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14/08/2019 | LUXEMBOURG | N°43312

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 août 2019, 43312


Tribunal administratif N° 43312 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 juillet 2019 Chambre de vacation Audience publique de vacation du 14 août 2019 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 28 (2) d), L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43312 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 19 juillet 2019 par Maître Mariame YA

ZBACK, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom ...

Tribunal administratif N° 43312 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 juillet 2019 Chambre de vacation Audience publique de vacation du 14 août 2019 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 28 (2) d), L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43312 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 19 juillet 2019 par Maître Mariame YAZBACK, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Irak), de nationalité irakienne, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 1er juillet 2019 déclarant irrecevable sa deuxième demande de protection internationale sur le fondement de l’article 28, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 6 août 2019 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Mariam YAZBACK et Madame le délégué du gouvernement Christiane MARTIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique de vacation de ce jour.

Le 5 octobre 2015, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères, direction de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, entretemps abrogée par la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Le même jour, Monsieur … fut entendu par un agent de la Police Grand-Ducale, section police des étrangers et des jeux, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Le 10 novembre 2015, Monsieur … fut entendu par un agent du ministère en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, dit « règlement Dublin III ».

Les 22 juillet et 1er août 2016, Monsieur … fut encore entendu par un agent du ministère sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.

Par décision du 13 février 2017, expédiée par lettre recommandée le 14 février 2017 à l’intéressé, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, dénommé ci-après « le ministre », informa Monsieur … qu’il avait rejeté sa demande de protection internationale comme étant non fondée, tout en lui ordonnant de quitter le territoire dans un délai de trente jours.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 10 mars 2017, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision précitée du ministre du 13 février 2017 portant rejet de sa demande de protection internationale et de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte, recours dont il fut définitivement débouté par arrêt de la Cour administrative du 27 mars 2018, inscrit sous le numéro 40763C du rôle En date du 27 avril 2018, un report à l’éloignement fut accordé à Monsieur … jusqu’au 24 octobre 2018, lequel fut, par la suite, prolongé jusqu’au 5 février 2020.

Le 21 août 2018, Monsieur … introduisit une nouvelle demande de protection internationale auprès du ministère.

Les déclarations de Monsieur … sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg furent actées par un agent de la Police Grand-Ducale, section criminalité organisée - police des étrangers, dans un rapport du même jour.

Le 29 octobre 2018, Monsieur … fut encore entendu par un agent du ministère sur sa situation et les motifs sous-tendant sa nouvelle demande de protection internationale.

Par décision du 1er juillet 2019, notifiée à l’intéressé par courrier recommandé envoyé le 3 juillet 2019, le ministre informa Monsieur … que sa demande de protection internationale avait été déclarée irrecevable en application de l’article 28, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015, ladite décision étant libellée comme suit : « […] J’ai l’honneur de me référer à votre deuxième demande en obtention d’une protection internationale que vous avez introduite auprès du service compétent du Ministère des Affaires étrangères et européennes en date du 21 août 2018.

Il ressort de votre dossier que vous avez introduit une première demande de protection internationale au Luxembourg le 5 octobre 2015, qui a fait l’objet d’une première décision ministérielle de refus le 13 février 2017.

Vous avez invoqué à la base de cette demande que vous auriez quitté l’Irak parce que votre vie y serait menacée. Ainsi, vous auriez exploité un élevage de colombes précieuses et début 2014, quarante de ces oiseaux auraient été volés. Vous auriez déposé plainte auprès de la police et deux mois plus tard, un voisin vous aurait prévenu que d’autres voisins auraient surpris deux voleurs en flagrant délit, en train de voler vos colombes. Ces derniers les auraient attrapés et attachés et auraient informé la police. Vous indiquez que les policiers auraient emmené les deux voleurs, un dénommé « … » et un dénommé « … », au poste de police et vous auraient également convoqué, vous et vos voisins, pour témoigner afin d’enregistrer vos déclarations. Les policiers auraient constaté que les voleurs seraient déjà recherchés dans une autre affaire de vol. Le lendemain, vous auriez été informé que ces derniers auraient avoué avoir volé les colombes et de les avoir vendus. Avec d’autres membres de votre famille et de votre « zone », vous vous seriez ensuite rendus auprès des familles desdits voleurs et auriez exigé que celles-ci viennent avec leurs chefs de clan présenter leurs excuses et rendre ce qui 2 aurait été volé. Toutefois, lesdites familles auraient refusé de s’excuser, auraient nié les accusations et vous auraient même menacé. De plus, elles vous auraient fait savoir qu’elles feraient partie de l’« organisation de Badr ». Vous avez ajouté que ces deux familles détiendraient beaucoup de pouvoir au niveau de votre commune et qu’elles auraient pu s’adjoindre les services d’avocats très compétents qui travailleraient aussi pour le compte de l’« organisation de Badr ». A la requête de ces derniers, l’enquête contre les voleurs aurait été renouvelée, puisqu’ils « ont argumenté que les premières déclarations des coupables étaient faites sous la pression ». Les deux coupables seraient sortis de prison mi-août 2014 et n’auraient finalement jamais été jugés. De plus, les familles des coupables auraient exigé que vous leur payiez la somme de 16.000 $ afin de couvrir les frais d’avocats. Suite à votre refus de payer cette somme, votre situation se serait dégradée. En effet « durant 7 jours chaque nuit à partir de minuit jusque (sic) matin il y avait des voitures qui venaient et qui tiraient sur ma maison. […] c’étaient des personnes qui étaient en uniforme militaire ». Votre famille aurait eu peur et tous vos frères auraient déménagé, et même vos voisins auraient arrêté de vous soutenir. Vous vous seriez alors fait établir un passeport et vous auriez quitté l’Irak.

Le 27 mars 2018, vous avez été débouté de votre première demande de protection internationale par un arrêt de la Cour administrative (Numéro 40763C du rôle), au motif que:

« […] La Cour constate en premier lieu que les faits invoqués par Monsieur … avant son départ de son pays d’origine ne sont pas susceptibles d’être rattachés à l’un des motifs de persécution prévus par l’article 2, sub f) de la loi du 18 décembre 2015 et ayant trait à sa religion, à sa nationalité, à ses opinions politiques ou à son appartenance à un groupe social. En effet, ces faits, à savoir des menaces de mort de la part de membres de l’organisation de « Badr » à la suite des vols de pigeons dénoncés par l’appelant, relèvent d’une criminalité de droit commun et sont susceptibles d’être poursuivis en tant qu’infractions de droit commun devant les juridictions du pays d’origine de l’appelant, comme ce fût d’ailleurs le cas, […] de manière qu’ils se trouvent en dehors du champ de la protection prévue par cette disposition.

Pour le surplus, il convient de rappeler que le simple fait pour l’appelant d’être exposé à une vengeance et des pressions de la part des membres de l’organisation de « Badr » ne saurait être qualifié comme étant à un tel point exceptionnel, sinon différent, par rapport à la société environnante pour être susceptible de le faire appartenir à un groupe social ayant une identité propre au sens de l’article 32, sub d) de la loi du 18 décembre 2015, aux termes duquel « un groupe est considéré comme un certain groupe social lorsque, en particulier ses membres partagent une caractéristique innée ou une histoire commune qui ne peut être modifiée, ou encore une caractéristique ou une croyance à ce point essentielle pour l’identité ou la conscience qu’il ne devrait pas être exigé d’une personne qu’elle y renonce […] et [lorsque] ce groupe a son identité propre dans le pays en question parce qu’il est perçu comme étant différent par la société environnante ». L’appelant ne saurait partant être qualifié de membre d’un groupe social exposé à des persécutions. C’est dès lors à bon droit que les premiers juges ont rejeté le recours de Monsieur … en ce qui concerne le volet du statut de réfugié.

En ce qui concerne la demande du statut conféré par la protection subsidiaire, l’appelant fonde cette demande sur les mêmes faits que ceux invoqués à la base de sa demande de reconnaissance du statut de réfugié, à savoir les risques d’atteintes graves dans le cadre des agissements des membres de l'organisation de « Badr » et la volonté de vengeance desdits membres suite à l'emprisonnement de deux personnes faisant partie de ladite organisation en raison du vol d’une quarantaine de pigeons appartenant à Monsieur …, lesdits faits étant encore soutenus par un fait nouveau, à savoir le décès du fils de l'appelant fin janvier 2018.

[…] 3 Il convient tout d’abord de relever que les faits invoqués par Monsieur … ne sont pas contestés en leur principe, mais seulement interprétés de manière différente par les parties respectives. Ensuite, la Cour partage entièrement l’application de ces dispositions en l’espèce et l’analyse exhaustive et minutieuse de la situation particulière de l’appelant faite par les premiers juges, de manière que la Cour renvoie aux motifs tels que détaillés dans le jugement dont appel dans la mesure où ils ne sont pas repris dans la suite. Ainsi, les premiers juges ont conclu à bon droit qu’il ne ressort d’aucun élément du dossier que Monsieur … pourrait être condamné à la peine de mort ou être exécuté en cas de retour dans son pays d’origine.

Pour le surplus, c’est encore à bon escient que le tribunal est arrivé à la conclusion que l’appelant n’a pas démontré qu’il existe respectivement dans le sud de l’Irak et plus particulièrement dans la ville de … un conflit armé interne caractérisé par des violences aveugles en raison d’un conflit armé interne ou international tel que tout civil y serait exposé à des atteintes graves du simple fait de s’y trouver. Quant aux agissements des membres de l’organisation de « Badr », la Cour constate en premier lieu que les voleurs des colombes de Monsieur … ont été arrêtés puis détenus pendant près de 18 mois et si ces derniers ont été libérés par la suite après avoir été jugés, ladite libération ne saurait être interprétée comme équivalant à un défaut de protection de la part des autorités irakiennes au sens des articles 39 et 40 de la loi du 18 décembre 2015.

Concernant ensuite les actes de vengeance commis respectivement par les auteurs suspectés du vol des pigeons et les membres de l’organisation de « Badr » ayant tiré à plusieurs reprises des coups de feu sur la maison de Monsieur … et ayant menacé les membres de la famille de ce dernier, dont notamment ses enfants, il convient de noter que l’appelant a pu déposer une plainte à la suite des premiers coups de feu tirés sur sa maison et qu’il a déjà bénéficié d’une protection des autorités de son pays d’origine suite au vol des pigeons, de sorte qu’il ne saurait invoquer une perte de confiance et un sentiment d’abandon de la part des autorités policières et judiciaires irakiennes dans le sens que celles-ci ne seraient pas capables de lui fournir une protection appropriée.

Quant au récent décès du fils de Monsieur … survenu en date du 30 janvier 2018, la Cour rejoint les développements du délégué du gouvernement soutenant que les circonstances entourant le décès du fils de l’appelant ne se trouvent pas clairement établies. Ainsi, il se dégage d’un commentaire Facebook de l’Hôpital Universitaire de … qu’un jeune a été victime d’un accident de circulation, une voiture « Obama » étant entrée en collision avec un vélo près de la « Marine » avec une demande adressée aux jeunes de partager la publication. Pour le surplus, il convient de constater que l’acte de décès officiel versé en cause reste muet sur les circonstances et raisons du décès du fils de Monsieur …. S’il se dégage de deux attestations testimoniales rédigées en des termes identiques qu’une course poursuite a eu lieu avec tirs d’armes à feu en l’air venant de trois voitures, une Dodge et deux Toyota « Pick-Up » avec des écussons militaires de l’organisation de « Sadr » et que deux individus sont sortis des véhicules pour tirer avec des armes à feu en l’air et rouer de coups de pieds une victime transportée à l’hôpital deux heures après, un écrit du 13 février 2018 de la « Basra Investigation Court » fait cependant état d’un accident de circulation avec délit de fuite, tout en mentionnant la possibilité pour la famille de la victime de déposer une plainte (« the plaintifs have requested a personal right to file a complaint against the unknown perpetrator in case of identification »).

Partant, la Cour arrive à la conclusion qu’il n’existe pas d’éléments suffisants susceptibles d’établir un lien entre le décès du fils de Monsieur … et les motifs de persécution 4mis en avant par ce dernier et qu’il n'existe partant pas de sérieuses raisons de croire que l’appelant encourrait, en cas de retour dans son pays d’origine, un risque réel et avéré de subir des atteintes graves au sens de l’article 48 de la loi du 18 décembre 2015 justifiant l’octroi de la protection subsidiaire. […] ».

Le 20 avril 2018, vous avez sollicité un report à l’éloignement; report qui vous a été accordé jusqu’au 24 octobre 2018, puis prolongé jusqu’au 11 décembre 2018, suite à votre demande de renouvellement le 11 juin 2018.

Le 21 août 2018, vous avez introduit une deuxième demande de protection internationale.

Il ressort de vos déclarations que vous auriez introduit une deuxième demande de protection internationale au Luxembourg parce qu’après avoir reçu le rapport d’entretien de votre première demande, vous auriez remarqué plusieurs erreurs.

Vous faites ensuite allusion au prétendu assassinat de votre fils le 31 janvier 2018, que vous avez déjà mentionné dans le cadre de votre première demande, et prétendez qu’il aurait été assassiné par des personnes armées qui l’auraient d’abord poursuivi en voiture, puis auraient tiré des coups de feu et l’auraient finalement frappé jusqu’à ce qu’il meurt de ces blessures après avoir été transporté à l’hôpital en étant dans le coma.

Vous prétendez par ailleurs qu’en mars 2018, les clans se seraient réunis à Basra en présence des autorités. Au cours de cette réunion, votre oncle, le chef de votre clan, aurait signalé que votre fils aurait été tué par des membres de la milice Badr. Le même jour, ledit chef aurait été amené à un bureau de cette milice pour être interrogé. Vous dites qu’ils l’auraient questionné sur votre personne et vous auraient tenu pour responsable du fait que « leur fils » se trouverait en prison depuis une année. Le chef de votre clan aurait répondu qu’il ne saurait pas où vous vous trouveriez et qu’il n’aurait plus rien à faire avec vous. Sur demande de ces prétendus membres de la milice Badr, il aurait alors écrit deux documents d’expulsion du clan à l’encontre de votre personne.

A cela s'ajoute que vous vous trouveriez depuis trois ans au Luxembourg et que vous souffririez de problèmes psychiques.

Pour étayer vos dires, vous remettez plusieurs documents, dont la majorité a déjà été versée dans le cadre de votre première demande, documents qui vous auraient été envoyés par votre frère en Irak:

- Un document qui attesterait de votre expulsion de votre clan, daté au 13 août 2018 et une explication du clan concernant votre expulsion.

- Des attestations médicales vous concernant.

- L’acte de décès de votre fils et des photos de son cadavre et de son enterrement, déjà versés dans le cadre de votre première demande de protection internationale.

- Une demande de votre frère adressée à un tribunal concernant les enquêtes entreprises suite au décès de votre fils, daté au 11 février 2018, déjà versée dans le cadre de votre première demande de protection internationale.

- Un rapport du procureur du tribunal de Basra daté au 30 janvier 2018 concernant l’accident de votre fils, déjà versé dans le cadre de votre première demande de protection internationale.

5- Une publication sur « facebook » concernant la mort de votre fils, déjà versée dans le cadre de votre première demande de protection internationale.

- Une copie d’une prétendue explication de la prétendue directrice d’école de votre fille, datant de 2017, selon laquelle des hommes inconnus se seraient présentés à l’école et auraient demandé où se trouverait votre fille.

- Trois copies de prétendues attestations testimoniales identiques à la lettre de la part de vos voisins confirmant une attaque sur votre maison, déjà versées dans le cadre de votre première demande de protection internationale.

- Une clé USB contenant des vidéos qui montrent une attaque de plusieurs personnes sur une maison ainsi que votre fils décédé.

Je suis au regret de vous informer qu’en vertu des dispositions de l’article 28 (2) d) de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, votre demande de protection internationale est irrecevable au motif que vous n’avez présenté aucun élément ou fait nouveau relatifs à l’examen visant à déterminer si vous remplissez les conditions requises pour prétendre au statut de bénéficiaire d’une protection internationale.

En effet, conformément à l’article 32 de la loi du 18 décembre 2015, il s’agit d’abord de constater que vous avez déjà fait état du prétendu assassinat de votre fils, et que vous avez déjà versé tous les documents le concernant, dans le cadre de votre première demande de protection internationale. Il s’ensuit que ce fait a déjà été traité et toisé dans le cadre de votre précédente demande et que les documents ont également déjà été analysés, de sorte que le prétendu assassinat de votre fils ne saurait pas être pris en compte dans le cadre de votre nouvelle demande de protection internationale. Ce constat vaut d’autant plus que le rapport du « Basra Investigation Court » fait clairement état d’un accident de la route avec délit de fuite et que vous restez toujours et entièrement en défaut de fournir le moindre élément nouveau, voire de verser un quelconque document nouveau, qui pourrait contredire cette version des faits.

Le constat est de même pour la prétendue « attaque » contre votre maison, alors que vous l’avez également déjà mentionnée dans le cadre de votre première demande.

Quant au seul élément nouveau ressortant de votre deuxième demande de protection internationale, à savoir votre prétendue expulsion de votre clan, prétendument décidée par votre oncle en mars 2019, notons que ce seul fait, à le supposer avéré, ne saurait pas suffire pour établir dans votre chef une crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève et de la loi du 18 décembre 2015.

En effet, hormis le manque de gravité de cet acte, il s’agit de constater que la prétendue expulsion de votre clan n’a aucun lien avec votre race, votre nationalité, votre religion, vos opinions politiques ou votre appartenance à un certain groupe social, tel que prévu par la Convention de Genève et la loi du 18 décembre 2015.

Il ne saurait par conséquent pas non plus être perçu comme un élément nouveau, qui augmenterait de manière significative la probabilité que vous remplissiez les conditions prévues par la loi pour bénéficier d’une protection internationale.

Ajoutons encore qu’il est fortement surprenant que vous avez encore prétendu au cours de votre première demande de protection internationale que les malfaiteurs contre lesquels vous auriez porté plainte et qui seraient prétendument membres de la milice Badr, seraient 6sortis de prison en août 2014 et n’auraient finalement jamais été jugés à cause de la prétendue influence de leur clan ou de l’importance de leur famille. Or, dans le cadre de votre deuxième demande vous prétendez tout à coup que des membres de la milice Badr vous auraient en été 2018 accusé d’être responsable du fait que « leur fils » se trouverait en prison depuis une année à cause de vous, respectivement de vos dénonciations. Or, étant donné que selon votre première version, vos malfaiteurs auraient déjà été libérés en 2014 et plus jamais inquiété par les autorités par la suite, il ne fait aucun sens que vous prétendiez cette fois-ci qu’un de vos malfaiteurs se soit encore trouvé en prison en 2018 à cause de votre plainte. Quand bien même cette deuxième version serait avérée, ce qui est contesté, il s’agit de constater que vous auriez évidemment pu en faire état au cours de votre précédente demande de protection internationale. Cette nouvelle version des faits ne saurait donc pas non plus constituer un élément nouveau tel que prévu par ledit article 32.

Enfin, on peut encore soulever que les problèmes médicaux dont vous faites état ne sauraient pas fonder une demande en obtention d’une protection internationale et ne sauraient par conséquent pas non plus être perçus comme des éléments nouveaux tels que prévus par l’article 32 de la loi du 18 décembre 2015.

Votre nouvelle demande en obtention d’une protection internationale est dès lors déclarée irrecevable au sens de l’article 28 (2) d). […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 19 juillet 2019, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 1er juillet 2019.

Etant donné que la décision déférée déclare irrecevable la demande de protection internationale de Monsieur … sur base de l’article 28, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015 et que l’article 35, paragraphe (3), de ladite loi prévoit un recours en annulation en matière de nouvelles demandes déclarées irrecevables, seul un recours en annulation a pu être dirigé contre la décision ministérielle du 1er juillet 2019.

Le recours en annulation est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours et après avoir rappelé les faits et rétroactes se trouvant à la base de sa demande de protection internationale, le demandeur rappelle avoir été propriétaire d’un élevage de pigeons d’une grande valeur. Fin mars 2014, des membres de la milice dénommée « l’Organisation de Badr » auraient tenté de les voler. Lesdites personnes auraient été appréhendées par des voisins et emmenées par la police, puis auraient été placées en détention. La famille du demandeur aurait essayé de trouver une entente avec celle des détenus pour régler le litige à l’amiable, ce qui aurait, néanmoins, été un échec. Sans avoir été jugées, les personnes en question auraient été relaxées et « l’Organisation de Badr » aurait organisé son assassinat. Monsieur … aurait alors requis une protection auprès de la police et de la justice, démarche qui aurait été vaine selon lui, en raison de la soumission de ces organes à ladite milice. Il affirme n’avoir eu d’autres choix que de fuir face aux intimidations, menaces et tentatives de meurtre dont il aurait fait l’objet. Il précise que la menace contre sa vie resterait actuelle et bien réelle, alors que les attaques contre ses biens n’auraient pas cessé, malgré le fait qu’il aurait quitté l’Irak depuis longtemps. De surcroît, depuis sa fuite ses enfants auraient été retirés de l’école, étant donné qu’ils auraient été la cible de tentatives d’enlèvement par desindividus appartenant à « l’Organisation de Badr », le demandeur insistant sur le fait que son fils aurait été assassiné en janvier 2018 par les personnes qui seraient à sa recherche.

En droit et se basant sur l’article 37, paragraphe (3), de la loi du 18 décembre 2015, Monsieur … fait valoir qu’il conviendrait d’examiner sa situation individuelle dans le contexte général. Il reproche, plus particulièrement, au ministre une interprétation erronée des faits de l’espèce en ayant retenu que les faits dont il fait état relèveraient « d’une criminalité de droit commun ». Il donne à considérer, à cet égard, qu’il aurait été persécuté en raison de son appartenance à un groupe social et à son clan. Son activité d’exploitant au sein dudit clan aurait fait de lui une cible. Sa profession, qui consisterait dans l’achat et la revente de colombes étrangères, lui assurerait une ouverture sur l’Europe étant donné qu’il serait en contact avec des colombophiles étrangers et cette activité, du fait de sa confidentialité et du petit nombre d’éleveurs spécialisés, générerait des fonds substantiels lors de la vente de certains oiseaux à pédigrée. L’ « Organisation de Badr » l’aurait, dès lors, ciblé en raison de son activité afin de se procurer les moyens financiers lui permettant de financer ses activités criminelles. La résistance du demandeur, ainsi que l’intervention de la police auraient accentué la pression de ladite milice sur sa personne. Etant donné qu’il serait en mesure de témoigner du financement de la milice par le biais d’activités criminelles, ses assaillants tenteraient de le tuer par tous les moyens.

Le demandeur fait encore valoir que d’autres membres de sa famille auraient été victimes de menaces de la part de ladite milice et que ses enfants auraient également fait l’objet de tentatives d’enlèvements. A l’heure actuelle, sa maison serait encore toujours surveillée et son fils aurait été tué le 30 janvier 2018 dans des circonstances tragiques, le demandeur précisant, à cet égard, que son fils aurait été poursuivi par deux voitures portant des emblèmes de « Badr ». Les assaillants, habillés en uniforme de militaire, auraient tiré des coups de feu en l’air et auraient réussi à faire arrêter la voiture afin d’en extraire son fils pour « le battre à mort ». Il explique que la raison pour laquelle les circonstances réelles du décès de son fils ne figureraient pas sur l’acte de décès serait due au fait que la vérité serait intentionnellement cachée et il fait remarquer que son fils n’aurait été vu par aucun médecin, de sorte qu’aucun rapport médical n’aurait été établi. En affirmant qu’il aurait été exclu de son clan suite à la demande de la milice « Badr », le demandeur met en exergue que ladite milice serait très puissante et se serait arrangée pour occulter cette affaire et clamerait encore que son fils aurait été tué uniquement pour l’atteindre. La plainte qu’il aurait déposée contre personne inconnue serait, d’ailleurs, restée sans suites.

Le demandeur conclut que les évènements relatés ne sauraient être qualifiés d’infractions de droit commun, alors qu’ils constitueraient des persécutions au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et le Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par le règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après désigné par « la Convention de Genève », et des articles 42 et 43 de la loi du 18 décembre 2015.

Le demandeur donne encore à considérer que le défaut de protection dont il aurait fait état serait avéré, alors que, d’une part, les auteurs des vols de pigeons auraient été appréhendés, incarcérés, puis l’un d’eux libéré par la suite sans avoir été jugé et que, d’autre part, la police irakienne n’aurait pas pu empêcher l’assassinat de son fils, ….

5En ce qui concerne la protection subsidiaire et en se fondant tant sur un jugement du tribunal administratif du 12 décembre 2017, inscrit sous le numéro 39094 du rôle, que sur un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne, désignée ci-après par « la CJUE », le demandeur conteste toute possibilité de fuite interne dans son chef en faisant valoir que les membres du groupe terroriste « Etat islamique », ainsi que les milices paramilitaires auraient commis des attentats suicidaires et d’autres attaques meurtrières dans tout le pays et viseraient délibérément des civils.

Par ailleurs, il fait plaider que de par les menaces de tentatives de meurtres avec des coups de feu tirés sur son domicile, la traque de sa famille, les tentatives d’enlèvements de ses enfants, ainsi que l’assassinat de son fils, le degré de gravité et d’individualisation requis par l’article 48, point b), de la loi du 18 décembre 2015 serait largement atteint par la multitude et la nature des atteintes qu’il aurait subies.

En donnant encore à considérer qu’en vertu du principe de précaution, il resterait préférable de ne pas reconduire une personne vers un pays où elle risque de faire l’objet de menaces attentatoires à sa sécurité et à son intégrité, il conclut qu’il aurait démontré à suffisance de droit des motifs sérieux et avérés permettant de croire qu’il courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 48, points a), b) et c), de la loi du 18 décembre 2015 en cas de retour dans son pays d’origine et qu’il mériterait dès lors l’octroi de la protection subsidiaire au sens de l’article 2, point g), de ladite loi.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours sous examen.

Aux termes de l’article 28, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015 : « Outre les cas dans lesquels une demande n’est pas examinée en application du paragraphe (1), le ministre peut prendre une décision d’irrecevabilité, sans vérifier si les conditions d’octroi de la protection internationale sont réunies, dans les cas suivants: […] d) la demande concernée est une demande ultérieure, dans laquelle n’apparaissent ou ne sont présentés par le demandeur aucun élément ou fait nouveau relatifs à l’examen visant à déterminer si le demandeur remplit les conditions requises pour prétendre au statut de bénéficiaire d’une protection internationale […] ».

Aux vœux de l’article 32 de la même loi « (1) Constitue une demande ultérieure une nouvelle demande de protection internationale présentée après qu’une décision finale a été prise sur une demande antérieure, y compris le cas dans lequel le demandeur a explicitement retiré sa demande et le cas dans lequel le ministre a rejeté une demande à la suite de son retrait implicite, conformément à l’article 23, paragraphes (2) et (3).

(2) Lorsqu’une personne qui a demandé à bénéficier d’une protection internationale fait de nouvelles déclarations ou présente une demande ultérieure, ces nouvelles déclarations ou les éléments de la demande ultérieure sont examinés dans le cadre de l’examen de la demande antérieure par le ministre ou, si la décision du ministre fait l’objet d’un recours juridictionnel en réformation, par la juridiction saisie.

(3) Le ministre procède à un examen préliminaire des éléments ou des faits nouveaux qui ont été présentés par le demandeur, afin de prendre une décision sur la recevabilité de la demande en vertu de l’article 28, paragraphe (2), point d). Le ministre peut procéder à 9 l’examen préliminaire en le limitant aux seules observations écrites présentées hors du cadre d’un entretien.

(4) Si les éléments ou faits nouveaux indiqués augmentent de manière significative la probabilité que le demandeur remplisse les conditions requises pour prétendre à une protection internationale, l’examen de la demande est poursuivi, à condition que le demandeur concerné a été, sans faute de sa part, dans l’incapacité de les faire valoir, au cours de la précédente procédure, y compris durant la phase contentieuse […] ».

Il ressort de ces dispositions que le ministre peut déclarer irrecevable une demande ultérieure, sans vérifier si les conditions d’octroi de la protection internationale sont réunies, dans le cas où le demandeur n’invoque aucun élément ou fait nouveau relatifs à l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour prétendre au statut de bénéficiaire d’une protection internationale. Saisi d’une telle demande ultérieure, le ministre effectue un examen préliminaire des éléments ou des faits nouveaux qui ont été présentés par le demandeur, afin de prendre une décision sur la recevabilité de la demande en question.

L’examen de la demande n’est poursuivi que si les éléments ou faits nouveaux indiqués augmentent de manière significative la probabilité que le demandeur remplisse les conditions requises pour prétendre à une protection internationale et à condition que le demandeur concerné ait été, sans faute de sa part, dans l’incapacité de les faire valoir au cours de la précédente procédure, y compris durant la phase contentieuse. Dans le cas contraire, la demande est déclarée irrecevable.

Il s’ensuit que la recevabilité d’une demande ultérieure est soumise à trois conditions cumulatives, à savoir, premièrement, que le demandeur invoque des éléments ou des faits nouveaux, deuxièmement, que les éléments ou les faits nouveaux présentés augmentent de manière significative la probabilité qu’il remplisse les conditions requises pour prétendre à une protection internationale et, troisièmement, qu’il ait été, sans faute de sa part, dans l’incapacité de se prévaloir de ces éléments ou de ces faits nouveaux au cours de la précédente procédure, y compris durant la phase contentieuse.

Il est constant en cause que la demande de protection internationale de Monsieur … faisant l’objet de la décision ministérielle déférée a été introduite le 21 août 2018, soit après le rejet définitif de sa demande précédente par l’arrêt, précité, de la Cour administrative du 27 mars 2018, inscrit sous le numéro 40763C du rôle, de sorte que la demande en question doit être qualifiée de demande ultérieure au sens de l’article 32, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015.

S’agissant ensuite de la question de savoir si les éléments soumis par Monsieur … dans le cadre de sa nouvelle demande peuvent être qualifiés de nouveaux au sens des articles 28 et 32, précités, de la loi du 18 décembre 2015, il échet d’abord de souligner que sont à considérer comme nouveaux, au sens de l’article 32 précité de la loi du 18 décembre 2015, des éléments qui sont postérieurs à la décision ministérielle de rejet de la demande initiale et à la procédure contentieuse afférente1.

En ce qui concerne, tout d’abord, l’assassinat du fils de Monsieur …, force est au tribunal de constater que ce fait a déjà été traité dans le cadre de sa précédente procédure 1 Voir en ce sens trib., adm. 6 décembre 2006, n° 22137 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Etrangers, n° 87 et, a contrario, trib. adm., 28 décembre 2000, n° 15527 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Etrangers, n° 82.d’asile et a été déclaré comme n’étant pas de nature à justifier l’octroi d’une protection internationale par l’arrêt, précité, de la Cour administrative du 27 mars 2018, de sorte que ce fait ne saurait être qualifié de fait nouveau au sens de l’article 32 de la loi du 18 décembre 2015. Le même constat s’impose en ce qui concerne les attaques contre la maison du demandeur, ces faits ayant, en effet, également été appréciés dans le cadre de sa première demande de protection internationale.

Quant à la contestation du demandeur de toute possibilité de fuite interne dans son chef compte tenu du fait que des membres du groupe terroriste « Etat islamique », ainsi que des milices paramilitaires auraient commis des attentats suicidaires et d’autres attaques meurtrières dans tout le pays et viseraient délibérément des civils, force est au tribunal de constater que, d’une part, la situation générale en Irak a, d’ores et déjà, été analysée dans le cadre de la première demande de protection internationale du demandeur et tranchée définitivement pas la Cour administrative dans son arrêt du 27 mars 2018, précité, et que, d’autre part, le demandeur n’apporte pas d’éléments nouveaux en ce qui concerne la situation actuelle régnant en Irak, de sorte que ce fait ne saurait, dès lors, pas non plus être qualifié de fait nouveau au sens de l’article 32 de la loi du 18 décembre 2015.

En ce qui concerne ensuite l’exclusion du demandeur et de sa famille de leur clan sur ordre de la milice « Badr » le 13 août 2018, force est au tribunal de constater que ce fait ne s’était pas encore produit à la date où le ministre a pris sa décision de rejet de la première demande, ni à la date à laquelle la Cour administrative a définitivement débouté le demandeur de son recours, de sorte qu’il n’a pas pu être traité ni toisé dans le cadre de l’examen de la première demande de protection internationale. Il s’ensuit que ce fait est effectivement à considérer comme constituant un fait nouveau, au sens des articles 28, paragraphe (2), point d) et 32, précités, de la loi du 18 décembre 2015.

En ce qui concerne la deuxième condition découlant de l’article 32, précité, de la loi du 18 décembre 2015, à savoir que les faits nouveaux invoqués doivent augmenter de manière significative la probabilité que le demandeur remplisse les conditions requises pour prétendre à l’octroi d’un des statuts conférés par la protection internationale, il convient de prime abord de constater que la décision ministérielle déférée reprend, dans un premier temps, les faits et rétroactes de la présente affaire, en indiquant de manière détaillée le parcours suivi et les arguments invoqués par le demandeur depuis le dépôt de sa première demande de protection internationale en date du 5 octobre 2015. Il ressort encore de la lecture de la décision ministérielle litigieuse que le ministre a procédé à l’examen des éléments exposés par Monsieur … lors de son entretien du 29 octobre 2018, à la lumière des éléments présentés dans le cadre de sa première demande.

Force est toutefois au tribunal de constater que l’exclusion du demandeur et de sa famille de leur clan suite à une demande formulée par la milice « Badr » ne saurait ni être considérée comme un acte de persécution au sens de la Convention de Genève, alors qu’il ne ressort pas des éléments du dossier qu’elle trouverait son fondement dans un des critères de fond de l’article 2, point f), de la loi du 18 décembre 2015, ni comme atteinte grave au sens de l’article 48 de la loi du 18 décembre 2015, alors qu’elle ne revêt pas une gravité suffisante, d’autant plus que le demandeur n’a pas fait état des conséquences que pourrait engendrer une telle exclusion pour lui et sa famille.

Partant, cet élément nouveau n’est pas de nature à augmenter de manière significative la probabilité que le demandeur remplisse les conditions requises pour prétendre à un statut dela protection internationale.

En tant qu’élément nouveau, le demandeur fait encore valoir que sa maison serait surveillée et que sa famille ferait l’objet de pressions de la part de la famille « Battat » en raison de ses propres problèmes. A cet égard, il convient de relever qu’outre la circonstance qu’il s’agit de faits non personnels, ces faits ne sauraient être qualifiés de persécutions au sens de la Convention de Genève, alors qu’ils ne trouvent pas leur fondement dans un des critères de fond, étant rappelé, à cet égard, que les problèmes du demandeur trouvent leur origine dans le fait que des membres de la famille « Battat » ont été poursuivis judiciairement suite au vol des pigeons du demandeur et que la famille de ce dernier a refusé de rembourser à ladite famille les frais engendrés par le procès. A cela s’ajoute, qu’en tout état de cause, le demandeur est resté vague dans ses déclarations dans la mesure où il a affirmé qu’« Angesichts meiner Probleme, ist mein Bruder auch verfolgt worden. »2 et s’est limité à remettre à l’agent du ministère un document qui attesterait du fait que la directrice d’école de sa fille aurait confirmé que des hommes inconnus se seraient rendus à son école afin d’obtenir des informations concernant le lieu de résidence actuel de sa fille3. A défaut de revêtir le niveau de gravité requis, ces faits ne sauraient pas non plus être qualifiés d’atteintes graves au sens de l’article 48 de la loi du 18 décembre 2015.

En ce qui concerne ensuite les divergences dans le récit du demandeur, soulevées par le délégué du gouvernement, alors que dans le cadre de sa première demande de protection internationale il a affirmé que les voleurs de pigeons ont été libérés en 2014 et plus jamais inquiétés par après et qu’au cours de l’entretien par devant un agent du ministère suite au dépôt de sa deuxième demande de protection internationale, il a affirmé qu’en 2018 un d’entre eux aurait été incarcéré depuis un an, il convient de retenir que ces divergences restent sans incidence aucune sur le cas d’espèce, étant donné qu’il ne s’agit, en tout état de cause, pas d’un élément nouveau susceptible de changer de manière significative la probabilité qu’il remplisse les conditions requises pour prétendre à une protection internationale.

Finalement et en ce qui concerne les problèmes médicaux dont le demandeur a fait état, il convient de relever que ces faits ne sauraient justifier une demande de protection internationale à défaut de tomber dans le champ d’application de la Convention de Genève, ni dans celui de la loi du 18 décembre 2015.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a conclu qu’à l’appui de sa deuxième demande de protection internationale, le demandeur n’a pas fait valoir des éléments ou faits nouveaux qui seraient de nature à augmenter de manière significative la probabilité qu’il remplisse les conditions requises pour prétendre à une protection internationale, de sorte qu’il a valablement pu déclarer ladite demande irrecevable, en application de l’article 28, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015.

Partant, et à défaut d’autres moyens, le recours est rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, 2 Rapport d’entretien de Monsieur … du 29 octobre 2018, p. 4.

3 Rapport d’entretien de Monsieur … du 29 octobre 2018, p. 3 et 4.le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme le recours en annulation introduit contre la décision ministérielle du 1er juillet 2019 déclarant irrecevable la nouvelle demande de protection internationale de Monsieur … ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique de vacation du 14 août 2019 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Stéphanie Lommel, juge, Alexandra Bochet, juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 14 août 2019 Le greffier du tribunal administratif 13


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 43312
Date de la décision : 14/08/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2019-08-14;43312 ?

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