Tribunal administratif N° 40567 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 janvier 2018 2e chambre Audience publique du 22 juillet 2020 Recours formé par Madame … et consorts, Luxembourg, contre deux décisions du conseil communal de la Ville de Luxembourg, une décision du ministre de l’Intérieur et une décision du ministre de l’Environnement, en présence du Fonds d’Urbanisation et d’Aménagement du Plateau de Kirchberg en matière de plan d’aménagement général
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 40567 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 5 janvier 2018 par Maître Georges Krieger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de 1. Madame …, demeurant à …, 2. Madame …, demeurant à …, 3. Madame …, demeurant à …, 4. Madame …, demeurant à …, 5. Madame …, demeurant à …, 6. Madame …, demeurant à …, 7. Monsieur et Madame …, demeurant à …, 8. Monsieur et Madame …, demeurant à …, 9. Monsieur …, demeurant à …, 10. Monsieur …, demeurant à …, tendant à l’annulation de « 1) La décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 13 juin 2016 adoptée en application de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, portant « mise sur orbite » du projet de refonte globale du Plan d’Aménagement Général de la Ville de Luxembourg ;
2) La décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017 portant adoption du projet de refonte globale du Plan d’Aménagement Général de la Ville de Luxembourg ;
3) La décision du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 approuvant les décisions 1précitées de la Ville de Luxembourg ;
4) La décision de la ministre de l’Environnement du 6 octobre 2017 approuvant les décisions précitées de la Ville de Luxembourg ; » Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Christine Kovelter, en remplacement de l’huissier de justice Frank Schaal, demeurant à Luxembourg, du 12 janvier 2018, portant signification de ce recours à l’administration communale de la Ville de Luxembourg, établie à L-
1648 Luxembourg, 42, Place Guillaume II, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;
Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 7 février 2018 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, inscrite au tableau de l’ordre des avocats de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F. Kennedy, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B186371, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Christian Point, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;
Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 19 février 2018 par Maître Albert Rodesch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté par son Ministre d’Etat ;
Vu la requête en prorogation des délais pour déposer le mémoire en réponse ainsi que le mémoire en duplique, présentée par Maître Albert Rodesch, pour compte de l’Etat du Grand-
Duché de Luxembourg, en date du 22 février 2018 ;
Vu les accords de toutes les autres parties avec la mesure sollicitée ;
Vu les avis des 8 et 12 mars 2018 du tribunal administratif fixant les délais pour déposer les mémoires en réponse, réplique et duplique ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 29 juin 2018 par Maître Albert Rodesch, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 29 juin 2018 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 26 octobre 2018 par Maître Georges Krieger, au nom des parties demanderesses ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 31 janvier 2019 par Maître Albert Rodesch, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;
2Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 1er février 2019 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;
Entendu les parties en cause à l’audience publique de la 2e chambre du tribunal administratif du 29 avril 2019 lors de laquelle le tribunal ordonna la mise en intervention d’une partie tierce intéressée ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Laura Geiger, en remplacement de l’huissier de justice Carlos Calvo, du 8 mai 2019 portant signification de ce recours à établissement public dénommé « Fonds d’Urbanisation et d’Aménagement du Plateau de Kirchberg » représenté par son président actuellement en fonctions, établi par la loi du 7 août 1961 et ayant son siège à L-
1468 Luxembourg, 4, rue Erasme ;
Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 22 mai 2019 par Maître Patrick Kinsch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom du Fonds d’Urbanisation et d’Aménagement du Plateau de Kirchberg ;
Vu l’ordonnance du vice-président présidant la 2e chambre du tribunal administratif autorisant le Fonds de l’Urbanisation et d’Aménagement du Plateau de Kirchberg à déposer un mémoire supplémentaire au greffe du tribunal administratif pour le 26 juillet 2019, la partie étatique et la Ville de Luxembourg à déposer un mémoire supplémentaire pour le 9 septembre 2019 et les parties demanderesses à déposer un mémoire supplémentaire pour le 18 octobre 2019 en fixant l’affaire pour plaidoiries à l’audience publique du 21 octobre 2019 ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 25 juillet 2019 par Maître Patrick Kinsch, au nom du Fonds d’Urbanisation et d’Aménagement du Plateau de Kirchberg ;
Vu les pièces versées en cause ainsi que les décisions attaquées ;
Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Sébastien Couvreur, en remplacement de Maître Georges Krieger, Maître Rachel Jazbinsek, en remplacement de Maître Albert Rodesch, Maître Gilles Dauphin, en remplacement de Maître Christian Point, et Maître Patrick Kinsch en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 21 octobre 2019.
Lors de sa séance publique du 13 juin 2016, le conseil communal de la Ville de Luxembourg, ci-après désigné par le « conseil communal », se déclara d’accord, en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet 2004 », « (…) pour lancer la procédure d’adoption du nouveau projet d’aménagement général (PAG) de la Ville de Luxembourg, parties écrite et graphique accompagnées des documents et annexes prescrits par la législation y relative (…) » et « (…) charge[a] le collège des bourgmestre et échevins de procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain et à l’article 7 de la loi modifiée du 22 mai 32008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement (…) ».
Le 14 juin 2016, le collège des bourgmestre et des échevins de la Ville de Luxembourg, ci-
après désigné par « le collège des bourgmestre et échevins », se déclara d’accord, en vertu de l’article 30, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, pour « (…) engager la procédure d’adoption des premiers plans d’aménagement particuliers « quartiers existants » de la Ville de Luxembourg, parties écrite et graphique et de les soumettre à la procédure d’adoption en les déposant à l’inspection du public et en les transmettant pour avis à la cellule d’évaluation de la Commission d’aménagement instituée auprès du Ministère de l’Intérieur ainsi qu’au Ministère de l’environnement et à la Direction de la Santé (…) ».
Par courriers des 13, 15, 16, 18, 19 juillet 2016, Madame …, Monsieur et Madame …, Monsieur …, Monsieur et Madame …, Madame …, Monsieur …, Monsieur et Madame …, Monsieur et Madame …, Madame … et Madame … soumirent au collège des bourgmestre et échevins des objections à l’encontre de ces projets d’aménagement général et particuliers.
Lors de sa séance publique du 28 avril 2017, le conseil communal, d’une part, statua sur les objections dirigées à l’encontre du projet d’aménagement général et, d’autre part, adopta ledit projet, « (…) tel qu’il a été modifié suite aux réclamations et avis ministériels reçus (…) ».
Parallèlement et lors de la même séance publique, le conseil communal, d’une part, statua sur les objections dirigées à l’encontre des projets d’aménagement particulier « quartier existants » et, d’autre part, adopta les parties graphiques et la partie écrite de ces derniers, « (…) sous [leur] forme revue et complétée (…) ».
Par plusieurs courriers du 22 mai 2017, Monsieur et Madame …, Madame …, Monsieur et Madame …, Madame …, Madame …, Madame …, Monsieur et Madame …, Monsieur et Madame … et Monsieur … introduisirent auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », une réclamation à l’encontre de la susdite délibération du conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption des projets d’aménagement général et ayant statué sur les objections dirigées par les administrés à l’encontre de ce même projet.
Par décision du 5 octobre 2017, le ministre approuva la délibération, précitée, du conseil communal du 13 juin 2016, de même que celle du 28 avril 2017 portant adoption du projet d’aménagement général, tout en statuant sur les réclamations lui soumises, en déclarant fondées une partie de celles-ci et en apportant, en conséquence, certaines modifications aux parties graphique et écrite du plan d’aménagement général (« PAG »), les réclamations introduites par les parties précitées ayant, cependant, été déclarées partiellement fondées. Cette décision est libellée comme suit :
« (…) Par la présente, j’ai l’honneur de vous informer que j’approuve les délibérations du conseil communal des 13 juin 2016 et 28 avril 2017 portant adoption de la refonte du plan d’aménagement général (dénommé ci-après « PAG ») de la Ville de Luxembourg, présenté par les autorités communales.
4Conformément à l’article 18 de loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain (dénommée ci-après « Loi ») j’ai fait droit à certaines objections et observations formulées par les réclamants à l’encontre du projet d’aménagement général.
La procédure d’adoption du projet d’aménagement général s’est déroulée conformément aux exigences des articles 10 et suivants de la Loi.
Les modifications ainsi apportées à la partie graphique et à la partie écrite du PAG sont illustrées dans la présente décision et en font partie intégrante. Il est laissé le soin aux autorités communales d’adapter les délimitations des plans d’aménagement particulier « quartier existant » sur les plans de repérage et les parties graphiques afférents et ce conformément aux modifications résultant de la décision ministérielle. Les autorités communales sont ainsi tenues de me faire parvenir des versions coordonnées de la partie écrite et de la partie graphique du PAG ainsi que des plans d’aménagement particulier « quartier existant » adaptés en conséquence.
(…) Ad réclamations … (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …) Les réclamations contiennent diverses doléances en relation avec l'aménagement futur d'un ensemble de terrains sis à l'arrière-fond des propriétés des réclamants, longeant la rue ….
Premièrement, les réclamants invoquent que la « zone de servitude "urbanisation - coulée verte" CV » prévue à proximité de la rue …, ne soit pas indiquée conformément à la légende-type définie par le règlement grand-ducal concernant le plan d'aménagement général d'une commune.
Or, l'article 3 du même règlement dispose que de légères modifications par rapport à la légende-type sont tolérées. Les réclamations sont partant non fondées sur ce point.
Deuxièmement, les réclamants souhaitent également le reclassement en « zone de parc public [PARC] » des fonds couverts par la servitude précitée. Or, ces réclamations sont non fondées.
En effet, il y a lieu de relever que la « zone de servitude "urbanisation - coulée verte" CV» garanti un urbanisme de haute qualité en les lieux litigieux lors de l'élaboration d'un plan d'aménagement particulier « nouveau quartier ». Ainsi, il ne s'avère guère utile de prévoir une « zone de parc public [PARC] » en ces endroits. Qui plus est, en cas d'un tel classement, ces terrains ne sauraient être exécutés par un plan d'aménagement particulier conformément à l'article 26 et ne sauraient dès lors être cédés au domaine public communal moyennant l'article 34 de la Loi.
Ceci dit, le classement, tel que préconisé par les réclamants risque d'hypothéquer l'aménagement des fonds concernés en tant qu'espace vert public lors de la réalisation dudit plan d'aménagement particulier.
5 Qui plus est, il y a, dans ce contexte, lieu de préciser que l'envergure de la « coulée verte» litigieuse est largement suffisante, du fait que selon les conclusions dérivées de l'étude environnementale la flore et la faune existantes en ces lieux ont été prises en compte de façon adéquate.
Troisièmement, les réclamations sont non fondées en ce qui concerne les remarques ayant trait à une éventuelle interdépendance entre le degré d'utilisation du sol et la cession de terrains, qui aurait déjà due, selon les réclamants, été opérée avant la confection du présent PAG.
En effet, force est de constater qu'une cession antérieure de terrains sis en les endroits litigieux n'aurait eu aucun effet sur le degré d'utilisation du sol, et plus spécifiquement sur la densité de logement. Pour ce qui est de la densité de logement, le degré d'utilisation du sol est calculé sur base de la surface du terrain brut, sise à l'intérieur de la délimitation des plans d'aménagement particulier respectifs, et ceci indépendamment des diverses propriétés et de leur appartenance au domaine public ou privé.
Quatrièmement, en ce qui concerne la densité prévue sur le site litigieux, et nonobstant le fait de la proximité immédiate d'un boulevard à grande envergure, tel que le boulevard Kennedy, le coefficient de scellement du sol (CSS) devrait être revu à la baisse, sachant que le coefficient actuellement défini permet un scellement intégral des terrains à bâtir net, ce qui risque fortement d'être en contradiction avec les dispositions de la « zone de servitude "urbanisation coulée verte" CV ».
Partant, les réclamations sont partiellement fondées et il y a lieu de réduire le coefficient de scellement du sol pour la zone soumise à l'élaboration d'un plan d'aménagement particulier «nouveau quartier », intitulée [PAP NQ-SD: WH-08], à 0,9. (…) ».
Par décision du même jour, le ministre approuva encore la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption des projets d'aménagement particulier « quartier existant », cette décision étant libellée comme suit :
« (…) Par la présente, j 'ai l'honneur de vous informer que j'approuve la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption des projets d'aménagement particulier « quartier existant » de la Ville de Luxembourg.
Or, conformément à ma décision d'approbation du projet de la refonte du plan d'aménagement général de la Ville de Luxembourg de ce jour, modifiant les délimitations des plans d'aménagement particulier « quartier existant » sur les plans de repérage et les parties graphiques afférents, le vous prie de me faire parvenir des versions coordonnées de la partie écrite et de la partie graphique des plans d'aménagement particulier a quartier existant » adaptées en conséquence.
De manière générale, je tiens encore à soulever que toutes les réclamations introduites à l'encontre du vote des plans d'aménagement particulier « quartier existant » ne sont pas recevables. En effet, le Législateur n'a pas prévu la possibilité d'introduire une réclamation auprès 6du ministre de l'Intérieur contre le plan d'aménagement particulier « quartier existant » alors qu'il a uniquement prévu dans l'article 16 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l'aménagement communal et le développement urbain que les réclamants puissent exclusivement porter leurs objections contre le projet d'aménagement général devant le ministre de l'Intérieur.
(…) ».
Par décision du 6 octobre 2018, le ministre de l’Environnement arrêta que « Les modifications de la délimitation de la zone verte telles qu’elles découlent du projet d’aménagement général adopté par le conseil communal de la Ville de Luxembourg dans sa séance publique du 28 avril 2017 ainsi que de la décision du 5 octobre 2017 du Ministre de l’Intérieur ayant fait droit aux réclamations listées au liminaires sont approuvées », que « Tout fond classé à l’intérieur d’une zone destinée à rester libre conformément au règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune reste soumis aux dispositions de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles » et que « les dispositions énoncées aux articles 12 et 17-33 de la prédite loi du 19 janvier 2004 restent applicables indépendamment du statut de classement par rapport au plan d’aménagement général des fonds auxquels elles pourraient se rapporter. Les effets du présent arrêté ne préjugent pas de la décision à rendre par le Ministre de l’Environnement en vertu des articles précités ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 5 janvier 2018, Madame …, Madame …, Madame …, Madame …, Madame …, Madame …, Monsieur et Madame …, Monsieur et Madame …, Monsieur … et Monsieur … ont fait introduire un recours tendant à l’annulation de (i) « La décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 13 juin 2016 adoptée en application de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, portant « mise sur orbite » du projet de refonte globale du Plan d’Aménagement Général de la Ville de Luxembourg », (ii) de « La décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017 portant adoption du projet de refonte globale du Plan d’Aménagement Général de la Ville de Luxembourg », de (iii) « La décision du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 approuvant les décisions précitées de la Ville de Luxembourg » et (iv) de « La décision de la ministre de l’Environnement du 6 octobre 2017 approuvant les décisions précitées de la Ville de Luxembourg ».
A titre liminaire et avant de procéder à l’analyse du recours sous examen, il échet de préciser qu’à l’audience publique des plaidoiries, sur question afférente du tribunal, les litismandataires des différentes parties en cause n’ont soulevé aucune contestation relative à la notification entre eux de l’ensemble des mémoires respectifs, par actes d’avocat à avocat, au cours de la procédure contentieuse.
I) Quant à la compétence Il y a lieu de retenir que les décisions sur les projets d’aménagement, lesquelles ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’elles concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. Les décisions 7d’approbation du ministre participent au caractère réglementaire des actes approuvés1, étant précisé que le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision litigieuse du 5 octobre 2017 ayant statué sur la réclamation introduite par les demandeurs, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.
Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire.
Il convient de prime abord de déterminer la nature du recours susceptible d’être introduit à l’encontre de la décision du ministre de l’Environnement, dans la mesure où la loi du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ci-après désignée par « la loi du 19 janvier 2004 », sur base de laquelle la décision litigieuse a été prise et qui était en vigueur au moment du dépôt du recours sous analyse, a été abrogée par la loi du 18 juillet 2018, publiée au Mémorial A le 5 septembre 2018 et entrée en vigueur le quatrième jour après sa publication à défaut de disposition spéciale de mise en vigueur contraire. En effet, la loi du 19 janvier 2004 prévoyait un recours au fond contre les décisions prises en vertu de cette loi, alors que la loi du 18 juillet 2018 prévoit en son article 68 un recours en annulation contre les décisions prises en vertu de cette loi.
Le tribunal constate encore que par l’article 83 de la loi du 18 juillet 2018, le législateur s’est limité à abroger purement et simplement la loi du 19 janvier 2004 dans son intégralité, sans prévoir de mesures transitoires autres que celles visant les roulottes et les mesures compensatoires, non pertinentes en l’espèce.
En ce qui concerne les voies de recours à exercer contre une décision prise sur le fondement de la loi du 19 janvier 2004, seule la loi en vigueur au jour où la décision a été prise est applicable pour apprécier la recevabilité d’un recours contentieux dirigé contre elle, étant donné que l’existence d’une voie de recours est une règle du fond du droit judiciaire, de sorte que les conditions dans lesquelles un recours contentieux peut être introduit devant une juridiction doivent être réglées suivant la loi sous l’empire de laquelle a été rendue la décision attaquée, en l’absence, comme en l’espèce, de mesures transitoires2. Il s’ensuit que la recevabilité d’un recours contre une décision prise sur le fondement de la loi du 19 janvier 2004 devra être analysée conformément aux dispositions de cette même loi, qui en son article 58 disposait que « Contre les décisions prises en vertu de la présente loi un recours est ouvert devant le tribunal administratif qui statuera comme juge du fond ».
Les décisions d’approbation ou de non-approbation des ministres de l’Intérieur et de l’Environnement rendues en matière d’établissement ou de modification de plans d’aménagement généraux ou particuliers constituent des actes de tutelle administrative réputés rétroagir au jour de la décision communale concernée. Ces décisions participent au caractère réglementaire de la 1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Actes réglementaires, n° 49 et les autres références y citées.
2 Trib. adm., 5 mai 2010, n° 25919 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Procédure contentieuse, n° 315 et les autres références y citées ; Cour adm., 13 décembre 2018, n° 41218C du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu.
8procédure de modification de ces plans et sont comme tels susceptibles de recours sur base de l’article 7 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 19963.
Cependant, la démarche du législateur devant être présupposée comme visant un résultat cohérent, les dispositions de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996 et celles de l’article 58 de la loi du 19 janvier 2004 sont à lire de façon complémentaire, en sorte que l’article 58, en désignant les décisions prises par le ministre de l’Environnement en application de la loi du 19 janvier 2004, concerne, suivant les termes mêmes employés, les seules décisions administratives individuelles à l’exception des actes administratifs à caractère réglementaire. Il s’ensuit qu’en application de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996, seul un recours en annulation peut être introduit à l’encontre d’un arrêté du ministre de l’Environnement par lequel il approuve ou refuse d’approuver une délibération d’un conseil communal modifiant la délimitation de la zone verte4.
Ainsi, la décision du 6 octobre 2017 par laquelle le ministre de l’Environnement a approuvé le PAG de la Ville de Luxembourg tel qu’adopté par le conseil communal le 28 avril 2017 est susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux en application de l’article 7 de la loi précitée du 7 novembre 19965, de sorte que les parties ayant introduit le recours ont valablement pu introduire un recours en annulation contre ladite décision.
Il s’ensuit que le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation introduit en l’espèce.
II) Quant à la loi applicable Quant au volet du recours en ce qu’il est dirigé contre la décision du ministre de l’Environnement, le tribunal vient de retenir qu’il est compétent pour connaître du recours en annulation introduit contre ladite décision. Dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à apprécier la légalité de la décision déférée en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elle a été prise6, de sorte que la loi précitée du 18 juillet 2018, entrée en vigueur postérieurement à la prise de l’acte litigieux, n’est pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement précisé à cet égard que les actes de tutelle administrative, tels que la décision ministérielle litigieuse, rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.
Quant au volet du recours concernant les décisions prises par le conseil communal et le ministre dans le cadre du PAG, le tribunal précise que la procédure d’adoption d’un PAG est prévue par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au 3 Cour adm., 24 janvier 2006, n° 20233C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Actes réglementaires, n° 52 et l’autre référence y citée.
4 Trib.adm. 17 janvier 2008, n° 22263 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Actes réglementaires, n° 53 et les autres références y citées.
5 Ibidem.
6 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Recours en annulation, n° 20 et les autres références y citées.
9Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire et (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain.
Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des actes déférés et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à apprécier la légalité de la décision déférée en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elle a été prise7, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par les lois, précitées, des 17 avril et 18 juillet 2018, adoptées et entrées en vigueur postérieurement à la prise des actes déférés, ne sont pas à prendre en considération en l’espèce.
Selon les dispositions transitoires figurant à l’article 108ter (1) de la loi du 19 juillet 2004, tel que modifié en dernier lieu par la loi précitée du 1er août 2011, « La procédure d’adoption des projets d’aménagement général, dont la refonte complète a été entamée par la saisine de la commission d’aménagement avant le 1er août 2011, peut être continuée et achevée conformément aux dispositions du Titre 3 de la présente loi qui était en vigueur avant le 1er août 2011.
La procédure d’adoption des projets d’aménagement particulier, qui a été entamée avant le 1er août 2011, peut être continuée et achevée conformément aux dispositions du Titre 4 de la présente loi qui étaient en vigueur avant le 1er août 2011. ».
Le tribunal relève que le conseil communal a émis son vote positif, au sens de l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004, en date du 13 juin 2016, de sorte que la saisine de la commission d’aménagement en application de l’article 11 de la même loi s’est a fortiori opérée après la date butoir du 1er août 2011, fixée par l’article 108ter (1), alinéa 1er de la loi du 19 juillet 2004.
Il suit de ces constats que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est – sous réserve des précisions faites ci-après – celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015 et 3 mars 2017.
S’agissant plus particulièrement de l’applicabilité de cette dernière loi, le tribunal relève que dans un arrêt du 24 septembre 2015, portant le numéro 36179C du rôle8, la Cour administrative a retenu ce qui suit : « (…) Si le droit administratif est notamment régi par le principe de l’effet immédiat de la loi nouvelle, celui-ci ne s’applique néanmoins en principe qu’aux situations juridiques nées postérieurement à la date normale de son entrée en vigueur après sa publication, ainsi qu’aux situations encore dépourvues de caractère définitif lors de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle. En outre, les dispositions modifiant une procédure administrative et désignant les autorités compétentes sont applicables aux procédures pendantes, sans que les administrés puissent prétendre à un droit acquis à voir leur cas traité par l’autorité désignée comme 7 Ibidem.
8 Cité sous : Pas. adm. 2018, V° Lois et règlements, n° 81.
10compétente par les dispositions antérieures (…). En revanche, le principe de non-rétroactivité des lois commande que ne soient pas remis en cause les actes déjà valablement accomplis (…) ».
Dès lors, si la procédure d’adoption du PAG litigieux a certes débuté avant l’entrée en vigueur de la loi du 3 mars 2017, laquelle a eu lieu le 1er avril 2017, en application de l’article 76 de ladite loi, tel que relevé ci-avant, il n’en reste pas moins qu’à cette dernière date, la procédure en question était toujours en cours, de sorte à devoir être qualifiée de procédure pendante, respectivement de situation juridique dépourvue de caractère définitif lors de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle. Il s’ensuit que conformément aux principes dégagés par la Cour administrative dans l’arrêt, précité, du 24 septembre 2015, cette dernière loi doit s’appliquer à la procédure en question dès son entrée en vigueur en date du 1er avril 2017. Ainsi, le tribunal doit en tenir compte, dans le cadre de l’examen de la légalité des décisions déférées des 28 avril 2017 et 5 et 6 octobre 2017, toutes adoptées postérieurement au 1er avril 2017. En revanche, en vertu du principe de non-
rétroactivité des lois, l’acte déféré du conseil communal du 13 juin 2016 ne saurait être remis en cause par ladite loi du 3 mars 2017, s’agissant d’un acte valablement accompli avant l’entrée en vigueur de la loi en question.
III) Quant à la recevabilité a) Quant au moyen ayant trait à une irrecevabilité omisso medio du recours dans le chef de Monsieur … L’administration communale et la partie étatique, en se basant sur les articles 13 et 16 de la loi du 19 juillet 2004, font valoir que dans la mesure où Monsieur … n’aurait pas formulé de réclamation auprès du ministre, le recours introduit dans son chef serait à déclarer irrecevable omisso medio.
Les parties demanderesses font valoir que l’irrecevabilité omisso medio ne saurait être retenue dans le chef de Monsieur …, alors qu’il serait de jurisprudence que le terme « forclusion » viserait uniquement la réclamation introduite auprès du collège échevinal ou du ministre et non l’éventuel recours subséquent. Une solution contraire « pose[rait] également question eu égard au droit à un recours effectif, prévu aux articles 6 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des Libertés fondamentales », ci-après désignée par « la CEDH ».
Il échet de rappeler que la loi du 19 juillet 2004 prévoit en son « Chapitre 3 - Procédure d’adoption du plan d’aménagement général » les règles applicables à la procédure d’adoption d’un PAG. Quant à la question plus précise des réclamations à faire valoir lors de l’élaboration d’un PAG, celles-ci sont visées aux articles 13 et 16 de la loi du 19 juillet 2004, tels qu’en vigueur au moment de la prise des décisions litigieuses, lesquels disposent comme suit :
« Art. 13. Réclamations « Dans le délai de trente jours de la publication du dépôt du projet dans les quatre quotidiens imprimés et publiés au Grand-Duché de Luxembourg, les observations et objections contre le projet doivent être présentées par écrit au collège des bourgmestre et échevins sous peine de forclusion.
11Au cas où une ou plusieurs observations écrites ont été présentées dans le délai, le collège des bourgmestre et échevins convoque les réclamants qui peuvent, en vue de l’aplanissement des différends, présenter leurs observations. » « Art. 16. Réclamations contre le vote du conseil communal Les réclamations contre le vote du conseil communal introduites par les personnes ayant réclamé contre le projet d’aménagement général conformément à l’article 13 doivent être adressées au ministre dans les quinze jours suivant la notification prévue à l’article qui précède, sous peine de forclusion.
Les réclamations dirigées contre les modifications apportées au projet par le conseil communal doivent être adressées au ministre dans les quinze jours de l’affichage prévu à l’article qui précède, sous peine de forclusion.
Sont recevables les réclamations des personnes ayant introduit leurs observations et objections conformément à l’article 13 et les réclamations dirigées contre les modifications apportées au projet par le conseil communal lors du vote. ».
Ainsi, les articles 13 et 16 précités prévoient à deux stades différents de l’élaboration d’un plan d’aménagement la possibilité d’introduire une réclamation, à savoir dans les trente jours qui suivent la mise en procédure par le conseil communal où les observations et objections contre le projet doivent être présentées par écrit au collège des bourgmestre et échevins sous peine de forclusion, et, dans les quinze jours suivant la notification de la décision définitive aux intéressés par lettre recommandée avec avis de réception, où les réclamations contre le vote définitif du conseil communal doivent être adressées au ministre sous peine de forclusion.
En d’autres termes, la procédure d’adoption d’un PAG a été mise en place en vue d'aplanir les différends dans une phase non contentieuse, cette procédure permettant, en effet, aux personnes intéressées de faire valoir leurs points de vue, leurs argumentaires et ce, en dehors de tout procès.
S’agissant d’une phase précontentieuse, les différents acteurs s'efforcent de trouver une solution aux réclamations introduites en ayant pour objectif d'éviter un allongement des procédures, allongement qui serait inévitable si chaque réclamation devait faire l'objet d'une procédure contentieuse.
En l’espèce, il échet de constater que Monsieur … a certes adressé des objections au collège des bourgmestre et échevins dans le délai imparti, mais n’a pas introduit de réclamation auprès du ministre.
L’objectif des différentes étapes de la procédure d’adoption d’un PAG est d’éviter que des objections qui auraient pu être soulevées et résolues au cours de la phase précontentieuse ne soient soulevées pour la première fois dans le cadre d’un recours contentieux et risquent ainsi de prolonger inutilement l’élaboration du PAG. Il s’ensuit que le recours introduit devant le juge administratif contre un PAG n’est recevable qu’à condition de l’épuisement de la procédure non contentieuse de réclamation prévue par l’article 16 de la loi du 19 juillet 2004 impliquant en particulier que l’omission d’emprunter la voie de la réclamation à adresser au ministre à l’encontre du vote du conseil communal portant adoption du projet d’aménagement général entraîne 12l’irrecevabilité omisso medio du recours devant le juge administratif, de sorte que le recours introduit au nom de Monsieur … est irrecevable, en ce qu’il est dirigé à l’encontre des décisions communale et ministérielle des 28 avril et 5 octobre 2017 portant adoption, respectivement approbation du PAG, sans que le tribunal ne puisse déceler, à défaut de précisions par les parties demanderesses à cet égard, une violation du droit à un recours effectif, étant rappelé qu’il n’appartient pas au tribunal de suppléer la carence des parties demanderesses dans le cadre de la formulation des moyens en droit.
b) Quant à la question du caractère décisionnel de la délibération du conseil communal du 13 juin 2016 L’Etat et l’administration communale de la Ville de Luxembourg soulèvent l’irrecevabilité du recours en ce qu’il est dirigé contre la délibération du conseil communal du 13 juin 2016 tout en précisant que depuis la modification de la loi du 19 juillet 2004 par la loi du 28 juillet 2011, le système de l’adoption provisoire, suivie d’une adoption définitive, aurait été remplacé par une approbation unique intervenant au terme de la période d’enquête publique et de consultation des autorités étatiques.
Les parties demanderesses répliquent que le conseil communal disposerait bien d’un pouvoir décisionnel au moment de la mise en procédure du PAG, mais l’étendu de ce pouvoir serait réduite à la question de savoir si le dossier est suffisamment élaboré ou non. Ladite décision serait bien une décision administrative à caractère réglementaire de nature à impacter les droits des administrés.
L’acte administratif susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux doit constituer une véritable décision de nature à faire grief, c’est-à-dire un acte susceptible de produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle et patrimoniale de celui qui réclame. N’ont pas cette qualité de décision faisant grief, comme n’étant pas destinées à produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, les informations données par l’administration, tout comme les déclarations d’intention ou les actes préparatoires d’une décision.9 Dans un arrêt du 15 décembre 2016, portant le numéro 38139C du rôle, la Cour administrative a précisé la nature juridique du vote du conseil communal prévu par l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004. Dans l’arrêt en question, la Cour administrative, après avoir relevé qu’avant la prise d’effet des modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par celle du 28 juillet 2011, les PAG étaient soumis à la « (…) procédure classique d’adoption et d’approbation (…) en deux temps (…)[, qui] comprenait d’abord un vote provisoire par le conseil communal contre lequel des objections étaient ouvertes, elles-mêmes vidées par le même conseil communal à travers le vote définitif, contre lequel des réclamations pouvaient être introduites devant le ministre de l’Intérieur qui, dans le cadre de ses attributions de tutelle d’approbation, était amené à vider les réclamations ainsi portées devant lui, et à approuver ou non le PAG, de sorte à revêtir une double casquette à ce sujet. (…) », et après avoir précisé que dans le cadre de cette procédure classique « (…) le conseil communal, en adoptant provisoirement un projet de PAG, avait en quelque sorte fait sien le projet d’une manière effective en l’adoptant à un premier stade, quitte à 9 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, confirmé sur ce point par Cour adm. 19 février 1998, n° 10263C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Actes administratifs, n° 61 et les autres références y citées.
13ce que des objections puissent être formulées relativement à cette première adoption communale (…) », a constaté que cette procédure avait été modifiée par ladite loi du 28 juillet 2011. Ainsi, l’article 10 prévoit, dans sa version modifiée, que le conseil communal délibère sur le projet d’aménagement général, tel qu’il lui est présenté par le collège des bourgmestre et échevins, ensemble avec l’étude préparatoire, le rapport de présentation ainsi que, le cas échéant, le rapport sur les incidences environnementales, et qu’en cas de vote positif, le collège des bourgmestre et échevins peut lancer les différentes procédures de consultation. L’article 14, quant à lui, prévoit, dans sa version modifiée, que le projet d’aménagement général ensemble avec toutes les pièces mentionnées à l’article 10 est soumis au conseil communal avec l’avis de la commission d’aménagement et, le cas échéant, avec l’avis du ministre ayant dans ses attributions l’environnement, le rapport sur les incidences environnementales, les réclamations et les propositions de modifications du collège des bourgmestre et échevins. Le conseil communal peut ensuite approuver le projet tel que présenté ou y apporter des modifications issues des propositions de la commission d’aménagement, de l’avis émis par le ministre de l’Environnement ou encore des observations et objections présentées. Enfin, le conseil communal peut renvoyer le dossier devant le collège des bourgmestre et échevins – qui est tenu de recommencer la procédure prévue aux articles 10 et suivants – lorsqu’il entend apporter d’autres modifications au projet d’aménagement général.
A partir d’une lecture combinée des articles 10 à 14 de la loi du 19 juillet 2004, tels que résultant de la modification du 28 juillet 2011, la Cour administrative est arrivée à la conclusion que le vote du conseil communal prévu à l’article 10, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, dans sa version applicable depuis la modification par la loi du 28 juillet 2011, n’est plus comparable à l’adoption provisoire du PAG – prévue par l’ancienne version dudit article – et ne peut dès lors plus être analysé en adoption du projet de plan, mais en une sorte de « mise sur orbite » dudit projet, respectivement en un feu vert donné au collège échevinal pour procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la même loi. La Cour a encore retenu que l’opération visée à l’article 14 consiste en règle générale dans l’adoption unique et définitive par le conseil communal du projet de PAG qui devient le PAG adopté par l’organe compétent de la commune. Cette adoption peut se faire soit sous la forme originale, soit, dans la majorité des cas, en tenant compte des modifications opérées par le conseil communal compte tenu des consultations menées.
Ainsi, le vote positif émis par le conseil communal, en application de l’article 10, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, ne constitue qu’une « (…) mise sur orbite [du] projet (…) », respectivement un « feu vert » que le conseil communal donne au collège échevinal pour continuer la procédure et pour procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004, après avoir constaté que le projet est suffisamment élaboré à cette fin.
Or, une telle « mise sur orbite », respectivement un tel « feu vert », qui n’emporte aucune adoption ou approbation du projet d’aménagement général, mais qui traduit le seul constat du conseil communal que le projet est suffisamment élaboré pour que le collège échevinal puisse continuer la procédure, ne fait que préparer l’adoption ultérieure de ce projet, sans être susceptible de produire par elle-même, respectivement par lui-même des effets juridiques sur la situation personnelle ou patrimoniale des administrés, de sorte à constituer, non pas un acte administratif de nature à faire grief, mais un simple acte préparatoire ne pouvant, en tant que tel, faire l’objet d’un 14recours contentieux.10 Il s’ensuit que le recours en annulation est à déclarer irrecevable pour autant qu’il vise la délibération du conseil communal du 13 juin 2016.
c) Quant au moyen d’irrecevabilité omisso medio du recous sous le rapport de plusieurs moyens d’annulation invoqués L’administration communale et la partie étatique concluent à l’irrecevabilité omisso medio du recours, en soutenant que certains moyens, soulevés dans la requête introductive d’instance, n’auraient pas été invoqués par les parties demanderesses dans le cadre de la procédure précontentieuse. Sont ainsi visés les moyens suivants :
- le moyen tiré d’une violation de l’article 16 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le contenu de l’étude préparatoire d’un plan d’aménagement général d’une commune ;
- les moyens tirés d’une violation de la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, ci-
après désignée par « la loi du 22 mai 2008 » ;
- les moyens ayant trait à une violation de la Convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, signée le 25 juin 1998, ci-après désignée par « la Convention d’Aarhus ».
A l’appui de ce moyen d’irrecevabilité, l’administration communale soutient que le tribunal administratif, dans un jugement du 10 juillet 2014, portant le numéro 32627 du rôle, ainsi que la Cour administrative, dans l’arrêt confirmatif afférent du 4 juin 2015, portant le numéro 35035C du rôle, auraient précisé que la loi du 19 juillet 2004 prévoirait dans son article 30 une procédure non contentieuse d’adoption et d’approbation des PAP, dont le but serait précisément de voir disparaître, au fur et à mesure des aplanissements des difficultés, les objections et réclamations solutionnées, tout en ne laissant subsister que celles maintenues et réitérées, lesquelles seraient seules susceptibles d’être portées devant les juridictions administratives, de sorte qu’en cas de défaut d’épuisement de la procédure précontentieuse de réclamation ainsi mise en place par le législateur, le recours contentieux introduit à l’encontre d’un PAP serait irrecevable omisso medio.
Ces principes devraient également s’appliquer en matière de PAG, au regard des dispositions des articles 13 et suivants de la loi du 19 juillet 2004. Par ailleurs, ces mêmes principes devraient s’appliquer non seulement en l’absence de toute réclamation au cours de la procédure précontentieuse d’adoption des PAP et PAG, mais également et a fortiori en présence de moyens d’annulation invoqués pour la première fois au cours de la procédure contentieuse, sous peine de priver d’effet ladite procédure précontentieuse, destinée à résoudre les réclamations à un stade non-contentieux. Ainsi, seuls les arguments effectivement soulevés à un stade précontentieux pourraient être invoqués devant les juridictions administratives. Admettre le contraire aurait pour conséquence de légitimer des objections et réclamations stéréotypés, consistant, le cas échéant, en une seule « (…) ligne de principe (…) », ce qui serait contraire aux objectifs de la loi du 19 juillet 10 Trib. adm., 25 septembre 2017, n° 37637 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Actes règlementaires, n° 56 et les autres références y citées.
152004 et aurait pour effet de vider de leur substance les dispositions des articles 13, 16 et 30 de ladite loi. L’administration communale en conclut que le recours devrait être déclaré irrecevable sous l’angle des moyens d’annulation invoqués dans la requête introductive d’instance, mais non formulés par les parties demanderesses à titre d’objection, respectivement de réclamation.
Les parties demanderesses concluent au rejet de ce moyen d’irrecevabilité.
Le tribunal rappelle qu’à travers les articles 10 et suivants de la loi du 19 juillet 2004, le législateur a mis en place une procédure d’adoption des PAG qui se déroule en plusieurs étapes, comprenant une enquête publique. Ainsi, l’article 12 de ladite loi dispose qu’après le vote du conseil communal prévu par l’article 10, le projet d’aménagement général fait l’objet d’une publication, comprenant, notamment, le dépôt du projet pendant trente jours à la maison communale où le public peut en prendre connaissance, ainsi que des mesures de publicité de ce dépôt. L’article 13 de la même loi prévoit que dans le délai de trente jours de la publication du dépôt du projet dans les quatre quotidiens imprimés et publiés au Grand-Duché de Luxembourg, les observations et objections contre le projet doivent être présentées par écrit au collège des bourgmestre et échevins, sous peine de forclusion. Cette disposition légale dispose encore qu’au cas où une ou plusieurs réclamations écrites ont été présentées dans le délai, le collège des bourgmestre et échevins convoque les réclamants qui peuvent, en vue de l’aplanissement des différends, présenter leurs observations. Aux termes de l’article 14, alinéa 1er de la loi du 19 juillet 2004, le projet d’aménagement général est ensuite soumis au conseil communal qui peut approuver le projet dans sa forme originale ou y apporter des modifications qui soit sont proposées par la commission d’aménagement, soit répondent en tout ou en partie à l’avis émis par le ministre ayant l’Environnement dans ses attributions, soit prennent en compte en tout ou en partie des observations et objections présentées. En vertu du 3e alinéa du même article, le conseil communal est tenu de renvoyer le dossier au collège des bourgmestre et échevins lorsqu’il entend apporter des modifications autres que celles visées à l’alinéa 1er. Enfin, il peut rejeter le projet d’aménagement général présenté et dans cette hypothèse, le dossier est clôturé. Aux termes de l’article 15 de la loi du 19 juillet 2004, la décision du conseil communal fait l’objet d’une publication, par voie d’affichage et par notification aux personnes ayant introduit une réclamation écrite. Cette publication est suivie d’une procédure de réclamation devant le ministre, organisée par l’article 16 de la même loi, libellé comme suit : « Les réclamations contre le vote du conseil communal introduites par les personnes ayant réclamé contre le projet d’aménagement général conformément à l’article 13 doivent être adressées au ministre dans les quinze jours suivant la notification prévue à l’article qui précède, sous peine de forclusion.
Les réclamations dirigées contre les modifications apportées au projet par le conseil communal doivent être adressées au ministre dans les quinze jours de l’affichage prévu à l’article qui précède, sous peine de forclusion.
Sont recevables les réclamations des personnes ayant introduit leurs observations et objections conformément à l’article 13 et les réclamations dirigées contre les modifications apportées au projet par le conseil communal lors du vote. ». Aux termes de l’article 18 de ladite loi du 19 juillet 2004, le ministre est, par la suite, amené à statuer sur les réclamations lui soumises, en même temps qu’il décide de l’approbation définitive du projet d’aménagement général, dénommé PAG dès cette approbation.
16 Aux termes d’une jurisprudence des juridictions administratives devenue constante, le recours introduit devant le juge administratif contre un PAG n’est recevable qu’à condition de l’épuisement de la procédure non contentieuse de réclamation ainsi mise en place par les articles 13 et suivant de la loi du 19 juillet 2004 impliquant en particulier que l’omission d’emprunter la voie de la réclamation à adresser au ministre à l’encontre du vote du conseil communal portant adoption du projet d’aménagement général11 entraîne l’irrecevabilité omisso medio du recours devant le juge administratif.
En ce qui concerne le contenu de la réclamation à adresser au ministre, il convient d’abord de constater que la loi du 19 juillet 2004 a prévu à travers ses articles 13 et suivants une procédure non contentieuse d’adoption et d’approbation des PAG tendant à voir disparaître, au cours de l’élaboration du PAG les objections et réclamations solutionnées, tout en ne laissant subsister que celles maintenues et réitérées, lesquelles seraient partant seules susceptibles d’être portées devant les juridictions de l’ordre administratif. Le fait que l’intention du législateur est de faire disparaître au fur et à mesure des procédures d’aplanissement des difficultés les différentes demandes et réclamations des administrés implique que seules les réclamations d’ores et déjà formulées au cours de la procédure précontentieuse sont susceptibles d’être portées devant le juge administratif, étant précisé à cet égard que la motivation à l’appui de ces réclamations peut être complétée et développée durant la phase contentieuse pour autant que la réclamation en elle-même ait d’ores et déjà été présentée en phase précontentieuse. Il y a partant lieu de distinguer entre le moyen nouveau avancé à l’appui d’une réclamation et la demande nouvelle invoquée une toute première fois devant les juridictions administratives. Ainsi, le moyen nouveau qui se définit comme la raison de droit ou de fait invoquée à l’appui de la réclamation est susceptible d’être invoqué devant le tribunal administratif même s’il y est invoqué pour la première fois, pour autant que la réclamation ait d’ores et déjà traversé la procédure précontentieuse sans aboutir. En revanche, les demandes nouvelles, se définissant comme demandes qui diffèrent de la demande initiale contenue dans l’observation ou la réclamation par son objet, par sa cause ou par les personnes entre qui elle est engagée n’ayant pas été présentées au cours de la procédure d’élaboration du PAG mais qui sont invoquées pour la première fois devant les juges administratifs sont irrecevables.12 En l’espèce, dans le cadre de la procédure d’élaboration du PAG litigieux, les demandeurs avaient présenté des objections et observations auprès du collège des bourgmestre et échevins, respectivement des réclamations auprès du ministre, visant à convaincre le conseil communal et l’autorité ministérielle à ne pas adopter, respectivement approuver, sous la forme soumise à l’enquête publique, le projet afférent en raison de certaines irrégularités et illégalités. Le recours contentieux sous examen vise à son tour l’annulation de la décision du conseil communal portant adoption du projet d’aménagement général, ainsi que de la décision ministérielle portant approbation de ladite décision du conseil communal. Indépendamment de l’argumentation juridique soulevée, d’une part, au cours de la procédure précontentieuse et, d’autre part, dans le cadre du présent litige, force est au tribunal de constater que les demandes présentées dans le 11 P. ex. : Cour adm., 17 avril 2008, n° 23846C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Urbanisme, n° 258 et les autres références y citées.
12 Trib. adm., 28 juin 2018, n° 39248 du rôle, non réformé sur ce point par Cour adm., 7 février 2019, n° 41544C du rôle ; voir également : trib. adm., 4 octobre 2018, n° 39421 du rôle, non réformé sur ce point par Cour adm., 21 mars 2019, n° 41948C et 41949C du rôle, disponibles sur www.jurad.etat.lu.
17cadre de ces deux procédures sont identiques, en ce qu’elles tendent, en substance, à la disparition de l’ordonnancement juridique du PAG sous examen. En effet, aucune demande nouvelle ne peut être décelée dans le recours sous examen par rapport aux observations et objections introduites devant le collège des bourgmestre et échevins, respectivement à la réclamation soumise au ministre. Le moyen d’irrecevabilité afférent est partant à rejeter pour ne pas être fondé.
d) Quant au moyen ayant trait à l’irrecevabilité du recours tel que dirigé contre la décision du ministre de l’Environnement Tant la partie étatique que la partie communale soulèvent l’irrecevabilité du recours en ce qu’il est dirigé contre la décision du ministre de l’Environnement. La partie étatique soutient que les parties demanderesses ne développeraient aucun moyen d’annulation à l’encontre de cette décision. L’administration communale fait valoir qu’en application de l’article 5 de la loi du 19 janvier 2004, la décision du ministre de l’Environnement du 6 octobre 2017 ne porterait que sur des modifications de la délimitation de la zone verte et que les parcelles appartenant aux parties demanderesses n’auraient pas été classées en zone verte.
Les parties demanderesses concluent que sous l’ancien PAG Joly, le site litigieux aurait été classé comme « ensembles à restructurer ». En procédant au reclassement de la zone « ensembles à restructurer » en zone d’habitation 2 soumise à plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », ci-après désigné par « PAP NQ », la Ville de Luxembourg aurait procédé à une modification des délimitations de la zone verte.
Dans son mémoire en duplique, l’administration communale soutient que les « terrains à étude – ensembles à restructurer » se situeraient à l’intérieur du périmètre d’agglomération et ne feraient dès lors pas partie de la zone verte. La zone en question aurait été dès lors seulement temporairement interdite à toute construction nouvelle en attendant que des études puissent définir les affectations et constructions admises. Elle fait valoir que de tels terrains ne correspondraient nullement à la définition de la zone verte, ni aux objectifs de sauvegarde poursuivis par la loi du 19 janvier 2004.
Force est au tribunal de retenir que le moyen d’irrecevabilité relatif à une absence de moyens invoqués par les parties demanderesses à l’encontre de la légalité de la décision du ministre de l’Environnement relève du fond de l’affaire et qu’il n’est dès lors pas susceptible d’affecter la recevabilité de la requête introductive d’instance, étant rappelé que l’intérêt à agir n’est pas à confondre avec le fond du droit en ce qu’il se mesure non au bien-fondé des moyens invoqués à l’appui d’une prétention, mais à la satisfaction que la prétention est censée procurer à une partie13.
Le moyen d’irrecevabilité afférent encourt, dès lors, à son tour, le rejet.
En l’absence d’autres moyens d’irrecevabilité, le tribunal est amené à conclure que le recours en annulation introduit à l’encontre des décisions du conseil communal, du ministre et du ministre de l’Environnement du 28 avril, ainsi que des 5 et 6 octobre 2017 est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi, dans le chef des parties demanderesses à l’exception 13 Trib. Adm. 30 juin 2010, n° 26267 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Procédure contentieuse, n° 4 et les autres références y citées.
18de Monsieur ….
IV) Quant au fond - Quant au moyen ayant trait à une violation de la loi communale En se basant sur l'article 13 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, ci-après désignée par « la loi du 13 décembre 1988 », les demandeurs soutiennent que le projet d'aménagement général de la Ville de Luxembourg aurait été voté en séance du conseil communal du 13 juin 2016, alors que tous les documents élaborés par le bureau …, dont notamment l'étude préparatoire du PAG, le rapport de justification, la partie écrite du PAG et la partie écrite des plans d’aménagement particulier « quartier existant », ci-après désigné par « PAP QE », seraient datés également au 13 juin 2016, de sorte que les documents précités n’auraient pas été consultables au moins 5 jours avant la délibération du conseil communal.
Il en résulterait que le vote du conseil communal du 13 juin 2016 serait irrégulier, de sorte que la procédure de refonte du PAG serait viciée sur un point fondamental qui impacterait la légalité de toutes les décisions ultérieures.
La partie étatique donne à considérer que la convocation du conseil communal aurait été effectuée dans les délais légaux et que les documents auraient, après avoir été discutés préalablement, été mis à disposition via une plateforme Internet. La date du 13 juin 2016 sur les documents ne ferait rien d'autre qu'indiquer que ces documents seraient à jour à la date prévue pour la délibération.
L’administration communale fait valoir que dans la mesure où les documents en question auraient été destinés à être soumis au vote des conseillers communaux, ils auraient été datés non pas à la date de leur établissement, ni de leur soumission aux conseillers, mais ils porteraient la date de la séance du conseil communal à l'ordre du jour de laquelle ils auraient figuré, de sorte qu’il ne saurait en être déduit une quelconque violation de l'article 13 de la loi communale, d’autant plus que les demandeurs ne mettraient en avant aucun moyen sérieux permettant de douter que tous les actes auraient été consultables par les conseillers communaux au moins cinq jours avant la réunion du 13 juin 2016. D'ailleurs, aucun conseiller communal ne s'en serait plaint et le projet d'aménagement général de la Ville de Luxembourg aurait été approuvé par le ministre.
A titre de réplique, les demandeurs soulignent que ni la partie étatique ni l’administration communale ne rapporteraient la preuve que les documents litigieux auraient effectivement été à disposition des conseillers communaux dans le délai légal. Ceci serait de nature à leur porter grief, dans la mesure où un manque d’information de la part des membres du conseil communal, qui prendront une décision ayant un impact sur les demandeurs, risquerait de leur causer préjudice.
Dans son mémoire en duplique, l’administration communale insiste sur le fait qu’aucun conseiller communal, même ceux appartenant à l’opposition, ne se serait plaint de ne pas avoir pu consulter lesdits documents au moins 5 jours avant la réunion du conseil communal, ce qui confirmerait l’absence de violation du délai légal.
19En vertu de l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004 « Le projet d’aménagement général ensemble avec l’étude préparatoire, le rapport de présentation ainsi que, le cas échéant, le rapport sur les incidences environnementales élaboré conformément à la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement est soumis au conseil communal.
Le conseil communal délibère sur le projet d’aménagement général ; en cas de vote positif, le collège des bourgmestre et échevins procède aux consultations prévues aux articles 11 et 12.
(…) ».
Par ailleurs, l’article 13 de la loi du 13 décembre 1988 dispose que « Sauf le cas d’urgence, la convocation [du conseil communal] se fait, par écrit et à domicile, au moins cinq jours avant celui de la réunion ; elle mentionne le lieu, le jour et l’heure de la réunion et en contient l’ordre du jour. (…) Pour chaque point à l'ordre du jour, les documents, actes et pièces afférents peuvent être consultés, sans déplacement, par les membres du conseil à la maison communale durant le délai de [cinq jours] (…) ».
Il suit des dispositions légales qui précèdent que la compétence pour élaborer un projet d’aménagement général revient entièrement au collège des bourgmestre et échevins, qui soumet ensuite son projet au vote du conseil communal. Les documents actes et pièces nécessaires au conseil communal pour pouvoir procéder au vote en connaissance de cause doivent être mis à disposition des conseillers communaux au moins cinq jours avant celui de la réunion, en application de l’article 13 précité de la loi du 13 décembre 1988.
Il échet de constater que le délai minimal de cinq jours inscrit à l’article 13 de la loi communale ne constitue pas une fin en soi, mais vise à éviter que les conseillers communaux soient mis devant le fait accompli et à garantir leur droit d’être informés et de pouvoir voter en connaissance de cause sur les points figurant à l’ordre du jour de la réunion du conseil communal.
Le délai de mise à disposition aux conseillers communaux des documents concernés doit nécessairement être fonction de la complexité du point sur lequel les conseillers sont appelés à voter, ainsi que de l’ampleur du dossier à connaître de même que des informations et connaissances dont les conseillers sont, le cas échéant, supposés disposer en la matière.
Par ailleurs, il échet de rappeler que dans le cadre de son arrêt du 15 décembre 2016, inscrit sous le numéro 38139C du rôle, la Cour administrative a retenu que le vote prévu à l’article 10, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004 (i) « doit être lu en ce sens que le conseil communal est d’accord à ce que le projet de PAG soit mis sur orbite, du moment qu’il déclare que ce projet est suffisamment élaboré pour qu’il puisse continuer la procédure et être soumis aux consultations prévues par la loi » et (ii) « n’est plus comparable à l’adoption provisoire du PAG et ne saurait dès lors être analysé en adoption du projet de plan, mais en une sorte de mise sur orbite dudit projet ». Il se dégage de la solution ainsi retenue par la Cour administrative que lors du vote prévu par l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004, les conseillers communaux ne sont pas appelés à adopter point par point le projet, mais uniquement à apprécier l’état de l’élaboration du projet dans sa large globalité sans entrer dans les détails concrets du projet. Il s’ensuit qu’une connaissance sommaire 20du projet, sans nécessairement entrer dans chaque détail du projet, devrait permettre aux conseillers de pouvoir, à ce stade de la procédure, délibérer et voter en connaissance de cause, au sens de l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004.
En l’espèce, le seul fait que les documents à la base du vote du conseil communal du 13 juin 2016 sont datés au 13 juin 2016 n’est pas suffisant pour établir que lesdits documents n’auraient pas été consultables par les conseillers communaux au moins cinq jours avant le vote.
Il ressort, en effet, en l’espèce, de l’extrait du registre aux délibérations du conseil communal de la séance du 13 juin 2016 que le conseil communal a pris en compte lors du vote du 13 juin 2016 tant le projet d’aménagement général que l’étude préparatoire, le rapport de présentation et, enfin, le rapport sur les incidences environnementales, intitulé : « Strategische Umweltprüfung für den PAG der Stadt Luxemburg ». Le tribunal est dès lors amené à conclure que les documents exigés légalement ont été soumis à la délibération du conseil communal au sens de l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004.
Il ressort de surcroît des pièces soumises au tribunal par l’administration communale que les conseillers communaux ont été invités aux six réunions de la Commission de développement urbain, qui se sont tenues en date des 3, 10, 24, 26 et 30 mai ainsi que du 7 juin 2016. Il était, dès lors, loisible aux conseillers communaux d’assister à la préparation du vote de mise sur orbite du projet d’aménagement général sur une période de six semaines et ainsi de prendre connaissance de manière globale de l’intégralité du projet, bien avant le vote de mise sur orbite.
Il ne ressort, par ailleurs, pas de l’extrait de la délibération du conseil communal du 13 juin 2016, versé en cause, qu’un conseiller communal se soit plaint de ne pas avoir pu prendre inspection des documents dans le délai légal, mais que bien au contraire, la « mise sur orbite » du projet d'aménagement général a été votée par le conseil communal lors de sa séance du 13 juin 2016.
Le moyen d’annulation tirée d’une violation de l’article 13 de la loi communale est partant à son tour à rejeter.
- Quant au moyen ayant trait à une violation de l’article 13 alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004 Les demandeurs font valoir qu’il serait de jurisprudence que, concernant l’aplanissement des différends, pour des raisons d'organisation, tous les membres du collège échevinal ne devraient pas nécessairement assister à cette réunion, ce qui aurait aussi été le cas pour leur audition. Il serait également de jurisprudence que le collège échevinal ne saurait se cantonner dans une attitude purement passive, consistant à se limiter à prendre acte des réclamations réitérées oralement devant lui, puisqu’une telle attitude reviendrait à vider l'audition des opposants voulue par le législateur de tout sens, le seul « enregistrement » de réclamations au cours de l'audition faisant double emploi avec l'introduction préalable obligatoire de réclamations écrites. Il appartiendrait au contraire au collège des bourgmestre et échevins de faire des efforts concrets en vue de l'aplanissement des difficultés, pouvant consister en des éclaircissements destinés à écarter des malentendus, des explications destinées à justifier le choix urbanistique retenu, voire en des propositions tenant 21compte dans une certaine mesure des objections ou critiques formulées. Or, une telle discussion avec les opposants, lorsqu'elle est menée par un seul membre du collège échevinal présupposerait cependant, d'une part, que le collège des bourgmestre et échevins ait préalablement arrêté sa position à ce sujet, en conférant notamment à son représentant des instructions sur la marge de manœuvre lui conférée ou la tactique à suivre dans le cadre de ces discussions, et d'autre part, que le représentant rende compte de manière circonstanciée aux autres membres du collège échevinal du déroulement des discussions, de manière à permettre au collège échevinal d'arrêter de manière éclairée sa position à soumettre au vote du conseil communal. Cette double exigence résulterait non seulement de la nature légale collégiale du collège des bourgmestre et échevins mais encore de la nature politique de cet organe, qui se trouverait fréquemment être le reflet d'une coalition politique, de sorte qu'il importerait également que le représentant désigné agirait non seulement en tant que représentant d'un organe collégial, mais également le cas échéant en tant que représentant de diverses sensibilités politiques.
Les demandeurs insistent plus particulièrement sur le fait que si le collège échevinal peut, pour des raisons pragmatiques d'organisation, charger l'un de ses membres de la tenue des auditions, celles-ci ne sauraient cependant pas être menées par le représentant du collège de sa propre initiative sur base d'un mandat tacite et par conséquent général, mais exigeraient un mandat spécial de la part du collège échevinal, faute de quoi celui-ci devrait être considéré comme ayant abandonné une partie de ses prérogatives à son représentant, ce qui constituerait une violation du principe de collégialité inhérent au fonctionnement du collège échevinal entraînant l'irrégularité de la délégation décidée implicitement.
En l'espèce, faute de documents retraçables attestant, d'une part, d'un mandat spécial accordé au bourgmestre pour mener les discussions dans le cadre de l'aplanissement des différends au nom du collège des bourgmestre et échevins, et, d'autre part, d'une réunion collégiale du collège des bourgmestre et échevins au cours de laquelle des discussions auraient pu être menées antérieurement et postérieurement à ladite réunion par rapport aux réclamations des demandeurs, l’article 13, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004 aurait été violé.
Les demandeurs soulignent finalement qu’il ne ressortirait pas de la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 que le collège échevinal aurait délibéré sur leurs réclamations en vue de formuler une proposition de suites à y réserver.
Dans son mémoire en réponse, la partie étatique fait valoir qu’au vu des 869 objections, un mandat écrit aurait été expressément émis en date du 7 octobre 2016, conférant au bourgmestre la tâche de prendre acte des objections réitérées oralement lors de l'audition en vue de l'aplanissement des difficultés et précisant que le résultat des auditions sera remis par voie de procès-verbal au collège échevinal pour décision collégiale.
L’administration communale conclut au rejet du moyen en renvoyant à l’extrait de la réunion du collège des bourgmestre et échevins du 7 octobre 2016 lors de laquelle un mandat aurait été conféré au bourgmestre.
A titre de réplique, les demandeurs font valoir que le mandat accordé au bourgmestre aurait été subordonné à une condition précise et à un cas exceptionnel, à savoir que la majorité des 22membres du collège des bourgmestre et échevins serait indisponible, ce que les parties étatique et communale resteraient en défaut de prouver, de sorte que le bourgmestre aurait agi sans mandat et que la procédure serait viciée.
Les demandeurs soutiennent ensuite qu’à supposer que ladite condition susmentionnée aurait été rencontrée, le mandat tel qu'accordé s'apparenterait plus à un mandat général qu'à un mandat spécial. Dans la mesure où le mandat aurait été accordé au bourgmestre en vue de traiter les 869 objections, il n’aurait pu qu’être large et général sans être individualisé, alors que la loi prévoirait un mandat spécial. En outre, le collège des bourgmestre et échevins se serait abstenu de prendre position avant les réunions d’aplanissement des différends par l’élaboration d’une « tactique à suivre dans le cadre des discussions », respectivement d’une « marge de manœuvre dans les pouvoirs (…) conférés à la bourgmestre seule ». Ils insistent sur le fait qu’il n’y aurait pas eu de discussion, alors que l'aplanissement des différents serait justement destiné à rechercher une solution non contentieuse. Cette obligation de moyen exclurait que le collège échevinal puisse se cantonner dans une attitude purement passive, consistant à se limiter à prendre acte des réclamations réitérées oralement devant lui, puisqu’une telle attitude reviendrait à vider l'audition des opposants voulue par le législateur de tout sens, le seul enregistrement de réclamations au cours de l'audition faisant double emploi avec l'introduction préalable obligatoire de réclamations écrites. Ils en concluent qu’ou bien, le bourgmestre aurait respecté la procédure en ouvrant un réel dialogue en vue d'aplanir les différends et, partant, n'aurait pas respecté le mandat ne l’autorisant qu'à prendre acte des objections, de sorte à violer ainsi le principe de collégialité, ou bien le bourgmestre aurait respecté le mandat en se cantonnant à uniquement prendre acte des réclamations, de sorte à violer la procédure dont le but serait de créer un réel dialogue.
Aux termes de l’article 13 de la loi du 19 juillet 2004 « Dans le délai de trente jours de la publication du dépôt du projet dans les quatre quotidiens imprimés et publiés au Grand-Duché de Luxembourg, les observations et objections contre le projet doivent être présentées par écrit au collège des bourgmestre et échevins sous peine de forclusion.
Au cas où une ou plusieurs réclamations écrites ont été présentées dans le délai, le collège des bourgmestre et échevins convoque les réclamants qui peuvent, en vue de l'aplanissement des différends, présenter leurs observations. » Aux termes de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 « Le projet d’aménagement général ensemble avec toutes les pièces mentionnées à l’article 10 est soumis avec l’avis de la commission d’aménagement et, le cas échéant, avec l’avis du ministre ayant dans ses attributions l’environnement, le rapport sur les incidences environnementales, les réclamations et les propositions de modifications du collège des bourgmestre et échevins, au conseil communal.
Au plus tard dans les trois mois à compter de l’échéance du délai prévu à l’article 11, alinéa 2, le conseil communal décide de l’approbation ou du rejet du projet d’aménagement général (…) ».
Il y a d’abord lieu de souligner que le collège des bourgmestre et échevins est un organe collectif qui doit impérativement exercer ses fonctions collectivement ou solidairement, c’est-à-
dire comme corps, fonctions qu’il exerce plus particulièrement en ce qui concerne l’audition des opposants telle que prévue par l’article 13 de la loi du 19 juillet 2004, précité, en tant qu’organe de la loi, chargé de son exécution. Il ne saurait dès lors être question de « délégation » en faveur 23de l’un des membres au sens de délégation de compétence ou de pouvoir, mais seulement d’une répartition entre les divers membres du collège de certaines tâches relevant de la besogne administrative ou de l’administration courante, sans que cette répartition, simple mesure de décentralisation interne, ne puisse conférer au membre désigné un pouvoir personnel et absolu de décision. Il y a ensuite lieu de relever que l’audition des opposants ne saurait être confondue avec une décision sur le sort à réserver à ces mêmes réclamations liant la commune, étant entendu que le pouvoir de décider du bien-fondé des différentes réclamations, sous l’approbation du ministre, revient au seul conseil communal, conformément aux dispositions de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004. En mettant à charge du collège des bourgmestre et échevins l’obligation de soumettre au conseil communal « les réclamations et les propositions de modifications », en l’occurrence la mesure de l’audition des opposants en vue de l’aplanissement des différends, le législateur a entendu assurer que l’organe décisionnel, en l’occurrence le conseil communal, soit informé du résultat des différentes auditions ayant eu lieu en vue de l’aplanissement des différends, ceci dans un esprit de respect du principe du contradictoire à tout niveau de la procédure d’élaboration concernée14.
En revanche, les termes utilisés par le législateur impliquent également et nécessairement que le collège échevinal parvienne en son sein, par délibération, à une décision quant au sort à réserver aux réclamations qu’il entend proposer au vote du conseil communal.
Il ressort des travaux parlementaires ayant précédé la loi du 28 juillet 2011 que ce libellé « permet de respecter le droit de réclamation des citoyens en ce que tous ceux qui ont présenté une réclamation dans le délai prévu sont convoqués. En même temps, il tient compte de l’objectif de la simplification administrative en remplaçant « doit entendre » par le mot « convoque », puisque tous les réclamants sont convoqués, mais uniquement ceux qui donnent suite à cette convocation sont entendus. Le terme « différends » est jugé plus correct que le terme « difficultés » : il ne s’agit en général pas de résoudre des difficultés, mais de présenter des réclamations, des vues divergentes au sujet du projet d’aménagement général. »15.
Il s’ensuit que la réunion d’aplanissement des différends prévue à l’article 13 n’impose pas au collège échevinal une obligation de résultat, mais une obligation de moyens, étant donné que le but de ladite réunion n’est pas d’atteindre à tout prix une solution acceptable tant pour le réclamant que pour le collège échevinal, mais que le réclamant puisse de son côté présenter son point de vue par rapport au projet d’aménagement général et les incidences dudit projet sur sa propriété et que le collège échevinal présente au réclamant des éclaircissements afin d’écarter des malentendus, des explications destinées à justifier le choix urbanistique retenu, voire des propositions tenant compte dans une certaine mesure des objections ou critiques formulées16.
En ce qui concerne tout d’abord l’audition des opposants proprement dite, réalisée par le seul bourgmestre, si celle-ci autorise un comportement en partie passif de la part du collège échevinal, en ce sens que celui-ci n’est pas appelé à prendre immédiatement et concomitamment à l’audition une décision sur la position à arrêter en vue du vote par le conseil communal, elle 14 trib. adm. 21 mars 2007, n°s 21479, 21480 et 21481 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Urbanisme, n° 108.
15 Doc.parl. n° 6023/7, p. 10 16 trib. adm. 21 novembre 2007, n° 22633 du rôle, confirmé sur ce point par Cour adm. 29 mai 2008, n° 23891C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Urbanisme, n° 104.
24comporte néanmoins également une part de discussion et de négociation, le collège pouvant le cas échéant être appelé à rencontrer les arguments des opposants, à discuter et négocier avec ceux-ci et éventuellement à leur soumettre des propositions de modification, le tout sur la toile de fond du but de l’audition des opposants, à savoir celui de solutionner à un niveau non contentieux, pour autant que possible, les différends existants - sans que toutefois une obligation de résultat ne pèse sur le collège échevinal. Cette recherche nécessaire d’une solution non contentieuse, si elle ne saurait comme retenu ci-avant imposer au collège échevinal ou à tout autre organe communal une obligation de résultat, relève cependant d’une obligation de moyens qui résulte non seulement du texte même de la loi, qui mentionne l’aplanissement des différends, mais encore du fait que le législateur ait imposé l’audition des opposants en sus de la possibilité pour ces derniers d’introduire une réclamation écrite. Une telle obligation exclut que le collège échevinal puisse se cantonner dans une attitude purement passive, consistant à se limiter à prendre acte des réclamations réitérées oralement devant lui, puisque une telle attitude reviendrait à vider l’audition des opposants voulue par le législateur de tout sens, le seul « enregistrement » de réclamations au cours de l’audition faisant double emploi avec l’introduction préalable obligatoire de réclamations écrites, mais impose au collège des bourgmestre et échevins des efforts concrets en vue de l’aplanissement des difficultés, pouvant, comme indiqué ci-avant, consister en des éclaircissements destinés à écarter des malentendus, des explications destinées à justifier le choix urbanistique retenu, voire en des propositions tenant compte dans une certaine mesure des objections ou critiques formulées.
Or une telle discussion avec les opposants, lorsqu’elle est menée par un seul membre du collège échevinal présuppose cependant, d’une part, que le collège ait préalablement arrêté sa position à ce sujet, en conférant notamment à son représentant qui n’agit pas individuellement ni de sa propre initiative, des instructions sur la marge de manœuvre lui conférée ou la tactique à suivre dans le cadre de ces discussions, et d’autre part, que le représentant rende compte de manière circonstanciée aux autres membres du collège échevinal du déroulement des discussions, de manière à permettre au collège échevinal d’arrêter de manière éclairée sa position à soumettre au vote du conseil communal.
Cette double exigence résulte non seulement de la nature légale collégiale du collège des bourgmestre et échevins mais encore de la nature politique de cet organe, qui se trouve fréquemment être le reflet d’une coalition politique, de sorte qu’il importe également que le représentant désigné agisse non seulement en tant que représentant d’un organe collégial, mais également le cas échéant en tant que représentant de diverses sensibilités politiques. Or des négociations avec les opposants, que le représentant du collège échevinal ne saurait entreprendre de sa propre initiative comme bon lui semble, ne sauraient se contenter d’une « délégation implicite» qui exclut par définition que les membres du collège aient préalablement abordé la question et conféré à leur représentant des consignes déterminées.17 En d’autres termes, si le collège échevinal peut, pour des raisons pragmatiques d’organisation, charger l’un de ses membres de la tenue des auditions, celles-ci, comportant nécessairement une part de discussions et de négociations avec les opposants, ne sauraient être menées par le représentant du collège de sa propre initiative sur base d’un mandat tacite et par conséquent général, mais exigent un mandat spécial - qui peut certes être oral - de la part du collège 17 Ibidem.
25échevinal, faute de quoi celui-ci doit être considéré comme ayant abandonné une partie de ses prérogatives à son représentant, ce qui constitue une violation du principe de collégialité inhérent au fonctionnement du collège échevinal entraînant l’irrégularité de la « délégation » décidée implicitement et partant en l’espèce de la représentation du collège par le seul bourgmestre.
Ceci étant, il y a lieu de rappeler qu’afin de pouvoir discuter utilement avec les diverses personnes ayant présenté des objections, le collège échevinal, en relation avec chaque objection présentée, doit, soit être composé lors de l’audition des auteurs d’objections pour le moins par une majorité de ses membres, soit arrêter préalablement aux opérations d’aplanissement des difficultés de façon collégiale sa prise de position au sujet des objections introduites, soit le cas échéant, après audition de la personne ayant réitéré oralement son objection, se concerter à nouveau avant la soumission de sa proposition quant au sort à réserver à l’objection, pour l’hypothèse compréhensible où tous respectivement une majorité des membres du collège échevinal ne peuvent pas être présents lors des différentes auditions18.
Or, en l’espèce, il échet de constater qu’il ressort d’une délibération du collège échevinal du 7 octobre 2016 que « quelque 866 objections et observations ont été introduites » et que « pour le cas où le collège échevinal ne pourrait, pour des raisons de calendrier ou d’obligations professionnelles de ses membres, être composé pour le moins par une majorité de ses membres lors d’une séance d’audition de réclamants » il est donné « mandat à Mme Lydie Polfer, bourgmestre, pour prendre acte des objections réitérées oralement lors de l’audition ceci en vue de l’aplanissement des difficultés soulevées par les auteurs des objections ». La même délibération retient que « le résultat des auditions sera transmis par voie de procès-verbal au collège échevinal qui décidera par la suite collégialement de la position à adopter face aux objections présentées pour solutionner les différends et arrêtera les propositions à soumettre au conseil communal (…) ».
Il s’ensuit que le bourgmestre a été chargé expressément par le collège échevinal de participer à lui seul aux réunions d’aplanissement des différends au cas où les autres membres auraient des empêchements, sans que les sept membres du conseil échevinal devaient pour chacune des 44 séances d’aplanissement des différends justifier leur indisponibilité.
Il se dégage encore des éléments soumis à l’appréciation du tribunal que suite à l’objection présentée par les demandeurs à l’encontre du projet d’aménagement général, ces derniers ont été entendus par le bourgmestre, tel que cela se dégage des compte-rendus des réunions d’aplanissement des différends des 12 décembre 2016 et 25 janvier 2017. Il se dégage encore d’un jugement du tribunal administratif du 15 juin 2020, inscrit sous le numéro 40568 du rôle, qu’il ressort de la décision du 6 avril 2017 que le collège échevinal se déclare « D’accord avec les propositions élaborées par le bureau … et le service de l’urbanisme » et qu’il a bien distingué entre le « Projet du PAG (partie graphique) modifiée suivant les réclamations des séances 2, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 13, 16, 19, 20, 22, 23, 24, 26, 27, 28, 30, 35, 36, 39, 40, 41, 44 et 45 » et les « réclamations sans modification [du projet d’aménagement général] », de sorte que le bourgmestre a nécessairement dû rendre compte fidèlement au collège échevinal des objections réitérées par les demandeurs au moment de l’audition de ceux-ci et que celles-ci ont été rejetées, 18 Cour adm. 19 janvier 2012, n° 28903C du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.
26étant encore précisé à cet égard que cette information à donner aux autres membres du collège échevinal n’est soumise à aucune forme ou formalité19.
Au vu de ce qui précède, il y a lieu de retenir que le collège échevinal, par l’intermédiaire de son bourgmestre, a pris acte des objections réitérées par les demandeurs. Le bourgmestre s’est ensuite concerté avec le collège échevinal dans une composition utile à la suite de l’audition des auteurs d’objections et le collège a soumis le résultat des auditions, dont celles des demandeurs, avec sa proposition écrite au conseil communal concernant les objections présentées en vue de l’adoption du PAG.
Il s’ensuit que le moyen des demandeurs ayant trait à une violation de l’article 13, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004 est à rejeter.
- Quant à une violation de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 Première branche Les demandeurs font valoir qu’il appartiendrait en vertu de l’article 14 de la loi du 19 juillet au conseil communal de statuer sur les réclamations et les propositions de modification du collège des bourgmestre et échevins qui suggérerait une réponse à y apporter. Or, il ressortirait de la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 qu'il n'aurait pas été statué individuellement sur chacune des réclamations et il semblerait que la majorité politique ait fait en bloc le choix de suivre les propositions du collège des bourgmestre et échevins et qu'en bloc, l'opposition ait rejeté ces mêmes conclusions, de sorte que les conseillers communaux n'auraient pas débattu sur les réclamations. Les demandeurs soutiennent qu’ils resteraient dès lors dans l’ignorance des motifs du rejet de leurs réclamations, respectivement du nombre de conseillers ayant décidé de ne pas y faire droit.
Dans son mémoire en réponse, la partie étatique conclut au rejet de ce moyen tandis que l’administration communale fait valoir qu’il ne ressortirait ni de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 ni de la loi du 13 décembre 1988 que le conseil communal devrait nécessairement voter individuellement sur chaque réclamation, mais au contraire, l'article 19 de cette loi prévoirait uniquement que le conseil communal vote sur les points à l'ordre du jour. Compte tenu du nombre d'objections et de l'ampleur du projet d'aménagement général de la Ville, il aurait été logistiquement et matériellement impossible de requérir les conseillers communaux de procéder lors d'une séance à 869 votes différents par vote à haute voix, à main levée ou par assis et levé, d’autant plus qu’aucun conseiller communal n'aurait exigé pareils votes.
L’administration communale précise dans ce contexte que les conseillers communaux auraient eu auparavant la possibilité d'assister aux réunions de la Commission du développement urbain qui se serait réunie les 17, 23 et 31 janvier, 8, 15 et 28 février, 1er, 6, 7, 9, 20, 23, 27 et 31 mars ainsi que le 6 avril 2017 pour se voir présenter les objections des réclamants, ainsi que les suites et modifications envisagées au projet d'aménagement général suite aux réunions en vue de l'aplanissement des différends. Lors de ces réunions, les membres de la commission, ainsi que les conseilleurs intéressés auraient pu poser les questions qu'ils auraient estimé nécessaires et 19 trib. adm. 21 novembre 2007, n° 22633 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.
27éventuellement proposer des adaptations. Ensuite, seulement le projet d'aménagement général adapté aurait été soumis au vote du conseil communal.
Dans leur mémoire en réplique les demandeurs soutiennent qu’il ne ressortirait pas des éléments soumis à l’appréciation du tribunal que l’administration communale aurait bien pris en compte leurs objections. En effet, le courrier adressé aux demandeurs ressemblerait à un courrier type envoyé à l'ensemble des réclamants, les informant de la décision prise en se bornant à affirmer que leur réclamation aurait été prise en considération mais, sans étayer le propos. Le tableau auquel est fait référence dans ledit courrier ne serait lui-même que la proposition du collège des bourgmestre et échevins et ne consisterait pas en la décision du conseil communal. Les demandeurs font valoir qu’ils resteraient même après lecture des mémoires en réponse dans l’ignorance des motifs du rejet de leurs réclamations, tout en insistant sur le fait que le nombre important d'objections ne dispenserait pas l'autorité communale de ses obligations envers ses administrés et que le conseil communal se serait vu dépossédé de son rôle par une commission n'ayant aucune compétence pour statuer sur les réclamations en vertu de la loi modifiée du 19 juillet 2004. En effet, s'il avait été possible de tenir entre janvier et avril, plusieurs réunions d'une commission, en présence de l'un ou l'autre conseiller communal, il aurait été tout aussi possible de réunir le conseil communal aux fins qu'il statue sur les réclamations. Les demandeurs précisent encore les conseillers communaux n'auraient eu que le choix d'être d'accord avec l'ensemble des propositions du collège des bourgmestre et échevins, ou avec rien, alors qu’ils n'auraient pas pu statuer sur les réclamations de façon individuelle mais seulement sur un rapport global du collège des bourgmestre et échevins sur l'ensemble des 869 réclamations.
Deuxième branche Les demandeurs font ensuite valoir que suivant la jurisprudence des juridictions administratives, le conseil communal ne pourrait statuer, sur base d'une réclamation, en défaveur du réclamant ni ultra petita. Or, à la suite du second vote du conseil communal, leur situation se serait empirée, étant donné que la densité de logement admissible dans la zone aurait été augmentée et ce pour des raisons inconnues. En effet la densité de logement aurait été portée à 96 unités par hectare pour l’ensemble de la zone, qui serait selon le schéma directeur d’une surface de 19,16 hectares, ce qui donnerait un potentiel de 975 nouveaux logements sur le site. Auparavant, la densité de logement aurait été de 84 unités par hectare et de 91 unités par hectare pour les zones WH08 et WH10. Cette augmentation de la densité de logement serait contraire aux réclamations formulées, lesquelles auraient insisté sur une diminution des densités projetées. Les coefficients de densité COS et CSS auraient également subi des modifications à la hausse. En effet, suivant la version du PAG adoptée à la suite du vote du conseil communal en date du 13 juin 2016, le site du Fonds du Kirchberg situé le long de la rue … aurait été divisé en trois schémas directeurs (SD-WH-08, SD-WH-09 et SD-WH-10) pour lesquels des coefficients de densités propres auraient été imposés. A la suite de l’insistance des riverains pour avoir davantage d’espaces verts au seins des lotissements projetés, le conseil communal aurait accepté d’imposer une coulée verte au sein du lotissement. Les demandeurs constatent cependant que, d’une part, les schémas directeurs auraient été regroupés pour ne prévoir plus qu’une seule « grille » de coefficients de densité et que les coefficients COS et CSS auraient été largement rehaussés à un COS de 0,80 et un CSS de 1, alors qu’auparavant ils auraient été pour le COS de 0,56 et de 0,71 pour le CSS. A la suite de l’intervention du ministre, le CSS aurait été légèrement réduit à un maximum de 0,90. Les demandeurs insistent sur le fait que selon l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004, le conseil communal pourrait approuver le projet en sa forme originale ou y apporter des 28modifications qui soit seraient proposées par la commission d’aménagement, soit répondent à l’avis du ministre de l’Environnement, soit prendraient en compte en tout ou en partie des observations et objections présentées. Il serait de jurisprudence qu’une modification du PAG en cours de procédure ne pourrait se faire que si cette modification a pour objet de répondre à une réclamation. Or, les demandeurs doutent qu’une réclamation aurait été formulée devant le collège des bourgmestre et échevins ayant eu comme objet une demande d’augmentation des coefficients de densité DL, COS et CSS.
La partie étatique fait valoir qu’il résulterait des procès-verbaux relatant les réunions du collège échevinal dans le cadre de l’aplanissement des différends que ces demandes auraient été effectuées en tout sens et qu’il n’existerait pas une unité d’objections quant à ce site litigieux. La modification opérée aurait dès lors répondu à l’ensemble des réclamations dans le but d’unifier la situation. Elle souligne encore que Madame … aurait soulevé une différence de densité entre les bâtiments projetés en zone WH08 et WH09 et les constructions autorisées en zone HAB 1 en demandant un développement harmonieux de cette partie de la localité.
L’administration communale fait d’abord valoir que les arrêts de la Cour administrative citées dans ce contexte par les demandeurs auraient été rendus concernant une procédure de modification d'un PAG sur base de l'article 9 de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l'aménagement des villes et autres agglomérations importantes et que le système de l'adoption provisoire, suivie d'une adoption définitive, aurait entretemps été remplacé par une adoption unique intervenant au terme de la période d'enquête publique et de consultation des autorités étatiques, de sorte que les enseignements de ces arrêts de la Cour administrative ne seraient plus d’application depuis la loi du 28 juillet 2011 portant modification de la loi du 19 juillet 2004. Ces arrêts auraient par ailleurs concerné le propriétaire d’un terrain ayant réclamé contre le classement de son propre terrain et non pas, comme en l’espèce, la propriété de tiers.
L’administration communale reproche ensuite aux demandeurs d’avoir mal appliqué les différents coefficients en se référant à l'annexe II: « Terminologie du degré d'utilisation du sol » du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le contenu du plan d'aménagement général d'une commune, ci-après désigné par « règlement grand-ducal PAG du 28 juillet 2011 », et en relevant plus particulièrement que le coefficient d'utilisation du sol (CUS) serait calculé par rapport à la surface totale du terrain à bâtir brut, tandis que le coefficient d'occupation du sol (COS) et le coefficient de scellement du sol (CSS) seraient calculés par rapport à la surface du terrain à bâtir net.
Elle soutient que le calcul effectué par les parties demanderesses négligerait que les coefficients s’appliqueraient sur des surfaces. Ainsi le calcul d’une moyenne devrait prendre en compte les surfaces différentes visées par les trois schémas directeurs. En outre, dans la mesure où le COS et le CSS s’appliqueraient sur le terrain à bâtir net, il faudrait prendre en compte l’instauration de la « zone de servitude urbanisation – coulée verte [CV] » par le projet tel qu’adopté par le conseil communal le 28 avril 2017, qui ne figurerait pas dans le projet mis en procédure et qui réduirait dès lors la surface de terrain à bâtir net sur base de laquelle ces deux coefficients seraient appliqués.
Comme les surfaces grevées d’une « zone de servitude urbanisation – coulée verte [CV] » seraient inconstructibles, les surfaces de terrain à bâtir net disponibles diminueraient. Les constructions admises occuperaient nécessairement une emprise plus grande du terrain à bâtir net, impliquant logiquement une augmentation du COS et du CSS calculés sur le terrain à bâtir net. Au cas où le COS 29et le CSS auraient été laissés inchangés, les futures constructions auraient été plus hautes, ce qui n’aurait pas été voulu par les auteurs des objections. L’administration communale précise encore que la surface construite brute admissible aurait été de 114.516 mètres carrés au moment de la mise en procédure du projet d’aménagement général et plus que 111.744,60 mètres carrés suite à l’approbation du PAG, de sorte que la surface construite brute aurait été réduite de 2.771,80 mètres carrés.
L’augmentation de la densité de logement s’expliquerait par une diminution du maximum des surfaces commerciales ou de bureaux avec corrélativement une augmentation de la part de la surface constructible brute totale du PAP NQ WH-08 à dédier au logement. Elle précise encore que les futurs projets de PAP NQ devraient prévoir une intégration harmonieuse dans le tissu bâti existant et insiste sur le fait qu’il serait indéniable qu’en ayant prévu de combler une lacune dans le tissu urbain existant suite au développement complet du côté nord de l’avenue J.F. Kennedy et de classer les terrains situés du côté sud de ladite avenue en « zone soumise à un plan d’aménagement particulier nouveau quartier », la Ville de Luxembourg aurait été mue par des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement du territoire communal et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur ledit territoire répondant à une finalité d’intérêt général.
A titre de réplique, les parties demanderesses insistent sur le fait que le COS et le CSS auraient été largement rehaussés suite au second vote du conseil communal et contestent que la coulée verte aurait une incidence sur la hausse des coefficients. Elles précisent que suivant le schéma directeur dans sa version du 13 juin 2016 environ 25% du terrain à bâtir brut devrait être cédé à la Ville de Luxembourg pour la réalisation des voiries, infrastructures et espaces publics et que la coulée verte aurait été reprise dans le schéma directeur. Suivant le schéma directeur dans sa version du 28 avril 2017, il serait indiqué que la cession au domaine public communal serait toujours d’environ 25 % et la coulée verte n’aurait pas été modifiée. La seule différence aurait été que la coulée verte serait inscrite dans la partie graphique du PAG et non plus seulement au niveau du schéma directeur, de sorte que rien ne permettrait de conclure en ce sens que la surface totale des terrains à bâtir net serait inférieure à la suite du second vote.
L’administration communale rajoute dans son mémoire en duplique qu’on ne pourrait se limiter à analyser chaque coefficient de manière isolée, mais que seule l’interaction entre les différents coefficients permettrait de déterminer ce qui pourrait être construit.
S’agissant de la première branche du moyen développé par les parties demanderesses, il échet de rappeler que l'article 14 de la loi du 19 juillet 2004, dans sa rédaction issue de la loi du 28 juillet 2011, dispose que :
« Art. 14. Vote du conseil communal Le projet d'aménagement général ensemble avec toutes les pièces mentionnées à l'article 10 est soumis avec l'avis de la commission d'aménagement et, le cas échéant, avec l'avis du ministre ayant dans ses attributions l'environnement, le rapport sur les incidences environnementales, les réclamations et les propositions de modifications du collège des bourgmestre et échevins, au conseil communal.
Au plus tard dans les trois mois à compter de l'échéance du délai prévu à l'article 11, alinéa 2, le conseil communal décide de l'approbation ou du rejet du projet d'aménagement général.
30 Il peut approuver le projet dans sa forme originale ou y apporter des modifications qui soit sont proposées par la commission d'aménagement, soit répondent en tout ou en partie à l'avis émis par le ministre ayant l'Environnement dans ses attributions, soit prennent en compte en tout ou en partie des observations et objections présentées.
Si le conseil communal entend apporter des modifications autres que celles visées à l'alinéa qui précède, il renvoie le dossier devant le collège des bourgmestre et échevins qui est tenu de recommencer la procédure prévue aux articles 10 et suivants. » Force est au tribunal de constater que le conseil communal à travers sa délibération du 28 avril 2017 « Décide d’apporter aux réclamations soumises les réponses suivantes qui selon les conclusions tirées ont conduit aux modifications afférentes dans les parties graphique et/ou écrite du PAG : (voir tableau en annexe) » et qu’il ressort de ladite annexe que les objections des parties demanderesses n’ont pas donné lieu à une modification du projet d’aménagement général tout en résumant le contenu de la réunion d’aplanissement des différends, de sorte que le conseil communal a bien délibéré sur le classement des parcelles litigieuses portant les numéros cadastraux … et ….
Force est également au tribunal de retenir que l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 ne prévoit pas que le conseil communal devrait procéder au vote pour chaque objection individuellement, mais se limite à préciser que le conseil communal « décide de l’approbation ou du rejet du projet d’aménagement général », de sorte à permettre au conseil communal d’approuver le projet d’aménagement général dans son ensemble par le biais d’un seul vote.
Il s’ensuit, à défaut de réserve exprimée par l’un ou l’autre conseiller communal, que le conseil communal a pu valablement voter sur le projet d’aménagement général sans voter pour chaque objection individuellement, de sorte que l’argumentation en sens contraire des demandeurs encourt le rejet.
S’agissant de la deuxième branche du moyen présenté par les parties demanderesses, il échet de rappeler que l’article 14 prévoit la possibilité pour le conseil communal soit d’approuver le projet d’aménagement général sous sa forme originale, soit d’y apporter des modifications en tenant compte des modifications proposées par la commission d’aménagement, respectivement de l’avis du ministre de l’Environnement, ou encore en tenant compte des objections formulées contre le projet d’aménagement général en question.
En l’espèce, il échet de constater qu’à la suite de la délibération du conseil communal du 13 juin 2016, les parcelles litigieuses avaient été classées en « zone d’habitation 2 [HAB-2] » soumises à un PAP NQ et à trois schémas directeurs. La partie graphique prévoyait les coefficients comme suit : COS : 0,65, CSS : 0,90, CUS : 1,30 et DL : 91, le schéma directeur SD-WH-09 comme suit : COS : 0,60, CSS : 0,80, CUS : 1,30 et DL :96 et le schéma directeur SD-WH-10 comme suit : COS :0,45, CSS : 0,65, CUS : 1,05 et DL :84. La partie graphique du PAG, telle qu’issue de la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 renseigne que les parcelles litigieuses ne font plus l’objet de trois schémas directeurs, mais plus que d’un seul, dont les coefficients sont précisés comme suit : COS :0,80, CSS : 1,00, CUS : 1,10 et DL :96. Or, il ressort des pièces versées en cause que les demandeurs ont tous formulé des objections relatives aux 31parcelles litigieuses dont la plupart tenaient à la mise en place d’une zone tampon par le biais d’un espace de verdure entre les constructions situées rue … et les futures constructions à ériger. Les objections concernaient également les hauteurs trop élevées des constructions projetées, une diminution de l’ensoleillement et des pertes de vues. Une objection soulevait qu’en raison de la pénurie de logements, il y aurait lieu d’augmenter la densité de logement.
Il convient ensuite de rappeler que l’alinéa 3 de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit que si le conseil communal peut adopter le projet de PAG dans sa forme originale, il peut également y apporter des modifications. Ces modifications sont, comme soulevé ci-avant, en principe issues de propositions pouvant émaner de manière formelle de trois sources, à savoir qu’elles peuvent émaner des propositions de la commission d’aménagement, sinon répondre en tout ou en partie à l’avis émis par le ministre ayant l’environnement dans ses attributions et finalement résulter de la prise en compte de toute ou partie des objections présentées par le public intéressé. Pour que la procédure fasse un sens, il doit être possible au conseil communal de relayer, le cas échéant, ces trois sources de modification et d’y ajouter à titre accessoire des éléments nécessairement complémentaires par rapport à ceux proposés par l’un ou l’autre de ces trois initiateurs de modifications. Si toutefois le conseil communal voulait aller plus fondamentalement au-delà de ces modifications proposées, toujours au niveau de l’adoption du projet de PAG prévue par l’article 14 sous revue, il lui est loisible, conformément au dernier alinéa de cet article, de renvoyer le dossier devant le collège échevinal qui, dans cette hypothèse, sera tenu de recommencer la procédure prévue aux articles 10 et suivants de la même loi20.
Il s’ensuit qu’au vu des objections introduites concernant les parcelles litigieuses, le conseil communal a légitimement pu reconsidérer la situation en adaptant les coefficients CUS, COS, CSS et DL applicables aux parcelles litigeuses et en fusionnant les trois schémas directeurs en un seul schéma directeur. En effet, la formulation « soit prennent en compte en tout ou en partie des observations et objections présentées » contenue dans l’alinéa 3 de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 n’impose pas que le conseil communal doive suivre les objections formulées par les administrés, à condition toutefois que le conseil communal ne porte pas au projet d’aménagement général des modifications spontanées directes ou indirectes, qui ne seraient pas la suite directe d’une objection valablement formulée.
Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le moyen relatif à une prétendue violation de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 est à rejeter pour ne pas être fondé.
- Quant au moyen ayant trait à une violation des articles 5, 6, 7 et 9 de la loi du 22 mai 2008 et à une violation des articles 7 et 6, paragraphe 8 de la Convention d’Aarhus Les parties demanderesses, en renvoyant à un jugement du tribunal administratif du 13 novembre 2017, inscrit sous le numéro 38273 du rôle, font valoir qu’il serait possible dans le cadre du présent recours d’invoquer l’illégalité des actes préparatoires, respectivement l’illégalité de la procédure de l’évaluation environnementale stratégique effectuée dans le cadre du « projet de modification ponctuelle avorté ».
20 Cour adm. 15 décembre 2016, n°38139C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu.
32Elles soutiennent que l’article 4 de la loi du 22 mai 2008 obligerait les autorités administratives à réaliser l’évaluation sur les incidences environnementales au cours de l’élaboration du plan ou programme. Or, les parcelles litigieuses auraient fait l’objet en juillet 2013 d’une évaluation des incidences environnementales (phase 1) dans le cadre d’un projet de modification ponctuelle de la partie graphique du PAG de la Ville de Luxembourg, procédure qui n’aurait jamais été entamée.
Ainsi, l’évaluation environnementale sommaire de 2013 n’aurait jamais été portée à la connaissance du public et elle ne correspondrait qu’à la première phase des études environnementales pour laquelle un bureau agréé ne serait pas requis. Cette évaluation reposerait sur une procédure distincte s’effectuant sur base d’un examen au cas par cas relevant des articles 2, paragraphe 3, 4, 6 et 7 de la loi du 22 mai 2008 et ayant pour objet que le plan ou programme soit examiné individuellement afin de vérifier s’il est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement. Les parties demanderesses se posent la question de savoir si dans le cadre d’une évaluation environnementale reposant sur l’article 2, paragraphe 2 de la loi du 22 mai 2008, c’est-à-dire dans le cadre d’une refonte intégrale, il serait possible d’obtenir une dispense d’évaluation environnementale pour les mêmes plans et programmes ayant fait l’objet d’une analyse au cas par cas. Elles se réfèrent dans ce contexte à une interprétation des articles de la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, ci-après désignée par « la directive 2001/42 » et précisent que l’article 4 de cette directive aurait comme objectif d’assurer que la répétition des évaluations soit évitée en permettant l’utilisation d’informations obtenues dans le cadre d’autres systèmes de prise de décision, comme les plans et programmes dans d’autres secteurs. Or, en l’espèce, l’évaluation sommaire des incidences environnementales réalisée en 2013 pour les terrains litigieux ne saurait être considérée comme une étude environnementale complète, étant donné qu’elle n’aurait jamais été publiée et fait l’objet d’une enquête publique. Ainsi, l’évaluation environnementale des terrains litigieux devrait faire l’objet d’une nouvelle évaluation ou une évaluation mise à jour pour la refonte du PAG. Les parties demanderesses rappellent à cet égard que les incidences d’une modification ponctuelle ne seraient pas comparables avec celles d’une refonte globale. En admettant que l’étude de juillet 2013 sur l’évaluation des incidences environnementales pourrait être placée dans le contexte de l’évaluation environnementale du PAG, à savoir dans la légende de la partie graphique de l’annexe 1, et annexée dans l’étude de l’évaluation des incidences environnementales réalisée par le bureau d’étude … en janvier 2015, elles contestent que l’évaluation des incidences environnementales de juillet 2013 ait fait l’objet d’une évaluation sur base de caractéristiques environnementales sur une situation réelle.
Elles donnent encore à considérer qu’une évaluation environnementale devrait reposer sur l’état actuel de l’environnement, de sorte que les informations concernant les aspects pertinents de la situation environnementale devraient être aussi actuels que possible. Elles précisent que l’étude sur l’évaluation des incidences environnementales réalisée en juillet 2013 ne prendrait pas en compte les changements de droit et de fait en relevant plus particulièrement que l’analyse des incidences sur le projet de modification ponctuelle n’aurait pas fait l’objet d’un screening quant aux effets prévisibles de la programmation urbanistique sur les chiroptères. Ainsi, l’étude sur l’évaluation des incidences environnementales de juillet 2013 n’aurait pas pu prendre en considération le guide d’orientation publié en juillet 2015 intitulé « Arbeitshilfe für Voreinschätzung (Screening) einer möglichen Betroffenheit von Fledermäusen im Rahmen von PAGs ». Elles soutiennent que ce guide, établi pour les chiroptères, prévoirait un cadre juridique développé avec rigueur. Elles donnent à considérer que l’évaluation environnementale effectuée par le bureau d’étude dans le cadre de la refonte du PAG comprendrait une première prise de position du bureau « … » quant aux effets prévisibles de la programmation urbanistique sur les chiroptères, qui aurait été soumise pour avis au ministre de 33l’Environnement complétée par l’avis de la Centrale Ornithologique. Elles précisent encore que le bureau … n’aurait pas disposé de l’agrément ministériel au stade de l’élaboration de l’étude environnementale et qu’il n’aurait pas détecté de chauves-souris, dont la présence aurait cependant été attestée par les habitants du quartier. L’étude de 2013 n’aurait pas non plus analysé l’effet cumulé avec le projet du tramway approuvé par une loi du 24 juillet 2014 portant construction d’une ligne de tramway à Luxembourg entre la Gare Centrale et le Circuit de la Foire Internationale au Kirchberg.
Ainsi, une analyse des incidences cumulées du projet sur l’environnement, respectivement sur les biens à protéger « être humain, population et santé », ainsi que les biens « biotope », « Sol » et « Paysage » n’aurait pu être réalisée lors de cette étude sommaire de 2013, alors que le critère de cumul de projets serait un critère important, dans la mesure où ce dernier aurait permis de considérer des nuisances probables notables et de soumettre ces effets cumulatifs à une évaluation environnementale plus approfondie. Les conclusions d’une telle étude environnementale plus approfondie auraient abouti à une détérioration moins importante des espaces verts présents sur les parcelles litigieuses, à une gestion plus réfléchie de l’urbanisation et à des densités de construction moins importantes. Les parties demanderesses ajoutent que dans l’avis n° 80408/CL-mz du 10 juillet 2014 concernant la modification ponctuelle de la partie graphique du PAG, le ministre de l’Environnement aurait soulevé des effets négatifs pouvant résulter de la proximité du projet avec l’avenue J.F. Kennedy. Elles en concluent qu’aucune mesure destinée à éviter, réduire ou compenser ces incidences notables n’aurait été prévue et que ces incidences auraient dû faire l’objet d’une étude plus approfondie conformément à l’article 5 de la loi du 22 mai 2008. Finalement, les parties demanderesses font valoir que l’étude sur l’évaluation des incidences environnementales réalisée par la société … en juillet 2013 n’aurait pas pu avoir comme conséquence une dispense d’une évaluation environnementale stratégique dans le cadre de la révision du PAG et qu’une décision d’actualisation de cette étude aurait dû être prise.
Dans leur mémoire en réplique, les parties demanderesses font valoir qu’en vertu de l’ancien PAG aucune nouvelle construction n’aurait pu être autorisée sur les parcelles litigieuses, de sorte que le site en question aurait été à considérer comme zone verte au sens de l’article 5 de la loi du 19 janvier 2004 et rappelle qu’en vertu de l’article 2 la loi du 28 mai 2008, la refonte du PAG aurait été soumis à l’élaboration d’une SUP. Ils continuent que la Ville de Luxembourg aurait dispensé le projet de modification ponctuelle de 2013 de l’élaboration d’une étude environnementale complète en estimant que celle-ci n’était pas susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement, alors que la première phase de l’étude aurait été bâclée, dans la mesure où la présence de chiroptères n’aurait pas été détectée. Ils se réfèrent dans ce contexte à un jugement du tribunal administratif du 7 septembre 2016, inscrit sous le numéro 37287 du rôle, ayant annulé une décision du ministre du Développement durable et des Infrastructures de ne pas réaliser d’évaluation environnementales dans le cadre d’un projet de plan d’occupation du sol en raison de la présence d’une espèce de chauve-
souris sur le site, soulignant le caractère erroné de la première phase de l’étude environnementale, ayant conclu à l’absence de risque d’incidences notables sur l’environnement. Ils ajoutent que les principes mêmes de la participation du public au processus de décision en matière environnementale auraient été méconnus, alors que le public n’aurait pas, faute d’études complètes, été en mesure de pouvoir intervenir utilement à un stade où toutes les options étaient encore ouvertes par rapport au projet d’aménagement général.
34La partie étatique conclut au rejet de ce moyen en confirmant que l’évaluation environnementale sommaire de 2013 effectuée par la société … dans le cadre d’un projet de modification ponctuelle de la partie graphique du PAG concluant qu’il n’y aurait pas lieu d’inclure les parcelles litigieuses dans le rapport sur les incidences environnementales, aurait été réutilisée dans le contexte de la refonte globale du PAG sous analyse. Il s’agirait de renseignements utiles conformément à l’article 5 de la loi du 22 mai 2008. Elle précise que l’évaluation de … de 2013 aurait fait partie intégrante de l’évaluation environnementale générale et aurait subi la publication adéquate.
La partie étatique fait valoir qu’il y aurait que deux années entre l’étude … et celle d’… de janvier 2015, de sorte qu’il n’y aurait guère d’évolution de la situation environnementale et que « techniquement », il serait considéré qu’il faudrait six années pour caractériser une évolution de la situation environnementale. Quant aux développements des parties demanderesses relatives au projet du tramway, la partie étatique soutient que la loi du 24 juillet 2014 citée par les demandeurs ne concernerait que le financement dudit projet, alors que les travaux nécessaires en amont en vue de la mise en place du projet de tramway auraient été effectués avant cette date, de sorte que l’étude … aurait pu prendre en compte l’impact du projet tramway. En soulignant que la Ville de Luxembourg aurait bien soumis à une évaluation environnementale sur base de l’article 2 (2) a) de la loi du 22 mai 2008 le plan projeté, sauf à ne pas avoir inclues les parcelles litigieuses dans le rapport sur les incidences environnementales en s’appuyant sur un Umwelterheblichkeitsbericht de … de 2013 réalisé dans le cadre du projet abandonné de modification ponctuelle de 2013, l’Etat fait valoir que la commune aurait bien respecté l’objectif de la loi de ne pas effectuer des redondances dans les études et les coûts. La partie étatique reproche aux demandeurs de ne pas avoir précisé leur moyen relatif à des lacunes du Umwelterheblichkeitsbericht de … de 2013 et que les attestations imprécises versées ne démontreraient pas la présence de chiroptères, d’autant plus que le ministre de l’Environnement n’aurait pas relevé dans son avis du 13 octobre 2016 relatif à l’ampleur et le degré de précision des informations sur le rapport des incidences environnementales qu’il existait une carence caractérisée.
La partie étatique soutient ensuite que le bureau … n’aurait pas été signataire du document, mais aurait seulement eu pour rôle de collecter des informations, qui auraient été analysées, traitées et validées par le bureau …, qui disposerait d’un agrément. Elle rappelle que la Cour administrative aurait précisé à l’occasion de ses arrêts sur le PAG de la commune de Käerjeng que l’incidence de la SUP sur des terrains d’ores et déjà situés en zone constructible ne serait très relative, de sorte que ce serait de manière légitime que le ministre aurait pu considérer que les mesures de suivi assurées par la commune auraient été suffisantes. A défaut, le ministre aurait pu soit ne pas approuver le PAG, ce qui aurait été manifestement disproportionné, alors que la commune aurait respecté l’intégralité des recommandations de la SUP et ce qui aurait retardé l’approbation de tout le PAG, ce qui aurait été contraire à l’intérêt général, soit effectuer une modification du PAG de sa propre initiative, sous peine de commettre un excès de pouvoir, alors que cette intervention aurait privé la Ville de Luxembourg de la possibilité de faire son propre suivi de la SUP comme prescrit par l’article 11 (1) de la loi du 22 mai 2008.
Dans son mémoire en duplique, la partie étatique précise que les parcelles litigieuses auraient fait partie du périmètre d’agglomération et non de la zone verte alors qu’elles auraient été destinées à être urbanisées, de sorte que la question d’une réalisation d’une SUP ne se poserait pas. En outre, elle soutient qu’une étude relative aux chiroptères aurait été effectuée et les conclusions tirées auraient été prises en considération.
35L’administration communale conclut principalement, en se référant aux arrêts de la Cour administrative rendus dans le cadre du PAG de la commune de Käerjeng, qu’une SUP ne serait pas requise à l’intérieur du périmètre d’agglomération, à savoir pour des terrains déjà classés en une zone urbanisée ou une zone destinée à être urbanisée par le précédent PAG, tel qu’il serait le cas pour les parcelles litigieuses. A titre subsidiaire, la partie communale soutient que les parties demanderesses n’invoqueraient aucun grief concret concernant les conclusions de la Umwelterheblichkeitsprüfung de … ou de celle du … ni n’apporteraient-ils une considération environnementale concrète qui aurait pu ou dû être prise en compte en cours de l’élaboration de l’évaluation environnementale. Elle précise que suite aux observations émises lors de l’enquête publique de la SUP, une étude relative aux chiroptères aurait été effectuée et que les conclusions de cette étude auraient été prises en considération. Elle ajoute que dans tous les cas de figure, il conviendrait d’identifier d’abord l’existence d’éventuelles incidences sur l’environnement sur base des critères de l’article 3 de la loi du 22 mai 2008 par le biais d’une Umwelterheblichkeitsprüfung avant de procéder, le cas échéant, à une évaluation des incidences notables identifiées par le biais d’un Umweltbericht. Ainsi, en l’espèce, il aurait été procédé à une Umwelterheblichkeitsprüfung en 2013 qui aurait conclu à l’absence d’incidences notables et le résultat de cette analyse aurait été avisé favorablement par le ministre. Elle soutient que le projet de modification du PAG de 2013 ou le projet de refonte du PAG se trouveraient au même niveau hiérarchique, dans la mesure où ils se situeraient dans un même contexte et la nature des éventuelles incidences environnementales resterait la même tout en confirmant qu’on serait en présence d’un ensemble hiérarchisé de plans au moment où le PAG sera exécuté le biais de PAP NQ.
L’administration communale précise ensuite que la Umwelterheblichkeitsprüfung dressée en janvier 2015 par le bureau d’études … contiendrait en annexe 5 un « Fledermaus-screening » établi par le bureau d’études …. Rien n’interdirait par ailleurs à un bureau d’études agréée, tel que le bureau d’études …, de recourir pour des tâches délimitées à un sous-traitant disposant d’une compétence spécifique dans un domaine particulier, tel qu’en l’espèce le bureau d’études … pour la tâche spécifique d’une étude sur les chiroptères. Au vu de la complexité croissante des études environnementales à réaliser, il serait illusoire d’exiger qu’un bureau d’études agréé soit en mesure de réaliser toutes les études requises à l’aide de collaborateurs internes. Quant aux développements des demandeurs relatifs au tramway, l’administration communale fait valoir que les parties demanderesses seraient dans l’incapacité d’articuler des incidences notables qu’entraînerait le tramway. Elle en conclut que les parties demanderesses n’avanceraient aucun élément concret et convaincant laissant penser qu’une actualisation de l’évaluation aboutirait à une conclusion différente de celle de 2013, d’autant plus que le ministre de l’Environnement aurait donné son avis tant sur l’évaluation de … que sur celle de … et ces avis confirmeraient que le reclassement des parcelles n’aurait pas d’incidences notables sur l’environnement.
Dans son mémoire en duplique, l’administration communale conteste que la Umwelterheblichkeitsprüfung établie par le bureau d’études … en juillet 2013 aurait été « bâclée » en affirmant qu’on ne saurait imposer aux bureaux d’études une obligation de résultat d’identifier toutes espèces animales et végétales présentes sur un site. Elle donne à considérer que les mesures compensatoires identifiées seraient prises en compte dans la planification ultérieure et que l’arrêt de la Cour administrative du 7 février 2017, inscrit sous le numéro 38584C du rôle, ayant confirmé le jugement du tribunal administratif du 7 septembre 2016, inscrit sous le numéro 37287 du rôle, serait intervenu dans le cadre de l’élaboration d’un pan d’occupation du sol, instrument de planification autrement plus précis qu’un PAG, dans la mesure où il pourrait directement être exécuté par une autorisation de construire sans nécessiter l’élaboration préalable d’un plan d’aménagement 36particulier. En l’espèce, on se trouverait dans le cadre d’un ensemble hiérarchisé de plans, le PAG devant être exécuté par le biais de PAP NQ.
Il échet d’abord au tribunal de constater les parties défenderesses argumentent par référence à un arrêt rendu par la Cour administrative le 3 mai 2018, inscrit sous le numéro 40403C du rôle, qu’une SUP n’aurait pas été requise, alors que les parcelles concernées auraient été classées sous l’ancien PAG Joly en une zone urbanisée ou une zone destinée à être urbanisée et seraient maintenues en zone destinée à être urbanisée par le nouveau PAG.
A cet égard, le tribunal constate d’abord que si la Cour administrative a en effet retenu dans son arrêt précité du 3 mai 2018 que du fait qu’« on n’est pas en présence d’une modification de la délimitation du périmètre d’agglomération pour les terrains sous analyse, aucune SUP n’avait en définitive dû être faite pour ces terrains, de sorte qu’en termes de bouclage de boucle, il doit être fait abstraction en tant que telle de la SUP confectionnée pour ces terrains, celle-ci n’ayant point été obligatoire », elle a toutefois nuancé cette conclusion en retenant que de « manière facultative et par référence » il pouvait être renvoyé à la SUP « dans les limites de ce qui est nécessaire pour la délimitation exacte de la ZSU-7a instaurée ».
Au-delà de ces considérations, force est de constater qu’aux termes de l’article 2 de la loi du 22 mai 200821 : « 1. Les plans et programmes visés aux paragraphes 2, 3 et 4 sont soumis préalablement à leur adoption à une évaluation environnementale.
2. Sous réserve du paragraphe 3, une évaluation environnementale est effectuée pour tous les plans et programmes:
a) qui sont élaborés pour les secteurs de l’agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l’énergie, de l’industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l’eau, des télécommunications, du tourisme, de l’aménagement du territoire urbain et rural ou de l’affectation des sols et qui définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive modifiée 85/337/CEE concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement pourra être autorisée à l’avenir, ou b) pour lesquels, étant donné les incidences qu’ils sont susceptibles d’avoir sur des sites, une évaluation est requise en vertu de l’article 12 de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles 3. Les plans et programmes visés au paragraphe 2 qui déterminent l’utilisation de petites zones au niveau local et des modifications mineures des plans et programmes visés au paragraphe 2 ne sont obligatoirement soumis à une évaluation environnementale que lorsque l’autorité responsable du plan ou programme estime, le ministre entendu en son avis, qu’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement. (…) ».
Selon une jurisprudence constante des juridictions administratives les plans d’aménagement, tant général que particulier, tombent sous la définition des « plans et programmes » au sens de la loi du 22 mai 2008. Il s’ensuit que conformément à l’article 2, 1. et 2. de ladite loi, ils doivent obligatoirement faire l’objet d’une étude environnementale préalablement à leur adoption. Seuls des 21 transposant en droit luxembourgeois la directive 2001/42/CE relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement.
37plans et programmes déterminant l’utilisation de petites zones au niveau local et des modifications mineures des plans et programmes visées au paragraphe 2 de l’article 2 de la loi du 22 mai 2008 sont, en principe, exclus de cette obligation, étant encore entendu que la loi du 22 mai 2008 ne prévoit aucune exception à l’obligation d’établir une évaluation environnementale selon le maintien ou non de parcelles dans le périmètre d’agglomération. Etant donné que la refonte globale du PAG de la Ville de Luxembourg n’est pas à considérer comme concernant « de petites zones au niveau local », ni comme « modifications mineures » d’un plan ou programme, ladite refonte n’a évidemment pas pu bénéficier de l’exception visée par l’article 2.3 de la loi du 22 mai 2008 et son adoption a dû être précédée de l’élaboration d’une évaluation environnementale, au sens de l’article 2 1. et 2. de la loi du 22 mai 2008, portant sur l’intégralité du territoire affecté par la refonte globale du PAG et partant a priori sur l’intégralité du territoire de la Ville de Luxembourg, quitte à ce que le rapport sur les incidences environnementales arrive, par la suite, éventuellement à la conclusion de l’absence d’incidences notables sur l’environnement du nouveau PAG sur certaines zones. En effet, dans la mesure où l’ultime objectif de la loi du 22 mai 2008 est la contribution à la protection de l’environnement, l’exemption des parcelles incluses dans le périmètre d’agglomération sous un ancien PAG et maintenues dans ledit périmètre par le nouveau PAG de l’obligation d’élaborer une étude environnementale reviendrait à dire que tout élément naturel situé à l’intérieur du périmètre d’agglomération ne mériterait pas de protection.
Ce constat est conforté par les développements de la Cour de justice de l’Union européenne dans son arrêt C-160/17 du 7 juin 2018 dans lequel ladite juridiction a retenu qu’étant donné que la finalité de la directive 2001/42/CE consiste à garantir un niveau élevé de protection de l’environnement, les dispositions qui délimitent son champ d’application, et notamment celles énonçant les définitions des actes envisagés par celle-ci, doivent être interprétées d’une manière large22 et par l’arrêt C-290/15 du 27 octobre 2016 soulignant qu’il convient d’éviter de possibles stratégies de contournement des obligations énoncées par la directive 2001/42 pouvant se matérialiser par une fragmentation des mesures, réduisant ainsi l’effet utile de cette directive23.
Il s’ensuit que le classement des parcelles litigieuses était soumis à l’élaboration d’une SUP.
Le tribunal relève ensuite qu’aux termes de l’article 5 de la loi du 22 mai 2008, « Lorsqu’une évaluation environnementale est requise en vertu de l’article 2, un rapport sur les incidences environnementales est élaboré, dans lequel les incidences notables probables de la mise en œuvre du plan ou du programme, ainsi que les solutions de substitution raisonnables tenant compte des objectifs et du champ d’application géographiques du plan ou du programme, sont identifiées, décrites et évaluées suivant les dispositions de l’alinéa 2. (…) ».
Il s’ensuit que dans la mesure où le projet de refonte globale du PAG de la Ville de Luxembourg devait faire l’objet d’une évaluation environnementale, un rapport sur les incidences environnementales identifiant, décrivant et évaluant les incidences notables probables de la mise en œuvre du plan ou du programme, ainsi que les solutions de substitution raisonnables tenant compte des objectifs et du champ d’application géographiques du plan ou du programme devait être élaboré.
22 CJUE, C-160/17 du 7 juin 2018, Raoul Thybau e.a. c/ Région wallonne, point 40.
23 CJUE, C-290/15 du 27 octobre 2016, Patrice D’Oultremont e.a. c/ Région wallonne, point 48 et, en ce sens, CJUE C-567/10 du 22 mars 2012, Inter-Environnement Bruxelles e.a., point 30.
38Il ressort néanmoins des explications des parties que les parcelles litigieuses ont fait l’objet d’un projet de modification ponctuelle du PAG Joly en 2013 et qu’elles n’ont pas été intégrées dans le rapport sur les incidences environnementales. Ainsi, dans la mesure où le projet de refonte globale du PAG aurait repris le reclassement des parcelles en question, tel qu’envisagé par le susdit projet abandonné de modification ponctuelle du PAG JOly, et où, dans le cadre de sa « Umwelterheblichkeitsprüfung » réalisée en 2013, la société … aurait, par rapport à ce reclassement, conclu à l’absence d’incidences notables sur l’environnement, l’entreprise … aurait, dans le cadre de sa propre « Umwelterheblichkeitsprüfung » relative à la refonte globale du PAG, retenu, sur base de la précédente « Umwelterheblichkeitsprüfung » réalisée par la société …, qu’il n’y aurait pas lieu d’inclure les parcelles concernées dans le rapport sur les incidences environnementales.
Il est constant en cause qu’un tel rapport sur les incidences environnementales a effectivement été élaboré dans le cadre de la procédure d’adoption du nouveau PAG de la Ville de Luxembourg.
Il est également constant en cause que par courrier du 10 juillet 2014 adressé à la Ville de Luxembourg, le ministre de l’Environnement a, dans le contexte de la modification ponctuelle de la partie graphique du PAG Joly concernant les parcelles litigieuses décidé que « J’estime que des incidences notables sur l’environnement dans le sens de la loi du 22 mai relative à l’évaluation des incidences de certains plan et programmes sur l’environnement ne sont pas prévisibles à travers la mise en œuvre du projet et que partant celui-ci ne nécessite pas une analyse plus approfondie dans le cadre d’un rapport sur les incidences environnementales (…). Je me permets de vous rappeler que conformément aux dispositions de l’article 2.7. de la prédite loi la décision de ne pas réaliser une évaluation environnementale ainsi que les raisons qui auront abouti à cette conclusion devront faire l’objet d’une publicité adéquate. ». Il est finalement constant en cause que la modification ponctuelle n’a pas été poursuivie et que la décision de ne pas réaliser une évaluation environnementale n’a pas fait l’objet d’une publicité.
S’agissant d’abord de l’argumentation des demandeurs selon laquelle la commune n’aurait pas pu se baser dans le cadre de la refonte du PAG et dans l’élaboration de sa strategische Umweltprüfung sur la Umwelterheblichkeitsprüfung effectuée dans le cadre de la procédure de modification ponctuelle du PAG n’ayant pas été finalisée, il échet de rappeler que l’article 6 de la loi du 22 mai 2008 que « 1. Le rapport sur les incidences environnementales élaboré conformément aux dispositions de l’article 5, alinéa 1 contient les informations qui peuvent être raisonnablement exigées, compte tenu des connaissances et des méthodes d’évaluation existantes, du contenu et du degré de précision du plan ou du programme, du stade atteint dans le processus de décision et du fait qu’il peut être préférable d’évaluer certains aspects à d’autres stades de ce processus afin d’éviter une répétition de l’évaluation. » et que « 2. Les renseignements utiles concernant les incidences des plans et programmes sur l’environnement obtenus à d’autres niveaux de décision ou en vertu d’autres dispositions peuvent être utilisés pour fournir les informations énumérées à l’article 5. », de sorte que la commune a pu a priori se servir de la Umwelterheblichkeitsprüfung de 2013 dans le cadre de la refonte du PAG de la commune, d’autant plus que la période de deux années entre la Umwelterheblichkeitsprüfung de … et la Umwelterheblichkeitsprüfung entamée en janvier 2015 par … dans le cadre de la refonte du PAG ne saurait, à défaut de contestations plus circonstanciées à cet égard, être considérée comme étant particulièrement longue. Il ressort encore du document Strategische Umweltprüfung für den PAG – Umweltbericht – Phase 2 – Detail- und Ergänzungsprfung – Stellungnahme zu den Reklamationen de … d’avril 2017 que « Aus fachlicher 39Sicht behalten die Aussagen der vorliegenden Studie etwa 6 Jahre ihre Gültigkeit. (…) ». Ce constat se trouve conforté par le considérant n° 9 de la directive 2001/42/CE transposée en droit national luxembourgeois par la loi du 22 mai 2008, selon lequel « (…) en vue d’éviter les évaluations faisant double emploi, les Etats membres devraient tenir compte, le cas échéant, du fait que les évaluations seront effectuées à différents niveaux d’un ensemble hiérarchisé de plans et de programmes. », étant précisé que l’opportunité de rationaliser les informations ainsi recueillies ne se limite pas à une situation d’un ensemble hiérarchisé de plans mais se prolonge également aux informations obtenues dans « le cadre d’autres systèmes de prise de décision »24.
Quant aux contestations des parties demanderesses ayant trait à un défaut de publication de la Umwelterheblichkeitsprüfung effectuée dans le cadre de la modification ponctuelle du PAG de 2013, il échet de rappeler que selon l’article 7 de la Convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, faite à Aarhus (Danemark) le 25 juin 1998 et approuvée par une loi du 31 juillet 2005, désignée ci-après par « la Convention d’Aarhus », « Chaque Partie prend les dispositions pratiques et/ou autres voulues pour que le public participe à l’élaboration des plans et des programmes relatifs à l’environnement dans un cadre transparent et équitable, après lui avoir fourni les informations nécessaires. Dans ce cadre, les paragraphes 3, 4 et 8 de l’article 6 s’appliquent. Le public susceptible de participer est désigné par l’autorité publique compétente, compte tenu des objectifs de la présente Convention. Chaque Partie s’efforce autant qu’il convient de donner au public la possibilité de participer à l’élaboration des politiques relatives à l’environnement ». Les paragraphes 3, 4 et 8 de l’article 6 de ladite convention sont libellés comme suit : « 3. Pour les différentes étapes de la procédure de participation du public, il est prévu des délais raisonnables laissant assez de temps pour informer le public conformément au paragraphe 2 ci-dessus et pour que le public se prépare et participe effectivement aux travaux tout au long du processus décisionnel en matière d’environnement.
4. Chaque Partie prend des dispositions pour que la participation du public commence au début de la procédure, c’est-à-dire lorsque toutes les options et solutions sont encore possibles et que le public peut exercer une réelle influence. (…) 8. Chaque Partie veille aussi à ce que, une fois que la décision a été prise par l’autorité publique, le public en soit promptement informé suivant les procédures appropriées. Chaque Partie communique au public le texte de la décision assorti des motifs et considérations sur lesquels ladite décision est fondée. ».
Selon l’article 7 de la loi du 22 mai 2008 « Avant que le plan ou programme ne soit adopté ou ne soit soumis à la procédure législative ou réglementaire, le projet de plan ou de programme et le rapport sur les incidences environnementales sont mis à la disposition du public. L'objet, un résumé du projet de plan ou programme ainsi qu'un résumé non technique du rapport sur les incidences environnementales sont publiés sur support informatique.
24 « Les informations obtenues dans le cadre d’autres systèmes de prise de décision, comme les plans et programmes dans d’autres secteurs, ou suite à la mise en œuvre d’une (sic) autre instrument législatif communautaire tel que la directive-cadre relative à l’eau (2000/60/CE) peuvent également être utilisées ». Commission européenne : Guidance on the implementation of Directive 2001/42/EC on the assessment of the effects of certain plans and programmes on the environment - « Mise en oeuvre de la directive 2001/42 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l‘environnement », p. 30.
40 L'objet du projet de plan ou de programme et du rapport sur les incidences environnementales y relatif est porté à la connaissance du public simultanément avec la publicité sur support électronique par voie de publication par extrait dans au moins quatre quotidiens imprimés et publiés au Luxembourg. A dater du jour de cette publication, le dossier complet peut être consulté auprès de l'autorité responsable du plan ou programme pendant trente jours par tous les intéressés qui peuvent émettre leurs observations et suggestions par le biais dudit support électronique ou transmettre leurs observations écrites directement à l'autorité responsable du plan ou programme au plus tard dans les quarante-cinq jours qui suivent le début de la publication. La publicité sur support électronique peut être complétée par des réunions d'information convoquées à l'initiative de l'autorité responsable du plan ou programme.
2. Simultanément aux formalités dont question au paragraphe 1, les projets de plans ou de programmes ainsi que le rapport afférent sur les incidences environnementales sont à soumettre pour avis au ministre ainsi qu'aux autres autorités ayant des responsabilités spécifiques en matière d'environnement qui ont été entendus en leur avis en vertu des dispositions de l'article 6, paragraphe 3. ».
Etant donné que dans le cadre de la publication en date du 20 juin 2016 de la Umwelterheblichkeitsprüfung de … dans le contexte de la refonte du PAG, il a été porté à la connaissance du public que « Es werden drei Kategorien von Flächen unterschieden, die a prioro keinen Umweltbericht erfordern und die nicht in der UEP näher behandelt werden : (…) 3.) Flächen, für die im Rahmen einer punktuellen PAG-Modification bereits eine SUP durchgeführt wurde. Dazu zählen: (…) PAP Avenue J.F. Kennedy Sud, Kirchberg »25 et le document Strategische Umweltprüfung – Umwelterheblichkeitsprüfung zur geplanten Umänderung des PAG im Bereich zwischen der Avenue J.F. Kennedy und dem Quartier Weimershof im Luxemburg – Kirchberg de juillet 2013 a été annexé, les contestations des demandeurs sont à rejeter à cet égard, d’autant plus que Madame … a réclamé contre la SUP par courrier du 4 août 2016.
Concernant les contestations des demandeurs ayant trait au fait que le bureau … ne disposait pas de l’agrément ministériel au stade de l’élaboration de l’étude environnementale en lui reprochant d’être passé « à côté de la détection de chauves-souris dont la présence [serait] évidente », il échet de rappeler que selon l’alinéa 2 du 1er paragraphe de l’article 6 de la loi du 22 mai 2008 « Le rapport [sur les incidences environnementales] est élaboré par une personne physique ou morale, privée ou publique, agréée en vertu de la loi du 21 avril 1993 relative à l’agrément de personnes physiques ou morales privées ou publiques, autres que l’Etat, pour l’établissement de tâches techniques d’étude et de vérification dans le domaine de l’environnement [,ci-après désignée par « la loi du 21 avril 1993 »]. ». Force est au tribunal de constater que ni la loi du 22 mai 2008, ni la loi du 21 avril 1993 n’excluent la possibilité pour le bureau d’études disposant de l’agrément prévu par la loi du 21 avril 1993 de recourir pour des tâches précises, telle qu’une étude sur les chiroptères, à un sous-traitant disposant d’une compétence spécifique dans un domaine particulier, dont le rapport sera intégré au rapport final du bureau d’études agréé. Ainsi, à défaut de contestations plus circonstanciées à cet égard et dans la mesure où « les objets d’études et les problèmes à analyser deviennent de plus en 25 Strategische Umweltprüfung für den PAG der Stadt Luxemburg – Umweltbericht Teil 1 – Prüfung der Umwelterheblichkeit (UEP), p.64 41plus compliqués et spécifiques, [de sorte que] les techniques à utiliser le deviennent aussi »26, rien ne s’oppose à ce que le bureau d’études … rédige un rapport dans un domaine spécifique qui fait ensuite partie intégrante du rapport du bureau d’études …. Les contestations des demandeurs à cet égard encourent à leur tour le rejet.
Quant à la définition de la notion d’incidence notable ou d’atteinte significative à l’environnement, le tribunal relève qu’eu égard aux objectifs de la loi du 19 janvier 2004 – « la sauvegarde du caractère, de la diversité et de l’intégrité de l’environnement naturel, la protection et la restauration des paysages et des espaces naturels, la protection de la flore et de la faune et de leurs biotopes, le maintien et l’amélioration des équilibres et de la diversité biologiques, la protection des ressources naturelles contre toutes les dégradations et l’amélioration des structures de l’environnement naturel »27 - un risque d’atteinte significative à une espèce protégée par ladite loi, voire à l’habitat d’une telle espèce, est à considérer comme risque d’incidence notable sur l’environnement28.
En l’espèce, les demandeurs estiment que le PAG aurait des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison du fait qu’il risquerait de porter une atteinte significative à l’habitat de certaines espèces de chauve-souris et qu’il n’y aurait pas eu d’analyse de l’effet cumulé avec le projet du tramway.
Aux termes de l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004 : « Il est interdit de réduire, de détruire ou de changer les biotopes tels que mares, marécages, marais, sources, pelouses sèches, landes, tourbières, couvertures végétales constituées par des roseaux ou des joncs, haies, broussailles ou bosquets. Sont également interdites la destruction ou la détérioration des habitats de l’annexe 1 et des habitats d’espèces des annexes 2 et 3. ». A l’annexe 2 de la loi du 19 janvier 2004 figure sous la catégorie générale des mammifères, la sous-catégorie des chauves-souris et plus particulièrement l’espèce du « Myotis myotis (Grand Murin, Großes Mausohr) ». Force est dès lors au tribunal de constater que la chauve-souris du type Grand Murin est une espèce animalière dont l’habitat est protégé par l’article 17 de la loi du 19 janvier 2004.
En ce qui concerne la question de la présence du Grand Murin sur les parcelles litigieuses, il ressort du document Strategische Umweltprüfung für den PAG – Umweltbericht – Phase 2 – Detail-
und Ergänzungsprüfung – Stellungnahme zu den Reklamationen de … d’avril 2017 que «Fledermausuntersuchen sind im Laufen und deren Resultate müssen bei der Erstellung des PAP Rechnung getragen werden ».
Il ressort du Abschlussbericht de … de juin 2017 établi à la suite de la délibération du conseil communal, mais avant la décision ministérielle du 5 octobre 2017, que « Im Untersuchungsgebiet wurden 3 Fledermausarten nachgewiesen (…). Dabei handelt es sich hauptsächlich um die Zwergfledermaus (Pipistrellus pipistrellus), vereinzelt den Großen Abendsegler (Nyctalus noctula) und lediglich 2 x das Große Mausohr (Myotis myotis). Während die Zwergfledermaus bei allen 26 Doc. Parl n° 3215 à la base de la loi du 21 avril 1993, Rapport de la Commission de l’Environnement, p. 2.
27 article 1er de la loi du 19 janvier 2004 28 v. par analogie : Conseil d’Etat belge, 18 février 2015, Poli, n° 230.237, ainsi que Conseil d’Etat belge 23 février 2015, De Limburg Stirum et consorts, n°230.267.
42Begehungen recht zahlreich in Erscheinung trat, konnten vom Großen Abendsegler und vom Großen Mausohr nur Einzeltiere detektiert / beobachtet werden (…).
Die Zwergfledermaus konnte im gesamten Gebiet nachgewiesen werden (…). Auch in dem angrenzenden Wohngebiet und bis dicht an die Avenue John F. Kennedy ist sie aktiv.
Die Nachweise des Großen Mausohrs und des Großen Abendseglers beschränken sich jedoch auf die Mähwiesen, die von ihnen sporadisch als Jagdrevier genutzt werden.
Bei den Kontrollen der Gebäude (von außen, soweit möglich einzelne Scheunen auch von innen) gab es keine Hinweise auf Fledermausquartiere. »29 Il ressort dudit rapport que le Grand Murin n’a été détecté certes que deux fois pendant les cinq visites des parcelles entre le 8 avril et le 23 mai 201730, mais que son état de conservation au Luxembourg est insuffisant. L’état de conservation de la Pipistrelle, ayant été vue régulièrement lors de ces visites, est favorable, tandis que la Grande Noctule qui est listée comme étant menacée avec un état de conservation défavorable et bénéficie à ce titre d’une protection accrue, n’a été vue que sporadiquement.31 Ledit rapport a encore retenu que « Bei den Begehungen hat sich herausgestellt, dass die geplante Bebauungszone von verschiedenen Fledermausarten als Jagdrevier genutzt wird. Vor allem entlang von Hecken und Gebüschstrukturen aber auch über Wiesenflächen wird gejagt. Während die eher strukturgebundene Zwergfledermaus auch dicht über Gärten oder an Straßenlaternen ihre Nahrung sucht, jagt der Große Abendsegler oft in größerer Höhe in offenen Bereichen, wie z.B. über Lichtungen oder Wiesen. Die Nahrungssuche findet aber durchaus auch in niedrigerer Höhe (z.B.
um Straßenlampen) statt. Das Große Mausohr benötigt zum Jagen Flächen mit freiem Zugang zum Boden (z.B. hallenartig ausgeprägte Laubwälder oder auch Mähwiesen, wie im vorliegenden Fall mit 2maligen Feststellung). Insofern stellte die Bebauung einen Eingriff in das Jagdrevier und in den Lebensraum der beiden großen Fledermausarten dar.
Die Überbauung eines bedeutenden Jagdgebietes, sowie die Unterbrechung von wichtigen Leitstrukturen, die die Erreichbarkeit von bedeutenden Jagdgebieten einschränken, können zum Verlust der Funktionsfähigkeit einer Fortpflanzungs-und Ruhestätte führen.
In Bezug auf die Zwergfledermaus mit vermuteten Quartieren im nahen (wenige 100 bis 1.000m) Umfeld handelt es sich um essentielle Jagdgebiete ».
Le rapport conclut que « Die Fläche wird als gelb eingestuft, da eine wertgebende Art (Großes Mausohr) kurzzeitig nachgewiesen werden konnte, diese scheint die Grünlandbereiche zumindest sporadisch / kurzzeitig als Teil des sehr viel größeren Jagdreviers zu nutzen. Zudem wurde eine intensive Nutzung der Gehölzstrukturen der siedlungsfolgenden Art Zwergfledermaus festgestellt, die auf gute Jagdhabitate innerhalb ihres vglw. kleinen Aktionsraumes (um ca. 2,5 km Durchmesser) angewiesen ist. »32 Il échet partant de constater qu’il ressort des documents versés en cause que la chauve-
souris du type Grand Murin, espèce dont l’habitat est protégé par les dispositions de la loi du 19 janvier 2004, est présente sur les parcelles litigieuses.
29 Abschlussbericht de … de juin 2017, page 9.
30 Abschlussbericht de … de juin 2017, page 7.
31 Abschlussbericht de … de juin 2017, pages 10 et 11.
32 Abschlussbericht de … de juin 2017, page 15.
43Force est de constater que l’Umwelterheblichkeitprüfung établie en juillet 2013 par le bureau d’études … sur demande de la Ville de Luxembourg conclut que « Die vorliegende Umwelterheblichkeitsprüfung (Phase 1 der SUP) kommt zu dem Ergebnis, dass für die Schutzgüter Bevölkerung und Gesundheit des Menschen, Pflanzen/Tiere/biologische Vielfalt, Boden, Wasser, Klima/Luft, Landschaft, Kultur- und Sachgüter keine erheblichen Auswirkungen vorliegen und damit die Pflicht zur Erstellung eines Ummweltberichts (Phase 2 der SUP) nicht vorliegt » en retenant pour le « Schutzgut Pflanzen, Tiere, biologische Vielfalt » que « Im Falle einer Realisierung des Planvorhabens geht die Fläche als Pflanzenstandort weitestgehend verloren. Aus der Karte der „Kartierung der Artikel 17 Biotope innerhalb des Bauperimeters“ vom … (Januar 2012) geht hervor, dass sich auf dem Plangebiet zwei Einzelbäume, zwei Schnitthecken, zwei Feldhecken sowie eine Streuobstwiese befinden, die nach dem Naturschutzgesetz vom „19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles“ geschützt sind. Der Fonds d’urbanisation et d’aménagement du Plateau de Kirchberg wird versuchen, die geschützten Biotope zu erhalten und sie sinnvoll in das Projektvorhaben zu integrieren. Falls dies im Rahmen des Projekts nicht möglich sein sollte, wird eine Kompensierungstudie durchgeführt und versucht, die zerstörten Biotope auf dem Plangebiet zu kompensieren. Die auf dem Plangebiet bestehenden Biotoptypen wurden bereits ermittelt. Die Studie liegt dem Dossier bei.
Die zwei „zones de servitude d’urbansiation“, wovon der sich die eine in der Mitte des Plangebiets (Bezeichnung „Promenade des Fleurs“) und die andere im Süden des Plangebiets (an den rückliegenenden Gartenanlagen der Einwohner des Quartiers Weimershof) befinden, bestimmen, dass diese Bereiche frei von jeglicher Bebauung bleiben und ausschließlich der öffentlichen Parkanlage bzw. der privaten Gartenanlage vorbehalten sind. ».
Ainsi, ledit rapport reste muet sur la présence d’une quelconque espèce animale et plus particulièrement sur la présence de chiroptères et n’évoque aucune raison pour laquelle aucune analyse à ce titre n’a été entamée. Les parties défenderesses ne fournissent aucune explication à cet égard, mais l’administration communale soutient qu’à supposer que la Umwelterheblichkeitsprüfung ait été lacunaire, la consultation publique menée aurais permis de révéler cette lacune et aurait abouti à l’établissement d’une enquête supplémentaire dont les conclusions ne remettent pas en cause le fait que le site peut être urbanisé, en soulignant que les mesures compensatoires identifiées seraient prises en compte dans la planification ultérieure.
Or, si le tribunal pourrait, le cas échéant, admettre la possibilité par le bureau d’études en charge de fournir des informations complémentaires isolées destinées à expliquer des données contenues dans la Umwelterheblichkeitsprüfung, il en va cependant différemment des informations venant combler des lacunes importantes dudit document, tel que c’est le cas en l’espèce où la présence d’animaux sur le site n’a tout simplement pas été recherchée, hypothèse dans laquelle ces informations doivent prendre la forme d’une évaluation sommaire des incidences sur l'environnement complémentaire, soumise aux mêmes garanties procédurales et notamment, d’enquête publique33. Il est constant en cause que le rapport d’… de juin 2017, ordonné par … n’a pas fait l’objet d’une telle publication, de sorte que la procédure est viciée à cet égard.
33 Dans ce sens : Conseil d’Etat belge, 28 mars 2018, n° 241141 du rôle. Les lacunes de l’étude d’incidences ayant fait l’objet d’un avis complémentaire concernaient « l’historicité de la forêt, les bryophytes et les lichens, ainsi que l’empierrement réalisé autour des éoliennes », qui selon le Conseil d’Etat, ne présentent pas de caractère important, qui aurait nécessité l’organisation d’une nouvelle enquête publique à la suite de cet avis.
44Force est dès lors au tribunal de conclure que, d’un côté, les informations et documents dont disposait le conseil communal au moment de la prise de la décision déférée n’étaient pas complets – étant donné qu’ils n’ont notamment pas révélé la présence de la chauve-souris du type du Grand Murin sur les parcelles litigieuses – et que partant ils ne lui permettaient pas d’évaluer en connaissance de cause les effets du PAG sur les habitats de certaines espèces animales protégées par la loi du 19 janvier 2004 et, d’un autre côté, en ne soumettant pas le rapport d’… de juin 2017, qui n’est pas de nature à suppléer aux carences de la Umwelterheblichkeitsprüfung de 2013, à l’enquête publique, la procédure d’élaboration de l’étude environnementale a été viciée.
Dans la mesure où, tel que retenu ci-avant, la procédure d’élaboration d’une étude environnementale s’inscrit nécessairement dans le cadre de la procédure d’adoption d’un PAG, de sorte qu’un vice constaté au niveau de la procédure d’élaboration de l’étude environnementale peut affecter la légalité de la procédure d’adoption du PAG34et, dans la mesure où en l’espèce il a été retenu que la procédure d’élaboration de l’étude environnementale est viciée et que, par ailleurs, ce vice n’est pas susceptible d’être réparé au niveau contentieux, le tribunal est amené à conclure que les décisions déférées relatives à l’adoption de la refonte du PAG de la Ville de Luxembourg sont affectées d’un vice de procédure et encourent l’annulation, sans qu’il n’y ait lieu d’analyser les autres moyens avancés par les demandeurs, cet examen devenant surabondant.
Etant donné que l’illégalité ainsi constatée ne concerne que le site litigieux, les décisions d’adoption et d’approbation prises respectivement par le conseil communal et par le ministre n’encourent l’annulation qu’en ce qui concerne le classement des parcelles visées, conformément à la maxime « potius ut valeat quam ut pereat », en vertu de laquelle il y a lieu de faire valoir pour autant que possible les dispositions réglementaires prises plutôt que de les voir périr.
- Indemnité de procédure La demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de … euros telle que formulée par les demandeurs en application de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, aux termes duquel « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine », est à rejeter, les conditions légales afférentes n’étant pas remplies en cause.
Il en est de même de la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de … euros formulée par la partie étatique, étant donné qu’elle omet de préciser en quoi il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais non compris dans les dépens.
Quant à la demande de distraction des frais au profit du mandataire de la partie étatique qui la sollicite, affirmant en avoir fait l’avance, il convient de rappeler qu’il ne saurait être donné suite à la demande en distraction des frais posée par le mandataire d’une partie, pareille façon de procéder n’étant point prévue en matière de procédure contentieuse administrative35.
34 Trib.adm, 30 juillet 2014, n° 33181 du rôle, confirmé par Cour adm, 11 décembre 2014, n° 35167C du rôle, Pas.
adm. 2018, V° Urbanisme, n° 192.
35 Trib. adm. 14 février 2011, n° 11607 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Procédure contentieuse, n° 1094 et les autres références y citées.
45 Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
déclare le recours en annulation irrecevable dans le chef de Monsieur … en ce qu’il vise la décision du conseil communal du 28 avril 2017 et la décision du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 ;
déclare le recours en annulation irrecevable, dans la mesure où il vise la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 13 juin 2016 ;
pour le surplus, reçoit le recours en annulation en la forme ;
au fond, le déclare partiellement justifié, parant annule la décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017, la décision du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 et la décision du ministre de l’Environnement du 6 octobre 2017 dans l’unique mesure où elles s’appliquent aux parcelles n° … et n° … appartenant au Fonds d’urbanisation et d’aménagement du Plateau de Kirchberg ;
en déboute pour le surplus ;
rejette la demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure de … euros telle que formulée par les demandeurs ;
rejette la demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure de … euros telle que formulée par l’Etat ;
condamne l’administration communale de la Ville de Luxembourg, l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg et le Fonds d’Urbanisation et d’Aménagement du Plateau de Kirchberg aux frais et dépens.
Ainsi jugé par:
Françoise Eberhard, vice-président, Daniel Weber, juge, Michèle Stoffel, juge, et lu à l’audience publique du 22 juillet 2020 par le vice-président, en présence du greffier en chef Xavier Drebenstedt.
s. Xavier Drebenstedt s. Françoise Eberhard Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 27 juillet 2020 Le greffier du tribunal administratif 46