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17/07/2019 | LUXEMBOURG | N°43270

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 juillet 2019, 43270


Tribunal administratif N° 43270 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 juillet 2019 chambre de vacation Audience publique extraordinaire du 17 juillet 2019 Recours formé par Monsieur …, Findel, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 120. L.29.08.2008)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43270 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 juillet 2019 par Maître Frank Wies, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom

de Monsieur …, déclarant être né le … à … (Guinée-Bissau), de nationalité bissau-...

Tribunal administratif N° 43270 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 juillet 2019 chambre de vacation Audience publique extraordinaire du 17 juillet 2019 Recours formé par Monsieur …, Findel, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 120. L.29.08.2008)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43270 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 12 juillet 2019 par Maître Frank Wies, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né le … à … (Guinée-Bissau), de nationalité bissau-guinéenne, actuellement retenu au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 26 juin 2019 ordonnant la prorogation de son placement au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de sa notification ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 juillet 2019 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Noémie Sadler, en remplacement de Maître Frank Wies, et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul Reiter en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique de vacation du 17 juillet 2019.

Par un arrêt de la Cour administrative du 18 octobre 2018, inscrit sous le numéro 41458C du rôle, Monsieur … fut définitivement débouté de sa demande de protection internationale introduite en date du 19 janvier 2016 auprès du service compétent du ministre des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministère », et ayant donné lieu à une décision de refus du 20 juin 2017 comportant aussi une décision de retour.

Une demande de sursis à l’éloignement introduite par l’intermédiaire du litismandataire de Monsieur … en date du 7 novembre 2018 fut rejetée par décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », du 14 décembre 2018. Un recours en annulation introduit à l’encontre de ladite décision en date du 6 mars 2019, inscrit sous le numéro 42459 du rôle, est actuellement pendant devant le tribunal administratif. Une requête en institution d’une mesure provisoire par rapport à la décision du 14 décembre 2018, précitée, fut rejetée par ordonnance du président du tribunal administratif du 14 mars 2019.

Par arrêté du 20 mai 2019, notifié à l’intéressé en date du 31 mai 2019, le ministre prononça à l’égard de Monsieur … une interdiction d’entrée sur le territoire pour une durée de trois à partir de la sortie de l’espace Schengen.

Par arrêté du 20 mai 2019, notifié à l’intéressé en date du 31 mai 2019, le ministre ordonna le placement de Monsieur … au Centre de rétention, ledit arrêté étant fondé sur les motifs et considérations suivants :

« Vu les articles 111, 120 à 123 et 125 (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu ma décision de retour du 20 juin 2017, lui notifiée le 26 juin 2017 ;

Vu ma décision d’interdiction d’entrée sur le territoire du 20 mai 2019 ;

Vu ma décision du 14 décembre 2018, refusant un sursis à l’éloignement ;

Attendu que l’intéressé est démuni de tout document d’identité et de voyage valable ;

Attendu que l’intéressé s’est présenté au Ministère des Affaires étrangères et européennes en vue de l’organisation de son retour volontaire dans son pays d’origine en date du 7 novembre 2018 et du 2 janvier 2019 ;

Attendu que l’intéressé n’est pas disposé à retourner volontairement dans son pays d’origine ;

Attendu que l’intéressé n’a jusqu’à présent pas fait des démarches pour un retour volontaire dans son pays d’origine ;

Attendu que l’intéressé évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement ;

Attendu par conséquent que les mesures moins coercitives telles qu’elles sont prévues par l’article 125, paragraphe (1), points a), b) et c) de la loi modifiée du 29 août 2008 précitée ne sauraient être efficacement appliquées ;

Considérant que les démarches nécessaires en vue de l’identification et de l’éloignement de l’intéressé seront engagées dans les plus brefs délais ;

Considérant que l’exécution de la mesure d’éloignement est subordonnée au résultat de ces démarches ; (…) ».

Par un arrêté du 26 juin 2019, notifié le 28 juin 2019, le ministre prorogea le placement en rétention de Monsieur … pour une durée d’un mois, sur base des considérations suivantes :

« Vu les articles 111 et 120 à 123 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu mon arrêté du 20 mai 2019, notifié en date du 31 mai 2019, décidant de soumettre l’intéressé à une mesure de placement ;

Attendu que les motifs à la base de la mesure de placement du 20 mai 2019 subsistent dans le chef de l’intéressé ;

Considérant que les démarches en vue de l’éloignement ont été engagées ;

Considérant que ces démarches n’ont pas encore abouti ;

Considérant que toutes les diligences en vue de l’identification de l’intéressé afin de permettre son éloignement ont été entreprises auprès des autorités compétentes ;

Considérant qu’il y a lieu de maintenir la mesure de placement afin de garantir l’exécution de la mesure de l’éloignement ; (…) ».

En date du 2 juillet 2019, Monsieur … introduisit par l’intermédiaire de son litismandataire une demande d’autorisation de séjour à titre de travailleur salarié, que le ministre déclara irrecevable par décision du 8 juillet 2019 sur base de l’article 39, paragraphe 1 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-

après désignée par « la loi du 29 août 2008 ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 12 juillet 2019, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision précitée du 26 juin 2019 ordonnant la prorogation de son placement au Centre de rétention pour la durée d’un mois à partir de sa notification.

Etant donné que l’article 123, paragraphe (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 portant sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après désignée par « la loi du 29 août 2008 », institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit en l’espèce, qui est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours et en fait, le demandeur rappelle être de nationalité bissau-

guinéenne et avoir quitté son pays d’origine, la Guinée-Bissau, il y a trois ans.

Il expose que malgré sa situation précaire, il aurait trouvé un employeur qui serait prêt à l’embaucher et verse un contrat de travail à durée indéterminée à cet égard. Il essaierait actuellement de régulariser sa situation par le biais d’une autorisation de séjour à titre de travailleur salarié, serait affilié au Centre commun de la Sécurité sociale et aurait conclu une convention de bénévolat en date du 4 juin 2018.

En droit, Monsieur … reproche au ministre de ne pas avoir effectué de démarches suffisantes en vue de préparer son éloignement. A part des courriers envoyés à l’ambassade de la république de Guinée-Bissau en date des 2 et 30 janvier et 21 mai 2019, le ministre n’aurait diligenté aucune mesure « à caractère pro-actif », de façon à écourter au maximum sa privation de liberté. Ainsi, les démarches effectuées entre janvier et mai 2019 n’auraient pas été efficaces, étant donné que le demandeur n’aurait pas été présenté aux autorités dont il revendique la nationalité.

Monsieur … fait ensuite valoir que le ministre n’aurait pas respecté le principe de la subsidiarité du placement en rétention en appliquant une mesure moins coercitive à son égard.

Il expose que l’obligation de se présenter régulièrement à des intervalles fixés par le ministre auprès d’un service donné ou l’assignation à résidence auraient pu être envisagées comme alternatives à la rétention, d’autant plus qu’il souffrirait de graves troubles respiratoires qui ne seraient pas traités de manière adéquate au Centre de rétention, où les troubles s’aggraveraient suite à « l’absence cruelle d’air frais ».

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours.

Aux termes de l’article 120 (1) de la loi du 29 août 2008 : « Afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement en application des articles 111, 116 à 118 (…), l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une structure fermée (…). Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. (…) ». En vertu de l’article 120 (3) de la même loi, « (…) La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Elle peut être reconduite par le ministre à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois si les conditions énoncées au paragraphe (1) qui précède sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien. Si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de la rétention peut être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire. (…) ».

Ainsi, l’article 120 (1) de la loi du 29 août 2008 permet au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite en premier lieu l’identification de l’intéressé et la mise à la disposition de documents d’identité et de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères en vue de l’obtention d’un accord de reprise de l’intéressé. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour la durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.

En vertu de l’article 120 (3) de la même loi, le maintien de la rétention est cependant conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et soit exécuté avec toute la diligence requise, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter l’éloignement dans les meilleurs délais.

Une décision de prorogation d’une mesure de placement en rétention est partant soumise à la réunion de quatre conditions, à savoir que les conditions ayant justifié la décision de rétention initiale soient encore données, que le dispositif d’éloignement soit toujours en cours, que celui-ci soit toujours poursuivi avec la diligence requise et qu’il y ait des chances raisonnables de croire que l’éloignement en question puisse être « mené à bien ».

Il échet encore de rappeler qu’une mesure de rétention s’analyse en une mesure administrative privative de la liberté de mouvement de la personne concernée et qu’elle doit être limitée à la durée strictement nécessaire afin de permettre l’exécution d’une mesure d’éloignement. A cette fin, le ministre est dans l’obligation de faire entreprendre avec la diligence requise toutes les démarches nécessaires afin d’organiser cette mesure d’éloignement.

Il n’est pas contesté, en l’espèce, que le demandeur ne dispose pas d’un document d’identité et de voyage en cours de validité et qu’il se trouve en séjour irrégulier au Luxembourg, le demandeur ayant fait l’objet d’une décision de retour le 20 juin 2017. En vertu de l’article 111, paragraphe (3), point c) de la loi du 29 août 2008, aux termes duquel le risque de fuite est présumé plus particulièrement si l’étranger ne remplit pas ou plus les conditions de l’article 34 de la même loi, respectivement s’il ne peut pas justifier de la possession de documents d’identité ou de voyage et s’il se trouve donc en séjour irrégulier sur le territoire luxembourgeois, le risque de fuite est présumé dans le chef du demandeur, sans que ne se dégagent du dossier soumis au tribunal des éléments permettant de renverser la présomption du risque de fuite dans son chef, de sorte que le ministre a a priori valablement pu le placer au Centre de rétention.

S’agissant des démarches concrètement entreprises par les autorités luxembourgeoises pour organiser l’éloignement du demandeur, force est de constater que dès le 20 décembre 2018, à savoir avant le placement au Centre de rétention du demandeur, le ministre a sollicité des renseignements au Centre de coopération policière et douanière afin d’obtenir des renseignements sur l’identité de Monsieur …, qui, lors d’une entrevue du 2 janvier 2019 au ministère, a déclaré ne pas vouloir retourner volontairement dans son pays d’origine. Par courrier postal et par courrier électronique du 2 janvier 2019, ayant fait l’objet d’un rappel envoyé en date du 30 janvier 2019, le ministre a demandé à l’ambassade de la République de Guinée-Bissau d’identifier le demandeur sur base de deux photos d’identité et un jeu d’empreintes digitales, respectivement de procéder à son audition. Ensuite, le ministre a relancé les autorités bissau-guinéennes par l’envoi d’un courrier en vue de l’identification du demandeur en y ajoutant une photo et un jeu d’empreintes digitales de Monsieur … et en proposant à nouveau une audition de ce dernier. Suivant une note au dossier du même jour, l’ambassade de la République de Guinée-Bissau a confirmé la réception du courrier précité tout en informant l’agent en charge du dossier au ministère que la personne responsable pour les affaires consulaires, qui souhaiterait parler à Monsieur … afin de confirmer sa nationalité bissau-guinéenne, serait en déplacement et serait probablement de retour dans quinze jours. Il ressort d’une autre note au dossier que l’ambassade de la République de Guinée-Bissau n’a pu être jointe en date du 5 juin 2019, de sorte qu’un courrier électronique demandant une date pour un entretien par vidéo-conférence a été envoyé le même jour. Il ressort d’un rapport soumis à l’appréciation du tribunal que Monsieur … a été présenté à l’ambassade de la République de Guinée-Bissau en date du 24 juin 2019. Par courrier électronique du 1er juillet 2019, un agent du ministère a demandé l’ambassade de la République de Guinée-Bissau d’émettre un laissez-passer pour le compte de Monsieur …, conformément à l’Accord de Cotonou du 23 juin 2000. L’ambassade de la République de Guinée-Bissau a répondu par courrier électronique du 2 juillet 2019 qu’elle y donnera suite dans les meilleurs délais. Par courrier du 15 juillet 2019, un courrier de rappel a été envoyé par le ministre à ladite ambassade.

Ainsi, au vu des démarches déployées concrètement par l’autorité ministérielle luxembourgeoise, actuellement tributaire à cet égard de la collaboration des autorités bissau-

guinéenne, le tribunal est amené à retenir que l’organisation de l’éloignement du demandeur est toujours en cours, mais qu’elle n’a pas encore abouti, et que les démarches ainsi entreprises en l’espèce par les autorités luxembourgeoises doivent être considérées comme suffisantes, de sorte qu’il y a lieu de conclure que l’organisation de l’éloignement est en cours et est exécutée avec toute la diligence requise. A cet égard, l’affirmation du demandeur selon laquelle les démarches effectuées par les autorités luxembourgeoises de janvier à mai 2019 auraient été inefficaces est à rejeter pour ne pas être pertinente, dans la mesure où le fait que les services du ministre ont entrepris des démarches en vue de l’identification du demandeur bien avant son placement en rétention témoigne de ce que le ministre a entrepris toutes les démarches nécessaires pour écourter le placement en rétention.

Monsieur … fait ensuite valoir que le ministre n’aurait pas respecté le principe de subsidiarité du placement en rétention, le demandeur estimant, en effet, qu’une des mesures moins coercitives prévues à l’article 125 de la loi du 29 août 2008 aurait pu lui être appliquée.

Il précise, à cet égard, pouvoir se présenter régulièrement à des intervalles fixés par le ministre auprès d’un service donné, respectivement préconise une assignation à résidence.

Comme retenu ci-avant, il n’est pas contesté que Monsieur …, qui a fait l’objet en date du 20 juin 2017 d’un ordre de quitter le territoire luxembourgeois, s’y trouve en séjour irrégulier, de sorte qu’en vertu de l’article 111, paragraphe (3), point c) de la loi du 29 août 2008, le risque de fuite est présumé dans son chef.

S’agissant de l’argumentation du demandeur selon laquelle une autre mesure moins coercitive que le placement en rétention aurait dû lui être appliquée, le tribunal relève que l’article 125, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008, dont Monsieur … se prévaut, prévoit ce qui suit : « Dans les cas prévus à l’article 120, le ministre peut également prendre la décision d’appliquer une autre mesure moins coercitive à l’égard de l’étranger pour lequel l’exécution de l’obligation de quitter le territoire, tout en demeurant une perspective raisonnable, n’est reportée que pour des motifs techniques et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111, paragraphe (3) [de la loi du 29 août 2008] (…).

On entend par mesures moins coercitives :

a) l’obligation pour l’étranger de se présenter régulièrement, à intervalles à fixer par le ministre, auprès des services de ce dernier ou d’une autre autorité désignée par lui, après remise de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d’un récépissé valant justification de l’identité ;

b) l’assignation à résidence pour une durée maximale de six mois dans les lieux fixés par le ministre ; l’assignation peut être assortie, si nécessaire, d’une mesure de surveillance électronique qui emporte pour l’étranger l’interdiction de quitter le périmètre fixé par le ministre. Le contrôle de l’exécution de la mesure est assuré au moyen d’un procédé permettant de détecter à distance la présence ou l’absence de l’étranger dans le prédit périmètre. La mise en œuvre de ce procédé peut conduire à imposer à l’étranger, pendant toute la durée du placement sous surveillance électronique, un dispositif intégrant un émetteur. Le procédé utilisé est homologué à cet effet par le ministre. Sa mise en œuvre doit garantir le respect de la dignité, de l’intégrité et de la vie privée de la personne.

La mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance et le contrôle à distance proprement dit, peuvent être confiés à une personne de droit privé ;

c) l’obligation pour l’étranger de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros à virer ou à verser soit par lui-même, soit par un tiers à la Caisse de consignation, conformément aux dispositions y relatives de la loi du 29 avril 1999 sur les consignations auprès de l’Etat. Cette somme est acquise à l’Etat en cas de fuite ou d’éloignement par la contrainte de la personne au profit de laquelle la consignation a été opérée. La garantie est restituée par décision écrite du ministre enjoignant à la Caisse de consignation d’y procéder en cas de retour volontaire.

Les décisions ordonnant des mesures moins coercitives sont prises et notifiées dans les formes prévues aux articles 109 et 110. L’article 123 est applicable. Les mesures prévues peuvent être appliquées conjointement. En cas de défaut de respect des obligations imposées par le ministre ou en cas de risque de fuite, la mesure est révoquée et le placement en rétention est ordonné. ».

Les dispositions des articles 120 et 125 de la loi du 29 août 2008, précités, sont à interpréter en ce sens qu’en vue de la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement, les trois mesures moins coercitives énumérées à l’article 125, paragraphe (1), sont à considérer comme mesures proportionnées bénéficiant d’une priorité par rapport à une rétention pour autant qu’il soit satisfait aux deux exigences posées par ledit article 125, paragraphe (1), de sorte que pour considérer ces autres mesures moins coercitives comme suffisantes et que la rétention ne répond à l’exigence de proportionnalité et de subsidiarité, aucune des autres mesures moins coercitives ne doit entrer en compte au vu des circonstances du cas particulier.

L’article 125, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008, prévoit plus particulièrement que le ministre peut prendre la décision d’appliquer, soit conjointement, soit séparément, les trois mesures moins coercitives y énumérées à l’égard d’un étranger pour lequel l’exécution de l’obligation de quitter le territoire, tout en demeurant une perspective raisonnable, est reportée pour des motifs techniques, à condition que l’intéressé présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111, paragraphe (3), de la même loi. Ainsi, s’il existe, comme en l’espèce, une présomption légale d’un risque de fuite dans le chef de l’étranger se trouvant en situation irrégulière sur le territoire national, celui-ci doit la renverser en justifiant notamment de garanties de représentation suffisantes1.

Au regard des contestations du demandeur, il y a lieu de vérifier si, en l’espèce, celui-ci a fourni des garanties de représentation suffisantes pour prévenir un risque de fuite, qui, tel que cela a été retenu ci-avant, est présumé dans son chef.

A cet égard, il convient de constater qu’il ressort certes des pièces soumises au tribunal et plus particulièrement du contrat de travail à durée indéterminée, du certificat d’affiliation au Centre commun de la Sécurité sociale et de la Convention de bénévolat que Monsieur … a 1 Trib. adm. 6 mai 2016, n° 37829 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.

entrepris des démarches en vue de son intégration. Or, ces pièces, loin d’exclure le risque de fuite dans le chef de Monsieur …, qui, par ailleurs, a encore déclaré en date du 28 juin 2019 à un agent de l’Organisation internationale des migrations (OIM) qu’il ne souhaiterait pas retourner en Guinée-Bissau, tel qu’il ressort d’un échange de courriers électroniques entre ledit agent de l’OIM et d’un agent du ministère, confirment que le demandeur entend se soustraire à son éloignement. Ainsi, Monsieur … n’entend pas quitter le territoire luxembourgeois et partant pas collaborer à son éloignement et se présenter régulièrement, à des intervalles à fixer par le ministre, auprès des services de ce dernier, étant rappelé à cet égard, que le risque de fuite ne vise pas le simple fait que le demandeur puisse fuir le territoire luxembourgeois, mais vise avant tout le fait qu’il puisse tenter de se soustraire à son éloignement.

Dans ces circonstances, et compte tenu des pièces lui soumises, le tribunal est amené à retenir que le demandeur ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de fuite conformément à l’article 125, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008 - risque qui est, tel que relevé ci-dessus, présumé dans son chef -, de sorte que le constat du ministre qu’il n’existe pas de mesure suffisante, mais moins coercitive qu’une mesure de placement, n’encourt aucune critique.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent, et en l’absence d’autres moyens, que le recours en réformation est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Françoise Eberhard, vice-président, Annick Braun, vice-président, Michèle Stoffel, juge, et lu à l’audience publique extraordinaire du 17 juillet 2019, à 15.00 heures, par le vice-président, Françoise Eberhard, en présence du greffier Michèle Hoffmann.

s.Michèle Hoffmann s.Françoise Eberhard Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 17 juillet 2019 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 43270
Date de la décision : 17/07/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2019-07-17;43270 ?

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