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04/07/2022 | LUXEMBOURG | N°44517

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 04 juillet 2022, 44517


Tribunal administratif N° 44517 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 juin 2020 2e chambre Audience publique du 4 juillet 2022 Recours formé par par la société anonyme …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’impôts

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44517 du rôle et déposée en date du 10 juin 2020 au greffe du tribunal administratif par la société en commandite simple Bonn Steichen & Pa

rtners, établie et ayant son siège social à L-2370 Howald, 2, rue Peternelchen, Immeuble C2,...

Tribunal administratif N° 44517 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 juin 2020 2e chambre Audience publique du 4 juillet 2022 Recours formé par par la société anonyme …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’impôts

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44517 du rôle et déposée en date du 10 juin 2020 au greffe du tribunal administratif par la société en commandite simple Bonn Steichen & Partners, établie et ayant son siège social à L-2370 Howald, 2, rue Peternelchen, Immeuble C2, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, représentée par son gérant commandité actuellement en fonctions, à savoir la société à responsabilité limitée BSP SARL, établie et ayant son siège social à L-2370 Howald, 2, rue Peternelchen, Immeuble C2, elle-même représentée aux fins de la présente procédure par son gérant, Maître Alain Steichen, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme …, établie et ayant son siège social à L-…, immatriculée au registre de commerce et des sociétés sous le numéro …, représentée par son administrateur unique actuellement en fonctions, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 13 février 2020, référencée sous le numéro C27272a, par laquelle ce dernier (i) s’est déclaré incompétent pour statuer sur ses réclamations dirigées à l’encontre des bulletins rectificatifs de la ventilation de la base d’assiette globale des années 2012, 2013 et 2014, émis les 25 septembre et 30 octobre 2019, (ii) a déclaré irrecevables ses réclamations dirigées contre les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2012, tous émis le 30 octobre 2019 et (iii) a rejeté ses réclamations introduites à l’encontre des bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2013 et 2014, émis les 25 septembre et 30 octobre 2019 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 23 novembre 2020 ;

Vu le mémoire en réplique déposé le 22 décembre 2020 au greffe du tribunal administratif par la société en commandite simple Bonn Steichen & Partners au nom de la société demanderesse ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Alain Steichen et Monsieur le délégué du gouvernement Eric Pralong en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 17 mai 2021 ;

1 Vu l’avis du tribunal administratif du 9 février 2022 informant les parties que le tribunal avait prononcé la rupture du délibéré et fixé l’affaire pour être reprise en délibéré à l’audience publique du 21 mars 2022 ;

Vu l’article 1er de la loi modifiée du 19 décembre 2020 portant adaptation temporaire de certaines modalités procédurales en matière civile et commerciale1 ;

Vu la communication de Maître Alain Steichen du 18 mars 2022, informant le tribunal que l’affaire pouvait être reprise en délibéré en dehors de sa présence ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport complémentaire à l’audience publique du 21 mars 2022.

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Il est constant que la société à responsabilité limitée XXX, ci-après désignée par « la société XXX », et la société anonyme …, ci-après désignée par « la société … », font partie d’un groupe de sociétés ayant opté pour le régime de l’intégration fiscale, tel que prévu par l’article 164bis de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après désignée par « LIR », la société … étant la société intégrante, tandis que la société XXX est l’une des sociétés intégrées du groupe.

Il est encore constant que la société XXX a fait l’objet d’un contrôle fiscal qui a donné lieu à un rapport dressé le 25 juillet 2019 par le réviseur du Service révision de l’administration des Contributions directes, couvrant la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2014.

A la suite de ce contrôle, le bureau d’imposition Sociétés Esch de l’administration des Contributions directes émit, en date du 14 août 2019, à l’encontre de la société XXX les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2011, les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2012, le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2012, les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2013, ainsi que les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2014.

Le 25 septembre 2019, le bureau d’imposition Sociétés 6 de l’administration des Contributions directes émit à l’encontre de la société … les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités, de la base d’assiette de l’impôt commercial communal et de la ventilation de la base d’assiette globale de l’année 2013.

Le 30 octobre 2019, le même bureau d’imposition émit à l’encontre de la société … les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités, de la base d’assiette de l’impôt commercial communal et de la ventilation de la base d’assiette globale de l’année 2012, ainsi que les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités, de la base d’assiette de l’impôt commercial communal et de la ventilation de la base d’assiette globale de l’année 2014.

1 « Les affaires pendantes devant les juridictions administratives, soumises aux règles de la procédure écrite et en état d’être jugées, pourront être prises en délibéré sans comparution des mandataires avec l’accord de ces derniers. » 2 Par courrier conjoint de leur litismandataire du 14 novembre 2019, réceptionné le même jour, les sociétés XXX et … introduisirent auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur », des réclamations à l’encontre des bulletins d’imposition énumérés ci-avant.

Le 13 février 2020, le directeur statua sur ces réclamations par deux décisions séparées, l’une prise à l’encontre de la société XXX, référencée sous le numéro C27272, et l’autre prise à l’encontre de la société …, référencée sous le numéro C27272a.

Dans la première de ces décisions, le directeur, d’une part, déclara irrecevables les réclamations dirigées par la société XXX contre les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2011 et 2012, émis le 14 août 2019, ainsi que celles introduites contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2013 et 2014, également émis le 14 août 2019, et, deuxièmement, rejeta la réclamation dirigée par ladite société à l’encontre du bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2012, lui aussi émis le 14 août 2019.

Dans la seconde des deux décisions évoquées ci-avant, le directeur (i) se déclara incompétent pour statuer sur les réclamations dirigées par la société … à l’encontre des bulletins rectificatifs de la ventilation de la base d’assiette globale des années 2012, 2013 et 2014, émis les 25 septembre et 30 octobre 2019 (ii) déclara irrecevables les réclamations dirigées par ladite société contre les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2012, émis le 30 octobre 2019 et (iii) rejeta les réclamations introduites par la même société à l’encontre des bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2013 et 2014, émis les 25 septembre et 30 octobre 2019.

Cette dernière décision est libellée comme suit :

« […] Vu la requête introduite le 14 novembre 2019 par Me Alain Steichen, de la société en commandite simple Bonn Steichen & Partners, d’une part, au nom de la société anonyme …, avec siège social à L-…, pour réclamer contre :

- les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités, de la base d’assiette de l’impôt commercial communal et de la ventilation de la base d’assiette globale de l’année 2012, tous émis le 30 octobre 2019, - les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités, de la base d’assiette de l’impôt commercial communal et de la ventilation de la base d’assiette globale de l’année 2013, tous émis le 25 septembre 2019, - les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités, de la base d’assiette de l’impôt commercial communal et de la ventilation de la base d’assiette globale de l’année 2014, tous émis le 30 octobre 2019, et, d’autre part, au nom de la société à responsabilité limitée XXX, avec siège social à L-

…, pour réclamer contre :

3 - les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2011, - les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2012, - le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2012, les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2013, - les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2014, tous émis en date du 14 août 2019 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu le rapport dressé en date du 25 juillet 2019 par le réviseur du Service de révision de l’Administration des contributions directes, couvrant la période s’étirant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2014 ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254, alinéa 2 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

Considérant de prime abord, qu’il importe de noter que depuis l’année d’imposition 2012, les réclamantes font partie d’un groupe de sociétés ayant opté pour le régime d’intégration fiscale tel qu’instauré par l’article 164bis de la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.) ;

que pour les années 2012, 2013 et 2014, le groupe de sociétés sus-énoncé comprend en tout 4 sociétés ; que la société mère constitue la société intégrante, en l’occurrence, la société anonyme …, alors que la société à responsabilité limitée XXX constitue, à côté des 2 autres sociétés, la société intégrée ; que les résultats des sociétés intégrées, dont celui de la société à responsabilité limitée XXX, sont à intégrer dans celui de la société intégrante pour une période couvrant au moins 5 exercices d’exploitation ;

Considérant que, bien qu’intégrées fiscalement, les réclamantes sont à considérer comme des sociétés ayant des personnalités juridiques distinctes ; que les réclamations introduites par la société anonyme … et la société à responsabilité limitée XXX sont réunies en un seul écrit (« Réclamation conjointe ») ; que néanmoins chaque acte attaqué fera l’objet d’une décision directoriale distincte, la présente décision ne portant que sur les réclamations introduites par la société anonyme …, celles introduites par la société à responsabilité limitée XXX étant disjointes pour être vidées séparément sous le n° C 27272 ;

Considérant que si l’introduction de plusieurs instances par une seule et même requête n’est incompatible, en l’espèce, ni avec le secret fiscal, ni avec les règles de compétence et de procédure, elle ne dispense pas d’examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu’il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes ; qu’il n’y a pas lieu de la refuser en la forme ;

Considérant que la réclamante fait grief au bureau d’imposition d’avoir procédé à des majorations de recettes au niveau de la société à responsabilité limitée XXX suite à un avis de la part du Service de révision, ayant pour conséquence une augmentation de ses résultats imposables pour les années litigieuses ;

4 Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 228 AO) de la loi, qu’elles sont partant recevables ;

Considérant qu’en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d’office un réexamen intégral de la cause, la loi d’impôt étant d’ordre public ; qu’à cet égard le contrôle de la légalité externe de l’acte doit précéder celui du bien-fondé ; qu’en l’espèce la forme suivie par le bureau d’imposition ne prête pas à critique ;

En ce qui concerne les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2012 Considérant qu’aux termes du § 232, alinéa 1er AO, un bulletin d’impôt ne peut être attaqué qu’au cas où le contribuable se sent lésé par le montant de l’impôt fixé ou conteste son assujettissement à l’impôt ;

Considérant que les montants de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal de l’année 2012 ont été fixés à 0 (zéro) euro et que la société anonyme … (ci-après : la réclamante) ne prétend pas à la fixation de cotes d’impôt positives ;

Considérant qu’il découle de ce qui précède que les réclamations contre les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2012 doivent être déclarées irrecevables pour défaut d’intérêt ;

En ce qui concerne les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2013 et 2014 Considérant que la réclamante « a pour objet : - toutes activités commerciales, en accord avec les dispositions de la loi du 9 juillet 2004, modifiant la loi modifiée du 28 décembre 1988 concernant le droit d’établissement et réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi qu’à certaines professions libérales. - effectuer toutes opérations se rapportant directement ou indirectement à la prise de participations sous quelque forme que ce soit, dans toute entreprise, ainsi que l’administration, la gestion, le contrôle et le développement de ces participations (…) » ; qu’en l’espèce, elle détient principalement des participations actives dans le domaine de la restauration et de l’immobilier ;

Considérant, tel que cela a été retenu supra, que le groupe de sociétés sus-énoncé comprend en tout 4 sociétés ; qu’aux termes de l’article 164bis L.I.R., les sociétés de capitaux résidentes pleinement imposables, dont 95 pour cent au moins du capital est détenu directement ou indirectement par une autre société de capitaux résidente pleinement imposable ou par un établissement stable indigène d’une société de capitaux non résidente pleinement imposable à un impôt correspondant à l’impôt sur le revenu des collectivités, peuvent, sur demande, être intégrées fiscalement dans la société mère ou dans l’établissement stable indigène, de façon à faire masse de leurs résultats fiscaux respectifs avec celui de la société mère ou de l’établissement stable indigène ; que la demande conjointe du 19 décembre 2012 de la part des sociétés concernées a été approuvée par le bureau d’imposition Sociétés 6 en date du 3 janvier 2013 ;

Considérant que la circulaire L.I.R. n° 164bis/1 du 27 septembre 2004 retient que le régime d’intégration fiscale ne vise pas à instaurer une base légale pour l’imposition du résultat consolidé au sens propre d’un groupe de sociétés, mais se limite à permettre aux sociétés intéressées de regrouper ou de compenser leurs résultats fiscaux pendant la période 5 d’application du régime d’intégration fiscale ; que les résultats fiscaux des sociétés filiales admises au régime d’intégration fiscale sont ajoutés au résultat fiscal de la société intégrante, en l’occurrence de la réclamante ;

Considérant que le bureau d’imposition Sociétés 6, compétent pour l’imposition de la réclamante, a procédé à des impositions rectificatives pour les années 2013 et 2014 sur pied du § 222, alinéa 1er, n° 1 AO ;

Considérant, à titre explicatif, qu’un bulletin d’impôt ne peut être rectifié en vertu du § 222, alinéa 1er AO que dans la mesure où le bureau d’imposition a pris connaissance de faits ou de moyens de preuve nouveaux justifiant une augmentation de la cote d’impôt pour autant que l’impôt ne soit pas atteint par la prescription, celle-ci voyant son délai prorogé de 5 à 10 ans, conformément à l’article 10 de la loi du 27 novembre 1933 concernant entre autres le recouvrement des contributions directes dans les cas visés justement par le § 222 AO ;

Considérant que les pertes reportables non prises en compte au niveau de la réclamante résultent des majorations des recettes de la société à responsabilité limitée XXX à hauteur de … euros (année 2011), … euros (2012), … euros (2013) et … euros (2014), ainsi que d’une distribution cachée de bénéfices à hauteur de … euros (année 2012) ; qu’il échoit donc de vérifier les impositions de la société intégrée, en l’occurrence de la société à responsabilité limitée XXX, telles qu’effectuées par le bureau d’imposition Sociétés Esch-sur-Alzette ;

Considérant que, sur pourvoi du préposé du bureau d’imposition Sociétés Esch-sur-Alzette, la comptabilité de la société à responsabilité limitée XXX des années 2011, 2012, 2013 et 2014 a fait l’objet d’une vérification au sens du § 162 AO par le Service de révision des contributions ;

Considérant que la société à responsabilité limitée XXX a été soumise aux obligations de la tenue d’une comptabilité régulière au sens des articles 197 et 205 de la loi modifiée du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales, des articles 8 à 11 du Code de Commerce et du § 160, alinéa 1er AO ; que le paragraphe 162 AO détermine les conditions à respecter par les entreprises afin que leur comptabilité soit tenue de manière régulière ;

Considérant qu’une comptabilité régulière en la forme et au fond est la représentation des comptes d’une entreprise dans une stricte chronologie et d’après les faits réels ; qu’elle est censée avoir enregistré de manière claire, précise et ordonnée toutes les opérations de cette entreprise ; qu’elle doit avoir pris en considération de façon exacte l’intégralité des faits comptables ; que s’y juxtapose le § 208, alinéa 1er AO, qui crée une présomption de régularité intégrale en faveur des comptabilités conformes aux règles énoncées au § 162 AO ;

Considérant que le rapport dressé par le réviseur du Service de révision, en ce qui concerne les principaux griefs détectés, fait état des constatations suivantes :

Rapport du réviseur … sur la vérification des livres et documents comptables de l’entreprise … Société à responsabilité limitée … 6 L-… Bureau d’imposition : Sociétés Esch No fiscal : … faite sur demande du préposé du bureau d’imposition Sociétés Esch et portant sur les exercices 2011 à 2014 inclusivement […] A. DONNÉES GÉNÉRALES 1. Motif de la vérification :

§§ 162(9), 193 et 206(1) de la loi générale des impôts (ci-après « AO) 2. Date de la clôture des bilans :

le 31 décembre 3. Déclarations et impôts contrôlés :

- déclarations pour l’impôt sur le revenu des collectivités 2011-2014 - déclarations pour l’impôt commercial communal 2011-2014 - déclarations pour l’impôt sur la fortune 2011-2014 4. Dernière révision fiscale : néant Exercices contrôlés : / 5. Forme juridique de l’entreprise : Société à responsabilité limitée 6. Associé(s) Associés à la consitution (3 février 2003) Nombre parts … … Total Associé après modification (28 avril Nombre parts 2009) … Associé après modification (30 avril Nombre parts 2009) … 7. Représentant légal :

Nom Fonction … Gérant unique La société est valablement engagée pour la restauration et le débit de boissons alcooliques et non alcooliques par la signature individuelle du gérant unique.

8. Objet social :

7 La société a pour objet l’exploitation d’un débit de boissons alcooliques et non-alcooliques avec établissement de restauration. Elle pourra accomplir tant au Grand-Duché de Luxembourg qu’à l’étranger, tous actes, toutes opérations financières, industrielles, commerciales, mobilières ou immobilières se rattachant directement ou indirectement à son objet social et permettant d’en faciliter la réalisation.

9. Personnes ayant fourni des renseignements :

Monsieur …, gérant unique Monsieur …, Fiduciaire …, tax and accounting Madame …, Fiduciaire …, tax and accounting Madame …, Fiduciaire …, tax an accounting B. Comptatbilité 10. Quant à la forme :

Les articles 9 à 11 du Code de commerce disposent que :

- (Article 9) Toute entreprise doit tenir une comptabilité appropriée à la nature et à l’étendue de ses activités en se conformant aux dispositions légales particulières qui les concernent.

- (Article 10) La comptabilité des personnes morales doit couvrir l’ensemble de leurs opérations, de leurs avoirs et droits de toute nature, de leurs dettes, obligations et engagements de toute nature.

- (Article 11) Toute comptabilité est tenue selon un système de livres et de comptes conformément aux règles usuelles de la comptabilité en partie double…Toutes les opérations sont inscrites sans retard, de manière fidèle et complète et par ordre de dates, soit dans un livre journal unique, soit dans un système de journaux spécialisés.

Dans ce dernier cas, toutes les données inscrites dans les journaux spécialisés sont introduites, avec indication des différents comptes mis en mouvement, par voie de centralisation dans un livre centralisateur unique.

Aux termes de l’article 12 du Code de commerce les comptes ouverts sont définis dans un plan comptable approprié à l’activité de l’entreprise. La teneur et la présentation de ce plan comptable, appelé plan comptable normalisé, sont déterminées par règlement grand-ducal du 10 juin 2009 publié au Mémorial A-N°145 du 22 juin 2009.

La loi générale des impôts (AO) impose pareillement la tenue d’une comptabilité régulière et complète (§§ 160-162 AO) quant à la forme et quant au fond. La comptabilité est régulière quant à la forme lorsqu’elle est agencée de façon claire et ordonnée, de façon à faciliter toute recherche et tout contrôle. Elle est régulière quant au fond lorsqu’elle renvoie une image fidèle et complète de la situation financière de l’entreprise.

A cette fin, elle doit respecter les principes généraux comptables tels que le principe de la continuité, de constance, de spécificité des exercices, de non compensation, de comptabilisation des charges et produits et de prudence. La comptabilité qui est régulière d’un point de vue formel bénéficie d’une présomption de régularité quant au fond. A défaut de respecter les conditions de régularité formelle, la comptabilité perd sa force 8 probante. Le paragraphe 160 de la loi générale des impôts impose le respect des règles comptables contenues dans les lois non fiscales.

La société XXX dispose d’une comptabilité en partie double informatisée et utilise une caisse enregistreuse informatisée du fournisseur ….

Pour les années 2011 à 2014 les documents et pièces comptables suivants ont été présentés au réviseur :

- La comptabilité informatisée sous format SAF-T (FAIA) - Les factures des entrées (achats et frais) ;

- Les extraits des comptes bancaires - Les livres des salaires.

11. Quant au fond :

Les déclarations fiscales des exercices révisés ont été remises au bureau d’imposition aux dates suivantes :

Exercice Date remise Date Bulletin 2011 20/08/2012 03/01/2014 2012 05/05/2014 08/04/2016 2013 27/05/2015 NC 2014 26/11/2015 NC Les objections à faire quant au fond sont développées sub C. Constatation spéciales ci-après.

C. Constatations spéciales.

12. Système de caisse enregistreuse « … » L’analyse des pièces comptables a démontré que les tickets de clôture que le gérant avait imprimé en fin de journée sont incomplets. En effet, les annulations y font défaut. Après demande du réviseur, le contribuable était en mesure de fournir pour certaines journées des impressions des annulations. Or ces données sont incomplètes respectivement font défaut.

Le contribuable a inscrit mensuellement les recettes journalières dans un fichier électronique sous format excel. Le comptable a injecté ce fichier dans sa comptabilité. Il reste à remarquer qu’un livre de caisse tenu à l’aide d’un tableur (par exemple Excel) n’est pas autorisé, vu que des changements sont possibles à tout moment.

Afin de vérifier l’exactitude des recettes déclarées, le réviseur a demandé à Monsieur … de fournir un export électronique des données de la caisse enregistreuse pour les années 2011 à 2014.

Cependant, il s’est avéré que ces données ne sont plus disponibles et qu’aucune copie de sauvegarde n’a été créée. Les données ont été effacées du système de caisse. Les écritures doivent être appuyées par des pièces justificatives qui doivent être conservées afin de permettre de contrôler la validité d’un enregistrement porté dans un compte à l’aide de la pièce récapitulative et vérifier la validité des pièces justificatives de base qui ont été 9 utilisées. A cet effet, le paragraphe 162(8) AO rappelle l’obligation de conservation décennale des pièces comptables édictée par l’article 16 du Code de commerce.

Cette dernière disposition impose plus particulièrement aux commerçants une obligation générale de conservation des documents commerciaux pendant une période de 10 ans à partir de la clôture de l’exercice auquel les documents se rapportent, les documents visés étant ceux énumérés aux articles 11, 12, 14 et 15 du Code de commerce. C’est ainsi que l’obligation de conservation décennale a d’abord trait à la comptabilité du commerçant qui doit retranscrire, comme souligné ci-dessus, les opérations de manière fidèle et complète, par ordre de date soit dans un livre journal unique, soit dans un système de journaux auxiliaires spécialisés - tel un livre de caisse -, mais couvre également, conformément à l’article 14 du Code de commerce, toutes les pièces justificatives, le libellé de ce texte impliquant que l’obligation de conservation décennale concerne toutes les pièces justificatives quelconques ayant trait à l’exploitation de l’entreprise, tels que les commandes et les factures ou encore les documents qui intéressent la gestion du personnel.

Etant confronté au fait que les données de la caisse pour les années 2011 à 2014 ne sont plus disponibles, le réviseur a proposé d’extraire les données de 2017 afin de disposer de données sur une année comparable.

Cependant, il faut constater qu’à nouveau le système POS de … s’est avéré non conforme aux exigences de la loi générale des impôts, spécialement au paragraphe 162 A.O.

En effet, la base de données sous-jacente à ce système n’est pas protégée ; il est facilement possible de modifier des données. La condition d’inaltérabilité n’est pas remplie.

Une analyse de séquence (analyse si la numérotation interne des opérations inscrite à la base de données précitée est continue et sans lacunes) a également démontrée que - Beaucoup de tickets (opérations) manquent. Le comptable a été en mesure de fournir une explication concluante sur un pourcentage élevé de ces tickets ;

- Les annulations ne sont pas mémorisées.

L’analyse de ces données a pourtant permis de dénicher les plats phares du restaurant et a ainsi pu servir à déterminer de façon plus précise une marge pondérée, se basant sur des marges individuelles par plat en fonction de leur pondération effective dans la constitution du chiffre d’affaires.

13. Marge sur engagé L’analyse de la comptabilité démontre une marge sur engagé incohérente.

Année Marge sur engagé déclarée (en %) 2011 … 2012 … 2013 … 2014 … 10 Cette marge est volatile et semble être largement en dessous d’une marge usuelle dans cette branche.

Interrogé à ce sujet, le gérant a fourni des explications vagues et non concluantes. Sur demande du réviseur, le contribuable a fourni un listing avec le calcul détaillé du prix de revient de certains plats phares de son établissement. Il s’est avéré que les marges y recueillies sont irréalistes (quantités gigantesques, respectivement ingrédients en disbalance). (c.f. Annexe1) Ainsi, le réviseur, accompagné d’un fonctionnaire du bureau d’imposition sociétés Esch, se sont rendus sur place et ont déterminé (cuisiné), ensemble avec le responsable de l’établissement et le comptable, les prix de revient de certains plats afin de pouvoir déterminer de la manière la plus exacte la marge pondérée du restaurant.

En se basant sur la répartition des plats (cf. section 12), tout en tenant compte de portions plus que copieuses (marge de sécurité en faveur du contribuable) et en se basant sur les prix de ventes appliqués, le réviseur a déterminé une marge pondérée entre 380% et 370%. Il est à signaler que cette marge correspond à une marge usuelle dans cette branche (entreprises comparables).

Lors de cette visite, le gérant a affirmé que depuis mi 2018 il a lui-même revu les quantités des plats. De ce fait il a remplacé ses anciennes assiettes et récipients par de nouveaux qui sont formés plus favorablement, permettant ainsi de réduire la quantité des ingrédients constitutifs des plats servis. Désormais il parvient à réaliser une marge sur engagé pondérée supérieure à 370%.

Cependant, il affirme que pendant les années soumises au contrôle, les portions servies étaient nettement plus grandes. A cette fin, il a montré la différence entre les assiettes utilisées auparavant et celles actuellement en usage.

Lors de la préparation sur les assiettes anciennes de certains plats cuisinés, il s’est avéré que les quantités utilisées par les cuisiniers étaient supérieures à ceux que le réviseur avait supposé initialement, mais bien inférieures au calcul du gérant.

A titre d’anecdote il convient de citer la situation suivante qui s’est déroulée lors de la visite précitée. Lors de la préparation de la « Pizza Diavola », le pizzaiolo a d’abord mis des tranches de salami sur sa pizza, quantité déjà très copieuse. Ensuite, il les a retirées pour les peser. Il s’est avéré que la quantité utilisée était nettement inférieure (environ de 60%) que pronostiqué par le gérant dans ses calculs. La réplique ironique du pizzaiolo était qu’il pourrait continuer à en mettre jusqu’à obtenir la quantité voulue. Le réviseur veut bien tenir compte du fait que les assiettes et ainsi les portions furent plus copieuses pendant les années sous contrôle et que ceci a un impact sur la marge sur engagé à retenir pour ces années, tout en refusant néanmoins les calculs extrêmes et peu crédibles proposés par le gérant.

Ainsi, la marge sur engagé pondérée retenue est de 340% pour les années du contrôle.

14. Détermination des recettes fraudées suivant § 217 AO 14.1. Détermination de l’engagé productif La taxation d’office prévue au § 217 AO est essentiellement une appréciation approximative d’après les éléments et circonstances d’exploitation. Ainsi le bénéfice imposable est à fixer d’après le revenu probable, en tenant compte de tous les indices et circonstances de nature à influer sur la détermination du bénéfice. En omettant de dresser et de conserver les pièces comptables prescrites, les responsables ont rendu 11 impossible un contrôle efficace des écritures au sujet des opérations de caisse et de ventes. Comme la marge sur engagé déterminée au point 13 dépasse sensiblement celle résultant des écritures comptables, le réviseur est en droit de conclure à la non-

inscription d’une partie des ventes et de rejeter les chiffres d’affaires résultant de la comptabilité viciée.

Afin de trouver un résultat approprié, l’engagé productif effectivement mis en vente doit être considéré. De l’engagé déclaré est déduite la quote-part des marchandises non vendue :

- Pertes en cuisine, ici l’engagé « Food » est diminué de 7,5%;

- Consommations offertes ;

- Surplus consommation du personnel ;

- Vol (ici voir point 15).

Les pertes en cuisine s’élèvent à Année 2011 2012 2013 2014 Engagé Food … … … … Correction 7,5% … … … … Détermination de l’engagé déclaré:

Année 2011 2012 2013 2014 Stock début … … … … Bières en fût … … … … Bières en bouteilles … … … … Liqueurs, eau de vie … … … … Vins … … … … Eaux, limo, jus, etc.

… … … … Champagne … … … … Café, crème, sucre et thé … … … … Restaurant … … … … Remises, ristourne, … … … … rabais Salaires en nature … … … … Stock fin … … … … Engagé déclaré … … … … Détermination de l’engagé productif :

Année 2011 2012 2013 2014 Engagé déclaré … … … … Perte en cuisine … … … … Vols (voir point 15) … … … … Offerts … … … … Consommation … … … … personnel (surplus) Engagé productif … … … … 12 14.2. Détermination des recettes fraudées En appliquant la marge pondérée déterminée au point 13 à l’engagé productif il en ressort un chiffre d’affaires global effectivement réalisé pour chaque année. La comparaison avec le chiffre d’affaires déclaré fait ressortir le montant absolu fraudé pour chaque année et le pourcentage des recettes fraudées.

Les recettes fraudées sont arrondies vers le bas au millième :

Année 2011 2012 2013 2014 Engagé productif … … … … Chiffre d’affaires … … … … selon marges Chiffre d’affaires … … … … déclarés Différence … … … … Chiffre d’affaires … … … … non déclarés arrondis Pourcentage fraudé … … … … sur chida déclaré 15. Vol de marchandises Le gérant, Monsieur …, affirme que l’ancien employé, Monsieur Ludovicio … aurait détourné des marchandises. A cette fin il joint en tant que pièce à l’appui des témoignages manuscrits de certains employés de son entreprise. De même il ajoute une photo d’une « reconnaissance de dette » du 30/11/2012 sur un montant de …€.

Selon cette reconnaissance de dette, Monsieur … doit …€ à Monsieur ….

Cependant, Monsieur … a détourné des marchandises appartenant à l’entreprise et non pas à Monsieur …. La comptabilité ne contient pas d’écriture comptable relative à cette opération.

Le réviseur est d’avis que le fait que Monsieur …, en forçant Monsieur … de lui verser l’équivalent des marchandises détournées, a lui aussi détourné ce montant de l’entreprise. Un tel détournement constitue un manque à gagner pour l’entreprise et représente une distribution cachée de dividende au sens de l’article 164(3) LIR.

Le réviseur accepte de diminuer l’engagé de … comme suit :

- … pour l’année 2011 et - … pour l’année 2012.

Cette opération impacte le calcul des recettes suivant le § 217 AO (voir section 14 de ce rapport).

En conséquence, il y a lieu d’opérer une distribution cachée de bénéfice de …,00€ au profit de Monsieur … en ce qui concerne l’année 2012.

[…] D. CONCLUSIONS 13 D’après les constatations reprises aux Nos 10 à 15 du présent rapport, la comptabilité est rejetée quant à la forme et quant au fond. Les recettes / ventes sont déterminées par voie de taxation en vertu du § 217 AO.

Les résultats déclarés sont redressés comme suit :

16. Distributions cachées de bénéfice No rapport Objet 2011 2012 2013 2014 14 Recettes … … … … fraudées 15 Manque à … … … … gagner Total … … … … E. REMARQUE FINALE Pendant toute la durée de la révision, les responsables de la société à responsabilité limitée XXX ont été tenus au courant du résultat des investigations. A l’occasion des différentes entrevues, ils ont été informés de toutes les constatations et conclusions renseignées dans le présent rapport ; ils disposaient donc toujours des données requises pour faire valoir leurs droits de défense en pleine connaissance de cause (§ 205 AO).

Pendant toute la durée du contrôle, les responsables ont été coopératifs.

Suite aux diverses entrevues avec le gérant et avec sa fiduciaire, le réviseur a tenu compte des objections, doléances et arguments avancées dans la mesure où elles étaient concluantes.

En considérant qu’un montant significatif d’impôt - soit en montant absolu - soit en rapport avec l’impôt annuel dû a été éludé, le réviseur est d’avis que le § 396 AO est applicable. Il incombe au préposé du bureau d’imposition Sociétés Esch de déposer plainte auprès du procureur d’Etat à l’encontre du contribuable.

Luxembourg, le 25/07/2019 […] Considérant que la société à responsabilité limitée XXX conteste par le biais de la réclamante les constatations du réviseur des contributions ; qu’elle argue notamment que le calcul de la marge bénéficiaire et donc des majorations toutes entières serait erroné, ce qui n’est, d’abord et d’après la vérification effectuée par l’instance contentieuse, pas le cas, étant donné que les sociétés semblent confondre les différentes méthodes de calcul et donc les différentes sortes de marges bénéficiaires qui existent en matière de comptabilité et/ou de fiscalité ; qu’il ressort du rapport du réviseur que ce dernier, « accompagné d’un fonctionnaire du bureau d’imposition sociétés Esch, se sont rendus sur place et ont déterminé (cuisiné), ensemble avec un responsable de l’établissement et le comptable, les prix de revient de certains plats afin de pouvoir déterminer de la manière la plus exacte la marge pondérée du restaurant. » ; que dans la branche de la restauration (dans le cas présent une pizzeria) une marge sur engagé pondérée se situe usuellement entre 370 pour cent et 380 pour cent ; que les marges déclarées par la société à responsabilité limitée XXX au titre des années 2011, 2012, 14 2013 et 2014 se situent toutefois entre 235,88 pour cent et 266,09 pour cent ; qu’il est sans équivoque que les marges déclarées sont largement insuffisantes, de sorte que la marge sur engagé pondérée a dû être revue vers le haut ; que finalement le réviseur a retenu une marge sur engagé pondérée de 340 pour cent afin de déterminer les montants des recettes non déclarées au cours des années 2011, 2012, 2013 et 2014 ;

Considérant qu’il demeure sans le moindre conteste que c’est à bon escient que le réviseur a rejeté quant à la forme et quant au fond les pratiques utilisées par la société à responsabilité limitée XXX afin de procéder à la détermination des bénéfices commerciaux qu’elle a réalisés à travers son activité de restauration ; que les multiples irrégularités et inconvénients qui se sont ainsi présentés lors du contrôle mènent donc nécessairement à la conclusion que les actes commis par la société à responsabilité limitée XXX ont visé, non pas par mégarde mais de manière tout à fait intentionnelle, le détournement d’impôt et la fraude fiscale ; que c’est donc à juste titre que le bureau d’imposition Sociétés Esch-sur-Alzette a admis tel quel les majorations de bénéfice telles que déterminées par le réviseur du Service de révision à force du contrôle effectué ;

En ce qui concerne les bulletins rectificatifs de la ventilation de la base d’assiette globale des années 2012, 2013 et 2014 Considérant qu’en vertu de l’article 7 de la loi modifiée du 1er mars 1952 modifiant certaines dispositions relatives aux impôts directs, le recours contre le bulletin rectificatif de la ventilation de la base d’assiette globale est porté directement devant le Tribunal administratif en matière de ventilation, tel que renseigné d’ailleurs sur les bulletins litigieux ;

Considérant que le directeur des contributions n’est dès lors pas compétent pour statuer sur le présent litige ;

Considérant que pour le surplus, les impositions sont conformes à la loi et aux faits de la cause et ne sont d’ailleurs pas autrement contestées ;

PAR CES MOTIFS se dit incompétent pour statuer sur les réclamations contre les bulletins rectificatifs de la ventilation de la base d’assiette globale des années 2012, 2013 et 2014, dit les réclamations contre les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2012 irrecevables pour défaut d’intérêt, reçoit les réclamations contre bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2013 et 2014 en la forme, les rejette comme non fondées. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 10 juin 2020, inscrite sous le numéro 44515 du rôle, la société XXX a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la susdite décision directoriale du 13 février 2020, référencée sous le numéro C27272.

15 Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le même jour, inscrite sous le numéro 44517 du rôle, la société … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision directoriale, précitée, du 13 février 2020, référencée sous le numéro C27272a.

La société … sollicite la jonction de ces deux affaires, au motif de leur connexité, en faisant valoir qu’un jugement en faveur de la société XXX dans l’affaire inscrite sous le numéro 44515 du rôle, concluant à l’inexistence d’une distribution cachée de bénéfices, devrait être pris en compte et aurait un impact dans la présente affaire, inscrite sous le numéro 44517 du rôle.

Une jonction entre différentes affaires est susceptible d’être prononcée, dans le souci d’une bonne administration de la justice, dans l’hypothèse où ces affaires concernent les mêmes parties et où elles ont trait au même objet.2 Etant donné que les recours inscrits respectivement sous les numéros 44515 et 44517 du rôle ont été introduits par deux sociétés ayant, malgré le recours au régime de l’intégration fiscale, des personnalités juridiques distinctes et sont dirigés contre des actes juridiquement différents émanant du directeur, ils n’ont pas trait au même objet, ni n’impliquent les mêmes parties, de sorte qu’il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de jonction sous examen.

A) Quant à la recevabilité du recours Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 de la loi générale des impôts du 21 mai 1931 telle que modifiée, appelée « Abgabenordnung », ci-après désignée par « AO », et de l’article 8 (3) 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond sur le recours dirigé par un contribuable contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation de sa part contre un bulletin d’imposition.

Il s’ensuit que le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre la décision du directeur du 13 février 2020, telle que déférée.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du recours quant à la forme et quant au délai.

S’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions.

Dès lors, étant donné que la partie étatique est restée en défaut de préciser en quoi le recours serait irrecevable quant à la forme et quant au délai, ses contestations sont à rejeter, étant relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’irrecevabilité d’ordre public qui serait à soulever d’office.

2 V. en ce sens : trib. adm., 12 juin 2003, n° 15385 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Procédure contentieuse, n° 939 et les autres références y citées, ainsi que trib. adm., 15 mai 2003, n° 14299 du rôle, confirmé par Cour adm., 15 juillet 2003, n° 16468C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Procédure contentieuse, n° 945 et les autres références y citées.

16 Le recours principal en réformation est, dès lors, à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il n’y a, par conséquent, pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

B) Quant au fond Arguments des parties A l’appui de son recours, la société … expose les faits et rétroactes gisant à la base de la décision directoriale déférée. Plus particulièrement, elle explique que suite au susdit contrôle fiscal auprès de la société XXX, le bureau d’imposition Sociétés Esch de l’administration des Contributions directes aurait procédé à des ajustements de la base imposable de cette société pour les années fiscales 2011 à 2014, au motif, d’une part, que la comptabilité de ladite société n’aurait pas été régulière et, d’autre part, qu’il y aurait eu une distribution cachée de bénéfices au profit de Monsieur …, le gérant de la société en question. La société demanderesse ajoute qu’en raison de l’intégration fiscale pour laquelle elle aurait opté, les ajustements ainsi opérés au niveau de la société XXX auraient eu des répercussions sur sa propre base imposable. En effet, le bureau d’imposition Sociétés 6 de l’administration des Contributions directes aurait émis des bulletins rectificatifs à son égard, fixant une cote d’impôt positive pour les années fiscales 2013 et 2014.

La société … poursuit, en exposant que la société XXX exploiterait le restaurant « … » situé à … Ce restaurant serait équipé d’un système de caisse « … » qui permettrait de relever chaque soir, après le service, les recettes de la journée. Ces informations seraient consignées informatiquement et sous format papier avec les justificatifs y afférents puis transmis à la fiduciaire chargée de tenir la comptabilité de la société XXX, qui recouperait les informations en question avec les relevés bancaires et les factures reçues et celles émises, avant de préparer et de déposer les comptes annuels au registre de commerce et des sociétés (« RCS »). Sur ce point, la société … souligne que les comptes annuels des exercices 2011 à 2014 auraient été déposés au RCS les 21 août 2012, 12 mai 2014, 29 avril 2015 et 4 décembre 2015 et auraient également été contrôlés par son propre commissaire aux comptes, de sorte à avoir été vérifiés à deux reprises par des « professionnels du secteur », qui n’auraient pas émis de doutes quant aux comptes en question.

Après avoir souligné que le contrôle fiscal susmentionné, au cours duquel la société XXX aurait démontré sa volonté de collaborer, aurait eu une durée anormalement longue, la société … précise que durant les années 2011 et 2012, Monsieur … aurait été employé au restaurant « … ».

Pendant cette période, Monsieur … aurait pris pour habitude d’emporter des bouteilles d’alcool après son service à son domicile pour sa consommation personnelle, sans en régler le prix et à l’insu de son employeur. En novembre 2012, suite à la découverte, par le gérant de la société XXX, de ces vols répétés de marchandises, Monsieur … aurait été licencié et aurait signé une reconnaissance de dette portant sur une somme correspondant au montant estimé des vols qui se seraient déroulés au cours des exercices 2011 et 2012. Après la signature de cette reconnaissance de dette, le gérant de la société XXX aurait entamé diverses démarches en vue du recouvrement de cette créance, telles qu’une saisie sur salaire. A cette fin, il aurait fait appel à un avocat et le Centre commun de la Sécurité sociale, ci-après désigné par « le CCSS », aurait été contacté à plusieurs reprises pour savoir si l’ancien employé avait repris une activité professionnelle. Ces démarches n’auraient pas été couronnées de succès, puisque le débiteur resterait encore aujourd’hui insolvable. La société … estime qu’il y aurait peu de chances que la situation change.

17 Elle aurait donc dû faire face à une perte sèche. Pourtant, l’administration fiscale et le réviseur de celle-ci auraient déduit de cette reconnaissance de dette une distribution cachée au profit du gérant de la société XXX, au motif que seul ce dernier aurait figuré comme créancier au document en question.

En droit, la société … fait valoir que le service de révision serait resté en défaut d’établir à suffisance le caractère irrégulier de la comptabilité de la société XXX et par là-même la pertinence des rectifications opérées dans les résultats de cette dernière.

A cet égard, la société … fait plaider qu’à défaut de définition légale de la notion de « comptabilité régulière », il serait généralement admis que les principes relatifs à la notion de comptabilité régulière devraient être dégagés de façon déductive en partant des objectifs de la comptabilité et non de manière inductive. Les règles, et non les faits, devraient constituer la base du raisonnement en la matière. Afin de déterminer si une comptabilité peut être considérée comme régulière, il faudrait se baser sur l’objectif des différentes règles comptables qui pourraient être trouvées dans la AO et dans le Code de commerce. Une comptabilité devrait être considérée comme régulière, si l’ensemble des objectifs sous-jacents à ces règles peuvent être atteints dans un cas particulier. De manière synthétique, il y aurait lieu de considérer qu’une comptabilité régulière constituerait une représentation des comptes d’une entreprise dans une stricte chronologie et d’après les faits réels. Pour qu’une comptabilité soit régulière, il serait exigé qu’elle soit régulière quant à la forme et quant au fond.

Pour pouvoir être considérée comme étant régulière quant à la forme, une comptabilité devrait remplir les exigences prévues au paragraphe 162 AO, afin qu’elle soit agencée de façon claire et ordonnée de manière à faciliter toute recherche et tout contrôle. Parmi ces exigences se trouverait notamment l’obligation de conservation des pièces comptables. A côté des livres et annotations comptables (« Bücher und Aufzeichnungen »), un contribuable serait obligé de conserver toutes autres pièces (« Geschäftspapiere und sonstige Unterlagen »), pour autant qu’elles revêtent une importance pour l’imposition. Pour qu’une pièce puisse être considérée comme remplissant ce dernier critère, il faudrait, en premier lieu, qu’elle prouve un fait ayant mené à une écriture comptable. En effet, en vertu de l’accrochement du bilan fiscal au bilan commercial prévu à l’article 40 LIR, il faudrait en principe qu’une opération soit enregistrée dans la comptabilité du contribuable pour qu’elle puisse avoir une incidence sur le résultat imposable du contribuable. La jurisprudence et la doctrine luxembourgeoises sembleraient également confirmer l’absence d’obligation de conservation de pièces justificatives non traduites par une écriture comptable. A cet égard, la société demanderesse renvoie à un arrêt de la Cour administrative du 4 juillet 2013, portant le numéro 31723C du rôle, de même qu’à un ouvrage doctrinal.

S’agissant de la forme sous laquelle les pièces justificatives seraient à conserver, la société demanderesse se prévaut de l’article 16 du Code de commerce, ainsi que de l’article 1er du règlement grand-ducal du 22 décembre 1986 pris en exécution des articles 1348 du Code civil et 11 du Code de commerce, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 22 décembre 1986 », entretemps abrogé par le règlement grand-ducal du 25 juillet 2015 relatif à la dématérialisation et à la conservation de documents, mais ayant été en vigueur jusqu’en août 2015, pour faire valoir qu’un contribuable pourrait conserver l’intégralité de ses pièces justificatives sous forme de copies, électroniques ou non, pour autant qu’elles respectent les conditions fixées par ces dernières dispositions, auquel cas le contribuable ne serait, en l’absence de disposition expresse en ce sens, pas obligé de conserver les originaux en sus des copies, 18 lesquelles auraient alors la même force probante que les originaux et bénéficieraient d’une présomption réfragable de conformité à ces derniers.

Ainsi, le rejet d’une comptabilité au motif que les originaux ne seraient pas conservés en sus des copies serait non seulement contraire à l’article 16, précité, du Code de commerce, mais violerait encore le principe de la « Zumutbarkeit », tel que prévu par le paragraphe 171 AO, selon lequel la charge de la preuve du contribuable serait limitée à ce qui pourrait être raisonnablement exigé de lui. A cet égard, la société … explique que le contribuable de bonne foi qui aurait conservé ses pièces justificatives sous un certain format serait souvent dans l’impossibilité de verser les pièces en question sous un autre format, exigé par l’administration, mais non légalement prévu, la société demanderesse soulignant encore, en citant un ouvrage doctrinal, que l’absence d’obligation de conserver des pièces dans des formats différents se dégagerait également de la doctrine luxembourgeoise.

En l’espèce, dans la mesure où, chaque soir après le service, l’intégralité du chiffre d’affaires aurait été consigné dans un bordereau journalier sous format papier incluant les paiements en espèces et par carte de crédit, les reçus des paiements par carte, ainsi que les dépenses effectuées à l’aide d’espèces provenant de la caisse, le service de révision aurait pu contrôler la véracité du journal de caisse en plus des écritures comptables faites au format informatique et concordantes avec lesdits bordereaux journaliers.

La société demanderesse continue, en expliquant que pour pouvoir être considérée comme étant régulière quant au fond, il faudrait que la comptabilité soit complète et exacte, c’est-à-dire que tous les faits comptables devraient avoir été pris en considération de façon exacte, afin de fournir une image fidèle de la situation financière de l’entreprise. Autrement dit, une comptabilité serait régulière au fond, lorsqu’elle refléterait de manière complète et exacte l’ensemble des opérations du contribuable.

Après avoir cité l’article 11 du Code de commerce, la société … fait valoir que si le vérificateur a reproché à la société XXX de pas avoir tenu une comptabilité régulière, il se dégagerait de ladite disposition légale qu’il suffirait de répertorier les opérations comptables dans un système de journaux, qui permettrait de retracer les recettes et les dépenses de la journée.

A cet égard, la société demanderesse insiste sur le fait que la société XXX disposerait bien d’un système de journaux spécialisés, en l’occurrence des bordereaux de caisse, permettant de retracer de manière fidèle et par date les opérations liées à la caisse, qui seraient, par la suite, reprises dans un livre centralisateur, à savoir le livre de caisse. Ce dernier permettrait d’établir le livre-journal, le grand livre et la balance des comptes. Toutes ces informations seraient ensuite agrégées dans le compte de résultat et le bilan de la société afin d’établir les comptes annuels de celle-ci.

L’ensemble de ces documents comptables aurait été mis à la disposition de l’administration fiscale sous format papier et sous format informatique. Dans ce contexte, la société demanderesse invite le tribunal à vérifier que les montants inscrits sur les bordereaux de caisse correspondraient aux impressions du système de caisse, ainsi qu’aux montants repris dans le livre de caisse et dans la balance des comptes.

Par ailleurs, la société … fait valoir qu’en vertu du paragraphe 208 AO, une comptabilité régulière en la forme bénéficierait d’une présomption de régularité quant au fond. Cette présomption ne pourrait être renversée qu’en présence d’éléments permettant de douter de la 19 sincérité des écritures comptables, d’indices pouvant remettre en cause la réalité factuelle des écritures et des documents comptables, le contrôleur devant prouver l’impossibilité du résultat déterminé par le contribuable. Ce dernier devrait s’appuyer sur des motifs sérieux et concluants.

Un simple soupçon ou un mouvement de méfiance ne suffiraient pas, ce qui serait confirmé par la jurisprudence des juridictions administratives, selon laquelle il appartiendrait au bureau d’imposition de faire état d’indices suffisamment concrets pour ébranler l’apparence ainsi créée et, par voie de conséquence, mettre en cause la régularité de la comptabilité. Il faudrait donc que l’administration dispose de motifs sérieux et concluants permettant de retenir que le résultat déclaré par le contribuable serait impossible, dans la mesure où il ne pourrait correspondre à la réalité. Ces motifs invoqués par l’administration devraient résulter d’un contrôle durant lequel elle aurait donné la possibilité au contribuable de clarifier d’éventuels doutes et aurait tenu compte des particularités de l’entreprise du contribuable. Ce ne serait que si, après avoir entendu les explications de ce dernier et après avoir pris en compte les particularités de son entreprise, il s’avère que le résultat déclaré par le contribuable ne pourrait correspondre à la réalité que l’administration serait en droit de rejeter une comptabilité bénéficiant de la présomption de régularité.

Ainsi, afin de rejeter la comptabilité d’un contribuable, l’administration devrait, soit démontrer l’irrégularité de celle-ci quant à la forme en raison du non-respect des exigences du paragraphe 162 AO, soit, en présence d’une comptabilité régulière quant à la forme et bénéficiant de ce fait de la présomption de véracité, avancer des motifs sérieux et concluants permettant de retenir que le résultat déclaré par le contribuable en question ne pourrait correspondre à la réalité.

Par ailleurs, pour que le rejet d’une comptabilité soit justifié, il faudrait qu’elle comporte des irrégularités significatives ou multiples de nature à ébranler sa régularité et sa valeur probante. Des défauts accidentels ou accessoires ne seraient pas suffisants, la société demanderesse renvoyant, à cet égard, à un arrêt de la Cour administrative du 10 novembre 2015, portant le numéro 35818C du rôle.

S’agissant des reproches faits en l’espèce à l’égard de la comptabilité de la société XXX par le réviseur et concernant, en premier lieu, sa régularité quant à la forme, la société … fait valoir que ladite société aurait fourni tous les documents comptables et pièces justificatives qui lui auraient été demandés, la société demanderesse énumérant les différentes pièces remises au service de révision de l’administration des Contributions directes.

Lors de la vérification de l’ensemble des données remises, ce dernier aurait soulevé certains défauts, pour la quasi-totalité desquels des explications concluantes auraient néanmoins pu être fournies par la société …. Le contrôle fiscal se serait achevé par un rapport dans lequel le réviseur n’aurait pu faire valoir que trois défauts non significatifs d’un point de vue formel pour retenir le caractère irrégulier de la comptabilité de ladite société, à savoir les circonstances selon lesquelles (i) les impressions des annulations n’auraient pas existé pour toutes les journées des années 2011 à 2014, (ii) la base de données de la caisse enregistreuse aurait fait défaut pour les années 2011 à 2014 et (iii) les enregistrements originaux dans le livre de caisse et dans la caisse enregistreuse pourraient en théorie être modifiés ultérieurement.

Quant au premier de ces trois défauts, la société … fait valoir que l’absence des impressions d’annulations ne serait pas suffisante pour remettre en cause la régularité formelle de la comptabilité de la société XXX, alors que l’obligation de conservation ne vaudrait que pour des pièces justificatives ayant une incidence fiscale. Or, les impressions d’annulations manquantes ne se rapporteraient qu’à des journées durant lesquelles aucune opération 20 d’annulation n’aurait eu lieu, la société demanderesse expliquant qu’en l’absence d’annulations, la page relative aux annulations aurait été vide. Aucune information n’ayant figuré sur les pages en question, les serveurs ne les auraient pas conservées, alors qu’elles n’auraient pas fait apparaître d’opération devant faire l’objet d’une écriture dans la comptabilité de la société ….

Quant à l’absence de la base de données de la caisse enregistreuse pour les années 2011 à 2014, la société demanderesse insiste sur le fait que la loi permettrait expressément que les pièces justificatives seraient conservées exclusivement sous forme de copies.

Elle ajoute que lors d’un des contrôles sur place dans le restaurant exploité par la société XXX, le réviseur aurait introduit une clef USB dans la caisse enregistreuse, afin d’en extraire un certain nombre d’informations. Cette manipulation aurait entraîné l’effondrement du système de la caisse enregistreuse et son indisponibilité pendant deux jours. Or, la perte des fichiers informatiques des opérations enregistrées par la caisse, causée par une manipulation du service de révision, ne pourrait être reprochée au contribuable.

Même en l’absence de la base de données des années 2011 à 2014, les pièces justificatives afférentes existeraient sous format papier. En effet, au cours des années 2011 à 2014, le personnel de la société XXX aurait imprimé à la fin de chaque journée des feuilles de caisse enregistreuse qui reprendraient l’ensemble des enregistrements pour chaque serveur. Ces copies sous format papier rempliraient toutes les conditions prévues par le règlement grand-ducal du 22 décembre 1986, de sorte à bénéficier d’une présomption de conformité aux originaux. En l’absence d’une obligation légale de conservation simultanée de l’original et de la copie, la comptabilité de la société XXX ne saurait être rejetée au motif que les pièces justificatives existeraient uniquement sous format papier.

Quant à l’argumentation du réviseur selon laquelle il serait possible de modifier les enregistrements originaux dans la caisse enregistreuse et dans le livre de caisse, de sorte que lesdits caisse et livre ne rempliraient pas une condition d’inaltérabilité, la société … fait valoir que ni le Code de commerce ni l’AO ne prévoiraient une telle condition. Le paragraphe 162 AO n’interdirait pas de manière absolue qu’une modification soit apportée à un enregistrement original, mais préciserait uniquement qu’en cas de modification d’un enregistrement original, il devrait être clair qu’une telle modification ait eu lieu, notamment en extournant un enregistrement avant de passer à l’enregistrement correct. Ainsi, la simple possibilité d’une modification d’un enregistrement original ne saurait être suffisante pour rejeter une comptabilité, mais il appartiendrait à l’administration fiscale de prouver que le contribuable a procédé à une modification d’un enregistrement sans l’avoir clairement indiquée, preuve qui ne serait pas rapportée en l’espèce. Admettre le contraire, reviendrait à dire que tout contribuable possédant une caisse enregistreuse « … », ce qui serait le cas de 75 % des entreprises du secteur …, pourrait se voir rejeter sa comptabilité au motif de l’irrégularité de celle-ci et se verrait exposé à des taxations d’office.

En conclusion, la société … soutient que la comptabilité de la société XXX remplirait les exigences du paragraphe 162 AO, de sorte à être régulière quant à la forme et à bénéficier d’une présomption de véracité.

Après avoir rappelé qu’afin de renverser cette présomption, il faudrait des motifs sérieux et concluants démontrant l’impossibilité du résultat déclaré, la société demanderesse fait valoir qu’en l’espèce, le réviseur aurait eu un soupçon de non-déclaration basé sur le fait que la marge entre les prix de revient et les prix de vente des plats servis, telle que déclarée par la société 21 XXX, serait « […] volatile et semble[rait] être largement en dessous d’une marge usuelle dans cette branche […] ». Or, dans son rapport, le réviseur ne préciserait pas comment il aurait déterminé la marge usuelle sur laquelle il aurait basé ce constat. Il ne fournirait notamment aucune information quant aux restaurants qu’il considérerait comme étant similaires à celui exploité par la société …. En se basant sur de tels éléments de comparaison secrets, il aurait porté atteinte aux droits de la défense de cette dernière, qui n’aurait pas été en mesure de se défendre par rapport aux critères retenus par le réviseur pour conclure à la comparabilité des restaurants en question par rapport à celui exploité par elle. Dans ce contexte, la société … souligne encore que le réviseur ne fournirait aucune indication concrète quant à la méthodologie suivie, de sorte qu’il serait impossible de savoir quel « […] indicateur de tendance centrale […] » aurait été utilisé et de quoi serait composé l’échantillon utilisé par le réviseur. Ainsi, les chiffres avancés par ce dernier ne sauraient représenter un motif sérieux et concluant rendant le résultat déclaré par la société XXX impossible.

Ainsi, le réviseur n’aurait pas établi à suffisance le caractère irrégulier de la comptabilité de la société …. Cette comptabilité étant, dès lors, à considérer comme étant régulière, elle aurait dû servir de base à l’imposition et l’administration n’aurait pas dû procéder par voie de rectification, ce d’autant plus qu’aucun manquement réel et sérieux n’aurait pu être révélé après trois années de contrôle.

Par ailleurs, la société … insiste sur le fait que le raisonnement du réviseur serait critiquable, en ce qu’il aurait appliqué une « marge sur engagé » pondérée de 380 % basée sur des éléments de comparaison non révélés. A cet égard, elle donne à considérer que compte tenu de la situation géographique du restaurant « … » à …, la zone de chalandise de la clientèle serait limitée, de sorte que le développement d’une activité pérenne serait difficile. De ce fait, la société XXX aurait dû appliquer diverses stratégies pour attirer des clients, lesquelles auraient affecté la rentabilité du restaurant. Le réviseur aurait, d’ailleurs, lui-même noté que de nombreux repas ou ristournes auraient été offerts pour fidéliser la clientèle. La société … souligne, dans ce contexte, qu’il n’appartiendrait pas à l’administration de s’immiscer dans la gestion de l’entreprise en remettant en cause le choix d’établir un restaurant à … ou celui des ingrédients des plats à la carte dudit restaurant.

En conclusion, la société … soutient, en substance, que les ajustements critiqués par elle auraient été opérés à tort, de sorte à devoir être annulés. Ainsi, les résultats de la société XXX, transférés à la société … en tant que société intégrante, qui seraient à prendre en considération aux fins de l’imposition devraient être ceux déclarés par la société demanderesse.

En outre, la société … conteste l’existence d’une infraction pénale justifiant une plainte auprès du ministère public, telle qu’évoquée par le réviseur. A cet égard, elle fait valoir qu’à travers ses développements afférents, le réviseur semblerait lui reprocher la commission des infractions pénales fiscales prévues aux alinéas 5 et 6 du paragraphe 396 AO, à savoir la fraude fiscale aggravée et l’escroquerie fiscale. Or, le réviseur n’établirait pas que les éléments matériel et moral respectifs de ces infractions seraient donnés en l’espèce. En l’absence de cette preuve, aucune fraude ou escroquerie ne serait vérifiée, la société … demandant, aux termes du dispositif de sa requête, au tribunal de « […] constater qu’il n’y a pas eu d’avantage fiscaux injustifiés (nicht gerechtfertigte Steuervorteile) ni de réduction des recettes fiscales (verkürzte Steuereinnahmen) au sens du § 396 AO […] ».

Finalement, la société … conteste toute distribution cachée de bénéfices au profit du gérant de la société ….

22 A cet égard, elle fait valoir qu’une distribution cachée de bénéfices, au sens de l’article 164 (3) LIR, existerait si un associé, sociétaire ou intéressé reçoit directement ou indirectement d’une société un avantage qu’il n’aurait pas pu obtenir en l’absence de ce lien. Au niveau de la société, il s’agirait d’un manque à gagner ou d’un appauvrissement. La situation concernée serait celle où un gestionnaire prudent et avisé n’aurait pas accordé un avantage similaire à un tiers.

Quant à l’existence d’un avantage auprès de l’associé, sociétaire ou intéressé, la jurisprudence allemande préciserait qu’il suffirait que l’appauvrissement auprès de la société ait l’aptitude à créer un avantage auprès de l’associé, sociétaire ou intéressé, appelé « Vorteilsgeneigtheit ». Une telle « Vorteilsgeneigtheit » supposerait, en principe, l’intention de procurer un avantage à l’associé, sociétaire ou intéressé (« finaler Zuwendungswillen »). En ce qui concerne le moment à prendre en considération pour apprécier l’existence d’une « Vorteilsgeneigtheit », la doctrine allemande préciserait que seul le moment de l’appauvrissement de la société serait pertinent. Tout développement ultérieur à cet appauvrissement ne serait pas pris en compte pour déterminer s’il y a une distribution cachée de bénéfices.

Après s’être référée à la jurisprudence des juridictions administratives relative à la charge de la preuve en la présente matière, la société … fait valoir qu’en l’espèce, une distribution cachée de bénéfices ferait défaut.

A cet égard, elle explique que si, certes, la susdite reconnaissance de dette, signée le 30 novembre 2012, mentionne le gérant de la société XXX comme créancier de la somme de … euros, cela s’expliquerait par le fait que ce dernier aurait été présent lorsque les vols commis auraient été révélés, qu’il aurait alors confronté le salarié concerné à ses actes et qu’il aurait saisi l’opportunité pour lui faire signer un document légalement contraignant. Cependant, ledit gérant n’aurait pas agi pour son propre compte, mais en tant que représentant légal de la société XXX, victime des faits, ce dont toutes les personnes impliquées auraient eu conscience.

La conclusion dégagée par l’administration fiscale selon laquelle il y aurait eu distribution cachée de bénéfices, au motif que la susdite reconnaissance de dette ne mentionnerait pas la société XXX en tant que créancier, reposerait sur une mauvaise application de l’article 164 (3) LIR.

A cet égard, la société … explique que le gérant de la société XXX n’aurait reçu aucun avantage de la part de cette dernière au moment du détournement des marchandises, en précisant qu’au moment du vol, la société XXX aurait ignoré que les marchandises en question auraient été détournées et qu’elle se serait appauvrie de la sorte. Ainsi, la « Vorteilsgeneigtheit » aurait clairement fait défaut au moment de son appauvrissement. Etant donné qu’une distribution cachée de bénéfices nécessiterait la réunion de trois critères, à savoir (i) un appauvrissement de la société, (ii) l’octroi d’un avantage à un associé ou gérant et (iii) le fait que l’avantage en question n’aurait pas été accordé à un tiers, et que ces critères n’auraient pas été remplis au moment du vol de marchandises, alors que le gérant ne se serait pas vu accorder d’avantage et que le vol aurait été commis par un tiers, il n’y aurait pas eu de distribution cachée de bénéfices en l’espèce. Ainsi, les charges relatives aux vols de marchandises devraient, par application conjointe des articles 45 et 167 LIR, être déductibles du résultat imposable, étant donné qu’elles ne seraient pas liées à une distribution cachée et qu’elles ne seraient pas en relation avec un revenu exonéré.

23 La société … poursuit, en faisant valoir que cette dernière conclusion s’imposerait même à supposer que le moment à prendre en compte pour déterminer l’existence d’une distribution cachée de bénéfices serait, non pas le moment de son appauvrissement, mais le moment de la signature de la reconnaissance de dette entre le gérant de la société XXX et l’ancien salarié de celle-ci. A cet égard, elle souligne que ledit gérant, qui ne serait pas juriste, mais restaurateur, n’aurait agi qu’en tant que « […] recouvreur de dette […] », en essayant de s’assurer qu’il arriverait à recouvrer les sommes détournées par Monsieur …. Ce serait dans cet état d’esprit qu’il aurait rédigé le document portant reconnaissance de dette, qui aurait été destiné à préserver les intérêts de la société …. Il serait évident que dans le cas où il aurait réussi à récupérer les sommes dues, il l’aurait fait, non pas pour son propre compte, mais afin de continuer les sommes en question à cette dernière société. A ce jour, ledit gérant n’aurait pas encore reçu un quelconque paiement du fait de cette reconnaissance de dette, mais il aurait la « […] ferme intention […] » de continuer toute somme qu’il pourrait recevoir à la société. Or, à défaut d’enrichissement du gérant, aucun avantage n’aurait été accordé à ce dernier.

Dans ce contexte, la société … souligne que contrairement à ce que prétendrait le directeur, de nombreuses démarches auraient été accomplies pour recouvrer la dette, mais le débiteur demeurerait, à l’heure actuelle encore, insolvable.

La société demanderesse fait ensuite valoir que ce serait à tort que le directeur aurait reproché à la société XXX de ne pas avoir dénoncé le comportement de son ancien salarié à l’administration fiscale, étant donné, d’une part, que la jurisprudence citée dans ce contexte par le directeur aurait été rendue en matière d’appel en garantie, de sorte à être dépourvue de pertinence en l’espèce, et, d’autre part, qu’une telle dénonciation n’aurait pas de fondement légal et n’aurait pas été opportune, alors qu’elle n’aurait aucunement augmenté les chances de recouvrement de la créance. La société … ajoute que le gérant de la société XXX aurait entrepris les démarches nécessaires afin de récupérer les sommes détournées et que l’absence de succès de ces démarches s’expliquerait par l’insolvabilité du débiteur et les limites des instruments juridiques à disposition des créanciers dans un tel cas de figure. S’il n’a pas déposé plainte auprès de la police grand-ducale ou du ministère public, il se serait agi d’une « […] décision prise dans le cadre de sa liberté de dépôt de plainte et de la libre gestion de son entreprise […] ». Sur ce point, la société … explique que ledit gérant aurait estimé (i) qu’il n’aurait pas disposé de preuves suffisantes de chacun des vols commis, (ii) que la reconnaissance de dette représenterait, en elle-

même, un document juridiquement contraignant confirmant l’aveu de Monsieur … des sommes détournées et (iii) que l’absence de dépôt de plainte augmenterait ses chances de recouvrement de la créance.

De même, ce serait à tort que le directeur soutiendrait qu’il ne serait pas prouvé que le gérant de la société XXX n’aurait pas perçu le montant de … euros, la société … précisant qu’une saisie-arrêt n’aurait pas été accordée par la justice de Paix de et à Esch-sur-Alzette, si la créance n’était pas impayée.

Par ailleurs, la société … fait plaider que la qualification des faits litigieux comme distribution cachée de bénéfices conduirait à un résultat injuste pour elle-même et pour la société …. A cet égard, elle explique qu’elle serait doublement punie : non seulement y aurait-il eu un vol non remboursé à ce jour, mais les montants déduits antérieurement auraient encore été réintégrés dans le résultat imposable de la société XXX, de sorte que des charges effectivement supportées, en l’occurrence une perte de stock, n’auraient pas été prises en compte pour la détermination du résultat imposable de cette dernière société et in fine de celui de la société ….

24 Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours pour ne pas être fondé.

Il fait valoir que contrairement à l’argumentation de la société demanderesse, la société XXX n’aurait pas tenu une comptabilité régulière durant les exercices litigieux, pour lesquels le bureau d’imposition compétent aurait dû procéder à des redressements sur base du rapport de révision.

A cet égard, il fait valoir que la société demanderesse serait soumise aux obligations de la tenue d’une comptabilité régulière au sens des articles 197 et 205 de la loi modifiée du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales, des articles 8 à 16 du Code de Commerce et du paragraphe 160 (1) AO. Le paragraphe 162 AO déterminerait les conditions à respecter par les entreprises afin que leur comptabilité soit considérée comme étant tenue de manière régulière.

Une comptabilité régulière en la forme et au fond serait la représentation des comptes d’une entreprise dans une stricte chronologie et d’après les faits réels. Elle serait censée avoir enregistré de manière claire, précise et ordonnée toutes les opérations de cette entreprise. Elle devrait avoir pris en considération de façon exacte l’intégralité des faits comptables. A cette fin, la société devrait respecter les principes généraux comptables, tels que les principes de continuité, de constance, de spécificité des exercices, de non compensation, de comptabilisation des charges et produits et de prudence. En effet, la comptabilité ne serait pas seulement un ensemble formellement parfait, mais devrait également être effectivement le reflet de toutes les caractéristiques patrimoniales de l’entreprise.

Il se dégagerait du dossier fiscal qu’une comptabilité régulière ne saurait être présumée en ce qui concerne les années d’imposition litigieuses, le délégué du gouvernement renvoyant, à cet égard, au rapport de révision.

Le représentant étatique estime que l’argumentaire développé par la société demanderesse ne devrait pas emporter la conviction du tribunal.

En effet, les impressions des annulations feraient toujours défaut. Si la société demanderesse soutient que les pièces en question n’auraient pas d’incidence fiscale, de sorte qu’il n’y aurait pas eu d’obligation de les conserver, il ne s’agirait que d’allégations non autrement étayées. L’argumentation de la société … selon laquelle les impressions d’annulation manquantes n’auraient concerné que des journées durant lesquelles il n’y aurait pas eu d’opération d’annulation, de sorte qu’il n’y aurait pas eu d’opération comptable à enregistrer, ne serait qu’un sophisme.

De même, il resterait manifeste que la base de données de la caisse enregistreuse ferait défaut. Dans ce contexte, le délégué du gouvernement déclare contester formellement les développements de la société demanderesse selon lesquels cette circonstance serait imputable au service de révision, qui aurait causé l’effondrement du système de caisse en y introduisant une clef USB, développements qui seraient restés au stade de pure allégation.

Par ailleurs, la non-conformité de la caisse enregistreuse et du livre de caisse serait manifestement donnée, en ce qu’il serait possible de modifier la comptabilité. Or, celle-ci serait censée avoir enregistré de manière claire, précise et ordonnée toutes les opérations de l’entreprise et devrait avoir pris en considération de façon exacte l’intégralité des faits comptables, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce. En effet, la condition d’inaltérabilité ne serait pas remplie et le réviseur aurait, par ailleurs, démontré que de nombreux tickets manquent, sans qu’une 25 explication concluante ait été fournie à cet égard, le délégué du gouvernement insistant encore sur le fait que les annulations ne seraient pas sauvegardées.

En conclusion, le délégué du gouvernement soutient que la comptabilité litigieuse aurait été rejetée à juste titre.

Le représentant étatique réfute ensuite les contestations de la société demanderesse quant à la distribution cachée de bénéfices au profit du gérant de la société ….

A cet égard, il fait valoir que l’essence de la notion de distribution cachée devrait être dégagée à partir du principe posé par l’article 164 (1) LIR suivant lequel les distributions ne pourraient pas réduire le revenu imposable. La loi opérerait de la sorte une distinction entre la sphère de réalisation des revenus, qui déterminerait le revenu imposable devant être soumis à imposition, et celle d’utilisation ou de distribution des revenus qui ne devrait pas influer sur le revenu imposable. La notion de distribution cachée de bénéfices ne tendrait ainsi pas à réintégrer dans les comptes sociaux une opération déterminée et le revenu correspondant, mais tendrait, d’abord, à requalifier l’opération ayant l’apparence d’être intervenue dans le cadre de la réalisation de revenus pour lui conférer sa qualification réelle d’une opération de distribution trouvant son fondement dans l’allocation d’un avantage direct ou indirect à un associé ou actionnaire et ayant entraîné soit une diminution de l’actif (« Vermögensminderung ») soit un défaut d’accroissement de l’actif (« verhinderte Vermögensmehrung ») et, ensuite, à annihiler la réduction indue du revenu imposable causée par cette opération de distribution. Les distributions cachées de bénéfices visées par l’article 164 (3) LIR existeraient dès lors à partir du moment où un associé, actionnaire ou intéressé, recevrait directement ou indirectement, en dehors de la distribution de bénéfices prévue en droit des sociétés, d’une société des avantages qui s’analysent, pour cette dernière, en un emploi de revenus sans contrepartie effective et que l’associé, actionnaire ou intéressé, n’aurait pas pu obtenir pareil avantage en l’absence de ce lien sociétaire. La situation concernée serait celle où un gestionnaire prudent et avisé n’aurait pas accordé un avantage similaire à un tiers.

En citant l’article 59 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », et en se prévalant de la jurisprudence des juridictions administratives relative à la charge de la preuve en la présente matière, le représentant étatique soutient que les conditions d’une distribution cachée de bénéfices seraient remplies en l’espèce.

A cet égard, il souligne que depuis le 10 août 2009, Monsieur … serait le gérant unique de la société …. Il serait par ailleurs actionnaire indirect de cette dernière à travers la société ….

Le délégué du gouvernement ajoute qu’en établissant les bases d’imposition des années 2013 et 2014, le bureau d’imposition compétent aurait, à juste titre, mis en exergue le fait que les sociétés XXX et … seraient liées et auraient les mêmes actionnaires et bénéficiaires économiques. Ledit bureau d’imposition aurait valablement conclu à l’existence d’une distribution cachée de bénéfices.

Sur ce dernier point, le délégué du gouvernement souligne que la requête adressée le 11 novembre 2014 à la Justice de Paix d’Esch-sur-Alzette, telle que versée par la société …, confirmerait l’existence de démarches entreprises par Monsieur …, qui se targuerait de sa qualité de créancier de Monsieur ….

26 La distribution cachée de bénéfices litigieuse se dégagerait ainsi des pièces versées par la société demanderesse et donc de l’aveu de cette dernière.

Ce serait à juste titre que le directeur aurait relevé qu’il serait pour le moins surprenant qu’une personne à laquelle des marchandises d’une valeur de … euros auraient été dérobées ne déposerait pas immédiatement plainte auprès du ministère public.

En soulignant que l’affirmation de la société … selon laquelle le gérant de la société XXX n’aurait pas perçu le montant de … euros serait restée à l’état de pure allégation, le représentant étatique insiste sur le fait que la reconnaissance de dette sommant le voleur à payer ledit montant sur le compte privé du susdit gérant serait à qualifier de distribution cachée de bénéfices, tel que retenu à juste titre par le bureau d’imposition.

Par ailleurs, le représentant étatique fait valoir qu’en vertu des dispositions de l’article 146 LIR, les distributions de bénéfices tant ouvertes que cachées seraient passibles de la retenue sur revenus de capitaux et que conformément à l’article 148 LIR, le taux de la retenue d’impôt applicable pour l’année 2012 serait de 15 pour cent, à moins que le débiteur prenne à sa charge l’impôt à retenir, ce qui, même en matière de distribution cachée de bénéfices, ne serait jamais présumé.

Finalement, il soutient que le tribunal ne saurait faire droit à la demande de la société demanderesse tendant à voir constater qu’il n’y aurait pas d’avantages fiscaux injustifiés ni de réduction de recettes fiscales au sens du paragraphe 396 AO, étant donné, d’une part, qu’il y aurait bien eu des avantages fiscaux injustifiés et une réduction de recettes fiscales et, d’autre part, que la demande en question n’aurait pas figuré dans la réclamation de l’intéressée, de sorte qu’il s’agirait d’une demande nouvelle, qui serait irrecevable de ce fait.

Dans son mémoire en réplique, la société … réitère, en substance, son argumentation développée dans sa requête introductive d’instance selon laquelle, d’une part, la comptabilité de la société XXX aurait été régulière au cours des années litigieuses et, d’autre part, les conditions d’une distribution cachée de bénéfices ne seraient pas remplies en l’espèce.

Quant à la question de la régularité de ladite comptabilité et s’agissant, en premier lieu, des critiques de la partie étatique quant à l’absence des impressions d’annulations, la société demanderesse insiste sur le fait que seules les pièces utiles à la détermination du résultat comptable et fiscal devraient être conservées et que l’absence de documents non pertinents, tels que des « […] impressions vierges d’annulation […] », serait sans incidence sur la régularité d’une comptabilité.

S’agissant de l’absence de la base de données de la caisse enregistreuse des années 2011 à 2014, la société … soutient que ladite caisse ne ferait pas partie du système comptable de la société …. Il s’agirait d’un outil préalable servant à regrouper les commandes de manière électronique et à enregistrer les entrées et sorties de monnaie. Ce système préalable serait maintenu en parallèle à un livre de caisse en format papier rempli de manière manuscrite. Or, le réviseur n’aurait émis aucune critique à l’encontre dudit livre de caisse ni à l’encontre du système comptable de la société XXX à proprement parler, qui serait maintenu par un prestataire de service du secteur comptable de renommée, lequel utiliserait, quant à lui, un logiciel comptable inaltérable et dont tous les documents et inscriptions seraient retraçables pour l’ensemble des années concernées.

27 La société demanderesse insiste encore sur le fait que le réviseur, en introduisant une clef USB dans la caisse enregistreuse, aurait causé l’effondrement du système, en soutenant qu’une intervention aurait été nécessaire afin de réparer la caisse et en renvoyant, à cet égard, à la facture se rapportant à cette intervention, tout en invitant le tribunal à entendre comme témoins le réviseur, voire le gérant de la société XXX et un représentant de la fiduciaire de cette dernière, dans le cas où des doutes quant à la matérialité des faits invoqués par elle subsisteraient.

Malgré cette perte de données informatiques, toutes les données financières et les pièces justificatives afférentes existeraient sous format papier, à travers les feuilles de caisse imprimées quotidiennement par le personnel du restaurant. A cet égard, elle réitère son argumentation selon laquelle ces copies bénéficieraient d’une présomption de conformité aux originaux, en application du règlement grand-ducal du 22 décembre 1986, de sorte que le seul fait que les pièces justificatives existeraient uniquement sous format papier ne permettrait pas de conclure à l’irrégularité de la comptabilité de la société ….

Quant à l’argumentaire de la partie étatique ayant trait à la non-conformité de la caisse enregistreuse, la société … insiste sur l’absence d’une condition légale d’inaltérabilité, tout en soulignant que tout système informatique serait altérable. Or, ni le gérant de la société XXX, restaurateur de profession, ni les serveurs du restaurant ne seraient capables d’une telle manipulation informatique.

Quant à la distribution cachée de bénéfices retenue au profit de Monsieur …, la société … insiste sur le fait qu’au moment du détournement de marchandises, le gérant de la société XXX n’aurait reçu aucun avantage. Il n’y aurait pas eu de « Vermögensverminderung » ni de « verhinderte Vermögensmehrung » envers ledit gérant, mais plutôt envers un tiers, en l’occurrence le voleur des biens en question. En d’autres termes, l’avantage litigieux aurait été accordé à un tiers, de sorte qu’il ne saurait y avoir eu distribution cachée de bénéfices.

La société … ajoute que le gérant de la société XXX n’aurait reçu un avantage ni au moment du vol, dont il n’aurait pas été l’auteur, ni au moment de la signature de la reconnaissance de dette, étant donné que la signature d’une telle reconnaissance de dette n’équivaudrait pas au paiement de la dette qui en ferait l’objet. L’avantage n’existerait pas non plus à l’heure actuelle, compte tenu du défaut de paiement de la dette par le voleur, qui serait insolvable.

Elle fait encore valoir que ni au moment du vol, ni au moment de la signature de la reconnaissance de dette, la société XXX n’aurait eu une « Vorteilsgeneigtheit », ni un « finaler Zuwendungswillen » envers son gérant, la société … réitérant, dans ce contexte, ses développements antérieurs quant au but poursuivi par ledit gérant en signant ladite reconnaissance de dette et quant à l’intention de celui-ci de continuer toute somme récupérée à la société ….

Par ailleurs, elle insiste sur le fait que les nombreuses démarches entreprises en vue du recouvrement de la créance démontreraient à elles seules que le voleur, qui resterait insolvable, n’aurait pas acquitté sa dette, la société … réitérant encore ses développements antérieurs ayant trait à l’absence de dénonciation des vols subis à l’administration fiscale, respectivement au ministère public et au résultat injuste auquel mènerait la qualification de distribution cachée de bénéfices.

28 Finalement, elle insiste sur le caractère fondé de sa demande de voir constater l’inexistence d’avantages fiscaux injustifiés au sens du paragraphe 396 AO, tout en soulignant que contrairement à ce que soutiendrait la partie étatique, il ne s’agirait pas d’une demande nouvelle, alors qu’elle aurait déjà été formulée dans sa réclamation.

Appréciation du tribunal A titre liminaire, le tribunal constate que la société … ne formule aucun moyen quant aux volets de la décision directoriale déférée par lesquels le directeur, d’une part, s’est déclaré incompétent pour statuer sur les réclamations dirigées par elle à l’encontre des bulletins rectificatifs de la ventilation de la base d’assiette globale des années 2012, 2013 et 2014, émis les 25 septembre et 30 octobre 2019 et, d’autre part, a déclaré irrecevables les réclamations dirigées par ladite société contre les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2012, émis le 30 octobre 2019.

Dans ces circonstances, le tribunal ne saurait remettre en cause ni la légalité ni le bien-fondé de ces deux volets de la décision litigieuse et son analyse ultérieure se limitera, dès lors, au volet de ladite décision portant rejet des réclamations introduites par la société demanderesse à l’encontre des bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2013 et 2014.

Cependant, il ressort du libellé de la décision directoriale déférée que les majorations des recettes opérées au niveau de la société XXX, suite au contrôle fiscal subi par cette dernière, à hauteur de … euros pour l’année 2011, de … euros pour l’année 2012, de … euros pour l’année 2013 et de … euros pour l’année 2014, ainsi que la reconnaissance, au niveau de cette même société, d’une distribution cachée de bénéfices pour l’année 2012 se sont répercutées sur ces derniers bulletins d’imposition par le biais de pertes reportables non prises en compte. Ainsi, l’analyse du tribunal englobera les différents redressements opérés à l’égard de la société XXX pour les années 2011 à 2014.

Toujours à titre liminaire, et en ce qui concerne la demande de la société … de voir « […] constater qu’il n’y a pas eu d’avantage fiscaux injustifiés (nicht gerechtfertigte Steuervorteile) ni de réduction des recettes fiscales (verkürzte Steuereinnahmen) au sens du § 396 AO […] », le tribunal relève que contrairement à ce que soutient le délégué du gouvernement, il ne s’agit pas d’une demande nouvelle, étant donné qu’elle figurait déjà, du moins en sa substance, dans la réclamation de la société …, à travers laquelle cette dernière a pris position quant à l’applicabilité dudit paragraphe 396 AO, tout en concluant qu’« […] une quelconque fraude ou escroquerie [serait] à rejeter […] ».

Il n’en reste pas moins que la demande en question est à rejeter pour défaut de pertinence, étant donné que s’il est certes exact que dans son rapport de révision, le réviseur a précisé être d’avis que le paragraphe 396 AO serait applicable et qu’il appartiendrait au bureau d’imposition compétent de déposer plainte auprès du ministère public, il n’en reste pas moins que l’acte déféré au tribunal ne comporte aucun élément décisionnel quant à une application, à l’égard des sociétés XXX et …, des dispositions dudit paragraphe 396 AO, en ce compris en ce qui concerne les infractions pénales de fraude fiscale aggravée et d’escroquerie fiscale, prévues aux alinéas 5 et 6 de ce même paragraphe et auxquelles la société demanderesse se réfère dans ce contexte, ces infractions relevant, d’ailleurs, de la compétence exclusive des autorités judiciaires, ainsi que cela ressort de l’alinéa 7 de la disposition légale en question.

29 Quant aux majorations des recettes de la société XXX, telles que critiquées par la société …, et s’agissant, d’abord, de l’argumentation de cette dernière ayant trait à une atteinte aux droits de la défense de la société XXX, au motif que le réviseur n’aurait pas clairement identifié les restaurants qu’il aurait considérés comme étant comparables au restaurant « … », le tribunal constate que le rapport de révision contient les précisions suivantes, non utilement remises en cause par la société demanderesse : « […] Pendant toute la durée de la révision, les responsables de la société à responsabilité limitée XXX ont été tenus au courant du résultat des investigations.

A l’occasion des différentes entrevues, ils ont été informés de toutes les constatations et conclusions renseignées dans le présent rapport ; ils disposaient donc toujours des données requises pour faire valoir leurs droits de défense en pleine connaissance de cause (§ 205 AO).

[…] ». S’agissant concrètement des démarches effectuées par le réviseur afin de vérifier les marges déclarées par la société XXX, il ressort du rapport de révision que le gérant de cette société a bien été invité à s’expliquer quant à la différence entre ces marges et celles qui, d’après le réviseur, seraient usuelles dans la branche. S’il est certes exact que ledit rapport ne contient aucune précision quant aux restaurants que le réviseur estime comparables au restaurant « … », il n’en reste pas moins que la société …, qui, du fait du recours au régime de l’intégration fiscale, est celle qui subit in fine les conséquences des redressements critiqués, a pu faire valoir ses contestations afférentes tant dans sa réclamation que dans le cadre du présent recours. Par ailleurs, il se dégage du rapport de révision que le réviseur a évalué les marges déclarées sur base de constatations faites sur place, en présence du comptable et du gérant de la société XXX, ce dernier ayant été entendu en ses explications. Dans ces circonstances, une atteinte aux droits de la défense n’est vérifiée ni à l’égard de la société XXX, ni à l’égard de la société ….

L’argumentation afférente de cette dernière encourt, dès lors, le rejet.

Quant au bien-fondé des majorations des recettes de la société XXX, telles que contestées par la société …, le tribunal constate que celles-ci ont été effectuées par voie de taxation d’office, au sens du paragraphe 217 AO, aux termes duquel : « (1) Soweit das Finanzamt die Besteuerungsgrundlagen (einschließlich solcher Besteuerungsgrundlagen, für die eine gesonderte Feststellung nicht vorgeschrieben ist) nicht ermitteln oder berechnen kann, hat es sie zu schätzen. Dabei sind alle Umstände zu berücksichtigen, die für die Schätzung von Bedeutung sind.

(2) Zu schätzen ist insbesondere dann, wenn der Steuerpflichtige über seine Angaben keine ausreichenden Aufklärungen zu geben vermag oder weitere Auskunft oder eine Versicherung an Eides Statt verweigert. Das Gleiche gilt, wenn der Steuerpflichtige Bücher oder Aufzeichnungen, die er nach den Steuergesetzen zu führen hat, nicht vorlegen kann oder wenn die Bücher oder Aufzeichnungen unvollständig oder formell oder sachlich unrichtig sind ».

Force est au tribunal de constater que l’un des cas d’ouverture d’une taxation d’office constitue la présence d’une comptabilité irrégulière quant à la forme ou quant au fond.

A cet égard, le tribunal précise que les paragraphes 162 à 165 AO imposent la tenue d’une comptabilité régulière et complète quant à la forme et quant au fond.

La comptabilité est régulière quant à la forme lorsqu’elle est agencée de façon claire et ordonnée, de façon à faciliter toute recherche et tout contrôle. Les écritures comptables doivent être appuyées par des pièces justificatives devant être conservées, de manière que l’exercice utile de leur pouvoir de vérification par les dirigeants de l’entreprise et les vérificateurs de la 30 comptabilité, dont l’administration fiscale, implique que le rapprochement entre l’enregistrement comptable et la pièce justificative afférente puisse être fait sans problèmes.3 Une comptabilité est régulière quant au fond lorsqu’elle renvoie une image fidèle et complète de la situation financière de l’entreprise. A cette fin, elle doit respecter les principes généraux comptables tels que les principes de continuité, de constance, de spécificité des exercices, de non-compensation, de comptabilisation des charges et produits et de prudence.4 Le paragraphe 162 dispose notamment en son alinéa (2) que : « Die Eintragungen in die Bücher sollen fortlaufend, vollständig und richtig bewirkt werden. Der Steuerpflichtige soll sich einer lebenden Sprache und der Schriftzeichen einer solchen bedienen ». Cette disposition consacre ainsi le principe de la comptabilisation continue qui implique la comptabilisation chronologique des opérations et ce dans un délai rapproché après leur survenance, ainsi que le principe de vérité qui impose l’enregistrement de toutes les opérations et leur enregistrement correct.

Par ailleurs, le paragraphe 208 (1) AO prévoit que « Bücher und Aufzeichnungen, die den Vorschriften des § 162 entsprechen, haben die Vermutung ordnungsmäßiger Führung für sich und sind wenn nach den Umständen des Falles kein Anlass ist, ihre sachliche Richtigkeit zu beanstanden, der Besteuerung zu Grunde zu legen. […] ».

Cette disposition instaure ainsi une présomption de véracité en faveur d’une comptabilité tenue conformément aux principes énoncés au paragraphe 162 AO, en l’absence d’indices permettant de douter de la réalité factuelle des écritures et des documents comptables.5 Il s’ensuit qu’en présence de tels indices, une comptabilité peut être rejetée par le bureau d’imposition compétent, même si, par ailleurs, elle peut être considérée comme étant régulière quant à la forme.

Dans ce contexte, il a été jugé qu’au vœu dudit paragraphe 208 (1) AO et du paragraphe 205 (1) AO qui investit le bureau d’imposition de la mission légale de vérifier l’exactitude des déclarations d’impôt, ce dernier est admis, même en présence de revenus déterminés sur base d’une comptabilité susceptible de bénéficier de la présomption établie par le paragraphe 208 (1) AO, à contrôler si la crédibilité de la déclaration ne se trouve pas affectée par des lacunes ou incohérences se dégageant des indications mêmes de la déclaration ou d’autres éléments du dossier fiscal.6 A cet égard, le réviseur a conclu au caractère irréaliste de la marge sur engagé, telle que ressortant de la comptabilité produite.

Si, sur ce point, il s’est certes référé à une marge usuelle dans la branche, telle qu’elle serait pratiquée par des entreprises comparables, sans identifier les entreprises ainsi visées, de sorte que la comparabilité invoquée ne peut être vérifiée, il s’est également, et surtout, appuyé sur ses propres constatations faites non seulement sur base d’éléments lui communiqués par la société XXX, mais aussi à l’occasion d’une visite des lieux, afin d’évaluer la marge sur engagé déclarée par ladite société. A cet égard, le réviseur ne s’est pas borné à comparer abstraitement 3 Cour adm., 15 janvier 2019, n° 41547C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 885.

4 Ibid..

5 Cour adm., 29 juillet 2009, n° 25165C du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.

6 Cour adm., 27 novembre 2008, n° 23720C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 893 et l’autre référence y citée.

31 cette marge à une marge usuelle du secteur d’activités concerné, mais il a, sur base d’éléments concrets, notamment les prix de vente des plats phares du restaurant, tels que pratiqués par la société XXX, et les prix de revient de ces plats, qui ont été établis contradictoirement lors de la préparation desdits plats en cuisine, en prenant en considération des portions plus que copieuses, déterminé la marge qui, eu égard à ces données, devrait être celle du restaurant, quitte à ce qu’il ait, à titre d’argument supplémentaire, mais non décisif à lui seul, indiqué que la marge ainsi déterminée correspondrait à une marge usuelle dans la branche.

Ainsi, le réviseur s’est vu fournir « […] un listing avec le calcul détaillé du prix de revient de certains plats phares […] » du restaurant, lequel aurait fait apparaître « […] que les marges y recueillies [seraient] irréalistes (quantités gigantesques, respectivement ingrédients en disbalance). (c.f. Annexe1) […] ». Ce caractère irréaliste est bien documenté par le premier exemple cité à l’annexe 1 à laquelle il est ainsi fait référence, à savoir des cuisses de grenouilles servis par douze pièces, ce plat comportant, selon les indications fournies par la société XXX, pas moins d’un demi kilo d’ail, ce qui est une quantité pour le moins improbable, même en tenant compte du fait qu’il s’agit d’un plat traditionnellement riche en ail.

Il se dégage encore du rapport de révision que « […] le réviseur, accompagné d’un fonctionnaire du bureau d’imposition sociétés Esch, se sont rendus sur place et ont déterminé (cuisiné), ensemble avec le responsable de l’établissement et le comptable, les prix de revient de certains plats afin de pouvoir déterminer de la manière la plus exacte la marge pondérée du restaurant […] ». Ainsi, « […] [e]n se basant sur la répartition des plats […], tout en tenant compte de portions plus que copieuses (marge de sécurité en faveur du contribuable) et en se basant sur les prix de ventes appliqués, le réviseur a déterminé une marge pondérée entre 380% et 370% […] », alors que les marges déclarées n’étaient que de 235,88 % pour l’année 2011, de 213,94 % pour l’année 2012, de 256,17 % pour l’année 2013 et de 266,09 % pour l’année 2014, sans qu’une explication plausible ait été fournie quant à cette différence significative, l’argumentation de la société … ayant trait à la situation géographique du restaurant « … » à … et à la nécessité en résultant de faire des efforts en vue d’attirer des clients étant, en l’absence d’autres éléments, insuffisante à cet égard.

Dans ce contexte, le gérant de la société XXX « […] a affirmé que depuis mi 2018 il a lui-même revu les quantités des plats […] », qu’il « […] a remplacé ses anciennes assiettes et récipients par de nouveaux qui sont formés plus favorablement, permettant ainsi de réduire la quantité des ingrédients constitutifs des plats servis […] » et que « […] [d]ésormais il parvient à réaliser une marge sur engagé pondérée supérieure à 370% […] ». Si ledit gérant a encore affirmé qu’au cours des années soumises au contrôle, les quantités servies auraient été nettement plus élevées, en montrant à cet égard la différence entre les assiettes utilisées auparavant et celles actuellement en usage, il ressort du rapport de révision que « […] [l]ors de la préparation sur les assiettes anciennes de certains plats cuisinés, il s’est avéré que les quantités utilisées par les cuisiniers étaient supérieures à ceux que le réviseur avait supposé initialement, mais bien inférieures au calcul du gérant […] ».

Ainsi, le réviseur a valablement pu conclure au caractère irréaliste des calculs lui soumis par la société XXX, nonobstant les explications du gérant quant au changement des assiettes et des portions servies depuis l’année 2018, étant relevé que le réviseur a finalement retenu une marge sur engagé pondérée de 340 %, tenant compte du fait que les portions étaient plus copieuses pendant les années sous contrôle.

32 Le caractère irréaliste desdits calculs est bien illustré par l’incident décrit dans le rapport de révision en les termes suivants : « […] Lors de la préparation de la « Pizza Diavola », le pizzaiolo a d’abord mis des tranches de salami sur sa pizza, quantité déjà très copieuse. Ensuite, il les a retirées pour les peser. Il s’est avéré que la quantité utilisée était nettement inférieure (environ de 60%) que pronostiqué par le gérant dans ses calculs. La réplique ironique du pizzaiolo était qu’il pourrait continuer à en mettre jusqu’à obtenir la quantité voulue. […] ».

Eu égard à l’ensemble de ces éléments, le tribunal conclut que la crédibilité des déclarations de la société XXX quant à la marge sur engagé des années litigieuses est ébranlée, ce qui permet de douter de la réalité factuelle des écritures et des documents comptables gisant à la base de ces déclarations.

Il s’ensuit que même à admettre que la comptabilité de la société XXX puisse être qualifiée de régulière quant à la forme, le bureau d’imposition, suivi par le directeur, a néanmoins valablement pu la rejeter et procéder par voie de taxation d’office, en application du paragraphe 217 AO.

Le recours à la taxation d’office ayant ainsi été justifié en l’espèce, il appartient à la société demanderesse de prouver que les revenus réels de la société XXX s’écartent de manière significative des bases d’imposition retenues par l’administration fiscale.7 Or, sur cette toile de fond, le tribunal ne s’est pas vu soumettre d’éléments concluants qui lui permettraient de remettre en cause le bien-fondé des majorations des résultats de la société XXX, telles que résultant de la taxation d’office ainsi opérée, laquelle a été effectuée sur base d’une marge sur engagé pondérée de 340 %, fixée par le réviseur à partir de ses propres constatations faites sur place et en tenant compte d’une marge de sécurité en faveur du contribuable.

Les contestations afférentes de la société … encourent, dès lors, le rejet.

Quant à la distribution cachée de bénéfices retenue dans le chef de la société XXX, le tribunal relève que l’article 164 LIR prévoit ce qui suit : « 1) Pour déterminer le revenu imposable, il est indifférent que le revenu soit distribué ou non aux ayants droit.

2) Sont à considérer comme distribution dans le sens de l’alinéa qui précède, les distributions de quelque nature qu’elles soient, faites à des porteurs d’actions, de parts bénéficiaires ou de fondateurs, de parts de jouissance ou de tous autres titres, y compris les obligations à revenu variable donnant droit à une participation au bénéfice annuel ou au bénéfice de liquidation.

3) Les distributions cachées de bénéfices sont à comprendre dans le revenu imposable.

Il y a distribution cachée de bénéfices notamment si un associé, sociétaire ou intéressé reçoit directement ou indirectement des avantages d’une société ou d’une association dont normalement il n’aurait pas bénéficié s’il n’avait pas eu cette qualité ».

L’essence de la notion de distribution cachée doit être dégagée à partir du principe posé par l’article 164 (1) LIR suivant lequel les distributions ne peuvent pas réduire le revenu 7 En ce sens : Cour adm., 27 juin 2019, n° 41512 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 916 et les autres références y citées.

33 imposable. Ainsi, le revenu à soumettre à l’impôt doit correspondre à celui réalisé par la collectivité soumise à l’impôt sur le revenu des collectivités agissant en tant qu’acteur indépendant dans une logique économique impliquant qu’elle entre en relation avec d’autres acteurs économiques sur une base synallagmatique en recherchant un équilibre entre ses engagements et la contre-prestation de l’autre partie. Toute forme de répartition de revenus aux actionnaires ou associés de la collectivité ne peut être opérée qu’à partir du revenu déjà préalablement soumis à l’impôt sur le revenu des collectivités. L’article 164 LIR opère à cette fin une distinction entre la sphère de réalisation des revenus, qui détermine le revenu devant être soumis à imposition, et celle d’utilisation ou de distribution des revenus qui ne doit pas influer sur le revenu imposable.

Une distribution cachée de bénéfices s’analyse en une opération ayant l’apparence d’être intervenue dans le cadre de la réalisation de revenus, mais dont l’examen de la substance permet de dégager sa qualification réelle sous la forme d’une opération de distribution trouvant son fondement dans l’allocation d’un avantage direct ou indirect à un associé, actionnaire ou intéressé et ayant entraîné soit une diminution de l’actif (« Vermögensminderung ») soit un défaut d’accroissement de l’actif (« verhinderte Vermögensmehrung »).

Les distributions cachées de bénéfices visées par l’article 164 (3) LIR existent dès lors à partir du moment où un associé, actionnaire ou intéressé, reçoit directement ou indirectement, en dehors de la distribution de bénéfices prévue en droit des sociétés, d’une société des avantages qui s’analysent, pour cette dernière, en un emploi de revenus sans contrepartie effective et que l’associé, actionnaire ou intéressé, n’aurait pas pu obtenir pareil avantage en l’absence de ce lien sociétaire. La situation concernée est celle où un gestionnaire prudent et avisé n’aurait pas accordé un avantage similaire à un tiers.

Par ailleurs, aux termes de l’article 59 de la loi du 21 juin 1999, « la preuve des faits déclenchant l’obligation fiscale appartient à l’administration, la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la cote d’impôt appartient au contribuable ».

Il se dégage d’une lecture combinée de ces dispositions que la charge de la preuve de l’existence d’une distribution cachée de bénéfices repose en premier lieu sur le bureau d’imposition. Celui-ci doit en effet procéder à un examen impartial et objectif des déclarations du contribuable et relever des éléments qui lui paraissent douteux et qui pourraient indiquer l’existence de distributions cachées de bénéfices. Ainsi, c’est essentiellement lorsque le bureau d’imposition peut faire état d’un faisceau de circonstances qui rendent une telle distribution probable et qui n’ont pas été éclairées ou documentées par le contribuable, qu’il peut mettre en cause la réalité économique des opérations et supposer une diminution indue des bénéfices de l’entreprise sans avoir à la justifier exactement. Il y a alors renversement de la charge de la preuve, le contribuable devant prouver qu’il n’y a pas diminution de bénéfice ou que celle-ci est économiquement justifiée, et non seulement motivée par des relations particulières entre deux entités liées.8 En l’espèce, le tribunal relève qu’il est certes exact que préalablement à la signature de la reconnaissance de dette par Monsieur …, opération qualifiée de distribution cachée de bénéfices par la partie étatique, la société XXX avait déjà subi une diminution indue de son actif au profit d’un tiers, à travers les vols de marchandises commis par son ancien salarié, lesquels ne sauraient, à l’évidence, s’analyser en distributions cachées de bénéfices.

8 Trib. adm., 29 avril 2019, n° 40694 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 631.

34 Il n’en reste pas moins qu’en vertu des principes de droit commun de la responsabilité civile, la créance de réparation du dommage causé par un fait dommageable revient à la victime, en l’occurrence la société XXX, et non pas au gérant de cette dernière.

Ainsi, la signature de la susdite reconnaissance de dette, mentionnant comme créancier, non pas la société XXX, victime des faits, mais son gérant, Monsieur …, peut s’analyser en un défaut d’accroissement de l’actif de la société, par rapport à la situation patrimoniale de cette dernière ayant résulté des vols subis.

Contrairement à ce que soutient la société …, la signature de ladite reconnaissance peut, dès lors, bien être prise en considération pour apprécier l’existence ou non d’une distribution cachée de bénéfices et il n’y a pas lieu de limiter l’analyse aux seuls vols de marchandises.

Quant à la condition fixée à l’article 164 (3) LIR, tenant à l’existence d’une relation particulière, il convient de relever que le cercle de personnes bénéficiaires d’avantages dont l’article 164 (3) LIR autorise la requalification en distribution cachée qui seront à comprendre dans le revenu imposable est délimité par cette disposition aux associés, sociétaires et intéressés de l’entité sociale visée. La notion d’« intéressé » fait partie d’une formule générale afin de permettre à l’administration et aux instances de recours de prendre leur décision dans chaque cas d’espèce et ce au vu de la difficulté de prévoir une énumération exhaustive. Une relation directe entre la société ou la collectivité ayant attribué l’avantage sans contrepartie réelle et le bénéficiaire de ce dernier n’est pas nécessaire. Seule est posée la condition que l’attribution d’un tel avantage par la société soit motivée par le seul lien participatif d’un associé ou sociétaire, de manière que l’octroi dudit avantage à une autre personne ayant des liens suffisamment étroits avec l’associé ou sociétaire puisse également être considéré comme distribution cachée si la relation économique entre ledit octroi et le lien participatif se trouve vérifiée d’après les éléments de l’espèce.9 S’il est exact que Monsieur … ne détient pas directement une participation dans la société XXX, de sorte à ne pas pouvoir être qualifié d’associé ou de sociétaire de cette dernière, il est néanmoins constant en cause qu’il est non seulement le gérant unique de la société en question, mais encore un actionnaire indirect de celle-ci, à travers sa participation détenue dans la société mère de la société XXX, la société ….

Dans ces circonstances, le tribunal retient que les liens existant entre cette société mère, d’une part, et Monsieur …, d’autre part, sont suffisamment étroits pour que ce dernier puisse être qualifié d’intéressé au sens de l’article 164 (3) LIR, ce qui n’est, d’ailleurs, pas contesté.

En ce qui concerne l’existence d’un avantage, le tribunal rappelle qu’il est constant en cause qu’à la suite de la découverte des vols commis par Monsieur …, Monsieur … a fait signer par ce dernier la susdite reconnaissance de dette, aux termes de laquelle l’intéressé a reconnu « […] devoir à titre personnel la somme de … € […] à Monsieur … […] » et s’est engagé « […] personnellement à payer ladite somme, avec un taux d’intérêt annuel de 4%, à Monsieur … par des versements mensuels […] de … € […] et cela à partir du 1er décembre 2012 sur le compte bancaire suivant : * Titulaire : … […] ».

9 Trib. adm. 18 décembre 2013 n° 30851 du rôle, confirmé par Cour adm., 2 décembre 2014, n° 33901C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 636 et les autres références y citées.

35 Agissant de la sorte, Monsieur …, usant de son mandat de gérant unique de la société XXX, s’est attribué, à titre personnel, une créance ayant dû revenir à la société, victime des vols subis.

L’attribution de cette créance équivaut a priori à un avantage alloué à Monsieur … en raison de sa qualité d’intéressé, au sens de l’article 164 (3) LIR, et qu’un gestionnaire normalement prudent et avisé n’aurait pas accordé à un tiers.

Dans la mesure où l’avantage a profité à une personne physique, dans le cas d’espèce à Monsieur …, l’avantage qui lui a été accordé par la société doit non seulement entraîner soit une diminution de l’actif, soit un défaut d’accroissement de l’actif dans son chef, mais également, tout comme les distributions de revenus dans les formes prévues par le droit des sociétés, avoir la nature d’une recette pouvant être qualifiée de revenu de capitaux mobiliers.10 L’article 97 (1) LIR qualifie « […] comme revenus provenant de capitaux mobiliers :

1. les dividendes, parts de bénéfice et autres produits alloués, sous quelque forme que ce soit, en raison des actions, parts de capital, parts bénéficiaires ou autres participations de toute nature dans les collectivités visées aux articles 159 et 160 […] ».

Les produits alloués, sous quelque forme que ce soit, en raison de la participation dans la société XXX détenue indirectement par Monsieur … doivent dès lors répondre, de par leur forme d’allocation à la définition générale des recettes contenue à l’article 104 (1) LIR, aux termes duquel « sont considérés comme recettes tous les biens et avantages, tant en espèces qu’en nature, mis à la disposition du contribuable dans le cadre de l’une des catégories de revenus nets mentionnées aux numéros 4 à 8 de l’article 10 », dont la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

Etant donné, d’une part, que les « biens et avantages » visés par l’article 104 (1) LIR comprennent « […] non seulement les biens en espèces, c’est-à-dire le numéraire ayant cours légal dans le pays, mais aussi tous les autres biens et avantages ne consistant pas en espèces mais appréciables en argent […] »11 et, d’autre part, qu’une créance, telle que celle attribuée à Monsieur …, constitue un bien meuble incorporel appréciable en argent, l’attribution de pareille créance à l’actionnaire indirect, réalisée en raison de cette participation indirecte, peut être qualifiée d’autre produit au sens de l’article 97 (1) 1. LIR et peut donner lieu à une distribution cachée de bénéfices dans cette mesure, et cela indépendamment de la question du paiement effectif de la créance.

Sur ce dernier point, si la société … soutient que le débiteur serait insolvable, pour conclure à l’absence d’avantage au profit de Monsieur …, cette argumentation est en tout état de cause à rejeter pour manquer en fait, étant donné que l’insolvabilité alléguée n’est pas établie.

Le seul fait qu’il ressort des pièces versées en cause que sur injonction judiciaire, le CCSS ait à deux reprises, en l’occurrence les 26 novembre 2014 et 24 février 2015, certifié que Monsieur … n’était pas affilié en qualité de travailleur salarié ou bénéficiaire d’une pension est, en effet, insuffisant à cet égard.

10 Cour adm., 31 juillet 2019, n° 42326C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 633 ; voir aussi : Cour adm., 11 mars 2021, n° 44908C du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.

11 Projet de loi n° 571 portant réforme de l’impôt sur le revenu, commentaires des articles, ad art. 120, p. 325.

36 Au vu de l’ensemble de ces éléments, le tribunal conclut que la partie étatique a valablement pu supposer une distribution cachée de bénéfices au profit de Monsieur ….

Dans la mesure où, conformément aux principes ci-avant énoncés, la charge de la preuve se trouve ainsi renversée, il incombe dès lors à la société … de prouver qu’il n’y a pas diminution de bénéfice ou que celle-ci est économiquement justifiée, et non seulement motivée par des relations particulières entre elle-même et le bénéficiaire de l’avantage en question.

Or, cette preuve n’est pas rapportée.

Si la société … argumente qu’en faisant signer la susdite reconnaissance de dette par Monsieur …, Monsieur … n’aurait agi qu’en tant que « […] recouvreur de dette […] », dans le but de préserver les intérêts de la société XXX, et qu’il aurait eu et aurait toujours l’intention de continuer toutes sommes récupérées à cette dernière, il ne s’agit cependant que de simples affirmations dépourvues de valeur probante.

Il suit des considérations qui précèdent que le directeur a valablement pu retenir l’existence d’une distribution cachée de bénéfices à hauteur de … euros, de sorte que les contestations afférentes de la société … encourent le rejet.

Dans ces circonstances, le tribunal conclut que le recours en réformation sous analyse est à rejeter pour ne pas être fondé.

Au vu de l’issue du litige, la société … est à débouter de sa demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure de 4.000 euros.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

rejette la demande tendant à la jonction du présent recours avec le recours inscrit sous le numéro 44515 du rôle ;

reçoit le recours principal en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

déboute la société demanderesse de sa demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure de 4.000 euros ;

condamne la société demanderesse aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Daniel Weber, premier juge, Annemarie Theis, attaché de justice délégué, 37 et lu à l’audience publique du 4 juillet 2022 par le vice-président, en présence du greffier Lejila Adrovic.

s. Lejila Adrovic s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 4 juillet 2022 Le greffier du tribunal administratif 38


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 44517
Date de la décision : 04/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-07-04;44517 ?

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