Tribunal administratif N°43293 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 juillet 2019 1re chambre Audience publique du 1er mars 2021 Recours formé par Monsieur …, …, contre des actes du bourgmestre de la Ville de Luxembourg, en présence de Monsieur …, …, en matière de permis de construire
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 43293 du rôle et déposée le 17 juillet 2019 au greffe du tribunal administratif par Maître Pierre Brasseur, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant à l’annulation (1) de la décision du bourgmestre de la Ville de Luxembourg du 20 mai 2019 autorisant Monsieur …, demeurant à L-…, à procéder au rehaussement et à la transformation de sa maison unifamiliale sise à la même adresse, ainsi que (2) de la décision, ainsi qualifiée, du bourgmestre de la Ville de Luxembourg du même jour « rejetant les observations du requérant sur le projet de décision d’autorisation au titre du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes » ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Christine Kovelter, en remplacement de l’huissier de justice Frank Schaal, demeurant à Luxembourg, du 19 juillet 2019, portant signification dudit recours à la Ville de Luxembourg, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions, ayant sa maison communale à L-1648 Luxembourg, 42, place Guillaume II, Hôtel de Ville, ainsi qu’à Monsieur …, préqualifié ;
Vu l’ordonnance présidentielle du 7 août 2019, inscrite sous le numéro 43297 du rôle ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 23 juillet 2019 par Maître Paul Schintgen, avocat à la Cour inscrit au tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de Monsieur …, préqualifié ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 29 juillet 2019 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, inscrite au barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F.
Kennedy, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B186371, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Christian Point, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la Ville de Luxembourg ;
Vu le mémoire en réponse de Maître Paul Schintgen, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 30 juillet 2019 au nom de Monsieur …, préqualifié ;
1Vu le mémoire en réponse de la société anonyme Arendt & Medernach SA, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 décembre 2019 au nom de la Ville de Luxembourg, préqualifiée ;
Vu le mémoire en réplique de Maître Pierre Brasseur, déposé au greffe administratif en date du 13 janvier 2020 pour compte de Monsieur …, préqualifié ;
Vu le mémoire en duplique de Maître Paul Schintgen, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 12 février 2020 au nom de Monsieur …, préqualifié ;
Vu le mémoire en duplique de la société anonyme Arendt & Medernach SA, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 février 2020 pour compte de la Ville de Luxembourg, préqualifiée ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les actes attaqués ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique du 13 janvier 2021, et vu les remarques écrites de Maître Pierre Brasseur, de Maître Gilles Dauphin, en remplacement de Maître Christian Point, pour compte de la société anonyme Arend & Medernach SA et de Maître Paul Schintgen des 5, 6 et 11 janvier 2021, produites, conformément à la circulaire du président du tribunal administratif du 22 mai 2020, avant l’audience.
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Il est constant en cause que Monsieur … est le propriétaire d’un appartement situé au dernier étage d’une résidence sise à L-….
Il se dégage également des explications concordantes des parties qu’en date du 5 mars 2018, le bourgmestre de la Ville de Luxembourg, ci-après désigné par « le bourgmestre », délivra à Monsieur …, ci-après désigné par « Monsieur … », l’autorisation pour le rehaussement et la transformation de sa maison unifamiliale située sur la parcelle voisine à celle de Monsieur …, inscrite au cadastre sous le numéro …, section … de …, sise à L-…, autorisation contre laquelle Monsieur … introduisit en date du 20 novembre 2018 auprès du tribunal administratif un recours en annulation, de même qu’une demande à voir prononcer un sursis à exécution en attendant la solution du litige.
Par arrêté du 11 février 2019, le bourgmestre prononça la fermeture du chantier litigieux après que ses services aient dû constater que les travaux réalisés n’étaient pas conformes à l’autorisation de construire. Le même jour, Monsieur … fut invité à soumettre au bourgmestre une nouvelle demande d’autorisation de construire et de nouveaux plans.
Suite à ces faits, la demande à voir prononcer un sursis à exécution de l’autorisation de construire du 5 mars 2018 fut rayée à l’audience publique de référé du tribunal administratif du 23 avril 2019, tandis que le recours en annulation dirigé contre cette même autorisation fut inscrit au rôle général.
Il se dégage ensuite du dossier soumis à l’appréciation du tribunal qu’après que Monsieur … ait introduit une nouvelle demande d’autorisation de construire en y annexant des plans modifiés, le bourgmestre invita Monsieur …, par courrier du 18 avril 2019, à consulter le dossier de demande et à formuler ses éventuelles remarques avant qu’une décision ne soit prise et ce conformément à l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure 2à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », ce que Monsieur … fit par le biais d’un téléfax du 2 mai 2019.
Par courrier du 20 mai 2019, le bourgmestre s’adressa à Monsieur … dans les termes suivants : « […] Je me permets par la présente de revenir au projet de construction visant le rehaussement et la transformation de la maison unifamiliale occupant la parcelle inscrite au cadastre sous le numéro … de la section … de … et …, pour vous informer que je viens de signer, en date de ce jour, l’autorisation de bâtir pour le projet en question.
Comme vous avez consulté le dossier avec [sic] au service de la police des bâtisses, je vous prie de trouver ci-dessous les réponses à votre fax du 2 mai 2019 :
Dans le premier point vous contestez que la surface construite brute est largement dépassée et que de ce fait le projet ne serait pas conforme aux dispositions de l’article B.2.6 b) de la partie écrite du PAP QE. La surface de la construction existante reste inchangée. Les murs extérieurs restent en place. Aucun niveau n’est ajouté. Un escalier a toujours permis l’accès au premier étage, seulement la hauteur sous plafond sera améliorée.
Dans le deuxième point vous contestez que le rehaussement de la toiture sera de 1,65 mètres à savoir une augmentation d’environ 40 cm par rapport à l’autorisation de bâtir du 5 mars 2018 et que des vues directes seront créées. Le projet soumis respecte la hauteur à la corniche de 6 mètres et la hauteur au faîte par rapport à la hauteur à la corniche conformément aux dispositions des articles B.3.4 et B.2.2.2 de la partie écrite du PAP QE. L’élévation latérale droite montre qu’il y aura un nombre moins élevé d’ouvertures que celles projetées par l’autorisation de bâtir du 5 mars 2018. Je tiens à préciser que pour ce qui est des vues directes notre réglementation est muette.
En application du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, je tiens à vous informer qu’un recours en annulation contre ma décision peut être introduit devant le Tribunal administratif dans un délai de 3 mois à partir de la présente notification, par requête signée d’un avocat inscrit à la liste I des tableaux dressés par les conseils des Ordres des avocats. […] ».
Le même jour, le bourgmestre délivra à Monsieur … une nouvelle autorisation, référencée sous le numéro …, pour le rehaussement et la transformation de la maison unifamiliale occupant la parcelle inscrite au cadastre sous le numéro … de la section … de …, sise à ….
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 17 juillet 2019, inscrite sous le numéro 43293 du rôle, Monsieur … a fait introduire un recours en annulation contre l’autorisation de construire du 20 mai 2019, précitée, ainsi que contre, une décision, ainsi qualifiée, du bourgmestre du même jour « rejetant les observations du requérant sur le projet de décision d’autorisation au titre du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes ». Par requête séparée déposée le même jour, inscrite sous le numéro 43297 du rôle, il a encore demandé à voir prononcer un sursis à exécution des décisions, ainsi qualifiées, prévisées, en attendant la 3solution de son recours au fond, requête dont il a été débouté par ordonnance présidentielle du 7 août 2019.
Quant à la recevabilité du recours Aucune disposition légale ne prévoit de recours au fond en matière d’autorisation de construire, de sorte que le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation.
Tant la Ville de Luxembourg que la partie tierce-intéressée dénient tout intérêt à agir dans le chef de Monsieur …, tandis que la Ville de Luxembourg a encore soulevé l’irrecevabilité du recours sous analyse pour autant qu’il est dirigé contre une décision, ainsi qualifiée, du bourgmestre du 20 mai 2019 en ce qu’elle porterait rejet des observations formulées par le requérant sur le projet de décision d’autorisation de construction conformément à l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979.
Le tribunal n’étant pas lié par l’ordre des moyens dans lequel ils lui ont été soumis, mais devant les trancher suivant la logique juridique dans laquelle ils s’inscrivent, il lui appartient tout d’abord de cerner l’objet du recours sous analyse.
1. Quant à la recevabilité du recours dirigé contre le courrier du bourgmestre du 20 mai 2019 Dans son mémoire en réponse la Ville de Luxembourg soulève l’irrecevabilité du recours en annulation pour autant qu’il est dirigé contre une décision, ainsi qualifiée, du bourgmestre du 20 mai 2019 en ce qu’elle porterait rejet des observations formulées par le requérant sur le projet de décision d’autorisation de construction conformément à l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979. Il s’agirait, en effet, d’un courrier par le biais duquel le bourgmestre aurait uniquement informé le requérant de la délivrance, le même jour, d’une autorisation de construire dans le chef de Monsieur … et qui, en tant que tel, ne constituerait pas un acte administratif susceptible de recours.
Le requérant n’a pas pris position par rapport à ce moyen d’irrecevabilité dans son mémoire en réplique.
Le tribunal est amené à constater que c’est à juste titre que la Ville de Luxembourg dénie tout caractère décisionnel au courrier du 20 mai 2019 adressé au requérant.
En effet, aux termes de l’article 2 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », un recours est ouvert « contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible ».
Cet article limite ainsi l’ouverture d’un recours devant les juridictions administratives notamment aux conditions cumulatives que l’acte litigieux doit constituer une décision administrative, c’est-à-dire émaner d’une autorité administrative légalement habilitée à prendre des décisions unilatérales obligatoires pour les administrés et qu’il doit s’agir d’une véritable décision, affectant les droits et intérêts de la personne qui la conteste1.
1 F. Schockweiler, Le contentieux administratif et la procédure administrative non contentieuse en droit luxembourgeois, n° 46, p. 28.
4 L’acte émanant d’une autorité administrative, pour être sujet à un recours contentieux, doit dès lors constituer, dans l’intention de l’autorité qui l'émet, une véritable décision, à qualifier d’acte de nature à faire grief, c’est-à-dire un acte de nature à produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle ou patrimoniale de celui qui réclame. Si le caractère décisoire de l’acte attaqué est une condition nécessaire à la recevabilité du recours contentieux, il n’est pas pour autant une condition suffisante. En effet, pour être susceptible de faire l’objet d’un recours la décision critiquée doit encore être de nature à faire grief2.
Plus particulièrement, n'ont pas cette qualité de décision faisant grief, comme n'étant pas destinées à produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, les informations données par l'administration, tout comme les déclarations d'intention ou les actes préparatoires d'une décision3.
Pour déterminer le caractère décisoire ou simplement informatif d’une lettre, il y a dès lors lieu d’analyser son libellé et de qualifier son contenu.
Force est de constater que par le courrier du 20 mai 2019, le bourgmestre s’est adressé à Monsieur … afin de l’informer qu’il venait de signer une autorisation visant « le rehaussement et la transformation de la maison unifamiliale occupant la parcelle inscrite au cadastre sous le numéro … de la section … de … et … », en l’occurrence celle du 20 mai 2019, attaquée également à travers le présent recours.
Ce courrier répond, par ailleurs, à un téléfax de Monsieur … du 2 mai 2019 par le biais duquel ce dernier a donné suite à l’invitation du bourgmestre de lui soumettre ses éventuelles observations par rapport à « un projet de 2ème décision d’autorisation pour le rehaussement et la transformation de la maison unifamiliale » sur la parcelle en cause.
Ainsi, loin de contenir un élément décisionnel propre, ledit courrier du bourgmestre se limite à prendre position par rapport aux critiques formulées par le requérant, informé au préalable à travers un courrier du 18 avril 2019 du dépôt d’une nouvelle demande d’autorisation, et, pour le surplus, comporte l’information de la délivrance, par acte séparé, d’une autorisation du 20 mai 2019, qui elle seule est susceptible de recours et qui serait, le cas échéant, susceptible d’affecter la situation des voisins.
Contrairement à ce que semble suggérer le requérant, ledit courrier ne fait dès lors pas suite à une demande de sa part laquelle le bourgmestre aurait rencontrée par une décision de refus, mais il s’inscrit uniquement dans le contexte de la prise de position adressée par le requérant à la commune en date du 2 mai 2019, qui elle-même est la suite du courrier du 18 avril 2019 par lequel le bourgmestre a informé Monsieur … de ce qu’il avait été saisi d’une nouvelle demande d’autorisation visant « le rehaussement et la transformation de la maison unifamiliale occupant la parcelle inscrite au cadastre sous le numéro … de la section … de … et sise … », que ses services avaient instruit le dossier et constaté sa conformité par rapport aux prescriptions réglementaires et qu’il avait la possibilité de consulter le dossier et de lui faire parvenir leurs observations éventuelles avant le 3 mai 2019.
2 Trib. adm. 18 juin 1998, n° 10617 et 10618, Pas. adm. 2020, V° Actes administratifs, n° 43 et les autres références y citées.
3 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, confirmé sur ce point par un arrêt du 19 février 1998, n° 10263C, Pas. adm. 2020, V° Actes administratifs, n° 63 et les autres références y citées.
5C’est dans ce contexte que le courrier de Monsieur … du 2 mai 2019 est à voir, ledit courrier mettant en exergue les raisons d’ordre urbanistique pour lesquelles le requérant s’oppose à la délivrance d’une nouvelle autorisation.
C’est par rapport à ces observations que le bourgmestre a pris position dans son courrier du 20 mai 2019 et plus particulièrement par rapport aux dispositions urbanistiques invoquées par le requérant qui, de son avis, s’opposeraient à la délivrance future d’une autorisation.
Dans ces conditions, ledit courrier ne contient aucun élément décisionnel propre, de sorte à ne pas être susceptible de recours.
Cette conclusion n’est pas infirmée par l’indication des voies de recours contenue dans le courrier du 20 mai 2019, étant donné qu’une indication erronée des voies de recours n’est pas de nature à conférer à un acte le caractère d’une décision administrative.
Il s’ensuit que le recours en annulation pour autant qu’il est dirigé contre le courrier du 20 mai 2019 adressé au requérant est à déclarer irrecevable comme étant dirigé contre un acte qui n’est pas à qualifier de décision administrative de nature à faire grief.
2. Quant à l’intérêt de Monsieur … à agir contre l’autorisation de construire du 20 mai 2019 Dans le recours sous analyse, le requérant justifie son intérêt à agir contre l’autorisation de construire délivrée le 20 mai 2019 par la circonstance que le rehaussement projeté de la toiture de la maison de Monsieur … élèverait la ligne de faîte du toit de presque 2 mètres, de sorte qu’au vu de la proximité du toit, ce rehaussement serait de nature à altérer fortement les conditions d’occupation, d’utilisation et de jouissance de son bien. Il explique, à cet égard, que depuis son salon, il aurait l’impression, en regardant à travers la baie vitrée du côté sud-ouest, d’être face à un mur oppressant, bloquant toute vue sur l’extérieur et distant de moins de 6 mètres. Ainsi, ni le ciel, ni le château d’eau, ni le haut des arbres ne seraient plus visibles, de même que le toit relevé bloquerait l’arrivée de la lumière naturelle directe dans son appartement. A cela s’ajouterait que l’ouverture de plusieurs fenêtres dans la façade de la maison de Monsieur … au niveau de la baie vitrée de son appartement conférerait aux voisins une vue directe dans son salon ce qui impliquerait une perte de son intimité.
Il estime qu’une telle dégradation de l’agrément de son appartement entraînerait automatiquement une diminution de sa valeur marchande.
Au vue de ces considérations, il devrait dès lors être admis qu’il a un intérêt direct et actuel à ce que les règles d’urbanismes applicables soient respectées.
La Ville de Luxembourg et Monsieur … soulèvent, quant à eux, l’irrecevabilité du recours dirigé contre l’autorisation de construire du 20 mai 2019 pour défaut d’intérêt à agir dans le chef du requérant.
La Ville de Luxembourg fait, à cet égard, valoir que si le requérant tentait de justifier son intérêt à agir en se plaignant avant tout du fait qu’en raison du rehaussement de l’immeuble litigieux, l’impression qu’il aurait en regardant à travers la baie vitrée située du côté sud-ouest de son appartement serait celle d’être face à un mur oppressant, bloquant toute vue sur l’extérieur et distant de moins de 6 mètres, tout en invoquant que ni le ciel ni le château d’eau 6ne seraient plus du tout visibles et en mettant en avant une perte d’ensoleillement en raison du relèvement du toit qui bloquerait l’arrivée de lumière naturelle directe dans son appartement, ces affirmations seraient contredites par la photographie versée par elle en tant que pièce n°9.
A cela s’ajouterait que le requérant n’invoquerait à l’appui de son recours aucune violation des dispositions réglementaires urbanistiques ayant trait à la hauteur même de la construction projetée, de sorte que la prétendue perte de lumière qui serait occasionnée par le rehaussement de l’immeuble litigieux n’aurait absolument aucun lien avec les moyens d’annulation invoqués.
Par ailleurs, dans la mesure où le rehaussement de l’immeuble concerné serait de seulement 1,6 mètres au faîtage, il ne pourrait, selon la Ville de Luxembourg, être sérieusement question d’une quelconque aggravation de la situation du requérant, ce d’autant plus que l’implantation de la construction principale projetée resterait inchangée par rapport à la construction initiale, et que, qui plus est, une terrasse située à l’arrière serait même détruite.
La Ville de Luxembourg est ensuite d’avis que l’argumentation adverse fondée sur une prétendue diminution de la valeur marchande de son appartement, outre de rester à l’état de pure allégation, ne serait pas non plus de nature à conférer au requérant un quelconque intérêt à agir contre l’autorisation litigieuse. Le même constat s’imposerait en ce qui concerne l’invocation de la perte alléguée d’intimité et la prétendue création d’une vue directe sur son salon.
Elle insiste, dans ce contexte, sur le fait que l’appartement du requérant se situant au niveau de l’étage en retrait d’un immeuble résidentiel, serait classé dans le secteur […] où les gabarits de construction admissibles seraient bien plus importants que ceux admissibles dans la section […] où se trouverait classé la maison de Monsieur ….
Au vu de toutes ces considérations, la Ville de Luxembourg estime que le requérant n’aurait pas d’intérêt à agir contre l’autorisation litigieuse.
Monsieur … rejoint, quant à lui, les contestations de la Ville de Luxembourg en ce qui concerne l’absence d’un intérêt à agir dans le chef du requérant.
Ainsi, il fait valoir que le rehaussement projeté, qui ne serait que de 1,61 mètres, n’engendrerait ni obscurité, ni même une perte de luminosité, ni une perte de vue, ni a fortiori une perte de la valeur marchande de l’appartement de Monsieur ….
A cela s’ajouterait qu’il se dégagerait de la deuxième photographie versée par le requérant que celui-ci n’aurait jamais eu, à partir de sa baie vitrée, ni une vue sud-ouest, ni une vue sur l’horizon, ni une vue sur le château d’eau de Cessange.
Monsieur … relève, par ailleurs, que du fait que la toiture de son immeuble aurait d’ores et déjà occupé le champ de vision de Monsieur …, celui-ci n’aurait jamais disposé à cet endroit d’une quelconque vue dégagée, tout comme lui-même n’aurait jamais bénéficié d’une vue dégagée du fait que celle-ci se trouverait bloquée par la résidence du requérant qui aurait d’ailleurs été érigée postérieurement.
Il estime qu’en tout état de cause il serait exagéré de parler d’une quelconque « obscurité totale » ou de l’apparition d’un « mur oppressant », ce d’autant plus que la soi-
7disant « grand baie vitrée » dont se prévaut le requérant ne serait rien d’autre qu’une fenêtre longitudinale d’un duplex largement illuminé de manière générale puisque Monsieur … disposerait de vues dégagées sur les autres façades.
Il ajoute qu’un allongement du projet litigieux vers l’avant et l’arrière aurait, au contraire, impacté de manière négative la vue des voisins, raison pour laquelle il n’aurait pas opté pour une telle mesure.
Il estime qu’une visite sur place s’imposerait pour vérifier la réalité de ses affirmations, même si celles-ci se dégageraient déjà des pièces versées en cause.
Ensuite, en ce qui concerne l’affirmation adverse suivant laquelle l’ouverture de plusieurs fenêtres dans la façade de sa maison au niveau de la baie vitrée de l’appartement de Monsieur … conférerait une vue directe dans le salon de celui-ci et induirait, par conséquent, une perte de son intimité, Monsieur … insiste sur le fait qu’aucune nouvelle fenêtre ne serait prévue à cette hauteur. Il renvoie, à cet égard, à une photographie des ouvertures des fenêtres de la nouvelle construction qui ont d’ores et déjà été réalisées pour souligner que celles-ci se trouveraient nettement en contre-bas de la soi-disant « baie vitrée ».
Il est d’avis que comme la fenêtre centrale projetée se situerait exactement au même endroit que l’ancienne lucarne, elle devrait être d’office disqualifiée dans l’analyse d’un éventuel impact négatif du projet litigieux sur le requérant par rapport à la situation existante.
Pour ce qui est des autres ouvertures, il donne à considérer qu’il s’agirait d’abord d’un velux qui serait nettement décalé par rapport à la soi-disant « baie vitrée » du requérant et qui ne servirait qu’à illuminer un grenier, donc une pièce non habitable et ne pouvant de ce fait gêner l’intimité du requérant. A cela s’ajouterait que l’inclinaison du velux inséré dans le toit impliquerait que la vue à partir du grenier porterait droit dans le ciel et non pas sur l’immeuble voisin. Par ailleurs, l’autre fenêtre, en forme longitudinale, se situerait en contre-bas de la baie vitrée du requérant tout en étant décalée par rapport à son champ de vision.
Au vu de ces considérations, Monsieur … est d’avis qu’il ne saurait, en l’espèce, être question d’un impact négatif du projet litigieux sur la situation du requérant et ce par comparaison avec la situation existante.
Il précise que pour montrer sa bonne volonté, il aurait opté dans le cadre de la nouvelle autorisation de construire délivrée en mai 2019 d’apposer les nouvelles fenêtres dans le toit sur le versant sud-ouest, situé du côté opposé à l’appartement du requérant, tout en soulignant qu’il aurait été initialement prévu de poser ces fenêtres sur le versant nord-est, ce qui aurait, effectivement permis une vue directe dans le duplex de Monsieur ….
Dans son mémoire en réplique, le requérant affirme que le rehaussement projeté de la maison voisine à son appartement lui causerait bien torts et griefs.
Il donne à considérer que la photographie sur laquelle se base la Ville de Luxembourg pour dénier toute aggravation de sa situation aurait été prise de l’extérieur tandis que le critère pertinent à prendre en compte serait la vue depuis son salon. A cela s’ajouterait que cette photographie montrerait l’ancienne toiture de la maison de Monsieur …, donc une toiture dont le faîte n’a pas encore été rehaussé de plus de 1,60 mètres.
8Ce serait encore à tort que la Ville de Luxembourg lui reproche de n’avoir soulevé à l’appui de son recours aucune violation d’une disposition urbanistique, alors que pourtant il aurait invoqué une violation de l’article B 2.6 b), premier tiret du PAP QE, autorisant le rehaussement d’une construction existante sous réserve que certaines conditions soient cumulativement données, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce, tel qu’il le démontrerait.
Quant à la perte d’intimité contestée par la Ville de Luxembourg, le requérant estime qu’elle serait attestée par le courrier du bourgmestre du 20 mai 2019 qui prendrait le soin de préciser que le nombre de nouvelles ouvertures sur son salon serait présentement moins grand que dans le projet précédent. A cela s’ajouterait qu’un grand velux offrirait désormais une vue plongeante sur son salon et une autre vue depuis le 1er étage de la maison voisine donnerait sur le même salon.
Il est d’avis qu’il serait de bon sens d’admettre que le rehaussement de plus de 1,60 mètres à une distance aussi faible de sa baie vitrée - distance qui serait le résultat du non-respect par la maison de Monsieur … des reculs latéraux - amoindrirait l’agrément de son appartement, amoindrissement qui impliquerait nécessairement une baisse de la valeur de celui-ci, sans qu’il ne serait nécessaire, à ce stade, de pouvoir chiffrer cette perte.
Il s’ensuivrait qu’il aurait bel et bien un intérêt à agir et le fait de lui dénier un tel intérêt de manière automatique, tel que le feraient la Ville de Luxembourg et Monsieur …, reviendrait de facto à tenter de le priver de tout droit de recours contre une décision administrative illégale.
Dans son mémoire en duplique, Monsieur … maintient ses contestations quant à l’intérêt à agir du requérant, tout en insistant sur le fait que les fenêtres et le velux projetés ne seraient pas de nature à aggraver la situation de celui-ci pour se situer soit au même endroit que les anciennes fenêtres avant transformation, soit se situer à un emplacement ne donnant aucune vue sur l’appartement du requérant. Ainsi, il pourrait être constaté que les ouvertures en question donneraient, en ce qui concerne la fenêtre se situant à l’endroit de l’ancienne lucarne, sur la façade, respectivement, pour ce qui est du velux dans le toit, dans le ciel.
Il constate que, pour le surplus, le requérant se limiterait à insister sur la prétendue réduction de l’agrément de son appartement, sans toutefois se donner la peine de fournir des précisions ou des pièces de nature à justifier son intérêt à agir autrement que par le fait qu’un tel intérêt serait prétendument constitué par le seul fait pour lui d’agir en justice.
Dans son mémoire en duplique, la Ville de Luxembourg maintient, quant à elle, également ses contestations tenant à l’absence d’intérêt à agir dans le chef du requérant.
Elle insiste tout d’abord sur le fait que le requérant n’invoquerait aucune violation des dispositions réglementaires urbanistiques ayant trait à la hauteur même de la construction projetée qui serait réglementée à travers les articles B.2.2 et B.3.4 des PAP QE.
Elle donne ensuite à considérer que si le requérant invoquait la faible distance entre la baie vitre de son appartement et la maison de Monsieur … en soutenant que celle-ci ne respecterait pas les reculs latéraux, il ne faudrait pas perdre de vue que si la maison unifamiliale existante de Monsieur … avait été érigée sur base d’une réglementation antérieure avec des reculs latéraux de 3 mètres, de sorte à ne pas respecter les reculs latéraux actuellement prévus par les PAP QE, il n’en resterait pas moins que l’implantation de cette maison ne serait aucunement modifiée par l’autorisation litigieuse.
9 A cela s’ajouterait que l’immeuble résidentiel dans lequel habite le requérant serait implanté avec un recul latéral de 3,50 mètres de la limite de propriété qui serait également inférieur au recul de 4 mètres prévu par l’article B.4.2.2 des PAP QE pour le secteur […].
Il s’ensuivrait que le requérant serait malvenu d’invoquer la faible distance entre son appartement et la maison avoisinante puisque les implantations respectives des deux constructions érigées sur base de réglementations antérieures resteraient inchangées.
Finalement, la Ville de Luxembourg insiste sur le fait qu’elle ne dénierait pas de manière automatique un intérêt à agir au voisin, mais qu’elle soumettrait l’existence d’un tel intérêt à l’établissement d’une aggravation concrète, effective et réelle découlant des modifications constructives autorisées. Or, en l’espèce, une telle preuve ferait défaut.
En ce qui concerne plus particulièrement le défaut d’intérêt à agir dans le chef du demandeur, tel que soulevé, il convient de rappeler qu’en matière de contentieux administratif, portant, comme en l’espèce, sur des droits objectifs, l’intérêt ne consiste pas dans un droit allégué, mais dans le fait vérifié qu’une décision administrative affecte négativement la situation en fait ou en droit d’un administré qui peut en tirer un avantage corrélatif de la sanction de la décision par le juge administratif4.
Par ailleurs, toute partie demanderesse introduisant un recours contre une décision administrative doit justifier d’un intérêt personnel distinct de l’intérêt général. Si les voisins proches ont un intérêt évident à voir respecter les règles applicables en matière d’urbanisme, cette proximité de situation constitue certes un indice pour établir l’intérêt à agir, mais ne suffit pas à elle seule pour le fonder. Il faut de surcroît que l’inobservation éventuelle de ces règles soit de nature à entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisin5. En d’autres termes, il faut que la construction litigeuse affecte directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien d’un demandeur6, lequel doit ainsi voir sa situation s’aggraver effectivement et réellement, la simple qualité de voisin, même direct, étant dès lors insuffisante pour justifier un intérêt à agir dans le chef du demandeur.
En tout état de cause, l’intérêt à agir s’apprécie non pas de manière abstraite, par rapport à la seule qualité de propriétaire d’un immeuble voisin, mais concrètement au regard de la situation de fait invoquée7.
En l’espèce, le demandeur justifie son intérêt à agir concrètement par l’impact négatif que le rehaussement de la toiture à versants existante, projeté en vue de l’aménagement de chambres pour enfants au 1er étage, aurait sur sa situation de voisin. Cet impact négatif se traduirait plus particulièrement par le fait que le rehaussement projeté compromettrait la vue dont il aurait pu jouir sur l’extérieur à partir de son salon situé du côté sud-ouest, de même qu’il entraînerait une perte de luminosité, le demandeur estimant, par ailleurs, que les ouvertures qui seraient créées dans le toit entraîneraient une perte d’intimité dans son chef dans la mesure où 4 Cour adm. 14 juillet 2009, n° 23857C et 23871C du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieusen°3 et les autres références y citées.
5 Voir en ce sens Cour adm. 26 mai 2005, n°19208C du rôle, Pas. adm, 2020,V° Procédure contentieuse, n°78 et les autres références y citées.
6 Olivier Renaudine, L’intérêt à agir devant le juge administratif, page 89, éditions Berger Levrault.
7 Trib. adm. 8 décembre 2003, n°16236 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieuse et l’autre référence y citée.
10elles permettraient une vue directe dans son salon, tout en mettant en avant que tous ces désagréments allégués dévaloriseraient son appartement.
Le tribunal est, à cet égard, de prime abord amené à relever que la situation de l’espèce est particulière en ce sens que les travaux autorisés visent une maison d’ores et déjà érigée sur la parcelle directement adjacente à celle sur laquelle se situe la résidence dans laquelle le demandeur est propriétaire d’un appartement se situant au dernier étage et que, de manière incontestée, l’implantation de la construction principale reste inchangée par rapport à celle de la construction initiale.
L’existence d’un intérêt à agir dans le chef du demandeur doit dès lors s’apprécier par rapport à l’aggravation que les seuls travaux modificatifs autorisés sont de nature à entraîner par rapport à la situation ayant préexisté, étant encore relevé que le demandeur situe son préjudice uniquement par rapport à l’impact négatif allégué du rehaussement sur l’ouverture vers son salon situé du côté sud-ouest.
Il se dégage des plans versés en cause et il n’est, par ailleurs, pas contesté que par le biais des travaux autorisés le faîte de la maison litigieuse se trouvera rehaussé de 1,61 mètres, étant relevé qu’il n’est pas non plus contesté que la hauteur imposée par la réglementation urbanistique en vigueur ne sera pas dépassée par l’effet du rehaussement ni que l’implantation de la construction voisine existante reste inchangée.
Ensuite, le tribunal se doit de constater que si le demandeur justifie son intérêt à agir par une perte de vue, respectivement de luminosité au niveau de l’ouverture sud-ouest de son salon, il se dégage des photographies versées en cause, et plus particulièrement de celle reflétant sa vue à partir de son salon, que celui-ci n’a jamais joui d’une vue dégagée du côté sud-ouest, puisqu’au contraire, il a toujours eu, à partir de son salon, une vue directe sur le toit de la maison voisine, respectivement tout au plus sur le haut des arbres se trouvant derrière cette maison. Cette situation de fait a d’ailleurs été confirmée par le requérant lui-même dans son courrier adressé au bourgmestre le 2 mai 2019 dans la mesure où il a expliqué que « la toiture dont le rehaussement est projeté, obstrue déjà une partie de la vue par la baie vitrée, et elle se situe à seulement 6 mètres de ma baie vitrée ». Pour ce qui est de la vue sur le château d’eau et sur l’horizon dont il se prévaut et qui serait compromise du fait du rehaussement, outre le fait que l’affirmation suivant laquelle il aurait eu, à partir de son salon, une vue directe sur le château d’eau et l’horizon n’est appuyée par aucun élément du dossier, alors qu’il aurait été aisé de fournir des photographies documentant cette prétendue vue et ce, au plus tard après que l’absence de vue aussi bien sur le château d’eau que sur l’horizon lui a été opposée par la partie tierce-intéressée dans son mémoire en réponse, le tribunal se doit de constater, à l’instar de Monsieur …, que ni le château d’eau en question, ni d’ailleurs l’horizon ne sont visibles sur l’unique photographie versée en cause par le demandeur pour tenter justement de documenter sa vue à partir de son salon sur la maison voisine avant les travaux de rehaussement. Il est dès lors tout au plus permis d’admettre que ce n’est qu’en se positionnant directement devant sa baie vitrée située dans son salon qu’il lui a, le cas échéant, été possible de voir le château d’eau et l’horizon.
En tout état de cause, dans la mesure où son champ de vision à partir de la baie vitrée en question n’a jamais été libre, le seul fait que le requérant n’aurait prétendument plus de vue directe ni sur le château d’eau, ni sur le haut des arbres, ni sur l’horizon ne saurait être considéré comme affectant directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son appartement de manière telle qu’il en découlerait une aggravation de sa situation concrète de 11voisin ni pour faire valoir d’intérêt suffisant à agir pour solliciter l’annulation de l’autorisation de construire délivrée par le bourgmestre en date du 20 mai 2019.
Le même constat s’impose en ce qui concerne la perte alléguée de luminosité, celle-ci devant, en tout état de cause, être mise en balance avec le fait qu’au vu des implantations respectives des deux constructions érigées à une faible distance sur base de réglementations urbanistiques antérieures, la maison voisine et sa toiture ont nécessairement toujours empêché que l’appartement du requérant soit baigné de lumière à partir de la baie vitrée de son salon.
Si le requérant invoque encore une perte d’intimité du fait que plusieurs fenêtres seraient projetées dans la façade de la maison voisine au niveau de la baie vitrée en cause, il y a lieu de constater, à l’étude des plans et des photographies versées que si de nouvelles ouvertures sont effectivement créées du côté sud-ouest, il n’en reste pas moins que, de manière non contestée, trois ouvertures sont situées en contre-bas de la baie vitrée en cause, de sorte que celles-ci ne peuvent avoir la moindre incidence au niveau de l’intimité du requérant pour ne conférer aucune vue sur son salon à travers la baie vitrée. Le tribunal relève à cet égard que, bien que confronté à cet état de fait à travers le mémoire en réponse de Monsieur …, le requérant n’a pas pris position y relativement. Ensuite, il se dégage des plans versés en cause et des explications pas non plus contestées de Monsieur … que la fenêtre centrale projetée du côté sud-ouest dans la toiture vient remplacer l’ancienne lucarne s’étant trouvée au même endroit, de sorte à ne pas être de nature à générer du point de vue de son intimité une aggravation de la situation du demandeur par rapport à la situation existante. Pour ce qui est du velux projeté, le tribunal se doit de constater qu’encore que confronté aux explications de Monsieur …, telles que sous-tendues par les plans autorisés, suivant lesquelles le velux en question est largement décalé par rapport à la baie vitrée et que, de ce fait, il ne saurait être valablement argumenté qu’il puisse générer une perte d’intimité dans le chef du requérant, ce d’autant plus que, d’une part, il est installé dans le grenier, et donc, de manière incontestée, dans une pièce non fréquentée de manière régulière, et que, d’autre part, dans la mesure où il est inséré dans le toit, son inclinaison ne permet pas une vue directe dans le salon du demandeur, celui-ci n’a aucunement contredit cette analyse.
Pour ce qui est finalement de la dernière ouverture en cause du côté sud-ouest, il se dégage des plans et des explications également non contestées de Monsieur … que celle-ci est elle aussi en décalage par rapport à la baie vitrée, de sorte que la perte d’intimité alléguée en ce qu’elle est fondée sur la prémisse que cette ouverture permettrait une vue directe sur le salon du demandeur par le biais de sa baie vitrée reste à l’état de pure allégation.
En conclusion, le tribunal est amené à conclure que si le rehaussement projeté a nécessairement une incidence partielle sur la vue et la luminosité de Monsieur …, cette considération doit cependant, au vu des circonstances de l’espèce, telles que décrites ci-
dessous, être fortement relativisée en ce sens que l’incidence du rehaussement de la maison voisine au niveau de la vue et de la luminosité ne concerne qu’un champ de vision déjà très largement impacté à l’heure actuelle par cette même maison et par le fait que le champ de vision de Monsieur … se trouve, par ailleurs, sensiblement dégagé à partir des autres façades, de sorte que la situation de voisin du requérant n’est pour le moins pas globalement aggravée.
Au vu de cette conclusion c’est, en tout état de cause, en vain qu’il tente encore de justifier son intérêt à agir par la prétendue diminution de la valeur marchande de son bien immobilier qui résulterait d’une dégradation de l’agrément de son appartement.
12Il y a, par conséquent, lieu de conclure de tout ce qui précède et sans qu’il n’y ait besoin de procéder à une visite des lieux telle que suggérée par Monsieur …, à une absence d’intérêt suffisant à agir dans le chef de Monsieur … et de déclarer irrecevable le recours introductif de celui-ci.
Au vu de l’issue du litige, la demande en paiement d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.500.- euros formulée par Monsieur … sur le fondement de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives est à rejeter.
Nonobstant l’issue du litige, il y a lieu de rejeter comme non justifiée la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.500.- euros formulée par Monsieur … sur le même fondement légal, alors que les conditions d’application de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 et notamment l’établissement du caractère d’iniquité résultant du fait de laisser les frais non répétibles à charge de la partie tierce-intéressée n’ont pas été rapportées à suffisance comme étant remplies en l’espèce.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
déclare le recours irrecevable en ce qu’il est dirigé contre le courrier du 20 mai 2019 adressé par le bourgmestre de la Ville de Luxembourg au requérant à défaut d’élément décisionnel propre contenu dans ledit courrier ;
déclare le recours irrecevable en ce qu’il est dirigé contre l’autorisation de construire délivrée le 20 mai 2019 par le bourgmestre de la Ville de Luxembourg, faute d’intérêt à agir dans le chef de Monsieur … ;
rejette les demandes en paiement d’une indemnité de procédure formulées de part et d’autre ;
met les frais et dépens à charge du requérant.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 1er mars 2021 par :
Annick Braun, vice-président, Alexandra Castegnaro, premier juge, Carine Reinesch, juge, en présence du greffier Luana Poiani.
s. Luana Poiani s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 1er mars 2021 Le greffier du tribunal administratif 13