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08/02/2021 | LUXEMBOURG | N°43552

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 février 2021, 43552


Tribunal administratif N° 43552 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 septembre 2019 1re chambre Audience publique du 8 février 2021 Recours formé par Monsieur … et consort, …, contre une décision du bourgmestre de la commune de Steinfort, en présence de Monsieur … et consort, …, en matière de permis de construire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43552 du rôle et déposée le 13 septembre 2019 au greffe du tribunal administratif par Maître Charles

Kaufhold, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au n...

Tribunal administratif N° 43552 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 septembre 2019 1re chambre Audience publique du 8 février 2021 Recours formé par Monsieur … et consort, …, contre une décision du bourgmestre de la commune de Steinfort, en présence de Monsieur … et consort, …, en matière de permis de construire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43552 du rôle et déposée le 13 septembre 2019 au greffe du tribunal administratif par Maître Charles Kaufhold, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de Monsieur … et de son épouse, Madame …, demeurant tous les deux à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision, ainsi qualifiée, du bourgmestre de la commune de Steinfort du 17 juin 2019 par le biais de laquelle ils ont été mis en demeure de remédier à des travaux réalisés en violation de l’autorisation de construire leur délivrée le 24 août 2018 et de se conformer à ladite autorisation ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Nadine dite Nanou Tapella, demeurant à Esch/Alzette, du 17 septembre 2019 portant signification de ce recours à 1) la commune de Steinfort, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions, établie à L-8443 Steinfort, 4, Square Général Patton et 2) Monsieur … et à Madame …, les deux demeurant ensemble à L-… ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour de Maître Steve Helminger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, déposée au greffe du tribunal administratif le 20 septembre 2019 pour compte de la commune de Steinfort, préqualifiée ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour de Maître Georges Krieger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, déposée au greffe du tribunal administratif le 30 septembre 2019 pour compte de Monsieur … et de Madame …, préqualifiés ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 11 décembre 2019 par Maître Steve Helminger pour compte de la commune de Steinfort, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 16 décembre 2019 par Maître Georges Krieger pour compte de Monsieur … et de Madame …, préqualifiés ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 16 janvier 2020 par Maître Charles Kaufhold pour compte de Monsieur … et de Madame …, 1préqualifiés;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 6 février 2020 par Maître Steve Helminger pour compte de la commune de Steinfort, préqualifiée ;

Vu l’acte de désistement d’instance déposé au greffe du tribunal administratif en date du 5 janvier 2021 par Maître Charles Kaufhold pour compte de Monsieur … et de Madame …, préqualifiés, par lequel ses mandants déclarent se désister « purement et simplement de l’action introduite contre les parties défenderesses », ledit acte de désistement d’instance ayant en outre été signé par les mandants eux-mêmes ;

Vu les pièces versées en cause et notamment l’acte entrepris ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l'audience publique du 13 janvier 2021, et vu les remarques écrites de Maître Steve Helminger et de Maître Georges Krieger des 8 et 12 janvier 2021, produites avant l’audience, conformément à la circulaire du président du tribunal administratif du 22 mai 2020.

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En date du 24 août 2018, le bourgmestre de la commune de Steinfort, ci-après désigné par « le bourgmestre », délivra à Monsieur … et à Madame …, ci-après désignés par « les consorts … », une autorisation pour « la construction de murets, remblai de terres et pose de brise-vue » sur un fonds sis … à …, inscrit au cadastre de la commune de Steinfort sous le numéro … de la section … de ….

Par courrier du 17 juin 2019, le bourgmestre s’adressa aux consorts … dans les termes suivants :

« Mes services ont constaté que les travaux réalisés dans le cadre de l’autorisation de construire n° … du 24 août 2018 sont en contravention aux règlements communaux.

Le mur de soutènement des terres réalisé, ainsi que le remblai des terres n’est pas conforme au plan de l’autorisation de construire délivrée, respectivement contraire aux prescriptions du Plan d’Aménagement Particulier qui stipulent :

Article 12 – Clôture et chemins d’accès … Les clôtures à l’arrière des constructions délimitant les propriétés privées entre elles peuvent être clôturées par des socles ou des murets mitoyens, de minimum 24 cm et d’une hauteur moyenne inférieure à 0,50m, surmontés par un grillage ouvert ou d’une haie. La hauteur totale de ces clôtures ne peut dépasser 1,20m.

Article 13 – Travaux de déblai et remblai En général, le terrain naturel est à préserver.

La pente d’aucun talutage ne pourra dépasser le rapport d’un mètre de hauteur sur trois mètres de longueur. Aucun mur de soutènement n’est autorisé sur la limite d’une parcelle.

… 2Par ailleurs, les travaux réalisés empiètent sur une des parcelles voisines et de façon à altérer sa surface.

Dès lors je vous prie de remédier aux travaux réalisés et de vous conformer à l’autorisation de construire délivrée, dans un délai de trois (3) mois, et de nous contacter en vue du constat de la régularisation, sans quoi nous serons obligés de remettre ce dossier à notre conseil juridique.

Un recours contre la présente décision peut être interjeté auprès du tribunal administratif conformément aux dispositions de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives. Ce recours doit être introduit sous peine de déchéance dans un délai de trois (3) mois à partir de la notification de la présente décision par le biais d’un avocat à la Cour. […] ».

Le 14 août 2019, les consorts … adressèrent au bourgmestre un courrier recommandé qu’ils qualifièrent de recours gracieux dirigé contre « la décision », ainsi qualifiée, du 17 juin 2019 tout en lui demandant d’annuler, sinon de mettre en suspens sa décision, ainsi qualifiée.

Par courrier recommandé du 4 septembre 2019, le litismandataire des consorts … s’adressa au bourgmestre pour constater le défaut de réponse donné par celui-ci au courrier précité du 14 août 2019, tout en lui signalant qu’à défaut de réponse immédiate, il n’aurait pas d’autre choix que de conseiller à ses mandants d’agir en justice.

Par une requête déposée au greffe du tribunal administratif en date 13 septembre 2019, inscrite sous le numéro 43552 du rôle, les consorts … ont fait introduire un recours en réformation sinon en annulation contre la décision, ainsi qualifiée, du bourgmestre du 17 juin 2019, par le biais de laquelle ils ont été mis en demeure de remédier à des travaux réalisés en violation de l’autorisation de construire leur délivrée et de se conformer à ladite autorisation.

Suivant acte de désistement d’instance déposé au greffe du tribunal administratif en date du 5 janvier 2021, et signé par les consorts …, ceux-ci ont informé le tribunal de leur volonté de se désister purement et simplement de leur recours en réformation, sinon en annulation introduit sous le numéro 43552 du rôle, dirigé contre la décision, ainsi qualifiée, précitée, du 17 septembre 2019, attribuée au bourgmestre de la commune de Steinfort.

Par courrier du 8 janvier 2021, la commune de Steinfort a accepté le désistement d’instance proposé par les consorts ….

Par courrier du 12 janvier 2021, Monsieur … et Madame …, auxquels les consorts … ont fait signifier par voie d’huissier ledit recours en réformation, sinon en annulation, en leur qualité de « défendeurs […] impliqués en tant que tiers intéressés car ils sont susceptibles d’avoir causé la décision litigieuse », ci-après désignés par « les consorts … », ont informé le tribunal qu’ils prenaient acte de la volonté des consorts … de se désister, tout en maintenant, par ailleurs, leur demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que formulée dans leur mémoire en réponse.

Dans la mesure où par le biais de l’acte déposé au greffe du tribunal administratif le 5 janvier 2021, les consorts … déclarent se désister de leur instance et que tant la commune que les consorts … ont marqué leur accord avec ledit désistement, il y a lieu de leur en donner acte et de constater la déchéance du recours au sens de l’article 25 de la loi modifiée du 21 juin 31999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, en vertu duquel :

« Le désistement peut être fait par acte signé par le demandeur ou par son mandataire et communiqué à la partie adverse et au tiers intéressé dans les formes de l’article 10. Il emporte de plein droit déchéance du recours et obligation de payer les frais de l’instance. ».

Comme les effets du désistement n’atteignent cependant pas une demande en paiement d’une indemnité de procédure, puisque celle-ci procède d’une cause juridique particulière et autonome, à savoir l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », celle-ci doit ainsi être toisée à la demande de la partie défenderesse ou tierce intéressée1.

Dès lors, il appartient au tribunal de statuer sur la demande en paiement d’une indemnité de procédure de 5.000.- euros réclamée par les consorts ….

Pour justifier leur demande en paiement d’une indemnité de procédure, les consorts … expliquent dans leur courrier du 12 janvier 2021 qu’il apparaîtrait que le recours aurait été ab initio manifestement irrecevable pour ne pas avoir été dirigé contre une décision administrative, mais contre une simple injonction de l’administration de supprimer des travaux non conformes.

A cela s’ajouterait que les travaux infractionnels auraient entretemps été enlevés par les consorts … au courant du mois de décembre 2019, soit avant même que le délai pour déposer un mémoire en réponse aurait expiré, de sorte qu’il serait incompréhensible pour quelle raison ils ne s’étaient désistés que quelques jours avant l’audience des plaidoiries.

Les consorts … estiment, enfin, que le désistement d’instance devrait s’analyser comme un aveu des consorts … concernant l’opportunité de leur recours.

Au vu de toutes ces considérations, il serait inéquitable de laisser les sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens à leur charge, ce d’autant plus que le recours leur aurait été signifié spontanément par les requérants.

Les consorts … n’ont pas pris position par rapport au courrier des consorts … du 12 janvier 2021, ni a fortiori par rapport à l’argumentation invoquée par ceux-ci pour justifier le bien-fondé de leur demande en allocation d’une indemnité de procédure.

En ce qui concerne la demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que formulée et maintenue par les consorts …, le tribunal est tout d’abord amené à relever qu’indépendamment de la question de la recevabilité du recours dont les requérants se sont désistés et ce, eu égard à la jurisprudence constante des juridictions administratives suivant laquelle une invitation adressée à un administré à se conformer aux règles urbanistiques en vigueur avec comme conséquence la remise des lieux en leur pristin état ou mises en demeure, constitutives d’une réaction spontanée au constat d’une infraction aux règles d’urbanisme, ne constituent pas des décisions autonomes de nature à faire grief2, dans la mesure où le courrier du bourgmestre du 17 septembre 2019 était assorti d’une indication des voies de recours, il ne saurait être reproché aux requérants, qui se sont fiés à cette indication, certes, le cas échéant, à tort, d’avoir introduit leur recours de manière abusive ou à la légère.

1 Trib. adm. 5 mars 2008, n° 23409 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure contentieuse, n°1132 et autre référence y citée 2 Cour adm. 14 juin 2011, n° 27726C du rôle, Pas. adm. 2020, V° Actes administratifs, n° 123 et l’autre référence y citée.

4 Contrairement aux consorts …, le tribunal n’analyse d’ailleurs pas la volonté des consorts … de se désister de leur recours nécessairement comme un aveu quant à l’opportunité de celui-ci. Il se dégage, en effet, des explications des consorts … eux-mêmes que déjà au cours du mois de décembre 2019, les requérants ont enlevé les travaux litigieux et qu’ils se sont donc conformés à la mise en demeure leur adressée par le bourgmestre, de sorte que leur désistement d’instance semble a priori s’expliquer par le fait qu’ils ont fait ce qu’il leur a été demandé à travers le courrier du 17 septembre 2019.

Il n’en reste pas moins qu’il est vrai que les requérants ont fait signifier le recours sous analyse aux consorts … en raison de leur prétendue qualité de parties tierces-intéressées au présent litige.

Or, si l’article 4 de la loi du 21 juin 1999 impose que la requête introductive d’instance soit notifiée aux « parties intéressées », notion qui vise toute personne directement intéressée à la solution du litige, il ne se dégage toutefois pas des éléments de la cause dans quelle mesure les consorts … sont à considérer comme des parties intéressées auxquelles le recours aurait dû être signifié, ni leur qualité de voisin, ni le fait qu’ils seraient prétendument à l’origine du courrier par lequel les requérants se sont sentis lésés n’étant, en effet, à eux seuls suffisants pour les impliquer dans le litige porté devant les juridictions administratives.

Il doit dès lors être admis que les consorts … se sont retrouvés exposés à une procédure contentieuse impliquant le ministère obligatoire d’un avocat à la Cour à laquelle ils ne devaient pas obligatoirement être parties et que, de ce fait, ils ont dû exposer des frais d’avocat, étant relevé qu’en tout état de cause, il ne saurait leur être reproché d’avoir mandaté un avocat avec la défense de leurs intérêts après s’être vu signifier le recours des consorts … par voie d’huissier de justice.

Au regard de ces considérations et en l’absence de prise de position formulée par les requérants suite à la volonté déclarée des consorts … de maintenir leur demande en allocation d’une indemnité de procédure notamment eu égard au fait qu’ils estiment s’être vus signifier le recours litigieux sans qu’une telle obligation ait existé dans le chef des requérants, le tribunal est amené à retenir qu’il serait inéquitable de laisser à l’unique charge des consorts … les frais non compris dans les dépens et plus particulièrement les frais d’avocat qu’ils ont dû exposer pour se défendre dans un procès dans lequel ils n’avaient pas besoin d’être impliqués. Le tribunal accorde des lors à aux consorts … indemnité de procédure qu’il évalue ex aequo et bono à 300.- euros.

Conformément à l’article 25, alinéa 2, de la loi du 21 juin 1999, les frais de l’instance sont à supporter intégralement par les requérants.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

donne acte à Monsieur … et à Madame … de ce qu’ils se désistent de l’instance introduite le 13 septembre 2019 ;

déclare ledit désistement régulier et valable ;

5constate la déchéance du recours au sens de l’article 25 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

condamne Monsieur … et Madame … au paiement d’une indemnité de procédure de 300.- euros au bénéfice des consorts … ;

met les frais et dépens à charge de Monsieur … et de Madame ….

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 8 février 2021 par :

Annick Braun, vice-président, Alexandra Castegnaro, premier juge, Carine Reinesch, juge, en présence du greffier Luana Poiani.

s. Luana Poiani s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 8 février 2021 Le greffier du tribunal administratif 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 43552
Date de la décision : 08/02/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 13/02/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2021-02-08;43552 ?

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