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19/04/2022 | LUXEMBOURG | N°44045

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 19 avril 2022, 44045


Tribunal administratif N° 44045 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 janvier 2020 4e chambre Audience publique du 19 avril 2022 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du Conseil de discipline des fonctionnaires de l’Etat en matière de discipline

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 44045 du rôle et déposée le 22 janvier 2020 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie Bauler, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre

des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à L-…, tendant principalement à ...

Tribunal administratif N° 44045 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 janvier 2020 4e chambre Audience publique du 19 avril 2022 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du Conseil de discipline des fonctionnaires de l’Etat en matière de discipline

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 44045 du rôle et déposée le 22 janvier 2020 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie Bauler, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision du Conseil de discipline des fonctionnaires de l’Etat du 22 octobre 2019 ayant prononcé, à son égard, la sanction de la révocation prévue à l'article 47 sub 10 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Martine Lisé, demeurant à Luxembourg, du 4 février 2020, portant signification du recours à l’établissement public Caisse Nationale de Santé, établi à L-1471 Luxembourg, 125, route d’Esch, représenté par le président de son comité de direction actuellement en fonction, enregistré au registre de commerce et des sociétés sous le numéro J21 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 29 avril 2020 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, représentée aux fins de la présente instance par Maître Louis Berns, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour le compte de l’établissement public Caisse Nationale de Santé, préqualifié ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 14 mai 2020 par le délégué du gouvernement ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 15 juin 2020 par Maître Jean-Marie Bauler préqualifié, pour compte de sa mandante ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 14 juillet 2020 par le délégué du gouvernement ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jean-Marie Bauler, Maître Louis Arendt, en remplacement de Maître Louis Berns, et Monsieur le délégué du gouvernement Yannick Genot en leurs plaidoiries à l’audience publique du 16 novembre 2021 ;

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Par courrier du 12 février 2019, le président de la Caisse nationale de santé, dénommée ci-après « la CNS », saisit le commissaire du gouvernement chargé de l'instruction disciplinaire, dénommé ci-après « le commissaire du gouvernement », afin de procéder à une instruction disciplinaire à l'encontre de Madame …, employée assimilée à une employée de l'État de la carrière … auprès de la CNS, conformément à l'article 56 paragraphe 2 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat, dénommée ci-

après « le statut général ».

Par courrier du 13 février 2019, le commissaire du gouvernement informa Madame … qu'une instruction disciplinaire avait été ordonnée à son encontre tout en l’invitant à se présenter au commissariat du gouvernement chargé de l'instruction disciplinaire pour une audition devant se dérouler le 28 février 2019 afin de prendre position par rapport aux faits lui reprochés, audition ayant finalement eu lieu en date du 18 mars 2019.

En date du 27 mai 2019, le commissaire du gouvernement clôtura son instruction par l’émission d’un rapport d’instruction.

Par un courrier du même jour, le commissaire du gouvernement informa Madame … qu’il envisagea de transmettre le dossier au conseil de discipline des fonctionnaires de l’Etat, ci-

après dénommé le « Conseil de discipline », conformément à l’article 56, paragraphe 5, du statut général, sans préjudice du droit de Madame … de prendre inspection du dossier disciplinaire en vue, le cas échéant, de présenter ses observations, respectivement de demander un complément d’instruction.

Par un courrier de son litismandataire du 11 juin 2019, Madame … fit parvenir ses observations au commissaire du gouvernement ce qui amena ce dernier à procéder à un rapport d’instruction complémentaire émis le 14 juin 2019 aux termes duquel la décision de transmission du dossier au Conseil de discipline fut maintenue.

En date du 22 octobre 2019, le Conseil de discipline prit la décision qui suit :

« (…) Vu le dossier constitué à charge de … par le commissaire du Gouvernement chargé de l'instruction disciplinaire, ci-après le commissaire, saisi par un courrier daté du 12 février 2019, entré le même jour, par le Président de la Caisse nationale de santé (ci-après la CNS) d'une instruction disciplinaire conformément à l'article 56 paragraphe 2 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat (ci-après désigné comme le « Statut ») et transmis pour attribution au Conseil de discipline par courrier du 14 juin 2019.

Vu le rapport d'instruction du 27 mai 2019 et le rapport d'instruction complémentaire du 14 juin 2019.

Il est reproché à …, du 1er janvier 2008 jusqu'au 4 février 2019, de s'être arrogée, par le biais de saisie d'opérations de remboursement d'argent sur le matricule …, sans que cette personne ait droit à un remboursement de la CNS, un montant de … euros, sans préjudice quant au montant exact, et sur les matricules … et … un montant d'environ … euros sans préjudice quant au montant exact sans que ces personnes aient droit à un remboursement de la CNS. À l'audience il a été précisé que le montant exact s'élève à … euros.

A l'audience publique du Conseil de discipline du mardi 24 septembre 2019, … et son conseil Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour demeurant à Luxembourg, ont été entendus en leurs explications et moyens de défense. Elle a déclaré maintenir ses déclarations effectuées lors de l'instruction disciplinaire et Maître Jean-Marie BAULER a versé une pièce datée du 11 septembre 2019 reprenant le décompte présenté par la CNS s'élevant à … euros, montant qui ne serait pas sujet à contestation de la part de sa cliente, laquelle se serait déclarée d'accord à signer une reconnaissance de dette pour le montant y renseigné.

…, sans contester en substance les reproches, entend les expliquer par la facilité, en l'absence de procédure de contrôle instaurée par la CNS, de se livrer à de tels agissements sans devoir monter un stratagème ingénieux. Avec le temps, encouragée par le succès des opérations passées n'ayant pas suscité l'éveil, elle aurait eu un irrépressible besoin de s'adonner à ses malversations.

Maître Jean-Marie BAULER, sans vouloir minimiser les agissements de sa cliente, a critiqué l'absence de responsabilité assumée tant par la direction de la CNS, que par les responsables politiques face à une situation où il était possible, pendant une décennie, sans faire preuve d'ingéniosité, de détourner des deniers publics sans la moindre procédure de contrôle digne de ce nom. Le constat que le pot aux roses a uniquement été découvert par le pur fruit du hasard serait d'autant plus inquiétant face aux montants pharamineux déboursés pour des audits internes de contrôle et de prévention de la fraude.

Il expose que sa cliente se trouve actuellement en détention préventive au centre pénitentiaire de Luxembourg-Schrassig pour répondre de reproches identiques à ceux actuellement pendants devant le Conseil de discipline et il entend en tirer une violation du principe non bis in idem.

Il invoque ensuite une violation d'un droit essentiel de la défense devant entraîner la nullité de la procédure par le fait d'avoir seulement un délai de 10 jours pour présenter des observations et demander un complément d'instruction. Ce délai aurait été insuffisant pour prendre position à l'égard d'un rapport de 39 pages.

Finalement, il met en avant l'impartialité objective et la partialité subjective du commissaire du gouvernement notamment par sa manière de s'acharner sur le mode de vie affiché par sa cliente, ne reculant pas à annexer au dossier des photos la montrant avec son enfant, à vouloir la discréditer, à la présenter comme non sincère par le fait d'avoir passé sous silence le montant de … euros touché à titre de pension alimentaire pour son enfant et à parler d'énergie criminelle.

Quant au fond, il donne à considérer que sa cliente s'est livrée à des aveux complets, qu'elle est au service de la CNS depuis … en ayant affiché un comportement irréprochable pendant des années, qu'elle est mère de deux enfants, que le fait de se retrouver en détention préventive, ensemble avec son mari, tout en devant à l'avenir assumer le remboursement de sa dette constitueraient autant d'éléments devant militer en sa faveur pour ne pas prononcer dans son chef la révocation, mais une mise à la retraite d'office. Sous cet aspect il fait référence à une décision récente du Conseil de discipline dans une affaire similaire d'une collègue de travail de … où cette sanction a été prononcée.

Maître Louis BERNS, avocat à la Cour demeurant à Luxembourg, a fait valoir les arguments de la CNS et il demande le rejet des moyens présentés pour être non fondés en droit.

Il rappelle que … est suspendue de ses fonctions et que son comportement serait à apprécier d'un point de vue disciplinaire, indépendamment de l'affaire pénale. Elle aurait, pendant plus de 10 ans, par le biais d'environ 840 opérations, détourné plus de … d'euros, n'hésitant même pas à procéder par des rétrocessions et ayant eu le sang-froid et le culot, une fois une enquête interne menée à l'encontre d'une collègue de travail pour des faits identiques, à continuer ses malversations en détournant entre cette date et le jour de son interpellation encore un montant supplémentaire de plus de … euros. Il concède qu'il est permis de critiquer la procédure de contrôle, mais il estime cependant que le système instauré, certes défaillant, ne peut en rien atténuer la responsabilité de …, laquelle a, de façon systématique pendant plus d'une décennie, spolié des deniers publics. Sous cet égard l'expression d'énergie criminelle serait tout à fait appropriée. Vu aussi l'impact médiatique, l'atteinte portée à l'image, à la réputation, à la considération et au crédit tant de la CNS que de ses salariés honnêtes et dévoués serait non négligeable. Il serait évident que la confiance qu'un employeur, en l'espèce l'État, peut et doit raisonnablement placer en son salarié serait irrémédiablement ébranlée et qu'au vu de la particulière gravité des faits, aucune forme de ménagement serait à envisager, de sorte que seule la sanction de la révocation serait appropriée en l'espèce, … n'ayant de surplus toujours pas signé de reconnaissance de dette, sans même parler d'un début de remboursement de sa dette.

Quant aux moyens invoqués :

La violation du principe non bis in idem :

Le Conseil de discipline ne peut que rappeler l'autonomie du droit disciplinaire et les caractères propres à la faute disciplinaire, lesquels font que celle-ci est déterminée selon des critères qui sont différents de ceux qui permettent de définir l'infraction pénale. Cette indépendance se manifeste notamment du point de vue qu'un même fait peut s'analyser à la fois en une faute pénale et en une faute disciplinaire, entraînant l'existence parallèle valable des deux formes de poursuites.

En effet, l'objectif de ces deux procédures est distinct en ce que, d'une part, dans la répression pénale, l'intérêt de la société est en jeu, tandis que, d'autre part, pour tout le volet disciplinaire, essentiellement l'intérêt de la fonction publique est à prendre en considération.

Ainsi reste intact le principe que la règle non bis in idem ne s'applique pas dans les rapports du droit pénal et du droit disciplinaire.

Ce moyen est partant à rejeter.

La violation des droits de la défense :

Si l'autorité administrative en charge de la procédure disciplinaire n'est pas formellement soumise au respect de l'article 6 de la CEDH, elle reste cependant tenue d'observer les principes généraux de droit tels le principe d'équitable procédure, le principe du respect des droits de la défense ou encore le principe général d'impartialité, et ce même en l'absence d'un texte exprès.

Le Conseil de discipline constate cependant que le moyen invoqué manque singulièrement de pertinence pour ne pas détailler en quoi concrètement les droits de la défense de …, en aveu par rapport à l'intégralité des reproches lui adressés, auraient été lésés du fait de devoir se conformer au délai inséré à l'article 56 du statut général pour formuler des points sur lesquels elle sollicite un complément d'instruction.

Il y a lieu de relever de surplus qu'il n'incombe pas au Conseil de discipline de se prononcer de manière générale sur le délai en question inséré dans une loi, mais uniquement de vérifier in concreto, par rapport aux faits du cas d'espèce soumis, si pareil délai, au vu des circonstances du dossier, a permis un exercice effectif des droits de la défense.

Rien ne permet seulement d'entrevoir que … n'aurait pas pu exposer sa défense ou aurait été limitée dans l'exercice de ses droits de la défense, d'autant plus que la possibilité de demander un complément d'instruction n'est pas un droit discrétionnaire et qu'il faut formuler de manière précise les points sur lesquels un complément est sollicité aussi pour permettre d'en apprécier la pertinence afin notamment de ne faire droit à des demandes dont l'objectif serait uniquement de retarder l'instruction.

Afin d'être complet, il y a lieu de signaler qu' à l'audience du Conseil de discipline, aucune mesure d'instruction complémentaire n'a été sollicitée par … conformément à l'article 66 du statut général, son avocat ayant pris exhaustivement position quant aux manquements reprochés de sorte que faute d'étayer le moyen en apportant des indices précis, objectifs et surtout vérifiables, aucune violation des droits de la défense ne se dégage du dossier et ce moyen est à déclarer non fondé.

Quant à l'impartialité objective et la partialité subjective du commissaire :

Le Conseil de discipline constate qu'aucune argumentation nouvelle précise par rapport à une impartialité objective du commissaire n'a été développée par Maître BAULER, de sorte qu'il est renvoyé sous ce rapport aux principes réaffirmés dans un arrêt de la Cour administrative du 14 juillet 2016 (n°37460C du rôle) où il a notamment été rappelé que la tâche du commissaire du gouvernement, telle qu'organisée par l'article 56 du statut général, ne révèle pas une impartialité objective, telle qu'avancée.

Concernant la prétendue partialité subjective du commissaire du gouvernement, le pressentiment de … quant à un acharnement sur sa personne doit s'analyser à la lumière des attributions conférées au commissaire lequel doit certes instruire à décharge, mais aussi à charge et, dans ce contexte, il est de son devoir de faire preuve d'une approche méticuleuse afin de mettre en exergue tous les détails, même ceux paraissant aux yeux de l'intéressée insignifiants ou gênants ou encore inappropriés, qu'il juge utiles y compris l'attitude de l'intéressée par rapport aux faits reprochés non seulement pour lui permettre de prendre, sur le fondement de l'article 56, paragraphe 5, du statut général, une décision, mais également en cas de transmission du dossier au Conseil de discipline, de soumettre aux membres une instruction ficelée présentant tous les atouts pour prendre une décision éclairée et à bon escient.

Si la défense estime que le commissaire n'a pas fait une description équilibrée et pondérée des faits notamment en faisant usage du terme « énergie criminelle », il y a lieu de constater que loin de constituer un préjugé de la part du commissaire celui-ci s'est uniquement livré, face à l'aveu de … d'avoir commis pendant plus d'une décennie des détournements, à un descriptif d'un élément moral et il a émis une appréciation personnelle sur la gravité des faits, sur ses qualités professionnelles et humaines, par ailleurs nécessaire pour soutenir son choix de saisir le Conseil de discipline.

Il n'y a, en l'espèce, aucun élément permettant de retenir une partialité subjective dans son chef, au contraire il se dégage en effet du rapport d'instruction que le commissaire a notamment relevé à la fois son ancienneté de service ainsi que son absence d'antécédents disciplinaires, a inclus au rapport toutes les observations effectuées par elle, a sollicité des pièces pour étayer sa situation financière et a invité la CNS à prendre position sur l'argumentation de défense de … en particulier celle en relation avec le système de contrôle des remboursements défaillant, c'est donc en vain qu'elle reproche au commissaire du gouvernement une partialité subjective.

Il s'ensuit que le moyen fondé sur une prétendue impartialité objective et une partialité subjective du commissaire du gouvernement est à rejeter.

Quant au fond :

Il est indéniable que les faits avérés sont d'une gravité indubitable, accentuée par le nombre de détournements (+- 844 cas), la durée (onze ans) du comportement incriminé et le montant détourné (… euros), dépassant le cadre strictement disciplinaire dans la mesure où l'intéressée, au moment de sa comparution devant le Conseil de discipline, se trouve en détention préventive pour répondre pénalement des malversations commises.

Après des contestations initiales lors de sa première entrevue au sein de la CNS le 4 février 2019, où … a uniquement concédé avoir détourné de l'argent au cours de l'année 2018, puis encore au cours de l'année 2017, elle a fini à passer à des aveux complets.

Aux termes de l'article 53 du statut général, l'application des sanctions se règle notamment d'après la gravité de la faute commise, la nature et le grade des fonctions et les antécédents du fonctionnaire inculpé. Elles peuvent être appliquées cumulativement.

… est « employée assimilée à l'employé de l'État » auprès de la CNS, classée au grade 6, échelon 235, et est entrée en service le … avec une nomination définitive au …. Aucun antécédent disciplinaire formel n'est encore renseigné à sa charge.

Le défenseur de …, afin d'appuyer son argumentation de ne pas prononcer la révocation de sa cliente, mais « uniquement » la mise à la retraite d'office, se réfère à une décision récente du Conseil de discipline où la mise à la retraite d'office d'une collègue de travail de …, ayant commis des faits identiques, avait été prononcée.

Il n'appartient bien évidemment pas au Conseil de discipline de commenter ses propres décisions et encore moins de justifier telle ou telle décision prise par cet organe, chaque décision reposant sur une appréciation individuelle de tout un dossier avec tous les éléments y consignés et d'une argumentation développée à l'audience appuyée le cas échéant par des pièces faisant donc l'objet d'un délibéré se soldant par une décision prise à bon escient par tous ses membres en référence à la situation spécifique de ce fonctionnaire, de sorte que des sanctions prononcées, même pour des faits similaires, ne se laissent pas comparer.

Cette clarification apportée, dans un souci d'être complet, le Conseil de discipline doit relever que, à l'opposé de l'affaire citée par la défense où, indépendamment de la période infractionnelle et du montant détourné en rien comparable à cette affaire-ci, une partie subséquente de la somme détournée avait été remboursée à la CNS bien avant la tenue de l'audience du Conseil de discipline, alors que le Conseil de discipline est réduit à constater que …, malgré d'itératives promesses en ce sens, n'a ni signé de reconnaissance de dette, ni commencé à apurer ses dettes.

Le Conseil de discipline doit encore relever que …, ayant choisi de travailler à mi-temps, a non seulement dissuadé vers la fin de l'année 2018 ses collègues de dénoncer la découverte des méfaits d'une autre collègue de travail, mais loin d'être freinée dans son élan et de se raviser, elle a continué à détourner encore environ … euros entre ce moment et sa suspension suite à la découverte de ses propres malversations.

S'y ajoute qu'elle n'a pas hésité, dans l'unique souci de se procurer une source de revenu supplémentaire, d'entraîner un ami dans ses manigances et d'exiger de sa part des rétrocessions de l'ordre de 50%, le tout, non pas pour combler des fins de mois difficiles, mais pour s'assurer, ainsi qu'à sa famille, un train de vie très confortable dépassant de très loin les revenus officiels du couple.

À l'instar des plaidoiries de Maître Louis BERNS, les faits décrits ci-dessus retenus à charge de … d'avoir du 1er janvier 2008 jusqu'au 4 février 2019, détourné, par le biais de saisie d'opérations de remboursement d'argent sur les matricules …, … et …, un montant de … euros sont constitutifs de manquements graves à ses devoirs professionnels pour violer les prescriptions énoncées à l'article 9, paragraphe 1, alinéa 1, du Statut, en vertu duquel le fonctionnaire est tenu de se conformer consciencieusement aux lois et règlements qui déterminent les devoirs que l'exercice de ses fonctions lui impose, à l'article 9, paragraphe 1, alinéa 2, du Statut, en vertu duquel le fonctionnaire doit se conformer aux ordres de service de ses supérieurs, et en l'occurrence la procédure dite de « Remboursement des prestations internationales — UE, EEE et Suisse », à l'article 9, paragraphe 2, du Statut, qui dispose que le fonctionnaire est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées, à l'article 10, paragraphe 1, alinéa 1, du Statut, en vertu duquel le fonctionnaire doit, dans l'exercice comme en dehors de l'exercice de ses fonctions, éviter tout ce qui pourrait porter atteinte à la dignité de ces fonctions ou à sa capacité de les exercer, donner lieu à scandale ou compromettre les intérêts du service public et à l'article 11, alinéa 2, du Statut, en vertu duquel tout détournement, toute communication contraire aux lois et règlements de pièces ou documents de service à des tiers sont interdits et doivent emporter la rupture du lien de l'intéressée avec la Fonction publique, c'est-à-dire sa révocation, son maintien dans la Fonction publique étant intenable, la relation de confiance devant exister entre le fonctionnaire et l'administration étant irrémédiablement rompu.

Indépendamment des considérations développées par Maître Louis BERNS et reprises au début de la décision, le détournement répétitif de deniers publics, en l'espèce un montant dépassant les … d'euros, pendant plus d'une décennie par …, a gravement affecté la crédibilité des institutions en général et la confiance du public en la CNS en particulier.

Toutes les considérations développées ne permettent que de recourir à la sanction la plus sévère prévue au Statut, à savoir la révocation prévue à l'article 47, point 10.

Par ces motifs :

le Conseil de discipline, siégeant en audience publique, statuant contradictoirement, sur le rapport oral de son président, … et son conseil entendus en leurs explications et moyens de défense et le représentant de la CNS en ses conclusions, prononce à l'égard de … du chef des manquements retenus ci-dessus constitutifs de manquements aux articles 9 , paragraphe 1, alinéas 1 et 2, paragraphe 2, 10, paragraphe 1, alinéa 1, et 11, alinéa 2, la sanction disciplinaire prévue à l'article 47.10. de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat, à savoir la révocation, condamne … aux frais de la procédure, ces frais liquidés à ….- euros. (…) ».

Par une requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 22 janvier 2020, inscrite sous le numéro 44045 du rôle, Madame … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision précitée du Conseil de discipline du 22 octobre 2019.

Dans son mémoire en réponse, le litismandataire de la CNS s’est rapporté à prudence de justice quant à l’incidence d'une éventuelle réformation ou annulation de la décision du Conseil de discipline du 22 octobre 2019 sur la décision prise par le conseil d'administration de la CNS le 13 novembre 2019 d'appliquer la décision du Conseil de discipline.

En effet, en application de l'article 52 du statut général, la CNS, en tant qu'autorité de nomination, serait tenue d'appliquer la sanction disciplinaire conformément à la décision du Conseil de discipline, de sorte que suite à la décision déférée du Conseil de discipline du 22 octobre 2019, son conseil d'administration aurait été amené à appliquer telle quelle la sanction de la révocation et ce, sans qu'elle ne dispose d'aucune marge d'appréciation par rapport à la sanction disciplinaire retenue. Cette décision, notifiée à Madame … par courrier recommandé expédié le 13 novembre 2019 serait actuellement coulée en force de chose jugée à défaut d’avoir fait l'objet d'un quelconque recours.

Le délégué du gouvernement, dans son mémoire en réponse, déclare se rapporter à prudence de justice quant à la recevabilité du recours, en relevant qu’étant donné qu’un recours en réformation serait prévu par la loi, le recours en annulation introduit à titre subsidiaire serait à rejeter.

Il relève également que le présent recours serait uniquement intenté contre la décision du Conseil de discipline du 22 octobre 2019, sans viser la décision du conseil d'administration de la CNS, prise en vertu de l'article 52 du statut général prise en date du 13 novembre 2019 et laquelle aurait entretemps acquis l'autorité de chose décidée, de sorte que la partie gouvernementale se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne l'incidence d'une éventuelle réformation ou annulation de la décision du Conseil de discipline sur la décision prise par la CNS.

Dans son mémoire en réplique, Madame … fait rétorquer que la partie gouvernementale et la CNS se tromperaient manifestement en invoquant l'article 52 du statut général, alors que la mesure de révocation prise par la CNS en date du 13 novembre 2019 devrait être considérée comme un acte récognitif n'ayant pas d'existence autonome, de sorte à ne pas pouvoir être attaqué devant le juge administratif, seul l'acte administratif de base étant susceptible de recours.

Il serait également de jurisprudence constante que la décision, ainsi qualifiée par la loi, de l'autorité de nomination serait, nonobstant sa dénomination, dépourvue de tout caractère décisoire, l’autorité de nomination étant légalement tenu d'appliquer la décision du conseil de discipline, de sorte à ne constituer qu'un acte d 'exécution non susceptible de recours.

Aux termes de l’article 54, paragraphe 2 du statut général prévoyant un recours au fond contre les décisions du conseil de discipline prononçant une sanction disciplinaire à l’encontre d’un fonctionnaire, sur renvoi du commissaire du gouvernement, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal contre la décision précitée du conseil de discipline du 22 octobre 2019, étant relevé qu’il est constant que Madame …, engagée auprès de la CNS en tant qu’employée sous le statut d’employé de l’Etat depuis plus de 10 ans, est soumise au régime de discipline des fonctionnaires de l’Etat aux vœux de l’article 7, paragraphe (1) de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat.

Force est ensuite de relever que si, contrairement à ce qui est prétendu par Madame …, la décision de l’autorité de nomination prise en exécution d’une décision du conseil de discipline constitue certes un acte attaquable en justice pour des causes qui lui sont propres, alors même qu’il ne fait qu’appliquer la sanction disciplinaire retenue par le Conseil de discipline1, la recevabilité du recours contre la décision du conseil de discipline ne saurait cependant être affecté par le fait que la décision de la CNS du 13 novembre 2019, prise en sa qualité d’autorité de nomination, n’a pas été déférée au tribunal, alors qu’aux termes de l’article 54, paragraphe 2 du statut général, « Les recours du fonctionnaire intéressé et du délégué du Gouvernement sont obligatoirement dirigés contre la décision du Conseil de discipline », de sorte qu’en l’absence d’une disposition légale conditionnant la recevabilité du recours dirigé contre la décision du conseil de discipline à l’introduction concomitante ou même séparée d’un recours contre la décision d’application de cette dernière, prise en exécution, le recours contre la seule décision du conseil de discipline est parfaitement possible, étant relevé que la décision prise en application de l’article 52 du statut général doit, sauf dans l’hypothèse d’un recours dirigé directement à son encontre, obligatoirement suivre le sort de la décision du conseil de discipline dont elle n’est que l’acte d’exécution.

Dans son mémoire en réponse, l’Etat se rapporte encore à prudence de justice quant à la recevabilité du recours sans pour autant fournir le moindre moyen à ce sujet.

Force est au tribunal de préciser que s’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions.

Dès lors, étant donné que la partie gouvernementale est restée en défaut de préciser dans quelle mesure le recours ne serait pas recevable, le moyen d’irrecevabilité afférent encourt le rejet, étant relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’irrecevabilité d’ordre public qui serait à soulever d’office.

Au vu de ces considérations et en l’absence d’autres moyens d’irrecevabilité, le recours principal en réformation dirigé contre la décision déférée du 22 octobre 2019 est encore recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

1 Trib. adm.,11 juillet 2014, no 21635 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Fonction publique, n° 329.

A l’appui de son recours et en fait et tout en rappelant certains des rétroactes passés en revue ci-avant, la partie demanderesse explique être entrée aux services de la CNS en date du … où elle aurait été affectée au service « remboursements internationaux » depuis 2001.

Elle relate qu’au début du mois de février 2019, il aurait été révélé publiquement que deux collaborateurs de la CNS, dont elle, auraient détourné des deniers publics.

Elle donne à considérer qu’après avoir été dispensée de service en date du 4 février 2019, elle aurait été suspendue de ses fonctions le 13 mars 2019, tout en relevant que dans le cadre de l'instruction disciplinaire, elle aurait immédiatement reconnu être à l'origine de détournements à hauteur d'environ … d’euros à l’aide de remboursements non autorisés pendant une période de 10 ans à son époux (environ …,- euros) et à un dénommé … (environ … euros) qui lui aurait cependant restitué 50% dudit montant, de sorte à ce qu’elle aurait bénéficié à titre personnel d'un montant de …,- euros.

Elle fait relever que le 18 septembre 2019, elle aurait signé une reconnaissance de dette à hauteur de … euros représentant la totalité des deniers détournés, y compris ceux dont elle n'aurait pas bénéficié personnellement.

Elle rappelle également que le 13 juillet 2019, elle aurait été placée en détention préventive jusqu’au 6 novembre 2019, alors même qu’elle serait mère de deux filles de 22 et 10 ans.

En droit et dans « le souci de préserver les droits de la défense et plus particulièrement celui d'un éventuel recours devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme à Strasbourg », la partie demanderesse soulève d’abord un moyen tenant à la violation du principe de légalité consacrée par l'article 14 de la Constitution luxembourgeoise et par l’article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, dénommée ci-après « la CEDH », ainsi qu’un moyen relatif à une violation du principe d'impartialité consacré par les droits de la défense et par l'article 6 de la CEDH, en ce qu’il serait permis de douter de l’impartialité objective du Conseil de discipline en tant qu’organe décisionnel alors qu’au moins deux de ses membres représenteraient « leurs ministères respectifs représentant l'Etat qui [serait] partie en cause », et en ce que le commissaire du gouvernement ne serait pas impartial du fait de cumuler de facto et de iure trois fonctions incompatibles, à savoir celle de juge d'instruction (instruire à charge et à décharge), de juge (classer l'affaire, sinon de renvoyer à l'autorité, sinon au Conseil de discipline) et celle de procureur (son rapport devant être considéré comme un réquisitoire), partialité corroborée par la circonstance que ce dernier lui attribuerait notamment « une énergie criminelle manifeste ».

Dans son mémoire en réplique, la partie demanderesse précise encore, à ce sujet, qu’il n'appartiendrait pas à l'agent instructeur, dans n'importe quelle procédure disciplinaire de qualifier la gravité des faits et/ou de proposer une sanction, l’article 56 paragraphe 5 du statut général, en énonçant simplement qu’à la fin de l’instruction le commissaire du gouvernement pourrait notamment décider de transmettre le dossier au Conseil de discipline lorsqu'il estime que les faits établis par l'instruction constituent un manquement à réprimer par une sanction plus sévère que celles de l’avertissement, de la réprimande ou de l’amende ne dépassant pas le cinquième d’une mensualité brute du traitement de base, ne permettrait pas au commissaire du gouvernement, dans une énergie répressive manifeste, d’émettre des jugements de valeur personnels et subjectifs quant aux faits à instruire à charge et à décharge.

Elle soulève ensuite la nullité de la procédure pour violation de ses droits de la défense, alors qu'une grande et essentielle partie du dossier n'aurait été mise à la disposition de son litismandataire qu'à la fin des vacances de pentecôte, le commissaire du gouvernement ne lui ayant communiqué que le rapport d'instruction.

Une telle façon de procéder aurait d’ailleurs été critiquée par la jurisprudence qui aurait sanctionné le défaut de mise à disposition du dossier disciplinaire intégral avant l’achèvement de l’instruction disciplinaire par l'annulation de la sanction disciplinaire.

La partie demanderesse fait encore répliquer à ce sujet que la partie gouvernementale resterait en défaut de prendre position quant à ce moyen, n'expliquant pas pourquoi elle considèrerait avoir respecté la jurisprudence bien établie en la matière, d’autant plus qu’il serait absolument déconcertant de constater qu’alors même que depuis des années, le commissariat à l'instruction aurait parfaitement assimilé le fait qu'il serait essentiel aux droits de la défense de communiquer l'intégralité du dossier, ce dernier semblerait l'avoir omis « (volontairement ?) » dans la présente affaire, de sorte que, d’après la partie demanderesse, tout laisserait à penser que le commissaire du gouvernement aurait craint qu’elle puisse se défendre utilement et obtenir de ne pas être révoquée.

En quatrième lieu, la partie demanderesse conclut encore à une violation du principe non bis in idem, alors qu’elle ne pourrait pas faire l'objet de poursuites différentes conduisant à des sanctions de même nature pour les mêmes faits, peu importe la finalité des décisions prises.

Ainsi, alors qu’elle aurait été révoquée dans le cadre de la procédure disciplinaire dont elle aurait fait l’objet, elle ferait toujours l'objet d'une procédure pénale où elle risquerait pour les faits identiques reprochés une peine d'emprisonnement qui emporterait également la perte de son emploi.

Même si dans son avis d'assemblée générale du 29 avril 2004, le Conseil d'Etat aurait relevé que le principe non bis in idem ne s'opposerait pas à ce qu'il soit infligé, à raison des mêmes faits, une sanction pénale et une sanction administrative ou professionnelle dès lors que l'institution de chacun de ces types de sanctions repose sur un objet différent et tend à assurer la sauvegarde de valeurs ou d'intérêts qui ne se confondent pas, la partie demanderesse estime que dans le cas d’espèce, les poursuites tant pénales que disciplinaires reposeraient manifestement sur le même objectif et tendraient à sauvegarder les mêmes intérêts.

Au fond, la partie demanderesse fait finalement plaider que la sanction retenue en l’espèce serait disproportionnée du fait de reposer sur une erreur manifeste d'appréciation.

Elle estime qu’en l’espèce, la sanction n’aurait pas été prononcée en tenant compte de la gravité de la faute commise, de la nature et du grade des fonctions, ainsi que des antécédents du fonctionnaire inculpé, en violation des prévisions de l'article 53 du statut général.

Elle demande à se voir infliger comme sanction disciplinaire la mise à la retraite au motif que le conseil de discipline n'aurait pas suffisamment tenu compte du modus operandi des détournements, de son attitude au cours de l'instruction disciplinaire et pénale, ainsi que de sa situation personnelle et familiale.

Elle fait souligner, dans ce contexte, que les détournements opérés auraient été facilités par l'absence d'un quelconque contrôle de la part de la CNS et qu’elle n'aurait pas usé d'un stratagème sophistiqué en ayant « établi des factures fictives » au bénéfice tout d'abord de son ami et ensuite de son mari, en guise de remboursement de frais médicaux exposés à l'étranger.

Or, compte tenu du fait que des pièces justificatives n’auraient pas existé, un simple contrôle hebdomadaire, mensuel, sinon semestriel des pièces justificatives devant figurer dans un classeur aurait permis de découvrir les faits fautifs.

Elle fait relever que contrairement aux allégations du commissaire du gouvernement, elle n’aurait pas été mue par une « énergie criminelle manifeste », mais, par ses agissements fautifs, aurait été entrainée dans un système de surendettement dont elle ne serait plus arrivée à sortir.

En ce qui concerne son attitude personnelle, la partie demanderesse donne à considérer qu’elle regretterait profondément ses agissements et affirme s'être excusée, relevant que dès le début, elle aurait collaboré activement avec le commissaire du gouvernement et avec les autorités judiciaires, alors que malgré le fait que la plupart des pièces n'auraient déjà plus existé, elle aurait fourni au commissariat du gouvernement toutes les informations permettant d'établir la dette dès le début de l'instruction au cours du mois de mars 2019, tout en ayant signé une reconnaissance de dette dès que le montant aurait été définitivement établi par la CNS.

Elle affirme en outre s'être engagée à vendre le domicile familial dont le solde du prix de vente permettrait d'apurer la majeure partie de la créance dont elle aurait personnellement profité, étant entendu qu'elle resterait également tenue des sommes dont aurait bénéficié exclusivement Monsieur ….

Ensuite, quant à sa situation personnelle et professionnelle, la partie demanderesse fait souligner qu’elle aurait 52 ans et aurait, ensemble avec son mari invalide, encore à charge une enfant mineure de 10 ans. Elle aurait encore été, pendant 25 ans, un fonctionnaire sans histoire dont les qualités humaines et professionnelles n’auraient prêté à la moindre critique.

Elle relève encore que, malgré sa collaboration active avec la justice sans laquelle le dossier serait toujours en cours d'instruction, elle aurait été mise en détention préventive pendant presque 4 mois.

De plus, au-delà du fait qu’elle serait obligée de vendre son immeuble familial pour apurer une partie de sa dette, elle serait tenue à l'égard de la CNS pendant le restant de sa vie, alors que la chance de récupérer les sommes dont aurait bénéficié Monsieur … seraient plus qu'aléatoires.

Elle donne finalement à considérer que sa collègue de travail, qui aurait également procédé à des détournements, n'aurait non seulement pas fait de prison, mais aurait bénéficié de la mise à la retraite par une décision du Conseil de discipline du 25 juin 2019.

Dans son mémoire en réplique et tout en soulignant que la CNS, auprès de laquelle elle aurait pourtant travaillé, se rapporterait à prudence de justice quant au fond du dossier et quant au caractère (dis)proportionné de la sanction à appliquer, la partie demanderesse s’étonne de la véhémence des conclusions de la partie gouvernementale, représentant seulement le conseil de discipline, selon lesquelles ses agissements seraient hautement préjudiciables aux services publics, notamment en raison du discrédit et du doute qu'ils jetteraient sur la probité des fonctionnaires et employés y assimilés travaillant à la CNS, ce qui rendrait impossible toute continuation d'une relation de travail qui devrait être basée sur une loyauté et une conscience professionnelle établie.

Or, d'une part, cette réaction disproportionnée de la part de l'Etat laisserait entrevoir une certaine culpabilité de ce dernier par rapport non seulement au quantum des sommes détournées, mais également par rapport à la facilité des détournements en raison de l'absence d'un quelconque contrôle de la part de la CNS, et d'autre part, se poserait la question de savoir si le public ou l’opinion publique seraient outrés, au point de perdre confiance dans l'ensemble des services publics, dans le cas où elle serait seulement mise la retraite pour non-respect de la dignité des fonctions, d’autant plus que la CNS serait chargée auprès du public de la prise en charge des soins de santé et du paiement d'indemnités pécuniaires de maladie et qu'aucun assuré n'aurait subi le moindre préjudice, la partie demanderesse relevant que le grand public ne serait jamais informé des sanctions disciplinaires, alors que seules les sanctions pénales connaîtraient une réelle publicité dans ce type d’affaires.

Enfin, la question de la « loyauté et [de la] conscience professionnelle », de la « confiance (..) irrémédiablement compromises » serait un faux débat, puisqu'également en cas de mise à la retraite, elle ne travaillerait plus pour la CNS.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours tandis que la CNS se rapporte à prudence en ce qui concerne les moyens de procédure soulevés dans le recours contre la décision du Conseil de discipline, le fond du dossier et le caractère (dis)proportionné de la sanction à appliquer, tout en demandant de débouter Madame … de sa demande en paiement d'une indemnité de procédure dirigée contre la CNS et de la condamner aux frais et dépens de l'instance.

En ce qui concerne d’abord le premier moyen invoqué, à titre conservatoire, tenant à une violation du principe de légalité consacrée par l'article 14 de la Constitution luxembourgeoise et par l’article 7 de la CEDH, force est de constater que la partie demanderesse ne fournit aucun développement y relatif ni dans le corps de sa requête introductive d’instance ni dans celui de son mémoire en réplique, de sorte que ce moyen encourt le rejet pour manquer en fait, le tribunal n’étant pas censé pallier la carence des parties dans la présentation de leurs moyens.

Quant au deuxième moyen relatif à une violation du principe d'impartialité consacré par les droits de la défense et par l'article 6 de la CEDH, force est d’abord de relever qu’il a été jugé que les garanties afférentes n’ont pas pour autant vocation à s’appliquer au niveau d’une procédure disciplinaire purement administrative, en ce qu’elles n’entrent en ligne de compte qu’à un stade ultérieur, au niveau de l’instance juridictionnelle compétente pour connaître du recours dirigé contre la décision administrative traduisant l’aboutissement de ladite procédure disciplinaire. Or, tant le commissaire du gouvernement que le conseil de discipline ne constituent que des étapes dans le processus décisionnel aboutissant à la sanction disciplinaire et ne revêtent pas en eux-mêmes un caractère juridictionnel, de sorte que les moyens avancés par la partie demanderesse, en ce qu’ils sont basés sur une violation alléguée de l’article 6 de la CEDH au niveau de la procédure disciplinaire administrative laissent d’ores et déjà d’être fondés.

S’il a certes été jugé que l’autorité administrative en charge de la procédure disciplinaire est néanmoins tenue d’observer les principes généraux de droit, tels que le principe de procédure équitable, le respect des droits de la défense ou encore le principe général d’impartialité, et ce, même en l’absence d’un texte exprès2, il a été retenu qu’il échet d’une manière générale d’assurer que l’enquête disciplinaire soit conduite par une personne compétente à condition que son impartialité ne soit pas contestable. Ainsi, l’autorité amenée à prendre la décision sur la sanction à appliquer doit être impartiale d’un point de vue subjectif, en ce qu’elle ne doit pas avoir procédé à des prises de position antérieures de nature à préjuger du résultat de la procédure disciplinaire, de même qu’il est exigé que, d’un point de vue objectif, ledit organe ne puisse pas être soupçonné de partialité objective, la partialité objective pouvant découler de conditions structurelles ou organisationnelles qui autoriseraient à suspecter l’impartialité d’un organe3.

En ce qui concerne d’abord les développements de la partie demanderesse relatifs à la composition du Conseil de discipline, force est de constater que la mise en doute de l’impartialité de cet organe se base sur le seul constat qu’il a été composé, entre autres, d’au moins « deux membres représent[a]nt leurs ministères respectifs représentant l'Etat qui est partie en cause », sans que la partie demanderesse, en tant qu’ancienne employée de la CNS, n’explique pour quelle raison la présence de deux représentants gouvernementaux mettrait en cause l’impartialité objective du Conseil de discipline en l’espèce et dans quelle mesure l’Etat serait partie en cause, alors que le litige oppose la partie demanderesse à la CNS, établissement public indépendant, de sorte que ce moyen est à rejeter pour manquer en fait, étant encore relevé, pour autant que de besoin, qu’il n’est pas allégué que ces fonctionnaires aient manifesté d'une quelconque manière un comportement caractérisé permettant de conclure à une appréhension raisonnable de préjugé ou qu’ils aient été appelés à prendre précédemment une décision ou à effectuer une intervention qui les auraient conduits à prendre position ou à émettre une appréciation pouvant constituer un préjugé sur le litige leur soumis en tant que membres du conseil de discipline. 4 Il en va de même du reproche de partialité objective dans le chef du commissaire du gouvernement, alors qu’il convient de relever qu’il a été jugé que du seul fait qu'il soit appelé, en fonction des résultats de l'enquête, soit à classer l'affaire, soit à transmettre le dossier à l’autorité administrative ou encore au Conseil de discipline aux fins de décision, le commissaire du gouvernement ne peut pas être soupçonné de partialité objective au cours de l'enquête, la partialité ne pouvant être déduite ex post du seul résultat de l'enquête. En effet, la possibilité du commissaire du gouvernement aux termes d'une instruction à charge et à décharge, à décider du sort de l'affaire n’a par ailleurs que la qualité d'un acte préparatoire, le conseil de discipline demeurant souverain dans son appréciation5.

Cette conclusion n’est pas énervée, sur un plan subjectif, par le fait que le commissaire du gouvernement a évoqué, dans son rapport, une « énergie criminelle manifeste », dans le chef de la demanderesse, alors que dans le cadre de son instruction, ce dernier est obligé, après avoir instruit le dossier à charge et à décharge, à juger des suites à réserver à ce dernier au moyen d’une appréciation notamment de la gravité de la faute commise, de la nature, du grade des fonctions et des antécédents du fonctionnaire inculpé, de sorte qu’il ne saurait en être tiré une 2 Trib. adm. 12 mars 2008, n° 21852a du rôle, Pas. adm. 2021, V° Fonction publique, n° 268, 1er volet, et les autres références y citées.

3 Trib. adm. 8 juillet 2015, n° 34312 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Fonction publique, n° 268, 2e volet, et les autres références y citées.

4 Trib. adm. 12 mars 2008, n° 21852a du rôle, Pas. adm. 2021, V° Fonction publique, n° 286, 1er volet, et les autres références y citées.

5 En ce sens : Trib. adm. 12 mars 2008, n° 21852a du rôle, Pas. adm. 2021, V° Fonction publique, n° 282, 1er volet, et les autres références y citées.

quelconque impartialité subjective, étant par ailleurs relevé que la partie demanderesse reste en défaut d’établir que ce dernier ait refusé un devoir d’instruction à sa décharge, respectivement qu’il ait pris des positions antérieures de nature à préjuger du résultat de la procédure disciplinaire sous examen.

Il s’ensuit que le moyen fondé sur une prétendue impartialité tant objective que subjective du commissaire du gouvernement est également à rejeter.

En ce qui concerne ensuite le moyen de nullité de la procédure pour communication tardive du dossier disciplinaire, moyen non autrement étayé en droit, force est de relever que l’article 56, paragraphe (4) du statut général, applicable à la partie demanderesse, dispose que « Le fonctionnaire a le droit de prendre inspection du dossier dès que l’instruction est terminée, conformément aux dispositions de la loi du 1er décembre 1978 réglant la procédure administrative non contentieuse et du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes.» Dans les dix jours, le fonctionnaire peut présenter ses observations et demander un complément d’instruction. Le commissaire du Gouvernement décide s’il y a lieu de donner suite à cette demande. ».

Aux termes de l’article 11 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l´Etat et des communes, dénommé ci-après « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », « Tout administré a droit à la communication intégrale du dossier relatif à sa situation administrative, chaque fois que celle-ci est atteinte, ou susceptible de l´être, par une décision administrative prise ou en voie de l´être. (…) ».

Force est de constater qu’il ressort en l’espèce du courrier du commissaire du gouvernement du 27 mai 2019, informant la partie demanderesse qu’il était envisagé de transmettre le dossier au conseil de discipline, que cette dernière a également été avertie de son droit de prendre inspection du dossier et de présenter ses observations, respectivement de demander un complément d’instruction, de sorte que le commissaire du gouvernement s’est parfaitement conformé aux prescriptions de l’article 56, paragraphe (4) précité du statut général qui n’implique pas une obligation de communication spontanée du dossier disciplinaire à l’agent concerné, obligation de communication qui, au vœu de l’article 11 du règlement grand-

ducal du 8 juin 1979, également précité, nécessite également une demande expresse y relative de la part de l’administré, ce qui n’est pas avéré en l’espèce.

Aucune disposition légale ou règlementaire ayant été violée dans ce contexte, la partie demanderesse ne saurait tirer aucun avantage procédural du fait que, comme en l’espèce, le dossier a effectivement été communiqué spontanément au litismandataire de la partie demanderesse par le commissaire du gouvernement, étant relevé qu’en tout état de cause et à titre superfétatoire, la réception du dossier disciplinaire « qu'à la fin des vacances de pentecôte » qui se sont déroulées en 2019 entre le samedi 25 mai et le dimanche 2 juin, soit au plus tard le vendredi 31 mai 2019, ne saurait être considérée comme tardive par rapport à la notification du rapport avisée en date du 28 mai 2019, d’autant plus que la lettre d’observations adressée par le litismandataire de la partie demanderesse au commissaire du gouvernement en date du 11 juin 2019 prend spécifiquement position par rapport à des pièces concrètes du dossier disciplinaire, et notamment les photos reprises du compte Facebook de la partie demanderesse.

Il y a finalement lieu de relever que la partie demanderesse ne contredit pas le constat du Conseil de discipline selon lequel aucune mesure d'instruction complémentaire n'a été sollicitée par elle à l’audience, conformément à l'article 66 du statut général, et que son litismandataire n’a pas été empêché de prendre exhaustivement position quant aux manquements lui reprochés.

Il s’ensuit que ce moyen est à rejeter pour ne pas être justifié ni en fait ni en droit, sans que cette conclusion ne soit énervée par les jurisprudences citées à cet effet par la partie demanderesse, qui pour la deuxième, à savoir le jugement du 21 mai 2014, inscrit sous le numéro 32235 du rôle, ne concerne pas une annulation pour défaut de communication du dossier, et dont la première, c’est-à-dire le jugement du 2 juin 1997, inscrit sous le numéro 9279 du rôle, n’est pas transposable à l’espèce du fait d’avoir sanctionné la circonstance, pour l’administration, d’avoir a posteriori complété le dossier par des pièces non communiquées au fonctionnaire.

Quant au moyen relatif au non-respect du principe non bis in idem, force est de relever, qu’il est de jurisprudence constante que ce principe qui fait certes obstacle à ce que l’administration puisse sanctionner disciplinairement deux fois ou davantage une personne en raison des mêmes faits, ne s’oppose toutefois pas à ce qu’il soit infligé, à raison des mêmes faits, une sanction pénale et une sanction administrative, dès lors que ces deux types de sanctions sont de nature différente et poursuivent des objectifs différents. En effet, l'autonomie du droit disciplinaire et les caractères propres à la faute disciplinaire font que celle-ci est déterminée selon des critères qui sont différents de ceux qui permettent de définir l'infraction pénale. Cette indépendance se manifeste notamment du point de vue qu'un même fait peut s'analyser à la fois en une faute pénale et en une faute disciplinaire, entraînant les deux formes de poursuite, ce qui revient à dire que la règle non bis in idem ne s'applique pas dans les rapports du droit pénal et du droit disciplinaire. En effet, le but de ces deux procédures est distinct, puisque, d'une part, dans la répression pénale, l'intérêt de la société est en jeu, alors que, d'autre part, dans la répression disciplinaire, seul l'intérêt de la fonction publique est à considérer6.

Il s’ensuit que ce moyen est à rejeter.

En ce qui concerne la mise en cause, par la partie demanderesse, de la proportionnalité de la sanction disciplinaire retenue, reprochant au Conseil de discipline de ne pas avoir, en violation de l'article 53 du statut général, pris en compte à leur juste valeur, le modus operandi des détournements, son attitude au cours de l'instruction disciplinaire et pénale ainsi que sa situation personnelle et familiale, force est d’abord de retenir que ni la matérialité ni la qualification disciplinaire des faits reprochés ne sont contestées par la demanderesse qui est en aveu de l’ensemble des faits lui reprochés.

En ce qui concerne la proportionnalité de la décision déférée et partant l’adéquation de la sanction à appliquer par rapports aux faits retenus, l’article 53 du statut général prévoit que « L’application des sanctions se règle notamment d’après la gravité de la faute commise, la nature et le grade des fonctions et les antécédents du fonctionnaire inculpé. », impliquant, d’après la jurisprudence en la matière, que les critères d’appréciation de l’adéquation de la sanction prévus légalement sont énoncés de manière non limitative, de sorte que le tribunal est susceptible de prendre en considération tous les éléments de fait lui soumis qui permettent de 6 Trib. adm., 11 juin 2001, n° 12473 du rôle, conf. par Cour adm. 11 décembre 2001, n° 13705C du rôle, Pas.

adm. 2021, V° Fonction publique, n° 240 et les autres références y citées.

juger de la proportionnalité de la sanction à prononcer, à savoir, entre autres, l’attitude générale du fonctionnaire.7 Il a également été jugé que, dans le cadre du recours en réformation exercé contre une sanction disciplinaire, le tribunal est amené à apprécier les faits commis par le fonctionnaire en vue de déterminer si la sanction prononcée par l'autorité compétente a un caractère proportionné et juste, en prenant notamment en considération la situation personnelle et les antécédents éventuels du fonctionnaire.8 Il y a d’abord lieu de rejeter les développements de la partie demanderesse sur l’absence de contrôles de nature à l’empêcher de procéder à des détournements, alors qu’il ressort des explications de la CNS, telles que reprises dans le rapport d’instruction, que la partie demanderesse a justement utilisé un stratagème prenant en compte les exigences de rigueur mises en place par la CNS pour éviter des abus et dont elle avait parfaitement connaissance.

Ainsi, elle affirme elle-même avoir encodé des factures « fictives », et ce, pour des prestations qu’elle a même rétrodatées de deux années dans le but espéré de profiter plus rapidement de la destruction des dossiers afférents, tout en prenant soin de ne pas le faire pour son propre compte, mais par le biais de ceux de deux connaissances et de son mari, de sorte que la partie demanderesse est particulièrement malvenue non seulement de s’offusquer de la qualification d’énergie criminelle, mais encore de faire plaider que ce serait presque malgré elle et du seul fait que la CNS ne l’ait pas contrôlé de manière constante dans tous ses faits et gestes, qu’elle ait détourné, sur plus d’une dizaine d’années, la somme, très importante, de plus de … d’euros.

De plus, il est encore constant en cause pour ressortir du dossier disciplinaire, qu’elle a même essayé d’empêcher ses collègues de travail de porter à la connaissance de leurs supérieurs hiérarchiques la découverte de détournements similaires commis par une autre collègue de travail et ce, dans le seul but de pouvoir continuer ses propres détournements, ce qu’elle a d’ailleurs encore fait, même après la découverte des détournements de sa collègue de travail, pour la somme d’environ encore …,- euros. Cette dernière circonstance, ensemble ses aveux au compte-gouttes après la découverte des faits, l’absence de tout effort concret en vue de l’indemnisation de la CNS, mettent également à mal la sincérité de son repentir et de ses regrets, respectivement de sa disponibilité à contenir et à réparer le préjudice causé, et ce, même si elle affirme actuellement avoir finalement signée une reconnaissance de dette vis-à-vis de la CNS.

C’est encore clairement à tort que la demanderesse met en avant, dans ce contexte, sa situation financière difficile, alors que cette dernière trouve sa seule cause dans le fait qu’elle est actuellement obligée de rembourser les sommes qu’elle a détournées dans le seul but de pouvoir mener un train de vie au-dessus de ses moyens propres. En effet, des difficultés financières engendrées a posteriori par l’obligation de rembourser des fonds détournés ne sauraient évidemment valoir comme une circonstance atténuante du comportement reproché en amont.

Il en va de même et pour les mêmes motifs, en ce qui concerne les conséquences de la répression pénale de ces mêmes faits sur sa vie personnelle et familiale.

Malgré l’absence d’antécédents disciplinaires, le caractère gravissime des faits et des circonstances mis en évidence ci-avant, d’ailleurs largement relatés dans la presse, implique 7 Trib. adm. 12 juillet 2019, nos 40837 et 41256 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Fonction Publique, n° 341 et les autres références y citées.

8 Trib. adm. 1er juillet 1999, n° 10936 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Fonction Publique, n° 378, 1er volet, et les autres références y citées.

que le tribunal est amené à confirmer l’analyse du conseil de discipline en ce que ce dernier a retenu que seule la peine la plus sévère du catalogue des sanctions disciplinaires, à savoir la révocation, est à envisager en l’espèce, sans que cette conclusion ne soit énervée par la circonstance qu’une autre personne ayant apparemment commis des faits similaires ait pu « bénéficié[r] » seulement de la mise à la retraite, alors qu’il est rappelé, au-delà du constat que le tribunal n’est pas à même de valablement procéder à une comparaison des deux cas d’espèce du fait de n’être saisi que du dossier de la partie demanderesse, que les sanctions disciplinaires sont justement personnalisées au vœu de l’article 54 du statut général précité.

Le recours est partant à déclarer non fondé en tous ses moyens.

Au vu de l’issue du litige, la partie demanderesse est à débouter de sa demande en allocation d'une indemnité de procédure d’un montant de 1.000,- euros.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme le recours principal en réformation dirigé contre la décision du conseil de discipline du 22 octobre 2019 ;

au fond, le déclare non justifiée et en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée par la partie demanderesse ;

condamne la partie demanderesse aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 19 avril 2022 par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, premier juge, Emilie Da Cruz De Sousa, juge, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 20 avril 2022 Le greffier du tribunal administratif 18


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 44045
Date de la décision : 19/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-04-19;44045 ?

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