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17/06/2019 | LUXEMBOURG | N°42695

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 juin 2019, 42695


Tribunal administratif N° 42695 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 avril 2019 1re chambre Audience publique du 17 juin 2019 Recours formé par Monsieur …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 35 (3), L. 18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 42695 du rôle et déposée le 18 avril 2019 au greffe du tribunal administratif par Maître Karima Hammouche, avocat à la Cour, inscr

ite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est...

Tribunal administratif N° 42695 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 avril 2019 1re chambre Audience publique du 17 juin 2019 Recours formé par Monsieur …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 35 (3), L. 18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 42695 du rôle et déposée le 18 avril 2019 au greffe du tribunal administratif par Maître Karima Hammouche, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu, au nom de Monsieur …, né le … (Guinée), de nationalité guinéenne, assigné au moment de l’introduction du recours à résidence à la structure d’hébergement d’urgence du Kirchberg (SHUK), sise à L-

1734 Luxembourg, 11, rue Carlo Hemmer, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 4 avril 2019 par laquelle les autorités luxembourgeoises ont pris la décision de le transférer vers l’Espagne, l’Etat membre responsable pour connaître de sa demande de protection internationale ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 20 mai 2019 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Karima Hammouche et Madame le délégué du gouvernement Elisabeth Pesch en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 5 juin 2019.

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Le 21 février 2019, Monsieur …, de nationalité guinéenne, introduisit une demande de protection internationale auprès du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, désignée ci-après par « le ministère », sur base de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, désignée ci-

après par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Le même jour, Monsieur … fut entendu par un agent de la police grand-ducale du service de police judiciaire, service criminalité organisée et police des étrangers, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Le 21 février 2019, Monsieur … passa encore un entretien auprès du ministère en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres 1par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par « le règlement Dublin III ».

Par décision du même jour, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, désigné ci-après par « le ministre », notifia à Monsieur … en mains propres un arrêté ordonnant son assignation à résidence à la structure d’hébergement d’urgence au Kirchberg (SHUK) pour une durée de trois mois.

En date du 22 février 2019, les autorités luxembourgeoises contactèrent les autorités espagnoles aux fins de la reprise en charge de Monsieur … sur base de la considération que l’intéressé avait précédemment franchi irrégulièrement la frontière espagnole en date du 8 novembre 2018.

Par courrier du 11 mars 2019, les autorités espagnoles informèrent les autorités luxembourgeoises que l’Espagne acceptait de reprendre en charge Monsieur … sur base de l’article 13, paragraphe (1) du règlement Dublin III.

Par une décision du 4 avril 2019, notifiée à l’intéressé par lettre recommandée envoyée le même jour, le ministre informa Monsieur … que le Grand-Duché de Luxembourg n’examinera pas sa demande de protection internationale et qu’il sera transféré vers l’Espagne, sur base de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 et des dispositions de l’article 13, paragraphe (1) du règlement Dublin III, le ministre insistant plus particulièrement sur le fait que Monsieur … avait irrégulièrement franchi la frontière espagnole le 8 novembre 2018 et que les autorités espagnoles avaient accepté de le prendre en charge. Ladite décision est libellée comme suit :

« J'accuse réception de votre demande en obtention d'une protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire que vous avez introduite en date du 21 février 2019.

En vertu des dispositions de l'article 28(1) de la loi précitée et des dispositions de l'article 13§1 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013, le Grand-Duché de Luxembourg n'examinera pas votre demande de protection internationale et vous serez transféré vers l'Espagne qui est l'Etat membre responsable pour examiner votre demande de protection internationale.

Selon vos déclarations vous auriez quitté la Guinée en septembre 2017 et, après un séjour de neuf à dix mois en Algérie, vous auriez pris le bateau au Maroc pour vous rendre en Espagne. Vous seriez resté en Espagne pour la durée de six mois avant de traverser la France pour arriver au Luxembourg en date du 20 février 2019.

Il résulte par ailleurs des recherches effectuées dans le cadre de votre demande de protection internationale, notamment dans la base de données EURODAC, que vous avez précédemment franchi irrégulièrement la frontière espagnole en date du 8 novembre 2018.

Sur base des informations à disposition, le Grand-Duché de Luxembourg a adressé une demande de prise en charge aux autorités espagnoles qui ont accepté en date du 11 mars 2019 de vous prendre en charge en vertu de l'article 13§1 du règlement (UE) n° 604/2013 susmentionné.

2Lors de votre audition en date du 21 février 2019, vous n'avez pas fait mention d'éventuelles particularités sur votre état de santé ou autres problèmes généraux empêchant un transfert vers l'Espagne qui est l'Etat membre responsable pour traiter votre demande de protection internationale.

Aussi, les informations à ma disposition ne sauraient donner lieu à l'application des articles 8, 9, 10 et 11 du règlement (UE) n° 604/2013.

Vous n'avez par ailleurs pas fait valoir des raisons particulières ou humanitaires qui auraient dû amener l'Etat luxembourgeois à faire application de l'article 17(1) du règlement (UE) n° 604/2013.

D'autres raisons individuelles pouvant éventuellement entraver la remise aux autorités espagnoles n'ont pas été constatées. […] ».

Le même jour, le ministre s’adressa au service de police judiciaire, section criminalité organisée et police des étrangers, en vue d’organiser le transfert de Monsieur … vers l’Espagne, tout en précisant que le transfert ne pourra être organisé avant le 23 avril 2019.

Par arrêté du 17 mai 2019, notifié à l’intéressé en mains propres le même jour, le ministre ordonna la prorogation de l’assignation à résidence à la SHUK de Monsieur … pour une durée de trois mois.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 18 avril 2019, inscrite sous le numéro 42695 du rôle, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 4 avril 2019 décidant de son transfert vers l’Espagne.

Dans la mesure où aucune disposition légale ne prévoit de recours au fond en la matière, l’article 35, paragraphe (3), de la loi du 18 décembre 2015 prévoyant expressément un recours en annulation contre la décision de transfert visée à l’article 28, paragraphe (1), de la même loi, seul un recours en annulation a pu être introduit contre la décision ministérielle précitée du 4 avril 2019 de transférer Monsieur … vers l’Espagne, de sorte que le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre la décision déférée.

Dans son mémoire en réponse et à titre de remarque préliminaire, le délégué du gouvernement relève que la décision constituant l'objet du recours devrait être identifiée dans la requête introductive d’instance avec toute la précision voulue et que l'objet de la demande consistant dans le résultat que le plaideur entend obtenir serait celui circonscrit dans le dispositif de ladite requête introductive. A cet égard, il conclut à l’irrecevabilité du présent recours, au motif que le demandeur ferait référence à un prétendu transfert vers la France et que le ministre n'aurait jamais pris un arrêté dans le chef du demandeur en date du 6 novembre 2018, tel que cela serait indiqué erronément dans le dispositif de la requête, ni même une décision qui ordonnerait son transfert vers la France.

A l’audience des plaidoiries du 5 juin 2019, le litismandataire du demandeur a expliqué que la référence à un « arrêté ministériel du 6 novembre 2018 », de même que celle à un transfert vers la France, seraient le fruit d’une erreur matérielle.

3A cet égard, le tribunal constate que s’il est vrai que le demandeur a dirigé son recours contre un « arrêté ministériel du 6 novembre 2018 », la décision ministérielle du 4 avril 2019 par le biais de laquelle le ministre a décidé de le transférer vers l’Espagne a été annexée comme pièce au recours, de sorte que la décision ministérielle litigieuse a été suffisamment identifiée afin de permettre au tribunal et à la partie adverse de ne pas se méprendre sur l’objet et la cause du recours.

Le délégué du gouvernement relève encore le libellé obscur du recours, sinon « du moins le peu de soins apporté à la rédaction » dans la mesure où le litismandataire du demandeur n’aurait fait valoir aucun moyen concret par rapport au dossier de son mandant, tout en se contentant, selon la partie étatique, de soulever une violation des articles 4 et 5 du règlement Dublin III, sinon de contester un ordre de transfert vers la France, au motif qu'il existerait des défaillances systémiques dans le système d'asile en Espagne, pour enfin conclure à l'application par le ministre de l'article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III dans son chef.

Etant donné qu’à l’audience des plaidoiries, le délégué du gouvernement a demandé à se voir donner acte qu’il n’aurait entendu tirer aucune conclusion en droit par rapport au libellé obscur de la requête sous analyse, ni par rapport au reproche tenant à une absence de soin apporté à sa rédaction, et à défaut d’autres moyens d’irrecevabilité, le recours subsidiaire en annulation est à déclarer recevable pour avoir été introduit selon les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours et en fait, Monsieur … expose avoir quitté son pays d'origine en septembre 2017. Après un séjour de neuf à dix mois en Algérie, il serait passé par l’Espagne et la France pour se rendre au Grand-duché de Luxembourg.

En droit, le demandeur entend se prévaloir d’une violation des articles 4 et 5 du règlement Dublin III, dans la mesure où il n’aurait bénéficié ni des informations minimales imposées par l’article 4, paragraphe (1), points a) à f), ni d’un entretien individuel tel que prévu à l’article 5 du règlement Dublin III, en ce que l’agent du ministère ayant mené l’entretien du 21 février 2019 ne lui aurait pas fourni les « informations minimales négligeant par là-même les dispositions dirimantes minimales prévues par le [règlement Dublin III] ».

A titre subsidiaire, au cas où l’Espagne serait l’Etat responsable au sens du règlement Dublin III, le demandeur conclut à une violation par le ministre des principes généraux et garanties consacrés par l’article 3 du règlement Dublin III, dans la mesure où « la France » (sic) devrait être considérée comme ne respectant pas le système européen commun d’asile puisqu’elle ne disposerait pas de structures d’hébergement convenables pour accueillir dignement les demandeurs d’asile, tout en se référant dans ce contexte à un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne, ci-après désignée par « la CJUE », du 21 décembre 2011 pour soutenir que les conclusions retenues par la CJUE trouveraient expressément à s’appliquer en l’espèce, alors que le ministre ne pourrait ignorer que le système d’asile en Espagne ne répondrait pas totalement aux exigences tenant au respect des droits fondamentaux des demandeurs d’asile, ce qui serait constitutif d’une défaillance systémique de la procédure d’asile et des conditions d’accueil des demandeurs d’asile au sens de l’interprétation donnée par la CJUE à l’article 4 « du règlement » (sic).

Le demandeur se prévaut à cet égard d'un rapport du 3 septembre 2018 témoignant d’une mission d’information effectuée par l’ambassadeur Tomáš Boček, représentant spécial du secrétaire général, sur les migrations et les réfugiés en Espagne du 18 au 24 mars 2018, du 3 septembre 2018, qui mettrait en exergue que la situation « systémique » de l’Espagne en 4matière de protection des demandeurs de protection internationale serait défaillante, tout en soutenant que lors de son entretien préalable à l’examen de sa demande protection internationale auprès du ministère, il aurait indiqué à l’agent qu’il n’aurait pas bénéficié, dans le cadre du traitement de sa demande de protection internationale, « de condition[s] d’accueil approprié[es] ». Il en conclut qu’une telle situation dénoterait à suffisance que le ministre aurait dû faire usage de la clause de souveraineté prévue à l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III.

Enfin, le demandeur entend insister sur le fait que le ministre aurait dû connaître de sa demande de protection internationale, au motif qu’il séjournerait au Luxembourg depuis « un peu plus de 5 mois ».

Le délégué du gouvernement, quant à lui, conclut au rejet du recours.

Aux termes de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 : « Si, en application du règlement (UE) n°604/2013, le ministre estime qu’un autre Etat membre est responsable de la demande, il sursoit à statuer sur la demande jusqu’à la décision du pays responsable sur la requête de prise ou de reprise en charge. Lorsque l’Etat membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge du demandeur, le ministre notifie à la personne concernée la décision de la transférer vers l’Etat membre responsable et de ne pas examiner sa demande de protection internationale ».

Il s’ensuit que si, en vertu du règlement Dublin III, un autre pays est responsable de l’examen de la demande de protection internationale et si ce pays accepte la prise respectivement la reprise en charge, le ministre décide, d’un côté, de transférer la personne concernée vers l’Etat membre responsable et, de l’autre côté, de ne pas examiner la demande de protection internationale introduite au Luxembourg.

Aux termes de l’article 13, paragraphe (1) du règlement Dublin III : « Lorsqu’il est établi, sur la base de preuves ou d’indices tels qu’ils figurent dans les deux listes mentionnées à l’article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n°603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d’un Etat membre dans lequel il est entré en venant d’un Etat tiers, cet Etat membre est responsable de l’examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. ».

Il suit de ces dispositions que l’Etat responsable du traitement de la demande de protection internationale est celui dont le demandeur a franchi irrégulièrement la frontière en provenance d’un pays tiers, cette responsabilité prenant fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière.

Le tribunal constate de prime abord qu’en l’espèce, la décision ministérielle déférée est motivée, d’une part, par le fait que le demandeur a irrégulièrement franchi la frontière espagnole en date du 8 novembre 2018 et, d’autre part, par le fait que les autorités espagnoles ont accepté de le prendre en charge.

Force est de relever que le bien-fondé de la motivation invoquée à la base de la décision ministérielle attaquée ressort non seulement du résultat des recherches effectuées dans la base de données EURODAC versées au dossier, mais également du courrier des autorités espagnoles compétentes du 11 mars 2019 par le biais duquel elles ont, tel que relevé ci-avant, accepté la 5reprise en charge du demandeur, telle qu’elle a été sollicitée par les autorités luxembourgeoises sur le fondement du prédit de l’article 13, paragraphe (1) du règlement Dublin III, de sorte que c’est a priori à bon droit que le ministre a décidé de le transférer vers l’Espagne et de ne pas examiner sa demande de protection internationale.

Force est encore de constater que le demandeur ne conteste pas la compétence de principe de l’Etat espagnol, respectivement l’incompétence de principe de l’Etat luxembourgeois.

Il reproche toutefois tout d’abord au ministre une violation des articles 4 et 5 du règlement Dublin III.

Le tribunal relève, à cet égard, que l’article 4 prévoit ce qui suit : « 1. Dès qu’une demande de protection internationale est introduite au sens de l’article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l’application du présent règlement, et notamment:

a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d’une autre demande dans un État membre différent ainsi que des conséquences du passage d’un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l’État membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée;

b) des critères de détermination de l’État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu’une demande de protection internationale introduite dans un État membre peut mener à la désignation de cet État membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n’est pas fondée sur ces critères;

c) de l’entretien individuel en vertu de l’article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les États membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations;

d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert;

e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d’exécuter leurs obligations découlant du présent règlement;

f) de l’existence du droit d’accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l’objet d’un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l’article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel.

2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu’il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3.

[…] 6 3. La Commission rédige, au moyen d’actes d’exécution, une brochure commune ainsi qu’une brochure spécifique pour les mineurs non accompagnés, contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l’application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les États membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux États membres. Ces actes d’exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d’examen visée à l’article 44, paragraphe 2, du présent règlement. ».

L’article 5 du règlement Dublin III, relatif à l’audition du demandeur de protection internationale en vue de déterminer l’Etat membre responsable de l’examen de sa demande, est, quant à lui, libellé comme suit: « (1) Afin de faciliter le processus de détermination de l’État membre responsable, l’État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l’article 4.

[…] (4) L’entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu’il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d’assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l’entretien individuel.

[…] (6) L’État membre qui mène l’entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l’entretien. Ce résumé peut prendre la forme d’un rapport ou d’un formulaire type. L’État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. ».

En l’espèce, le tribunal constate, d’une part, qu’il ressort du dossier administratif, et plus particulièrement des deux certificats du 21 février 2019 signés par Monsieur …, qu’à cette date, l’intéressé «[…] a reçu en mains propres et a pris connaissance […] [d’une] Brochure d’informations pour demandeurs de protection internationale en langue française », de même qu’une « Brochure d’informations Dublin partie B en langue française » et, d’autre part, que Monsieur … a déclaré sur la fiche de données personnelles, qu’il a remplie au moment du dépôt de la demande de protection internationale en langue française, qu’il maîtriserait cette même langue. Il ressort encore desdits certificats qu’il a été informé de son droit à l’obtention d’une assistance judiciaire et de son droit au recours à un interprète. Dans la mesure où il ne résulte d’aucun élément du dossier administratif que le demandeur aurait connu des problèmes de compréhension, qu’aucune réserve n’a été formulée à ce titre et que le demandeur n’établit pas que la brochure lui remise ne serait pas conforme aux dispositions de l’article 4 du règlement Dublin III, il y a lieu de conclure qu’il a valablement été informé des éléments énoncés à l’article 4 du règlement Dublin III.

Le tribunal rappelle ensuite que le demandeur a été auditionné par un agent du ministère le 21 février 2019 en vue de déterminer l’Etat membre responsable de l’examen de sa demande 7de protection internationale, en application de l’article 5, précité, du règlement Dublin III, audition à l’occasion de laquelle il s’est vu adresser les informations suivantes de la part de l’agent ministériel en charge de son entretien : « […] L’objet de notre entretien est de déterminer l’Etat membre responsable de l’examen de votre demande de protection internationale. En vertu du Règlement Dublin III, une demande de protection internationale est examinée par un seul Etat européen, ainsi votre demande peut relever de la compétence d’un autre Etat membre en application du prédit Règlement. Si le Luxembourg n’est pas responsable de l’examen de votre demande, vous serez en principe transféré vers le pays responsable. Les questions porteront notamment sur votre trajet, sur d’autres demandes antérieures de protection internationale, sur la présence de membres de famille dans d’autres pays européens, sur l’éventuelle obtention de visa ou d’autorisation de séjour.

Il est très important que vous coopériez dans l’établissement du rapport d’entretien. Il est dans votre intérêt de répondre honnêtement et le plus clairement possible à ces questions et de ne rien omettre. Veuillez-vous tenir à la stricte vérité.

Pour le cas où un interprète assiste au présent entretien, sachez qu’il est tenu au secret professionnel. Je tiens enfin à préciser que vous pouvez parler sans crainte, la confidentialité de votre récit étant assurée. ».

Il suit de ce qui précède que lors de son audition, Monsieur … avait connaissance tant de l’objet de ladite audition – à savoir la détermination de l’Etat membre responsable de l’examen de sa demande de protection internationale, sur base des critères prévus au règlement Dublin III, dont il avait préalablement été informé par le biais de la susdite brochure – que du fait que le constat de la responsabilité d’un autre Etat membre aura, en principe, pour conséquence, son transfert vers cet Etat membre.

Dans ces circonstances, il y a lieu de retenir que le demandeur avait la possibilité de s’exprimer en connaissance de cause dans le cadre de la détermination de l’Etat membre responsable de l’examen de sa demande. Dès lors et à défaut de contestations plus concrètes soulevées par le demandeur, les moyens basés sur une violation des articles 4 et 5 du règlement Dublin III sont à rejeter pour ne pas être fondés.

Quant au moyen basé sur une violation de l’article 3, paragraphe (2), point 2 du règlement Dublin III, il y a d’abord lieu de relever qu’aux termes dudit article : « Lorsqu’il est impossible de transférer un demandeur vers l’État membre initialement désigné comme responsable parce qu’il y a de sérieuses raisons de croire qu’il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’État membre procédant à la détermination de l’État membre responsable poursuit l’examen des critères énoncés au chapitre III afin d’établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable ».

Ainsi, le demandeur ne peut mettre en cause la décision de transfert qu’en invoquant l’existence de défaillances systémiques de la procédure d’asile et des conditions d’accueil des demandeurs d’asile dans cet Etat membre qui constituent des motifs sérieux et avérés de croire qu’il courra un risque réel d’être soumis à des traitements inhumains ou dégradants au sens de 8l’article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne1, ci-après désignée par « la Charte ».

De prime abord, le tribunal est amené à relever que la décision déférée du 4 avril 2019 a été prise en application de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 et de l’article 13, paragraphe (1) du règlement Dublin III, cette dernière disposition visant le cas d’un demandeur ayant « franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d’un Etat membre dans lequel il est entré en venant d’un Etat tiers », hypothèse distincte du cas d’un demandeur ayant introduit une demande de protection internationale dans un premier Etat membre, hypothèse plus particulièrement visée à l’article 18 du règlement Dublin III.

Il résulte, en effet, des propres déclarations du demandeur que celui-ci n’a pas introduit de demande de protection internationale en Espagne au motif qu’il « ne voulai[t] pas demander l’asile en Espagne […] », le demandeur ayant, d’après ses propres dires, projeté de se rendre au Luxembourg pour y déposer une telle demande, (« Mon but était d’arriver au Luxembourg »).

Dans la mesure où le demandeur n’a pas eu la qualité de demandeur de protection internationale lors de son séjour en Espagne, il n’est en tout état de cause pas en mesure de se prévaloir de défaillances systémiques dans le système d’accueil des demandeurs de protection internationale en Espagne au sens de l’article 3, paragraphe 2), alinéa 2 du règlement Dublin III qu’il aurait personnellement pu rencontrer en Espagne.

D’autre part, le demandeur ne fournit aucun élément pertinent permettant de conclure qu’il craint avec raison que sa demande de protection internationale, dans la mesure où dorénavant il sera considéré comme demandeur de protection internationale, ne sera pas correctement traitée et que les conditions minimales d’accueil pas assurées en Espagne en raison de défaillances systémiques en Espagne.

Force est en effet de constater que les éléments produits en cause ne permettent pas de dégager, de manière générale, l’existence de défaillances systémiques en Espagne au sens du règlement Dublin III.

Il convient, à cet égard, de relever que comme le système européen commun d’asile repose sur la présomption - réfragable - que l’ensemble des Etats y participant respectent les droits fondamentaux, en ce compris les droits trouvant leur fondement dans la Convention de Genève, et que les Etats membres peuvent s’accorder une confiance mutuelle à cet égard, il appartient au demandeur de rapporter la preuve matérielle de défaillances avérées2.

Le tribunal est encore amené à relever que la CJUE3 vient tout récemment de confirmer ce principe selon lequel le droit de l’Union repose sur la prémisse fondamentale selon laquelle chaque Etat membre partage avec tous les autres Etats membres, et reconnaît que ceux-ci partagent avec lui, une série de valeurs communes sur lesquelles l’Union est fondée. Cette prémisse implique et justifie l’existence de la confiance mutuelle entre les Etats membres dans 1 CJUE, grande chambre, 10 décembre 2013, Shamso Abdullahi c. Bundesasylamt, C-394/12, point 62.

2 Voir par exemple trib. adm. 1er juillet 2015, n° 36439 ; trib. adm. 1er juillet 2015, n° 36441 ; trib. adm. 14 octobre 2015, n° 36966 ; trib. adm. 21 octobre 2015, n° 36996 ; trib. adm. 28 octobre 2015, n° 37015 ; trib. adm. 9 octobre 2017, n° 40111 du rôle ; trib. adm. 9 novembre 2017, n° 40169 du rôle, disponibles sur : www.jurad.etat.lu.

3 CJUE, 19 mars 2019, Jawo c/ Bundesrepublik Deutschland, n° C-163/17.

9la reconnaissance de ces valeurs et, donc, dans le respect du droit de l’Union qui les met en œuvre, ainsi que dans le fait que leurs ordres juridiques nationaux respectifs sont en mesure de fournir une protection équivalente et effective des droits fondamentaux reconnus par la Charte, notamment aux articles 1er et 4 de celle-ci, qui consacrent l’une des valeurs fondamentales de l’Union et de ses Etats membres, de sorte qu’il doit être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d’une protection internationale dans chaque Etat membre est conforme aux exigences de la Charte, de la la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, ci-après désignée par « la Convention de Genève », ainsi que de la de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, ci-après désignée par « la CEDH ».

La CJUE a encore rappelé que si cette présomption peut être renversée par l’existence de défaillances systémiques, celles-ci doivent toutefois atteindre un seuil particulièrement élevé de gravité : « Ce seuil particulièrement élevé de gravité serait atteint lorsque l’indifférence des autorités d’un État membre aurait pour conséquence qu’une personne entièrement dépendante de l’aide publique se trouverait, indépendamment de sa volonté et de ses choix personnels, dans une situation de dénuement matériel extrême, qui ne lui permettrait pas de faire face à ses besoins les plus élémentaires, tels que notamment ceux de se nourrir, de se laver et de se loger, et qui porterait atteinte à sa santé physique ou mentale ou la mettrait dans un état de dégradation incompatible avec la dignité humaine ».

Partant, ce seuil de gravité ne saurait couvrir des situations caractérisées même par une grande précarité ou une forte dégradation des conditions de vie de la personne concernée, lorsque celles-ci n’impliquent pas un dénuement matériel extrême plaçant cette personne dans une situation d’une gravité telle qu’elle peut être assimilée à un traitement inhumain ou dégradant : le seul fait que la protection sociale et/ou les conditions de vie sont plus favorables dans l’Etat membre requérant que dans l’Etat membre normalement responsable de l’examen de la demande de protection internationale n’est ainsi pas de nature à conforter la conclusion selon laquelle la personne concernée serait exposée, en cas de transfert vers ce dernier Etat membre, à un risque réel de subir un traitement contraire à l’article 4 de la Charte.

Or, pareilles défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale en Espagne atteignant un tel seuil particulièrement élevé de gravité ne résultent ni théoriquement, ni concrètement, des éléments soumis au tribunal.

En effet, le demandeur se limite à citer les dispositions de l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III, de même qu’il cite des extraits de jurisprudences de la CJUE, sans faire état d’éléments concrets dont se dégagerait l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale en Espagne, le seul rapport de l’ambassadeur Tomáš Boček, cité par le demandeur, étant insuffisant à cet égard.

Au contraire, on peut lire dans ledit rapport que « les conditions matérielles d’accueil dans les centres d’hébergement de demandeurs d’asile et de réfugiés que nous avons visités en Espagne continentale, ainsi que l’aide offerte pour l’apprentissage de l’espagnol et l’acquisition de diverses compétences, qui est appréciée par les demandeurs d’asile et les réfugiés, méritent d’être louées ». Il ressort encore dudit rapport que si certes l’accès des demandeurs d’asile et des réfugiés au marché de l’emploi demeure un défi, un certain nombre de bonnes pratiques existeraient dont par exemple celle de « l’établissement de partenariats 10avec des entreprises pour faciliter la formation et l’emploi des réfugiés, ainsi que la création de centres pour favoriser l’insertion sociale des réfugiés et des migrants en situation irrégulière au moyen d’activités de formation, d’aide à l’apprentissage de l’espagnol et de la participation à divers programmes culturels ». Quant aux « centres d’accueil pour réfugiés » (CAR) en Espagne continentale, il convient plus particulièrement de constater que le rapport précise que « tous les centres doivent offrir des conditions de vie et des services d’un niveau identique défini dans un manuel du ministère du Travail et de la Sécurité sociale sur la prestation de ces services. […] Nous avons visité le CAR de Mislata à Valence et celui d’Alcobendas à Madrid. Nous avons été très favorablement impressionnés par les conditions matérielles d’accueil dans ces deux centres. […] Les demandeurs d’asile avaient accès aux soins de santé dans des dispensaires locaux généraux ou spécialisés. […] Dans le centre de Mislata, des cours de formation professionnelle à la cuisine et à la coiffure, et, en principe, d’autres formations à différents métiers pouvaient été organisés en cas de demande suffisante parmi les demandeurs d’asile. […] Un psychologue, un médiateur culturel et un travailleur social apportaient un soutien spécialisé aux demandeurs d’asile dans les deux centres. […] Tous les demandeurs d’asile et réfugiés avec lesquels nous nous sommes entretenus dans les CAR se sont déclarés satisfaits des conditions de vie dans ces centres et ont exprimé leur gratitude pour l’aide que leur apportent les autorités espagnoles, en reconnaissant que les centres étaient bien gérés. ».

Il convient par ailleurs de souligner que si le demandeur devait estimer que le système d’aide espagnol serait à tel point avilissant qu’il impliquerait per se un traitement inhumain et dégradant contraire à l’article 4 de la Charte, respectivement à l’article 3 de la CEDH, il lui appartiendrait de faire valoir ses droits directement auprès des autorités espagnoles en usant des voies de droit adéquates, respectivement devant les instances européennes adéquates ; il en va de même si le requérant devait estimer que le système espagnol ne serait pas conforme aux normes européennes ; dans ce cas, il appartiendrait au requérant de faire valoir ses droits sur base de la directive n° 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale (« directive Procédure ») ainsi que de la directive n° 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale (« directive Accueil ») directement auprès des autorités espagnoles en usant des voies de droit adéquates.

Le moyen basé sur l’existence de défaillances systémiques en Espagne, tel qu’exposé, est dès lors à rejeter.

En ce qui concerne, enfin, le moyen fondé sur une non-application, par le ministre, de la clause discrétionnaire instaurée par l’article 17, paragraphe (1), du règlement Dublin III, s’il est vrai que lorsqu’en application des critères dudit règlement, l’Etat luxembourgeois n’est pas responsable de l’examen de la demande de protection internationale, il peut malgré tout décider d’examiner une demande de protection internationale en vertu de ladite clause discrétionnaire, cette possibilité relève cependant du pouvoir discrétionnaire du ministre, s’agissant d’une disposition facultative qui accorde un pouvoir d’appréciation étendu aux Etats membres4. Si un pouvoir discrétionnaire des autorités administratives ne s’entend certes pas comme un pouvoir absolu, inconditionné ou à tout égard arbitraire, mais comme la faculté qu’elles ont de choisir, dans le cadre des lois, la solution qui leur paraît préférable pour la satisfaction des 4 CJUE, 21 décembre 2011, N.S. e.a., C-411/10 et C-493/10, point 78.

11intérêts publics dont elles ont la charge5, et s’il appartient au juge administratif de vérifier si les motifs invoqués ou résultant du dossier sont de nature à justifier la décision attaquée6, de sorte que lorsque l’autorité s’est méprise, à partir de données fausses en droit ou en fait, sur ses possibilités de choix et sur les limites de son pouvoir d’appréciation, il y a lieu d’annuler la décision en question, encore faut-il que pareille erreur dans le chef de l’autorité administrative résulte effectivement des éléments soumis au tribunal. Par ailleurs, dans le cadre du contrôle d’un pouvoir discrétionnaire, le tribunal n’est amené à sanctionner une disproportion que si celle-ci est manifeste.

Il convient encore de relever que si l’article 3, paragraphe (2), du règlement Dublin III couvre l’hypothèse de défaillances systémiques, l’article 17, pour sa part, permet aux Etats membres de tenir compte, de manière discrétionnaire, des hypothèses autres que celles prévues par le règlement Dublin III qui imposeraient à l’Etat membre l’examen de la demande de protection internationale. En d’autres termes, l’article 17, visant d’autres hypothèses « humanitaires », n’a pas vocation à pallier, de manière subsidiaire, au résultat d’une application correcte des règles de répartition de compétence du règlement Dublin III.

Dans la mesure ou l’argumentation du demandeur fondée sur l’article 17 du règlement Dublin III est fondée exclusivement sur l’existence de défaillances systémiques en Espagne, problématique tombant dans le champ d’application de l’article 3, paragraphe (2) du règlement Dublin III, le demandeur n’est pas fondé à invoquer l’article 17 du règlement Dublin III, sur base des mêmes considérations.

Il s’ensuit que c’est à bon droit et sans commettre d’erreur d’appréciation, ni excéder ses pouvoirs, que le ministre a décidé de transférer le demandeur vers l’Espagne, l’Etat membre responsable de l’examen de sa demande de protection internationale, sans faire application de l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III Finalement, le demandeur, conclut à la compétence du ministre pour connaître de sa demande de protection internationale, au motif qu’il aurait séjourné au pays depuis « un peu plus de 5 mois ». Or outre le fait qu’il ne tire aucune conclusion de ce reproche en droit, cette affirmation est, par ailleurs, contredite au regard de l’audition auprès du service de la police judiciaire, de même que l’entretien auprès du ministère le 21 févier 2019, lors desquels il a déclaré être arrivé au Luxembourg en février 2019. Or, il n’appartient pas au tribunal administratif de suppléer à la carence des parties demanderesses et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base des conclusions de celles-ci.7 Au vu des considérations qui précèdent, et à défaut d’autres moyens, le recours est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

se déclare incompétent pour analyser le recours principal en réformation ;

5 « Les limites du pouvoir discrétionnaire des autorités administratives », in Rapports belges du VIIe Congrès international de Droit comparé, Bruxelles, CIDC, 1966, p.449 6 CdE, 11 mars 1970, Pas. 21, p.339 7 Trib.adm. 5 juillet 2000, n°11527 du rôle, Pas. adm. 2018, V° procédure contentieuse, n°437 et les autres références y citées.

12reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;

au fond le dit non justifié, partant en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 17 juin 2019, par :

Annick Braun, vice-président, Alexandra Castegnaro, premier juge, Carine Reinesch, attaché de justice, en présence du greffier en chef Arny Schmit.

s. Arny Schmit s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 17.6.2019 Le greffier du tribunal administratif 13


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 42695
Date de la décision : 17/06/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2019-06-17;42695 ?

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