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22/06/2022 | LUXEMBOURG | N°42457

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 22 juin 2022, 42457


Tribunal administratif N° 42457 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 mars 2019 3e chambre Audience publique du 22 juin 2022 Recours formé par Monsieur … et consort, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’impôt

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 42457 du rôle et déposée le 6 mars 2019 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Paul NOESEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de lâ€

™Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … et de son épouse, Madame …, demeurant ...

Tribunal administratif N° 42457 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 mars 2019 3e chambre Audience publique du 22 juin 2022 Recours formé par Monsieur … et consort, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’impôt

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 42457 du rôle et déposée le 6 mars 2019 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Paul NOESEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … et de son épouse, Madame …, demeurant ensemble à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 6 décembre 2018, référencée sous les numéros … et …, (i) déclarant leurs réclamations contre les bulletins de la base de l’assiette de l’impôt commercial communal des années 2008 à 2015 irrecevables, (ii) recevant en la forme les réclamations contre les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des années 2008 à 2015, ainsi que celles dirigées contre les bulletins portant fixation de la base d’imposition de la contribution à l’assurance dépendance pour les années 2008 à 2015, (iii) annulant les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des années 2011 à 2015, émis le 1er août 2018, (iv) rejetant leurs réclamations introduites contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2008 à 2015 et, (v) réformant in pejus les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2011 à 2015, tous émis le 18 juillet 2018 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 6 juin 2019 ;

Vu le mémoire en réplique de Maître Jean-Paul NOESEN, déposé au greffe du tribunal administratif le 3 juillet 2019, au nom et pour le compte de Monsieur … et de Madame …, préqualifiés ;

Vu l’article 1er de la loi modifiée du 19 décembre 2020 portant adaptation temporaire de certaines modalités procédurales en matière civile et commerciale1 ;

Vu les communications respectives de Maître Jean-Paul NOESEN et de Monsieur le délégué du gouvernement Eric PRALONG du 26 janvier 2021 suivant lesquelles ils marquent leur accord à ce que l’affaire soit prise en délibéré sans leur présence ;

1 « Les affaires pendantes devant les juridictions administratives, soumises aux règles de la procédure écrite et en état d’être jugées, pourront être prises en délibéré sans comparution des mandataires avec l’accord de ces derniers. ».

Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique du 27 janvier 2021 ;

Vu l’avis du tribunal administratif du 12 novembre 2021 prononçant la rupture du délibéré en vue d’un changement de composition ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision directoriale critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport complémentaire à l’audience publique du 11 janvier 2022.

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Sur demande du préposé du bureau d’imposition …, Monsieur … et son épouse, Madame …, ci-après désignés par « les époux …-… », firent l’objet d’un contrôle fiscal de la part du service de révision de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le service de révision », contrôle dont les conclusions furent matérialisées dans un rapport de révision du 21 juin 2018, portant sur les exercices 2008 à 2015, ci-après désigné par « le rapport de révision ».

Le 18 juillet 2018, le bureau d’imposition …, section des personnes physiques, ci-

après désigné par le « bureau d’imposition », émit à l’égard des époux …-… les bulletins de l’impôt sur le revenu, les bulletins de la base d’assiette de l’impôt commercial communal et les bulletins portant fixation de la base d’imposition de la contribution à l’assurance dépendance pour les années 2008 à 2015.

Le 1er août 2018, le bureau d’imposition émit à l’égard des époux …-… des bulletins de l’impôt sur le revenu rectificatifs visant les années d’imposition 2011 à 2015 sur le fondement du paragraphe 94, alinéa 1er de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégée « AO ».

Par courriers de leur mandataire, datés du 17 septembre 2018, les époux …-… firent introduire une réclamation auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après « le directeur », à l’encontre des prédits bulletins d’impôt.

Par décision 18 septembre 2018, référencée sous les nos … et … du rôle, le directeur retint ce qui suit :

« […] Vu les requêtes introduites le 18 septembre 2018 par Me Jean-Paul Noesen, au nom des époux, le sieur … et la dame …, demeurant à L-…, pour « introduire un recours contre les bulletins d’imposition » des années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015, « comme suit :

a) Le bulletin d’imposition concernant l’impôt sur le revenu du 18/07/2018 b) Le bulletin d’imposition du même 18/07/2018 concernant la contribution à l’assurance-dépendance c) Le bulletin contenant calcul de la base d’assiette globale et fixant à zéro l’impôt commercial communal du 18/07/2018 et de dire que l’opération ne donne pas lieu à une imposition différente de celle résultant des déclarations du contribuable, à l’exception des redressements expressément admis aux termes de la présente. » ;

Considérant que les requêtes sont à considérer comme réclamations au sens du § 228 de la loi générale des impôts (AO) dirigées à la fois contre :

les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015, les bulletins de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015, et, finalement, les bulletins portant fixation de la base d’imposition de la contribution à l’assurance dépendance pour les années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015, tous émis en date du 18 juillet 2018 ; que les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 furent toutefois remplacés par des bulletins rectificatifs sur base du § 94, alinéa 1er AO en date du 1er août 2018 ; que les réclamations sont donc censées viser ces derniers et non pas les bulletins originaires du 18 juillet 2018, pourtant attaquables dans leur intégralité, conformément aux §§ 234 et 243 AO ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu le rapport dressé en date du 21 juin 2018 par le réviseur du Service de révision de l’Administration des contributions directes, couvrant la période s’étirant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2015 ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254, alinéa 2 et 301 AO ;

Considérant que les deux requêtes portées au rôle du Contentieux de l’impôt sous les numéros respectifs … et … ayant un objet connexe, il y a lieu de les joindre dans l’intérêt d’une bonne administration de la loi ; que le fait de joindre les deux requêtes ne dispense pas d’examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu’il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes;

En ce qui concerne les bulletins de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 Considérant qu’aux termes du § 232, alinéa 1er AO, un bulletin d’impôt ne peut être attaqué qu’au cas où le contribuable se sent lésé par le montant de l’impôt fixé ou conteste son assujettissement à l’impôt ;

Considérant que le montant de l’impôt commercial communal des années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 a été fixé à chaque fois à 0 euro et que les requérants ne prétendent sûrement pas à la fixation d’une cote d’impôt positive ;

Considérant que si un bulletin ayant fixé une cote d’impôt égale à zéro, avait reconnu en plus une perte dans le chef du réclamant, la réclamation n’aurait pas été admise directement contre ledit bulletin, mais seulement contre un bulletin futur opérant report de la perte (article 114 de la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.) et § 9bis de la loi concernant l’impôt commercial communal (GewStG)) déterminée par reconstitution des bénéfices et des pertes depuis la dernière imposition à cote positive de la période éligible pour le report de pertes et fixant pour la première fois une cote d’impôt supérieure à zéro (TA du 4 février 1998, n° 9850 du rôle) ;

Considérant qu’il en découle que les réclamations contre les bulletins de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 doivent être déclarées irrecevables pour défaut d’intérêt ;

En ce qui concerne les bulletins (rectificatifs) de l’impôt sur le revenu des années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO) dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 228 AO) de la loi, qu’elles sont partant recevables ;

Considérant que les réclamants font grief au bureau d’imposition d’avoir omis de prendre en considération à titre de bénéfice commercial au sens de l’article 14 L.I.R. des pertes d’exploitation réalisées par le biais de leur activité d’élevage de chevaux destinés aux sports équestres et hippiques ;

Considérant qu’en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d’office un réexamen intégral de la cause, sans égard aux conclusions et moyens du réclamant, la loi d’impôt étant d’ordre public ;

qu’à cet égard, le contrôle de la légalité externe de l’acte doit précéder celui du bien-

fondé ;

qu’en l’espèce la forme suivie par le bureau d’imposition ne prête pas à critique ;

Considérant de ce chef que l’instruction par la présente instance a révélé que le bureau d’imposition a émis des bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des années 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 en date du 1er août 2018 en vertu du § 94, alinéa 1er AO ;

que le § 94, alinéa 1er AO (principe communément appelé « demande en redressement ») dispose que les bulletins d’impôt (§§ 211, 212, 212a, alinéa 1er, 214, 215 et 215a AO) ainsi que les décisions administratives à caractère individuel (°235 AO) ne peuvent être retirés ou modifiés qu’à la double condition que le contribuable y consente expressément et qu’il ne se trouve pas forclos dans le cadre d’un recours contentieux, tout ceci endéans un délai de 3 mois à partir de la notification du bulletin ou de la décision administrative en cause ; qu’en l’espèce, le bureau d’imposition s’est servi du § 94, alinéa 1er AO afin de procéder, sans avoir le consentement explicite des réclamants, à des rectifications des bulletins originaires en leur défaveur ; que dans ce cas, la sanction en est l’annulation pure et simple des bulletins entrepris ; que la présente décision sur réclamation tranchera dorénavant l’affaire quant au fond ;

Considérant, à titre liminaire, que les réclamants arguent en ce qui concerne la seule année 2008 (les autres années touchées, le cas échéant, par la même problématique n’étant bizarrement pas évoquées) qu’il n’y aurait « pas lieu d’appliquer la prescription majorée de 10 ans tel que prévu (sic) par l’article 3 de la loi du 22 décembre 1951, telle que modifiée, et la prescription était acquise au contribuable pour l’exercice 2008, le 31/12/2013, sur base de la prescription quinquennale de droit commun » ; que les réclamants tentent de corroborer leur hypothèse de la prescription de l’année 2008 en arguant qu’il n’y aurait « eu dans ce dossier, ni absence de déclaration, ni déclaration inexacte, mais très clairement, des divergences d’interprétation de la loi entre le contribuable et l’Administration sur le caractère déductible de certaines dépenses », alors que « le caractère matériellement complet des déclarations » ne serait « pas en discussion » ;

Considérant qu’il y a toutefois lieu de réfuter lesdites allégations formulées à l’égard du bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2008, par le fait que seul un contrôle approfondi effectué par le Service de révision de l’Administration des contributions a permis de dégager la persistance remarquable avec laquelle les requérants se sont adonnés à créer toute une constellation de sociétés les plus diverses qui, en fin de compte, leur ont permis de largement optimiser, pour choisir un terme assez neutre, leur situation fiscale ; que l’aperçu à titre isolé des différents volets que comprend leur modèle d’affaires ne saurait en aucun cas refléter les buts réellement recherchés et, par ce biais, les conséquences fiscales qui s’en dégagent en cas d’acquiescement (implicite) par le bureau d’imposition ; qu’il aurait donc été impossible pour un bureau d’imposition seul, même à le supposer avoir fait son travail en son âme et conscience et de la manière la plus rigoureuse possible, sans possibilité de se rendre compte de tous les détails et modalités que seul un Service de révision est en mesure de se procurer à travers de longues et fastidieuses enquêtes, de détecter les implications réciproques dans les différentes sociétés que gèrent les réclamants, et d’en tirer des conclusions quant aux conséquences comptables, pécuniaires et fiscales qui s’en dégagent ;

qu’on ne saurait donc admettre une prescription de seulement 5 ans, étant donné que toutes les fois où il y a imposition supplémentaire pour déclaration incomplète ou inexacte, avec ou sans intention frauduleuse, la prescription est d’office de dix ans (alinéa 1er de l’article 10 de la loi modifiée de 1933) ; qu’il en est de même en ce qui concerne l’année 2009, sans que la problématique de la prescription ne soit toutefois expressément invoquée ; qu’en ce qui concerne par ailleurs le reste des années en cause, notamment celles où la prescription pourrait jouer et qui n’ont pas encore été imposées, force est de constater que la prescription a été interrompue à chaque fois par une renonciation explicite qu’ont signée les requérants ;

Considérant, quant au fond de l’affaire, que le rapport dressé par le réviseur du Service de révision fait état des constations suivantes :

Rapport des réviseurs … et … sur la vérification des livres et documents comptables du haras … …-… … L-… No dossier : … faite sur demande du préposé du bureau d’imposition … et portant sur. les exercices 2008 et 2015 inclusivement, Index :

A. Données générales…………………………Nos 1 - 6………………page 2 B. Comptabilité………………………………..Nos 7 - 8………………pages 3 – 4 C. Constations spéciales……………………..No 9…………………….pages 5 - 10 D. Conclusion…………………………………………………………….page 11 E. Remarque finale………………………………………………………page 12 A. DONNÉES GÉNÉRALES 1. Motif de la vérification :

§§162(9), 193 et 206(1) de la loi générale des impôts 2. Date de la clôture des exercices :

le 31 décembre 3. Déclarations et impôts contrôlés :

Impôt sur le revenu 2008 à 2015 4. Dernière révision fiscale :

néant Exercices contrôlés :

néant 5. Objet :

haras 6. Personnes ayant fourni des renseignements :

Monsieur … Monsieur …, comptable.

B. COMPTABILITÉ 7. Quant à la forme Les déclarations fiscales et les modelés 144 concernent les recettes et les dépenses du bénéfice agricole et forestier ont été confectionnés pour les années 2008 à 2015 par M. … de … à L-…. La comptabilité est tenue en utilisant la logiciel Sage BOB.

La fiduciaire a déclaré, depuis le commencement de l’activité en 2001, les résultats du haras en tant que bénéfice agricole et forestier. Le bureau d’imposition de … les a considérés comme perte agricole et forestière pour les années 2001 à 2005 et comme bénéfice commercial pour les années 2006 à 2009. Les impositions des années 2010 à 2015 n’ont pas encore été effectuées.

D’après l’article 61 de l’impôt sur le revenu, le bénéfice agricole et forestier est constitué par le résultat que le contribuable obtient par l’élevage ou l’engraissage d’animaux, lorsque la nourriture de ces animaux provient ou pourrait provenir de la culture du sol d’une unité d’exploitation agricole dans des proportions et selon des critères à déterminer par règlement grand-ducal. Sans préjudice de la condition de la provenance des denrées consommables, un règlement grand-ducal pourra fixer à l’endroit des contribuables qui font habituellement des achats de bétail en disproportion avec la nature et l’étendue de leur domaine agricole, un délai minimum entre l’achat et la vente pour que l’opération garde son caractère agricole.

Les chevaux tombent sous la dénomination de gros bétail, un terme utilisé pour l’ensemble des bêtes d’élevage à savoir bovins, chevaux, mulets et ânes.

Aux termes de l’article 14 LIR: « Sont considérés comme bénéfice commercial :

1. le revenu net provenant d’une entreprise commerciale, industrielle, minière ou artisanale. Est réputée entreprise commerciale, industrielle, minière ou artisanale, toute activité indépendante à but de lucre exercée de manière permanente et constituant une participation à la vie économique générale, lorsque ladite activité ne forme ni une exploitation agricole ou forestière ni l’exercice d’une profession libérale. [… ]».

S’il est vrai que l’article 14 LIR, qui définit le bénéfice commercial comme trouvant son origine dans une activité indépendante à but de lucre exercée de manière permanente et constituant une participation à la vie économique générale, n’est pas expressément applicable au bénéfice agricole et forestier, force est de retenir que sous l’intitulé bénéfices de la LIR figurent trois catégories de revenus, à savoir celles de bénéfice commercial, de bénéfice agricole et forestier ainsi que de bénéfice provenant de l’exercice d’une profession libérale. Ces trois catégories relevant de la fiscalité de l’entreprise ont en commun qu’elles remplissent toutes les trois les critères requis pour les entreprises commerciales. Ainsi, elles sont exercées à titre indépendant et dans un but de lucre, elles présentent une certaine continuité et les contribuables les exerçant participent à la vie économique en général.

Les documents suivants ont été présentés au réviseur :

˃ les extraits bancaires des comptes :

 …  …  …  …  …  … ˃ les balances des comptes généraux ;

˃ les grands-livres ;

˃ les pièces relatives aux frais.

8. Quant au fond Les déclarations fiscales des exercices révisés ont été remises au bureau d’imposition aux dates suivantes:

Exercice Date Date bulletin 2008 remise 21/12/2009 01/02/2012 2009 27/12/2010 15/05/2013 2010 21/12/2011 / 2011 21/12/2012 / 2012 16/12/2013 / 2013 18/12/2014 / 2014 23/12/2015 / 2015 29/12/2016 I Les objections et les critiques précises quant au fond sont reprises au chapitre C. Constatations spéciales ci-après.

Tous les montants de ce rapport, non libellés autrement, sont exprimés en EUR.

C. CONSTATATIONS SPECIALES Considérant que suivant déclarations des années 2001 à 2015 (2008-2015: années tombant sous la vérification du service de révision), les pertes engendrées par l’exploitation agricole de Monsieur … ont évoluées comme suit :

Année Résultat Recettes :

Recettes : pension Autres recettes Frais déclarés déclaré ventes chevaux et nourriture 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 TOTAL … … … … … Le détail des « Autres recettes » pour les années 2008 à 2015 est indiqué dans le tableau ci-dessous :

Année Autres recettes dont prestations … (*) divers 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 Total … … (*) divers : Il s’agit notamment de gains de change, d’escomptes obtenus, d’intérêts reçus, de vente matériel, de refacturation de frais, d’autres produits exceptionnels et de subventions destinées à promouvoir l’emploi.

En ce qui concerne les prestations … (voir dans les explications supplémentaires), il s’agit de montants uniques annuels comptabilisés auprès du … pour travaux de bureau effectués. En conséquence et suite aux explications supplémentaires invoquées ci-dessous, les prestations de … sont éliminées. Il s’agit de factures de complaisance dont la déduction est le cas échéant refusée auprès de … (voir rapport du service de révision de la société …).

Le premier tableau fait ressortir que les résultats sont nettement déficitaires et que les recettes sont de faible envergure par rapport aux frais déclarés. Aucun résultat positif n’a jamais été dégagé et les pertes engendrées par l’exploitation agricole de Monsieur … ont régulièrement été épongées par l’ensemble de ses revenus. Il a régulièrement déboursé des sommes importantes à titre de soutien de son exploitation agricole, sans que le moindre gain pécuniaire ne se soit cependant jamais réalisé à force de ses efforts dans ladite activité.

Un lien étroit entre ces dépenses et la recherche de la réalisation d’un revenu n’a jamais existé. Il est difficile d’admettre que l’activité agricole était exercée de manière structurée et avec la perspective raisonnable de dégager, au moins à moyen terme, un revenu positif.

La reproduction, l’élevage, le dressage et l’acquisition de poulains engendrent bien évidemment des coûts importants de fonctionnement. Monsieur … a confirmé dans ce contexte, qu’un cheval doit être formé pendant une période d’au moins sept ans et être présenté régulièrement à des concours pour pouvoir être négociable à la suite à un prix convenable.

Vu l’absence totale de bénéfices d’une période s’étalant actuellement sur 15 ans, vu l’existence d’autres revenus ayant permis de subvenir aux besoins de la famille … et vu les dépenses élevées et non proportionnées aux recettes, la déduction des pertes agricoles est mise en cause.

Le but de lucre est absent ce qui fait que le résultat déclaré est écarté sous la rubrique du bénéfice agricole et forestier et que l’activité est désignée d’amateur. Le but de toute activité professionnelle est la recherche d’un profit, l’exploitation ou l’activité en question doit donc présenter un caractère lucratif. Si ce caractère fait défaut, l’activité est considérée et requalifiée comme activité d’amateur, et son résultat, même passagèrement bénéficiaire, n’influence pas le revenu imposable.

Il faut que le contribuable puisse s’attendre du moins à longue durée et en tenant compte de tous les faits et circonstances de l’espèce, à réaliser un résultat positif engendré par son activité2 ; que ses « visées personnelles d’obtenir un gain au sens de la loi fiscale doivent être réalisables et qu’il ne suffit pas qu’elles se manifestent sous l’aspect d’efforts impropres à aboutir à un rendement économique »3.

La loi emploie uniformément le terme de bénéfice, qui suggère nécessairement un but de lucre. En effet, ce critère constitue le point commun de toute activité génératrice de revenus imposables et sert ainsi à différencier l’activité commerciale de l’activité d’amateur («Liebhaberei») et de l’activité purement bénévole, de manière que les activités qui ne sont pas tournées vers la réalisation d’un profit - encore que le but de lucre puisse être l’objectif accessoire et non pas principal de l’activité et que même la recherche d’un intérêt seulement modique procuré par les moyens investis suffit pour admettre un but de lucre, ne sont pas constitutives d’une entreprise commerciale ou d’une profession libérale pour ne pas être motivées par des intentions financières, mais par des intérêts purement privés, que les dépenses faites dans le cadre d’une telle activité ne sont pas déductibles en tant que dépenses d’exploitation et qu’un résultat négatif n’est pas considéré comme perte au sens de l’article 7 LIR4.

S’il est bien vrai que la perspective d’un résultat global positif n’est pas impérative, néanmoins faut-il que le contribuable procède à la recherche d’un gain pécuniaire, recherche qui s’exprime dans un comportement économiquement raisonnable, c’est-à-dire que les expectatives du contribuable doivent être réalisables et surtout qu’il doit déployer les efforts nécessaires et proportionnés propres à aboutir à un rendement économique. Dans l’hypothèse où la recherche d’un tel gain fait défaut, il y a lieu de présumer que l’activité répond uniquement aux aspirations et motivations personnelles du contribuable5.

Ein land- und forstwirtschaftlicher Betrieb im vorgenannten Sinne liegt vor, wenn eine land-und forstwirtschaftliche Betätigung selbstständig und nachhaltig sowie mit der Absicht, Gewinn zu erzielen, betrieben wird. Die Absicht der Gewinnerzielung zeigt sich in dem Bestreben, während des Bestehens des Betriebs, d. h. von seiner Gründung bis zu seiner Veräußerung, Aufgabe oder Liquidation aufs Ganze gesehen einen Gewinn zu erzielen. Ob der Steuerpflichtige eine derartige Absicht hatte, lässt sich als innere Tatsache nicht anhand seiner Erklärungen, sondern nur aufgrund äußere Umstände feststellen. Hierfür ist insbesondere von Bedeutung, ob der Betrieb bei objektiver Betrachtung nach seiner Art, der Gestaltung der Betriebsführung und den gegebenen Ertragsaussichten einen "Totalgewinn" in dem beschriebenen Umfang erwarten lässt. Ist danach bei objektiver Betrachtung ein positives Ergebnis nicht zu erwarten, kann der Steuerpflichtige gleichwohl nachweisen, dass er die objektiven Gegebenheiten verkannt und erwartet habe, dass zunächst angefallene Verluste im Laufe der weiteren Entwicklung des Betriebs durch Gewinne ausgeglichen würden und insgesamt ein positives Gesamtergebnis erzielt werden könne. Gelingt ihm auch dieser Nachweis nicht, so folgt daraus, dass er die verlustbringende Tätigkeit nur aus im Bereich seiner Lebensführung liegenden persönlichen Gründen oder Neigungen ausgeübt hat6.

2 BFH du 23.05.1965 : IV R 84/82; BStBl 111985,p.515 3 Conseil d’Etat du 7 mai 1958, n° 5456 du rôle et jurisprudence administrative constante 4 Cour adm.14 juillet 2015, n° 35070C du rôle.

5 Trib. Adm. 10 janvier 2007, n°21401 du rôle, Pas. Adm. 2012, V° Impôts, n°143.

6 BFH, Urteil vom 27. Januar 2000 IV R 33/99, BStBl II 2000,227 mit weiteren Nachweisen.

Nach der ständigen Rechtsprechung des BFH kommt es für die Abgrenzung zwischen Liebhaberei und einer einkommensteuerrechtlich bedeutsamen Tätigkeit, wie einem Gewerbebetrieb oder einer Land-und Forstwirtschaft, neben der Voraussetzung, dass der Betrieb nach betriebswirtschaftlichen Grundsätzen geführt wird, entscheidend darauf an, ob der Betrieb nach seiner Wesensart und der Art seiner Bewirtschaftung auf die Dauer gesehen nachhaltig mit Gewinnen arbeiten kann. Dies erfordert eine in die Zukunft gerichtete Beurteilung, wofür die Verhältnisse eines bereits abgelaufenen längeren Zeitraums wichtige Anhaltspunkte bieten7. Dauernde Verluste während eines Zeitraumes von - wenn keine besonderen Verhältnisse gegeben sind - etwa acht und mehr Jahren sprechen nach der Rechtsprechung des BFH für die Annahme einer Liebhaberei, weil der geschlossene Verlustzeitraum einer solchen Anzahl von Jahren eine ausreichende Grundlage für die Prognose bietet, dass der Betrieb bei gleichbleibender Form der Bewirtschaftung nicht geeignet ist, aus der Verlustzone herauszukommen und nachhaltige Gewinne zu erzielen.

L’expectative d’un bénéfice global par l’exploitation agricole de Monsieur … fait largement défaut. Ainsi, il est dès lors sans le moindre doute que l’activité agricole n’a pas été exercée dans un but de lucre, condition d’ailleurs indispensable afin de pouvoir être qualifiée de relever de la sphère professionnelle, de sorte que les conditions pour l’imposition d’un bénéfice ou d’une perte qui en résulterait, selon le cas, ne sont pas remplies.

Des pertes à hauteur de … EUR ont été réalisées pendant les années 2001 à 2015.

Lors de la vérification de la société … (voir dans les explications supplémentaires) par le service de révision, il a été constaté que Monsieur … s’est ingénié à déduire de multiples factures supplémentaires concernant le … au niveau de la société …. Cette façon de procéder lui a permis de minimiser davantage les pertes du Gestüt qui en cas de déductions intégrales auraient été encore beaucoup plus importantes.

Donc, l’activité n’étant pas exercée dans un but de lucre mais en tant qu’activité d’amateur avec des intérêts principalement privés et en raison de l’absence de résultats positifs depuis de longues années (actuellement 15 ans), la déduction des pertes à hauteur de … EUR pour les années 2008 à 2015 est refusée.

Le ménage des époux … disposait de revenus lui ayant permis de subvenir amplement à ses besoins et de couvrir les pertes accumulées par l’exercice de l’activité agricole.

En ce qui concerne les revenus à leur disposition, il s’agissait de dividendes provenant de la société à responsabilité limitée … (…) et de salaires provenant de la société sus-indiquée et de la société à responsabilité limitée …. Les deux sociétés en question sont également soumises à un contrôle par le service de révision.

En outre, sans les revenus indiqués ci-dessus, l’acquisition, les transformations et les aménagements de la maison d’habitation et de la sellerie n’auraient pas été réalisables.

A titre d’information, les divers investissements effectués pendant les années 1996 à 2015 sont repris dans le tableau suivant :

7 BFH, Urteil vom 27. Januar 2000 IV R 33/99, BStBl II 2000,227 mit weiteren Nachweisen.

Désignation du bien Année Prix Immeuble à … 1996 Frais d’acte 1996 Transformations 1996 à 2001 Total Aménagements divers 2001 à 2015 Aménagement sellerie 2011 à 2014 Installation électrique 2002 à 2015 Parc automobile 2001 à 2013 Matériel et outillage 2002 à 2015 Achats chevaux 2001 à 2015 Hengstleistungsprüfung 2008 et 2009 Total … EUR EXPLICATIONS SUPPLEMENTAIRES La société … a été constituée en date du 7 novembre 1996. L’associé unique, M. …, a souscrit et entièrement libéré les parts sociales. Immédiatement après la constitution de la société, M. …, représentant la totalité du capital social, s’est nommé gérant pour une durée indéterminée. Il a ainsi individuellement et sous sa seule signature les pleins pouvoirs pour engager la société pour tous actes, dans les limites fixées par son objet social ou la loi.

En qualité de dirigeant et d’unique associé de …, M. … dispose d’un compte courant au sein de son entreprise. Il s’agit d’un compte courant débiteur, M. … ayant plus de dettes que de créances envers sa société. Le solde débiteur du compte courant est à considérer comme un prêt hypothécaire sans terme convenu. Même si le solde débiteur du compte a augmenté pendant les quinze dernières années, situation due à un non remboursement du compte en question, des dividendes ont été distribués régulièrement.

La question se pose si on n’est pas en présence d’un abus des droits. Cette manière de procéder est contraire à l’intérêt de la société … et est appliquée pour favoriser une entreprise, à savoir le …, dans laquelle le dirigeant, Monsieur …, est intéressé directement ou indirectement. Cette problématique est développée et approfondie dans le rapport du service de révision établi à la suite de la vérification de la société ….

L’évolution du compte courant associé de M. … dans la société … pour les années 2001 à 2015 est renseignée à titre indicatif dans le tableau suivant :

Dette de l’associé Année envers la société … 31/12/2001 -

31/12/2002 7 -

31/12/2003 58 -

31/12/2004 221 -

31/1212005 238 -

31/12/2008 330 -

31/12/2007 213 -

31/12/2008 53 -

265 31/12/2009 -

31/12/2010 783 -

31/12/2011 701 -

31/12/2012 611 -

31/12/2013 1 103 - 1 31/12/2014 1 39 - 3 31/12/2015 1 26 - 2 1 35 Comme développé lors des différents entretiens avec Monsieur …, l’activité de la société … consiste à prester des activités de conseil dans le domaine alimentaire et plus particulièrement dans celui de la nutrition animale. Cette activité englobe: la production de produits de nutrition animale, les recherches de nouveaux clients et fournisseurs, l’entretien des relations et la négociation des prix avec les clients et fournisseurs existants et le développement de nouvelles stratégies commerciales et de nouveaux marchés.

… a encore comme objet la prise de participations dans d’autres sociétés, ainsi que l’assistance commerciale à ses filiales et aux sociétés du groupe. Il s’agit notamment de la société … ayant son siège au Danemark. « … is a world-wide group of partner driven distribution companies operating mainly within the Feed, Food and Pharma ingredients industries ». M. … est Member of the Board of Directors de la société danoise ainsi que Principal de la société … domiciliée à … aux Etats-Unis.

La société … verse mensuellement des commissions et annuellement des dividendes à Monsieur …, l’unique associé de …. Ces dividendes et ces prestations de service, qui sont des frais de conseil suivant Monsieur …, constituent les seules recettes de …. D’après lui, les prestations ainsi que les frais de voyages et de représentation engagés par … sont facturés mensuellement à …. Malheureusement Monsieur … n’est pas en mesure de présenter des pièces probantes (contrats de négociations avec des clients ou fournisseurs, contrats de nouvelles stratégies commerciales etc.) qui auraient démontré le caractère réel de ces prestations de services.

A titre indicatif, la société … a pour objet la création, la location et la vente de costumes et accessoires. Toutes les parts sociales ont été souscrites par Madame …-….

Parmi les recettes déclarées par … pour les années 2008 à 2015 figurent les prestations … suivantes :

Prestations Année … 2008 5 2009 0 4 2010 5 5 2011 0 5 2012 5 5 2013 1 3 2014 6 2015 Total … 2 8 7 En ce qui concerne les prestations …, il s’agit de montants uniques annuels comptabilisés auprès de la société … pour travaux de bureau effectués. Reste à savoir quel genre de travaux une société, ayant pour objet la création, la location et la vente de costumes et accessoires, effectue pour une société, active dans le domaine de la nutrition animale.

En résumé, les revenus à la disposition des époux … sont repris dans le tableau suivant :

Salaires bruts Dividende … Année … et … Brut Net 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 TOTAL … … … Donc effectivement, le ménage des époux … disposait pour les années 2008 à 2015 de revenus lui ayant permis de subvenir amplement à ses besoins et de couvrir les pertes accumulées par l’exercice de l’activité agricole.

D. CONCLUSION La déduction des pertes à hauteur de … EUR pour les années 2008 à 2015 est refusée.

Perte commerciale/ Perte Année agricole déclarée acceptée 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 TOTAL … … En considérant qu’un montant significatif d’impôt - soit en montant absolu - soit en rapport avec l’impôt annuel dû, a été éludé, le réviseur est d’avis que le § 396 de la loi générale des impôts (AO) est applicable. Il incombe au préposé du bureau … de déposer plainte auprès du procureur d’Etat à l’encontre de Monsieur ….

Considérant, d’une manière générale, qu’on entend par bénéfice commercial au sens de la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.) tout revenu qui remplit l’ensemble des conditions posées par l’article 14 ; que l’article 14 L.I.R. retient notamment à l’endroit de son alinéa 1er qu’est considéré comme bénéfice commercial le revenu net provenant d’une entreprise commerciale, industrielle, minière ou artisanale ; qu’est réputée entreprise commerciale, industrielle, minière ou artisanale, toute activité indépendante (1) à but de lucre (2) exercée de manière permanente (3) et constituant une participation à la vie économique générale (4), lorsque l’activité ne forme ni une exploitation agricole ou forestière (5) ni l’exercice d’une profession libérale (6) ;

Considérant que pour qu’une activité puisse être qualifiée de bénéfice commercial au sens de l’article 14, alinéa 1er L.I.R., il faut dès lors qu’elle remplisse simultanément plusieurs critères, dont quatre sont des critères positifs ((1) à (4)) et deux des critères négatifs ((5) et (6)) ; qu’en l’espèce, il n’est pas litigieux que les deux critères négatifs sont parfaitement remplis, de sorte qu’il reste à analyser si les quatre critères positifs (activité indépendante, à but de lucre, exercée de manière permanente et constituant une participation à la vie économique générale) sont remplis à leur tour ; qu’à cet égard soit évoqué qu’il n’appartient ni au bureau d’imposition ni d’ailleurs au directeur des contributions de douter des compétences ou de juger du professionnalisme de celui qui exerce l’activité, de tels critères n’étant pas prévus par la loi fiscale ;

Considérant qu’il peut valablement être admis qu’il n’existe d’un côté pas le moindre doute que l’activité d’élevage de chevaux est exercée de façon indépendante et de manière permanente, alors que de l’autre côté la condition de la participation à la vie économique se réalise bien évidemment à son tour, de sorte qu’il reste à analyser s’il y a existence d’un but de lucre ; que pour que cette dernière condition soit remplie, il faut que le contribuable puisse s’attendre, du moins à longue durée et en tenant compte de tous les faits et circonstances de l’espèce, à réaliser un résultat positif engendré par son activité (cf. BFH du 23.05.1985 ; IV R 84182 ; BStBI Il 1985, p.515) ; que ses « visées personnelles d’obtenir un gain au sens de la loi fiscale doivent être réalisables et qu’il ne suffit pas qu’elles se manifestent sous l’aspect d’efforts impropres à aboutir à un rendement économique » (cf.

Conseil d’Etat du 7 mai 1958, n° 5456 du rôle et jurisprudence administrative constante, entre autres TA du 14 juillet 2017, n° 38006 du rôle et TA du 27 septembre 2017, n° 38100 du rôle) ; que suivant les déclarations remises, les résultats engendrés par l’exploitation en cause se sont présentés comme suit durant les années 2001 à 2015 :

année résultat 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 Considérant qu’il va dès lors sans dire que les requérants ont régulièrement déboursé des sommes importantes à titre de soutien de leur exploitation, sans que le moindre gain pécuniaire ne se soit cependant jamais réalisé ; qu’il s’avère ainsi pour le moins douteux qu’un lien étroit et inhérent entre les dépenses engagées et la recherche de la réalisation de recettes ait jamais existé ; que cette hypothèse s’avère tant et plus corroborée et illustrée par le fait qu’une participation financière personnelle aux frais peut régulièrement être considérée comme un clair indice d’une absence de but de lucre ;

Considérant qu’il peut dès lors valablement être admis que l’expectative d’un bénéfice global par l’exploitation des réclamants a largement fait défaut en l’espèce ; qu’il est partant manifeste que l’activité d’élevage de chevaux n’a pas été exercée dans un but de lucre, condition d’ailleurs indispensable afin de pouvoir être qualifiée de relever de la sphère professionnelle, les conditions pour l’imposition d’un bénéfice ou d’une perte qui en résulterait n’étant par conséquence pas remplies ; que suite à l’ensemble des constatations relevées supra, il demeure sans le moindre conteste que c’est à bon escient que le réviseur a qualifié d’activité d’amateur l’activité d’élevage de chevaux des réclamants, et que c’est encore à bon escient que le bureau d’imposition a admis tel quel les conclusions du réviseur du Service de révision ;

Considérant en dernier lieu et en ce qui concerne notamment les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015, que le bureau d’imposition … a émis en date du 24 juillet 2018 des avis de contrôle rectifiant ceux du 10 juillet 2018 et refixant les montants perçus à titre de distributions cachées de bénéfice au sens de l’article 164, alinéa 3 L.I.R. par la réclamante en provenance de la société à responsabilité limitée … ; que les dits montants rectificatifs sont dès lors à prendre en considération à travers la présente décision sur réclamation en vertu des dispositions du § 243 AO ;

Considérant que pour le surplus, les impositions sont conformes à la loi et aux faits de la cause et ne sont d’ailleurs pas autrement contestées ;

Considérant que le redressement de l’impôt sur le revenu des années 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 fait l’objet des annexes 1, 2, 3, 4 et 5 qui constituent des parties intégrantes de la présente décision ;

En ce qui concerne les bulletins portant fixation de la base d’imposition de la contribution à l’assurance dépendance pour les années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 Vu l’article 378 de la loi du 19 juin 1998 portant introduction d’une assurance dépendance;

Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO) dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 228 AO) de la loi, qu’elles sont partant recevables ;

Considérant qu’en vertu de l’article 376 du Code des assurances sociales (CAS), l’assiette de la contribution à l’assurance dépendance est constituée par les revenus professionnels, les revenus de remplacement, ainsi que les revenus du patrimoine ;

Considérant qu’en l’espèce, les contributions à l’assurance dépendance relatives aux années litigieuses reposant justement sur les revenus expressément prévus à cette fin par la loi, s’avèrent donc dues ;

PAR CES MOTIFS dit les réclamations contre les bulletins de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 irrecevables pour défaut d’intérêt, les réclamations contre les bulletins (rectificatifs) de l’impôt sur le revenu des années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 ainsi que celles dirigées contre les bulletins portant fixation de la base d’imposition de la contribution à l’assurance dépendance pour les années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 en la forme, annule les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des années 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015, émis le 1 er août 2018, rejette les réclamations contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2008, 2009 et 2010, ainsi que celles dirigées contre les bulletins portant fixation de la base d’imposition de la contribution à l’assurance dépendance pour les années 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 comme non fondées, réformant in pejus en ce qui concerne les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015, émis le 18 juillet 2018, fixe l’impôt sur le revenu dû pour l’année 2011, y compris la contribution au fonds pour l’emploi, à … euros, fixe l’impôt sur le revenu dû pour l’année 2012, y compris la contribution au fonds pour l’emploi, à … euros, fixe l’impôt sur le revenu dû pour l’année 2013, y compris la contribution au fonds pour l’emploi, à … euros, fixe l’impôt sur le revenu dû pour l’année 2014, y compris la contribution au fonds pour l’emploi, à … euros, fixe l’impôt sur le revenu dû pour l’année 2015, y compris la contribution au fonds pour l’emploi, à … euros, renvoie au bureau d’imposition pour exécution, notamment pour imputation des retenues.[…] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 6 mars 2019, Monsieur … et Madame … ont introduit un recours tendant principalement à la réformation, et subsidiairement à l’annulation de la décision directoriale précitée du 6 décembre 2018.

Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 AO et de l’article 8 paragraphe (3) 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond sur le recours dirigé par un contribuable contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation de sa part contre un bulletin de l’impôt.

Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours principal en réformation, lequel est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il n’y a dès lors pas lieu d’examiner le recours en annulation introduit à titre subsidiaire.

Dans leur requête introductive d’instance, les demandeurs ont sollicité la jonction du recours sous examen avec un autre recours déposé par eux au greffe du tribunal administratif le 30 avril 2019, inscrit sous le numéro 42744 du rôle, introduit à l’encontre d’une décision du directeur du 30 janvier 2019 intervenue sur réclamation introduite par la société … SARL en date du 18 septembre 2018.

Une jonction entre différentes affaires est susceptible d’être prononcée, dans le souci d’une bonne administration de la justice, dans l’hypothèse où ces affaires concernent les mêmes parties et où elles ont trait au même objet8.

Etant donné que le recours inscrit sous le numéro 42744 du rôle se distingue du présent recours tant par son objet que par les parties en cause, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de jonction sous examen.

A l’appui de leur recours et en fait, les demandeurs expliquent que fin 1996, ils seraient devenus propriétaires des bâtiments du … afin d’y pratiquer l’élevage de chevaux, activité qui aurait nécessité des travaux de transformation coûteux notamment au niveau des étables existantes. Ces mêmes travaux n’auraient pu être effectués qu’au fur et à mesure en fonctions des fonds disponibles, les demandeurs précisant à cet égard qu’ils n’auraient pas pu bénéficier d’un crédit immobilier. En 2001, ils auraient finalement acquis leurs deux premières juments d’élevage.

8 Trib. adm., 12 juin 2003, n° 15385 du rôle, et trib. adm., 15 mai 2003, n° 14299 du rôle, confirmé par Cour adm., 15 juillet 2003, n° 16468C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Procédure contentieuse, n°939 et les autres références y citées.

Ils soutiennent ensuite qu’entre le tournant du siècle jusqu’à la crise financière de 2008, l’élevage de chevaux aurait connu une très forte croissance en Europe, ce qui les aurait amenés à engager des collaborateurs ayant les compétences particulières en dressage de poulains, alors que l’activité de dressage aurait été plus rentable que l’élevage proprement dit.

Ils précisent, par ailleurs, que l’élevage et le dressage d’un jeune cheval débuterait à l’âge de 3 ans et durerait entre 3 et 5 ans.

Leur premier investissement substantiel dans un animal aurait consisté dans l’achat du cheval « … » de race « … » pour un montant de …,- euros, lequel serait toutefois décédé au cours d’une intervention vétérinaire, décès que l’assurance de la clinique aurait refusé de couvrir. A la même époque, la chef de haras aurait été blessée à la colonne vertébrale lors d’un accident d’équitation et aurait été en congé de maladie pendant 6 mois. Toujours à la même époque, une personne de remplacement, en dépit de sa qualité d’être membre de l’équipe nationale danoise, aurait causé des blessures à un jeune cheval en formation.

Les époux …-… font encore valoir qu’à la suite de la crise financière, l’élevage de chevaux en Europe aurait chuté de 55 % et ce ne serait que depuis 2 ans que le marché du cheval d’élevage serait redevenu rentable, une fois que les poulains nés jusqu’en 2008 et formés jusqu’en 2015 auraient été « écoulés ». Ils estiment que le problème économique de leur écurie aurait résidé dans le fait qu’elle n’aurait pas eu la taille critique pour leur permettre de travailler de façon rentable dès le début, et ce, en raison de leurs moyens financiers restreints de l’époque, lesquels les auraient empêchés d’acquérir un nombre élevé de chevaux d’élevage et d’acquérir ou de prendre en bail des pâturages supplémentaires pour leurs poulains. Ainsi, une partie de ces mêmes poulains aurait dû être placée, moyennant paiement substantiel, dans des écuries à l’étranger.

Leur situation financière se serait toutefois entretemps améliorée alors qu’ils disposeraient d’un stock d’animaux estimé à …,- euros, ce qui leur permettrait, à l’avenir, de réaliser une marge bénéficiaire sur les ventes, les époux …-… donnant à cet égard à considérer que la viabilité d’une entreprise agricole s’acquerrait en termes de décennies et pas en termes d’années.

Ils s’étonnent, par ailleurs, de la divergence d’appréciation d’une administration à l’autre en arguant que l’administration de l’Enregistrement se serait, dans le cadre d’une révision, limitée à critiquer l’absence de déclaration intracommunautaire pour l’exercice 2012 avec les conséquences financières qui en découleraient, tout en dressant, pour le surplus, une image positive de leur exploitation.

En droit, les demandeurs reprochent en premier lieu au directeur de ne pas avoir conclu à la prescription quinquennale en ce qui concerne les années d’imposition 2008 et 2009, tout en se rapportant à prudence de justice en ce qui concerne les années 2010 à 2012 compte tenu des renonciations à la prescription qu’ils ont signées pour les mêmes années. A cet égard, ils réfutent plus particulièrement la conclusion de la partie étatique selon laquelle ils auraient fait preuve d’une persistance remarquable pour optimiser leur situation fiscale en créant « une constellation de sociétés les plus diverses », les demandeurs soutenant à cet égard que cette « constellation » se limiterait à deux sociétés à responsabilité limitée unipersonnelles, dans lesquelles chacun d’entre eux serait associé unique. Ils contestent, par ailleurs, l’affirmation de la partie étatique selon laquelle ils n’auraient fait que des déclarations d’impôt incomplètes et inexactes, en soutenant avoir tenu une comptabilité régulière dont le résultat aurait servi de base à ces mêmes déclarations, tout en précisant que l’objet du litige consisterait dans le refus par l’administration des Contributions directes de conclure à la déductibilité de dépenses faites et régulièrement comptabilisées.

Dans un deuxième temps, les demandeurs après s’être « offusqués » que le directeur aurait qualifié leur activité d’élevage d’activité d’amateur, se prévalent d’un arrêt de la Cour administrative du 18 janvier 20189, dont les conclusions seraient transposables en l’espèce, pour affirmer que même si leur exploitation avait connu des débuts difficiles, leurs efforts financiers importants, ainsi que l’engagement de personnel qualifié et le chiffre d’affaires conséquent réalisé, démontreraient à suffisance leur but de lucre. En mettant en exergue que le caractère indépendant, permanent et important de leur exploitation n’aurait pas été remis en cause par le directeur, ils font encore valoir que les contestations de ce dernier tourneraient autour de « l’élément intentionnel » d’obtenir un gain au sens de la loi fiscale. Ils en concluent que le « vrai débat » serait celui de la viabilité à long terme de leur exploitation et proposent de nommer un expert pour se prononcer sur la question suivante : « L’exploitation équestre portant la désignation … exploitée par les requérants est une entreprise agricole constituant une unité économique viable de par l’importance des moyens mis en place, et la compétence de gestion des exploitants, ainsi que les perspectives de développement du marché équestre.

Si les premières années d’existence n’ont pas permis de réaliser des bénéfices, ceci n’est pas dû à l’incompétence des exploitants, ou l’absence de chance de réussite péremptoire, mais à une situation conjoncturelle difficile avec une surabondance de poulains sur le marché, la nécessité d’injecter des fonds propres dans les immeubles à défaut de financement bancaire, et des faits de mauvaise fortune.

A l’heure actuelle, ces obstacles peuvent être considérés comme maîtrisés, et à condition d’une évolution stable du marché équestre, l’exploitation va générer un bénéfice à partir de 2021 ».

Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs, en prenant appui sur un arrêt de la Cour administrative du 11 décembre 201810, soutiennent que l’existence de pertes pendant plusieurs années dans le chef d’une entreprise agricole, ainsi que la participation financière personnelle des exploitants et le fait, pour ces derniers, de disposer de revenus complémentaires, ne permettrait pas d’exclure ipso facto le but de lucre dans leur chef. Ils estiment, par ailleurs, que d’un point de vue économique, et faute de tout subside étatique, l’exercice de l’activité d’élevage de chevaux ne serait pas possible sans que les exploitants participent personnellement aux dépenses y relatives.

Les demandeurs font encore valoir qu’il y aurait lieu de prendre en considération le cadre temporel pour apprécier selon les circonstances économiques concrètes, si le critère de la recherche du but de lucre est rempli en l’espèce. Ils sont ainsi d’avis que l’analyse de la présente espèce sous un point de vue économique sur une période de plusieurs années devrait amener à la conclusion qu’ils ont exercé l’activité d’élevage de chevaux conformément aux « us et coutumes » et dans un but de lucre, nonobstant l’absence de réalisation de bénéfices sur les années d’imposition litigieuses, les demandeurs instant à cet égard sur les dépenses qu’ils auraient engagées, sur leurs qualifications et leurs efforts, ainsi que sur le fait que le 9 Cour adm., 18 janvier 2018, n°40092C du rôle 10 Cour adm., 11 décembre 2018, n°41351C du rôle.

haras aurait toujours compté entre 4 et 8 salariés entre 2008 et 2018. Ils estiment, par ailleurs, que le fait que le chiffre d’affaires lié à la vente de chevaux entre 2008 et 2015 s’élèverait à …,- euros constituerait un autre élément important qui corroborerait la recherche d’un lucre dans leur chef.

En insistant de nouveau sur le fait qu’ils s’occuperaient « d’une niche » très particulière, à savoir celle du cheval de dressage, niche pour laquelle la clientèle serait très exigeante, ils affirment avoir manqué d’audace à leurs débuts en misant sur « le cheval à prix plus démocratique », lequel ne se vendrait pas. Ils auraient ainsi subi des pertes dues à une erreur d’appréciation dans leur chef, pertes qu’ils estiment néanmoins déductibles.

Ils en concluent qu’il ressortirait de tous ces éléments que leur activité d’élevage et de dressage ne consisterait pas dans un simple « hobby », mais constituerait une activité exercée en vue de la réalisation d’un bénéfice commercial, de sorte qu’il y aurait lieu de prendre en considération les dépenses et pertes d’exploitation déclarées par eux.

Au vu des considérations qui précèdent, ils concluent à la réformation de la décision directoriale litigieuse.

Le délégué du gouvernement, de son côté, conclut au rejet du recours pour n’être fondé dans aucun de ses moyens.

Avant tout progrès en cause, il convient de relever que si dans le cadre de leur requête introductive d’instance, les demandeurs ont certes affirmé qu’il y aurait lieu de réformer la décision directoriale litigieuse dans toute sa teneur, force est toutefois de constater que leurs moyens et développements n’ont trait qu’au seul volet relatif aux bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des années 2008 à 2015, les concernés ne contestant en effet ni la conclusion du directeur selon laquelle leurs réclamations sont irrecevables pour défaut d’intérêt pour autant qu’elles visent les bulletins de la base de l’assiette de l’impôt commercial communal des mêmes années, ni sa conclusion selon laquelle elles sont non fondées en ce qui concerne les bulletins portant fixation de la base d’imposition de la contribution à l’assurance dépendance pour les années en question. L’analyse du tribunal se limitera partant au seul volet relatif aux bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des années 2008 à 2015 de la décision directoriale litigieuse.

Force est ensuite de constater que les parties sont en désaccord sur la question de la durée du délai de prescription, l’Etat se prévalant de la prescription de dix ans pour cause de déclaration fiscale incomplète, voire inexacte, alors que les demandeurs estiment que la prescription quinquennale serait applicable.

A cet égard il y a en premier lieu de noter, en ce qui concerne la demande de communication des « documents de notification pertinents des précédentes impositions des [demandeurs] » formulée au dispositif de la requête introductive d’instance, que concomitamment à son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement a versé au greffe du tribunal administratif une copie du dossier fiscal, ensemble avec les renonciations à la prescription en ce qui concerne l’impôt sur le revenu, l’impôt commercial communal et l’assurance dépendance pour les années 2010 à 2012 signées par Monsieur …. Dans la mesure où les demandeurs n’ont pas fait état d’éléments qui leur feraient défaut ni d’éléments qui leur permettraient d’affirmer qu’ils n’auraient pas eu communication de l’intégralité du dossier fiscal à la base du présent litige, leur prédite demande est à rejeter pour défaut d’objet.

Il convient ensuite de relever qu’en matière d’impôt sur le revenu, le régime de la prescription est régi, non pas par les dispositions de l’AO, mais par celles de la loi modifiée du 27 novembre 1933 concernant le recouvrement des contributions directes, des droits d’accise sur l’eau de vie et des cotisations d’assurance sociale, telle que remise en vigueur par l’arrêté grand-ducal du 29 octobre 1946 qui, compte tenu de son libellé amendé, étendu et modifié, est à considérer dans son ensemble comme postérieure en date à la loi générale des impôts, même analysée sous le couvert de sa loi confirmative du 27 février 1946 concernant l’abrogation des lois de compétence de 1938 et 1939 et l’octroi de nouveaux pouvoirs spéciaux11.

L’article 10 de ladite loi du 27 novembre 1933, dans sa teneur initiale, dispose que « la créance du Trésor se prescrit par 5 ans, toutefois, en cas d’imposition supplémentaire pour déclaration incomplète ou inexacte, avec ou sans intention frauduleuse, la prescription est de dix ans.

Ces prescriptions s’appliquent à tous impôts, taxes, cotisations, droits d’accise, amendes, frais et autres perceptions généralement quelconques dont est chargée l’administration des contributions, sauf la prolongation conventionnelle des droits du Trésor.

La prescription prend cours à partir du 1er janvier qui suit l’année pendant laquelle la créance est née ».

Il se dégage des termes de l’article 10, alinéa 1er, initial de la loi du 27 novembre 1933 que pour les prescriptions extinctives visées, la prescription quinquennale constitue la règle, tandis que la prescription décennale, conditionnée par une imposition supplémentaire du chef de déclarations incomplètes ou inexactes, avec ou sans intention frauduleuse, représentait l’exception.

L’alinéa 1er de cet article a fait l’objet en 199912 d’une modification libellée comme suit : « La créance du Trésor se prescrit par cinq ans. Toutefois, en cas de non-déclaration ou en cas d’imposition supplémentaire pour déclaration incomplète ou inexacte, avec ou sans intention frauduleuse, la prescription est de 10 ans ».

Force est de constater qu’en l’espèce, il y a bien eu imposition supplémentaire des demandeurs, tantôt par le biais de bulletins rectificatifs, qu’à travers la décision directoriale litigieuse, l’administration fiscale ayant, suite au rapport de révision, jugée inexacte les déclarations d’impôts leurs soumis par les demandeurs pour les années fiscales litigieuses, de sorte que c’est à bon droit que l’administration des Contributions directes a retenu un délai de prescription décennal et non quinquennal.

A cela s’ajoute qu’il ressort des pièces versées par la partie étatique que Monsieur … a signé le 6 août 2015 une renonciation explicite à la prescription en ce qui concerne l’impôt sur le revenu, l’impôt commercial communal et l’assurance dépendance pour les années 2010 11 Voir trib. adm., 27 mai 1998, n° 10208 du rôle, cité sous Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 754 et les autres références y citées.

12 Art.3, loi du 24 décembre 1999 concernant le budget des recettes et des dépenses de l’Etat pour l’exercice 2000, Mém. A, n° 148, p.2675.

à 2012, de sorte que les demandeurs ne sauraient actuellement soulever la prescription relative à ces mêmes années d’imposition.

Il s’ensuit que les développements des demandeurs relatifs à une prescription quinquennale sont à rejeter pour ne pas être fondés.

En ce qui concerne le fond du recours, il convient d’abord de noter qu’il ressort du rapport dressé par le réviseur du service de révision, ainsi que de la décision directoriale sous analyse que les demandeurs ont, depuis le commencement de l’activité d’élevage litigieuse en 2001, déclaré les résultats du haras comme bénéfice agricole, tel que défini par l’article 61 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après désignée par la « LIR », lequel dispose en son alinéa 1er, point 1, que « Le bénéfice agricole et forestier est constitué par le résultat que le contribuable obtient:

1. par la culture du sol en vue de la production des plantes ou de parties de plantes telle que l’agriculture proprement dite, la sylviculture, la viticulture, l’horticulture, ainsi que les cultures maraîchère, fruitière, en pépinières, en serres. En ce qui concerne la sylviculture, la seule possession de terrains forestiers est à considérer comme exploitation forestière.

Lorsque le contribuable vend, dans le cadre et dans l’intérêt de son exploitation agricole, des produits agricoles achetés à des tiers, et que ces produits n’interviennent pas régulièrement pour une part importante en valeur, toutes les opérations de vente font partie de l’exploitation agricole. Un règlement grand-ducal pourra préciser la notion de part importante au sens de l’alinéa précédent en fixant des pourcentages en fonction, soit de la totalité des produits vendus, soit de la production propre de l’exploitation. Ces pourcentages pourront varier suivant le genre de l’exploitation;

2. par l’élevage ou l’engraissage d’animaux, lorsque la nourriture de ces animaux provient ou pourrait provenir de la culture du sol d’une unité d’exploitation agricole dans des proportions et selon des critères à déterminer par règlement grand-ducal. Sans préjudice de la condition de la provenance des denrées consommées, un règlement grand-ducal pourra fixer à l’endroit des contribuables qui font habituellement des achats de bétail en disproportion avec la nature et l’étendue de leur domaine agricole, un délai minimum entre l’achat et la vente pour que l’opération garde son caractère agricole;

3. par l’apiculture et par l’exploitation de viviers ne comportant pas d’installations spéciales de nature industrielle;

4. par la chasse et la pêche exercées par le contribuable en corrélation avec son exploitation agricole ou forestière. ».

Il échet à cet égard de relever que l’article 61 LIR ne fait que ranger dans une catégorie de revenus particulière le bénéfice engendré par certaines activités qui, à défaut de cette mesure, serait considéré comme bénéfice commercial au sens de l’article 14 LIR. Par ailleurs, force est de relever que les dispositions des articles 16 à 60 LIR concernant le bénéfice commercial sont applicables, en vertu de l’article 64 LIR, au bénéfice agricole et forestier.

Aux termes de l’article 14 LIR: « Sont considérés comme bénéfice commercial :

1. le revenu net provenant d’une entreprise commerciale, industrielle, minière ou artisanale. Est réputée entreprise commerciale, industrielle, minière ou artisanale, toute activité indépendante à but de lucre exercée de manière permanente et constituant une participation à la vie économique générale, lorsque ladite activité ne forme ni une exploitation agricole ou forestière ni l’exercice d’une profession libérale. […] ».

S’il est vrai que l’article 14 LIR, qui définit le bénéfice commercial comme trouvant son origine dans une activité indépendante à but de lucre exercée de manière permanente et constituant une participation à la vie économique générale, n’est pas expressément applicable au bénéfice agricole et forestier, force est de retenir que sous l’intitulé « bénéfices » de la LIR figurent trois catégories de revenus, à savoir celles de bénéfice commercial, de bénéfice agricole et forestier, ainsi que de bénéfice provenant de l’exercice d’une profession libérale.

Ces trois catégories relevant de la fiscalité de l’entreprise ont en commun qu’elles remplissent toutes les trois les critères requis pour les entreprises commerciales. Ainsi, elles sont exercées à titre indépendant et dans un but de lucre, elles présentent une certaine continuité et les contribuables les exerçant participent à la vie économique en général13.

D’ailleurs, pour ces trois catégories d’activités, la loi emploie uniformément le terme de bénéfice, qui suggère nécessairement un but de lucre. En effet, ce critère constitue le point commun de toute activité génératrice de revenus imposables et sert ainsi à différencier l’activité commerciale de l’activité d’amateur («Liebhaberei») et de l’activité purement bénévole, de manière que les activités qui ne sont pas tournées vers la réalisation d’un profit -

encore que le but de lucre puisse être l’objectif accessoire et non pas principal de l’activité et que même la recherche d’un intérêt seulement modique procuré par les moyens investis suffit pour admettre un but de lucre14 -, ne sont pas constitutives d’une entreprise commerciale ou d’une profession libérale pour ne pas être motivées par des intentions financières, mais par des intérêts purement privés, que les dépenses faites dans le cadre d’une telle activité ne sont pas déductibles en tant que dépenses d’exploitation et qu’un résultat négatif n’est pas considéré comme perte au sens de l’article 7 LIR15.

Ce critère du but de lucre implique notamment que l’activité en question soit structurée et exercée de manière à donner la perspective raisonnable de dégager, au moins à moyen terme, un revenu positif, ce qui implique que le contribuable adopte un comportement économiquement raisonnable, c’est-à-dire que ses expectatives doivent être réalisables et surtout qu’il doit déployer les efforts nécessaires et proportionnés propres à aboutir à un rendement économique16.

C’est l’intention du contribuable qui est déterminante ; si cette intention n’est pas douteuse, le but de lucre est donné même si l’opération se révèle déficitaire17.

En l’espèce, il est constant en cause que les époux …-… ont, à partir de l’année 2001 et pendant les années d’imposition litigieuses, à côté de leurs activités au sein des sociétés à responsabilité limitée … et …, exercé l’activité d’élevage et de dressage de chevaux, activité en relation avec laquelle ils ont entendu déduire, pour les années d’imposition litigieuses, les pertes y liées, tels qu’ils l’ont fait pour les exercices fiscaux précédents et tel que cela semble avoir été accepté par l’administration fiscale. Pour les années d’imposition litigieuses, l’administration fiscale a toutefois refusé de prendre en compte ces pertes au motif que l’activité d’élevage et de dressage de chevaux telle qu’exercée par les époux …-… ne pourrait pas être considérée comme ayant été exercée dans un but de lucre et ce, eu égard aux fortes 13 Alain Steichen, Manuel de droit fiscal, Droit fiscal spécial, Tome 2, éditions Saint Paul, 2006, p.1052, n° 1200.

14 Projet de loi concernant l’impôt sur le revenu, commentaire des articles, doc. parl. 5714, art. 17, p. 18.

15 Cour adm., 14 juillet 2015, n°35070C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n°239.

16 Idem.

17 Jean-Pierre Winandy, Les impôts sur le revenu et la fortune, éditions Promoculture, 4e édition, p. 330, n°327.

pertes qui ont été essuyées pendant de nombreuses années et aux montants importants que les demandeurs ont investi à titre personnel pour soutenir leur haras.

La partie étatique s’appuie plus particulièrement sur le résultat négatif annuel moyen réalisé par l’exploitation des demandeurs de 2008 à 2015 et sur l’absence de tout bénéfice pour conclure à l’absence de recherche d’un but de lucre.

Si en l’espèce, les années d’imposition litigieuses sont celles de 2008 à 2015 et qu’il appartient dès lors, en principe, au tribunal de prendre en compte la situation des contribuables au cours de ces seules années, il n’en demeure pas moins, tel que relevé ci-

dessus, que le critère du but de lucre que doit remplir une activité pour qu’une déduction de pertes déclarées dans le cadre de cette activité puisse avoir lieu, s’apprécie en tenant notamment compte du comportement économique adopté par les contribuables dans le but de dégager à moyen terme un revenu positif avec leur activité.

Il convient, par ailleurs, de souligner que s’il est vrai que, ne fût-ce que pour des raisons de prescription, un cadre temporel se situant endéans des limites de cinq ans peut apparaître a priori comme étant adéquat, le juge fiscal, appelé à statuer dans le cadre d’un recours en réformation, est néanmoins habilité, surtout pour des activités nécessitant une longue période de démarrage, telle que celle sous analyse, d’ouvrir, si la situation se présente devant lui, encore plus largement le cadre temporel en question18.

Le tribunal prendra dès lors en compte non seulement la situation de l’activité d’élevage et de dressage exercée par les époux …-… entre 2008 et 2015, mais également la période antérieure et subséquente, en fonction des documents probants lui soumis par les parties, étant plus particulièrement relevé que les années 2001 à 2015 couvrent une période de 15 ans dont il peut être raisonnablement admis qu’elle est de nature à refléter à suffisance le comportement économique adopté à moyen terme par les demandeurs pour rechercher un gain pécuniaire avec leur activité et qui aurait dû leur avoir permis d’aboutir à des résultats positifs dans cette recherche.

S’il est vrai, tel que le plaident à bon droit les demandeurs, que l’activité en question est soumise à de nombreux aléas et n’est pas de nature à amener à un profit instantané, et qu’il n’est, par ailleurs, pas contesté en cause que, d’un côté, les demandeurs ont connu des problèmes avec un de leur chevaux, à savoir le cheval « … » de race « … », acquis pour un montant de …,- euros, et que, de l’autre côté, la crise économique de ces dernières années a affecté la filière équine et plus particulièrement le marché de vente des chevaux, il ressort toutefois du rapport de révision, tel que versé en cause que, depuis le début de l’activité d’élevage et de dressage exercée par les demandeurs jusqu’en 2015, c’est-à-dire sur une période de 15 ans, celle-ci n’a engendré que des pertes. En effet, et tel que cela ressort de la décision directoriale citée in extenso ci-avant, le résultat déclaré pour les années 2001 à 2015 se situait entre …,- euros et …,- euros.

A cela s’ajoute que, parallèlement, il ressort du même rapport de révision, que les recettes d’exploitation générées par les époux …-… en relation avec l’activité d’élevage et de dressage litigieuse sont restées nettement inférieures aux dépenses engagées par ces derniers, de sorte que le tribunal est amené à conclure que ceux-ci n’ont pas exercé leur activité dans 18 Par analogie : Cour adm., 18 janvier 2018, n°40992C du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu l’objectif de réaliser un bénéfice et qu’en tout état de cause, ils n’ont pas adopté un comportement économiquement raisonnable.

Ce constat est conforté par le fait qu’aucun plan prévisionnel ou financier n’a été soumis au tribunal. Or, il peut légitimement être attendu de la part d’un exploitant qui entend réaliser à moyen terme un profit avec son activité d’élevage et de dressage qu’il établisse dès le début de son activité un plan prévisionnel et financier, une telle attitude ne pouvant être qualifiée de comportement économiquement raisonnable.

Quant aux efforts personnels mis en avant par les demandeurs et le fait qu’ils ont engagé divers salariés pour s’occuper de leur haras, ceux-ci ne sauraient, à eux seuls, invalider la conclusion que le fait de poursuivre une activité manifestement déficitaire pendant plus de 15 ans, en injectant, par ailleurs, des fonds personnels conséquents, fonds sans lesquels leur activité n’aurait pas pu survivre, n’est ni raisonnable ni explicable d’un point de vue économique.

Finalement, il ne ressort d’aucun élément soumis au tribunal que l’exploitation des demandeurs serait entretemps devenue rentable, tel qu’ils l’affirment dans leur requête introductive d’instance, étant rappelé à cet égard que la charge de la preuve des faits réduisant la cote d’impôts pèse, en vertu de l’article 59 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, sur les demandeurs. Si les demandeurs offrent certes de prouver par voie d’expertise que leur exploitation est rentable depuis 2021, cette offre de preuve est à rejeter dans la mesure où une prétendue rentabilité aurait été aisée de prouver en remettant au tribunal des documents comptables pertinents, ce que les demandeurs ont cependant omis de faire.

Par conséquent, au vu de l’absence totale de bénéfices non seulement pendant les années fiscales litigieuses, mais également au cours d’une période s’étalant sur 15 ans, voire au-delà, de l’existence d’autres revenus ayant permis de subvenir à leurs besoins et des dépenses élevées et non proportionnées aux recettes, le tribunal est amené à conclure que, pour ce qui est des années 2008 à 2015, les époux …-… ne lui ont pas soumis d’éléments probants permettant de retenir qu’ils auraient exercé leur activité d’élevage et de dressage de chevaux de manière structurée et avec la perspective raisonnable de dégager, au moins à moyen terme, un revenu positif, c’est-à-dire avec des intentions financières, mais, au contraire, afin de poursuivre des intérêts privés.

Il s’ensuit que les conditions pour la déduction de la perte résultant de l’exploitation du haras des demandeurs ne sont pas remplies et que c’est dès lors à bon droit que l’administration fiscale n’a pas déduit pour les années d’imposition litigieuses la perte agricole déclarée de ….- euros, de sorte que le recours sous analyse est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;

rejette la demande de jonction du présent rôle avec l’affaire introduite en date du 30 avril 2019 sous le n° 42744 du rôle ;

reçoit le recours principal en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

rejette la demande en institution d’une expertise ;

condamne les demandeurs aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 22 juin 2022 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Géraldine Anelli, premier juge, Alexandra Bochet, juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 22 juin 2022 Le greffier du tribunal administratif 27


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 42457
Date de la décision : 22/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-06-22;42457 ?

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