Tribunal administratif N° 41621 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 août 2018 4e chambre Audience publique du 29 septembre 2020 Recours formé par Monsieur …, …, contre trois actes du directeur général adjoint de la police grand-ducale en matière de détachement
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 41621 du rôle et déposée le 24 août 2018 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie Bauler, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, commissaire en chef, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la « décision » du 24 mai 2018 rejetant sa candidature pour le poste de Chef du commissariat de proximité CP …, de l'arrêté d'affectation de Monsieur … au commissariat de proximité de … du 25 avril 2018 et de l'ordre de nomination du 1er mai 2018 de Monsieur … à la fonction de chef ff du commissariat de proximité de … ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Martine Lisé, demeurant à Luxembourg, du 12 septembre 2018, portant signification de la requête introductive d’instance à Monsieur …, demeurant à L-… ;
Vu la constitution d’avocat de Maître Maximilien Lehnen déposée au greffe du tribunal administratif en date du 16 novembre 2018 par laquelle il déclare avoir mandat d’occuper et se constituer pour Monsieur le Commissaire en chef … ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 3 décembre 2018 ;
Vu le mémoire en réponse du 11 décembre 2018 déposé au greffe du tribunal administratif par Maître Maximilien Lehnen, préqualifé, au nom de Monsieur …, préqualifié ;
Vu le mémoire en réplique déposé le 10 janvier 2019 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie Bauler au nom de Monsieur …, préqualifié ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 8 février 2019 ;
Vu les pièces versées et notamment les actes critiqués ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jonathan Holler, en remplacement de Maître Jean-Marie Bauler, Maître Maximilien Lehnen et Madame le délégué du gouvernement Danièle Nosbusch en leurs plaidoiries respectives.
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1Monsieur …, fonctionnaire de la police grand-ducale, fut nommé aux fonctions de chef du commissariat de proximité de …, ci-après désigné par « CP de … », par arrêté ministériel du 29 avril 2011.
Le 24 octobre 2016, le directeur général de la police grand-ducale lui a notifié un préavis de détachement de ses fonctions exercées au CP de … à la Direction des Opérations et Préventions, Centre d'Intervention National.
Le 31 octobre 2016, le directeur général adjoint de la police grand-ducale, ci-après « le directeur général adjoint », adressa à Monsieur … un ordre de détachement à titre de mesure conservatoire à la Direction des Opérations et Préventions, Centre d'Intervention National.
Le recours introduit à l’encontre de l’ordre de détachement du directeur général adjoint du 31 octobre 2016 fut définitivement rejeté par arrêt de la Cour administrative du 5 juin 2018 portant le numéro 40814C.
Une note de service n° 25/2018 du 26 mars 2018 informa de la vacance de quatre postes dont notamment un concernant le poste de Chef du commissariat de proximité CP … En date du 30 mars 2018, Monsieur … posa sa candidature pour ledit poste.
Par un arrêté du 25 avril 2018, Monsieur … a été « désaffecté du Service de Recherche et d'enquête criminelle de Cappellen pour être affecté au commissariat de proximité de … avec effet au 1er mai 2018 ».
Par un ordre de nomination du 1er mai 2018, le directeur général de la police grand-
ducale a nommé Monsieur … « à la fonction de chef ff du commissariat de proximité de … avec effet au 1er mai 2018 ».
Par courrier intitulé « Brm.- », du 24 mai 2018, lui notifiée le 30 mai 2018, le directeur des ressources humaines a informé Monsieur … que sa candidature au poste de Chef du commissariat de proximité CP … n’avait pas été retenue.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 24 août 2018, inscrite sous le numéro 41621 du rôle, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation sinon en annulation dirigé contre la « décision » du 24 mai 2018 rejetant sa candidature pour le poste de Chef du commissariat de proximité CP …, l'arrêté d'affectation de Monsieur … au commissariat de proximité CP … du 25 avril 2018 et l'ordre de nomination du 1er mai 2018 de Monsieur … à la fonction de chef ff du commissariat de proximité CP ….
Dans la mesure où aucune disposition légale ne prévoit un recours au fond en la présente matière, le tribunal administratif est incompétent pour statuer sur le recours en réformation introduit à titre principal.
Quant au recours subsidiaire en annulation, le délégué du gouvernement soulève un moyen d’irrecevabilité du recours tiré du défaut d’intérêt à agir de Monsieur …. Il soutient à ce titre que Monsieur … justifierait son intérêt à agir par la circonstance que du fait de la nomination de Monsieur … au poste de chef du commissariat « Porte de l'Ouest », il serait privé d'exercer les fonctions de chef de commissariat. Or, il estime que, contrairement à ce que soutiendrait Monsieur …, l'appel à candidatures ayant abouti à la décision critiquée ne porterait 2pas sur l'attribution du poste de chef du futur commissariat « Porte de l'Ouest » regroupant les commissariats de … et de …, mais bien sur une nomination « faisant fonction » de chef du commissariat de proximité de …. Ainsi, il est d’avis que l'affectation de Monsieur … au commissariat de proximité CP … n'aurait en aucune manière affecté la situation statutaire de Monsieur …, qui resterait chef du commissariat de proximité CP …. Il donne à considérer que le véritable objectif poursuivi par Monsieur … serait l’annulation de l’ordre de détachement au Centre d’Intervention National, dont la légalité aurait été confirmée par la Cour administrative et, qui ne saurait être atteint par l’annulation des décisions déférées. Il conclut que dans la mesure où l'intérêt à agir se mesurerait à la satisfaction que l'instance est censée procurer à une partie et où la présente instance ne pourrait pas aboutir, le recours serait à déclarer irrecevable pour défaut d’intérêt à agir.
La partie tierce intéressée se rallie au moyen d’irrecevabilité soulevé par le délégué du gouvernement tiré du défaut d’intérêt à agir de Monsieur …, précisant que le commissariat CP … n’avait plus existé au jour de la requête introductive d’instance pour avoir fusionné avec d’autres commissariats dans le cadre de la réforme de la loi Police en 2018.
Monsieur … rétorque que la Cour administrative aurait retenu dans son arrêt précité qu’il ne pourrait à l’évidence plus faire un travail de chef de commissariat de proximité depuis son détachement vers le Centre National d’Intervention. Or, il rappelle qu’il aurait posé sa candidature pour « le poste qui deviendra en suite celui de chef du commissariat Porte de l’Ouest » qui aurait été attribué à Monsieur …, de sorte qu’il serait « de facto et de jure, privé d’exercer les fonctions de chef de commissariat pour des motifs manifestement illégaux ».
Force est au tribunal de constater que suite à l'introduction de la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale, ci-après désignée par « la loi du 18 juillet 2018 », les commissariats de proximité ont été abolis. En effet, l’exposé des motifs de ladite loi indiquent que « la distinction opérée par la loi du 31 mai 1999 entre centres d’intervention et commissariats de proximité a été abolie, pour introduire une seule dénomination de „commissariat de police“, facilitant ainsi de manière conséquente l’organisation des services policiers, mais également la perception de la Police par le citoyen pour lequel une distinction de dénomination entre services de police générale est dénuée de tout sens »1.
Il ressort encore des affirmations concordantes tant de Messieurs … et … que du délégué du gouvernement que le commissariat de proximité de …, visé par l’appel à candidature litigieuse, n’existe plus et qu’en date du 1er août 2018, soit antérieurement à la date d’introduction du présent recours, le ministre ayant dans ses attributions la Sécurité Intérieure a établi, sur base de loi du 25 mars 2015 fixant le régime des traitements et les conditions et modalités d’avancement des fonctionnaires de l’Etat, l’organigramme de la police grand-ducale aux termes duquel tant Monsieur … que Monsieur … occupent le poste de chef du « Commissariat Porte de l’Ouest », qui est un poste désigné comme poste à responsabilité particulière (PARP).
Ainsi, c’est à juste titre que le délégué du gouvernement fait valoir que l’objectif du présent recours ne saurait être celui de l’obtention in fine, par la nomination de chef du commissariat de proximité …, d’une nomination au poste de chef du « Commissariat Porte de l’Ouest », étant donné qu’elle est manifestement intervenue dès le 1er août 2018. Partant, l’intérêt de Monsieur … à agir dans le cadre de la présence instance en ce qu’«[il serait] de facto 1 Projet de loi n° 7045, Exposé des motifs, Commentaire des articles, Ad Article 58, p. 49 3et de jure, privé d’exercer les fonctions de chef de commissariat pour des motifs manifestement illégaux », n’est à l’évidence pas donné.
Il s’ensuit que le recours est à déclarer irrecevable pour défaut d’intérêt à agir de Monsieur … concernant les trois actes déférés, quel que soit leur caractère attaquable.
Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;
déclare le recours subsidiaire en annulation irrecevable ;
condamne le demandeur aux frais et dépens.
Ainsi jugé par:
Anne Gosset, premier juge, Olivier Poos, premier juge, Emilie Da Cruz de Sousa, juge, et lu à l’audience publique du 29 septembre 2020 par le premier juge Anne Gosset, en présence du greffier Marc Warken.
s.Marc Warken s.Anne Gosset Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 29 septembre 2020 Le greffier du tribunal administratif 4