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03/06/2022 | LUXEMBOURG | N°43525,45813

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 03 juin 2022, 43525,45813


Tribunal administratif Nos 43525 et 45813 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits les 3 septembre 2019, 4e chambre respectivement 24 mars 2021 Audience publique du 3 juin 2022 Recours formés par la société anonyme SOCIETE 1 SA, …, contre deux décisions du directeur de l’administration des Contributions directes en matières d’impôt commercial communal et d’impôt sur le revenu des collectivités

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JUGEMENT

I) Vu la requête inscrite sous le numéro 43525 du rôle et déposé

e le 3 septembre 2019 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme Arendt & M...

Tribunal administratif Nos 43525 et 45813 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrits les 3 septembre 2019, 4e chambre respectivement 24 mars 2021 Audience publique du 3 juin 2022 Recours formés par la société anonyme SOCIETE 1 SA, …, contre deux décisions du directeur de l’administration des Contributions directes en matières d’impôt commercial communal et d’impôt sur le revenu des collectivités

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JUGEMENT

I) Vu la requête inscrite sous le numéro 43525 du rôle et déposée le 3 septembre 2019 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme Arendt & Medernach SA, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue John F. Kennedy, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B186371, représentée aux fins des présentes par Maître Alain Goebel, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom et pour le compte de la société anonyme SOCIETE 1 SA, établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonction, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 4 juin 2019 ayant déclaré non fondé sa réclamation du 12 janvier 2018 dirigée contre les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et les bulletins de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2012 et 2013, tous émis en date du 25 octobre 2017, et les ayant réformé in pejus ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 16 décembre 2019 ;

Vu le mémoire en réplique déposé le 14 janvier 2020 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme Arendt & Medernach SA, préqualifiée, pour le compte de sa mandante ;

II) Vu la requête inscrite sous le numéro 45813 du rôle et déposée le 24 mars 2021 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme Arendt & Medernach SA, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue John F. Kennedy, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B186371, représentée aux fins des présentes par Maître Alain Goebel, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom et pour le compte de la société anonyme SOCIETE 1 SA, établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonction, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, tendant à la réformation sinon à l’annulation des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et les bulletins de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2014 et 2015, tous émis le 17 juillet 2019, respectivement le 11 mars 2020 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé le 22 juin 2021 au greffe du tribunal administratif ;

Vu le mémoire en réplique déposé le 22 septembre 2021 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme Arendt & Medernach SA, préqualifiée, pour le compte de sa mandante ;

I) et II) Vu les pièces versées en cause et notamment les décision directoriale et bulletins critiqués ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Alain Goebel et Monsieur le délégué du gouvernement Éric Pralong en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 novembre 2021.

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En date des 25 juillet 2012, 26 mars et 8 octobre 2014, le bureau d'imposition Luxembourg sociétés 2 de l’administration des Contributions directes, dénommé ci-après « le bureau d'imposition », émit, à l’égard de la société anonyme SOCIETE 1 SA, dénommée ci-

après « la société SOCIETE 1 », respectivement les bulletins d’imposition du revenu des collectivités et les bulletins de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des années 2011 à 2013 en vertu du paragraphe 100a de la loi générale d’impôt du 22 mai 1931, dite « Abgabenordnung », en abrégé « AO ».

Par courrier du 15 juin 2015 le bureau d'imposition s’adressa à la société SOCIETE 1 dans les termes suivants :

« (…) Après réexamen de votre dossier et afin de le compléter, je vous prie de nous fournir pour les années 2011 à 2013 des informations complémentaires sur le poste ,marques et franchises’ (sub autres charges d’exploitation, … euros ; … euros ; … euros portés en déduction), à savoir :

1) quelle en est la relation économique exacte ? 2) merci de nous faire parvenir copie du contrat passé respectif 3) Nous faire parvenir aussi copie des factures que SOCIETE 1 a reçues 4) Nous faire parvenir enfin encore une preuve du paiement des redevances payées en question (…) ».

Suite à la prise de position de la société SOCIETE 1 du 30 juin 2015, le bureau d'imposition s’adressa à cette dernière par un courrier du 28 août 2017, rédigé en les termes suivants :

« (…) Après analyse détaillée effectuée par la division économique de l'Administration des Contributions Directes, le bureau d'imposition Sociétés 2 est amené à faire des redressements pour ce qui concerne les redevances payées par SOCIETE 1 SA à la société liée SOCIETE 2 SA (no fiscal …).

Les redressements en question sont effectués sur base de l'article 56 LIR qui prévoit que si les conditions au niveau commercial entre deux entreprises liées diffèrent de celles qui seraient convenues entre des entreprises indépendantes, les bénéfices de ces entreprises (liées) seront déterminés aux conditions qui prévalent entre entreprises indépendantes et imposés en conséquence.

Pour les années 2011 à 2015 cela donne:

2011: redevances déduites = …; redevance fiscalement admise = …; différence = … 2012: redevances déduites = …; redevance fiscalement admise = …; différence = … 2013: redevances déduites = …; redevance fiscalement admise = …; différence = … 2014: redevances déduites = …; redevance fiscalement admise = …; différence = … 2015: redevances déduites = …; redevance fiscalement admise = …; différence = … Les chiffres correspondant à ,différence’ constituent les redevances excédentaires au prix de pleine concurrence et sont à réintégrer dans la base imposable de SOCIETE 1 SA -

par analogie, les redevances excédentaires devraient ne plus être inclues dans la base imposable du donneur de licence Merci, de prendre position, le cas échéant, pour le 21 septembre au plus tard (…) ».

Par un courrier du 15 septembre 2017, entrée à l’administration des Contributions directes en date du 18 septembre 2017, la société SOCIETE 1 fit parvenir ses observations au bureau d'imposition.

En date du 25 octobre 2017, le bureau d'imposition émit les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal pour les années 2012 à 2013 à l’égard de la société SOCIETE 1 .

Par l'intermédiaire de son litismandataire de l’époque, la société SOCIETE 1 introduisit en date du 12 janvier 2018 auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, dénommé ci-après le « directeur », une réclamation contre les bulletins d'imposition précités du 25 octobre 2017.

En date du 24 octobre 2018, le directeur adressa un courrier de mise en état à la société SOCIETE 1 , l’invitant, en application des paragraphes 171, 228, 235, 243, ainsi que 244 AO :

« (…) à expliquer la raison pour laquelle elle a payé des redevances pour l'usage de la marque de fabrique et de commerce « MARQUE 1 » déposée le 7 juin 2010 auprès de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (OHMI) par la société anonyme SOCIETE 2 , avec siège social à L-…, alors que la marque précitée a déjà été enregistrée par la société anonyme SOCIETE 3 , avec siège social à L-…, sous le n° … auprès de l'OHMI en date du 23 février 2007, à expliquer pourquoi la marque « MARQUE 1 » (n° …) a été enregistrée dans les classes 16, 35 et 41, alors que celle nouvellement déposée et figurant sous le n° … auprès de l'OHMI a été enregistrée dans les classes 9, 38 et 42, à expliquer à quelle date précise l'enregistrement de la marque « MARQUE 1 » (n° …) n'a pas été renouvelé voire expiré (…) », tout en demandant que les pièces demandées, ensemble avec d'éventuelles observations écrites, soient présentées pour le 30 novembre 2018 au plus tard.

Suite à la prise de position de la société SOCIETE 1 , par le biais de son litismandataire actuel en date du 30 novembre 2018, le directeur procéda à une nouvelle mise en état en date du 12 février 2019, dans les termes suivants :

« (…) Vu les paragraphes 228 et 235 ainsi que les paragraphes 243, 244 et 171 de la loi générale des impôts ;

la réclamante est invitée à fournir un organigramme renseignant de façon exhaustive les actionnaires (personnes physiques et morales) avec leurs quotes-parts de détention dans le capital de chaque société du groupe « GROUPE », antérieurement et postérieurement à la restructuration du 24 septembre 2012, à indiquer de manière chronologique, l'évolution de l'actionnariat des sociétés anonymes « SOCIETE 1 », « SOCIETE 2 », « SOCIETE 4 » et « SOCIETE 3 » en ce qui concerne les années 2011, 2012 et société à responsabilité limitée « SOCIETE 5 » en ce qui concerne les années 2011 et 2012.

Les pièces demandées sont à présenter, ensemble avec d'éventuelles observations écrites, (…) pour le 18 mars 2019 au plus tard. (…) ».

La société SOCIETE 1 répondit à cette mise en état par un courrier de son litismandataire du 18 mars 2019.

Par une décision du 4 juin 2019, portant le numéro de rôle C 24332, le directeur annula les bulletins rectificatifs de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2011, tout en réformant in pejus les bulletins sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2012 et 2013. Cette décision est libellée comme suit :

« (…) Vu la requête introduite le 15 janvier 2018 par Me Christian Rollmann, de l'étude Kronshagen, complétée par la société anonyme Arendt & Medernach, au nom de la société anonyme SOCIETE 1 , avec siège social à L-…, pour réclamer contre les bulletins rectificatifs de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2011, ainsi que contre les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2012 et 2013, tous émis le 25 octobre 2017 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu la mise en état du directeur des contributions du 24 octobre 2018, en vertu des §§ 243, 244 et 171 de la loi générale des impôts (AO), ainsi que la réponse y relative de la réclamante entrée le 3 décembre 2018 ;

Vu la mise en état du directeur des contributions du 12 février 2019, en vertu des §§ 243, 244 et 171 AO, ainsi que la réponse y relative de la réclamante entrée le 20 mars 2019 ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254, alinéa 2 et 301 AO ;

Considérant que si l'introduction de plusieurs instances par une seule et même requête n'est incompatible, en l'espèce, ni avec le secret fiscal, ni avec les règles de compétence et de procédure, elle ne dispense pas d'examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu'il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes ; qu'il n'y a pas lieu de la refuser en la forme ;

Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 228 AO) de la loi, qu'elles sont partant recevables ;

Considérant que la réclamante fait grief au bureau d'imposition de ne pas avoir déduit en intégralité les redevances payées à sa société-mère, i.e. la société anonyme SOCIETE 2 , pour l'usage ou la concession de l'usage de quatre marques de fabrique ou de commerce, en l'occurrence « GROUPE », « MARQUE 1 », « MARQUE 2 » et « MARQUE 3 » ;

Considérant qu'en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d'office un réexamen intégral de la cause, la loi d'impôt étant d'ordre public ;

qu'à cet égard le contrôle de la légalité externe de l'acte doit précéder celui du bien-

fondé ;

qu'en l'espèce la forme suivie par le bureau d'imposition ne prête pas à critique ;

Considérant que le bureau d'imposition a émis les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2011, 2012 et 2013 en vertu du § 100a AO respectivement en dates du 25 juillet 2012, du 26 mars 2014 et du 8 octobre 2014 ; qu'en date du 13 octobre 2016 il a fait parvenir à la réclamante une déclaration de renonciation à la prescription concernant, entre autres, l'impôt sur le revenu des collectivités de l'année 2011 et l'impôt commercial communal de l'année 2011 ;

que cette déclaration a été signée et renvoyée par la réclamante le 7 novembre 2016, de sorte que les impôts sus-énoncés ne sont pas prescrits au 31 décembre 2016 ;

Considérant qu'en exécution du § 205, alinéa 3 AO, le bureau d'imposition a informé la réclamante en date du 28 août 2017, que les redevances comptabilisées au titre des années 2011, 2012 et 2013 ne seraient pas déductibles en intégralité ;

Considérant qu'aux termes du § 205, alinéa 3 AO des divergences notables par rapport à la déclaration du contribuable doivent, pour autant qu'elles soient en sa défaveur, lui être communiquées pour observation préalablement à l'émission du bulletin ; que le but du § 205, alinéa 3 AO, en tant que principe de bonne administration, consiste à vérifier les conclusions auxquelles tend une instruction en défaveur du contribuable et partant à éviter d'éventuels malentendus ;

Considérant que suite au prédit courrier, la réclamante s'est montrée insatisfaite quant aux divergences en sa défaveur, tandis qu'elle n'a pas apporté des éléments nouveaux et révélateurs au bureau d'imposition ; qu'il s'ensuit que le bureau d'imposition a procédé aux impositions des années litigieuses en se référant aux redressements communiqués dans son courrier du 28 août 2017 ; qu'il a émis le 25 octobre 2017, d'une part, les bulletins rectificatifs de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2011 en vertu du § 222, alinéa 1er, n° 1 AO (faits nouveaux), et, d'autre part, les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2012 et 2013 en vertu du § 100a, alinéa 2 AO (contrôle ultérieur) ;

En ce qui concerne les bulletins rectificatifs de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2011 Considérant que les bulletins originaires de l'année 2011, émis en date du 25 juillet 2012 en vertu du § 100a, alinéa 1er AO, ont été redressés sur base du § 222, alinéa 1er, n° 1 AO par des bulletins rectificatifs du 25 octobre 2017 ;

Considérant, à titre explicatif, qu'un bulletin d'impôt ne peut être rectifié en vertu du § 222, alinéa 1er AO que dans la mesure où le bureau d'imposition a pris connaissance de faits ou de moyens de preuve nouveaux justifiant une augmentation de la cote d'impôt pour autant que l'impôt n'est pas atteint par la prescription, celle-ci voyant son délai prorogé de 5 à 10 ans, conformément à l'article 10 de la loi du 27 novembre 1933 concernant entre autres le recouvrement des contributions directes dans les cas visés justement par le § 222 AO ;

Considérant que la réclamante a cependant parfaitement déclaré les dépenses d'exploitation, en l'occurrence les redevances litigieuses, lors de la remise de sa déclaration pour l'impôt sur le revenu des collectivités et pour l'impôt commercial communal de l'année 2011, de sorte qu'on ne saurait lui reprocher d'avoir tenté de dissimuler la déduction des redevances, ce qui, le cas échéant, aurait occasionné le recours aux dispositions du § 222, alinéa 1er AO afin d'émettre un bulletin rectificatif ;

que le fait de s'abstenir de déclarer, intentionnellement ou non, une partie de ses revenus, fût-elle substantielle, constitue justement l'élément essentiel de la raison d'être du § 222, alinéa 1er AO ; qu'admettre le contraire impliquerait à se demander quoi d'autre serait susceptible de justifier et de légitimer son existence même, l'idée fondamentale à la base de ce paragraphe étant précisément celle de créer une base légale qui permet au bureau d'imposition d'émettre, postérieurement à l'émission des bulletins d'impôt initiaux/originaires, des bulletins rectificatifs prenant en compte l'ensemble des faits dont il n'avait pas connaissance auparavant ; que cela signifie, a contrario, que le § 222 AO ne saurait jamais être invoqué de la part du bureau d'imposition, chaque fois qu'il a eu connaissance de l'événement qu'il tente de redresser, avant l'émission du bulletin rectificatif proprement dit ;

Considérant encore qu'en ce qui concerne plus particulièrement la notion de « neue Tatsache », terme contenu dans le n° 1 du § 222, alinéa 1er AO, il importe de mettre en exergue que celle-ci englobe tout fait ou acte quelconque qui est susceptible de constituer isolément ou ensemble avec d'autres faits ou actes une base d'imposition de l'impôt en cause et dont le bureau d'imposition compétent n'a eu connaissance qu'après l'émission du bulletin d'impôt initial sans que le contenu des déclarations antérieures du contribuable n'ait été de nature à donner lieu à des doutes raisonnables dans le chef du bureau d'imposition ; que l'administration est dès lors fondée à émettre des bulletins rectificatifs chaque fois que le contribuable a fourni, dans sa déclaration fiscale initiale, des indications inexactes, insuffisantes ou incomplètes par rapport à la nature de l'impôt ;

Considérant, en guise de conclusion, que le bureau d'imposition avait à sa disposition les données nécessaires quant à la problématique de la reconnaissance, ou non, des redevances en tant que dépenses d'exploitation, ceci bien avant que les bulletins originaires de l'année 2011 furent émis et notifiés, de sorte que force est dorénavant de procéder par l'annulation pure et simple des bulletins rectificatifs de l'année 2011, étant donné que ceux-ci ont été émis sur base d'une disposition légale non applicable en l'occurrence ;

En ce qui concerne les bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2012 et 2013 Considérant que les bulletins originaires des années 2012 et 2013 ont été émis le 26 mars 2014 respectivement le 8 octobre 2014 en vertu du § 100a, alinéa 1er AO ; qu'en application du § 100a, alinéa 2 AO (contrôle ultérieur) le bureau d'imposition a émis des bulletins d'impôt au sens du § 210 AO en date du 25 octobre 2017 ;

Considérant que la réclamante reproche au bureau d'imposition « une taxation à un montant moindre de dépenses d'exploitation annuelles déclarées pour redevances payés (sic) sur marques utilisées appartenant à la société liée SOCIETE 2 S.A. » ; qu'en l'occurrence, le bureau d'imposition n'a admis en tant que dépenses d'exploitation que les montants de … euros (année 2012) et … euros (année 2013) au lieu de … euros (année 2012) et … euros (année 2013) déclarés par la réclamante ; qu'il a motivé sa décision par le fait que le principe de pleine concurrence (« arm's length principle ») n'aurait pas été respecté ;

Considérant que la question pertinente en l'espèce est celle de savoir si les redevances payées par la réclamante sont déductibles selon les prémisses de l'article 45, alinéa 1er de la loi concernant l'impôt sur le revenu (L.I.R.) qui prévoit que : « Sont considérées comme dépenses d'exploitation déductibles les dépenses provoquées exclusivement par l'entreprise. » ;

Considérant, à titre liminaire, qu'il convient de présenter brièvement la réclamante ;

qu'elle est la société opérative du groupe « GROUPE » (ci-après : groupe GROUPE ), groupe d'entreprise d'édition indépendante dédié à la publication de magazines, guides et événements sur le marché luxembourgeois ; que parmi les publications du groupe GROUPE figurent les magazines « MARQUE 1 », « MARQUE 4 », « MARQUE 3 » et « MARQUE 2 » ; qu'il se dégage notamment du site internet du groupe GROUPE que « Notre marque phare MARQUE 1 atteint les decision makers via un écosystème unique composé d'un business club de plus de 900 entreprises membres, d'un magazine mensuel, d'un site d'actualité couplé à une newsletter biquotidienne, d'un site d'offres d'emploi et d'un guide B2B annuel » ; qu'en date du 4 mai 2010 la société à responsabilité limitée SOCIETE 6 a constitué la société anonyme SOCIETE 2 afin d'y loger les marques « GROUPE », « MARQUE 1 », « MARQUE 3 » et « MARQUE 2 » ; que la société anonyme SOCIETE 2 , nouvellement créée, a dorénavant perçu des redevances pour l'usage ou la concession de l'usage des marques susmentionnées de la part de la réclamante, alors qu'il s'agit précisément de la facturation de ces redevances qui fait l'objet du présent litige ;

Considérant que le bureau d'imposition s'est basé sur un rapport de la division économique de l'administration des contributions directes afin de fonder sa décision de ne prendre en compte en tant que redevances déductibles que les frais supportés par le titulaire des marques, augmentés d'une marge bénéficiaire de 5 pour cent, au motif que les redevances déclarées par la réclamante ne correspondraient pas au principe de pleine concurrence ;

Considérant, factuellement, qu'un « CONTRAT DE LICENCE DE MARQUE » a été conclu le 1er janvier 2010 entre la société à responsabilité limitée SOCIETE 6 et la réclamante (anciennement SOCIETE 7 S.A.) ; que ledit contrat prévoit la concession d'une licence à la réclamante pour l'édition de magazines sous la marque « MARQUE 1 », enregistrée le 23 février 2007 à l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (OHMI) sous le numéro … par la société anonyme SOCIETE 3 ; qu'il doit être admis que cette dernière a cédé entre le 23 février 2007 et le 1er janvier 2010 la marque « MARQUE 1 » à la société à responsabilité limitée SOCIETE 6, étant donné que le contrat de licence sus-énoncé renseigne que « Le bailleur de la licence [la société à responsabilité limitée SOCIETE 6] est propriétaire de la marque MARQUE 1 , enregistrée à l'OHMI. Sous le numéro … » ; qu'il y a d'ores et déjà lieu de relever que le contrat ne porte qu'une seule signature, ce qui est pour le moins étonnant vu que deux sociétés - apparemment - distinctes s'y trouvent impliquées ; que la clause 5 du contrat stipule le versement au propriétaire de la marque d'un droit unique s'élevant à … euros ; que le point 2 de la clause 6 a comme objet « Les droits de licence d'exploitation courants » en se référant « à la clause 5, paragraphe 2m phrase 1 de ce contrat » respectivement « à la clause 5m paragraphe 2, phrase 4 », alors que les « paragraphe 2m » ou « clause 5m » n'existent pas dans le contrat en question ;

Considérant que la société anonyme SOCIETE 2 a derechef déposé la marque « MARQUE 1 » auprès de l'OHMI en date du 7 juin 2010 ; que cette marque a été enregistrée le 22 octobre 2010 sous le numéro … ;

Considérant qu'en date du 1er septembre 2011, un nouveau « CONTRAT DE LICENCE DE MARQUE » a été conclu entre la société anonyme SOCIETE 2 et la réclamante, contrat qui porte la signature de l'administrateur-délégué des sociétés en cause, i.e. deux fois celle du sieur …, fondateur du groupe GROUPE et administrateur-délégué des deux sociétés ; que le nouveau contrat de licence prévoit l'exploitation des marques reprises à l'annexe 1 du contrat, en l'occurrence des marques « GROUPE », « MARQUE 1 », « MARQUE 2 » et « MARQUE 3 » ; qu'en termes de redevances à payer par la réclamante, le point 7 retient ce qui suit : « A titre de redevances, le Preneur de Licence paiera au concédant un montant forfaitaire annuel minimal, complété éventuellement d'un montant proportionnel calculé sur la base du chiffre d'affaires hors taxes réalisé par le Preneur de Licence, soit :

· Un montant forfaire (sic) de deux-cents-cinquante mille (sic) Euros (…,-€) par an ainsi que · dix pour cent ( 10%) du chiffre d'affaires hors taxes » ;

qu'en ce qui concerne la marque « GROUPE » le taux de redevances a été porté à 9 pour cent le 20 décembre 2012 ;

Considérant que le bureau d'imposition, doutant de la réalité économique des contrats de licence susmentionnés, a sollicité l'avis de la division économique afin de trancher si les redevances comptabilisées par la réclamante correspondent au principe de la pleine concurrence ;

Considérant qu'il ressort de l'« Analyse financière du preneur de licence [i.e. de la réclamante] » du rapport de la division économique ce qui suit :

2. Analyse financière du preneur de licence (LuxCO 2) Tableau 1 Année 2011 2012 2013 2014 2015 Frais de publicité et … … … … … autres frais en relation avec le développement de Marque Redevances payées … … … … … Total chiffre d’affaires … … … … … Total charges … … … … … opérationnelles (hors redevances) Total charges … … … … … opérationnelles (redevances inclues) Marge opérationnelle … … … … … (hors redevances) Marge opérationnelle … ..

… … … (redevances inclues) Différence de marge … … … … … due aux redevances qu'en ce qui concerne les seules années litigieuses, la réclamante a engagé des frais de publicité et autres frais en relation avec les marques à hauteur de … euros (année 2012) et … euros (année 2013) ; que d'un autre côté, la société anonyme SOCIETE 2 n'a comptabilisé que des frais minimes se chiffrant à … euros (année 2012) et … euros (année 2013) ; qu'il y a lieu de se poser la question sur le bien-fondé d'une telle opération, à savoir, que la réclamante supporte quasiment tous les frais en relation avec les marques en question, tandis que de l'autre côté, elle fait encore verser des redevances à des taux allant de 9 à 10 pour cent appliqués sur les chiffres d'affaires générés par les marques qu'elle-même a entretenues et soignées ;

Considérant que suite à la facturation des redevances, les marges opérationnelles des marques ont été ramenées de -0,21 pour cent à -10,63 pour cent (année 2012) et de 10,01 pour cent à 1,69 pour cent (année 2013) ; que force est de mettre en exergue que pour l'année 2012, année pour laquelle la marge opérationnelle a déjà été négative, la facturation de redevances a entraîné une perte opérationnelle de la réclamante de non moins de (… - … - … i.e.) -… euros ;

Considérant, en matière de principe et à titre de point de départ de l'ensemble des réflexions développées de façon détaillée ci-après, qu'un des grands préceptes de base en matière de la fiscalité directe édicte que l'impôt qui est fixé dans le chef d'un certain contribuable se doit toujours de respecter méticuleusement la capacité contributive de ce dernier, s'agît-il, comme en l'espèce, de plusieurs contribuables agissant ensemble sous le toit d'un même groupe d'entreprises, les acteurs étant en outre contraints d'agir comme entre tiers pour ce qui est des actes commerciaux intragroupes qu'ils entreprennent ; qu'en d'autres termes, plus un contribuable a réalisé de revenus imposables durant une période donnée, plus la quote-part des revenus qu'il est contraint de céder à titre d'impôts au profit du public augmente ; qu'il y a lieu de mettre en exergue que cette idée fondamentale à la base de la perception des impôts directs se trouve notamment ancrée dans les paragraphes 5 (« le droit fiscal doit s'attacher à des faits réels de sorte que, pour les besoins de l'imposition, il n'y a pas lieu de tenir compte de simulations »), 6 (« lors d'un abus de droit, les impôts sont à percevoir de la même manière qu'ils l'auraient été au cas d'une conception juridique tenant compte des activités, des relations et de la réalité économique ») et 11 (« principe de l'appréciation d'après les critères économiques ») de la loi d'adaptation fiscale (StAnpG) ;

Considérant que dans cet ordre d'idées, il a été retenu maintes et maintes fois en jurisprudence « que la juridiction saisie ne saurait s'arrêter aux seules formes juridiques choisies par les parties pour réaliser une opération déterminée, mais elle est appelée, au-delà de l'apparence juridique, de rechercher et d'analyser la réalité économique recouverte par lesdites formes juridiques. En effet, il est de principe en droit fiscal que les faits et les actes juridiques doivent être interprétés et appréciés d'après des critères économiques. La définition du « Eigenbesitzer » du § 11 StAnpG constitue un concept sui generis de nature fiscale, qui ne se couvre pas avec les catégories du droit civil et il se dégage du terme en question que la loi envisage la situation d'un possesseur plutôt que d'un propriétaire juridique, de sorte qu'elle n'exige pas que tous les attributs du propriétaire soient réunis dans la personne de ce possesseur spécial. Pour le surplus, les qualifications juridiques avancées par les parties ne sont retenues par le juge de l'impôt que dans la mesure où elles correspondent à l'intention réelle des parties » ;

Considérant qu'il importe en général d'appréhender une certaine constellation de plusieurs sociétés dans son intégralité et à l'instar des réflexions économiques qui l'ont instaurée (cf. § 11 StAnpG, ayant trait à l'approche économique, qui l'emporte de plein droit sur l'approche purement juridique), afin de décider si la conception choisie de la part du contribuable se base sur des raisons économiques valablement compréhensibles et concevables ou si elle s'appuie quasi-exclusivement, ou même exclusivement, sur bien d'autres idées, qui, le cas échéant, tendent plutôt vers l'optimisation fiscale ;

Considérant que la société à responsabilité limitée SOCIETE 6, la créatrice de la société anonyme SOCIETE 2 (détentrice actuelle des marques en cause), a été une société de droit luxembourgeois créée en vertu de la loi du 31 juillet 1929 (loi communément appelée « régime Holding 1929 »), société qui n'a été redevable d'aucun impôt en dehors de la taxe d'abonnement et du droit d'apport ; qu'après abolition de la loi précitée à partir du 1er janvier 2011, les redevances dues en vertu du contrat de licence signé le 1er décembre 2010 sont en principe devenues imposables dans le chef de la société à responsabilité limitée SOCIETE 6 ;

que suite à l'instauration du régime de la propriété intellectuelle par le biais de l'article 50bis L.I.R. les détenteurs d'un droit de propriété intellectuelle ont, sous réserve que certaines conditions énoncées à l'article 50bis L.I.R. soient remplies, droit à une exonération à hauteur de 80 pour cent des redevances diminuées des dépenses en relation économique directe avec ces revenus ; que dès lors, le débiteur des redevances peut, en principe, les déduire de son résultat imposable en tant que dépenses d'exploitation ; que suite à l'abolition du régime Holding 29, la réclamante a donc versé des redevances à la société anonyme SOCIETE 2 ;

que la société à responsabilité limitée SOCIETE 6 a été absorbée le 24 septembre 2012 par une autre société du groupe GROUPE , en l'espèce la société anonyme SOCIETE 3 ;

Considérant qu'en l'espèce, la société anonyme SOCIETE 2 , actionnaire à raison de 99 pour cent de la réclamante, a facturé des redevances à des montants pour le moins substantiels pour les années litigieuses, anéantissant ainsi la marge opérationnelle et, partant, les bénéfices de la réclamante ; que la société anonyme SOCIETE 2 n'a pratiquement pas encouru de frais afin de mettre en valeur les marques en cause ; qu'en vertu du point 8 du contrat de licence du 1er septembre 2011 la société anonyme SOCIETE 2 n'a été tenue de se charger que du seul « maintien en vigueur des Marques » ; que pour le surplus, la réclamante « prêtera toute assistance nécessaire au Donneur de Licence à cet effet » ; que le fait que la réclamante doit assister la société anonyme SOCIETE 2 en ce qui concerne le « maintien en vigueur des Marques » constitue déjà un indice plutôt prononcé permettant de la considérer comme véritable possesseur des marques en question ; que force est encore de mettre en exergue que la société anonyme SOCIETE 2 n'emploie pas de personnel, de sorte qu'il est évident que les marques ont dû être gérées par le biais du personnel d'une autre société du groupe GROUPE , en l'occurrence par la réclamante ;

Quant à la marque « GROUPE » Considérant qu'il échoit de se poser la question de savoir pourquoi la réclamante a payé des redevances pour l'utilisation de la marque « GROUPE », alors que cette dernière représente le nom du groupe GROUPE et non celui d'un magazine destiné à la vente et générant donc des profits ; qu'il convient de vérifier l'usage réel de cette marque pour laquelle la réclamante s'est fait concéder le droit de licence respectivement d'analyser aussi si les redevances convenues sont la contrepartie effective pour une utilisation de la licence lui conférée ;

Considérant que la marque « GROUPE » représente le groupe d'édition GROUPE fondé en 1994 ; que sous l'enseigne « GROUPE » sont publiés les magazines « MARQUE 1 », « MARQUE 4 », « MARQUE 2 » et « MARQUE 3 » ; qu'en ce qui concerne le mensuel « MARQUE 1 » celui-ci a été édité par la réclamante depuis l'an 2000 ; que jusqu'au dépôt par la société anonyme SOCIETE 2 des marques verbale (n° …) et semi-

figurative (n° …) « GROUPE » en dates du 26 août 2010 et du 19 novembre 2010, la réclamante pouvait disposer librement du nom « GROUPE » pendant au moins dix années ;

que tout d'un coup, précisément à l'occasion du contrat de licence du 1er septembre 2011, la réclamante a été contrainte à verser des redevances se chiffrant à 9 voire 10 pour cent de son chiffre d'affaires pour l'usage de la marque « GROUPE », dénomination dont elle a bénéficié gratuitement avant le dépôt auprès de l'OHMI par la société anonyme SOCIETE 2 , sa société-mère ; qu'il est pour le moins étonnant qu'une entreprise d'édition qui est active sur le marché luxembourgeois depuis un bon nombre d'années, se fasse dérober une marque notoirement connue et de renommée telle « GROUPE » par une autre société ; que la raison évidente et largement prépondérante pour le non dépôt de la marque en question par la réclamante elle-même consiste en une économie d'impôt considérable qui résulte de la déduction de redevances au niveau de la réclamante ; que la commercialisation de la marque « GROUPE » par la réclamante même lui reviendrait beaucoup moins cher, de sorte à correspondre davantage à la réalité économique ;

Considérant qu'il convient encore d'ajouter que la prédite marque figure même dans la dénomination sociale de la réclamante, à savoir sous l'abréviation « GROUPE », représentant les initiales de « GROUPE », de sorte que la réclamante a opéré sous l'enseigne « GROUPE » ou « GROUPE » depuis au moins le 27 décembre 2010 et partant antérieurement à la conclusion du contrat de licence du 1er septembre 2011 ;

Quant à la marque « MARQUE 1 » Considérant qu'une consultation du site internet de l'EUIPO permet le constat inéluctable que la marque « MARQUE 1 » a été déposée à deux reprises auprès de l'OHMI, en l'occurrence, le 25 novembre 2005 sous le numéro … par la société anonyme SOCIETE 3 , société détenant 1 pour cent des actions de la réclamante, ainsi que le 7 juin 2010 sous le numéro … par la société anonyme SOCIETE 2 , détenant 90 pour cent de la réclamante ;

Considérant que le directeur a procédé en date du 24 octobre 2018 à une mise en état du dossier afin de se procurer de plus amples détails en ce qui concerne la raison du dépôt sous le numéro … de la marque « MARQUE 1 » ; que lors de sa réponse du 3 décembre 2018 la réclamante a expliqué que la marque enregistrée par la société anonyme SOCIETE 3 avait pour objet une protection dans les classes 16, 35 et 41 (presse écrite), alors que celle enregistrée par la société anonyme SOCIETE 2 avait pour objet une protection dans les classes 9, 38 et 42 (presse en ligne) ;

Considérant qu'il y a donc eu existence, en parallèle, de deux marques « MARQUE 1 », de sorte que la société anonyme SOCIETE 2 n'a en aucun cas pu agir comme seul propriétaire de la marque précitée ; qu'afin de devancer ce lapsus, cette dernière a déposé la marque « MARQUE 1 » auprès de l'OHMI en date du 20 mars 2014 dans les classes 9, 16, 35, 36, 41, 42 et 45 (n° …) ;

Considérant qu'il en résulte que la société anonyme SOCIETE 2 n'a pas été en droit de réclamer des redevances pour la presse écrite au motif qu'elle n'a protégé la marque « MARQUE 1 » que pour la presse en ligne ; que l'annexe 1 du contrat de licence du 1er septembre 2011 fait indubitablement référence à la marque « MARQUE 1 » déposée le 7 juin 2010 sous le numéro … ; que l'instruction par la présente instance a toutefois révélé que la réclamante a non seulement versé à la société anonyme SOCIETE 2 des redevances en relation avec la presse en ligne mais également des redevances en relation avec la presse écrite, étant donné qu'elle n'a pas ventilé son chiffre d'affaires en revenus provenant de la presse écrite et en revenus provenant de la presse en ligne ; qu'elle a simplement appliqué le taux de redevances convenu dans le contrat de licence du 1er septembre 2011 à l'intégralité de son chiffre d'affaires réalisé pendant les années litigieuses ; que la réclamante a donc versé des redevances en contrepartie de l'utilisation de la marque « MARQUE 1 » (n° …) à la société anonyme SOCIETE 2 , alors que cette dernière n'avait, aux termes du contrat de licence du 1er septembre 2011, que droit aux redevances émanant de la marque « MARQUE 1 » (n° …) ; qu'il en découle que les redevances afférentes à la presse écrite ne sont, en toute logique, pas déductibles en tant que dépenses d'exploitation, le contrat de licence du 1er septembre 2011 n'habilitant pas la réclamante à verser à la société anonyme SOCIETE 2 des redevances pour l'usage de la marque « MARQUE 1 » (n° …) ;

Quant à l'ensemble des marques « GROUPE », « MARQUE 1 », « MARQUE 2 » et « MARQUE 3 » Considérant, pour ce qui est du principe de pleine concurrence, qu'il convient de rappeler que ce principe représente la norme internationale adoptée par les pays membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui doit être utilisée pour la détermination des prix de transfert entre entreprises associées effectuant des transactions transfrontalières ; que pour assurer l'application de ce principe, l'OCDE a élaboré des lignes directrices qui sont régulièrement mises à jour et qui sont destinées à être observées de manière impérative tant par les entreprises multinationales que par les autorités fiscales des pays parties à la convention ;

Considérant que l'article 164 L.I.R. confirme le principe de pleine concurrence dans son alinéa 3 : « Il y a distribution cachée de bénéfices notamment si un associé, sociétaire ou intéressé reçoit directement ou indirectement des avantages d'une société ou d'une association dont normalement il n'aurait pas bénéficié s'il n'avait pas eu cette qualité » ;

Considérant que la disposition de l'article 164, alinéa 3 L.I.R. est l'application du principe suivant lequel il y a lieu, pour les besoins du fisc, de restituer aux actes leur véritable caractère et doit partant s'interpréter en fonction de cette finalité ;

Considérant, en ce qui concerne la détermination du taux de redevances, que la réclamante a fourni une étude établie par l'Office Freylinger ; que cette analyse expose « qu'un taux de licence compris entre 5 et 10% du chiffre d'affaires ou des revenus [est] tout à fait envisageable » ; que cette étude est toutefois à rejeter comme non appropriée, étant donné qu'elle se borne à analyser la marque « MARQUE 1 », au détriment des autres marques ;

Considérant que la 2ème étude remise par la réclamante a été établie par la société de droit français NERA Economic Consulting S.A.S. ; qu'en conclusion (cf. page 23), il y est exposé que « L'analyse mise en œuvre aboutit à conclure qu'un taux maximum de 7.1% devrait être représentatif de pratiques de pleine concurrence » ; qu'il se dégage pourtant du contrat de licence du 1er septembre 2011 qu'un taux de 10 pour cent est applicable à l'endroit du chiffre d'affaires de chaque marque ; que le seul taux revu à la baisse est celui appliqué sur le chiffre d'affaires généré par la marque « GROUPE », alors que ce taux (i.e. 9 pour cent) se situe toujours bien au-dessus de la recommandation émise par la société de droit français NERA Economic Consulting S.A.S., analyse qui, au surplus, ne fut effectuée qu'en date du 13 juin 2018, donc, presque 7 ans après la conclusion du contrat de licence en cause ;

Considérant que l'étude susmentionnée est basée sur les marques « MARQUE 2 », « MARQUE 4 », « MARQUE 1 », « MARQUE 3 » et « GROUPE » ; que la requête du 15 janvier 2018 invoque également que la marque « MARQUE 4 » aurait été concédée à la réclamante (« (…) marques « MARQUE 2 », « MARQUE 3 », « MARQUE 4 », « MARQUE 1 » et finalement la « GROUPE » toutes concédées à SOCIETE 1 SA » ») ; que, toutefois, la marque « MARQUE 4 » ne figure pas au contrat de licence du 1er septembre 2011 et qu'une concession y afférente n'a partant pas pu être donnée ; que le taux de 7,10 pour cent se trouve donc falsifié étant donné que l'analyse est basée sur une marque non visée ;

Considérant que force est de relever que toutes les marques en cause constituent des biens incorporels distincts avec des valeurs différentes ; qu'à titre d'exemple, « MARQUE 1 » est un magazine portant sur le monde des affaires au Luxembourg et donc incomparable à « MARQUE 2 », magazine traitant de l'architecture ou encore «MARQUE 3 », magazine destiné à la communauté anglaise et distribué en avion ; qu'il aurait appartenu à la réclamante de présenter pour chaque marque une analyse du taux de redevances séparée et non, comme l'a fait la réclamante, une analyse déterminant un taux de redevances global, sans prendre en compte les spécificités et particularités inhérentes à chaque marque ;

Considérant, en guise de conclusion, que même en clamant que le versement de redevances à la société anonyme SOCIETE 2 tirerait son origine de raisons économiques ostensibles, il est néanmoins évident que la réclamante est restée en défaut de démontrer utilement que la constellation se base valablement sur des raisons économiques compréhensibles, c'est-à-dire sur des raisons autres que fiscales, de sorte qu'il s'agit nécessairement de celles-ci qui sont à considérer comme prédominantes ; qu'il en découle que les redevances fixées en l'espèce entre la réclamante et la société anonyme SOCIETE 2 , tirant leur origine incontestablement de considérations tout à fait différentes de celles se dégageant des principes du libre marché, ne sauront dès lors être conformes, sous aucun prétexte, au principe de l'appréciation d'après les critères économiques, tel que prôné par le § 11 StAnpG ; que, partant, sous l'angle fiscal, le titulaire des marques en question doit être écarté au profit de la réclamante, et ce au titre de la « réalité économique », ce qui a pour conséquence le transfert de la propriété économique à cette dernière ; que celle-ci est dorénavant à considérer comme véritable possesseur des marques « MARQUE 1 », « GROUPE », « MARQUE 2 » et « MARQUE 3 » au sens du § 11 StAnpG ; que la réclamante invoque encore une jurisprudence qui serait transposable au cas d'espèce, notamment que « [l'Etat] ne précise pas quels volets essentiels du droit de propriété feraient défaut dans le chef de la société (…) et quelle autre personne physique ou morale devrait être considérée comme propriétaire fiscal des marques » ; qu'en l'espèce toutefois, tel que cela a été retenu ci-avant, la réclamante est à considérer comme propriétaire économique des marques ;

Considérant d'ailleurs, en ce qui concerne précisément l'arrêt invoqué par la réclamante, qu'à titre de bref résumé, les juges de céans ont retenu dans une affaire similaire qu'une marque a été déposée dans une société nouvellement créée d'un groupe existant d'entreprises afin « de réserver une certaine part des bénéfices du groupe aux actionnaires fondateurs ou les plus anciens, qui ont les plus grands mérites dans le développement du groupe (…) et de ses activités et qui ont ainsi jeté les bases pour la renommée de la marque (…) » ; qu'en l'espèce, la restructuration autour de la marque en cause a été effectuée au motif que le nouvel actionnariat ne devrait « pas être admis à profiter gratuitement des efforts passés des anciens actionnaires », c'est-à-dire des revenus provenant de la concession de l'usage de cette marque ayant entretemps acquis une certaine notoriété ;

Considérant qu'il échoit donc d'analyser l'actionnariat du groupe GROUPE avant et après le dépôt des marques en question ; qu'à titre de rappel, la marque « MARQUE 1 » a été déposée à deux reprises, notamment en dates du 25 novembre 2005 (n° …) et du 7 juin 2010 (n° …) ;

Considérant que le directeur a procédé en date du 12 février 2019 à une mesure d'instruction du dossier afin de se procurer de plus amples détails en ce qui concerne l'actionnariat de toutes les sociétés du groupe GROUPE ; que la réclamante y a répliqué en date du 20 mars 2019 ; qu'après une demande de renseignements supplémentaires par la présente instance, elle a fait parvenir les informations sollicitées par courrier électronique en date du 14 mai 2019 ; qu'il en découle que le sieur … a été le bénéficiaire économique unique de la marque « MARQUE 1 » (n° …) par le biais de la société anonyme SOCIETE 6, dont il a été le seul actionnaire avant le dépôt de la marque « MARQUE 1 » (n° …) ; que lors du second dépôt de la marque « MARQUE 1 » (n° …), en l'occurrence le 7 juin 2010, le sieur … a toujours été le seul bénéficiaire économique de la marque en question, mais cette fois-ci à travers la société anonyme SOCIETE 2 qui a été détenue à son tour par la société anonyme SOCIETE 6 ;

Considérant, dans un souci d'exhaustivité, qu'il y a lieu de noter qu'à un moment donné la société anonyme SOCIETE 4 est entrée dans le capital de la société anonyme SOCIETE 2 à concurrence de 30 pour cent ; que le contentieux de l'impôt n'a pourtant pas pu déterminer avec certitude la date précise de ce changement d'actionnariat dans la société ayant déposé la marque « MARQUE 1 » (n° …) ; que nonobstant ce fait, il importe de relever que jusqu'au 20 juillet 2010, donc après la date de dépôt de la marque « MARQUE 1 » (n° …) le 7 juin 2010, le sieur … a tout de même été l'actionnaire unique de la société anonyme SOCIETE 4 à travers la société anonyme SOCIETE 6, de nouveaux actionnaires personnes physiques ne sont entrés dans le capital de la société anonyme SOCIETE 4 qu'à partir du 20 juillet 2010 ;

Considérant que force est de constater qu'en date du 7 juin 2010, le bénéficiaire économique unique des marques « MARQUE 1 » (nos … et …) a été la même personne physique, à savoir le sieur … ; qu'il n'y avait donc aucune raison de déposer une nouvelle fois la marque « MARQUE 1 » ; que sur fond des éléments ci-avant relatés il convient de conclure que la jurisprudence invoquée par la réclamante n'est pas transposable à l'espèce ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les redevances versées par la réclamante à la société anonyme SOCIETE 2 ne sont pas à considérer comme dépenses d'exploitation au vœu de l'article 45 L.I.R., étant donné que fiscalement les marques en cause font partie, conformément au § 11 StAnpG, du patrimoine d'exploitation de la réclamante ;

qu'il y a donc lieu de réintégrer toutes les redevances payées aux résultats déclarés par la réclamante au titre des années 2012 et 2013;

Considérant que pour le surplus, les impositions sont conformes à la loi et aux faits de la cause et ne sont d'ailleurs pas autrement contestées ;

Considérant que les redressements des bulletins de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal des années 2012 et 2013 font l'objet des annexes 1 et 2 qui constituent des parties intégrantes de la présente décision ;

PAR CES MOTIFS reçoit les réclamations en la forme, annule les bulletins rectificatifs de l'impôt sur le revenu des collectivités et de la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2011 ;

réformant in pejus, fixe l'impôt sur le revenu des collectivités de l'année 2012, y compris la contribution au fonds pour l'emploi, à … euros, établit la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2012 à … euros, fixe l'impôt commercial communal de l'année 2012 à … euros, fixe l'impôt sur le revenu des collectivités de l'année 2013, y compris la contribution au fonds pour l'emploi, à … euros, établit la base d'assiette de l'impôt commercial communal de l'année 2013 à … euros, fixe l'impôt commercial communal de l'année 2013 à … euros, renvoie au bureau d'imposition pour exécution, notamment pour imputation des bonifications d'impôt. (…) ».

En date du 17 juillet 2019, le bureau d'imposition émit les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal pour l’année 2014, avec comme remarque sous la rubrique « l’imposition diffère de la déclaration sur les points suivants » : « nouveau bulletin émis dans la logique de la décision directoriale du 4 juin 2019 ».

La réclamation introduite par la société SOCIETE 1 en date du 10 octobre 2019 contre les bulletins précités de l’année 2014 demeura sans réponse.

En date du 11 mars 2020, le bureau d'imposition émit les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal pour l’année 2015, précisant sous la rubrique « l’imposition diffère de la déclaration sur les points suivants » : « Les redevances payées à hauteur de … euros ont été déclarés non déductibles par décision directoriale du 4 juin 2019 ».

La réclamation introduite par la société SOCIETE 1 en date du 2 juin 2020 contre les bulletins précités de l’année 2015 demeura également sans réponse.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 3 septembre 2019, la société SOCIETE 1 a fait introduire un recours en réformation sinon en annulation contre la décision précitée du directeur du 4 juin 2019.

Par une deuxième requête déposée au greffe du tribunal administratif le 24 mars 2021, la société SOCIETE 1 a fait introduire un recours tendant à la réformation sinon à l’annulation des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour les années 2014 et 2015.

Dans sa requête introductive d’instance du 24 mars 2021, inscrit sous le numéro 45813 du rôle, la partie demanderesse sollicite la jonction avec l’affaire inscrite le 3 septembre 2019 sous le numéro 43525 du rôle, toujours pendant devant le tribunal de céans.

Le délégué du gouvernement ne s’y oppose pas.

Etant donné que les deux affaires sont effectivement connexes du fait de se rapporter à la question de la déductibilité des redevances versées par la société SOCIETE 1 en contrepartie de l'usage ou la concession de l'usage de droits de propriété intellectuelle et que les bulletins litigieux des années d’imposition 2014 et 2015, déférés par la requête introductive d’instance du 24 mars 2021, se réfèrent expressément à la décision directoriale déférée par la requête introductive d’instance du 3 septembre 2019, concernant les années d’imposition 2012 et 2013, il y a lieu, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de procéder à la jonction des rôles 45813 et 43525 pour y statuer par un seul et même jugement.

Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 AO et de l’article 8, paragraphe (3), 1, respectivement de l’article 8, paragraphe (3), 3 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond sur le recours dirigé par un contribuable contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation de sa part contre un bulletin de l’impôt, respectivement sur un recours introduit contre des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et des bulletins de la base d’assiette de l’impôt commercial communal en cas de silence du directeur suite à une réclamation y relative lui adressée dans les délais.

Le tribunal est partant compétent pour connaître d’un recours en réformation dirigé contre la décision directoriale précité du 4 juin 2019, respectivement contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et les bulletins de la base d’assiette de l’impôt commercial communal des 17 juillet 2019 et 11 mars 2020.

Dans le dispositif de ses mémoires en réponse, le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité des recours tout en se rapportant, dans le corps de ses mémoires, à prudence de justice en ce qui concerne la recevabilité des recours en la forme.

Force est au tribunal de préciser que s’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions.

Dès lors, étant donné que la partie gouvernementale est restée en défaut de préciser dans quelle mesure la forme des recours n’aurait pas été respectée, les moyens d’irrecevabilité afférent encourent le rejet, étant relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’irrecevabilité d’ordre public qui serait à soulever d’office.

Les recours principaux en réformation respectifs, par ailleurs, introduits dans les formes et délai prévus par la loi, sont partant recevable.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur les recours subsidiaires en annulations dirigés contre les mêmes actes.

A l’appui de ses deux recours et en fait, outre le rappel des rétroactes passés en revue ci-avant, la partie demanderesse explique qu’elle serait la société opérationnelle du groupe « GROUPE », dénommé ci-après « le groupe GROUPE », éditeur indépendant des publications dénommées « MARQUE 1 », « MARQUE 3 », « MARQUE 2 » et « MARQUE 4 ». Par ailleurs, elle exploiterait également le plus grand club d'affaires du Luxembourg, ainsi qu'une agence de communication, l'ensemble des activités du groupe GROUPE étant exercé sous le sceau de la marque « GROUPE ».

Elle donne à considérer qu’elle serait la filiale à 99% de la société anonyme de droit luxembourgeois SOCIETE 2 SA, dénommée ci-après « SOCIETE 2 », ayant été constituée le 4 mai 2010 par la société à responsabilité limitée SOCIETE 6 SARL, dénommée ci-après « la société SOCIETE 6 », comme société détentrice de la propriété intellectuelle du groupe GROUPE , selon le schéma de protection usuel dissociant la détention de l'exploitation de ladite propriété intellectuelle.

La partie demanderesse fait ensuite relever que SOCIETE 2 serait titulaire des marques verbales suivantes :

- « MARQUE 1 », déposée en date du 7 juin 2010 auprès de l'Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle (« EUIPO ») portant le numéro …, - « MARQUE 3 », déposée en date du 9 septembre 2010 auprès de l'Office Benelux de la propriété intellectuelle portant le numéro …, - « MARQUE 2 », déposée en date du 26 mai 2010 auprès de l'EUIPO portant le numéro …, - ainsi que des marques verbales et figuratives « GROUPE », déposées respectivement en dates du 26 août 2010 et du 19 novembre 2010 auprès de l'EUIPO, et portant les numéros … et ….

Elle fait valoir que par contrat de licence de marque du 1er septembre 2011, SOCIETE 2 lui aurait octroyé un droit non-exclusif d'usage et d'exploitation des marques citées ci-avant pour une durée initiale de cinq années, renouvelable tacitement à chaque fois pour une période d'un an et ceci en échange d'une redevance de licence calculée annuellement sur la base du chiffre d'affaires hors taxes réalisé par elle.

La partie demanderesse précise encore que SOCIETE 2 serait également titulaire :

- depuis le 20 mars 2014 de la marque « MARQUE 1 » n° … auprès de l'EUIPO, - depuis le 20 mars 2014, de la marque « MARQUE 3 » n° …auprès de l'EUIPO, - depuis le 20 mars 2014, de la marque « MARQUE 2 » n° … auprès de l'EUIPO, - depuis le 20 mars 2014, des marques verbales et figuratives « GROUPE » portant respectivement les numéros … et … auprès de l'EUIPO.

Ainsi, les redevances de licence appliquées à partir du 1er janvier 2013 correspondraient à (i) 10% dudit chiffre d'affaires dérivé des marques « MARQUE 1 », « MARQUE 3 » et « MARQUE 2 », et (ii) 9% du chiffre d'affaires dérivé de la marque « GROUPE », le montant des redevances ayant été auparavant fixé comme suit : « A titre de redevances, le Preneur de Licence paiera au concédant un montant forfaitaire annuel minimal, complété éventuellement d'un montant proportionnel calculé sur la base du chiffre d'affaires hors taxes réalisé par le Preneur de Licence, soit :

un montant forfaitaire de deux-cents-cinquante mille Euros (…,-€) par an ainsi que dix pour cent (10%) du chiffre d'affaires hors taxes ».

Elle fait encore préciser que par sa lettre datée du 15 septembre 2017, elle aurait démontré que les redevances versées respecteraient les conditions de marché sur la base de deux analyses :

(i) l’analyse de l'Office Freylinger, communiquée au bureau d'imposition par courrier électronique en date du 28 octobre 2016, réalisée le 6 février 2012 en conformité avec la pratique du marché de l'époque et qui préconiserait un taux de redevance compris entre 5% et 10% du chiffre d'affaires après examen des taux de redevances de licence de marque usuellement pratiqués dans son secteur, (ii) l’analyse financière de Maître Rollmann, servant à corroborer l'analyse initiale de l'Office Freylinger, communiquée en date du 13 février 2017.

La société relève encore que par courrier électronique du 18 juillet 2018, elle aurait encore versé une nouvelle pièce au dossier, à savoir une étude prix de transfert réalisée le 13 juin 2018 par la société NERA Economic Consulting, dénommée ci-après « l’étude NERA », qui tiendrait compte des principes édictés par l’Organisation de coopération et de développement économiques, dénommée ci-après « l'OCDE », et qui établirait la conformité du montant des redevances versées au principe de pleine concurrence, confirmant les analyses précédentes.

Suite à la décision directoriale du 4 juin 2019, le bureau d'imposition aurait, en date du 19 juin 2019, annulé les bulletins des années 2011 à 2013 et émis des bulletins révisés pour les années 2012 et 2013, conformément à la décision directoriale.

En droit, la demanderesse fait plaider que ce serait à tort que le directeur, pour les années d’imposition 2012 et 2013, et ensuite le bureau d'imposition, pour les années d’imposition 2014 et 2015, auraient refusé de reconnaître la conformité au principe de pleine concurrence d'une partie des redevances versées par elle pour l'usage et l'exploitation des marques conformément au contrat de licence. Elle demande partant, par réformation, de considérer la déductibilité des redevances versées en tant que dépenses d'exploitation en vertu de l'article 45 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu, dénommée ci-après « LIR », pour la partie desdites redevances respectant le principe de pleine concurrence, à savoir (i) 7,1% du chiffre d'affaires dérivé des marques MARQUE 5 , MARQUE 3 et GROUPE, et (ii) 7,1% du chiffre d'affaires dérivé de la marque MARQUE 1 n°….

En premier lieu, la partie demanderesse critique la décision directoriale d’avoir retenu une absence de raisons économiques valablement compréhensibles et concevables pour procéder à une réintégration de l'intégralité des redevances payées au titre des années 2012 à 2015 aux résultats déclarés, en application du paragraphe 11 de la loi d'adaptation fiscale du 16 octobre 1934 « Steueranpassungsgesetz », en abrégé « StAnpG ». Elle reproche encore au directeur d’avoir invoqué les paragraphes 5 et 6 StAnpG, tout comme le principe de l'imposition selon la capacité contributive, sans la moindre transposition de ces concepts au cas d'espèce et sans aucun élément de preuve d'une simulation ou d'un abus de droit.

La partie demanderesse conteste être le possesseur économique des marques au sens du paragraphe 11 StAnpG, soulignant d’abord qu’elle ne saurait ni être considérée comme le propriétaire juridique des marques « GROUPE », « MARQUE 1 », « MARQUE 3 » et « MARQUE 2 », étant donné que ces dernières auraient été enregistrées par SOCIETE 2 constituée en date du 4 mai 2010, ni être qualifiée de propriétaire économique, « Eigenbesitzer », desdites marques, alors qu’aux termes des contrats de licence signés avec SOCIETE 2, seulement un droit non-exclusif d'usage et d'exploitation des marques pour une durée limitée lui aurait été confié.

Ce point de vue ne serait pas énervé par la considération de l’administration des Contributions directes, basée sur un rapport de sa division économique, selon laquelle elle supporterait quasiment tous les frais en relation avec les marques en question, alors qu’elle conteste tant le caractère détaillé de cette analyse, puisque les données chiffrées mentionnées comme « Frais de publicité et autres frais en relation avec le développement de la marque » ne seraient pas autrement étayées, que l’affirmation selon laquelle elle aurait formellement engagé de tels frais, relevant, dans ce contexte, que les marques lui concédées en licence n'auraient, de par leur nature même, besoin d'aucune publicité grâce à l’écosystème du groupe GROUPE , dans lequel le magazine ferait de la publicité pour le site internet et les événements, tandis que le site internet ferait de la publicité pour le magazine et les événements.

En tout état de cause, il ressortirait des contrats de licence que tous les frais en relation avec le développement des marques seraient à la charge de SOCIETE 2, tels que le paiement du dépôt des marques et logos, leur protection, les frais de développement et tout le contentieux qui en découlerait, alors qu’elle-même ne serait tenue que d’y prêter son assistance par la mise à disposition de toute information et de toute donnée permettant l'amélioration, le développement et l'optimisation desdites marques ainsi que par la notification à SOCIETE 2 de tout acte de contrefaçon ou piratage de ces marques, et ce, même si elle était amenée à engager des frais dans ce contexte, étant donné que le maintien de la réputation des droits de propriété intellectuelle concédés ferait indirectement augmenter ses ventes.

Elle fait encore noter que les marques à succès ne nécessiteraient que peu de maintenance de la part du donneur de licence, étant donné qu’elles seraient bien ancrées dans l'esprit du public, de sorte qu’un niveau élevé de dépenses ne serait pas nécessaire pour maintenir la valeur d'une marque (par opposition à la réalisation de son plein potentiel commercial). Ainsi, il serait courant que des dépenses relativement faibles soient suffisantes pour « maintenir » une marque et que ces fonctions pourraient aisément être exercées par les administrateurs du donneur de licence, sans qu'il n’y ait la nécessité de disposer de personnel salarié.

La partie demanderesse en conclut que le directeur aurait ajouté une condition supplémentaire à l’article 45 LIR, en insinuant que la déduction des redevances serait limitée aux cas où le contribuable constaterait à court terme une augmentation de sa marge opérationnelle ou de son chiffre d'affaires, alors que la seule condition à remplir pour permettre une telle déduction serait la conformité des taux de redevances avec le principe de pleine concurrence, ce qui serait le cas en l'espèce.

Dans son mémoire en réplique, la partie demanderesse fait relever que le délégué du gouvernement serait également resté en défaut de transmettre le détail des « frais de publicité et autres frais en relation avec les marques » retenus par l'administration des Contributions directes, de sorte qu’elle ne serait pas à même de pouvoir utilement les contester.

Par ailleurs, le délégué du gouvernement, dans son mémoire en réponse, tout en citant la circulaire LIR n° 50bis/1, qui ne lierait d'ailleurs que l'administration fiscale, resterait en défaut de prouver utilement qu'en l'espèce le propriétaire juridique ne serait pas le propriétaire économique. La seule référence au fait que les deux sociétés parties au contrat de licence auraient le même administrateur-délégué, d’ailleurs parfaitement admissible pour un groupe de sociétés affiliées, ne serait nullement de nature à établir une violation du principe de pleine concurrence, étant donné qu’en l'absence d'une affiliation entre sociétés, toute discussion par rapport au principe de pleine concurrence serait de toute façon superfétatoire, car toute opération serait alors par définition conforme aux pratiques du marché.

La partie demanderesse critique ensuite le directeur de s’immiscer dans sa gestion commerciale et financière, alors que selon le principe de la « liberté de gestion des entreprises », les sociétés commerciales seraient libres de déterminer en toute indépendance quelle serait la meilleure stratégie à adopter afin de réaliser leur objectif.

Ce serait dès lors à tort que le directeur lui reprocherait d’avoir fait usage du régime de l'article 50bis LIR, dès son instauration et suite à l'abolition du régime des sociétés créées en vertu de la loi modifiée du 31 juillet 1929 sur le régime fiscal des sociétés de participations financières (Holding companies), ci-après dénommée « le régime Holding 29 », au motif qu’il serait étonnant de constater qu’elle se soit fait dérober la marque « GROUPE », marque notoirement connue et de renommée, par une autre société alors qu’elle aurait, jusqu'au dépôt par SOCIETE 2 de la marque « GROUPE », pu librement disposer du nom « GROUPE » pendant au moins dix années. En affirmant que la commercialisation de la marque « GROUPE » par elle-même lui reviendrait beaucoup moins chère, de sorte à correspondre davantage à la réalité économique, la décision directoriale s'immiscerait dans la gestion commerciale et financière du groupe GROUPE .

La partie demanderesse fait relever que par l'introduction de l'article 50bis LIR, l'objectif du législateur aurait été notamment d'inciter les contribuables à développer et protéger leurs droits de propriété intellectuelle en procédant à l'enregistrement de leurs marques, ce qu’elle aurait précisément fait en créant, conformément à la volonté du législateur, une chaîne de valeur à partir de SOCIETE 2, en tant que société mère, qui déposerait, enregistrerait et concèderait des droits de propriété intellectuelle à sa filiale qui les exploiterait effectivement.

La partie demanderesse rappelle qu’il serait admis en droit fiscal que le contribuable demeurerait seul juge de l'opportunité de ses démarches commerciales et qu'il serait, en général, entièrement libre de choisir la forme qui lui semblerait la plus appropriée pour l'exploitation de son entreprise. La jurisprudence y relative retiendrait à ce titre que le caractère simplement inhabituel des formes, constructions ou opérations de droit privé ne serait pas à lui seul suffisant pour les voir qualifier d'inadéquates au vu de la liberté en principe reconnue au contribuable de choisir la voie la moins imposée, mais qu'il faudrait que l'objectif économique soit atteint par cette voie dans le contexte économique donné d'une manière telle qu'elle permettrait l'obtention d'un effet fiscal que le législateur ne peut pas être considéré comme ayant voulu accorder dans le cadre d'une application de la loi fiscale conforme à son intention.

Or, l'article 50bis LIR représenterait une mesure légale encourageant le contribuable à organiser ses affaires d'une certaine manière afin de bénéficier d'un régime de faveur dès lors que certaines conditions sont remplies, de sorte que le paragraphe 11 StAnpG ne saurait trouver application en l'espèce, faute pour l’administration des Contributions directes d’avoir établi une simulation ou un abus de droit.

La partie demanderesse fait finalement préciser que la marque « GROUPE » aurait été créée et lancée en décembre 2010, de sorte que l'affirmation directoriale selon laquelle elle aurait pu librement disposer du nom « GROUPE » pendant au moins dix années serait erronée.

Concernant l’affirmation du directeur questionnant la nécessité de payer des redevances pour l'utilisation de la marque « GROUPE », alors que cette dernière représenterait le nom du groupe de sociétés auquel elle appartiendrait, figurant même dans sa dénomination sociale sous l'abréviation « GROUPE », et non celui d'un magazine destiné à la vente et générant des profits, la partie demanderesse explique que le paiement de redevances y relatives se justifierait du fait qu’en dehors des marques média exploitées sous licence, l'ensemble des autres services qu’elle presterait serait opéré sous la marque « Maison Moderne », à savoir la régie publicitaire (100% du chiffre d'affaires des ventes, incluant des mandats de régies externes), l'agence en communication, les travaux d'édition réalisés pour le compte de clients (entre autres, « … », le magazine de bord de …, et « … », le magazine de la ville …). La partie demanderesse souligne enfin que la décision directoriale elle-même relèverait d’ailleurs que la marque « GROUPE » constituerait « une marque notoirement connue et de renommée », justifiant partant le paiement de redevances afférentes.

Enfin, le raisonnement selon lequel l'abréviation « GROUPE » figurerait déjà dans sa propre dénomination sociale ne pourrait pas être sérieusement pris en considération, la partie demanderesse donnant à considérer que cet acronyme ne constituerait en aucun cas une marque protégée du fait d’être repris par une multitude d'acteurs.

Concernant la marque « MARQUE 1 », qui aurait été déposée à deux reprises, à savoir le 25 novembre 2005 sous le numéro … par la société SOCIETE 3 , ainsi que le 7 juin 2010 sous le numéro … par SOCIETE 2, la partie demanderesse explique qu’en juin 2010 et au vu des changements importants dans les modes de consommation des médias, à savoir un développement exponentiel des médias digitaux aux dépens des médias classiques, SOCIETE 2 aurait également protégé la marque « MARQUE 1 » (n°…) dans les classes 9, 38 et 42 ayant notamment trait à des produits et services de médias en ligne, étant relevé que la protection de la marque « MARQUE 1 », initialement déposée par la société SOCIETE 3 (n°…), n'aurait été assurée que dans les classes 16, 35 et 41 réservées au domaine de la presse écrite (journaux, livres, revues, etc.).

Quant à l’argument directorial selon lequel SOCIETE 2 n'aurait pas été en droit de réclamer des redevances pour la presse écrite au motif qu'elle n'aurait protégé la marque « MARQUE 1 » que pour la presse en ligne, la partie demanderesse souligne qu’elle disposerait d'une comptabilité analytique permettant de ventiler le chiffre d'affaires selon qu'il résulte de la presse écrite ou de la presse en ligne, de sorte qu’elle devrait être autorisée à déduire en tout état de cause, en tant que dépenses d'exploitation, les redevances versées pour la marque « MARQUE 1 » (n°…), ayant trait à des produits et services de médias en ligne, conformément à la ventilation figurant dans sa comptabilité analytique qu’elle verse au débat en tant que pièce.

La partie demanderesse donne finalement à considérer que la structuration mise en place en l'espèce se baserait sur des raisons économiques sérieuses et valables, soulignant que le mode d'organisation du groupe GROUPE , suivant lequel la propriété des droits de propriété intellectuelle serait détachée de leur exploitation au sein de sociétés différentes, serait une pratique pour le moins courante et acceptée dans le monde des affaires et par la jurisprudence, alors que cette pratique permettrait d'isoler les risques et responsabilités liés à l'exploitation et partant de protéger les marques de toute difficulté de nature commerciale pouvant être rencontrée par la société opérationnelle, ce qui constituerait un motif extra-fiscal indéniable. Par ailleurs, il conviendrait également de relever, dans ce contexte, que SOCIETE 2 aurait été constituée dans le cadre d'une restructuration du groupe GROUPE afin de permettre, entre autres, l'entrée de certains employés en tant que nouveaux actionnaires afin de motiver leur participation dans la réalisation de bénéfices futurs, sans que Monsieur … ne doive renoncer au bénéfice de ses efforts passés en vue du développement du groupe GROUPE . Ainsi, dans le cadre de cette restructuration du groupe GROUPE , deux sociétés auraient été créées en date du 4 mai 2010, à savoir la société anonyme SOCIETE 4 SA, ci-

après dénommée « la société SOCIETE 8 », destinée à regrouper le nouvel actionnariat, et SOCIETE 2, destinée à détenir la propriété intellectuelle du groupe GROUPE .

A cet effet, les marques « MARQUE 1 », « GROUPE », « MARQUE 2 » et « MARQUE 3 » auraient toutes été déposées entre mai et novembre 2010 par SOCIETE 2 nouvellement constituée, tandis qu’en date du 20 juillet 2010, les nouveaux actionnaires seraient entrés dans le capital de la société SOCIETE 8 qui elle, à cette même date, serait entrée dans le capital de SOCIETE 2 à hauteur de 30%.

La partie demanderesse invoque encore une jurisprudence, transposable, selon elle, au cas d'espèce, qui aurait considéré que « (…) l'appelante a valablement expliqué la structuration choisie par la volonté de réserver une certaine part des bénéfices du groupe aux actionnaires fondateurs ou les plus anciens, qui ont les plus grands mérites dans le développement du groupe … et de ses activités et qui ont ainsi jeté les bases pour la renommée de la marque …, afin de les privilégier par rapport à des employés méritants qui seraient admis à devenir coactionnaires […] mais qui ne devraient pas être admis à profiter gratuitement des efforts passés des anciens actionnaires (…) », sans que cette position jurisprudentielle ne pourrait être remise en cause par l'argumentaire directorial selon lequel jusqu'au 20 juillet 2010, donc après la date de dépôt de la marque « MARQUE 1 » (n°…) le 7 juin 2010, Monsieur … aurait été l'actionnaire unique de la société SOCIETE 8 à travers la société SOCIETE 6 , et que les nouveaux actionnaires personnes physiques ne seraient entrés dans la société SOCIETE 8 qu'à partir du 20 juillet 2010, alors que, selon la partie demanderesse, ce léger décalage temporel d’à peine plus d'un mois entre le dépôt de la marque « MARQUE 1 », le 7 juin 2010, et l'entrée de SOCIETE 8 dans le capital de SOCIETE 2 en date du 20 juillet 2010, serait tout à fait raisonnable dans le cadre d'une restructuration d'une telle envergure nécessitant une mise en place structurée, en plusieurs phases, afin de pouvoir faire face à d'éventuelles difficultés techniques ou autres. En tout état de cause, cette période transitoire aurait été basée sur un accord oral entre les futurs associés sur la base de la confiance, garantissant que cette situation ne serait que très temporaire. Par ailleurs et en tout état de cause, les autres marques auraient bien été déposées postérieurement à l'entrée de la société SOCIETE 8 dans le capital de SOCIETE 2.

En deuxième lieu, la partie demanderesse fait plaider que le principe de pleine concurrence serait respecté en l’espèce, tout en relevant de prime abord que l'article 56 LIR, prévoyant ledit principe, n'aurait pas encore été en vigueur pour les périodes d'imposition 2012-2013, du fait de n’avoir été introduit que par la loi du 19 décembre 2014 relative à la mise en œuvre du paquet d'avenir (première partie). Il s’ensuivrait qu’à cette époque, le principe de pleine concurrence n'aurait été réglementé que de manière très évasive par l'ancien article 56 LIR, applicable uniquement dans le cadre de situations transfrontalières, ainsi que par l'article 164, paragraphe (3) LIR relatif aux distributions cachées, article invoqué par l'administration des Contributions directes.

Quant au respect du principe de pleine concurrence par le taux de redevance fixé entre les parties, la partie demanderesse donne à considérer qu’elle ne se serait pas laissée guider par son libre arbitre dans la détermination des prix de transfert, mais qu’elle aurait été soucieuse de pratiquer des taux de redevances conformes à ceux du marché, ce qui l’aurait conduit, dès 2012, et bien avant toute réglementation et pratique administrative dans ce domaine, à mandater l'Office Freylinger lequel aurait retenu que les taux de redevances de licence usuellement pratiqués dans le secteur de l'édition se situeraient généralement entre 5% et 10% du chiffre d'affaires.

La partie demanderesse fait souligner, face aux critiques y relatives de la part de la décision directoriale déférée, que rien n'indiquerait, dans le rapport de l’Office Freylinger, qu'il se serait borné à analyser la seule marque « MARQUE 1 », d’autant plus qu'en déterminant les taux de redevances généralement pratiqués dans le secteur de l'édition, ledit rapport aurait, au contraire, visé toutes les marques lui octroyées par SOCIETE 2.

Etant donné cependant que l'analyse de l'Office Freylinger ne correspondrait pas à une étude des prix de transfert préparée selon les principes OCDE, qui, à l'époque, ne se seraient pas imposés en droit fiscal luxembourgeois, et que l’administration des Contributions directes lui aurait fait part de son intention de refuser la déduction des redevances excédentaires par rapport au prix de pleine concurrence, la partie demanderesse explique avoir fourni l’étude NERA, une analyse économique des prix de transfert détaillée et indépendante tenant compte des principes OCDE et qui aurait établi qu'un taux de redevance de 7,1% par an devrait être représentatif de pratiques de pleine concurrence, taux qui ne serait d’ailleurs pas critiqué en son quantum par l'administration des Contributions directes.

Quant à la critique de la décision déférée, selon laquelle l'étude NERA n’aurait été effectuée qu'en date du 13 juin 2018, soit presque 7 ans après la conclusion du contrat de licence en cause, la partie demanderesse fait relever que la jurisprudence retiendrait qu'une analyse de prix de transfert établie ex post pour les seuls besoins de la procédure serait recevable, de sorte que les redevances déclarées seraient déductibles en tant que dépenses d'exploitation en vertu de l'article 45 LIR pour autant qu'elles ne dépassent pas le taux de pleine concurrence, à savoir 7,1% du chiffre d'affaires. Ainsi seule la partie excédant 7,1% du chiffre d'affaires serait à réintégrer dans sa base imposable.

Quant à la conformité de l'étude NERA aux principes OCDE, la partie demanderesse soutient que ces derniers n'exigeraient pas que les transactions fassent l'objet d'un rapport individuel et que des taux de redevances distincts soient calculés pour chaque marque du fait de se rapporter à différentes publications, alors qu’au contraire, les principes OCDE préciseraient que « De fait, les transferts d'actifs incorporels concernent souvent un ensemble d'actifs incorporels […] Dans ce cas, l'analyse prix de transfert la plus pertinente est probablement celle qui tient compte des relations étroites entre les différentes transactions agrégées de manière à améliorer la fiabilité de l'analyse. ». Ainsi, ce serait à tort que le directeur aurait estimé qu’il lui aurait appartenu de présenter pour chaque marque une analyse séparée du taux de redevances.

Par ailleurs, aux fins de l'application de la méthode prix de transfert dite du prix comparable sur le marché libre, la société Nera Economic Consulting se serait basée sur un échantillon suffisamment large pour saisir les accords de licence semblables à ceux conclus en l'espèce, conformément aux principes OCDE. Il semblerait même que l'échantillon sélectionné sous-estime la valeur des licences accordées par SOCIETE 2 et par conséquent le niveau des redevances, dans la mesure où ces marques seraient destinées à un public professionnel avisé dans un pays aisé, ce qui serait particulièrement attractif aux yeux des publicitaires.

Quant à l'inclusion de la marque « MARQUE 4 » dans l'étude NERA, alors qu’elle ne verse pas de redevances pour l'usage de cette marque, la partie demanderesse estime que le taux de redevance de la marque « MARQUE 4 » dans des conditions de pleine concurrence ne serait pas plus élevé que le taux moyen des autres marques, de sorte que son inclusion dans l'étude NERA ne ferait pas augmenter le taux de redevance déterminé pour l'ensemble des marques, étant donné que la marque « MARQUE 4 », utilisée pour mettre à disposition un guide en ligne de restaurants au Luxembourg, s’intègrerait dans le thème commun des autres marques litigieuses abordant les questions luxembourgeoises pour les professionnels travaillant au Luxembourg dans le cadre de publications physiques et électroniques et d’événements commerciaux associés, attirant ainsi de la publicité et du sponsoring, la partie demanderesse rappelant, dans ce contexte, que le magazine « MARQUE 2 » concernerait l'architecture et la promotion immobilière au Luxembourg, que le magazine « MARQUE 3 » serait un magazine d'affaires et un site web d'actualités économiques luxembourgeois en langue anglaise, avec des mises à jour quotidiennes par courriel, destiné en particulier aux expatriés anglophones, que le magazine « MARQUE 1 » traiterait l’information économique et politique luxembourgeoise destinée à la communauté d'affaires avec mises à jour quotidiennes par courriel et de nombreux événements, que la marque « MARQUE 1 Club » accueillerait sous son nom le premier club d'affaires au Luxembourg, ainsi qu'un centre de formation agréé et que, finalement, la marque « GROUPE » jouerait un rôle multiple dans la mesure où un ensemble de services serait opéré sous cette marque, à savoir la régie publicitaire, l'agence de communication, les travaux d'édition réalisés pour le compte de clients, tels que « … », le magazine de bord de la compagnie aérienne …, et « … », le magazine de la ville …, ainsi que la régie du « … ».

Ce serait dès lors à tort que le directeur aurait estimé que le taux de 7,1% se trouverait falsifié du fait que l'analyse engloberait une marque non concernée, d'autant plus que l'étude NERA en question serait basée sur un échantillon suffisamment large de contrats de licence de marques relatifs à l'industrie de l'édition.

Dans son mémoire en réplique et quant au caractère de pleine concurrence du taux de redevance, la partie demanderesse concède que si le seul taux revu à la baisse, à savoir celui appliqué sur le chiffre d'affaires généré par la marque « GROUPE » (9 %), se situerait toujours bien au-dessus de la recommandation émise par l'étude NERA, toutes les redevances déclarées ne seraient déductibles en tant que dépenses d'exploitation en vertu de l'article 45 LIR que pour autant qu'elles ne dépassent pas le taux de pleine concurrence, à savoir 7,1% du chiffre d'affaires.

Quant aux développements du délégué du gouvernement, dans le rôle numéro 45813, allant au-delà des motifs de la décision directoriale, la partie demanderesse fait répliquer que la détention et l'exploitation de la propriété intellectuelle au sein du groupe GROUPE serait entièrement conforme à la législation en vigueur, rappelant que le recours au régime fiscal de l'article 50bis LIR faisant suite à la fin du régime Holding 29 n'aurait aucune incidence sur elle, mais seulement sur le bénéficiaire de ces régimes. Or, SOCIETE 2 ne ferait pas partie du présent recours.

La partie demanderesse fait plaider que l’introduction de l'article 50bis LIR aurait eu comme objectif non seulement d'inciter les contribuables à développer et à protéger leurs droits de propriété intellectuelle en procédant à l'enregistrement de leurs marques, citant des extraits des travaux parlementaires y relatifs, mais également de mettre en place un régime fiscal spécifique pour les droits de propriété intellectuelle afin de pallier à la suppression du régime Holding 29, « afin de se rapprocher du traitement [fiscal] actuel de ces activités dans le cadre des sociétés holdings 29 ».

Quant à la propriété économique des marques au sens du paragraphe 11 StAnpG, la partie demanderesse fait encore répliquer que la jurisprudence administrative aurait établi les critères suivants, basés sur la capacité de vendre, d’acquérir ou de transiger sur un actif, respectivement sur le pouvoir de bénéficier à la fois des chances d'appréciation et des risques de dépréciation d'un actif. Or, le délégué du gouvernement resterait en défaut de prouver utilement que ces critères seraient remplis en l’espèce dans son chef, la partie demanderesse soulignant qu’au vu des stipulations du contrat de licence, elle serait incapable de pouvoir agir comme « Eigenbesitzer » du fait de ne disposer que d'un droit non-exclusif d'usage et d'exploitation des marques pour une durée limitée, sans que « (…) les droits et obligations y contenues ne p[uiss]ent en aucun cas être transmises à un tiers, ni être considérées comme un des éléments d'actif […] ni être mis en vente (…) », le contrôle sur les marques appartenant exclusivement à SOCIETE 2 qui aurait seule la capacité de vendre, de transiger, et plus généralement d'agir sur les marques protégées par ses soins et inscrites à l'actif de son bilan.

Enfin, SOCIETE 2 aurait la maîtrise des avantages économiques futurs générés par les marques, tout en devant assumer l'entièreté des risques y afférant, la partie demanderesse renvoyant, à cet égard, aux comptes annuels de cette dernière pour les années 2011 à 2013, tels qu’ils figureraient au dossier fiscal, lesquels renseigneraient diverses dépréciations dont les marques auraient fait l'objet par le biais d'amortissements.

En ce qui concerne la modification de son objet social au courant de l’année 2021, la partie demanderesse fait relever que ce constat ne serait d’aucune pertinence en l’espèce, alors qu’au-delà du constat que le changement ne serait effectif qu’à partir du 2 mars 2021, de sorte à corroborer l’affirmation que ce n’aurait pas été le cas lors des années litigieuses, à savoir 2014 et 2015, il faudrait considérer que les activités reprises à l'objet social d’une société ne constitueraient pas des activités exercées en fait, mais simplement des activités que la société serait habilitée à exercer au cas où, par exemple, elle deviendrait titulaire de marques à l'avenir.

Quant au respect du principe de pleine concurrence, la partie demanderesse fait répliquer que la concession d'un droit d'usage et d'exploitation de marques entre deux entreprises non liées aurait nécessairement donné lieu au paiement d'une redevance de licence, comme le démontrerait l'étude NERA, de sorte que tant SOCIETE 2 qu’elle-même auraient agi dans le plus grand respect de leurs intérêts économiques et sociaux en procédant à la mise en compte de redevances. Affirmer le contraire, comme le ferait le délégué du gouvernement, nierait la réalité économique et enfreindrait le principe de pleine concurrence.

En ce qui concerne l’affirmation du délégué du gouvernement selon laquelle les marges opérationnelles auraient chuté suite à la facturation des redevances, la partie demanderesse fait relever, outre le fait que tout versement de redevances entraînerait une chute des marges opérationnelles en tant que charge, que le dossier fiscal ne comporterait pas de rapport de la division économique établissant que la facturation de redevances ne correspondrait pas à la réalité économique, de sorte que les développements fondés sur un tel rapport devraient être écartés des débats pour violation du principe du contradictoire.

Conformément à la demande du délégué du gouvernement concernant plus particulièrement la marque « MARQUE 1 », la partie demanderesse affirme avoir versé au dossier la ventilation du chiffre d'affaires résultant de la presse écrite, respectivement de la presse en ligne pour les années 2012 à 2015. Au vu du volume très important de factures y relatives (plusieurs milliers par année), ces dernières ne seraient versées qu’à la demande expresse du tribunal.

Enfin, concernant le constat du délégué du gouvernement selon lequel l'annexe 1 au contrat de licence du 1er septembre 2011 mentionnerait uniquement les marques « MARQUE 1 » (n° …) et « GROUPE » (n° … et n° …), déposées durant l'année 2010 et non pas les marques « MARQUE 1 » (n° …) et « GROUPE » (n° … et n° …) déposées durant l'année 2014, de sorte qu’il serait étonnant que le contrat n’ait pas connu de modification afférente, la partie demanderesse se réfère à l’article 1.1 du contrat de licence précisant que le contrat viserait les marques mentionnées à l’annexe ainsi que toutes les marques actuelles ou futures que SOCIETE 2 pourrait utiliser, déposer ou enregistrer, comportant ou incorporant les représentations des enregistrements concernées, de sorte à englober les marques « MARQUE 1 » (n° …) et « GROUPE » (n° … et n° …) déposées durant l'année 2014, sans qu'aucune modification du contrat de licence n'aurait été nécessaire pour justifier le paiement de redevances pour l'usage de ces marques.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet des deux recours qui ne seraient fondés en aucun de leurs moyens, en reprenant en substance les motifs de la décision directoriale déférée, tout en précisant qu'il n'y aurait pas l'ombre d'un doute que le système de facturation de redevances par SOCIETE 2 n'aurait été mis en place que pour réduire la base imposable de la partie demanderesse, ce qui serait d’ailleurs confirmé par le fait qu'avant l'application des dispositions de l'article 50bis LIR, le groupe GROUPE aurait déjà porté en déduction des redevances de son résultat imposable par l'intermédiaire d'une société Holding 29, en l'occurrence la société SOCIETE 6 , structure remplacée en date du 1er janvier 2011, date à laquelle le régime Holding 29 aurait été abrogé et qui aurait même permis une non-imposition totale des redevances au niveau de la société Holding 29, contrairement au régime de l’article 50bis LIR prévoyant seulement une imposition réduite à hauteur de 20% au niveau de SOCIETE 2.

Ainsi, le transfert de bénéfices d’abord vers une société non-imposable, à savoir la société SOCIETE 6 , et puis vers une société bénéficiant d'une exonération à hauteur de 80% des redevances, à savoir SOCIETE 2, documenterait une certaine tendance itérative du groupe GROUPE .

Il résulterait encore d'un rapport établi par la division économique, ayant relevé que les marges opérationnelles auraient chuté en 2014 et en 2015 de 8,48%, respectivement de 8,05% suite à la facturation des redevances, que ladite facturation ne correspondrait pas à la réalité économique, alors qu’un gestionnaire normalement prudent et diligent et soucieux de la rentabilité de son entreprise n'aurait pas accordé un avantage similaire à un tiers.

Le délégué du gouvernement souligne encore qu’il importerait peu que l’administration des Contributions directes aurait fait référence au nouvel article 56 LIR non encore applicable avant l’année fiscale 2015, alors que le principe de pleine concurrence se trouverait ancré depuis longtemps à l'alinéa 3 de l'article 164 LIR relatif aux distributions cachées de bénéfices.

Il donne encore à considérer qu’en versant l’étude NERA, la partie demanderesse reconnaîtrait implicitement que les redevances figurant dans le contrat de licence du 1er septembre 2011, en l'occurrence de 9 à 10%, seraient trop élevées et ne correspondraient dès lors pas au principe de pleine concurrence.

Ensuite, le délégué du gouvernement entend attirer l'attention sur le fait que la marque « MARQUE 1 » aurait été déposée auprès de l'OHMI en dates des 25 novembre 2005 (numéro …) et 7 juin 2010 (numéro …) par SOCIETE 2 afin de l'enregistrer dans les classes afférentes à la presse écrite, respectivement dans celles relatives à la presse en ligne. Or, le 20 mars 2014 et le 14 août 2014, la marque « MARQUE 1 » aurait encore une fois été déposée et enregistrée auprès de l'OHMI (numéro …) par SOCIETE 2, cette fois-ci dans les classes en relation avec la presse écrite et la presse en ligne, de sorte qu’il y aurait donc coexistence de deux marques enregistrées pour les classes de la presse en ligne, ceci depuis le 14 août 2014.

Il en serait de même en ce qui concerne la marque figurative « GROUPE » qui aurait été enregistrée le 3 mai 2011 dans les classes 9, 16, 35, 38, 41 et 42 (numéro …), ainsi que le 14 août 2014 dans les classes 9, 16, 35, 36, 38, 41, 42, 45 (numéro …). Etant donné que dès lors que la marque « MARQUE 1 » et la marque figurative « GROUPE » existeraient doublement dans les registres de l'OHMI, il serait pour le moins étonnant que le contrat de licence du 1er septembre 2011 n'ait pas été modifié au vu des nouveaux dépôts et enregistrements des marques « MARQUE 1 » et « GROUPE », ce qui porterait à confusion, alors que si les anciennes marques avaient été remplacées par celles déposées au cours de l'année 2014, le versement de redevances sur base du contrat de licence du 1er septembre 2011 ne s'avérerait plus de droit, car se rapportant, entre autres, aux marques « MARQUE 1 » (numéro …) et « GROUPE » (numéro …). Par conséquent les redevances y relatives ne seraient pas déductibles au titre des années d'imposition 2014 et 2015, d’autant plus qu’au sujet des redevances perçues pour l'usage ou la concession de l'usage de la marque « MARQUE 1 », la partie demanderesse manquerait de renseigner, factures à l’appui, d'un côté, le total du chiffre d'affaires généré par la presse écrite, et de l'autre côté, le total du chiffre d'affaires généré par la presse en ligne, les relevés versés avec la requête introductive d’instance ne concerneraient que les recettes publicitaires digitales pour les années 2014 et 2015, aucun relevé n’ayant été versé pour les années 2012 et 2013.

Ce serait dès lors à bon droit que la décision directoriale aurait conclu que la partie demanderesse serait le propriétaire économique des marques litigieuses, alors que l’argumentation suivant laquelle seule SOCIETE 2 se chargerait du développement, du maintien et de la commercialisation des marques ne serait pas compatible avec le constat que cette dernière n'emploierait pas de personnel, de sorte que ce serait bien la partie demanderesse qui en reconnaissant « qu'elle puisse être amenée à engager des frais », gérerait finalement toutes les marques déposées par son actionnaire.

Le délégué du gouvernement fait encore souligner que lors de l'assemblée générale extraordinaire du 2 mars 2021, les actionnaires de la partie demanderesse auraient décidé de modifier son objet social qui inclurait actuellement « l'exploitation de ses propres marques médias, sous quelque forme que ce soit », de sorte à reconnaître être le véritable possesseur des marques litigieuses qui seraient toujours juridiquement détenues par SOCIETE 2, de sorte à corroborer la thèse suivant laquelle elle aurait exploité elle-même toutes les marques depuis leurs dépôts et enregistrements par SOCIETE 2, mis sur pied dans le seul but de réduire la base imposable par la facturation de redevances.

Force est d’abord au tribunal de relever que les parties sont en désaccord sur la possibilité pour la partie demanderesse de déduire en tant que dépenses d’exploitation les redevances qu’elle a réglées pour les licences des marques « MARQUE 1 », « MARQUE 3 », « MARQUE 2 » et « GROUPE » dans le cadre de l’imposition de ses revenus pour les années 2012 à 2015.

L’article 45 LIR définit comme dépenses d’exploitation les « dépenses provoquées exclusivement par l’entreprise ».

Si des paiements afin de se voir accorder une licence pour l’utilisation d’une certaine marque dans le cadre de son activité par une société commerciale peuvent a priori être considérés comme ayant été provoqués exclusivement par l’entreprise, de sorte à pouvoir être reconnus en tant que dépenses d’exploitation, la partie gouvernementale s’y oppose en l’espèce sur base de l’article 11 StAnpG en soutenant que les marques litigieuses seraient à considérer comme appartenant en réalité au patrimoine de la partie demanderesse qui en serait le propriétaire économique et que toute la structuration du groupe de sociétés auquel appartient la partie demanderesse ainsi que les contrats de licence ne se justifieraient pas par des raisons économiques valables autres que fiscales, de sorte qu'il y aurait lieu de réintégrer les redevances payées par la partie demanderesse à son résultat déclaré, conformément aux dispositions de l'article 164, alinéa 3 LIR.

Il échet ainsi, dans un premier temps, de déterminer le propriétaire économique des marques litigieuses au sens du paragraphe 11 StAnpG, disposant que « Für die Zurechnung bei der Besteuerung gelten, soweit nichts anderes bestimmt ist, die folgenden Vorschriften :

(…) 4. Wirtschaftsgüter, die jemand in Eigenbesitz hat, werden dem Eigenbesitzer zugerechnet. Eigenbesitzer ist, wer ein Wirtschaftsgut als ihm gehörig besitzt. ».

En effet, en droit fiscal, le tribunal ne saurait s'arrêter aux seules formes juridiques choisies par les parties pour réaliser une opération déterminée, mais il est appelé, au-delà de l'apparence juridique, de rechercher et d'analyser la réalité économique recouverte par lesdites formes juridiques. En effet, il est de principe en droit fiscal que les faits et les actes juridiques doivent être interprétés et appréciés d'après des critères économiques. La définition du « Eigenbesitzer » au sens du paragraphe 11, point. 4 StAnpG constitue un concept sui generis de nature fiscale, qui ne se couvre pas avec les catégories du droit civil et il se dégage du terme en question que la loi envisage la situation d'un possesseur plutôt que d'un propriétaire juridique, de sorte qu'elle n'exige pas que tous les attributs du propriétaire soient réunis dans la personne de ce possesseur spécial1.

Il est d’abord constant en cause que SOCIETE 2 est titulaire et partant propriétaire juridique des marques verbales suivantes, à savoir « MARQUE 1 », depuis le 7 juin 2010, « MARQUE 3 », depuis le 9 septembre 2010 ainsi que « MARQUE 2 », depuis le 26 mai 2010, de même que des marques verbale et figurative « GROUPE », depuis respectivement le 26 août 2010 et le 19 novembre 2010, enregistrements tous renouvelés le 20 mars 2014, soit valablement protégés avant les années d’imposition concernées et tout au long des années d’imposition litigieuses de 2012 à 2015, étant cependant relevé que jusqu’à son dépôt, par SOCIETE 2 en date du 20 mars 2014, de la marque « MARQUE 1 » également pour la classe de la presse écrite, la marque « MARQUE 1 » pour la presse écrite n’était pas détenu par SOCIETE 2, mais par la société SOCIETE 3 (N° EUTM – …), ce qui ne porte cependant pas préjudice au principe que des redevances ont été réglés par la partie demanderesse pour l’utilisation de cette marque dans la classe concernée.

En effet, il ressort également des pièces versées, que, d’un côté, par un contrat de licence de marque conclu en date du 1er janvier 2010 entre les sociétés ayant précédé la société SOCIETE 3 et la partie demanderesse, à savoir la société SOCIETE 6 , respectivement la société anonyme SOCIETE 7 SA, la partie demanderesse s’est vue accorder une licence d’exploitation exclusive de la marque « MARQUE 1 » (N° EUTM – …) pour la durée d’une année, renouvelable tacitement, en contrepartie d’une redevance unique s’élevant à …,- euros, et, d’un autre côté, par un « contrat de licence de marque » du 1er septembre 2011, SOCIETE 2 a concédé à la partie demanderesse un droit « non-exclusif d'usage et d'exploitation » des marques précitées ci-avant pour une durée initiale de cinq années, renouvelable tacitement d’année en année, en contrepartie du paiement d'une redevance de licence se composant d’un montant forfaitaire annuel de …,- euros et d’un montant proportionnel annuel de 10 % du chiffre d’affaire hors taxes réalisé par la partie demanderesse. Il échet de relever, dans ce contexte, qu’en application de la clause n°1.1 du contrat de licence, le droit d’exploitation des marques litigieuses s’étend à « toutes les marques actuelles ou futures que le Donneur de Licence pourrait utiliser, déposer ou enregistrer qui comporteraient ou incorporeraient les représentations des enregistrements ci-avant cités », de manière à englober nécessairement les renouvellements des marques litigieuses, ainsi que l’extension desdites marques à d’autres classes de produits et de services, tel que cela a été fait par SOCIETE 2 en date du 20 mars 2014.

Il suit ensuite d’une notification de modification du montant des redevances, en application de la clause 7, dernier alinéa du contrat de licence, notification expressément acceptée par la partie demanderesse en date du 20 décembre 2012, qu’à partir du 1er janvier 2013, les redevances ont été fixées à 10 % du chiffre d’affaires hors taxes par rapport aux marques « MARQUE 2 », « MARQUE 3 » et « MARQUE 1 », ainsi qu’à 9 % du chiffre d’affaires hors taxes par rapport aux marques verbale et figurative « GROUPE ».

1 Trib. adm 25 août 1999, n° 10456 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Impôts, n° 79 et les autres références y citées.

Au-delà du constat qu’il n’est pas allégué par la partie gouvernementale ni d’ailleurs établi au regard des éléments du dossier soumis au tribunal que la partie demanderesse aurait été un jour propriétaire juridique des marques litigieuses pour les transférer ensuite à ses sociétés mères dans le but de pouvoir déduire les redevances y relatives, force est de relever que les deux contrats de licence précités ne prévoient pas pour le preneur de licence, sauf autorisation expresse, de droit de cession et de concession de sous-licences, tout en stipulant expressément l’obligation au donneur de licence de maintenir en vigueur les marques litigieuses, sans que la mention, se retrouvant dans la clause 8 du contrat du 1er septembre 2011, selon laquelle le preneur de licence s’oblige à prêter toute assistance nécessaire au donneur de licence dans ce contexte, ne puisse être interprétée, faute d’autres éléments, comme une nécessaire obligation pour le preneur de licence à supporter les frais de maintien en vigueur, tel que le prétend partant à tort la partie gouvernementale, étant encore relevé que l’envergure de cette assistance est notamment précisé dans le 2e alinéa de cette même clause, comme étant l’engagement à mettre à disposition du donneur de licence toute information et toute donnée permettant l’amélioration, le développement et l’optimisation des marques.

Ainsi, il résulte de l’ensemble des stipulations des deux contrats que les donneurs de licence, à savoir la société SOCIETE 3 et SOCIETE 2, entendent rester le propriétaire économique des marques litigieuses, se réservant tous les droits à cet égard, lesdits contrats ayant été conclus dans le cadre de l’exercice de leurs droits de propriété exclusifs afférents par la commercialisation des droits de marques au biais de la concession de licences d'exploitation non exclusives, sauf en ce qui concerne la marque « MARQUE 1 » (N° EUTM – …), ayant été exclusive jusqu’en 2014.

Ces considérations ne sont pas mises à mal par la circonstance que SOCIETE 2 n’aurait pas de salariés pour procéder aux mesures de conservation de sa propriété intellectuelle au vu des explications non énervées fournies à ce titre par la partie demanderesse.

Si la partie gouvernementale estime qu’en l’espèce, la partie demanderesse devrait être néanmoins considérée comme propriétaire économique des marques litigieuses au sens du paragraphe 11, numéro 4 StAnpG précité, elle laisse pourtant d’établir de manière suffisamment convaincante qu’en dépit des considérations qui précèdent, la partie demanderesse se serait, en l’espèce, comporté de manière telle qu'elle aurait enlevé « au propriétaire juridique toute possibilité de disposer dudit bien », critère qu’elle souligne elle-

même, par référence à sa circulaire LIR n°50bis/1.

Cette conclusion n’est pas énervée par la référence au rapport de la division économique, figurant au dossier fiscal, dont il résulterait que la partie demanderesse aurait engagé des frais de développement des marques litigieuses à un tel point qu’elle devrait être considéré comme le propriétaire économique de celles-ci, alors qu’au vu des contestations par la partie demanderesse des chiffres figurant au tableau 1 dudit rapport, tel que repris dans la décision directoriale déférée, citée in extenso ci-avant, et faute d’une explication concrète quant aux sommes ainsi mises en évidence - le rapport se limitant, dans une note de bas de page, d’indiquer avoir retenu « les frais direct de publicité dans la comptabilité du preneur de licence, ainsi que les frais en relation avec des réceptions et les frais de représentation – frais considérés comme étant en lien direct avec le maintien, le développement, la gestion, la protection et l’exploitation de la marque » -, il est impossible au tribunal de vérifier les chiffres ainsi avancées par la partie gouvernementale qui ne ressortent pas de manière évidente des différents éléments du dossier fiscal tel que déposé au greffe.

Les qualités de propriétaire économique des marques litigieuses dans le chef de la partie demanderesse ne ressortent pas non plus du constat que la marque « GROUPE » ne correspondrait pas à une publication concrète de la partie demanderesse, alors que, d’après les explications non énervées de la partie demanderesse, cette marque constitue non seulement la marque fédératrice de toutes les autres marques, mais qu’elle est également utilisée tant dans le cadre des produits commercialisés par la partie demanderesse que dans le cadre des autres activités et services fournies, même non liés aux autres marques litigieuses données en licence. De plus, la partie gouvernementale n’établit pas que cette marque ou même sa seule dénomination aurait été librement utilisée par la partie demanderesse avant son dépôt par SOCIETE 2, en date du 26 août 2010, et ce même si les initiales « GROUPE » se retrouvent - d’ailleurs seulement depuis son changement de nom en date du 11 janvier 2011 - dans sa dénomination sociale.

En ce qui concerne la critique de la partie gouvernementale selon laquelle il aurait été plus économique pour la partie demanderesse de procéder elle-même au dépôt de la marque « GROUPE », respectivement des autres marques litigieuses, mettant ainsi en cause la structuration du groupe GROUPE , qui n’aurait été conçue que dans un but purement, sinon quasi-exclusivement fiscal, force est de rappeler qu’il est de jurisprudence constante que le caractère simplement inhabituel des formes, constructions ou opérations de droit privé n’est pas à lui seul suffisant pour les voir qualifier d’inadéquates au vu de la liberté en principe reconnue au contribuable de choisir la voie la moins imposée, mais qu’il faut, dans un cas tel celui de l’espèce, que l’objectif économique soit atteint par cette voie dans le contexte économique donné d’une manière telle qu’elle permet l’obtention d’un effet fiscal que le législateur ne peut pas être considéré comme ayant voulu accorder dans le cadre d’une application de la loi fiscale conforme à son intention2, impliquant qu’il appartient à la partie demanderesse d’établir que la structuration litigieuse est justifiée par des motifs extra-fiscaux valables, à savoir des motifs considérés comme réels et présentant par eux-mêmes un avantage économique suffisant au-delà du seul bénéfice fiscal obtenu3.

Si la structuration du groupe GROUPE a certes pour effet de réduire le résultat imposable de la partie demanderesse en raison des redevances de licences de marques qu’elle doit régler à SOCIETE 2 qui, elle, pourra ensuite profiter du régime de l’article 50bis LIR, force est d’abord de rappeler que la partie demanderesse n’a jamais été propriétaire juridique des marques litigieuses, qui ont toujours appartenu à des sociétés-mères directes ou indirectes de la partie demanderesse, de sorte que le fait que le groupe se soit restructuré à la fin du régime Holding 29 pour pouvoir adopter le régime de l’article 50bis LIR ne saurait lui être reproché, non seulement au vu des considérations sous-jacentes à la mise en place de ce dernier régime, telles que révélées dans les travaux parlementaires afférents cités par la partie demanderesse, mais également vu que cette démarche s’est faite dans la continuation de la structuration déjà en place avant, dans le cadre de laquelle une société-mère du groupe détient les droits de marques exploitées par sa ou ses sociétés filiales.

2 Trib, adm. 27 juin 2013, n° 30540 du rôle, conf par Cour adm., 18 mars 2014, n° 33125C du rôle, Pas. adm.

2021, V° Impôts, n° 36 et les autres références y citées.

3 Trib, adm., 28 janvier 2015, n° 33984 du rôle, conf. sur ce point par Cour adm, 16 février 2016, n° 35979C du rôle, V° Impôts, n° 37 et l’autre référence y citée.

En effet, au-delà des raisons fiscales d’une telle structuration, la partie demanderesse a encore valablement mis en exergue que la constellation du groupe GROUPE ainsi choisie permet de centraliser la propriété intellectuelle du groupe dans une structure séparée afin de la mettre à l’abri des risques de l’activité opérationnelle du groupe, exercée en l’occurrence par la partie demanderesse, une telle structuration ayant déjà été jugée comme étant justifiée par des motifs économiques extra-fiscaux valables4,5.

A cela s’ajoute que cette même configuration permet en outre, tel que le relève la partie demanderesse, de concevoir une participation dans les recettes liées aux marques litigieuses par les actionnaires de la société détentrice des droits, à travers, en l’occurrence, la société SOCIETE 8 regroupant, en tant qu’actionnaires à parts inégales, différents employés du groupe, structuration permettant de réserver une part privilégiée des bénéfices du groupe à l’actionnaire fondateur qui a les plus grands mérites dans le développement du groupe par rapport à des employés méritants qui seraient admis à devenir coactionnaires des sociétés opérationnelles du groupe en vue d'être intéressés aux bénéfices futurs de ces sociétés, mais qui ne devraient pas être admis à profiter gratuitement des efforts passés des anciens actionnaires6. Cette dernière considération ne saurait être mise à mal par la circonstance que la société SOCIETE 8 n’est entrée dans le capital de SOCIETE 2 qu’à partir du 20 juillet 2010, soit après le dépôt de la marque « MARQUE 1 », par SOCIETE 2 en date du 7 juin 2010, étant encore relevé que la mise en place d’une structuration en vue d’accueillir de nouveaux actionnaires ne saurait dépendre de l’arrivée concrète des actionnaires en question.

Il ressort finalement des explications et schémas non énervées de la partie demanderesse, telle que notamment sa prise de position par rapport à la mise en état du 12 février 2019, que les mesures de restructurations entreprises par le groupe à la date du 24 septembre 2012 ne concernent qu’une simplification générale du groupe, ne touchant pas à la relation entre la partie demanderesse et son actionnaire principal, SOCIETE 2, détentrice des marques litigieuses.

Il suit des considérations qui précèdent que la qualité de propriétaire économique des marques litigieuses dans le chef de la partie demanderesse ne résulte pas non plus de la structuration du groupe GROUPE , pour laquelle elle a valablement mis en avant des considérations économiques autres que fiscales.

En ce qui concerne l’affirmation de la partie gouvernementale selon laquelle la partie demanderesse devrait être considéré comme propriétaire économique des marques litigieuses en raison du caractère substantiel des redevances payées qui ne seraient pas conformes au principe de pleine concurrence, force est d’abord au tribunal de relever qu’il importe peu que l’administration des Contributions directes ait initialement basé cette motivation sur une version de l’article 56 LIR qui n’est applicable que depuis l’année fiscale 2015, alors que c’est à bon droit que le délégué du gouvernement a souligné que ce principe, d’origine internationale pour avoir été adoptée par les pays membres de l’OCDE pour la détermination des prix de transfert entre entreprises associées effectuant des transactions transfrontalières, trouve sa base au niveau national dans l’article 164 LIR relatif aux distributions cachées de bénéfices applicable à toutes les années d’impositions litigieuses et aux termes duquel il y a 4 Cour adm., 2 août 2017, n°39021C du role, disponible sous www.jurad.etat.lu 5 En ce sens : Trib. adm., 11 novembre 2016, n° 36719 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu 6 Cour adm., 2 août 2017, n°39021C du role, disponible sous www.jurad.etat.lu distribution cachée de bénéfices si un associé, sociétaire ou intéressé reçoit directement ou indirectement des avantages d'une société ou d'une association dont normalement il n'aurait pas bénéficié s'il n'avait pas eu cette qualité.

Si la partie demanderesse a, dans un premier temps tenté de justifier le niveau des redevances qu’elle doit régler aux titulaires des marques litigieuses par renvoi à une étude de prix ne correspondant pas aux principes OCDE, force est de relever qu’il n’est pas contesté en cause que l’étude NERA y est conforme, de sorte qu’elle est a priori pertinente dans le cadre de la fixation des tarifs de pleine concurrence applicables.

S’agissant d’un élément de preuve dans le cadre de la preuve à rapporter par la partie demanderesse que les redevances des marques litigieuses respectent le principe de pleine concurrence, le tribunal, dans le cadre de ses pouvoirs de statuer, en tant que juge de fond, par rapport à la situation de fait et de droit telle qu’elle se présente au jour de son jugement, ne saurait écarter les conclusions de ladite étude pour la seule raison qu’elle n’ait été effectuée qu’en date du 13 juin 2018, soit postérieurement aux années d’imposition litigieuses, étant encore relevé, tel que soutenu par la partie demanderesse, que la production ex post d’une étude de prix pour les seuls besoins de la procédure est admissible7.

C’est encore à bon droit que la partie demanderesse a réfuté l’argumentation gouvernementale selon laquelle l’étude NERA se trouverait « falsifiée » du fait de l’inclusion de la marque « MARQUE 4 » pour laquelle la partie demanderesse ne verse pourtant pas de redevances, alors que la conclusion, non autrement critiquée par la partie gouvernementale, de l’étude NERA, selon laquelle « un taux maximum de 7,1 % devrait être représentatif de pratiques de pleine concurrence » et que « l’analyse mise en œuvre aboutit à conclure que les termes et conditions de la Transaction Couverte sont proches de termes et conditions de pleine concurrence », vise nécessairement les taux fixés en l’espèce pour les redevances payées par la partie demanderesse et qui sont fixés par marque en fonction d’un pourcentage de 10%, respectivement de 9% sur le chiffre d’affaire hors taxes afférent. Ainsi, en déterminant un taux maximal de 7,1 %, l’étude NERA vise nécessairement toutes les marques prises de manière individuelle, sans faire de différence de taux en fonction des différentes marques analysées, de sorte que le fait que la marque « MARQUE 4 », a également fait l’objet de l’analyse, sans qu’elle ne fasse pourtant l’objet des contrats de licence litigieux, ne porte pas à conséquence.

Etant donné que l’étude NERA retient que les taux de redevances pratiqués en l’espèce sont « proches », des termes et conditions de pleine concurrence, les redevances pratiquées ne sauraient être à ce point exorbitants qu’ils seraient de nature à établir, de ce seul fait, la qualité de propriétaire économique des marques litigieuses dans le chef de la partie demanderesse.

Il suit de toutes les considérations qui précèdent qu’il n’est pas établi que la partie demanderesse devrait, en application du paragraphe 11, point 4 StAnpG, être considérée en l’espèce comme étant le véritable propriétaire économique des marques litigieuses, de sorte que tant la décision directoriale que les bulletins déférés sont à réformer dans le sens que ces redevances sont à considérer comme des dépenses d’exploitation provoquées exclusivement par l’entreprise, dans la mesure où elles ne dépassent pas, dans leur ensemble, le taux de 7,1% 7 Trib. adm., 22 octobre 2018, n° 40348 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu du chiffre d’affaire annuel afférent, tel que retenu par l’étude NERA, taux non autrement remis en cause par la partie gouvernementale.

La partie demanderesse n’ayant pas établi en quoi il serait inéquitable qu'elle supporte seule les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, elle est à débouter de ses demandes respectives en allocation d'une indemnité de procédure d’un montant de 10.000,- euros présentées dans chacun des deux rôles.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

prononce la jonction des rôles nos 45813 et 43525 ;

reçoit en la forme le recours principal en réformation dirigé contre la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 4 juin 2019 ;

au fond, le déclare justifié, partant, par réformation de la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 4 juin 2019, dit que les redevances payées pour la licences des marques « MARQUE 2 », « MARQUE 3 », « MARQUE 1 », ainsi que « GROUPE » sont à considérer comme des dépenses d’exploitation au sens de l’article 45 LIR dans la mesure où elles ne dépassent pas, dans leur ensemble, le taux de 7,1% du chiffre d’affaire annuel afférent et renvoie le dossier en prosécution de cause au directeur de l’administration des Contributions directes ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation afférent ;

reçoit en la forme le recours principal en réformation dirigé contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour les années 2014 et 2015 ;

au fond, le déclare justifié, partant, par réformation des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de l’impôt commercial communal pour les années 2014 et 2015, dit que les redevances payées pour la licences des marques « MARQUE 2 », « MARQUE 3 », « MARQUE 1 », ainsi que « GROUPE » sont à considérer comme des dépenses d’exploitation au sens de l’article 45 LIR dans la mesure où elles ne dépassent pas, dans leur ensemble, le taux de 7,1% du chiffre d’affaire annuel afférent et renvoie le dossier en prosécution de cause devant le bureau d'imposition Luxembourg Sociétés 2 de l’administration des Contributions directes ;

rejette les demandes respectives en allocation d'une indemnité de procédure d’un montant de 10.000,- euros présentées par la partie demanderesse dans les deux rôles ;

condamne l’Etat aux frais et dépens de l’instance ;

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 3 juin 2022 par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, premier juge, Emilie Da Cruz De Sousa, juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 3 juin 2022 Le greffier du tribunal administratif 36


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 43525,45813
Date de la décision : 03/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-06-03;43525.45813 ?

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