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27/09/2019 | LUXEMBOURG | N°40517

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 27 septembre 2019, 40517


Tribunal administratif N° 40517 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 décembre 2017 4e chambre Audience publique du 27 septembre 2019 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 40517 du rôle et déposée le 22 décembre 2017 au greffe du tribunal administratif par Maître Didier Schönberger, avocat à la Cour, ins

crit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, t...

Tribunal administratif N° 40517 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 décembre 2017 4e chambre Audience publique du 27 septembre 2019 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 40517 du rôle et déposée le 22 décembre 2017 au greffe du tribunal administratif par Maître Didier Schönberger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation sinon subsidiairement à l’annulation de la décision datée du 17 octobre 2017, référencée sous le numéro C 20568, du directeur de l’administration des Contributions directes en réponse à une réclamation lui adressée le 28 janvier 2015 et dirigée à l’encontre d’un bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2013, émis le 19 novembre 2014 ;

Vu l’ordonnance présidentielle du 15 janvier 2018 portant le numéro 40578 du rôle déboutant Monsieur … de sa requête en institution d’un sursis à exécution introduit à l’encontre de la décision précitée du 17 octobre 2017 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 13 mars 2018 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 12 avril 2018 par Maître Didier Schönberger, préqualifié, au nom de son mandant ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Didier Schönberger et Monsieur le délégué du gouvernement Steve Collart en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique des plaidoiries du 4 décembre 2018 ;

Vu l’avis du tribunal du 8 février 2019 prononçant la rupture du délibéré, invitant les parties à déposer un mémoire supplémentaire et fixant l’affaire pour continuation des débats à l’audience publique du 2 avril 2019 ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 4 mars 2019 par Maître Didier Schönberger, préqualifié, au nom de son mandant ;

Vu le mémoire supplémentaire du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 mars 2019 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision directoriale critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport complémentaire, ainsi que Maître Didier Schönberger et Monsieur le délégué du gouvernement Steve Collart en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 2 avril 2019 à laquelle l’affaire avait été refixée pour la continuation des débats.

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Monsieur … déposa sa déclaration pour l’impôt sur le revenu de l’année 2013 en date du 14 mars 2014 en indiquant « Néant » comme revenu imposable de l’année 2013 tout en déclarant être résident à …, …, depuis le 15 juin 2013.

Le bureau d’imposition, ayant informé Monsieur …, en exécution du paragraphe 205, alinéa 3 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », qu’il entendait s’écarter de la déclaration pour l’impôt sur le revenu lui soumise et le contribuable ayant pu prendre position y relativement par courrier du 13 novembre 2014, émit en date du 19 novembre 2014 un bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2013, imposant dans le chef du contribuable des revenus de capitaux d’un montant total de … euros.

Par un courrier daté du 26 janvier 2015, Monsieur … adressa au directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur », une réclamation à l’encontre du prédit bulletin.

Le directeur, suite à une double mise en état effectuée conformément aux paragraphes 243, 244 et 171 AO, fit partiellement droit à la prédite réclamation en ramenant l’impôt sur le revenu dû pour l’année 2013, y compris la contribution au Fonds pour l’emploi, à … euros par décision directoriale du 17 octobre 2017, référencée sous le n° C 20568, décision libellée en les termes suivants :

« Le directeur des contributions, Vu la requête introduite le 28 janvier 2015 par le sieur …, demeurant à L-…, pour réclamer contre le bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2013, émis le 19 novembre 2014 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254, alinéa 2 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

Vu la mise en état du directeur des contributions du 28 octobre 2016, en vertu des §§ 243, 244 et 171 AO et la réponse y afférente du réclamant, entrée le 16 novembre 2016 ;

Vu la mise en état du directeur des contributions du 9 décembre 2016, en vertu des §§ 243, 244 et 171 AO et la réponse y afférente du réclamant, entrée le 14 décembre 2016 ;

Considérant que la réclamation a été introduite par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 228 AO) de la loi, qu’elle est partant recevable ;

Considérant que le réclamant fait grief au bureau d’imposition d’avoir imposé dans son chef des revenus de capitaux d’un montant total de … euros ;

Considérant qu’en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d’office un réexamen intégral de la cause, sans égard aux conclusions et moyens du réclamant, la loi d’impôt étant d’ordre public ;

qu’à cet égard, le contrôle de la légalité externe de l’acte doit précéder celui du bien-

fondé ;

qu’en l’espèce la forme suivie par le bureau d’imposition ne prête pas à critique ;

Considérant que le réclamant a remis une déclaration pour l’impôt sur le revenu de l’année 2013 en date du 14 mars 2014 ; que, cependant, il s’est contenté de ne remettre que les pages 1, 2, 15 et 16 du prédit formulaire ; qu’il a inscrit à la ligne « total des revenus nets » de la page 16, aussi bien dans les cases prévues aux revenus non exonérés que dans celles prévues aux revenus exonérés, la mention « NEANT », de sorte que le revenu imposable de l’année 2013 serait également « NEANT » ; qu’il a déclaré être résident à …, depuis le 15 juin 2013 ;

Considérant qu’en exécution du § 205, alinéa 3 AO, le bureau d’imposition a informé le réclamant par une lettre datée du 22 octobre 2014, qu’il envisageait de s’écarter de la déclaration pour l’impôt sur le revenu de l’année litigieuse ; qu’en l’occurrence, le bureau d’imposition entendait imposer, d’une part, des revenus bruts payés par les compagnies d’assurances de droit français « GPA assurances Groupe Generali » (ci-après « Generali ») et « Sogecap » se chiffrant au total à … euros au titre de revenus nets provenant de capitaux mobiliers, et, d’autre part, une valeur locative pour un montant de … euros en raison de l’occupation d’un immeuble sis …, dont le réclamant est propriétaire ;

Considérant qu’aux termes du § 205, alinéa 3 AO des divergences notables par rapport à la déclaration du contribuable doivent, pour autant qu’elles soient en sa défaveur, lui être communiquées pour observation préalablement à l’émission du bulletin ; que le but du § 205, alinéa 3 AO, en tant que principe de bonne administration, consiste à vérifier les conclusions auxquelles tend une instruction en défaveur du contribuable et partant à éviter d’éventuels malentendus ;

Considérant que suite au prédit courrier, le réclamant s’est montré insatisfait quant aux divergences en sa défaveur par le biais d’une lettre introduite en date du 13 novembre 2014, tandis qu’il n’a pas apporté des éléments nouveaux et révélateurs au bureau d’imposition ; qu’il s’ensuit que le bureau d’imposition a procédé à l’imposition de l’année 2013 en se référant aux redressements communiqués dans son courrier du 22 octobre 2014 ;

qu’il découle de ce qui précède, qu’en l’espèce la forme suivie par le bureau d’imposition ne prête pas à critique ;

Considérant que le bureau d’imposition a été informé par le bureau de la retenue d’impôt sur les intérêts en date du 7 août 2014 que le réclamant a bénéficié d’un paiement de … euros de la part de Sogecap ; qu’en l’espèce, l’information a indiqué qu’il s’agit d’un paiement d’intérêts survenu pendant l’année litigieuse ;

Considérant que le réclamant a, à de maintes reprises et finalement, par l’intermédiaire de son avocat, demandé des attestations de résidence fiscale au bureau d’imposition compétent « afin d’éviter la retenue à la source en France, il lui est nécessaire d’obtenir les attestations de résidence que vous trouverez en annexe, dûment complétées et signées par vos soins. » ;

que le bureau d’imposition a dès lors constaté un deuxième paiement effectué pendant l’année d’imposition litigieuse par Generali ; que, donc, le réclamant a révélé cette information dans le seul but d’obtenir une attestation de résidence fiscale ;

Considérant qu’en vertu de l’article 2, alinéa 2 L.I.R. le contribuable résident est tenu de déclarer la totalité de ses revenus perçus au cours d’une année, fussent-ils de nature indigène ou étrangère ; qu’en d’autres termes, il est tenu de déclarer ses revenus mondiaux, quitte à seulement les prendre en compte afin de déterminer le taux d’imposition, applicable aux seuls revenus indigènes ;

Considérant qu’il échet de mettre en exergue que le réclamant n’a déclaré aucun revenu pour l’année litigieuse, alors qu’il s’est vu verser un montant total se chiffrant à (… + … i.e.) … euros sous forme d’intérêts ; que force est de relever qu’il a signé lui-même sa déclaration pour l’impôt sur le revenu de l’année 2013 en indiquant à 5 reprises qu’il n’aurait eu aucun revenu pendant l’année litigieuse (« NEANT ») ; que dans sa requête datée du 26 janvier 2015, il affirme lapidairement « J’espère que vous croirez en ma bonne foi dans cette affaire, et qu’en aucun cas j’ai eu l’intention (sic) flouer l’administration des contributions. » ; qu’il est toutefois quelque peu douteux qu’une personne ne se souvienne plus des rachats partiels des contrats d’assurance en 2013 pour la somme modique de (… + … + … + … i.e.) … euros ; qu’il peut valablement être supposé que le réclamant n’entendait justement pas déclarer les revenus litigieux, en l’occurrence, les intérêts résultant des montants investis ;

Considérant que le bureau d’imposition était contraint d’imposer les revenus issus des rachats des contrats d’assurance en tant que revenu net provenant de capitaux mobiliers se chiffrant dès lors à (… - … (frais d’obtention) - … (tranche exemptée) i.e.) … euros ;

Considérant que le réclamant, ancien actionnaire principal du groupe français « … », a cédé en 2004 l’ensemble des parts qu’il détenait dans le dit groupe, représentant … pour cent du capital ; que d’après les articles de presse, cette vente a eu lieu pour … euros à … euros ; que toutefois, le réclamant a partagé cette somme avec deux autres actionnaires principaux, de sorte qu’il est difficile de supputer le montant exact des fonds recueillis par lui ;

Considérant que le réclamant affirme avoir placé à l’époque tous ses fonds dans quatre contrats d’assurance ; que d’après les documents fournis, ces placements se sont chiffrés au total à … euros en 2005 ; qu’au fur et à mesure des années, il a procédé à des retraits partiels de ces contrats d’assurance ;

Considérant qu’en l’espèce, le réclamant avait été invité par le directeur de l’administration des contributions à présenter en détail ses revenus mondiaux, i.e. ses revenus indigènes et étrangers, réalisés du 15 juin au 31 décembre 2013, ainsi que l’intégralité des contrats d’assurance souscrits auprès des compagnies d’assurances afférentes ;

Considérant que lors de sa réponse le réclamant a réaffirmé que « Je n’ai donc pas de revenu (sic) étrangers ou indigènes. » ;

Considérant que le réclamant avait besoin d’une attestation de résidence établie par le bureau d’imposition compétent, afin de la faire valoir lors d’une vente immobilière en France en 2014 ; que lors d’un télémessage du 25 septembre 2014, il a réitéré sa demande par le biais de son avocat, en expliquant que « L’absence de ce certificat est préjudiciable du fait qu’il ne peut totalement encaisser le produit issu d’une vente immobilière française, alors même qu’il envisage d’autres cessions pour lesquelles le même problème va se poser. » ; que, par conséquent, le réclamant serait propriétaire au moins de deux autres immeubles ; que l’« AVIS D’IMPÔT 2014 », émis par la Direction générale des finances publiques en France, fixant l’impôt sur les revenus de 2013, mentionne qu’ « Au 1er janvier 2014, au moins une de vos résidences (principale ou secondaire) est équipée d’un téléviseur. » ;

Considérant que le directeur a procédé en date du 9 décembre 2016 à une seconde mise en état du dossier afin de se procurer de plus amples détails en ce qui concerne les immeubles du réclamant ; que la dite mise en état du dossier est libellée comme suit :

- le réclamant est invité à prendre position par rapport aux affirmations de son avocat, en l’occurrence Me …, prétendant dans son télémessage du 25 septembre 2014 que « L’absence de ce certificat est préjudiciable du fait qu’il ne peut totalement encaisser le produit issu d’une vente immobilière française, alors même qu’il envisage d’autres cessions pour lesquelles le même problème va se poser », ainsi que de prendre position par rapport à l’« Avis d’impôt 2013 (impôt sur les revenus de 2013) », émanant de la Direction générale des finances publiques en France et indiquant qu’« Au 1er janvier 2014, au moins une de vos résidences (principale ou secondaire) est équipée d’un téléviseur », à fournir, le cas échéant, des explications quant à la possession d’immeubles à l’étranger, notamment quant à leur destination (p.ex. location).

Considérant que le réclamant a précisé lors de sa réponse à la deuxième mise en état du directeur, qu’« Au premier janvier 2014, je possédais les biens immobiliers suivant (sic) :

Un appartement à Paris … Un appartement à l’Alpe d’Huez, … (Isère) » ;

que l’appartement à l’Alpe d’Huez a été cédé le 31 juillet 2014 ; qu’aux dires du réclamant : « à l’époque je cédais ma résidence secondaire de montagne qui n’avait plus lieu d’être, étant donné que je m’installais au Luxembourg » ; que l’appartement à Paris n’a été cédé qu’en date du 28 avril 2015 « car il s’agissait de ma résidence principale de Paris, jusqu’au 21 juin 2013, que j’ai mis beaucoup de temps à vendre du fait de la récession immobilière de l’époque » ; que finalement, il affirme que « je n’ai plus d’immeuble à l’étranger, mes résidences secondaires ont été cédées en 2014 et 2015 (voir certificat (sic) en annexe). Ces deux biens n’ont pas été donnés en location, car ils étaient en vente » ;

Considérant que d’après les affirmations du réclamant, ce dernier n’avait donc pas de revenus immobiliers, alors qu’il possédait deux appartements à l’étranger destinés à son utilisation personnelle ; que ces appartements sont donc à considérer comme résidences secondaires depuis le 15 juin 2013 ;

En ce qui concerne le revenu net provenant de la location de biens Considérant, en matière de principe, que la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.) qualifie de revenu provenant de la location de biens la valeur locative de l’habitation occupée par le propriétaire, fixée en application de l’article 98, alinéa 1er, numéro 5 L.I.R. et du règlement grand-ducal du 12 juillet 1968 en portant exécution ; qu’en vertu de l’article 4 du prédit règlement, la valeur locative annuelle est fixée à 4% de la tranche de valeur unitaire correspondant à l’habitation ne dépassant pas 3.800 euros et à 6 % de la tranche de cette valeur unitaire dépassant 3.800 euros ;

Considérant qu’en l’espèce, force est de constater que le réclamant est devenu propriétaire d’un appartement sis à … en date du 19 juin 2013, l’emménagement dans sa nouvelle habitation ayant suivi en date du 20 juin 2013 ; que la valeur locative forfaitaire se chiffre dès lors à (… (valeur unitaire) x 4% x 6/12 i.e.) … euros ;

Considérant que le réclamant était propriétaire de deux appartements en France ; que ces appartements sont à considérer comme résidences secondaires pour la période du 15 juin 2013 au 31 décembre 2013 ;

Considérant qu’en vertu de la circulaire du directeur des contributions L.I.R. n° 58 du 16 juillet 1975 lorsqu’une habitation est située à l’étranger, la fixation forfaitaire d’une valeur locative ne peut être appliquée faute de valeur unitaire et doit donc être fixée par estimation ;

qu’en l’espèce la valeur unitaire des deux immeubles est estimée à chaque fois à … euros et par conséquent les valeurs locatives forfaitaires sont fixées à ((4% * …) x 6/12 i.e.) … euros chacune ;

Considérant que l’article 3 de la convention contre les doubles impositions conclue entre la France et le Luxembourg dispose que le droit d’imposition des revenus immobiliers revient à l’Etat dans lequel l’immeuble est situé ; que toutefois, conformément aux dispositions de l’article 134 L.I.R., ensemble avec l’article 19 alinéa 1er de la convention contre les doubles impositions précitée, ces revenus sont à prendre en compte lors de la détermination du taux d’impôt global à appliquer aux revenus indigènes ; qu’ainsi, dans le cadre de l’imposition fictive des revenus mondiaux réalisés par le réclamant pendant l’année litigieuse, une valeur locative forfaitaire de (2 x … i.e.) … euros est à prendre en compte aux fins de la détermination du revenu net exonéré provenant de la location de biens ;

En ce qui concerne le paiement fait par la compagnie d’assurance Generali Considérant que le réclamant a contracté en date du 30 mai 2003 un contrat d’« Assurance Vie Multifonds » auprès de Generali ; qu’au cours de l’année litigieuse, il a procédé au rachat intégral de la dite assurance pour un montant brut de … euros, le bureau d’imposition ayant, partant, ajouté et imposé les intérêts créditeurs émanant du capital accumulé (i.e. … euros) dans la rubrique du revenu net provenant de capitaux mobiliers ;

Considérant, à titre explicatif, qu’une assurance-vie est une forme d’assurance dont la vocation d’origine est de garantir le versement d’une certaine somme d’argent (capital ou rente) lorsque survient un événement lié à l’assuré (son décès ou sa survie) ; que la forme la plus répandue d’une telle assurance-vie est celle qui verse le capital ou la rente, soit en cas de décès, soit en cas de survie à une date fixe et précise ; que l’assurance-vie forme donc une sorte de double contrat d’assurance décès et d’assurance en cas de vie sur une durée unique ;

Considérant, à ce titre, que l’assurance-vie permet aussi de faire fructifier des fonds tout en poursuivant un objectif à long terme (p.ex. : la retraite, un investissement immobilier,…), sa durée étant déterminée à la souscription et reconductible ou non selon les contrats, par prorogation, normalement, d’année en année ; qu’elle garantit ainsi le remboursement de l’intégralité de l’épargne de l’assuré (dont une part se compose de capital (i.e. de versements effectués par l’assuré) et une part se compose d’intérêts) ; qu’en l’espèce, la valeur de rachat de l’assurance-vie du réclamant comprend donc, outre son capital versé sous forme de paiements réguliers, des intérêts créditeurs courus pendant toute la durée du contrat ;

Considérant qu’aux termes de l’article 115, alinéa 17 L.I.R., le capital et la valeur de rachat touchés du chef d’un contrat d’assurance contracté à titre individuel en cas de vie, d’invalidité ou de décès sont exempts de l’impôt sur le revenu ; qu’il échet de mettre en exergue, qu’en l’espèce, le contrat précise que le souscripteur, le cas échéant le réclamant, est bénéficiaire des primes versées en cas de rachat partiel ou total de l’assurance-vie (i.e. en cas de vie) qu’en cas de décès le contrat ne précise pas expressément le bénéficiaire des primes, alors que toutefois, il stipule : « VOIR DISPOSITIONS TESTAMENTAIRES DEPOSEES CHEZ MAITRE … NOTAIRE A GRENOBLE (38) » ; que dès lors, le contrat d’assurance-vie Generali fait clairement mention du bénéficiaire en cas de vie ou de décès ; qu’il s’ensuit que les intérêts perçus par le réclamant du chef du rachat de son contrat d’assurance-vie et formant une partie intégrante de la valeur de rachat, sont, à leur tour et de plein droit, exempts de l’impôt sur le revenu ;

Considérant que c’est à tort que le bureau d’imposition a imposé les intérêts en tant que revenu net provenant de capitaux mobiliers ; que les intérêts créditeurs se chiffrant à … euros sont exempts en vertu de l’article 115, alinéa 17 L.I.R. ;

En ce qui concerne les paiements faits par la compagnie d’assurance Sogecap Considérant que le réclamant a encore souscrit en date du 13 janvier 2005 auprès de Sogecap (Société Générale Gestion Privée), trois contrats dénommés « SOGECAPI MULTISUPPORT … » pour une durée de huit ans, prorogeables annuellement par accord tacite ; qu’au cours de l’année litigieuse, il a procédé au rachat intégral des trois contrats pour un montant brut total de (… + … + … i.e.) … euros, le bureau d’imposition ayant, partant, ajouté et imposé les intérêts créditeurs émanant du capital accumulé, se chiffrant à (… + … + … i.e.) … euros, dans la rubrique du revenu net provenant de capitaux mobiliers ;

Considérant que la loi du 27 juillet 1997 sur les contrats d’assurance fournit les définitions suivantes :

A. Contrat d’assurance: un contrat en vertu duquel, moyennant le paiement d’une prime fixe ou variable, une partie, l’assureur, s’engage envers une autre partie, le preneur d’assurance, à fournir une prestation stipulée dans le contrat au cas où :

a) dans l’assurance de dommages survient un événement incertain que l’assuré a intérêt à ne pas voir se réaliser b) dans l’assurance de personnes survient un événement incertain qui affecte la vie, l’intégrité physique ou la situation familiale de l’assuré.

Est considéré comme contrat d’assurance un contrat nominatif basé sur les techniques des opérations de capitalisation et comportant une clause d’attribution bénéficiaire ;

B. Opération de capitalisation: un contrat au porteur comportant l’engagement, en échange de versements uniques ou périodiques, de fournir une prestation fixée dans le contrat ou liée à l’évolution de la valeur ou du rendement des actifs auxquels le contrat est adossé ;

Considérant que la loi distingue principalement entre deux produits, en l’occurrence :

1) les contrats repris sub A, destinés à fournir une prestation particulière, au cas où un évènement incertain se produit et contre lequel l’assuré entend se protéger, pouvant se rapporter aussi bien à une chose qu’à une personne (assurances contre les dommages matériels ou personnels) ;

2) les produits enrichissants repris sub B destinés à un investissement financier pur et simple et qui, contrairement aux contrats repris sub 1), n’offrent aucune protection quelconque, mais uniquement des services financiers en relation avec le capital investi contractuellement ;

Considérant qu’en l’espèce, les trois contrats souscrits par le réclamant ne contiennent aucune clause prévoyant une prestation particulière de la part de Sogecap en cas d’un évènement incertain, en l’occurrence en cas de vie, d’invalidité ou de décès ;

Considérant le fait que les investissements soient proposés par une compagnie d’assurance, ne change rien au fait qu’ils sont proches à des produits bancaires, vu qu’ils ne couvrent aucun risque et qu’ils sont utilisables comme des titres financiers usuels ; qu’il y a lieu de noter que les contrats litigieux ont été suivis par une agence de « Private Banking » à Paris, donc une agence qui rend des services financiers très personnalisés et sophistiqués, souvent résumés sous l’expression « gestion de fortune », à des particuliers détenant un patrimoine net « important » ; qu’il s’ensuit que les intérêts perçus par le réclamant du chef du rachat de ses contrats et formant une partie intégrante de la valeur de rachat, ne tombent pas dans le champ d’application de l’article 115, alinéa 17 L.I.R. au motif qu’il s’agit de placements purement financiers ayant comme unique but la rémunération du capital investi ;

Considérant qu’aux termes de l’article 97, alinéa 1er, n° 5 L.I.R. « Sont considérés comme revenus de capitaux mobiliers les intérêts de créances de toute nature non visées sub 2, 3, ou 4 et notamment des prêts, avoirs, dépôts, comptes d’épargne, comptes courants » ;

qu’en l’espèce, un taux d’intérêt applicable aux investissements du réclamant a été prévu dès la date d’effet des contrats litigieux, notamment en vue d’accroître son capital ; qu’il résulte à suffisance de preuve des développements qui précèdent que les intérêts créditeurs se chiffrant à … euros sont pleinement imposables dans la rubrique du revenu net provenant de capitaux mobiliers ; que dès lors, la décision du bureau d’imposition de refuser l’application de l’article 115, alinéa 17 L.I.R. à l’endroit des contrats Sogecap est à confirmer ;

Considérant qu’en vertu de l’article 105 L.I.R. le revenu net provenant de capitaux mobiliers est à réduire des frais d’obtention, donc des dépenses faites directement en vue d’acquérir, d’assurer et de conserver des recettes ; que suivant le n° 3 de l’alinéa 1er de l’article 107 L.I.R., le minimum forfaitaire des frais d’obtention pour les revenus nets provenant de capitaux mobiliers se chiffre à 25 euros ; que l’alinéa 2 du même article dispose que « Lorsque l’assujettissement du contribuable à l’impôt n’a pas existé durant toute l’année, ces montants se réduisent à respectivement … euros, … euros et … euros par mois entier d’assujettissement. » ; qu’en l’occurrence, le réclamant a déclaré être résident à …, depuis le 15 juin 2013, de sorte que les frais d’obtention se chiffrent à (6 x … i.e.) … euros ;

Considérant qu’en vertu de l’article 115, alinéa 15 L.I.R. la première tranche de 1.500 euros des revenus visés à l’article 97 L.I.R. est exempte de l’impôt sur le revenu ;

Considérant que, finalement, le revenu net provenant de capitaux mobiliers se chiffre à (… - … - 1.500 i.e.) … euros ;

Considérant que le minimum forfaitaire pour dépenses spéciales visées à l’article 109, alinéa 1er, n° 1 et 1a L.I.R., à l’article 110, n° 4 L.I.R. et aux articles 111 et 111bis L.I.R. se chiffre à 480 euros ; que l’article 113, alinéa 1er L.I.R. dispose que « Lorsque l’assujettissement du contribuable à l’impôt n’a pas existé durant toute l’année, le forfait est à prendre en considération en proportion des mois entiers d’assujettissement. » ; qu’en l’espèce le forfait pour dépenses spéciales se chiffre à (480 x 6/12 i.e.) 240 euros ;

Considérant que le redressement de l’impôt sur le revenu de l’année 2013 fait l’objet de l’annexe qui constitue une partie intégrante de la présente décision (…) ».

Par requête déposée le 22 décembre 2017 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation sinon subsidiairement à l’annulation de la décision directoriale précitée du 17 octobre 2017.

Par requête déposée en date du 8 janvier 2018, inscrite sous le numéro 40578 du rôle, il a encore fait introduire une demande tendant à voir prononcer le sursis à exécution de ladite décision directoriale du 17 octobre 2017 dont il fut débouté par une ordonnance présidentielle du 15 janvier 2018.

Il résulte de la lecture combinée des dispositions du paragraphe 228 AO, et de l’article 8, paragraphe (1) 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, qu’un recours au fond est ouvert contre la décision directoriale litigieuse.

Le recours principal en réformation est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

Il n’y a dès lors pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

A l’appui de son recours et en fait, le demandeur expose avoir procédé en date du 12 septembre 2013 au rachat total d’un contrat d’assurance vie multifonds détenu depuis 2003 auprès de GPA assurances groupe Generali. Le 13 septembre 2013, il aurait perçu le versement des fonds correspondant au rachat total de trois contrats de capitalisation « Sogecapi Multisupport … » conclus avec la société anonyme de droit français d’assurance sur la vie et de capitalisation Sogecap, ci-après désignée par « Sogecap », détenus depuis 2005 en démembrement par lui-même et, respectivement, son épouse et ses deux filles.

Il insiste sur le fait qu’il aurait été résident français, tout en relevant que son déménagement de Paris vers le Luxembourg n’aurait eu lieu que du 2 au 11 octobre 2013, étant donné que son appartement au Luxembourg n’aurait pas été habitable avant le 15 octobre 2013 au plus tôt, du fait des travaux en cours.

Il expose avoir remis, au titre de l’année fiscale 2013, sa déclaration d’impôt en France, tout en déposant une déclaration fiscale au Luxembourg ne renseignant aucun revenu.

En droit, il déduit de ces faits, et en particulier de la circonstance que le changement de son foyer permanent de Paris à Luxembourg n’aurait été opéré qu’en octobre 2013 et que les ordres de rachat des contrats et la réception des fonds y afférents auraient été exécutés en septembre 2013, alors qu’il aurait encore matériellement résidé à Paris, que son revenu de source française aurait en toute hypothèse été imposable exclusivement dans son pays de résidence, soit la France, dans lequel un abattement de … euros lui aurait été accordé en sa qualité de « contribuable non résident français ».

Subsidiairement, il fait plaider que les paiements perçus de la part de Sogecap échapperaient au champ d’application de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, dénommée ci-après « LIR ».

Il expose à cet égard que le produit du rachat des contrats de capitalisation « Sogecapi multisupport … » ne serait pas imposable au titre du revenu de capitaux mobiliers au sens de l’article 97 LIR en tant qu’intérêts. En effet, il considère, en ce qui concerne la participation aux résultats et le rachat, que les contrats multisupport donneraient accès à la fois (i) aux fonds en euros, la participation aux résultats étant en ce cas affectée en majoration du capital constitué des souscriptions en cours ; la valeur de rachat étant égale au capital constitué à la date de réception de la demande, ainsi qu’à (ii) des supports en unités de compte : les revenus étant réinvestis ; la valeur de l’unité de compte correspondante tenant compte de ces réinvestissements. Il estime ainsi que la valeur de rachat serait dans ce cas égale au produit du nombre d’unités de compte inscrit à la souscription par la valeur de l’unité de compte en euros.

Aussi, en s’appuyant sur un avis de la Commission française des études comptables de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes en France, selon lequel un tel contrat devrait être analysé comme un produit de placement unique, même si le souscripteur peut modifier la répartition entre les supports, il explique encore qu’au moment du rachat, les produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation seraient, lors du dénouement du contrat, constitués, en droit français, par la différence entre les sommes remboursées au bénéficiaire et le montant des primes versées ; toutefois, cette différence ne correspondrait à aucun élément de la liste exhaustive des revenus de capitaux mobiliers énumérés à l’article 97 LIR. Or, les revenus non spécifiquement énumérés à l’article 97 LIR seraient hors du champ d’application de la loi.

A titre plus subsidiaire, il considère qu’étant donné que les revenus en question seraient capitalisés ou réinvestis chaque année, le rachat total des trois contrats effectué en date du 13 septembre 2013 aurait donné lieu à une réalisation en capital, à savoir à une plus-value qui tomberait en dehors du champ d’application de l’article 99bis LIR, s’agissant d’un gain en capital hors champ d’application de la LIR par déduction de l’article 99bis LIR, ne constituant pas en l’espèce le fruit d’une opération de spéculation.

A titre encore plus subsidiaire, il estime que ces revenus seraient à soumettre au demi-

taux global. Dans ce contexte, il expose que l’absence de prise en compte des revenus de contrats capitalisation serait la conséquence d’une omission du législateur. En effet, si l’article 115, alinéa 17 LIR prévoirait que sont exemptés le capital et la valeur de rachat touchés du chef d’un contrat d’assurance contracté à titre individuel en cas de vie, d’invalidité ou de décès, mais que le capital et la valeur de rachat touchés en vertu d’un contrat de prévoyance-vieillesse prévu à l’article 111bis LIR ne sont pas exemptés pour être, pour leur part, imposables au demi-

taux global par application combinée des articles 131 (1) c) et 132 (2) 5 LIR, le contrat de capitalisation français serait assimilable au contrat de prévoyance-vieillesse.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur verse différents éléments et pièces pour sous-tendre son affirmation selon laquelle il « « [n’aurait] pas [été] résident effectif avant l’année 2014, [de sorte à ne] pas [avoir] renseigné de revenu imposable au Luxembourg en 2013 ». Il fait valoir, à ce titre, que « la simple possession d’un immeuble sans y habiter ne suffi[rait] pas pour y établir sa résidence ».

Il réitère son affirmation suivant laquelle, il aurait payé l’intégralité des impôts dus en tant que résident français, à savoir le prélèvement forfaitaire libératoire de 7,5% retenu à la source par chacune des compagnies d’assurance sur les intérêts créditeurs provenant du capital accumulé.

Quant au certificat de résidence qu’il aurait sollicité, il conteste les affirmations du délégué du gouvernement selon lesquelles il aurait eu un intérêt à en requérir un, alors que la retenue à la source aurait été dûment prélevée en France. Etant donné qu’il n’aurait pas été résident luxembourgeois au cours de l’année 2013, il n’aurait pas dû être imposé sur les montants perçus au titre de revenu provenant de la location de biens et des paiements effectués par la compagnie d’assurance Generali ou par Sogecap.

Par voie de mémoire supplémentaire, autorisé par le tribunal pour prendre position sur la question du paiement par le demandeur de l’impôt dû en France en tant que résident français pour l’année 2013, au vu du dépôt au greffe par ce dernier de l’avis d’impôt sur les revenus et d’impôt de solidarité de l’année 2013, tel que requis par le tribunal à l’audience publique des plaidoiries du 4 décembre 2018, le demandeur verse diverses pages de l’avis d’impôt sur les revenus et d’impôt de solidarité sur la fortune 2014 ainsi qu’une attestation d’un avocat inscrit aux barreaux de Grenoble et de Chambéry certifiant qu’il « [se serait] régulièrement acquitté de l’impôt dû en France au titre de [différents] avoirs » « au titre de résident fiscal français pleinement imposable » pour l’année 2013.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours dans tous ses moyens.

A titre liminaire, il convient de relever que les parties sont d’abord en désaccord sur la question de savoir si le demandeur était fiscalement résident au Luxembourg au cours de l’année 2013 et, le cas échéant, à partir de quelle date.

L’article 2 LIR dispose, dans sa teneur applicable à l’année d’imposition 2013, que « (1) Les personnes physiques sont considérées comme contribuables résidents si elles ont leur domicile fiscal ou leur séjour habituel au Grand-Duché. Les personnes physiques sont considérées comme contribuables non résidents si elles n’ont pas leur domicile fiscal ni leur séjour habituel au Grand-Duché et si elles disposent de revenus indigènes au sens de l’article 156. (…) ».

Cette disposition légale soumet la qualité de contribuable résident à la condition d’avoir son domicile fiscal ou son séjour habituel au Grand-Duché de Luxembourg. Ces deux notions sont précisées respectivement par les paragraphes 13 et 14 de la loi d’adaptation fiscale du 16 octobre 1934, ci-après désignée « Steueranpassungs-Gesetz » en abrégé « StAnpG ».

Aux termes du paragraphe 13 StAnpG: « Einen Wohnsitz im Sinn der Steuergesetze hat jemand dort, wo er eine Wohnung innehat unter Umständen, die darauf schließen lassen, dass er die Wohnung beibehalten und benutzen wird », tandis qu’aux termes du paragraphe 14 StAnpG: « (1) Den gewöhnlichen Aufenthalt im Sinn der Steuergesetze hat jemand dort, wo er sich unter Umständen aufhält, die erkennen lassen, dass er an diesem Ort oder in diesem Land nicht nur vorübergehend verweilt. Unbeschränkte Steuerpflicht tritt jedoch stets dann ein, wenn der Aufenthalt im Inland länger als sechs Monate dauert. In diesem Fall erstreckt sich die Steuerpflicht auch auf die ersten sechs Monate ».

Le paragraphe 13 StAnpG définit ainsi le domicile fiscal comme le lieu où le contribuable a la possession d’une habitation dans des conditions permettant de conclure qu’il la conservera et en fera usage. Cette notion suppose de la sorte la possession matérielle d’une habitation, ainsi que « des circonstances de fait [dont] résulte l’intention de conserver et d’occuper une habitation dans le pays » (projet de loi concernant l’impôt sur le revenu, doc.

parl. 571, commentaire des articles, ad art. 3)1.

La possession (« Verfügungsmacht ») s’entend du pouvoir de disposer en droit et en fait d'une habitation, que ce soit de façon directe en qualité de propriétaire, d'usufruitier ou de locataire ou encore de façon dérivée ou indirecte par le biais d’une autre personne2.

Concernant l’admission « des circonstances de fait [dont] résulte l’intention de conserver et d’occuper une habitation dans le pays », il convient de préciser liminairement que l’intention intime du contribuable dans le sens du maintien ou non du domicile fiscal initial ne constitue pas un critère, étant donné que le paragraphe 13 StAnpG prend à cet égard précis le contrepied de la disposition antérieure du paragraphe 80 AO qui avait érigé l’intention de maintenir l’habitation en critère pour la reconnaissance ou non d’un domicile fiscal3.

Force est au tribunal de constater qu’en la cause, les affirmations du demandeur sont manifestement contradictoires quant à la date à laquelle il serait devenu résident fiscal et varient au fil de ses écrits. En effet, il ressort, premièrement, incontestablement de sa déclaration fiscale pour l’impôt sur le revenu de l’année 2013, telle que remplie par ses soins, qu’à la date du 15 juin 2013, il serait devenu résident fiscal luxembourgeois. Deuxièmement, il découle des affirmations mêmes du demandeur dans sa requête introductive d’instance que « le changement du foyer permanent du [demandeur], de Paris à Luxembourg, n’[aurait] été opéré qu’en octobre 2013 ». Enfin, troisièmement, dans le cadre de son mémoire supplémentaire, le demandeur verse une attestation d’un avocat inscrit aux barreaux de Grenoble et de Chambéry certifiant qu’il « [se serait] régulièrement acquitté de l’impôt dû en France au titre de [différents] avoirs » « au titre de résident fiscal français pleinement imposable » pour l’année 2013.

Au regard des affirmations contradictoires du demandeur quant à la date effective de l’existence d’un domicile fiscal au Luxembourg dans son chef et au vu de la nécessité de vérifier l’existence de critères objectifs concernant l’admission « des circonstances de fait [dont] résulte l’intention de conserver et d’occuper une habitation dans le pays », tels qu’énoncés plus en avant, force est au tribunal de constater, de concert avec le délégué du gouvernement, que le demandeur a déclaré être résident à Luxembourg depuis le 15 juin 2013, cette date étant encore corroborée par l’inscription du demandeur au registre national des personnes physiques en date du 20 juin 2013. Le tribunal retient ainsi comme critère objectif pour l’admission d’un domicile fiscal au Luxembourg, la date du 15 juin 2013. Cette 1 trib. adm. 11 mai 2016, n°34142 du rôle conf. par Cour adm. 2 mars 2017, n° 38088C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Impôts, n°44.

2 Etudes Fiscales 124/127, Guy Poos : Notions fiscales de base concernant l’impôt sur le revenu, p. 32 3 cf. Hübschmann, Hepp, Spitaler, AO-Kommentar, § 8, Rz 1-4). Ainsi, dès lors que les critères objectifs pour l’admission d’un domicile fiscal se trouvent vérifiés, une volonté subjective contraire n’affecte pas l’existence du domicile fiscal (cf. BFH 22 avril 1994, III R 22/92, BStBl. II 1994, 887 ; 23 novembre 2000, VI R 165/99, BStBl.

II 2001, 279.

conclusion n’est énervée i) ni par la production par le demandeur de documents bancaires et professionnels et autres éléments relatifs à sa vie personnelle, dès lors que ces éléments ne permettent pas de retenir une date précise établissant le changement de résidence, ii) ni par l’avis d’impôt 2014 sur les revenus de l’année 2013 et de l’impôt de solidarité sur la fortune 2014 en France tel que requis par le tribunal dans son avis du 8 février 2019, étant donné qu’au regard du caractère manifestement lacunaire dudit document, le tribunal n’est pas en mesure de retenir que le demandeur aurait fait l’objet d’une imposition en France pour les revenus perçus en 2013, iii) ni encore par l’attestation d’un avocat français qui n’est manifestement pas habilité à trancher la question de la fixation d’une résidence fiscale.

Ce moyen étant rejeté, il y a lieu d’examiner les autres moyens et arguments subsidiaires du demandeur gisant à la base de sa requête introductive d’instance dirigée à l’encontre de la décision déférée.

Il échet de constater que le demandeur ne conteste pas la décision déférée sur l’imposition au titre du revenu net provenant de la location de biens, étant précisé que l’article 2, paragraphe (2) LIR dispose que « [l]es contribuables résidents sont soumis à l’impôt sur le revenu en raison de leur revenu tant qu’indigène qu’étranger ».

Il y a encore lieu de retenir que la décision déférée ayant réformé le bulletin d’impôt sur l’imposition des intérêts perçus par le demandeur au titre des paiements faits par la compagnie d’assurance Generali, le demandeur ne conteste pas non plus la décision déférée sur ce point.

Ainsi, le seul reproche qui demeure a trait à l’imposition des paiements faits par Sogecap.

Il ressort du dossier fiscal que Monsieur … a souscrit auprès de Sogecap en date du 18 avril 2005 trois contrats intitulés « Sogecapi Multisupport … », avec effet au 18 janvier 2005.

Il ressort de la note d’information relative auxdits contrats qu’il s’agit de « contrat de capitalisation en euros et/ou unités de compte », étant encore précisé que « [c]e contrat à versements libres relève de la branche 24 (capitalisation) par laquelle SOGECAP a reçu un agrément ». Il y est encore indiqué que le souscripteur choisit librement la durée de sa souscription en respectant un minimum de huit ans, étant encore précisé qu’il peut, soit, à tout moment, demander le rachat à son profit du capital constitué et au terme choisi, soit, à terme, demander à percevoir le capital constitué à cette date, soit proroger annuellement sa souscription par accord tacite, les garanties de souscription cessant néanmoins avec le règlement total du capital constitué.

Il est encore constant en cause que le demandeur a sollicité le rachat de ces trois contrats dont le règlement a été effectué le 13 septembre 2013 pour un montant total de … euros, à savoir la somme de … euros et … euros et … euros, étant précisé que le montant total des intérêts et plus-values s’est élevé à … euros soit la somme de … euros et … et … euros.

Les parties sont en désaccord sur le traitement fiscal desdits intérêts et plus-values qui ont été imposés au titre de revenus de capitaux mobiliers conformément à l’article 97, alinéa 1er, n°5 LIR, disposant que « Sont considérés comme revenus provenant de capitaux mobiliers :

(…) 5. les intérêts de créances de toute nature non visées sub 2, 3 ou 4 et notamment des prêts, avoirs, dépôts, comptes d’épargne, comptes courants ; ». Il y a lieu d’entendre que les revenus des créances, dépôts, cautionnements, comptes d’épargne et comptes courants qui ne sont pas compris dans les recettes d’une entreprise industrielle, commerciale, agricole ou de l’exercice d’une profession libérale sont également imposables au titre de l’article 97, paragraphe (1), n°5 LIR4.

De son côté, le demandeur estime que les sommes perçues devraient tomber sous le champ d’application de l’article 115 point 17 LIR, selon lequel « le capital et la valeur de rachat touchés du chef d’un contrat d’assurance contracté à titre individuel en cas de vie, d’invalidité ou de décès. Ne sont pas visés par l’exemption, le capital et la valeur de rachat touchés en vertu d’un contrat de prévoyance-vieillesse prévu à l’article 111bis ».

C’est à juste titre que le délégué du gouvernement estime, à l’instar du directeur, que les trois contrats souscrits par le demandeur auprès de Sogecap, ne comportant aucune prestation particulière dans son chef en cas de survenance d’un événement incertain, à savoir vie, invalidité ou décès, ne sauraient être qualifiés de contrat d’assurance au sens de l’article 1er point A de la loi modifiée du 27 juillet 1997 sur les contrats d’assurance qui définit le contrat d’assurance comme suit :

« Contrat d'assurance: un contrat en vertu duquel, moyennant le paiement d'une prime fixe ou variable, une partie, l'assureur, s'engage envers une autre partie, le preneur d'assurance, à fournir une prestation stipulée dans le contrat au cas où:

• dans l'assurance de dommages survient un événement incertain que l'assuré a intérêt à ne pas voir se réaliser;

• dans l'assurance de personnes survient un événement incertain qui affecte la vie, l'intégrité physique ou la situation familiale de l'assuré.

Est considéré comme contrat d'assurance un contrat nominatif basé sur les techniques des opérations de capitalisation et comportant une clause d'attribution bénéficiaire » En effet, en l’espèce, tel que cela a été relevé plus en avant, les contrats souscrits par le demandeur sont des contrats de capitalisation, étant donné qu’il reste propriétaire voire usufruitier de son capital engagé et prenant, à ce titre, part aux résultats financiers réalisés par Sogecap.

Force est encore au tribunal de constater que les sommes litigieuses ne sont pas non plus à considérer comme plus-values exemptées au titre de l’article 99bis LIR, tel que le prétend le demandeur, étant donné que les contrats de capitalisation ne sont pas l’objet d’une aliénation mais uniquement d’un rachat.

Il suit de ces considérations que la décision du directeur d’imposer les revenus perçus par le demandeur lors du rachat de ses contrats conclus avec Sogecap conformément à l’article 97, paragraphe (1), n°5 est à suivre. Le moyen y afférant est partant à rejeter pour ne pas être fondé.

Cette conclusion n’est pas énervée par l’affirmation du demandeur selon laquelle, suivant un avis de la Commission française des études comptables de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes en France, un tel contrat devrait être analysé comme un produit de placement unique, même si le souscripteur peut modifier la répartition entre les supports, étant encore précisé qu’au moment du rachat, les produits attachés aux bons ou contrats de 4 Manuel de droit fiscal, Alain Steichen, Edition Saint Paul, 2006, Tome 2, n° 1417 capitalisation seraient lors du dénouement du contrat constitués en droit français par la différence entre les sommes remboursées au bénéficiaire et le montant des primes versées, dès lors que l’avis de la Commission française des études comptables de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes en France n’a pas vocation à faire autorité au Luxembourg, étant encore relevé que les avis d’opération relatifs au rachat des trois produits renseignent expressément un montant détenu déterminé qualifié notamment d’« intérêts », indépendamment de la question de savoir si ces intérêts ne sont versés qu’à la date du rachat.

Cette conclusion n’est pas non plus énervée par le moyen du demandeur suivant lequel les revenus perçus par lui au titre du rachat de ses contrats conclus avec Sogecap seraient à soumettre au demi-taux global, dès lors que les revenus divers visés à l’article 99 alinéa 4 LIR sont relatifs à des contrats de prévoyance-vieillesse qui sont étrangers à la présente affaire tel que cela a été retenu ci-avant.

Enfin, cette conclusion n’est pas non plus énervée par les développements du demandeur évoqués dans le cadre de son mémoire supplémentaire suite à la question soulevée par le tribunal concernant le paiement de l’impôt dû en France en tant que résident français pour l’année 2013, en ce compris les paiements lui faits par Generali et Sogecap, dès lors que c’est à juste titre que le délégué du gouvernement relève que les chiffres versés par le demandeur n’emportent pas conviction en particulier en raison du fait que le montant référencé sur l’avis d’impôt en France pour l’année 2013 se différencie de celui de … euros retenu par le bureau d’imposition et que le demandeur reste en défaut d’apporter une quelconque explication plausible justifiant la différence de … euros, étant encore précisé que si la fiche concernant l’impôt de solidarité sur la fortune versée en cause est datée et signée pour l’année d’imposition 2014, celle pour l’année 2013 est seulement datée mais non signée.

Il découle des développements qui précèdent et face aux contradictions relevées plus en avant que le recours est à rejeter pour ne pas être fondé.

Au vu de l’issue du litige, la demande d’allocation d’une indemnité de procédure de 2.000 euros est à rejeter pour ne pas être fondée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours principal en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.000 euros ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Carlo Schockweiler, premier vice-président, Anne Gosset, premier juge, Olivier Poos, premier juge, et lu à l’audience publique du 27 septembre 2019 par le premier vice-président, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Carlo Schockweiler Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, 27 septembre 2019 Le greffier du tribunal administratif 16


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 40517
Date de la décision : 27/09/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2019-09-27;40517 ?

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