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08/06/2020 | LUXEMBOURG | N°40642

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 juin 2020, 40642


Tribunal administratif N° 40642 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 janvier 2018 2e chambre Audience publique du 8 juin 2020 Recours formé par Monsieur … et consort, …, contre deux décisions du conseil communal de la Ville de Luxembourg et deux décisions du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général et en matière de plan d’aménagement particulier

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 40642 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 16 janvier 2018 par Maître Marc Thewes, avocat à la Cour, i

nscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à ...

Tribunal administratif N° 40642 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 janvier 2018 2e chambre Audience publique du 8 juin 2020 Recours formé par Monsieur … et consort, …, contre deux décisions du conseil communal de la Ville de Luxembourg et deux décisions du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général et en matière de plan d’aménagement particulier

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 40642 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 16 janvier 2018 par Maître Marc Thewes, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, et de Madame …, demeurant à L-…, tendant à l’annulation de :

« 1) La délibération du Conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption du nouveau projet d’aménagement général de la Ville (…) 2) La délibération du Conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption des plans d’aménagement particuliers quartier existant (…) 3) La décision du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 portant approbation de la délibération citée sub 1 (…) 4) La décision du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 portant approbation des projets d’aménagement particuliers quartiers existants, décision publiée le 19 octobre 2017. » Vu l'exploit de l'huissier de justice suppléant Laura Geiger, en remplacement de l’huissier de justice Carlos Calvo, demeurant à Luxembourg, du 19 janvier 2018, portant signification de ce recours à l'administration communale de la Ville de Luxembourg, établie à L-1648 Luxembourg, 42 Place Guillaume II, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonction ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 5 février 2018 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F. Kennedy, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B186371, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Christian Point, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

1Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 19 février 2018 par Maître Albert Rodesch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu la requête en prorogation des délais pour déposer le mémoire en réponse ainsi que le mémoire en duplique, présentée par Maître Albert Rodesch, pour compte de l’Etat du Grand-

Duché de Luxembourg, en date du 22 février 2018 ;

Vu les accords de toutes les autres parties avec la mesure sollicitée ;

Vu les avis des 8 et 12 mars 2018 du tribunal administratif fixant les délais pour déposer les mémoires en réponse, réplique et duplique ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 28 juin 2018 par Maître Albert Rodesch, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 29 juin 2018 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 24 octobre 2018 par Maître Marc Thewes, au nom des parties demanderesses ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 28 janvier 2019 par Maître Albert Rodesch, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 1er février 2019 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ana-Lisa Franco Ferro, en remplacement de Maître Marc Thewes, Maître Paul Schintgen, en remplacement de Maître Albert Rodesch, et Maître Martial Barbian, en remplacement de Maître Christian Point en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 30 septembre 2019 ;

Vu l’avis du tribunal administratif du 1er octobre 2019 invitant les parties demanderesses à prendre position quant à la portée géographique de leur recours en annulation et, le cas échéant, quant à l’opportunité de signifier le recours à des tiers intéressés et refixant l’affaire au 14 octobre 2019 ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 7 octobre 2019 par Maître Marc Thewes, au nom des parties demanderesses ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 11 octobre 2019 par Maître Albert Rodesch, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

2Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 14 octobre 2019 par la société Arendt & Medernach SA, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause ainsi que les décisions attaquées ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport complémentaire, ainsi que Maître Ana-Lisa Franco Ferro, en remplacement de Maître Marc Thewes, Maître Paul Schintgen, en remplacement de Maître Albert Rodesch, et Maître Martial Barbian, en remplacement de Maître Christian Point en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 14 octobre 2019.

Lors de sa séance publique du 13 juin 2016, le conseil communal de la Ville de Luxembourg, ci-après désigné par le « conseil communal », se déclara d’accord, en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet 2004 », « (…) pour lancer la procédure d’adoption du nouveau projet d’aménagement général (PAG) de la Ville de Luxembourg, parties écrite et graphique accompagnées des documents et annexes prescrits par la législation y relative (…) » et « (…) charge[a] le collège des bourgmestre et échevins de procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain et à l’article 7 de la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement (…) ».

Le 14 juin 2016, le collège des bourgmestre et des échevins de la Ville de Luxembourg, ci-

après désigné par « le collège des bourgmestre et échevins », se déclara d’accord, en vertu de l’article 30, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, pour « (…) engager la procédure d’adoption des premiers plans d’aménagement particuliers « quartiers existants » de la Ville de Luxembourg, parties écrite et graphique et de les soumettre à la procédure d’adoption en les déposant à l’inspection du public et en les transmettant pour avis à la cellule d’évaluation de la Commission d’aménagement instituée auprès du Ministère de l’Intérieur ainsi qu’au Ministère de l’environnement et à la Direction de la Santé (…) ».

Par courrier du 18 juillet 2016, Monsieur et Madame …, déclarant agir en tant que propriétaires de la parcelle référencée au cadastre sous le numéro …, ci-après désignée par « la parcelle … », située au …, soumirent au collège des bourgmestre et échevins des objections à l’encontre de ces projets d’aménagement général et particulier.

Lors de sa séance publique du 28 avril 2017, le conseil communal, d’une part, statua sur les objections dirigées à l’encontre du projet d’aménagement général et, d’autre part, adopta ledit projet, « (…) tel qu’il a été modifié suite aux réclamations et avis ministériels reçus (…) ».

Parallèlement et lors de la même séance publique, le conseil communal, d’une part, statua sur les objections dirigées à l’encontre des projets d’aménagement particulier « quartier existants » et, d’autre part, adopta les parties graphiques et la partie écrite de ces derniers, « (…) sous [leur] forme revue et complétée (…) ».

3 Par courrier du 19 mai 2017, Monsieur … et Madame …, ci-après désignés par « les consorts … », introduisirent auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », une réclamation à l’encontre des susdites délibérations du conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption des projets d’aménagement général et particulier « quartier existant » et ayant statué sur les objections dirigées par les administrés à l’encontre de ces mêmes projets.

Par décision du 5 octobre 2017, le ministre approuva la délibération, précitée, du conseil communal du 13 juin 2016, de même que celle du 28 avril 2017 portant adoption du projet d’aménagement général, tout en statuant sur les réclamations lui soumises, en déclarant fondées une partie de celles-ci et en apportant, en conséquence, certaines modifications aux parties graphique et écrite du plan d’aménagement général (« PAG »), la réclamation introduite par les consorts … ayant, cependant, été déclarée non fondée, en son volet visant le projet d’aménagement général, et irrecevable, en son volet visant le projet d’aménagement particulier « quartier existant » couvrant le fonds litigieux. Cette décision est libellée comme suit :

« (…) Ad réclamation … et … (rec 113) Les réclamants contestent le classement en « zone mixte urbaine [MIX-u-f] » de fonds sis à Hollerich, et plus particulièrement de leur maison d'habitation située au ….

Le classement en « zone mixte [MIX-u] » des fonds litigieux est pourtant parfaitement justifié autour d'un axe important tel que la …. Une zone destinée uniquement à des fins d'habitation ne s'avère être nullement adéquate en ces endroits, sachant que l'assurance d'une bonne mixité des fonctions y est indispensable et conforme à l'article 2 de la Loi.

Partant, la réclamation est non fondée.

En outre, les doléances formulées par les réclamants quant aux dispositions du plan d'aménagement particulier « quartier existant » (PAP QE) couvrant les fonds litigieux ne sont pas recevables dans le présent contexte. En effet, le Législateur n'a pas prévu la possibilité d'introduire une réclamation auprès du ministre de l'Intérieur contre le plan d'aménagement particulier « quartier existant » (PAP QE) alors qu'il a uniquement prévu dans l'article 16 de la Loi que les réclamants puissent exclusivement porter leurs objections contre le PAG devant le ministre de l'Intérieur. » Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 16 janvier 2018, les consorts … ont fait introduire un recours tendant à l’annulation de (i) « La délibération du Conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption du nouveau projet d’aménagement général de la Ville », (ii) « La délibération du Conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption des projets d’aménagement particuliers quartier existant », (iii) « La décision du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 portant approbation de la délibération citée sub 1 (…) » et (iv) « La décision du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 portant approbation des projets d’aménagement particuliers quartiers existants, décision publiée le 19 octobre 2017 ».

A titre liminaire et avant de procéder à l’analyse du recours sous examen, il échet de préciser qu’à l’audience publique des plaidoiries, sur question afférente du tribunal, les 4litismandataires des différentes parties en cause n’ont soulevé aucune contestation relative à la notification entre eux de l’ensemble des mémoires respectifs, par actes d’avocat à avocat, au cours de la procédure contentieuse.

I) Quant à la compétence Il y a lieu de retenir que les décisions sur les projets d’aménagement, lesquelles ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’elles concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. Les décisions d’approbation du ministre participent au caractère réglementaire des actes approuvés1, étant précisé qu’en ce qui concerne la procédure d’adoption du PAG, le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision litigieuse du 5 octobre 2017 ayant statué sur la réclamation introduite par les demandeurs, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.

Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire.

Il s’ensuit que le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation introduit en l’espèce.

II) Quant à la loi applicable Le tribunal précise que les procédures d’adoption d’un PAG et d’un plan d’aménagement particulier (« PAP ») sont prévues par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire et (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain.

Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des actes déférés et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à apprécier la légalité de la décision déférée en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elle a été prise2, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par les lois, précitées, des 17 avril et 18 juillet 2018, adoptées et entrées 1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2019, V° Actes réglementaires, n° 49 et les autres références y citées.

2 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Recours en annulation, n° 20 et les autres références y citées.

5en vigueur postérieurement à la prise des actes déférés, ne sont pas à prendre en considération en l’espèce.

Selon les dispositions transitoires figurant à l’article 108ter (1) de la loi du 19 juillet 2004, tel que modifié en dernier lieu par la loi précitée du 1er août 2011, « La procédure d’adoption des projets d’aménagement général, dont la refonte complète a été entamée par la saisine de la commission d’aménagement avant le 1er août 2011, peut être continuée et achevée conformément aux dispositions du Titre 3 de la présente loi qui était en vigueur avant le 1er août 2011.

La procédure d’adoption des projets d’aménagement particulier, qui a été entamée avant le 1er août 2011, peut être continuée et achevée conformément aux dispositions du Titre 4 de la présente loi qui étaient en vigueur avant le 1er août 2011. ».

Quant au volet du recours visant le nouveau PAG de la Ville de Luxembourg, le tribunal relève que le conseil communal a émis son vote positif, au sens de l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004, en date du 13 juin 2016, de sorte que la saisine de la commission d’aménagement en application de l’article 11 de la même loi s’est a fortiori opérée après la date butoir du 1er août 2011, fixée par l’article 108ter (1), alinéa 1er de la loi du 19 juillet 2004.

Quant au volet du recours visant les PAP « quartier existant », ci-après désigné par « PAP QE », le tribunal rappelle que ceux-ci ont été adoptés parallèlement au susdit PAG et que la procédure afférente a été entamée par la délibération susvisée du collège échevinal du 14 juin 2016, soit après la date butoir du 1er août 2011, fixée par l’article 108ter (1), alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004.

Il suit de ces constats que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est – sous réserve des précisions faites ci-après – celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015 et 3 mars 2017.

S’agissant plus particulièrement de l’applicabilité de cette dernière loi, le tribunal relève que dans un arrêt du 24 septembre 2015, portant le numéro 36179C du rôle3, la Cour administrative a retenu ce qui suit : « (…) Si le droit administratif est notamment régi par le principe de l’effet immédiat de la loi nouvelle, celui-ci ne s’applique néanmoins en principe qu’aux situations juridiques nées postérieurement à la date normale de son entrée en vigueur après sa publication, ainsi qu’aux situations encore dépourvues de caractère définitif lors de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle. En outre, les dispositions modifiant une procédure administrative et désignant les autorités compétentes sont applicables aux procédures pendantes, sans que les administrés puissent prétendre à un droit acquis à voir leur cas traité par l’autorité désignée comme compétente par les dispositions antérieures (…). En revanche, le principe de non-rétroactivité des lois commande que ne soient pas remis en cause les actes déjà valablement accomplis (…) ».

Dès lors, si les procédures d’adoption des PAG et PAP litigieux ont certes débuté avant l’entrée en vigueur de la loi du 3 mars 2017, laquelle a eu lieu le 1er avril 2017, en application de l’article 76 de ladite loi, tel que relevé ci-avant, il n’en reste pas moins qu’à cette dernière date, les 3 Cour adm., 24 septembre 2015, n° 36179C du rôle, Pas. adm. 2019, V° Lois et règlements, n° 86 et l’autre référence y citée.

6procédures en question étaient toujours en cours, de sorte à devoir être qualifiées de procédures pendantes, respectivement de situations juridiques dépourvues de caractère définitif lors de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle. Il s’ensuit que conformément aux principes dégagés par la Cour administrative dans l’arrêt, précité, du 24 septembre 2015, cette dernière loi doit s’appliquer aux procédures en question dès son entrée en vigueur en date du 1er avril 2017. Ainsi, le tribunal doit en tenir compte, dans le cadre de l’examen de la légalité des décisions déférées des 28 avril 2017 et 5 et 6 octobre 2017, toutes adoptées postérieurement au 1er avril 2017.

III) Quant à la recevabilité a) Quant au moyen d’irrecevabilité ratione temporis La partie étatique soulève dans son mémoire en réponse la tardiveté du recours, dans la mesure où ce dernier aurait été introduit en date du 16 janvier 2018, alors que la décision ministérielle aurait été tamponnée le 11 octobre 2017.

Les consorts … concluent au rejet de ce moyen d’irrecevabilité.

Aux termes de l’article 16 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », « Le délai d’introduction [du recours] est de trois mois à partir de la publication de l’acte attaqué ou, à défaut de publication, de la notification ou du jour où le requérant en a eu connaissance ».

Selon l’article 3, paragraphe 1er, de la Convention européenne sur la computation des délais, signée à Bâle, le 16 mai 1972, approuvée par la loi du 30 mai 1984, les délais exprimés en jours, semaines, mois, années, courent à partir du dies a quo, minuit, jusqu’au dies ad quem, minuit.

L’article 4, paragraphe 2 de la Convention de Bâle prévoit que « Lorsqu’un délai est exprimé en mois ou en années, le dies ad quem est le jour du dernier mois ou de la dernière année dont la date correspond à celle du dies a quo ou, faute d’une date correspondante, le dernier jour du dernier mois ».

Le délai d’introduction du recours étant exprimé en mois, il y a lieu de prendre la date du 16 octobre 2017, date à laquelle les demandeurs ont été avisés de l’envoi recommandé portant notification de la décision ministérielle litigieuse, tel qu’il résulte de la copie de l’enveloppe versée en cause, comme jour ayant fait courir le délai. Il s’ensuit que le délai pour introduire leur recours, tel que prévu par l’article 16 de la loi du 21 juin 1999, a commencé à courir le 16 octobre 2017 à minuit pour expirer le 16 janvier 2018 à minuit, de sorte que le recours introduit en date du 16 janvier 2018 est recevable ratione temporis.

b) Quant au moyen ayant trait à l’irrecevabilité du recours pour viser des actes distincts L’administration communale de la Ville de Luxembourg, ci-après désignée par 7« l’administration communale », soulève l’irrecevabilité du recours, au motif qu’il viserait des décisions émanant des autorités communales et de tutelle ayant trait à l’adoption, d’une part, des PAP QE et, d’autre part, du PAG, soit d’instruments urbanistiques de nature et de portée distinctes.

Ainsi, ces décisions n’auraient pas le même objet et elles ne seraient pas fondées sur des considérations de base identiques. Par ailleurs, les reproches formulés par les consorts … à l’encontre de chacun de ces deux instruments urbanistiques ne seraient pas fondés sur les mêmes moyens. Or, il se dégagerait de la jurisprudence des juridictions administratives que tout recours devrait être introduit par requête séparée, sauf exceptions non vérifiées en l’espèce, de sorte que le recours devrait être déclaré irrecevable.

Dans son mémoire en duplique, l’administration communale soutient que le jugement du tribunal administratif du 6 juillet 1998, portant le numéro 9579 du rôle, dont les consorts … se prévalent, dans leur mémoire en réplique, pour conclure au rejet de ce moyen d’irrecevabilité, ne serait pas transposable au cas d’espèce. En effet, dans le cadre du litige ayant donné lieu audit jugement, le recours aurait été dirigé contre des décisions ministérielle et communale délivrées en vue de la réalisation d’une seule et même construction, en l’occurrence deux silos horizontaux à fourrages verts. Ce litige ne serait donc en rien comparable au présent litige portant, à travers une même requête, sur des décisions communales et ministérielles ayant concouru à l’adoption d’instruments d’aménagement de nature réglementaire présentant un objet et une portée distincts.

Si les consorts … soutiennent, d’une part, que le PAG et les PAP QE seraient complémentaires et, d’autre part, qu’il y aurait lieu de déférer l’ensemble des actes relatifs à l’adoption du PAG et des PAP au tribunal, il n’en resterait pas moins que les décisions communales et ministérielles ayant concouru à l’adoption du PAG et des PAP QE n’auraient indéniablement pas le même objet.

Les consorts … concluent au rejet de ce moyen d’irrecevabilité.

Il est constant en cause que certains des actes déférés ont trait à l’adoption du PAG de la Ville de Luxembourg, tandis que les autres concernent l’adoption des PAP QE.

S’il est vrai que tout recours doit en principe être introduit par une requête séparée, le demandeur est cependant autorisé à déférer différentes décisions dans une même requête, lorsque les décisions présentent entre elles un lien de connexité suffisamment étroit et qu’il est dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de les juger par une seule et même décision du tribunal.4 Le PAG, d’une part, et les PAP QE, d’autre part, ainsi que, par conséquent, les actes intervenus dans le cadre de leurs procédures d’adoption respectives, ont manifestement un lien de connexité étroit entre eux, étant donné qu’aux termes de l’article 25 de la loi du 19 juillet 2004, les PAP précisent et exécutent le PAG. Etant donné qu’une éventuelle illégalité du PAG est, dès lors, susceptible de se répercuter sur les PAP QE et, par conséquent, sur l’issue du recours visant les actes ayant trait à l’adoption de ces derniers, il est conforme à l’objectif d’une bonne administration de la justice de les juger à travers un seul et même jugement.

4 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Procédure contentieuse, n° 339 et les autres références y citées ; dans le même sens : trib. adm., 15 décembre 2004, n° 18044 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Procédure contentieuse, n° 338 et les autres références y citées.

8Le moyen d’irrecevabilité sous analyse encourt, dès lors, le rejet.

c) Quant au moyen d’irrecevabilité ayant trait à un défaut d’intérêt à agir dans le chef des consorts … L’administration communale soulève encore l’irrecevabilité du recours, pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des consorts …. Elle soutient que sous l’ancien PAG, dit « PAG Joly », la parcelle … aurait été classée en « zone mixte 4 », tandis que dans le cadre du PAG refondu, elle serait classée en « zone mixte urbaine [MIX-u] ». L’administration communale déduit de ces considérations que le statut urbanistique conféré à cette parcelle à travers le PAG refondu serait identique sinon comparable à celui ayant été prévu par le PAG Joly. Ainsi, la situation des consorts … n’aurait pas été aggravée par le nouveau PAG. Or, il serait de jurisprudence constante qu’en matière de contentieux administratif et notamment dans le domaine de l’urbanisme, l’intérêt à agir s’apprécierait in concreto et ne serait donné qu’à la condition que les décisions attaquées soient de nature à faire grief au demandeur et donc si elles affectent négativement sa situation par une aggravation concrète de sa situation de propriétaire. Dans la mesure où tel ne serait pas le cas en l’espèce, le recours serait à déclarer irrecevable.

Dans son mémoire en duplique, l’administration communale ajoute qu’elle ne partagerait pas l’argumentation des consorts …, ni celle développée par les juridictions administratives dans un certain nombre de jugements et d’arrêts, selon laquelle la qualité de réclamant débouté au stade précontentieux suffirait pour conférer à l’administré concerné un intérêt à agir. Admettre un tel raisonnement reviendrait à devoir reconnaître automatiquement un intérêt à agir à un voisin ayant introduit, sans succès, un recours gracieux à l’encontre d’une autorisation de construire, indépendamment de toute vérification de la question de savoir si ladite autorisation affecte négativement sa situation. Il n’y aurait donc « (…) qu’un pas à faire pour réduire à néant une jurisprudence érigée de longue date et à bon droit par les juridictions administratives (…) ».

Les consorts … concluent au rejet de ce moyen d’irrecevabilité.

Il est constant en cause que ces derniers, en leurs qualités de propriétaires de la parcelle …, avaient réclamé contre respectivement le PAG et le PAP QE couvrant le fonds litigieux et il se dégage des pièces versées en cause, notamment du tableau renseignant les réponses données par le conseil communal aux différentes réclamations lui soumises, que dans le cadre de la prise de la décision d’adoption des projets de PAP, approuvée par le ministre, le conseil communal a procédé aux modifications suivantes de ces derniers « (…) modifications partie graphique Plan de repérage PAP QE, de [HAB-2.g.] à [MIX-u.d] Adaptation périmètre des PAP QE 2) modifications partie graphique Plan de repérage PAP-QE, 2-4, rue des Girondins de [HAB-2.e] en [HAB-2.h] ».

Ainsi, la soumission de la parcelle … au PAP QE de la « zone mixte urbaine », secteur [MIX-u.f], telle que critiquée par les demandeurs, a été maintenue, de sorte que leur réclamation afférente a été rejetée par le conseil communal.

9Eu égard aux considérations qui précèdent, les consorts … disposent partant en l’espèce d’un intérêt à agir suffisant par le seul fait que leurs réclamations dirigées en leurs qualités de propriétaires concernés, respectivement contre le PAG et le PAP QE ont été rejetées par le ministre, respectivement par le conseil communal, avec l’approbation du ministre.

Le moyen d’irrecevabilité afférent encourt, dès lors, à son tour, le rejet.

En l’absence d’autres moyens d’irrecevabilité, le tribunal est amené à conclure que le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

IV. Quant au fond A titre liminaire, compte tenu des prises de positions afférentes divergentes des différentes parties, il appartient au tribunal de déterminer la portée précise du recours sous analyse.

Il convient à cet égard de relever que tant par leur réclamation du 18 juillet 2016 que par leur réclamation du 19 mai 2017 adressée à l’autorité de tutelle, les consorts … ont non seulement réclamé contre le classement de leur propre parcelle, mais encore contre celui de toute la zone « formée des maisons n° … jusqu’à l’intersection …-… et des garages et maisons y compris la maison n° … »5.

Il résulte ensuite de la requête introductive d’instance, malgré une discussion axée sur le classement particulier de la parcelle des requérants, que ceux-ci visent le « bloc de maisons comprises entre la …, la … et la … »6, constat confirmé par le mémoire supplémentaire des requérants.

En ce qui concerne la mise en intervention des propriétaires des parcelles concernées, si ceux-ci disposent certes d’un intérêt personnel au maintien du classement retenu, cet intérêt personnel se confond toutefois en l’espèce avec l’intérêt général ayant nécessairement présidé à l’élaboration du PAG, intérêt général défendu en l’espèce par la Ville de Luxembourg et le ministre de tutelle.

Aussi, dans la mesure où, à travers leur argumentaire, tant la Ville de Luxembourg que l’Etat défendent aussi l’intérêt particulier des propriétaires au maintien du classement adopté, ceux-ci se trouvent indirectement mais actuellement représentés à l’instance par la Ville de Luxembourg et la partie étatique, de sorte qu’une mise en intervention ne s’impose pas, spécialement lorsqu’elle n’aboutirait qu’à des redondances et à retarder la procédure7.

Le tribunal relève ensuite qu’il lui appartient de déterminer la suite du traitement des moyens et arguments des parties compte tenu de la logique juridique dans laquelle ils s’inscrivent, sans être lié par l’ordre dans lequel les moyens ont été présentés par les parties, l’examen des moyens tenant à la légalité externe devant précéder celui des moyens tenant à la légalité interne, 5 Réclamation des consorts … du 19 mai 2017.

6 Requête introductive d’instance, p. 6.

7 Cour adm., 30 novembre 2017, n° 39702C du rôle, Pas. adm. 2019, V° Procédure contentieuse, n° 500.

10étant encore précisé qu’après avoir jugé les qualités et intérêt à agir d’une personne comme étant vérifiés, la juridiction administrative ne vérifie pas l’intérêt au moyen8.

A. Quant aux moyens tirés d’une illégalité externe des décisions déférées - Quant au moyen ayant trait à une violation de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 Les demandeurs font valoir qu’entre le premier vote du conseil communal et le vote du 28 avril 2017, le classement du bloc de maisons, où se trouverait leur parcelle, aurait changé, dans la mesure où tout le bloc se trouverait dorénavant classé en zone mix-u, alors qu’avant le vote du 28 avril 2017, la parcelle des demandeurs aurait été classée en zone mix-u et les habitations situées entre la … et la … auraient été classées en zone HAB-2. Ainsi, il y aurait eu modification entre le projet dans sa forme originale et celui qui a été adopté et présenté au ministre. Ils soutiennent qu’ils ignoreraient si ces modifications découlent de modifications proposées par la commission d’aménagement, répondent à l’avis émis par le ministre de l’Environnement ou découlent d’observations et d’objections présentées. Si tel n’était pas le cas, il y aurait eu violation de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004, étant donné que le conseil communal n’aurait pas renvoyé le dossier devant le collège des bourgmestre et échevins qui aurait été alors tenu de recommencer la procédure prévue par les articles 10 et suivants de la loi du 19 juillet 2004.

Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs soulignent que l’objection introduite en date du 15 juillet 2016 concernant la propriété située au … n’aurait fait nullement état d’une erreur matérielle justifiant un changement du classement de l’îlot en zone mixte urbaine, mais au contraire, cette objection aurait visé à intégrer les garages appartenant à une résidence dans la même classification que la résidence, à savoir une zone d’habitation 2 et non l’inverse. L’objection introduite le 12 juillet 2016, concernant le classement d’une propriété située au … ne serait pas pertinente, dans la mesure où cette dernière ne mentionnerait que de façon lacunaire un éventuel préjudice ne tenant que sur les considérations de voisinage non avérées. Les parties demanderesses en concluent que ce serait sur base d’une seule objection formulée contre le classement en zone Hab-2g, qui ne comprendrait aucun argument pertinent, que le conseil communal en aurait décelé une éventuelle erreur matérielle et aurait décidé de reclasser l’îlot en question en zone mixte. Ce postulat ne saurait être retenu. A supposer qu’il s’agirait d’une erreur matérielle, ni la partie étatique ni l’administration communale ne feraient état de la motivation existante au moment de leur prise de décision.

La partie étatique confirme que le classement des immeubles longeant la … et la … aurait été modifié entre la mise en procédure et l’adoption du PAG, dans le sens que ces immeubles auraient été dans un premier temps majoritairement classés en zone d’habitation pour faire par la suite partie de la zone mixte urbaine. A la suite de la première publication du projet de PAG, plusieurs objections au sens de l’article 13 de la loi du 19 juillet 2004 auraient été introduites concernant cette zone, dont une objection concernant le classement d’une propriété située au … en zone d’habitation 2. Lors de la réunion d’aplanissement des différends concernant cette parcelle, il aurait été expliqué auxdits réclamants qu’il s’agirait d’une erreur matérielle et que la partie de 8 Cour adm., 12 février 2015, n°s 34667C, 34671C et 34683C du rôle, Pas adm. 2019, V° Procédure contentieuse, n° 8 et l’autre référence y citée ; voir également : trib. adm. Prés., 9 novembre 2015, n° 37082 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Procédure contentieuse, n° 34 et les autres références y citées.

11l’îlot classée en zone d’habitation serait classée en zone mixte urbaine. Une autre réclamation aurait concerné l’immeuble situé au …, dont la résidence serait classée en zone mixte urbaine tandis que ses garages se trouveraient en zone d’habitation 2. Lors de la réunion d’aplanissement des différends, il aurait été déclaré aux réclamants qu’il s’agirait d’un oubli et que la partie classée en zone d’habitation 2 serait classée en zone mixte urbaine. Ainsi, la partie étatique soutient que le conseil communal aurait légitimement pu reconsidérer la situation et faire droit aux objections tendant au reclassement en zone mixte urbaine conformément à l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004.

L’administration communale rejoint en substance la partie étatique dans son argumentation.

L’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 dispose qu’« (…) Au plus tard dans les trois mois à compter de l’échéance du délai prévu à l’article 11, alinéa 2, le conseil communal décide de l’approbation ou du rejet du projet d’aménagement général.

Il peut approuver le projet dans sa forme originale ou y apporter des modifications qui soit sont proposées par la commission d’aménagement, soit répondent en tout ou en partie à l’avis émis par le ministre ayant l’Environnement dans ses attributions, soit prennent en compte en tout ou en partie des observations et objections présentées.

Si le conseil communal entend apporter des modifications autres que celles visées à l’alinéa qui précède, il renvoie le dossier devant le collège des bourgmestre et échevins qui est tenu de recommencer la procédure prévue aux articles 10 et suivants. ».

L’article précité prévoit ainsi la possibilité pour le conseil communal soit d’approuver le projet d’aménagement général sous sa forme originale, soit d’y apporter des modifications en tenant compte des modifications proposées par la commission d’aménagement, respectivement de l’avis du ministre de l’Environnement, ou encore en tenant compte des objections formulées contre le projet d’aménagement général en question.

Aux termes de l’article 13 de la loi du 19 juillet 2004, « Dans le délai de trente jours de la publication du dépôt du projet dans les quatre quotidiens imprimés et publiés au Grand-Duché de Luxembourg, les observations et objections contre le projet doivent être présentées par écrit au collège des bourgmestre et échevins sous peine de forclusion. Au cas où une ou plusieurs réclamations écrites ont été présentées dans le délai, le collège des bourgmestre et échevins convoque les réclamants qui peuvent, en vue de l’aplanissement des différends, présenter leurs observations. ».

Ladite disposition légale prévoit ainsi l’obligation pour les réclamants contre le projet d’aménagement tel qu’initié à travers le vote en ce sens du conseil communal d’adresser leurs réclamations au collège échevinal qui devra les convoquer ensuite à une réunion d’aplanissement des différends.

En l’espèce, il échet de constater qu’à la suite de la délibération du conseil communal du 13 juin 2016, seule la partie longeant la … de l’îlot formé par la …, la … et la … était classée en 12« zone mixte urbain [MIX-u] », tandis que le côté longeant la … et la … était classé en « zone d’habitation 2 [HAB-2] ». La partie graphique du PAG, telle qu’issue de la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 renseigne un classement en « zone mixte urbaine [MIX-u] » pour l’entièreté de l’îlot concerné. Or, il ressort des pièces versées en cause que trois propriétaires ont formulé des objections contre le classement de leur parcelle située dans l’îlot concerné. Ainsi, un propriétaire, dont la parcelle est située à la …, a sollicité que les parcelles sises à la … gardent leur vocation de zone d’habitation et que « les garages appartenant aux maisons de la … devraient être maintenus dans leur gabarit et hauteur », un autre propriétaire a formulé une objection quant au fait que les garages d’une résidence ont été classés en « zone mixte urbaine [MIX-u] », alors que la résidence connectée auxdits garages avait été classée en « zone d’habitation 2 [HAB-2] » et un autre administré a réclamé contre le fait que des travaux d’extension seraient en cours sur les parcelles adjacentes à la sienne et qu’un classement en « zone d’habitation 2 [HAB-2] serait trop contraignant et restrictif. Lesdits réclamants ont été convoqués à des réunions d’aplanissement des différends en date des 3 et 8 novembre, respectivement 20 décembre 2016. Le résultat de ces réunions ensemble avec toute les pièces et les plans modifiés ont été transmis par le collège des bourgmestre et échevins au conseil communal, tel qu’il ressort de la décision du 28 avril 2017.

Il convient ensuite de rappeler que l’alinéa 3 de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit que si le conseil communal peut adopter le projet de PAG dans sa forme originale, il peut également y apporter des modifications. Ces modifications sont, comme soulevé ci-avant, en principe issues de propositions pouvant émaner de manière formelle de trois sources, à savoir qu’elles peuvent émaner des propositions de la commission d’aménagement, sinon répondre en tout ou en partie à l’avis émis par le ministre ayant l’environnement dans ses attributions et finalement résulter de la prise en compte de toute ou partie des objections présentées par le public intéressé. Pour que la procédure fasse un sens, il doit être possible au conseil communal de relayer, le cas échéant, ces trois sources de modification et d’y ajouter à titre accessoire des éléments nécessairement complémentaires par rapport à ceux proposés par l’un ou l’autre de ces trois initiateurs de modifications. Si toutefois le conseil communal voulait aller plus fondamentalement au-delà de ces modifications proposées, toujours au niveau de l’adoption du projet de PAG prévue par l’article 14 sous revue, il lui est loisible, conformément au dernier alinéa de cet article, de renvoyer le dossier devant le collège échevinal qui, dans cette hypothèse, sera tenu de recommencer la procédure prévue aux articles 10 et suivants de la même loi9.

Il s’ensuit qu’au vu des trois objections introduites concernant l’îlot concerné, le conseil communal a légitimement pu reconsidérer la situation en classant l’intégralité de l’îlot en « zone mixte urbaine [MIX-u] ». En effet, la formulation « soit prennent en compte en tout ou en partie des observations et objections présentées » contenue dans l’alinéa 3 de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 n’impose pas que le conseil communal doit suivre les objections formulées par les administrés, respectivement qu’il soit limité aux seules parcelles pour lesquelles une objection a été introduite, à condition toutefois que la modification s’effectue dans le cadre d’un ensemble restreint de parcelles, tel qu’en l’espèce, sans que le conseil communal pourrait porter au projet d’aménagement général des modifications spontanées directes ou indirectes, qui ne seraient pas la suite directe d’une objection valablement formulée.

9 Cour adm,. 15 décembre 2016, n°38139C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu.

13Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le moyen relatif à une prétendue violation de l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004 est à rejeter pour ne pas être fondé.

- Quant au moyen ayant trait à une violation des articles 27 et 30 de la loi du 19 juillet 2004 Les demandeurs critiquent le fait que le ministre aurait affirmé dans la décision du 5 octobre 2017 ne pas se prononcer sur la réclamation ayant trait au PAP QE, alors que la loi n’instituerait pas de recours en la matière. Ils insistent sur le fait que l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004 attribuerait expressément une compétence de tutelle d’approbation au ministre concernant le PAP QE et que le ministre aurait d’ailleurs approuvé les délibérations du conseil communal d’adopter tant le PAG que le PAP QE. Ils précisent que la loi prévoirait que le PAG et les PAP QE pourraient être adoptés parallèlement, de sorte que les délais prévus par l’article 30 pourraient être prorogés en conséquence. Ainsi, le ministre n’aurait pas pu s’abstenir de prendre position sur la réclamation concernant le PAP QE. Ils soutiennent que s’il n’existait pas en matière de PAP QE de recours organisé à l’instar de celui prévu par l’article 16 de la loi du 19 juillet 2004, il n’en resterait pas moins que le ministre aurait exercé une des compétences lui attribuées par la loi, étant donné qu’il aurait approuvé ledit PAP QE. En tout état de cause, le ministre n’aurait pas répondu à leur réclamation à l’encontre du PAP QE.

La partie étatique fait valoir que la procédure de réclamation devant le ministre en matière de PAP QE aurait été supprimée dans le contexte de la modification législative intervenue le 28 juillet 2011 et que l’approbation du PAP QE participerait à un acte réglementaire dénué en tant que tel d’une obligation de motivation formelle.

L’administration communale conclut également au rejet du moyen.

Aux termes des alinéas 9 à 13 de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, à la suite de la réception par le conseil des bourgmestre et échevins des observations et objections contre le projet d’aménagement particulier, « [9] Le projet d’aménagement particulier est ensuite soumis par le collège des bourgmestre et échevins avec l’avis de la cellule d’évaluation, avec les observations et objections, le cas échéant, avec le rapport justificatif et s’il y a lieu, avec les propositions de modifications répondant à l’avis de la cellule d’évaluation et aux observations et objections présentées, au vote du conseil communal au plus tard dans les trois mois qui suivant l’écoulement du délai [de trente jours].

[10] Le conseil communal décide de la recevabilité en la forme et quant au fond des observations et objections présentées au collège des bourgmestre et échevins et peut, soit adopter le projet d’aménagement particulier dans sa présentation originale, soit y apporter des modifications répondant à l’avis de la cellule d’évaluation et aux observations et objections, soit rejeter le projet. Dans ce dernier cas, le dossier est clôturé. (…) [12] La délibération du conseil communal portant adoption du projet d’aménagement particulier est transmise dans les quinze jours qui suivent le vote du conseil communal pour approbation au ministre, lequel prend sa décision dans un délai de trois mois suivant la réception du dossier.

14[13] Avant de statuer, le ministre vérifie la conformité du projet d’aménagement particulier avec le plan ou projet d’aménagement général, la conformité et la comptabilité avec les dispositions de la loi, et notamment les objectifs énoncés à l’article 2, ses règlements d’exécution, ainsi qu’avec les plans et programmes déclarés obligatoires en vertu de la loi modifiée du 21 mai 1999 concernant l’aménagement du territoire. » Force est au tribunal de constater que depuis la modification législative opérée par la loi du 28 juillet 2011, la procédure précontentieuse d’aplanissement des difficultés mise en place par l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004 ne prévoit plus qu’une seule étape, consistant en des observations et objections à introduire auprès du collège échevinal et à trancher par le conseil communal quant à leur recevabilité et quant à leur bien-fondé, dans le cadre de sa décision sur l’adoption ou le rejet du projet, telle que visée à l’alinéa 10 dudit article 30, de sorte que la loi ne prévoit plus la possibilité pour les administrés d’introduire une réclamation auprès du ministre. Il s’ensuit qu’il n’appartenait pas au ministre de se prononcer sur la réclamation introduite par les demandeurs, de sorte qu’aucun défaut de motivation ne saurait lui être reproché à cet égard et que le moyen ayant trait à une violation de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004 est à rejeter pour ne pas être fondé.

Les demandeurs reprochent encore aux autorités communale et étatique d’avoir violé l’article 27 de la loi du 19 juillet 200410, sans toutefois préciser dans quelle mesure ladite disposition législative auraient été violée en l’espèce. Il échet partant de confirmer l’administration communale dans ses conclusions tendant au rejet de ce moyen simplement suggéré, sans être soutenu effectivement. En effet, le juge n’est pas en mesure de prendre position par rapport à un tel moyen simplement suggéré, puisque l’exposé d’un moyen de droit requiert non seulement la désignation de la règle de droit qui serait violée, mais encore la manière dont celle-ci aurait été violée par l’acte attaqué. Il n’appartient ainsi pas au juge de suppléer la carence des demandeurs 10 Article 27 de la loi du 19 juillet 2004 « (1) Il incombe à la commune de prendre l’initiative d’élaborer un projet d’aménagement particulier « quartier existant ». Le premier établissement du plan d’aménagement particulier « quartier existant » ainsi élaboré est mené parallèlement à la procédure du projet d’aménagement général couvrant les mêmes fonds. Les délais prévus à l’article 30 sont adaptés à ceux découlant de la procédure d’adoption du projet d’aménagement général et sont prorogés en conséquence.

(2) Un plan d’aménagement particulier « quartier existant » peut être complété, modifié ou révisé à l’initiative de la commune.

En vue de cette initiative, les communes n’ont pas besoin d’être propriétaires du ou des terrains sur lesquels porte le projet de modification ou de justifier d’un titre les habilitant à réaliser l’opération sur le ou les terrains en cause.

(3) Tout projet d’aménagement particulier « quartier existant » peut également, outre les personnes qualifiées au sens de l’article 7 de la présente loi, être élaboré ou modifié par un homme de l’art tel que visé à l’article 1er de la loi précitée du 13 décembre 1989 ou à l’article 1er de la loi précitée du 25 juillet 2002. Les communes qui disposent d’un service technique communal répondant aux articles 99 bis ou 99 ter de la loi communale peuvent élaborer ou modifier les projets d’aménagement particulier « quartier existant » sans devoir recourir aux prestations de services d’une personne qualifiée ou d’un homme de l’art externe à l’administration communale ».

15et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions11.

- Quant au moyen ayant trait à une violation de l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004 Les consorts … soutiennent, sans autre précision, que ni le conseil communal ni le ministre n’auraient répondu aux éléments qu’ils auraient soulevés dans le cadre de leur objection, respectivement de leur réclamation.

La partie étatique conteste cette argumentation et l’administration communale ne prend pas autrement position.

Pour autant que les demandeurs aient visé une violation de l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004, il échet de rappeler qu’aux termes de l'alinéa 1er de l'article 18 de la loi du 19 juillet 2004 :

«Le ministre statue sur les réclamations dans les trois mois qui suivent le délai prévu à 1'article 16 alinéa 1, respectivement dans les trois mois suivant la réception des avis de la commission d'aménagement et du conseil communal prévus à l'article qui précède, en même temps qu'il décide de l'approbation définitive du projet d'aménagement général, qui prend dès lors la désignation de plan d'aménagement général. » Il s'ensuit que le ministre est appelé, d'une part, à statuer sur les réclamations et, d'autre part, à décider de l'approbation définitive du projet d'aménagement général, dans le cadre de la décision qu'il est amenée à prendre en application de l'article 18 précité.

Dans la mesure où ce moyen vise la légalité externe, il échet de rappeler que contrairement à ce qui est imposé pour les décisions administratives individuelles par l’article 6 du règlement grand-

ducal du 8 juin 1979 sur la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, inapplicable en matière réglementaire, aucun texte n’oblige l’administration à formuler de manière expresse et explicite les motifs gisant à la base d’un acte à caractère réglementaire, dont toutefois le motif doit être légal et à cet égard vérifiable par la juridiction administrative12.

Les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des constructions qu’ils concernent et le régime des constructions à y élever, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé.13 Le fait qu’un acte est susceptible d’avoir des effets sur un nombre indéterminé de personnes suffit à lui seul pour lui conférer le caractère d’un acte règlementaire, même s’il n’établit pas de mesure générale et abstraite. Les projets d’aménagement ont pour but et pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des agglomérations qu’ils concernent et les régimes des constructions à y ériger. Ces dispositions s’imposent indistinctement à toutes les propriétés foncières comprises dans le rayon des plans. La délibération par laquelle un conseil communal adopte un plan d’aménagement a le caractère 11 Trib. adm.. 17 février 2016, n° 34630 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Procédure contentieuse, n° 875 et l’autre référence y citée.

12 Cour adm., 7 décembre 2004, n° 18142C du rôle, Pas. adm. 2019, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 113 et les autres références y citées.

13 Cour adm, 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2019, V° Urbanisme, n° 69 et les autres références y citées.

16d’un acte réglementaire. Il en est de même de la décision du ministre de l’Intérieur, qu’il approuve la délibération du conseil communal en lui conférant force obligatoire ou qu’il refuse d’approuver la délibération. Si en adoptant ou en approuvant le plan d’aménagement, le conseil communal ou le ministre de l’Intérieur sont appelés à statuer sur des réclamations présentées par un particulier agissant dans son intérêt personnel, cette circonstance n’est pas de nature à changer le caractère de l’acte. Les réclamations ne constituent en effet que des incidents de la procédure d’élaboration du projet d’aménagement et elles ne sont pas dirigées contre une décision à caractère individuelle.14 Force est en l'espèce de constater que dans le cadre de sa décision déférée du 5 octobre 2017, citée par extraits ci-avant, le ministre a pris position quant à la réclamation introduite par les demandeurs en la déclarant non fondée au motif que le classement en « zone mixte urbaine [MIX-

u] » serait justifié autour d’un axe important afin d’assurer une bonne mixité des fonctions. Il s'ensuit qu'indépendamment du bien-fondé de la justification ainsi avancée, le ministre a motivé tant en droit qu'en fait sa décision.

Si le ministre n'a certes pas pris position quant aux arguments tirés de diverses irrégularités dans le cadre de la procédure d'élaboration du projet d'aménagement général, invoqués par les demandeurs dans leur réclamation, il échet pourtant de conclure qu'en ayant rejeté la réclamation du demandeur comme non fondée, le ministre a nécessairement rejeté l'ensemble des moyens avancés à l'appui de ladite réclamation. De surplus, la Cour administrative a retenu dans un arrêt du 20 mars 2014, inscrit sous le numéro 33588C du rôle, que bien que la décision ministérielle portant approbation de la décision d'un conseil communal approuvant un projet d'aménagement général s'analyse en un acte participant à un acte réglementaire dont elle épouse elle-même la forme, la procédure d'aplanissement des difficultés se trouve à tel point proche d'un processus de participation et de collaboration administrative, tel que parallèlement prévu pour la prise de décisions individuelles, que la solution jurisprudentielle consacrée en matière de refus implicite pour silence gardé par l'administration durant plus de trois mois, permettant la fourniture de motifs pour la première fois en phase contentieuse, pourvu que les éléments afférents aient existé au moment de la prise de la décision critiquée, doit être entrevue comme étant transposable ponctuellement et précisément au cas de l'omission par le ministre de statuer sur une réclamation dans le cadre de la procédure d'adoption d'un PAG.

En l'espèce, force est encore de constater que si le ministre n'a pas expressément pris position quant à certains arguments avancés par les demandeurs dans leur réclamation, la partie étatique a néanmoins amplement motivé le rejet desdits arguments dans le cadre de son mémoire en réponse.

Dès lors, indépendamment de toute considération quant au bien-fondé de l'argumentation ainsi avancée par la partie étatique et conformément aux principes dégagés par la Cour administrative dans son arrêt précité du 20 mars 2014, force est au tribunal de conclure que la décision déférée du 5 octobre 2017 comporte une indication suffisante de la motivation à sa base, de sorte que le moyen tiré d'une absence de motivation est à rejeter pour ne pas être fondé.

B. Quant aux moyens tirés d’une illégalité interne des décisions déférées 14 Cour adm, 17 juin 1997, n° 9481C du rôle, Pas. adm. 2019, V° Urbanisme, n° 70 et les autres références y citées.

17Les consorts … reprochent au ministre et à la Ville de Luxembourg d’avoir commis une violation des articles 2 et 6 de la loi du 19 juillet 2004 ainsi qu’une erreur d’appréciation.

Ils soutiennent, quant au moyen ayant trait à une violation des articles 2 et 6 de la loi du 19 juillet 2004, que trois objectifs desdits articles n’auraient pas été respectés, à savoir, en premier lieu, l’objectif relatif au développement, dans le cadre de structures urbaines, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie et la qualité urbanistique des localités, en insistant plus particulièrement sur le fait que le classement de leur parcelle en « zone mixte urbaine [MIX-u-f] » aurait comme conséquence que leur parcelle serait un jour encerclée par des bâtiments mixtes plus hauts et plus denses, de sorte qu’il n’y aurait plus de circulation d’air, ni à l’avant ni à l’arrière de leur parcelle, de sorte à engendrer une réduction de la qualité de vie. En deuxième lieu, les consorts … font valoir que les autorités communale et ministérielle n’auraient pas tenu compte de l’objectif relatif au niveau élevé de protection de l’environnement naturel, dans la mesure où, d’un côté, le classement ne tiendrait pas compte de la coulée verte existant à la …, soit à l’arrière de la parcelle des demandeurs et, d’un autre côté, le classement ferait abstraction d’une pollution éventuelle du sol sur lequel se trouverait le garage. En troisième lieu, les demandeurs font encore valoir que l’objectif de la sécurité ne serait pas respecté alors que si des projets de construction se faisaient et densifiaient les constructions dans le bloc de maisons comprises entre la …, la … et la …, cela aboutirait nécessairement à densifier le trafic à cet endroit alors que l’infrastructure routière actuelle ne le permettrait pas et qu’il n’existerait actuellement pas de plan pour l’adapter en conséquence.

Dans leur mémoire en réplique, quant à l’objectif relatif au développement, dans le cadre de structures urbaines, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie et la qualité urbanistique des localités, les demandeurs insistent sur le fait que le raisonnement avancé par les parties communale et étatique, selon lequel le classement en zone mixte urbaine se justifierait pour un îlot d’immeubles située le long d’une artère routière à forte circulation, ne serait pas cohérent en précisant que les parcelles cadastrales numéros …, …, … et …, longeant le côté gauche de la … n’auraient pas été reclassées en zone mixte urbaine mais en zone d’habitation 1, ainsi qu’en secteur protégé d’intérêt communal « environnement construit – C ».

Quant à l’objectif relatif au niveau de protection de l’environnement naturel, les demandeurs précisent que plusieurs indices permettraient de justifier l’existence d’une « coulée verte » et plus particulièrement celui de la présence d’une zone calme, respectivement d’une « oase urbaine calme potentielle », qui longerait l’arrière de leur parcelle. Cette « oase urbaine calme potentielle » se situerait à moins de 50 mètres de leur parcelle, ce qui justifierait la présence d’une coulée verte à l’arrière de leur parcelle. Concernant la présence d’un site potentiellement contaminé ou des sites contaminés ou assainis, ils soutiennent que le cadastre des sites potentiellement contaminés et des sites contaminés ou assainis ne permettrait pas de justifier un classement en zone mixte urbaine et aurait dû au contraire permettre un classement en zone d’habitation.

Quant au moyen ayant trait à une erreur d’appréciation, les demandeurs se référent aux mêmes arguments développés ci-avant dans le cadre de leur moyen ayant trait à une violation des articles 2 et 6 de la loi du 19 juillet 2004.

Les parties étatique et communale concluent au rejet de ces moyens.

18Le tribunal précise que les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, doivent être mues par des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général et dans ce contexte, lesdites autorités doivent veiller tant à la conservation de l’esthétique urbaine qu’au développement rationnel des agglomérations.15 Dans ce contexte, la mission du juge de la légalité conférée au tribunal à travers l’article 7 de la loi précitée du 7 novembre 1996 exclut le contrôle des considérations d’opportunité et notamment d’ordre politique, à la base de l’acte administratif attaqué et inclut la vérification, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, de ce que les faits et considérations sur lesquels s’est fondée l’administration sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute. Dès lors, le tribunal est amené à analyser si la mesure prise est proportionnelle par rapport aux faits dont l’existence est vérifiée, une erreur d’appréciation étant susceptible d’être sanctionnée dans la mesure où elle est manifeste, au cas notamment où une flagrante disproportion des moyens laisse entrevoir un usage excessif du pouvoir par l’autorité qui a pris la décision, voire un détournement du même pouvoir par cette autorité16.

S’il est partant certes vrai que le choix d’entériner ou de ne pas entériner la modification d’un PAG relève d’une dimension politique et échappe comme tel au contrôle des juridictions de l’ordre administratif saisies d’un recours en annulation, il n’en demeure pas moins que tout acte administratif doit reposer sur un motif dont le juge administratif vérifie tant l’existence que la légalité. Tel que précisé ci-avant, cette exigence découle du fait que le juge administratif a l’obligation de vérifier si les autorités administratives compétentes n’ont pas violé la loi, commis un excès de pouvoir ou un détournement de pouvoir et cette obligation de motivation existe également pour les actes à caractère réglementaire qui, quoique discrétionnaires, doivent être pris dans l’intérêt général, de sorte qu’il importe que les autorités administratives compétentes fassent connaître le ou les motifs qui les ont guidées dans leur décision, le contrôle exercé par le juge de l’annulation ne portant dès lors pas sur l’opportunité, mais sur la réalité et la légalité des motifs avancés17.

Quant aux objectifs devant guider les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, il y a lieu de se référer à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, aux termes duquel « Les communes ont pour mission de garantir le respect de l’intérêt général en assurant à la population de la commune des conditions de vie optimales par une mise en valeur harmonieuse et un développement durable de toutes les parties du territoire communal par:

(a) une utilisation rationnelle du sol et de l’espace tant urbain que rural en garantissant la complémentarité entre les objectifs économiques, écologiques et sociaux;

15 Trib. adm., 20 octobre 2004, n° 17604 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Urbanisme, n° 178 et les autres références y citées.

16 Trib. adm., 27 décembre 2007, n° 22243 du rôle, confirmé par Cour adm. 23 juillet 2008, n° 24055C du rôle, Pas.

adm. 2019, V° Urbanisme, n°195 et les autres références y citées.

17 En ce sens : trib. adm. 26 avril 2004, n° 17315 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Urbanisme, n° 657 et les autres références y citées.

19(b) un développement harmonieux des structures urbaines et rurales, y compris les réseaux de communication et d’approvisionnement compte tenu des spécificités respectives de ces structures, et en exécution des objectifs de l’aménagement général du territoire;

(c) une utilisation rationnelle de l’énergie, des économies d’énergie et une utilisation des énergies renouvelables;

(d) le développement, dans le cadre des structures urbaines et rurales, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie de la population et la qualité urbanistique des localités;

(e) le respect du patrimoine culturel et un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage lors de la poursuite des objectifs définis ci-dessus;

(f) la garantie de la sécurité, la salubrité et l’hygiène publiques. ».

L’article 6 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit quant à lui que « Le plan d’aménagement général a pour objectif la répartition et l’implantation judicieuse des activités humaines dans les diverses zones qu’il arrête aux fins de garantir le développement durable de la commune sur base des objectifs définis par l’article 2 de la loi. ».

Il convient encore de noter que la modification d’un PAG est, dans son essence même, prise dans l’intérêt général, cette caractéristique étant présumée jusqu’à preuve du contraire.18 Il échet de constater que l’îlot situé entre la …, la … et la …, qui était classé sous le PAG Joly en partie en zone mixte 419, y inclus la parcelle des parties demanderesses, et en partie en zone mixte 520, a été classé au niveau du PAG refondu en « zone mixte urbaine [MIX-u] » et, selon le plan de repérage des PAP QE, le coin de l’îlot situé entre la … et la …, incluant la parcelle des demandeurs, a été classé en secteur « MIX-u.f » du PAP QE de la « zone mixte urbaine », les parcelles longeant la … ont été classées en secteur « MIX-u.g » dudit PAP QE et le reste de l’îlot, entre la … et la … a été classé en secteur « MIX-u.d » de ce même PAP QE.

Selon l’article 5 de la partie écrite du PAG « La zone mixte urbaine couvre les quartiers ou parties de quartiers à caractère urbain. Elle est destinée à renforcer la centralité des quartiers et à accueillir, en fonction de sa localisation et de sa vocation, des habitations, des activités d’artisanat et de commerce, dont la surface de vente est limitée à 10.000 m2 par immeuble bâti, des activités de loisirs, des services administratifs ou professionnels, des hôtels, des restaurants et des débits de boissons, ainsi que des constructions, des établissements, des équipements et des aménagements de service public et d’intérêt général et des espaces libres correspondant à l’ensemble de ces fonctions. (…) 18 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, Pas. adm., 2019, V° Recours en annulation, n° 9 et les autres références y citées.

19 Article B.1.1 de la partie écrite du PAG Joly « Les zones mixtes (…) 4 sont destinées, en dehors de l’habitat, aux immeubles administratifs, commerciaux et récréatifs, hôtel, cafés, restaurants, parkings à étages. (…) » avec la possibilité, selon l’article B.1.4 b) de la partie écrite du PAG Joly, de prévoir une hauteur des constructions pouvant comporter jusqu’à quatre niveaux pleins..

20 Article B.2.1 de la partie écrite du PAG Joly « Les zones mixtes 5 (…) sont destinées, en dehors de l’habitat, aux immeubles administratifs, commerciaux et récréatifs, hôtels, cafés, restaurants. Peuvent être admis des entreprises artisanales, ateliers, dépôts, parkings à étages » avec la possibilité, selon l’article B.2.3 a) de la partie écrite du PAG Joly de prévoir une hauteur des constructions pouvant comporter jusqu’à cinq niveaux pleins.

20Y sont interdits les constructions et les établissements qui par leur nature, leur importance, leur étendue, leur volume et leur aspect seraient incompatibles avec la sécurité, la salubrité, la commodité et la tranquillité d’un quartier mixte ou dont l’intégration dans l’ilot ou dans la rue n’est pas garantie. (…) ».

L’article C.4.4 de la partie écrite des PAP QE, applicable au PAP QE de la « zone mixte urbaine », prévoit pour le secteur [MIX-u.f] une hauteur maximale à la corniche de 14 mètres, pour le secteur [MIX-u.d.] une hauteur à la corniche de 11,50 mètres et pour le secteur [MIX-u.g] une hauteur de 17,50 mètres.

Il échet de constater qu’il ressort des pièces versées en cause et notamment de la partie graphique du PAG, telle qu’approuvée à travers la décision ministérielle déférée, que le classement des parcelles litigieuses se justifie par des considérations d’ordre urbanistique. En effet, il est constant en cause que l’îlot concerné longe la …, qui représente, tel que la partie étatique le souligne à juste titre, une importante artère d’accès à la Ville de Luxembourg faisant l’objet d’un trafic important, constat qui se trouve encore confirmé par le fait que la … est superposée d’une zone de bruit ainsi que par la courbe alternante journalière du trafic journalier moyen illustrée dans l’étude préparatoire21. Il ressort également de l’étude préparatoire que l’îlot concerné fait partie des pôles secondaires de développement, qui « complète[nt] la structure économique à caractère plutôt local [et] constituent des centres de quartier, des entreprises artisanales, des commerces de détail (…) »22. Contrairement aux conclusions des parties demanderesses, il échet de retenir que le fait de définir un pôle de développement le long d’un grand axe tel que la …, tout en le classant en zone d’habitation, serait contraire aux objectifs de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004 et notamment à celui d’une utilisation rationnelle du sol et de l’espace urbain, étant encore précisé que l’îlot avait déjà été classé sous le PAG Joly en zone mixte 4, respectivement 5 et qu’il accueille différents prestataires de services, ainsi qu’une maison de retraite.

Quant à l’argument des demandeurs selon lequel d’autres parcelles longeant le côté opposé de la … n’auraient pas été classées en « zone mixte urbaine [MIX-u] », mais auraient été classées en « zone d’habitation 1 [HAB-1] », ainsi qu’en « secteur protégé d’intérêt communal « environnement construit – C » » et pour autant que les demandeurs ont entendu viser une violation du principe constitutionnel de l’égalité devant la loi, tel qu’inscrit à l’article 10bis de la Constitution, suivant lequel tous les Luxembourgeois sont égaux devant la loi, applicable à tout individu touché par la loi luxembourgeoise si les droits de la personnalité, et par extension les droits extrapatrimoniaux sont concernés, il échet de retenir que ce principe ne s’entend pas dans un sens absolu, mais requiert que tous ceux qui se trouvent dans la même situation de fait et de droit soient traités de la même façon. Le principe d’égalité de traitement est compris comme interdisant le traitement de manière différente de situations similaires, à moins que la différenciation soit objectivement justifiée. Il appartient par conséquent, aux pouvoirs publics, tant au niveau national qu’au niveau communal, de traiter de la même façon tous ceux qui se trouvent dans la même situation de fait et de droit. Par ailleurs, lesdits pouvoirs publics peuvent, sans violer le principe de l’égalité, soumettre certaines catégories de personnes à des régimes légaux 21 Etude préparatoire, sections 2 et 3, p. 20.

22 Etude préparatoire, sections 2 et 3, p. 37.

21différents, à condition que les différences instituées procèdent de disparités objectives, qu’elles soient rationnellement justifiées, adéquates et proportionnées à leur but23.

Il échet de constater que la situation des parcelles visées par les demandeurs n’est pas comparable. En effet, lesdites parcelles font partie d’un îlot situé entre la …, la … et la …, à l’arrière duquel s’étend jusqu’au … une vaste surface à l’intérieur de laquelle les parcelles sont sans exception classées en « zone d’habitation 1 », respectivement « zone d’habitation 2 », ce qui n’est pas le cas pour l’îlot dans lequel se trouve la parcelle des demandeurs, qui se trouve en face d’une « zone de parc public [PARC] ». Ainsi, pour l’îlot situé du côté opposé de la …, le classement de quelques parcelles longeant la … en « zone d’habitation 1 [HAB-1] » se justifie par le fait qu’il est composé en grande majorité d’immeubles unifamiliaux, de sorte à renfermer une zone à faible densité ayant nécessité une zone de transition sous forme de quelques parcelles formant le coin entre la rue Marie-Adélaïde et la … vers la zone à densité plus importante formée par la « zone mixte urbaine [MIX-u] ». L’îlot contenant la parcelle des demandeurs est quant à lui composé de façon plus hétéroclite, de sorte que la situation des consorts … et celle des propriétaires des parcelles précitées ne sont pas suffisamment comparables pour que le principe constitutionnel de l’égalité puisse trouver vocation à s’appliquer en l’espèce.

Il s’ensuit que le moyen relatif à une violation du principe d’égalité encourt le rejet.

Il suit de tout ce qui précède que le classement de l’îlot en « zone mixte urbaine [MIX-u] » remplit les objectifs prévus à l’article 2, point a) et d) de la loi du 19 juillet 2004.

S’agissant de la « coulée verte » dont se prévalent les parties demanderesses, et pour autant qu’elles aient entendu viser la « zone de servitude urbanisation – coulée verte », il échet de rappeler que selon l’article 27 de la partie écrite du PAG « Les zones de servitude « urbanisation » constituent des zones superposées qui comprennent des terrains situés dans les zones urbanisées, les zones destinées à être urbanisées ou dans les zones destinées à rester libres. Des prescriptions spécifiques sont définies pour ces zones dans le plan d'aménagement général aux fins d'assurer la sauvegarde de la qualité urbanistique, ainsi que de l'environnement naturel et du paysage d'une certaine partie du territoire communal.

Les prescriptions y relatives sont détaillées ci-après par type de servitude, applicables dans les zones telles que indiquées par une ou plusieurs servitudes dans la partie graphique du PAG.

Le plan d'aménagement particulier « nouveau quartier », le concept d'aménagement et/ou le lotissement respectivement le projet de construction doivent préciser les servitudes.

Les zones de servitude « urbanisation » sont définies comme suit:

(…) CV Zone de servitude urbanisation — coulée verte » 23 Trib. adm., 6 décembre 2000, n° 10019 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Lois et règlements, n° 8 et les autres références y citées.

22Les zones de servitude « urbanisation — coulée verte » visent à réserver les surfaces nécessaires à la réalisation de parcs publics, d'espaces verts ouverts au public, d'îlots de verdure et de surfaces de jeux publics, de loisir, de détente et de repos. Elles visent à développer et/ou à maintenir le maillage écologique et un aménagement paysager. Les cours d'eau à l'intérieur d'une telle zone doivent être aménagés et/ou renaturés de manière écologique.

Des aménagements, équipements et constructions en relation avec la destination d'une zone de servitude « urbanisation — coulée verte » ainsi que des chemins dédiés à la mobilité douce y sont admis. Exceptionnellement, des rues de desserte locale (zone résidentielle ou zone 30 km/h) peuvent couper la zone de servitude. Dans les PAP NQ - SD BG -05, PAP NQ - SD BG -06 et PAP NQ - SD HO - 13 des cités jardinières sont admises.

Y peuvent encore être admis des aménagements et des constructions d'intérêt général ou d'utilité publique ainsi que des infrastructures techniques pour la gestion des eaux superficielles, à réaliser par la Ville, l'Etat ou des gestionnaires de réseaux, à condition que leur implantation se limite au strict minimum, qu'un soin particulier soit apporté à leur intégration dans le site.

(…) ».

Il échet de constater que ni une parcelle faisant partie de l’îlot concerné ni une autre parcelle à proximité dudit îlot ne sont superposées d’une « zone de servitude urbanisation – coulée verte [CV] ».

Pour autant que les parties demanderesses aient visé par leur argument la … classée en « zone de parc public [PARC] », il échet de constater que les consorts … restent en défaut de préciser en quoi la Ville de Luxembourg, respectivement le ministre, en approuvant les décisions déférées, n’auraient pas pris en compte ladite zone. En effet, la … se trouve en contrebas de l’îlot litigieux dont le classement semble a priori n’avoir aucune incidence sur la qualité de ladite zone, étant encore rappelé qu’il n’appartient ainsi pas au juge de suppléer la carence des demandeurs et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions24.

Quant à l’argumentation des demandeurs ayant trait au fait que le classement ne tiendrait pas compte d’une pollution éventuelle du sol sur lequel se trouve « le garage », non autrement déterminé, il échet de constater, sur base des pièces versées en cause, que la parcelle adjacente à celle des demandeurs figure sur le cadastre des sites potentiellement contaminés. Tel qu’il résulte de l’extrait des cadastres des sites potentiellement contaminés et des sites contaminés ou assainis versé par les demandeurs il s’agit de sites « pour lesquels l’Administration de l’environnement dispose d’informations relatives à une utilisation historique du site suite à laquelle une contamination du sol ne peut pas être exclue. Une entrée comme SPC ne veut pas nécessairement dire que le site est pollué. Les sites qui sont repris dans la base CASIPO restent dans la base même si une étude analytique prouve l’absence de contamination. Dans certains cas, une étude historique réalisée par un organisme agréé peut suffire pour prouver que le site n’est pas contaminé. Dès qu’une étude analytique est à disposition de l’Administration de l’environnement, le site est également repris dans le cadastre des sites contaminés ou assainis. ». Ainsi, à défaut de 24 Trib. adm., 17 février 2016, n° 34630 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Procédure contentieuse, n° 875 et les autres références y citées.

23précisions à cet égard, il n’y a aucune certitude en l’espèce que la parcelle voisine, sur laquelle ont été successivement exploités un atelier de peinture, un service de nettoyage à sec, un atelier de réparation, respectivement de rechapage de pneus et une imprimerie avec un laboratoire de photographie, est effectivement polluée, étant relevé que les demandeurs restent en défaut d’expliquer pourquoi l’existence d’un tel risque de contamination de la parcelle devrait entraîner un classement en zone d’habitation, au lieu d’un classement en zone mixte urbaine. Il échet encore de retenir que le jugement du tribunal administratif du 20 septembre 2006, inscrit sous le numéro 20690 du rôle, cité par les demandeurs, ne saurait être rapproché au cas d’espèce, dans la mesure où d’un côté, contrairement à l’extrait cité par les parties demanderesses de façon incomplète, le tribunal n’avait pas retenu que de façon générale « l’existence d’un risque objectif et non contredit par des analyses afférentes d’une contamination d’un terrain se trouvant classé en zone artisanale et dont le reclassement en zone d’habitation est sollicité [devrait] être considérée comme un motif tenant à la propreté et à la salubrité publiques et qui [pourrait] partant valablement servir de fondement à une décision de reclasser ce terrain en l’état dans une zone non constructible », mais le tribunal avait précisé que ce reclassement se justifierait « jusqu’à la fourniture de la preuve d’une absence de contamination ou l’exécution des travaux d’assainissement » et, d’un autre côté, la décision dont le tribunal devait apprécier la légalité dans son jugement du 20 septembre 2006 avait été prise en vertu du règlement grand-ducal du 14 décembre 2000 concernant les localités de … et de … stipulant l’interdiction de procéder à des extensions du périmètre d’agglomération tendant à assurer la protection sanitaire du barrage …, ce qui est un contexte tout autre que celui en l’espèce, concernant une parcelle située en plein centre de la capitale.

Il suit de tout ce qui précède que le classement de l’îlot en « zone mixte urbaine [MIX-u] » n’est pas contraire à l’objectif prévu à l’article 2, point e) de la loi du 19 juillet 2004.

S’agissant finalement de l’argument des demandeurs selon lequel une densification de l’îlot contenant leur parcelle aboutirait à une densification du trafic alors que l’infrastructure routière ne le permettrait pas, il échet de retenir que les consorts … restent en défaut d’apporter un élément concret pour appuyer leur thèse, d’autant plus que, tel que décrit ci-avant, la … constitue d’ores et déjà une artère principale à trafic important.

Il suit des considérations qui précèdent que les moyens relatifs à une violation des articles 2 et 6 de la loi du 19 juillet 2004 et à une erreur d’appréciation sont à rejeter pour ne pas être fondés.

V. Indemnité de procédure Enfin, la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de ….- euros telle que formulée par les consorts … en application de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, aux termes duquel « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine », est à rejeter au vu de l’issue du litige.

24La même conclusion s’impose en ce qui concerne la demande en obtention d’une indemnité de procédure de …- euros, telle que formulée par la partie étatique, étant donné qu’elle omet de préciser en quoi il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais non compris dans les dépens.

Quant à la demande de distraction des frais au profit du mandataire de la partie étatique qui la sollicite, affirmant en avoir fait l’avance, il convient de rappeler qu’il ne saurait être donné suite à la demande en distraction des frais posée par le mandataire d’une partie, pareille façon de procéder n’étant point prévue en matière de procédure contentieuse administrative25.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours en annulation recevable ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure de …- euros telle que formulée par les demandeurs ;

rejette la demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure de …- euros telle que formulée par l’Etat ;

condamne les demandeurs aux frais et dépens.

Ainsi jugé par:

Marc Sünnen, président, Daniel Weber, juge, Michèle Stoffel, juge, et lu à l’audience publique du 8 juin 2020 par le président, en présence du greffier Lejila Adrovic.

s. Lejila Adrovic s. Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 9 juin 2020 Le greffier du tribunal administratif 25 Trib. adm., 14 février 2001, n° 11607 du rôle, Pas. adm. 2019, V° Procédure contentieuse, n° 1114 et les autres références y citées.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 40642
Date de la décision : 08/06/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2020-06-08;40642 ?

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