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05/05/2021 | LUXEMBOURG | N°43774

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 mai 2021, 43774


Tribunal administratif N° 43774 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 novembre 2019 1re chambre Audience publique du 5 mai 2021 Recours formé par la société anonyme X et consort, …, contre des décisions du bourgmestre de la commune de Beckerich, en présence de la société à responsabilité limitée Y, …, en matière de permis de construire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43774 du rôle et déposée le 12 novembre 2019 au greffe du tribunal administra

tif par Maître Claude Collarini, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocat...

Tribunal administratif N° 43774 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 novembre 2019 1re chambre Audience publique du 5 mai 2021 Recours formé par la société anonyme X et consort, …, contre des décisions du bourgmestre de la commune de Beckerich, en présence de la société à responsabilité limitée Y, …, en matière de permis de construire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43774 du rôle et déposée le 12 novembre 2019 au greffe du tribunal administratif par Maître Claude Collarini, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de la société anonyme X, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, et de Monsieur …, administrateur de sociétés, demeurant à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation 1) d’une décision du bourgmestre de la commune de Beckerich du 25 mars 2019, référencée sous le numéro …, portant autorisation à la société à responsabilité limitée Y, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, de construire une maison unifamiliale sur la parcelle sise à L-

…, et 2) de la décision confirmative du même bourgmestre du 12 août 2019 intervenue sur recours gracieux ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Gilbert Rukavina, demeurant à Diekirch, du 20 novembre 2019, portant signification de ce recours à la commune de Beckerich, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions, établie en sa maison communale à L-8523 Beckerich, 6, Dikrecherstrooss, ainsi qu’à la société à responsabilité limitée Y, préqualifiée ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif en date du 27 novembre 2019 par la société anonyme Elvinger Hoss Prussen SA, établie et ayant son siège social à L-1340 Luxembourg, 2, Place Winston Churchill, inscrite au barreau de Luxembourg, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Nathalie Prüm-Carré, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la commune de Beckerich, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 20 février 2020 par Maître Nathalie Prüm-Carré, au nom de la commune de Beckerich, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 19 mars 2020 par Maître Claude Collarini, au nom de la société anonyme X et de Monsieur …, préqualifiés ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 19 juin 2020 par Maître Nathalie Prüm-Carré, au nom de la commune de Beckerich, préqualifiée ;

1 Vu la constitution de nouvel avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 3 juillet 2020 par Maître Stéphanie Starowicz, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée Y, préqualifiée, en remplacement de Maître Pierrot Schiltz, préqualifié ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique du 6 janvier 2021, et vu les remarques écrites de Maître Claude Collarini et de Maître Nathalie Prüm-Carré du 4 janvier 2021 produites, conformément à la circulaire du président du tribunal administratif du 22 mai 2020, avant l’audience.

Par une décision du 25 mars 2019, référencée sous le numéro …, le bourgmestre de la commune de Beckerich, ci-après désigné par « le bourgmestre », autorisa la société à responsabilité limitée Y, ci-après désignée par « la société Y », à construire une maison unifamiliale à l’adresse L-…, sur des fonds inscrits au cadastre de la commune de Beckerich, section … d’… et de …, sous les numéros … et ….

Par un courrier recommandé du 2 août 2019, la société anonyme X, ci-après désignée par « la société X », et Monsieur …, ensemble désignés ci-après par « les requérants », introduisirent par l’intermédiaire de leur litismandataire un recours gracieux à l’encontre de l’autorisation de bâtir, précitée, du 25 mars 2019 en faisant valoir que l’accès vers l’arrière de la maison à construire se ferait via un chemin privé latéral menant à leur propriété sise au numéro … et en faisant partie intégrante.

Par un courrier du 12 août 2019, le bourgmestre s’adressa aux requérants dans les termes suivants :

« Tout comme relevé dans notre réponse du 19 juin et suivant entretien avec Monsieur … en date du 2 août courant, nous ne pouvons pas vous fournir d'autres informations que celles obtenues par les géomètres officiels. Le plan cadastral est le seul document officiel qui a pour mission de renseigner et de repérer les parcelles en tant qu'unités de la propriété foncière en les délimitant graphiquement par rapport aux parcelles voisines, en renseignant la présence éventuelle de bâtiments et en identifiant son propriétaire à l'aide du numéro de parcelle.

La personne ayant effectué le mesurage et responsable du projet travaille pour le bureau … qui est habilité par l'Administration du cadastre et de la topographie à effectuer des mesurages en bonne et due forme suivant l'article 9 de la loi du 25 juillet 2002 portant création et réglementation des professions de géomètre et de géomètre officiel. L'administration du cadastre et de la topographie apporte à tout plan, établi par un géomètre officiel et destiné à être intégré aux archives cadastrales, une mention de validation quant à l'application de ses directives.

Ceci-dit, ce n'est pas notre commune qui détermine les limites mais le géomètre-expert définit juridiquement et matérialise sur le terrain les limites des propriétés privés.

Pour autant que de besoin, nous vous rappelons que l'indication d'un lot ou d'un terrain privé (dans ce cas délimité dans l'espace) sur un plan cadastral est toujours accompagné d'un numéro cadastral ce qui n'est pas le cas en l'occurrence sur le plan daté du 24 mai 1962. De 2surcroit, il faut savoir que les clôtures, haies, murets, chemins et portails sont des limites matériellement apparentes, mais qui ne constituent des éléments de preuves, valables.

Si les limites définies par le cadastre vous semblent dès lors incorrectes, alors nous vous recommandons de prendre directement contact avec le géomètre officiel qui pourra justifier la décision rendue par l’Administration du cadastre et de la topographie à Luxembourg. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 12 novembre 2019 et inscrite sous le numéro 43774 du rôle, les requérants ont fait introduire un recours tendant à la réformation sinon à l’annulation 1) de la décision du bourgmestre du 25 mars 2019, référencée sous le numéro …, portant autorisation à la société Y de construire une maison unifamiliale à l’adresse … à …, et 2) de la décision confirmative du même bourgmestre du 12 août 2019 intervenue sur recours gracieux.

Si la requête introductive d’instance a été signifiée régulièrement à la société Y, préqualifiée, en date du 20 novembre 2019, le tribunal constate qu’aucun mémoire en réponse n’a été déposé au greffe du tribunal administratif de sa part. Or, en vertu de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, désignée ci-après par « la loi du 21 juin 1999 », le tribunal est amené à statuer à l’égard de toutes les parties même si la partie défenderesse ou un tiers intéressé ne comparaît pas dans le délai prévu à l’article 5 de cette même loi.

Etant donné que la loi ne prévoit aucun recours de pleine juridiction en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre les décisions du bourgmestre, précitées, des 25 mars et 12 août 2019.

Il est, par contre, compétent pour connaître du recours subsidiaire en annulation dirigé contre les mêmes décisions.

Quant à la recevabilité du recours Dans leur requête introductive d’instance, les requérants justifient tout d’abord leur intérêt à agir en faisant valoir que la jurisprudence administrative retiendrait que les voisins directs par rapport à un établissement projeté pourraient légitimement craindre des inconvénients résultant pour eux d’un projet de construction. Ils auraient dès lors un intérêt à voir respecter les règles applicables en matière de permis de construire, du moins dans la mesure où la non-observation éventuelle de ces règles serait susceptible de leur causer un préjudice nettement individualisé, à savoir, en l’espèce, une atteinte à leur droit de propriété.

Ils précisent que l’objet du recours sous analyse ne serait pas de solliciter l’annulation de l’autorisation de construire litigieuse au motif qu’elle serait de nature à leur causer un préjudice en entravant l’exercice de leur droit de propriété sur le chemin longeant les deux parcelles dont ils seraient propriétaires. En effet, indépendamment de ces aspects qui feraient l’objet d’une action en justice intentée devant le juge civil, l’autorisation de bâtir litigieuse ne serait pas sans poser problème d’un point de vue administratif.

Ils soutiennent, à cet égard, que l’autorisation entreprise aurait été délivrée au mépris des règles de sécurité qui commanderaient en l’espèce de refuser de délivrer pareille autorisation au regard du fait qu’elle impliquerait, pour pouvoir accéder aux places de stationnement situés à l’arrière de l’immeuble projeté, l’obligation d’emprunter un chemin 3privé dont l’étroitesse ne permettrait pas le croisement de deux véhicules.

Compte tenu du fait qu’ils n’auraient pas d’autre possibilité pour pouvoir accéder à leur propriété que d’emprunter ce chemin privé, l’autorisation de bâtir délivrée par le bourgmestre serait, notamment à cet égard, de nature à leur causer grief.

Dans son mémoire en réponse, la commune de Beckerich, ci-après désignée par « la commune », soulève, quant à elle, l’irrecevabilité du recours sous analyse pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des requérants.

Elle fait valoir que si un voisin proche avait un intérêt évident à voir respecter les règles applicables en matière d’urbanisme, cette proximité de situation constituerait un indice pour établir son intérêt à agir, mais ne suffirait pas à elle seule à le fonder. Il faudrait, de surcroît, que l’inobservation éventuelle de ces règles soit de nature à entraîner une aggravation concrète de sa situation de voisin dans le sens que la construction litigieuse devrait affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien du demandeur, lequel devrait ainsi voir sa situation s’aggraver effectivement et réellement.

En l’espèce, les requérants ne démontreraient aucune aggravation concrète de leur situation de voisin, ce d’autant plus que l’autorisation de bâtir « n° … » (sic), porterait uniquement sur la « transformation » (sic) de la maison familiale sise « … » (sic).

Elle avance que pour justifier leur intérêt à agir, les requérants ne feraient état que de la prétendue violation de leur droit de propriété, qui, au demeurant, ne serait pas méconnu en l’espèce car le chemin prétendument « privé » qui serait à emprunter pour accéder aux places de stationnement situées à l’arrière de l’immeuble projeté serait un chemin communal, tout en soulignant que le tribunal serait, en tout état de cause, incompétent pour connaître de cette question. Elle soutient, pour le surplus, que les requérants seraient en défaut de démontrer une quelconque atteinte aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de leur propriété.

Dans leur réplique, les requérants expliquent qu’ils seraient les voisins directs de la parcelle sise au n°… pour laquelle a été accordée l’autorisation de bâtir déférée.

A cela s’ajouterait le fait que, contrairement aux développements de la commune, les travaux tels qu’autorisés auraient une incidence directe sur la jouissance de leurs parcelles, en particulier en ce qui concerne la parcelle n° … qui, depuis plus de 60 années, aurait eu la jouissance privative du chemin privé lequel devrait, désormais, être utilisé par les futurs occupants de la bâtisse sise au n°… pour qu’ils puissent accéder aux emplacements de parking situés à l’arrière de l’immeuble.

Ils donnent à considérer que si cette violation de leur droit de propriété sur ce chemin privé n’intéressait pas au premier plan le juge administratif, il n’en demeurerait pas moins qu’ils justifieraient de ce fait d’un intérêt à agir à l’encontre de l’autorisation litigieuse.

De surcroît, il serait à noter que le chemin en question aurait une largeur qui ne serait que de 3,70 mètres, de sorte que le passage de deux véhicules en sens inverse y serait fortement compromis. Ceci poserait indéniablement problème lorsque, inévitablement, les futurs occupants de l’immeuble sis au n° … croiseraient ceux de l’immeuble érigé sur la parcelle n° …. Les requérants se réfèrent, à cet égard, aux photographies versées en pièce 7, 4desquelles il résulterait que ce chemin ne serait nullement adapté pour accueillir des véhicules circulant en sens inverse et ce pour la simple et bonne raison que celui-ci n’aurait été créé que pour desservir la parcelle n°… leur appartenant.

Dans sa duplique, la commune réitère que la seule et simple qualité de voisin ne suffirait pas à établir l’intérêt à agir contre un permis de construire, mais qu’il faudrait, de surplus, établir qu’une décision administrative affecterait négativement la situation en fait ou en droit d’un administré qui pourrait partant tirer un avantage corrélatif de l’annulation de celle-ci.

Elle donne à considérer qu’il ne s’agirait en l’espèce pas, tel que le soutiennent les requérants, d’emplacements de « parking » dont l’accès devrait être assuré aux futurs occupants de la maison litigieuse, mais d’un car-port. Ce ne serait pas non plus un chemin privé qui serait en cause, mais un chemin communal.

Elle avance que si, pour justifier la prétendue aggravation de leur situation, les requérants faisaient valoir qu’ils n’auraient plus la jouissance privative dudit chemin, cela reviendrait tout au plus à faire état d’une violation de leur droit de propriété sur ledit chemin, bien qu’en matière de contentieux administratif, un intérêt à agir ne puisse pas consister en un droit allégué.

Elle ajoute que la circonstance que le chemin litigieux n’aurait qu’une largeur de 3,70 mètres et ne permettrait dès lors pas le passage concomitant de deux véhicules ne serait, de surcroît, pas de nature à reconnaître à elle seule un intérêt à agir dans le chef des requérants.

Le tribunal relève que l’intérêt conditionne la recevabilité d’un recours contentieux.

En matière de contentieux administratif portant, comme en l’espèce, sur des droits objectifs, l’intérêt ne consiste pas dans un droit allégué, mais dans le fait vérifié qu’une décision administrative affecte négativement la situation en fait ou en droit d’un administré qui peut partant tirer un avantage corrélatif de la sanction de cette décision par le juge administratif1.

Ainsi, toute partie demanderesse introduisant un recours contre une décision administrative doit justifier d’un intérêt personnel distinct de l’intérêt général. Si les voisins proches ont un intérêt évident à voir respecter les règles applicables en matière d’urbanisme, cette proximité de situation constitue certes un indice pour établir l’intérêt à agir, mais ne suffit pas à elle seule pour le fonder. Il faut de surcroît que l’inobservation éventuelle de ces règles soit de nature à entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisin2.

Le requérant doit justifier d’un intérêt personnel et direct à obtenir l’annulation de l’acte qu’il attaque, le juge administratif devant seulement avoir égard à ce que le demandeur avance à ce sujet, dès lors qu’il lui appartient de démontrer son intérêt.

En l’espèce, force est de constater que les requérants se prévalent plus particulièrement de contraintes et de désagréments en relation avec les places de stationnement se situant à l’arrière de l’immeuble projeté qui entraîneraient pour eux, à côté de l’atteinte alléguée à leur droit de propriété en ce que les occupants du futur immeuble seraient obligés d’emprunter un 1 cf. Cour adm. 14 juillet 2009, n° 23857C et 23871C du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu.

2 cf. Cour adm. 26 mai 2005, n° 19208C du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieuse, n° 76 et les autres références y citées.

5chemin leur appartenant pour pouvoir accéder auxdites places de stationnement, également des problèmes au niveau de la sécurité de la circulation, dans la mesure où ils n’auraient pas d’autre choix que d’emprunter ledit chemin pour accéder à leur propriété et que celui-ci serait trop étroit pour permettre le croisement de deux véhicules.

Le tribunal est dès lors amené à retenir que les explications ainsi mises en avant sont suffisantes pour justifier un intérêt à agir dans le chef des requérants, cela indépendamment du caractère justifié quant au fond des reproches soulevés qui sera examiné ci-après.

Il s’ensuit que le moyen afférent tenant à un défaut d’intérêt à agir dans le chef des requérants est à rejeter.

Au vu de ce qui précède et à défaut d’autres moyens d’irrecevabilité, le recours en annulation ayant, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

Quant au fond Arguments des parties A l’appui de leur recours et en fait, les requérants expliquent qu’ils seraient les propriétaires en indivision d’un immeuble sis à L-…, …, inscrit au cadastre de la Commune de Beckerich, Section … d’… et de …, sous le numéro …, ainsi que de la parcelle voisine inscrite au même cadastre sous le numéro ….

Ils expliquent qu’au courant du mois de mai 2019, ils auraient pris connaissance d’un certificat apposé par la commune aux abords de la propriété voisine sise au n°… le 7 mai 2019, renseignant qu’une autorisation avait été délivrée en date du 25 mars 2019 permettant la construction d’une maison unifamiliale sur ladite parcelle voisine.

Ils précisent, à cet égard, que leur immeuble serait situé en bas d’un chemin privé longeant, d’un côté, la parcelle n° … - ayant fait l’objet d’une autorisation de bâtir n° … du 25 mars 2019 permettant à la société Y à transformer une maison unifamiliale sise au …, qui aurait fait l’objet d’un recours contentieux devant le tribunal administratif, inscrit sous le numéro 43572 du rôle -, ainsi que la parcelle n° …, et, de l’autre côté, la parcelle n° …, les deux dernières parcelles leur appartenant.

Ils mettent en avant que ce chemin privé se terminerait en impasse sur leur propriété et qu’il n’aurait été créé que pour assurer la desserte du fonds en question, tel que cela se dégagerait du plan dressé en date du 24 mai 1962 par le géomètre de l’administration du Cadastre indiquant que ledit chemin serait un chemin privé rattaché à leur propriété sise au n° ….

Ils expliquent qu’ils auraient depuis d’innombrables années eu la jouissance privative de ce chemin qui, depuis plus de 60 ans, serait séparé du domaine public par un portail, tout en soulignant que ledit chemin n’aurait jamais fait l’objet d’un quelconque entretien de la part de de la commune, mais qu’il aurait été exclusivement entretenu par les propriétaires du fonds auquel il serait rattaché, à savoir leur propriété.

Ils font valoir qu’il résulterait des plans de construction versés à l’appui de la demande d’autorisation de bâtir litigieuse que, pour pouvoir accéder aux places de stationnement qui se situeraient à l’arrière de l’immeuble sis au n° …, il serait nécessaire d’emprunter le chemin 6privé rattaché à leur propriété, ce qui entraînerait, selon eux, également une obligation de démolir le muret qui serait rattaché à leur propriété.

Ils mettent en exergue que ceci aurait déjà été exposé dans le cadre d’une lettre recommandée avec accusé de réception adressée à la commune par l’intermédiaire de leur litismandataire le 2 août 2019, mais que celle-ci aurait refusé d’en tenir compte tel que cela se dégagerait du courrier de la commune du 12 août 2019, déféré en l’espèce.

En droit, ils se prévalent en premier lieu d’une violation par le bourgmestre de son devoir de veiller à la sûreté et à la commodité du passage.

En s’appuyant sur les articles 3 du décret des 16 à 24 août 1790 sur l’organisation judicaire, ci-après désigné par « le décret des 16 à 24 août 1790 », et 67 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, ci-après désignée par « la loi communale du 13 décembre 1988 », ils font valoir que l’obligation de veiller à la sécurité ainsi qu’à la commodité du passage s’imposerait au bourgmestre en toutes circonstances, y compris lorsqu’il serait amené à examiner une demande en obtention d’une autorisation de bâtir, tel que cela serait le cas en l’espèce, étant donné qu’il devrait s’assurer que la construction qui serait réalisée en conformité avec l’autorisation accordée ne soit pas de nature à créer une situation de danger.

Ils avancent qu’en l’espèce, les impératifs de sécurité ne seraient pas respectés dès lors que, sur base des plans approuvés, il serait nécessaire d’emprunter le chemin privé leur appartenant pour pouvoir accéder aux emplacements de parking situés à l’arrière du bâtiment sis au n° …, tout en donnant à considérer que ledit chemin ne serait pas adapté à un tel cas de figure, alors que son étroitesse empêcherait le croisement de deux véhicules.

Ils insistent sur le fait qu’ils n’auraient pas d’autre possibilité que d’emprunter ce chemin pour pouvoir accéder à leur propriété qui serait enclavée, de sorte que des croisements seraient inévitables entre les occupants des immeubles situés sur les parcelles sises aux n° … et ….

Il serait dès lors étonnant qu’une autorisation de construire ait été délivrée sur base de plans prévoyant des emplacements de parking à l’arrière du bâtiment, alors que, suivant les requérants, la situation de danger créée de ce fait aurait très bien pu être évitée si l’octroi de l’autorisation de construire avait été subordonné à l’élargissement du chemin, de telle sorte à permettre le croisement de deux véhicules.

Les requérants soutiennent ensuite que l’autorisation de bâtir entreprise serait contraire à l’article 4 de la partie écrite du plan d’aménagement général de la commune de Beckerich, ci-après « le PAG », en ce que le fonds sis au n° … ne bénéficierait pas d’un accès à la voirie publique d’une largeur minimale de 5 mètres étant donné que la largeur du chemin qu’il faudrait obligatoirement emprunter pour accéder à partir de la voie publique au fonds en question ne serait que de 3,70 mètres.

Ils font ensuite valoir que l’autorisation litigieuse aurait encore été délivrée au mépris des dispositions de l’article 27, alinéa 2 du PAG prévoyant que les emplacements de stationnement devraient avoir un accès facile et permanent sur la voie publique tenant compte des impératifs de sécurité de la circulation.

Il s’ensuivrait que le bourgmestre aurait dû, sur base du constat inéluctable que le chemin d’accès censé mener à la construction projetée serait trop étroit pour permettre la 7circulation en toute sécurité des véhicules, refuser la délivrance de l’autorisation de bâtir litigieuse.

Ils soutiennent que le permis de construire délivré serait encore contraire à l’article 27, point a), précité du PAG prévoyant que chaque logement devrait bénéficier de deux emplacements de parking dont l’un se situant à l’intérieur de la construction dans la mesure où, en l’espèce, seuls des emplacements de parking à l’extérieur, derrière l’immeuble, seraient prévus.

Ils avancent, enfin, que les deux emplacements de parking situés derrière l’immeuble seraient protégés par un car-port dont la construction, telle que projetée, ne serait pas conforme au PAG. En effet, il résulterait des plans sur base desquels a été délivrée l’autorisation de construire déférée que le car-port serait construit à cheval sur les parcelles correspondant aux n° … et …, alors pourtant que celui-ci aurait dû, au vœu de l’article 28 du PAG, être construit sur la limite de la parcelle.

Ils concluent, au vu de ce qui précède, que l’autorisation de bâtir litigieuse encourrait l’annulation.

Dans son mémoire en réponse et au-delà des faits et rétroactes exposés ci-dessus, la commune explique que le 21 novembre 2018, la société Y aurait introduit une demande en obtention d’une autorisation de bâtir pour des parcelles sises aux numéros … et … à …, enregistrées à l’époque au cadastre de la commune de Beckerich, section … d’… et de …, sous les numéros … et …. Une nouvelle demande ou une modification de la demande d’autorisation initiale relative à la construction d’une maison unifamiliale au numéro … aurait été déposée le 22 mars 2019.

Sur base de ces demandes, deux autorisations de bâtir auraient été délivrées par le bourgmestre en date du 25 mars 2019, à savoir, d’une part, une autorisation, référencée sous le numéro … et portant autorisation pour la transformation d’une maison unifamiliale à l’adresse … à …, et, d’autre part, une autorisation, référencée sous le numéro … et portant autorisation pour la construction d’une maison unifamiliale à l’adresse … à ….

La commune précise que la configuration des parcelles … et … aurait ultérieurement été modifiée, tel que cela ressortirait du plan G.0.3.14 dressé par la société …, validé par le géomètre officiel de l’administration du Cadastre et de la Topographie le 27 juin 2019. Cela aurait eu pour conséquence qu’à partir des parcelles … et …, deux nouvelles parcelles auraient été constituées, portant les numéros … et ….

La commune relève, à cet égard, les points suivants : d’une part, elle donne à considérer qu’antérieurement au projet de la société Y, les deux parcelles cadastrales initiales (… et …) auraient été couvertes par une seule et même bâtisse, tel que cela ressortirait notamment du plan n° 2 intitulé « Carport, coupes et façades » montrant la façade principale existante, tout en soulignant que cette bâtisse unique, a priori une ancienne ferme, aurait constitué le n° ….

D’autre part, elle souligne que le projet de construction litigieux aurait pour finalité de créer deux unités d’habitation, à savoir (i) une maison implantée sur la parcelle … s’appuyant sur le mur de la maison sise au n° … et faisant l’objet de l’autorisation de bâtir n° … portant « autorisation pour la construction d’une maison unifamiliale à l'adresse …, L-… », et (ii) une maison occupant la parcelle d’angle, sise sur la parcelle n° … et faisant l’objet de l’autorisation de bâtir n° …, autorisant « la transformation d’une maison unifamiliale à l’adresse …, L-… ».

8Elle insiste, par ailleurs, sur le fait qu’il ressortirait des plans 1 et 2 annexés aux autorisations de bâtir qu’il s’agirait, pour ce qui est de la maison sise au …, d’une transformation dans la mesure où la structure de ce qui aurait été « l’habitation » serait conservée dans son intégralité.

En droit, et quant à la violation alléguée des articles 3 du décret des 16 et 24 août 1790 et 67 de la loi communale du 13 décembre 1988, elle avance que ces dispositions ne figureraient pas parmi les normes de référence en vertu desquelles le bourgmestre accepterait ou refuserait de délivrer une autorisation de bâtir.

Il serait, en effet, de jurisprudence constante que lors de la délivrance d’une autorisation de construire, le bourgmestre serait appelé à vérifier la conformité d’une demande d’autorisation uniquement par rapport aux dispositions du PAG et du règlement sur les bâtisses (RB) en vigueur et qu’il ne pourrait refuser son autorisation en matière d’urbanisme pour une construction, par ailleurs conforme à la réglementation urbanistique, sur la seule base de son pouvoir général de police découlant de l’article 3 du titre XI du décret des 16 et 24 août 1790, et ce indépendamment de dispositions afférentes contenues dans la réglementation urbanistique applicable. Le moyen afférent serait dès lors à rejeter.

S’agissant de la violation alléguée de l’article 4 du PAG, elle fait valoir qu’il résulterait clairement des plans et extraits cadastraux versés aux débats que la maison sise au … serait desservie par la … qui serait une voie publique d’une largeur minimale de 5 mètres.

En ce qui concerne la violation alléguée de l’article 27 du PAG, elle soutient, en s’appuyant sur un arrêt de la Cour administrative du 26 janvier 2010, inscrit sous le numéro 26004C du rôle, qu’un accès facile et permanent à la voie publique signifierait que l’occupant de la maison devrait avoir la possibilité de rejoindre à tout moment son emplacement de stationnement.

Dans la mesure où l’accès aux emplacements de stationnement se ferait par la … et par le chemin communal, la condition inscrite à l’article 27, précité, serait remplie en l’espèce.

S’agissant concrètement des emplacements de stationnement, elle avance que l’article 27 serait à lire en parallèle avec les dispositions de l’article 28 du PAG relatif aux garages, car-

ports et emplacements de stationnement.

En précisant que le PAG ne définirait pas la notion d’« emplacement de stationnement », elle fait valoir que l’article 28 n’opérerait aucune distinction entre les garages et les car-ports hormis dans son titre et regrouperait, sous le terme « garage », ces deux types de construction. Ainsi, toutes les règles de construction relatives aux « garages » s’appliqueraient également aux « car-ports », de sorte qu’un car-port serait assimilé à un garage au sens de l’article 28 susvisé.

En l’espèce, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l’article 27 n’imposerait pas deux parkings, mais deux emplacements de stationnement, de sorte que la construction projetée, possédant un car-port et, devant ce car-port, un emplacement de stationnement, serait conforme à la réglementation urbanistique en vigueur.

En ce qui concerne ensuite la violation alléguée de l’article 28 du PAG, elle avance qu’il ressortirait expressément des dispositions de l’article 28, point a) du PAG que l’implantation 9d’un car-port pourrait se faire à la limite de la parcelle, mais qu’il ne s’agirait là pas d’une obligation.

En l’espèce, le car-port se trouverait intégralement sur la parcelle correspondant au numéro … et portant le numéro de cadastre …, de sorte que son implantation serait conforme aux dispositions de l’article 28 du PAG.

La commune conteste, enfin, le caractère privé du chemin litgieux, en soulignant qu’il s’agirait d’un moyen tiré d’une lésion alléguée des droits de propriété relevant du droit civil et échappant en tant que tel à la compétence des juridictions administratives.

Dans leur réplique, les requérants soutiennent, en s’appuyant sur un jugement du tribunal administratif du 16 février 20063, que, contrairement à l’argumentation de la commune, l’obligation de veiller à la sécurité ainsi qu’à la commodité du passage s’imposerait au bourgmestre en toutes circonstances, y compris lorsqu’il serait amené, comme en l’espèce, à examiner une demande en obtention d’une autorisation de bâtir. Le bourgmestre aurait dès lors dû refuser, au vu de l’étroitesse du chemin privé, de délivrer l’autorisation litigieuse.

Ils réitèrent ensuite que la largeur du chemin privé de 3,70 mètres ne serait pas suffisante pour accéder en véhicule à l’arrière du bâtiment où seraient prévus les emplacements de parking litigieux, de sorte que l’autorisation entreprise violerait la largueur minimale de 5 mètres telle que prévue par l’article 4 du PAG.

S’agissant du moyen fondé sur une violation de l’article 27, alinéa 2 du PAG, ils réitèrent leur argumentation suivant laquelle les emplacements de parking situés à l’arrière du bâtiment ne disposeraient d’aucun accès facile et permanent sur la voie publique tenant compte des impératifs de la sécurité de la circulation, en avançant qu’il faudrait obligatoirement, pour accéder à l’arrière du bâtiment, emprunter le chemin privé leur appartenant lequel ne serait pourtant nullement adapté pour permettre un tel passage alors que le caractère exigu de ce chemin rendrait matériellement impossible le croisement de deux véhicules.

Il s’ensuivrait que les impératifs de sécurité de la circulation n’auraient manifestement pas été pris en compte alors que l’autorisation litigieuse permettrait la réalisation de travaux qui seraient de nature à créer une situation dangereuse pour les usagers dudit chemin.

Par rapport à l’article 27, alinéa 2, point a) du PAG, ils soutiennent qu’un car-port ne pourrait être considéré comme étant un emplacement de stationnement situé « à l’intérieur de la construction », alors qu’il s’agirait d’un ouvrage annexe à la construction, tout en soulignant que, selon eux, la notion de construction viserait l’immeuble en tant que tel.

Ils avancent ensuite que la disposition de l’article 28 du PAG ne serait davantage pas respectée en l’espèce dans la mesure où la limite arrière du car-port dépasserait de loin la façade arrière de la maison d’habitation.

Ils contestent, finalement, que les plans ayant été produits par la commune à l’appui de son mémoire en réponse soient ceux qui ont fait l’objet de l’autorisation de bâtir n°… entreprise en l’espèce.

3 Trib. adm. 16 février 2006, n° 19919 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu.

10Ainsi, à la lecture du plan 1 versé en pièce 2, il apparaîtrait que ce plan aurait été établi par la société Z en date du 16 novembre 2018 et qu’il comporterait 3 indices :

- le 1er en date du 5 février 2019 avec comme remarque l’intitulé « divers » ;

- le 2ème en date du 15 mars 2019 mentionnant à titre de remarque « adaptations des plans d’après le mesurage géomètre ; local technique dans les combles », et - le 3ème en date du 23 avril 2019 comportant la remarque « maintien du mur pignon existant dans le garage du LOT 1 ».

Au vu du fait que le plan n° 1 versé en pièce 2 ferait état de l’indice 3 daté du 23 avril 2019, il serait dès lors impossible que ce plan ait été approuvé par le bourgmestre en date du 25 mars 2019.

Il s’ensuivrait qu’il serait utopique de maintenir en vigueur une autorisation de bâtir dont on ignorerait sur base de quels plans elle a été délivrée puisqu’il serait, dans ces conditions, également impossible de vérifier notamment sa conformité avec les dispositions écrites du PAG, respectivement avec celles du règlement sur les bâtisses.

Ils donnent à considérer que cette même argumentation aurait été soulevée par eux dans le cadre de l’affaire actuellement pendante devant le tribunal, inscrite sous le numéro 43572 du rôle, dans laquelle se poserait la même problématique.

Ils font valoir que l’argumentaire avancé à cet égard par la commune, à savoir que « des plans peuvent donc être postérieurs à une autorisation de bâtir tout en étant partie intégrante de ladite autorisation car ils abrogent nécessairement et implicitement les plans antérieurs. », et appuyé sur une jurisprudence du tribunal administratif du 15 décembre 2004, inscrite sous le numéro 17971 du rôle, ne pourrait être retenu en l’espèce, alors que la situation telle qu’elle se serait présentée dans la cadre de cette affaire ne serait pas comparable à celle en l’espèce.

En effet, dans cette affaire, la commune de Walferdange aurait délivré en date du 18 avril 2003 une autorisation de construire qui, par la suite, aurait fait l’objet d’une modification datée du 6 janvier 2004 laquelle aurait été avisée par le bourgmestre en date du 30 janvier 2004 par l’apposition de sa signature sur les plans de construction en question ainsi que d’un cachet stipulant que « ce plan est conforme à notre autorisation de bâtir n°… dont les prescriptions et mesures sont à respecter. ».

Si, dans cette affaire, le bourgmestre avait dès lors avalisé le plan tel que modifié postérieurement à la délivrance de l’autorisation de bâtir tout en certifiant par la même occasion que ce plan tel que modifié était conforme à l’autorisation de bâtir délivrée par lui, tel ne serait pas le cas en l’espèce où les plans dans leur dernière version telle que modifiée en date du 23 avril 2019 n’auraient pas pu être soumis à l’approbation du bourgmestre puisque le cachet « vu et approuvé » apposé par le bourgmestre serait daté du 25 mars 2019, soit antérieurement à la dernière modification des plans.

Ils avancent que même à admettre que des plans pourraient être établis postérieurement à une autorisation de bâtir et faire néanmoins partie intégrante de celle-ci au regard de la jurisprudence précitée, encore faudrait-il, pour que tel soit le cas, que les plans en question soient validés par le bourgmestre qui devrait en outre confirmer que ces plans sont conformes à l’autorisation de bâtir qu’il a précédemment délivrée.

11Il ne pourrait, en revanche, être admis qu’il soit possible de produire une nouvelle version des plans établie postérieurement à la délivrance de l’autorisation de bâtir sans que cette nouvelle version n’ait été validée par le bourgmestre et déclarée conforme à l’autorisation délivrée, les requérants soulignant que le fait de tolérer « ce genre de pratiques » reviendrait à permettre que soient commis des abus en tous genres.

Ils concluent qu’ils seraient dans l’impossibilité de savoir si les plans versés en cause sont identiques à ceux ayant été approuvés.

Au vu de tout ce qui précède, l’autorisation de bâtir litigieuse serait dès lors à annuler.

Dans sa duplique, la commune réitère son argumentation suivant laquelle le bourgmestre devrait vérifier la conformité de la demande d’autorisation uniquement par rapport au plan ou au projet d’aménagement général et, le cas échéant, au plan ou projet d’aménagement particulier et qu’il ne saurait dès lors invoquer des considérations de bonne police pour justifier son refus.

Quant à la violation alléguée de l’article 4, alinéa 3 du PAG, elle soutient que cette disposition viserait clairement les fonds et non les constructions sises sur les fonds, de sorte qu’il ne serait nullement imposé qu’une construction sise sur un fonds bénéficie d’un accès direct à une voirie publique d’une largeur minimale de 5 mètres.

A titre subsidiaire, elle avance que suivre l’argumentation des requérants aurait pour conséquence que le chemin litigieux serait devenu, pour le succès de leur moyen, une voirie publique au sens de l’alinéa 3 de l’article 4 du PAG, devant, à ce titre, avoir une largeur minimale de 5 mètres.

Il serait dès lors manifeste qu’en l’espèce, les requérants adopteraient une attitude incohérente et contradictoire, faisant preuve de mauvaise foi manifeste et violant l’exigence de bonne foi entre parties, et ce tant au niveau pré-contentieux que contentieux.

Elle ajoute qu’un tel comportement devrait, par ailleurs, être sanctionné en vertu de la théorie de l’estoppel, rattachable à l’article 1134, alinéa 3 du Code civil, suivant lequel nul ne peut se contredire au détriment d’autrui.

Quant à la prétendue violation de l’article 27, alinéa 2 du PAG, elle réitère que les emplacements en question seraient un car-port et un emplacement de stationnement sis devant ce car-port, et qu’ils se situeraient tous les deux à l’arrière de la maison, tout en précisant que ledit article 27 viserait les « places de stationnement ».

En se référant à l’arrêt, précité, de la Cour administrative du 26 janvier 2010, elle soutient qu’un accès facile et permanent signifierait que l’occupant de la maison devrait avoir la possibilité de rejoindre à tout moment son emplacement de stationnement.

Or, il ressortirait manifestement des plans et des lieux que l’accès aux deux emplacements serait facile en ce qu’ils se situeraient sur le fonds, dans le recul postérieur de la maison, et seraient directement connectés au chemin communal, lui-même directement relié à la ….

12Ce constat ne serait pas énervé par des impératifs de sécurité ou de circulation publique tels qu’invoqués par les requérants, la commune faisant valoir que le fait que deux véhicules ne puissent pas concomitamment se croiser sur ledit chemin ne serait pas en soi une circonstance de nature à impacter négativement la sécurité, la facilité et la permanence de l’accès à la voie publique.

Le moyen afférent serait dès lors à rejeter.

Elle soutient ensuite que, contrairement à ce qui serait avancé par les requérants, un car-

port serait bel et bien un emplacement de stationnement au sens de l’article 27 du PAG, alors qu’il s’agirait d’un endroit susceptible d’accueillir matériellement un véhicule, conformément à la jurisprudence des juridictions administratives et plus précisément à l’arrêt, précité, de la Cour administrative du 26 janvier 2010.

Elle ajoute que, contrairement à ce qui serait soutenu par les requérants, la notion de « construction » au sens du point a) de l’article 27 du PAG ne viserait pas que l’immeuble en tant que tel, mais, en application de l’alinéa 1er de l’article 46 du PAG définissant le terme de « construction », également le car-port dans la mesure où il servirait à abriter des choses.

Il s’ensuivrait que le car-port revêtirait à la fois la qualité d’emplacement de stationnement et de construction.

En ce qui concerne le moyen fondé sur une violation de l’article 28, alinéa 4, point a) du PAG, elle fait valoir qu’outre le fait que les requérants n’apporteraient aucun élément à l’appui de leurs allégations, il conviendrait de constater que la limite arrière du car-port ne dépasserait pas la façade arrière de la maison d’habitation et que le gabarit du car-port n’excèderait pas celui de la façade arrière de la maison d’habitation, de sorte que le moyen afférent serait également à rejeter.

Quant aux contestations adverses liées aux plans tels qu’autorisés par le bourgmestre, la commune affirme que les plans versés en cause seraient bien ceux sur base desquels l’autorisation n° … aurait été accordée. Elle réitère, à cet égard, que par dossier déposé le 21 novembre 2018, la société Y aurait introduit une demande d’autorisation de bâtir et qu’une nouvelle demande, voire une modification de la demande d’autorisation initiale aurait été finalisée le 22 mars 2019 pour la construction d’une maison unifamiliale sise au numéro …. A la demande de la commune, les plans versés à l’appui de cette demande auraient dû être modifiés à plusieurs reprises. Comme l’indiquerait, en toute transparence, le cartouche des deux plans versés en cause, ceux-ci auraient été modifiés par le cabinet d’architectes Beng, le 5 février 2019, le 15 mars 2019 et, enfin, le 23 avril 2019. Elle souligne que bien que datée du 25 mars 2019, l’autorisation de bâtir n° … n’aurait été délivrée à la société Y que postérieurement au 23 avril 2019, ce qui serait encore confirmé par la facture relative au forfait à payer pour toute délivrance d’une autorisation de bâtir qui n’aurait été émise que le 7 mai 2019 et payée le 15 mai 2019. De plus, comme le reconnaîtraient les requérants, l’affichage du certificat correspondant n’aurait eu lieu que le 7 mai 2019, c’est-à-dire bien postérieurement à la dernière modification du plan « Vue en plans ».

En se référant au jugement, précité, du 15 décembre 2004, ayant retenu que des plans peuvent être postérieurs à une autorisation de bâtir tout en en faisant partie intégrante dans la mesure où ils abrogent nécessairement et implicitement les plans antérieurs, elle réitère qu’aucune disposition légale ne prévoirait de formalité particulière pour une autorisation de 13construire qui, en substance, consisterait en la constatation officielle par l’autorité compétente de la conformité d’un projet de construction par rapport aux dispositions réglementaires urbanistiques applicables. Elle fait valoir que cette constatation s’exprimerait par un visa accordé par le bourgmestre à des plans déterminés, constituant la partie graphique de l’autorisation de construire, ce visa pouvant, le cas échéant, être assorti de conditions constituant la partie écrite de ladite autorisation.

Ainsi, contrairement à ce que clameraient les requérants, il ne pourrait pas être retenu que des plans postérieurs à une autorisation de bâtir devraient faire l’objet d’une signature et de l’apposition d’un cachet par le bourgmestre pour être considérés comme étant valides et conformes à l’autorisation de bâtir précédemment délivrée. Juger l’inverse reviendrait, selon elle, à ajouter une condition non prévue par la loi.

Elle donne à considérer que les requérants ne préciseraient, par ailleurs, pas quelle norme légale aurait été méconnue par le fait que la date des plans soit postérieure à l’autorisation de bâtir.

Elle précise qu’en fait, il y aurait eu au plus tard le 25 mars 2019, un accord entre le bourgmestre, les services techniques et le représentant de la société Y sur les travaux de construction à effectuer pour la maison sise …. Sur base de cet accord, le bourgmestre aurait signé l’autorisation de bâtir, mais cette autorisation n’aurait été délivrée qu’une fois que le plan « Vue en plans » aurait été modifié conformément aux termes de l’accord intervenu.

Il en résulterait que les plans datés du 23 avril 2019 feraient partie intégrante de l’autorisation de bâtir n° … du 25 mars 2019 quand bien même ils seraient postérieurs à la date portée sur cette autorisation.

Remarques préliminaires A titre liminaire, et quant au contrôle à opérer par le bourgmestre lors de la délivrance d’une autorisation de construire et par la suite par le tribunal administratif saisi d’un recours contre une autorisation de construire, le tribunal relève qu’aux termes de l’article 37 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par « la loi du 19 juillet 2004 », « […] L’autorisation n’est accordée que si les travaux sont conformes au plan ou au projet d’aménagement général et, le cas échéant, au plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », respectivement au plan ou projet d’aménagement particulier « quartier existant » et au règlement sur les bâtisses, les voies publiques et les sites.[…] ».

La finalité de l’exigence légale de l’obtention d’une autorisation de construire consiste à vérifier si un projet de construction est conforme aux règles d’urbanisme applicables, à savoir essentiellement les plans d’aménagement général et particulier et le règlement sur les bâtisses, et une autorisation de construire s’analyse partant en la constatation officielle par l’autorité compétente, en l’occurrence le bourgmestre, de la conformité d’un projet de construction aux dispositions d’urbanisme applicables, ce principe étant rappelé par l’article 37, précité de la loi du 19 juillet 2004. Ainsi, le bourgmestre, en délivrant l’autorisation de bâtir, constate dans la forme passive d’une autorisation que la réalisation du projet est permise sur base du plan 14d’aménagement général et du règlement sur les bâtisses de la commune4, textes d’interprétation stricte.

Le bourgmestre, appelé à statuer sur une demande de permis de construire, agit dès lors en organe d’exécution et s’il refusait un permis de construire pour une construction dont la mise en place ne serait point empêchée par la réglementation communale d’urbanisme existante, il suspendrait de ce fait l’exécution même de ladite réglementation, sinon encore rendrait de fait non constructible une parcelle ayant vocation à recevoir des constructions, pareille façon de procéder n’étant pas seulement prohibée par la loi, mais encore contraire à l’essence même des attributions exécutives du bourgmestre en la matière5.

Toujours à titre liminaire et s’agissant des contestations quant aux plans effectivement autorisés par le bourgmestre, le tribunal relève que l’examen de la conformité d’une autorisation de construire à la réglementation urbanistique en vigueur se fait sur base des seuls plans soumis et tel qu’autorisés par le bourgmestre et non pas par rapport à des plans éventuellement soumis au bourgmestre, mais non revêtus d’une autorisation formelle.

Par ailleurs, force est de constater qu’aucune disposition en matière d’urbanisme ne prévoit de formalité particulière pour une autorisation de construire qui, tel que cela a été retenu ci-avant, consiste, en substance, en la constatation officielle par l’autorité compétente de la conformité d’un projet de construction par rapport aux dispositions réglementaires applicables.

Cette constatation s’exprime par un visa accordé par le bourgmestre à des plans déterminés, constituant la partie graphique de l’autorisation de construire, visa le cas échéant assorti de conditions constituant la partie écrite de l’autorisation, l’autorité compétente étant toujours appelée à se prononcer par rapport à un projet déterminé concrétisé par des plans, de sorte que le caractère décisionnel se rapporte toujours à des plans déterminés6.

Appréciation du tribunal En l’espèce, s’agissant de prime abord du reproche que le plan versé en cause ne serait pas celui autorisé, il est certes vrai que, tel que l’a reconnu la commune et tel que cela ressort des indices dudit plan, le plan intitulé « Vue en plans » établi le 16 mai 2018 a été modifié plusieurs fois, la dernière fois étant le 23 avril 2019, partant postérieurement à la date du 25 mars 2019 qui correspond à celle figurant sur la partie écrite de l’autorisation litigieuse. Le tribunal constate néanmoins que ce plan, y compris la modification y apportée, porte la signature du bourgmestre avec la mention « vu et approuvé ». Si certes le cachet apposé à côté de la signature du bourgmestre porte la date du 25 mars 2019, donc une date antérieure à la dernière modification du plan et encore qu’il aurait été plus judicieux de faire figurer sur le plan en question la date de la signature effective de ce plan par le bourgmestre, le tribunal relève que c’est ce plan modifié qui a fait l’objet de l’autorisation du bourgmestre, l’incohérence des dates s’expliquant, suivant la commune, par le fait que le bourgmestre aurait donné son accord le 25 mars 2019 sous réserve de la modification apportée par la suite et qu’en réalité, l’autorisation n’aurait été délivrée qu’après réception de la dernière modification.

En conséquence, il y a lieu d’admettre que ce plan fait partie intégrante de l’autorisation attaquée, signée le 25 mars 2019, et qu’il représente le projet tel qu’autorisé.

4 Cour adm. 27 avril 2006, n° 20250C du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu.

5 Idem.

6 Trib. adm. 15 décembre 2004, n° 17971 du rôle, confirmé par Cour adm. 9 juin 2005, n° 19200C du rôle, Pas.

adm. 2020, V° Urbanisme, n° 793 et les autres références y citées.

15 Il s’ensuit et en l’absence d’une inscription en faux du plan intitulé « Vue en plans » produit en cause, les contestations des requérants fondées sur l’affirmation que ce plan ne correspondrait pas à ceux autorisés sont à rejeter.

S’agissant tout d’abord de la question du caractère privé ou communal du chemin litigieux menant à l’arrière de la maison sise au … à …, force est de constater que les requérants ont déclaré dans leur requête introductive d’instance et réitéré dans leur mémoire en réplique que l’objet de leur recours ne serait pas de requérir l’annulation de l’autorisation de bâtir déférée en ce que celle-ci serait de nature à entraver leur droit de propriété sur le chemin litigieux, de sorte qu’il y a lieu de leur en donner acte.

En ce qui concerne ensuite le moyen fondé sur une violation alléguée des articles 3 du décret des 16 à 24 août 1790, respectivement 67 de la loi communale du 13 décembre 1988, basée sur la sécurité et la commodité de passage du chemin menant à l’arrière de la maison projetée au vu, notamment, de l’accès très étroit dudit chemin ne permettant pas le passage simultané de deux véhicules, le tribunal relève tout d’abord que s’il incombe au pouvoir communal de faire jouir les habitants des avantages d’une bonne police, notamment de la propreté, de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité dans les rues, lieux et voies publiques, ainsi que de la commodité de passage dans les rues, quais, places et voies publiques et que le bourgmestre est chargé de l’exécution des lois et règlements de police en ayant, à titre personnel, le droit et le devoir d’assurer l’exécution des lois de police et de la législation sur l’urbanisme et l’aménagement du territoire7, force est néanmoins de constater que, tel que cela a été retenu ci-avant, lors de la délivrance d’une autorisation de construire, le bourgmestre est appelé à vérifier la seule conformité d’un projet de construction avec les prescriptions du PAG, PAP éventuels et du règlement sur les bâtisses communaux.

En effet, il convient de souligner que la jurisprudence des juridictions administratives a eu l’occasion de retenir que l’exercice, par le bourgmestre, de son pouvoir général de police ne saurait tenir directement en échec les dispositions urbanistiques en ce sens qu’il pourrait se prévaloir d’un problème général de sécurité, de tranquillité ou autre, pour tenir en échec le principe même de l’implantation d’une construction conforme aux règles urbanistiques8, et que la conformité de la demande d’autorisation par rapport aux dispositions d’urbanisme existantes entraîne en principe dans le chef du bourgmestre l’obligation de délivrer le permis sollicité sans prendre en considération d’autres considérations d’intérêt privé ou tenant à l’exécutabilité technique ou matérielle du projet9.

Dès lors, contrairement à ce qui est soutenu par les requérants, si certes le bourgmestre est chargé de l’exécution des lois et règlements de police, lorsqu’il est saisi d’une demande d’autorisation de construire, il ne peut contrôler le projet que par rapport à la réglementation urbanistique en vigueur et doit accorder son autorisation du moment que le projet est conforme à cette règlementation. En revanche, il ne saurait refuser son autorisation en matière d’urbanisme sur la seule base de son pouvoir général de police découlant des décrets précités, indépendamment de dispositions afférentes contenues dans la réglementation urbanistique applicable.

7 Trib. adm. 15 avril 1997, n° 9510 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Urbanisme, n° 781 et les autres références y citées.

8 Trib. adm. 4 novembre 2002, n° 14597 ; trib. adm. 15 décembre 2004, n° 17971, confirmé par arrêt du 9 juin 2005, n° 19200C, disponibles sous www.jurad.etat.lu.

9 En ce sens : Cour adm. 22 mars 2011, n°27064C du rôle, Pas. adm. 2020, V° Urbanisme, n° 777 et les autres références y citées.

16 Il s’ensuit que le moyen des requérants fondé sur une violation par l’autorisation de bâtir déférée des articles 3 du décret des 16 à 24 août 1790, respectivement 67 de la loi communale du 13 décembre 1988 est rejeté en l’absence d’indication de dispositions afférentes qui seraient contenues dans la réglementation urbanistique en vigueur et qui auraient été violées.

En ce qui concerne ensuite le moyen fondé sur une violation de l’article 4 du PAG, celui-ci dispose que : « Sont considérés comme fonds à bâtir:

- les parcelles, situées dans les zones à bâtir, aux abords d’une voie publique munie de toutes les infrastructures (…) Une seule construction, servant au séjour de personnes ou à une destination assimilée, est autorisée par fond constructible.

Seuls peuvent recevoir des constructions, les fonds ayant un accès direct à la voirie publique, d’une largeur minimale de 5,00 mètres, et reliés à tous les réseaux des infrastructures. Ces dispositions ne valent pas pour les annexes ou dépendances non destinées au séjour de personnes. ».

Force est de constater que le moyen fondé sur une violation de l’article 4 du PAG repose sur la prémisse erronée que la largeur minimale de 5 mètres y prévue serait à apprécier par rapport au chemin longeant la construction principale. Or, la largeur y prévue est à apprécier par rapport à la voie publique à laquelle il est accédé directement à partir du fonds accueillant la construction en cause, en l’occurrence la …, qui elle, de façon non contestée, a une largeur de 5 mètres.

Le tribunal relève encore que l’article 4 du PAG vise la définition d’un fonds à bâtir, de sorte que nécessairement l’obligation d’avoir à partir de tels fonds un accès direct à la voirie publique d’une largeur minimale de 5 mètres au sens de l’article 4, précité, du PAG ne concerne que les fonds destinés à recevoir une construction servant au séjour de personnes ou à une destination assimilée, mais ne vise pas les constructions en tant que telles.

C’est dès lors à tort que les requérants se prévalent de l’article 4 du PAG pour contester l’accès direct au « garage » se situant derrière la maison projetée, respectivement pour critiquer la largeur du chemin litigieux menant audit « garage », dans la mesure où ces prescriptions ne peuvent être invoquées que par rapport au fonds sur lequel est érigée la construction litigieuse, mais non pas par rapport à la construction elle-même, étant d’ailleurs précisé que la question de l’accès à la voirie publique à partir d’un garage, d’un car-port ou d’autres emplacements de stationnement est expressément réglementée aux articles 28 et 29 du PAG.

Ceci étant dit, et dans la mesure où il ressort, par ailleurs, du plan « Vue en plans », ainsi que des extraits cadastraux versés en cause que le fonds destiné à recevoir la maison unifamiliale projetée longe la voie publique …, de sorte à y avoir un accès direct, et qu’il n’est d’ailleurs pas contesté que le fonds en question est relié à tous les réseaux des infrastructures et que la …, tel que retenu ci-avant, présente une largeur minimale de 5 mètres, le moyen fondé sur une violation de l’article 4 du PAG est rejeté.

S’agissant ensuite de la violation alléguée de l’article 27, alinéa 2 du PAG, aux termes 17duquel : « Les emplacements de stationnement devront avoir un accès facile et permanent sur la voie publique tenant compte des impératifs de la sécurité de la circulation. », en ce que les emplacements de stationnement doivent avoir un accès facile et permanent sur la voie publique sous peine que les impératifs tenant à la sécurité de la circulation ne soient pas garantis, il échet de relever que la Cour administrative a eu l’occasion de retenir dans son arrêt, précité, du 26 janvier 2010, invoqué par la commune, que « l’exigence inscrite à l’article […] concernant le caractère permanent des emplacements de stationnement d’un immeuble, trouve sa justification dans le fait que chaque logement de l’immeuble concerné doit être doté en permanence d’un emplacement de stationnement et les conducteurs, pour lesquels un emplacement de stationnement est prévu, doivent avoir la possibilité d’accéder à tout moment à cet emplacement de stationnement même si l’accès, pour des raisons techniques, ne peut se réaliser qu’après un certain délai d’attente. ».

Si certes dans le cadre de cet arrêt, il était question d’un système « parklift » permettant d’accéder aux emplacements de stationnement de l’immeuble en question et non d’un accès par un chemin privé, respectivement communal tel que cela est le cas en l’espèce, les enseignements y retenus par la Cour administrative par rapport à cette disposition urbanistique, dont les termes sont identiques à ceux de l’article 27, alinéa 2 du PAG litigieux en l’espèce, peuvent être transposés à l’affaire sous analyse en ce que l’accès à un emplacement de stationnement doit être possible à tout moment, même si, pour une raison temporaire, telle l’arrivée d’un autre véhicule, l’accès ne peut se réaliser qu’après un certain délai d’attente.

En l’espèce, il ressort du plan « Vue en plans » que les emplacements de stationnement litigieux, se situant dans le recul postérieur de la maison n° …, sont directement accessibles à partir du chemin longeant le côté latéral gauche de la maison n° …, lui-même directement connecté à la …, de sorte qu’il doit être retenu que lesdits emplacements de stationnement disposent d’un accès facile et permanent sur la voie publique au sens de l’article 27, alinéa 2 du PAG permettant à l’occupant de la maison n° … de les rejoindre à tout moment, et ce indépendamment du cas de figure du croisement sur ledit chemin de deux véhicules qui doit être considéré comme occasionnel. En tout état de cause, le tribunal n’entrevoit pas en quoi la sécurité de la circulation ne serait pas garantie en l’espèce.

Au vu de ce qui précède, le moyen fondé sur une violation de l’article 27, alinéa 2 du PAG est rejeté.

S’agissant ensuite de la violation alléguée de l’article 27, alinéa 3, point a) du PAG au motif que seuls deux emplacements de stationnement situés à l’extérieur de l’immeuble seraient prévus, ledit article dispose comme suit : « Dans les parties de la commune déterminées par le projet d’aménagement, une autorisation de bâtir pour toute construction nouvelle, toute reconstruction ainsi que pour toute transformation augmentant la surface exploitée d’au moins 25 mètres carrés ne pourra être délivrée que si un nombre suffisant d’emplacements de stationnement pour véhicules est prévu sur la propriété intéressée.

Toutefois, en cas de transformation, l’obligation d’aménager des emplacements de stationnement ne vaudra que pour la surface nouvelle ou changement d’affectation ainsi créé dépassant 25 mètres carrés. Ces emplacements devront figurer dans le projet soumis pour autorisation. […] a) Sont à considérer comme suffisants:

- deux emplacements par logement dont un à l’intérieur de la construction ; […] ».

18 En l’espèce, il ressort du plan « Vue en plans » versé en cause et il n’est d’ailleurs pas contesté que l’autorisation entreprise prévoit la construction d’un car-port dans le recul postérieur des maisons sises aux numéros 15 et … et que devant ledit car-port, il est prévu d’installer un autre emplacement de stationnement pour un véhicule.

S’il n’est dès lors pas contesté que l’autorisation de bâtir entreprise prévoit deux emplacements de stationnement pour véhicules, force est néanmoins de constater que les parties sont en désaccord sur la question de savoir si un des deux emplacements de stationnement est à qualifier d’emplacement « à l’intérieur de la construction » au sens de l’article 27, alinéa 3, point a) du PAG.

A cet égard, le tribunal relève tout d’abord que le terme de « construction » au sens de l’article 27, alinéa 3, précité, vise nécessairement la construction principale qui est définie à l’article 46, alinéa 1er du PAG comme étant « […] toute construction publique ou privée servant à abriter des hommes, des animaux ou des choses ainsi que toutes les parties des immeubles se situant tant au-dessus qu’en dessous du niveau de l’axe de la voie desservante.

Elle est implantée aux abords du domaine public (voie ou place) en respectant les reculs prescrits. […] ».

L’exigence que l’emplacement de stationnement doit se trouver à l’intérieur de la construction principale est encore corroborée par les termes de l’article 28 du PAG, intitulé « Garages, car-ports ou autres emplacements de stationnement » disposant que « a) La construction de garages est autorisée, en dehors du gabarit admis pour la construction principale, dans un recul latéral, en respectant les conditions suivantes: […] ».

En effet, il résulte d’une lecture parallèle des dispositions des articles 27, alinéa 3, point a), et 28, point a) du PAG, qu’en règle générale, il faut prévoir deux emplacements de stationnement par logement, dont l’un doit se trouver à l’intérieur de la construction principale.

A titre dérogatoire, la construction de garages, de car-ports ou d’autres emplacements de stationnement est toutefois permise en dehors du gabarit admis pour la construction principale, c’est-à-dire à l’extérieur de la construction principale, si ceux-ci se situent dans le recul latéral à cette construction principale et sous condition du respect d’un certain nombre de conditions listées à l’article 28 du PAG.

Or, s’il ne peut effectivement pas être remis en cause, tel que le soutient la commune, qu’un car-port en ce qu’il sert à abriter des choses revêt à la fois la qualité d’emplacement de stationnement et de construction au sens du PAG, il ne saurait toutefois en être déduit qu’il se situe à l’intérieur de la construction principale au sens de l’article 27, alinéa 3, point a) du PAG, qui est, en l’espèce, la maison d’habitation sise au n° ….

Il se dégage incontestablement du plan « Vue en plans » versé en cause que le car-port ne se situe ni à l’intérieur de la construction principale, mais hors du gabarit de celle-ci, ni d’ailleurs dans le recul latéral conformément à l’article 28 du PAG, alors qu’il est implanté dans le recul postérieur de la maison n° …, derrière la terrasse et la verdure se rapportant à cette même maison.

Il s’ensuit que l’emplacement du car-port litigieux ne respecte ni l’article 27, alinéa 3, point a) du PAG pour ne pas se trouver à l’intérieur de la construction principale, ni l’article 1928 du même PAG, alors que, se situant en dehors du gabarit de la construction principale, il n’est pas implanté dans le recul latéral de ladite construction.

Au vu des considérations qui précèdent, le tribunal est amené à conclure que l’autorisation de bâtir n° … du 25 mars 2019 est contraire à la réglementation urbanistique applicable au moment de sa délivrance et plus particulièrement aux articles 27, alinéa 3, point a) et 28, point a) du PAG, de sorte qu’il a lieu de l’annuler et de renvoyer le dossier devant le bourgmestre. Il en est de même en ce qui concerne la décision confirmative du même bourgmestre du 12 août 2019 intervenue sur recours gracieux.

Eu égard à cette conclusion, l’examen des autres moyens invoqués devient surabondant.

La demande en condamnation de la commune de Beckerich à payer à chacun des requérants une indemnité de procédure d’un montant de 2.000.- euros sur base de l’article 33 de la loi, précitée, du 21 juin 1999, augmentée dans leur mémoire en réplique à un montant de 5.000.- euros, est toutefois à rejeter alors qu’il n’est pas établi en quoi il serait inéquitable de laisser à leur seule charge les frais non compris dans les dépens.

En ce qui concerne la demande en condamnation de chacun des requérants à une indemnité de procédure d’un montant de 5.000.- euros, telle que sollicitée par la commune, celle-ci est à rejeter au vu de l’issue du litige.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;

reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;

au fond, le déclare justifié ;

partant annule 1) la décision du bourgmestre de la commune de Beckerich du 25 mars 2019, référencée sous le numéro …, portant autorisation à la société à responsabilité limitée Y, de construire une maison unifamiliale sur la parcelle sise à L-…, et 2) la décision confirmative du même bourgmestre du 12 août 2019 intervenue sur recours gracieux ;

rejette les demandes en paiement d’une indemnité de procédure telles que formulées de part et d’autre ;

condamne la commune de Beckerich aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 5 mai 2021 par :

Annick Braun, vice-président, Alexandra Castegnaro, premier juge, Alexandra Bochet, juge en présence du greffier Luana Poiani.

20 s. Luana Poiani s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 5 mai 2021 Le greffier du tribunal administratif 21


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 43774
Date de la décision : 05/05/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2021-05-05;43774 ?

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