Tribunal administratif N° 41030 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 avril 2018 4e chambre Audience publique du 14 juin 2019 Recours formé par Madame …, … (GB), contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu des personnes physiques
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 41030 et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 16 avril 2018 par la société à responsabilité limitée M&S Law SARL, établie et ayant son siège social à L-1150 Luxembourg, 205, route d’Arlon, immatriculée auprès du registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 215086, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, représentée par Maître Joram Moyal, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à GB …, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision réputée avoir été prise « en matière gracieuse » par le directeur de l’administration des Contributions directes en date du 15 janvier 2018 « rejetant la demande datée du 6 octobre 2017, introduite le 2 novembre 2017, concernant le refus d’examiner la déclaration fiscale (….) au titre des années fiscales 2012 et 2013 » ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 27 juin 2018 ;
Vu le mémoire en réplique déposé par la société à responsabilité limitée M&S SARL, préqualifiée, au greffe du tribunal administratif, le 24 juillet 2018, au nom de sa mandante ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 28 août 2018 ;
Vu le mémoire dénommé « mémoire supplémentaire » déposé par la société à responsabilité limitée M&S SARL, préqualifiée, au greffe du tribunal administratif, le 28 septembre 2018, au nom de sa mandante ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Estelle Wanssy, en remplacement de Maître Joram Moyal, et Monsieur le délégué du gouvernement Steve Collart en leurs plaidoiries respectives.
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1 En date du 21 juin 2017, le bureau d’imposition Luxembourg 6 de l’administration des Contributions directes, dénommé ci-après « le bureau d’imposition », émit à l’égard de Madame … un bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2012 en précisant, dans le cadre de la rubrique intitulée « Détail concernant l’imposition », qu’« à défaut de déclaration d’impôt les revenus ont été taxés en vertu du § 217 AO ».
En date du 3 juillet 2017, Madame … adressa un courrier au bureau d’imposition, aux mains de Madame …, de la teneur suivante :
« (…) Dear Ms .., Re: dossier … I have called your office in your absence last week and your colleague explained to me the reason for your letters is that you assume that my husband … was not living in Luxembourg in 2012. Your colleague also explained to me what you require in terms of the proof of the contrary.
Your recalculation of my tax class from class 2 to class 1 for 2012 is incorrect and I am surprised that you can freely take these type of decisions based on assumptions and without any grounds for it whatsoever.
Mr … have lived in Luxembourg ever since we moved there in July 2008 with our children and until December 2015. We have stayed together for the sake of our children in Luxembourg, but when we moved back to the UK, we have decided to live separately. I am surprised that I have to provide the proof of this fact, as advised by your colleague on the phone.
We moved to Luxembourg as a family for my job and my husband tried to look for work in Luxembourg initially as well. However, since my job involved lots of frequent travel abroad, we decided it would be best if he stayed at home and looked after our 3 children, who were 2, 7 and 10 years old in 2012. As a result, all this time in Luxembourg, he was a househusband and carer for our 3 children: …, … and …. All the bills and rent were in my name and paid by me. Throughout the years all of us travelled back to the UK to visit our families and Mr … also travelled sometimes alone to visit his father who was ill with cancer at the time.
Please let me know if you have any further questions. However, I do not speak/read French and will have difficulty to answer them if you send me the letters in French.
Although after so many years I disposed of most of the documents, such as doctors' bills etc, I was able to find some and am enclosing the copies. I believe you can reach out to the communes we were registered with to confirm our residence as well. As you can see, the doctors' bills and documents cover all the years throughout and up to 2015. (…) ».
Par un courrier électronique du 25 août 2017, le bureau d’imposition prit position comme suit :
« (…) Dear Ms …, 2Regarding your letter from the 3rd of july 2017 please note the following:
As your income for the tax year 2012 was higher than 100.000.-Euro you had the obligation to fill in a tax declaration.
But unfortunately neither you nor Mister … sended in the required tax declaration.
That's the reason why I had to proceed to a taxation of your income for the year 2012.
Please note that I won't proceed to a recalculation of your tax return.
If you consider that your tax return is incorrect then you have to make a written complaint to the Director of the Tax Administration.
Kind regards, (…) ».
En date du 6 octobre 2017, Madame … adressa le courrier suivant à la direction de l’administration des Contributions directes :
« (…) Suite à ma lettre du 6 octobre, je joins également une lettre en français (traduite via Google Translate), car j'ai lu sur Internet que mon cas pourrait ne pas être entendu si ce n'est pas en français ou en allemand.
Veuillez également trouver ci-joint les déclarations de revenus pour 2012 et 2013, y compris certaines factures et factures que j'ai réussi à trouver après tant d'années passées.
Veuillez noter que je n'ai jamais reçu de demande originale de fournir la déclaration de revenus pour 2012 et 2013 avant mon retour au Royaume-Uni en décembre 2015 et je ne savais pas que je devais les fournir puisque mon employeur avait déjà déduit toutes les taxes.
Lettre originale du 6 octobre ci-dessous en français.
Cher Monsieur / Madame, Votre bureau a fait le recalcul de mes impôts pour 2012 sur la base d'une allégation selon laquelle mon mari ne vivait pas avec moi et nos trois enfants au Luxembourg à l'époque.
Comme vous le savez certainement, le fardeau de la preuve incombe à la partie qui présente une demande.
Cette affirmation n'a été étayée par aucun élément de preuve provenant du bureau des impôts et reposait uniquement sur des spéculations.
Comme il y a un différend quant à savoir si mon mari vivait avec nos 3 enfants et moi en 2012 au Luxembourg, il appartient à l'autorité de réclamer (votre bureau des impôts) de fournir la preuve que mon mari ne résidait pas au Luxembourg.
De plus, en signe de bonne volonté, j'ai fourni de nombreuses preuves pour prouver que mon mari vivait avec nous. Pendant toutes ces années où je travaillais au Luxembourg, il 3était domestique, s'occupant de nos enfants et jusqu'à ce que nous revenions au Royaume-
Uni.
Votre bureau a agi de façon non professionnelle en me harcelant et en faisant des allégations non fondées sur lesquelles il a ensuite décidé de faire un nouveau calcul de mes impôts.
J'attends votre confirmation écrite que cette affaire est maintenant close ou attendez-
vous à ce que vous fournissiez des preuves pour étayer votre réclamation. (…) ».
En date du 15 janvier 2018, le directeur de l’administration des Contributions directes, dénommé ci-après « le directeur », prit la décision suivante, inscrite sous le n° C 24078 du rôle :
« (…) Vu la requête introduite le 27 octobre 2017 par la dame …, demeurant à GB-
…, pour réclamer contre le bulletin de l'impôt sur le revenu de l'année 2012, émis le 21 juin 2017 ;
Vu le dossier fiscal ;
Vu les §§ 228, 235, numéro 5 et 301 de la loi générale des impôts (A0) ;
Considérant qu'aux termes des §§ 228 et 246 AO, dont la règle a été reprise dans l'instruction sur les voies de recours figurant au bulletin entrepris, le délai de réclamation est de trois mois et court à partir de la notification ;
Considérant que le bulletin de l'impôt sur le revenu de l'année 2012 a été émis le 21 juin 2017 et notifié le 27 juin 2017 ; de sorte que le délai a expiré le 27 septembre 2017 ; que la réclamation est donc tardive ;
Considérant qu'aux termes du § 83 AO ce délai est un délai de forclusion ;
Considérant que l'instruction n'a pas révélé de circonstances susceptibles de justifier un relevé de forclusion suivant les §§ 86 et 87 AO ;
Considérant qu'aux termes du § 252 AO les réclamations tardives sont irrecevables ;
PAR CES MOTIFS dit la réclamation irrecevable (…) ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 16 avril 2018, Madame … a fait introduire un recours en réformation sinon en annulation de la décision précitée du directeur du 15 janvier 2018.
A l’audience publique des plaidoiries, le tribunal a soulevé d’office la question de la recevabilité du mémoire intitulé « mémoire supplémentaire » déposé au greffe du tribunal administratif par le litismandataire de Madame … en date du 28 septembre 2018.
Le délégué du gouvernement a conclu au rejet de ce mémoire supplémentaire non 4autorisé.
Le litismandataire de Madame … s’est rapporté à prudence de justice quant à cette question.
En vertu de l’article 7 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, désignée ci-après « la loi du 21 juin 1999 », « Il ne pourra y avoir plus de deux mémoires de la part de chaque partie, y compris la requête introductive. (…) ».
Etant donné que Madame … a déjà fait déposer, outre sa requête introductive d’instance, un mémoire en réplique en date du 24 juillet 2018, elle n’était plus autorisée, sauf autorisation expresse y relative de la part du tribunal, à déposer un mémoire supplémentaire à ceux déjà déposés.
En l’occurrence, le document intitulé « mémoire supplémentaire » est à considérer comme un mémoire non autorisé par la loi respectivement par le tribunal, de sorte qu’il est à écarter des débats.
Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours subsidiaire en annulation alors qu’un recours au fond serait prévu en la matière.
Le litismandataire de Madame … n’a pas pris position à ce sujet.
Pour déterminer quel recours peut être dirigé contre la décision directoriale déférée, il échet d’abord de qualifier ladite décision, Madame … la désignant comme une décision prise en matière gracieuse, tandis que la partie gouvernementale la considère comme une décision sur réclamation.
Force est d’abord de constater dans ce contexte qu’il ressort clairement de la lecture de la décision déférée, telle que reprise in extenso ci-avant, que le directeur s’est considéré saisi d’une réclamation au sens du paragraphe 228 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », dirigée contre le bulletin d’impôt sur le revenu de l’année 2012.
C’est à tort que Madame … fait actuellement plaider qu’elle aurait voulu, par son courrier du 6 octobre 2017, également précité, introduire une demande de remise gracieuse auprès de la direction de l’administration des Contributions directes, étant relevé que, dans sa requête introductive d’instance, elle fait expliquer qu’elle aurait « procédé à la traduction en français de son courrier daté du 6 octobre 2017, à l'aide d'un outil de traduction en ligne, afin de pouvoir introduire une réclamation en langue française (…) et a[urait] par la même occasion renvoyé, le 14 novembre 2017 (…) les déclarations fiscales pour 2012 et 2013. ».
De plus, au sujet de son intérêt à agir, Madame … précise qu’elle aurait subi une « lésion de son intérêt personnel et légitime », alors que « l'administration des contributions directes refuse[rait] de recevoir et traiter la déclaration fiscale (…) pour l'année 2012 ».
Elle justifie ensuite la compétence « ratione matériae » du tribunal administratif par le constat suivant lequel la décision sur réclamation comporterait un élément décisionnel en 5ce que « la réclamation concernant le dépôt de la déclaration fiscale pour l'année 2012 a[urait] été rejetée ».
Il s’ensuit que Madame … a clairement voulu introduire une réclamation contre le bulletin de l’année d’imposition 2012.
Cette conclusion n’est pas non plus énervée par les affirmations du litismandataire de Madame … selon lesquelles il serait « formellement et énergiquement contesté que la décision du Directeur des contributions n'entraîne[rait] pas une rigueur incompatible avec l'équité » et selon lesquelles son courrier du 6 octobre 2017 « devra[it] donc être analysé comme une demande de remise gracieuse, dans la mesure où le bulletin d'imposition contesté soulève une charge d'impôt substantielle dans le chef de la requérante, dont elle ne peut financièrement pas s'acquitter - en effet, le montant total réclamé par l'Administration des contributions directes au 10 janvier 2018, intérêts de retard compris, est de EUR …, », alors qu’elle aurait « simplement [demandé] à ce que le bulletin d'imposition pour 2012 soit annulé, par application de la correcte classe d'impôt à son encontre. ».
En effet, le simple fait de se plaindre de la circonstance qu’une imposition emporte une charge financière, certes difficile voire impossible à acquitter, ne saurait nécessairement être qualifié de demande de remise gracieuse, alors qu’il ressort de tous les écrits de Madame … ainsi que de ses actes de procédure qu’elle conteste formellement son imposition se basant sur une classe d’impôt prétendument incorrecte, qu’elle entend ainsi faire rectifier en déposant des « déclarations de revenus pour 2012 et 2013, y compris certaines factures et factures que j'ai réussi à trouver après tant d'années passées », étant relevé qu’il est de jurisprudence constante qu’une demande de remise gracieuse s'analyse exclusivement en une pétition du contribuable d'être libéré, sur base de considérations tirées de l'équité, de l'obligation de régler une certaine dette fiscale et ne comporte par nature aucune contestation de la légalité de la fixation de cette même dette.1 Il s’ensuit que conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », et de l’article 8 (3) 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif, dénommée ci-après « la loi du 7 novembre 1996 », le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours dirigé par un contribuable contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation introduite contre un bulletin d’impôt sur le revenu.
Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal contre la décision précitée du directeur du 15 janvier 2018.
Il n’y a dès lors pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.
Le recours en réformation dirigé contre la décision précitée du directeur est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
A l’appui de son recours et en fait, la demanderesse explique qu’elle serait originaire du Royaume-Uni où elle aurait résidé jusqu'en 2008, date à laquelle elle aurait, pour des 1 trib. adm. 17 octobre 2001, n° 13099 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Impôts, n° 647 et les autres références y citées.
6raisons professionnelles, déménagé au Luxembourg, où elle se serait installée avec ses trois enfants ainsi que son mari jusqu’en 2015.
Elle donne à considérer qu’elle ne parlerait malheureusement aucune des langues administratives du Luxembourg et qu’elle n'aurait dès lors absolument pas été au fait de ses obligations fiscales au Luxembourg, s’étant légitimement référée au mécanisme de prélèvement à la source en la matière, constituant à ses yeux une imposition définitive.
Ainsi, n'ayant jamais reçu un courrier de l'administration des Contributions directes dans ce sens auparavant, elle fait plaider qu’en toute bonne foi, elle n'aurait eu connaissance de l'obligation de déposer une déclaration fiscale qu'à la réception des bulletins d'imposition concernant l'année fiscale 2012 émis par l'administration des Contributions directes en date du 21 juin 2017, qu’elle aurait « reçus le 4 juillet 2017 », soit plus de cinq ans après, alors qu’elle aurait déjà quitté le Luxembourg depuis deux ans.
Etant donné que ces bulletins d'imposition auraient fait état d'un supplément d'imposition de …,- euros, elle serait aussitôt entrée en relation par téléphone avec l'inspecteur en charge de l'établissement des bulletins d'imposition concernés, afin de comprendre les raisons de cette imposition.
La demanderesse passe ensuite en revue les rétroactes de l’affaires tels que repris ci-
avant.
En droit, la demanderesse critique d’abord le directeur en ce qu’il lui aurait reproché de ne pas avoir envoyé de réclamation dans le délai légal de trois mois suivant la notification du bulletin d'imposition du 21 juin 2017, alors même qu’elle aurait d’abord, depuis Londres, correspondu verbalement puis par écrit dès le mois de juin 2017.
Dans ce contexte, elle affirme qu’elle aurait entretenu une longue relation téléphonique et épistolaire avec les services de l'administration des Contributions directes et que sa lettre datée du 3 juillet 2017 adressée au bureau d’imposition serait à considérer comme une réclamation contre le bulletin d'imposition du 21 juin 2017 introduite dans les délais légaux et par rapport à laquelle l’agent de l’administration des Contributions directes aurait pris position dans son courriel du 25 août 2017.
Dans son mémoire en réplique, la demanderesse demande par ailleurs acte de ce que la date de réception du bulletin de l’année 2012 ne serait pas le 4 juillet 2017, comme erronément indiqué dans sa requête introductive d’instance, mais le 3 juillet 2017, de sorte qu’il serait évident que son courrier du 3 juillet 2017 aurait été écrit en réaction au bulletin d'imposition litigieux.
La demanderesse en conclut que ce serait à tort que la partie gouvernementale considérerait son courrier du 6 octobre 2017 comme réclamation, alors que ce dernier ne serait qu’une demande de remise gracieuse en conséquence du fait qu’elle aurait essuyé une fin de non-recevoir sur sa réclamation par l'inspecteur des impôts à travers le courriel du 25 août 2017.
Ainsi, le courrier du 6 octobre 2017 aurait été introduit dans le délai légal de trois mois suivant la fin de non-recevoir du 25 août 2017.
7Le délégué du gouvernement conclut à la confirmation de la décision directoriale déférée qui aurait à bon droit déclaré irrecevable la réclamation du 6 octobre 2017.
A titre liminaire, le tribunal rappelle qu’il vient de retenir que, contrairement à ce qui est prétendu par la partie demanderesse, le courrier du 6 octobre 2017 n’est pas à considérer comme une demande de remise gracieuse, en ce qu’il tend à remettre en cause l’imposition en demandant au directeur de justifier la classe d’impôt retenue dans son chef, respectivement de changer cette dernière au regard des pièces versées en cause.
Au vœux du paragraphe 228 AO, « Les décisions visées aux §§ …, 166 alinéa 3, 211, 212, 212a alinéa 1, 214, 215, 215a, 235, 396 alinéa 1 et 402 peuvent être attaquées dans un délai de trois mois par voie de réclamation devant le directeur de l'Administration des contributions directes ou son délégué. Il sera procédé conformément au §299. (…) ».
Quant à la recevabilité ratione temporis de la réclamation de la demanderesse contre le bulletin litigieux de l’année 2012, force est d’abord de constater que, nonobstant la question de savoir si le bulletin litigieux a été effectivement réceptionné par la demanderesse en date du 3 ou du 4 juillet 2017, le courrier daté du 6 octobre 2017, quelle que soit par ailleurs sa date de réception effective par la direction de l’administration des Contributions directes – l’enveloppe y relative adressée à la direction de l’administration des Contributions directes telle qu’elle se trouve dans le dossier fiscal portant comme date de mise à la poste le 23 octobre 2017 et ayant été tamponnée par la direction comme avoir été réceptionnée le 27 octobre 2017 - ne saurait en tout état de cause être considéré comme une réclamation valablement introduite dans le délai légal de trois mois à partir de la réception du bulletin litigieux, au sens du paragraphe 228 AO.
En ce qui concerne la question de savoir si le courrier du 3 juillet 2017 peut être qualifié de réclamation contre le bulletin du 21 juin 2017, tel que le soutient actuellement la demanderesse par le biais d’une rectification de son affirmation relative à la date de notification dudit bulletin d’imposition, force est de relever qu’une telle qualification est contredite par tous les éléments de la cause.
En effet, il échet de noter en premier lieu que le changement de la date de réception du bulletin d’imposition litigieux du 4 juillet 2017 au 3 juillet 2017 et l’affirmation conséquente que le courrier du 3 juillet 2017 aurait été rédigé en réaction à la notification dudit bulletin, est en contradiction avec l’affirmation de la demanderesse, dans ce même courrier du 3 juillet 2017, selon laquelle elle aurait à ce même sujet essayé de joindre les services du bureau d’imposition par la voie téléphonique la semaine d’avant, de sorte que les « letters »2 au sujet desquelles elle a demandé des renseignements avant le 3 juillet 2017 ne peuvent évidemment pas être le bulletin qui lui aurait été prétendument notifié seulement le jour en question.
De plus, il ressort de la lettre du 3 juillet 2017 que la demanderesse n’invoque que le changement de la classe d’impôt, alors que, dans son courrier daté du 6 octobre 2017, elle fait expressément référence au « recalcul de [s]es impôts ».
2 “I have called your office in your absence last week and your colleague explained to me the reason for your letters (…)” 8Ensuite, ce n’est qu’avec la lettre datée du 6 octobre 2017, réceptionnée le 27 octobre 2017 par l’administration des Contributions directes, que la demanderesse fournit une déclaration d’impôt pour l’année 2012, datée elle du 10 octobre 2017.
Il ressort finalement de l’échange de courriers électroniques du 25 août 2017, tel qu’il figure au dossier fiscal, que, suite à l’invitation du bureau d’imposition, dans son courriel du 25 août 2017, faite à la demanderesse d’introduire une réclamation pardevant le directeur3, la demanderesse a, par retour de courrier électronique du même jour, demandé de lui fournir l’adresse et le nom du directeur4, adresse qui a ensuite été fournie par un retour de courriel toujours du même jour.
Il suit de ces considérations que la lettre du 3 juillet 2017 ne saurait être qualifiée de lettre de réclamation dirigée contre le bulletin d’imposition du revenu de l’année 2012, de sorte que c’est à bon droit que le directeur a, par sa décision déférée du 15 janvier 2018, déclaré irrecevable la réclamation y relative.
Il s’ensuit que le recours est à déclarer non fondé, sans qu’il n’y ait lieu de statuer sur les autres moyens invoqués tenant au caractère fondé d’une prétendue demande de remise gracieuse.
La demanderesse sollicite encore l’allocation d’une indemnité de procédure de l’ordre de 1.500,- euros sur base de l’article 240 du nouveau code de procédure civile.
Si l’article 240 du nouveau code de procédure civile n’est certes pas applicable devant les juridictions administratives, il a été jugé que l’invocation d’une base légale incorrecte n’entraîne pas l’irrecevabilité d’une demande en allocation d’une indemnité de procédure susceptible d’être réclamée sur base des dispositions de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives5.
Or, en l’espèce et au vu de l’issue du litige, la demande en allocation d’une indemnité de procédure au sens de l’article 33 de la loi précitée du 21 juin 1999 est à rejeter.
Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
écarte des débats le mémoire dénommé « mémoire supplémentaire » déposé au greffe du tribunal administratif le 28 septembre 2018 ;
reçoit en la forme le recours principal en réformation de la décision directoriale du 15 janvier 2018 ;
au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;
dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;
3 “If you consider that your tax return is incorrect then you have to make a written complaint to the Director of the Tax Administration.” 4 “Please provide the adress and the name of the Director of Tax Administration” 5 trib. adm., 11 mars 2002, n°13366 du rôle, Pas. adm 2018, V° Impôts, n°1061 et autres références y citées.
9rejette la demande de Madame … en allocation d’une indemnité de procédure ;
condamne la demanderesse aux frais.
Ainsi jugé par :
Carlo Schockweiler, premier vice-président, Anne Gosset, premier juge, Olivier Poos, premier juge, et lu à l’audience publique du 14 juin 2019, par le premier vice-président, en présence du greffier Marc Warken.
s.Marc Warken s.Carlo Schockweiler Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 14 juin 2019 Le greffier du tribunal administratif 10