Tribunal administratif N° 41382 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 juillet 2018 2e chambre Audience publique du 23 mai 2019 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de police des étrangers
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 41382 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 5 juillet 2018 par Maître Philippe Stroesser, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Monténégro), de nationalité monténégrine, actuellement détenu au Centre pénitentiaire de Luxembourg, tendant à l’annulation de la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 10 avril 2018 ordonnant son éloignement et lui interdisant l’entrée sur le territoire luxembourgeois pour une durée de dix ans ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 5 septembre 2018 ;
Vu le mémoire en réplique déposé le 12 octobre 2018 au greffe du tribunal administratif par Maître Philippe Stroesser, pour le compte du demandeur ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 24 octobre 2018 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Denise Parisi, en remplacement de Maître Philippe Stroesser, et Madame le délégué du gouvernement Christiane Martin en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 3 décembre 2018.
Vu la constitution d’avocat à la Cour de Maître Frédéric Veneau du 31 janvier 2019.
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Par décision du 10 mars 2000, le ministre de la Justice refusa la prolongation de l’autorisation de séjour de Monsieur …, ainsi que d’émettre une autorisation de séjour pour son épouse, …, et ses enfants … et … et les invita à quitter le territoire luxembourgeois dans un délai d’un mois.
Selon un rapport de police N° 65071/2003 du 29 janvier 2003, Monsieur … fut arrêté pour vente de stupéfiants.
Suite à une demande de prolongation d’une autorisation de séjour, le ministre de la Justice accorda par décision du 15 avril 2003 une prolongation de son autorisation de séjour à Monsieur … jusqu’au 25 mars 2004.
Selon un rapport de police N° 2003/26945/718/ML du 23 mai 2003, Monsieur … fit l’objet de 6 procès-verbaux pour des infractions à loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie, ci-après désignée par « la loi du 19 février 1973 », pour coups et blessures et pour avoir subi la confiscation d’objets prohibés.
Par arrêté du 27 août 2003, le ministre du Travail et de l’Emploi refusa à Monsieur … un permis de travail.
Selon un rapport du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration et d’un extrait du casier judiciaire établi en date du 16 décembre 2004, Monsieur … fut condamné par jugement du tribunal correctionnel de Luxembourg du 17 novembre 2003 à une peine d’emprisonnement de 5 ans assorti d’un sursis total, à une amende de 10 000 euros et à une interdiction de conduire de 3 ans pour vente illicite de stupéfiants, offre illicite de stupéfiants, mise en circulation illicite de stupéfiants, détention illicite de stupéfiants en vue d’un usage par autrui, transport illicite de stupéfiants en vue d’un usage par autrui et détention d’arme prohibée.
Par décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 29 avril 2005, Monsieur … obtint une autorisation de séjour jusqu’au 10 avril 2006, prorogeable sous condition de présentation d’un permis de travail.
Par décision du 25 août 2006, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration informa Monsieur … qu’un permis de séjour lui est accordé jusqu’au 13 juin 2007.
Par décision du 18 octobre 2007, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration informa Monsieur … qu’un permis de séjour lui est accordé jusqu’au 31 août 2008.
Il ressort d’un acte d’écrou du Centre pénitentiaire de Luxembourg, ci-après désigné par « CPL », que Monsieur … fit l’objet d’un mandat de dépôt en date du 11 juillet 2008.
Par jugement du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, siégeant en matière criminelle, du 23 mars 2010, Monsieur … fut condamné à une peine de réclusion de 16 ans pour tentative de meurtre.
Par arrêt du 9 novembre 2010 la Cour d’Appel du Grand-Duché du Luxembourg, chambre criminelle, déclara l’appel de Monsieur … partiellement fondé et par réformation ramena la peine de réclusion à 12 ans.
Le 7 mars 2017, les autorités luxembourgeoises s’adressèrent aux autorités monténégrines pour demander la réadmission de Monsieur … en application des dispositions de l’accord entre la Communauté européenne et la République du Monténégro concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier signé à … le 18 septembre 2007, désigné ci-après par « l’accord de réadmission ». Cette demande de réadmission fut acceptée en date du 17 mars 2017 par le ministre de l’Intérieur du Monténégro.
Par arrêté du 10 avril 2018, notifié en mains propres à l’intéressé le 16 avril 2018, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », informa Monsieur … que son séjour sur le territoire luxembourgeois était irrégulier, qu’il devait quitter ledit territoire sans délai à destination du pays dont il a la nationalité, à savoir le Monténégro, ou à destination du pays qui lui aura délivré un document de voyage en cours de validité, ou à destination d’un autre pays dans lequel il est autorisé à séjourner, tout en lui interdisant l’entrée sur le territoire pendant une durée de dix ans.
Ledit arrêté est basé sur les considérations suivantes :
« Vu les articles 100 et 109 à 115 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;
Vu les antécédents judiciaires de l’intéressé ;
Attendu que l’intéressée constitue une menace pour l’ordre public, la sécurité intérieure, la santé publique ou les relations internationales du Grand-Duché de Luxembourg ou de l’un des Etats parties à une convention internationale relative au franchissement des frontières extérieures, liant le Grand-Duché de Luxembourg ;
Attendu que l’intéressé ne justifie pas l’objet et les conditions du séjour envisagé ;
Attendu que l’intéressé ne justifie pas de ressources personnelles suffisantes, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays d’origine ou le transit vers un pays tiers dans lequel son admission est garantie ;
Attendu que l’intéressé n’est ni en possession d’une autorisation de séjour valable pour une durée supérieure à trois mois ni d’une autorisation de travail ;
(…) ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 5 juillet 2018, Monsieur … a fait introduire un recours en annulation de la décision ministérielle précitée du 10 avril 2018.
Dans la mesure où ni la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration, ci-après désignée « la loi du 29 août 2008 », ni aucune autre disposition légale n’instaurent un recours au fond en matière de décisions de retour, respectivement de décisions portant interdiction du territoire, l’article 113 de la loi du 29 août 2008 prévoyant expressément un recours en annulation contre les décisions visées aux articles 109 et 112 de la même loi, le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation introduit contre la décision ministérielle déférée, recours qui est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
A l’appui de son recours et en ce qui concerne la légalité externe de la décision ministérielle sous analyse, le demandeur, en se référant à l’article 109 de la loi du 29 août 2008, reproche en premier lieu au ministre de ne pas avoir suffisamment motivé sa décision. Ainsi, le ministre ne lui aurait pas expliqué les raisons pour lesquelles il aurait estimé qu’il serait une menace grave pour l’ordre public et la sécurité publique, de sorte qu’il y aurait lieu d’annuler cette même décision ministérielle pour défaut de motivation.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen en faisant valoir que la décision déférée serait motivée tant en fait qu’en droit.
L’article 109 de la loi du 29 août 2008, qui dispose que « (1) Les décisions de refus visées respectivement aux articles 25 et 27 et aux articles 100, 101 et 102 sont prises par le ministre et dûment motivées. La décision motivée par des raisons de santé publique est prise sur proposition du ministre ayant la Santé dans ses attributions.
(2) Les motifs précis et complets d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique qui sont à la base d’une décision, sont portés à la connaissance de la personne concernée, à moins que des motifs relevant de la sûreté de l’Etat ne s’y opposent » requiert qu’une décision de retour soit spécifiquement motivée par l’indication des motifs précis et complets d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique qui sont à sa base.
Contrairement aux affirmations du demandeur, le tribunal est amené à retenir que la décision de retour litigieuse est motivée à suffisance dans la mesure où le ministre a retenu que le comportement du demandeur constitue une menace pour l’ordre public, la sécurité intérieure, la santé publique ou les relations internationales du Grand-Duché de Luxembourg ou de l’un des Etats parties à une convention internationale relative au franchissement des frontières extérieures, liant le Grand-Duché de Luxembourg. Ladite décision ministérielle qui indique les dispositions légales sur base desquelles elle a été adoptée, à savoir les articles 100 et 109 à 115 de la loi du 29 août 2008, est par ailleurs motivée par le fait que le demandeur ne justifie pas l’objet et les conditions du séjour envisagé. Par ailleurs, le ministre a mis en exergue qu’il ne dispose pas de ressources personnelles suffisantes, et qu’il n’est ni en possession d’une autorisation de séjour valable pour une durée supérieure à trois mois ni d’une autorisation de travail. Il s’ensuit que la décision déférée a indiqué tant les circonstances de fait que la cause juridique à sa base, de sorte qu’elle est motivée à suffisance de droit au regard des exigences de l’article 109, précité, de la loi du 29 août 2008. Cette motivation a, par ailleurs, été utilement complétée par les explications fournies par le délégué du gouvernement au cours de l’instance contentieuse, ensemble avec le dossier administratif versé en cause, de sorte que le demandeur n’a pas pu se méprendre sur les raisons à la base de la décision litigieuse et a ainsi été mis en mesure d’assurer la défense de ses droits et intérêts en parfaite connaissance de cause.
Il convient encore de préciser, en ce qui concerne l’obligation imposée par l’article 109, paragraphe (2), de la loi du 29 août 2008 de porter à la connaissance de l’intéressé les motifs précis et complets d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique qui sont à la base d’une décision de refus visée respectivement aux articles 25 et 27 et aux articles 100, 101 et 102 de la loi du 29 août 2008, que le ministre a fait référence dans la décision déférée aux « antécédents judiciaires de l’intéressée ». S’il est certes manifeste que cette formule est succinte, la sanction de l’obligation de motiver une décision administrative consiste selon les principes dégagés par la Cour administrative, en la suspension des délais de recours, l’administration pouvant produire ou compléter les motifs postérieurement et même pour la première fois lors de la phase contentieuse1. En l’espèce, force est au tribunal de constater que dans le cadre de la phase contentieuse, le délégué du gouvernement a porté à la connaissance du demandeur les motifs précis et complets d’ordre public afin de justifier la menace qu’il présente pour la société luxembourgeoise en mettant en exergue les condamnations judiciaires et procès-verbaux de la police grand-ducale dont il a fait l’objet et des sanctions disciplinaires prononcées à son encontre au CPL lors de son incarcération, tout en insistant sur le fait que la menace pour l’ordre public, telle qu’invoquée par le ministre, serait avérée, en se référant notamment encore à des rapports du comité de guidance des 2 juillet 2014, 19 octobre 2016 et 4 juillet 2018.
1 Cour administrative 20 octobre 2009 n° 25738C, Pas. adm. 2018, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 85 et les autres références y citées.
Il s’ensuit qu’au vu des explications susvisées complétées dans le cadre de la phase contentieuse, la décision est motivée à suffisance de droit. Le moyen afférant est à rejeter pour ne pas être fondé.
Au fond, Monsieur … fait valoir qu’il ne constituerait pas une menace pour l’ordre public. Il fait dans ce contexte état de ce que l’article 27, alinéa 2 de la loi du 29 août 2008 et la jurisprudence constante retiendraient que l’existence de condamnations pénales antérieures ne pourraient motiver à elles seules le refus de séjour et qu’une décision de refus de séjour, d’éloignement et d’interdiction d’entrée sur le territoire pourraient seulement être prises « si le comportement personnel de la personne présente une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société ». Il rappelle ses antécédents judiciaires précitées, tout en insistant sur le fait qu’au jour de sa condamnation à une peine de réclusion de 12 ans, il n’aurait été âgé que de 24 ans. Il se réfère ensuite à des rapports du comité de guidance afin de relever que son comportement se serait nettement amélioré, qu’il aurait lors de son incarcération travaillé dans plusieurs ateliers et qu’il aurait payé ses amendes et indemnisé les parties civiles. Il aurait également participé sur une base volontaire et de façon active au « Programme Tox », ainsi qu’au programme « Anti-gewalt Training », et il aurait suivi avec succès une thérapie auprès d’un médecin.
Il reproche ensuite au ministre d’avoir retenu dans la décision déférée qu’il ne justifierait ni de l’objet et des conditions du séjour envisagé ni de ressources personnelles suffisantes. Dans ce contexte, il rappelle qu’il aurait toujours séjourné régulièrement au Luxembourg, que son séjour se justifierait au vu du fait que toute sa famille y résiderait, notamment sa mère et tous ses frères et sœurs et que son père serait décédé sur le sol luxembourgeois en date du 24 juin 2016. Un retour au Monténégro aurait pour conséquence un isolement social complet et vaudrait séparation définitive de sa famille qui le soutiendrait depuis le début de son incarcération. Il en conclut qu’une telle séparation constituerait une violation de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, dénommée ci-après « la CEDH », tout en relevant qu’il se serait bien intégré au Luxembourg, qu’il parlerait les langues officielles du pays, qu’il aurait suivi sa scolarité sur le territoire luxembourgeois et y aurait travaillé pendant de nombreuses années. Il y aurait noué des liens sociaux tant au niveau professionnel, familial qu’amical. Il n’aurait visité le Monténégro qu’à de rares occasions lors des vacances et il n’y aurait plus aucune attache, ni famille. Il soulève encore le fait que sa mère, âgée de 67 ans, souffrirait d’une invalidité à hauteur de 75% et qu’elle aurait besoin d’une tierce personne pour s’occuper d’elle et pour gérer sa vie quotidienne, ce qu’il aurait l’intention de faire à sa sortie du CPL.
En ce qui concerne ses ressources financières, il mentionne être copropriétaire d’un immeuble situé à Luxembourg, de sorte qu’il serait inexact de prétendre qu’il ne justifierait pas de ressources personnelles suffisantes.
En résumé, il conclut à l’annulation de la décision déférée en raison de l’absence d’attaches avec le Monténégro, du temps passé sur le territoire luxembourgeois, de son intégration, de la présence de toute sa famille au Luxembourg et au regard du fait qu’il y aurait noué des liens familiaux et sociaux.
Quant à l’interdiction d’entrée sur le territoire, le demandeur rappelle les dispositions de l’article 112 de la loi du 29 août 2008 qui permettrait au ministre d’assortir une décision de retour d’une interdiction d’entrée sur le territoire, tout en relevant que cette durée ne pourrait en principe pas excéder cinq ans, sauf dans l’hypothèse où l’intéressé constituerait une menace grave pour l’ordre public. Le ministre qui disposerait d’un pouvoir discrétionnaire en la matière aurait néanmoins l’obligation de motiver sa décision et l’existence de motifs seraient une des conditions essentielles de la validité d’un acte administratif.
Dans son mémoire en réplique, le demandeur relève que seules les deux condamnations énoncées ci-avant pourraient être prises en compte dans l’appréciation de savoir s’il constitue une menace pour l’ordre public, ce qui ne saurait être le cas pour de simples procès-verbaux auxquels aucune suite pénale n’aurait été réservée. Il insiste encore une fois sur le fait que son comportement au CPL, notamment depuis 2014, se serait nettement amélioré, que le nombre d’incidents survenus ces dernières années aurait diminué et se réfère à cet égard à un rapport du comité de guidance du 4 juillet 2018.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours.
A titre préliminaire, il y a lieu de relever que l'article 27 de la loi du 29 août 2008, auquel le demandeur fait référence, a pour objet d'assurer la transposition de la directive n° 2008/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres et n’est pas applicable au cas d’espèce, puisque Monsieur … n’est pas un citoyen de l’Union européenne.
Dans le cadre de l’analyse afin de savoir si Monsieur … constitue une menace pour l’ordre public, la sécurité intérieure et la santé publique, le délégué du gouvernement relève, à titre liminaire, que le rapport du comité de guidance du 4 juillet 2018 ne pourrait être pris en considération en l’espèce, étant donné qu’il aurait été rédigé postérieurement à l’adoption de la décision déférée du 10 avril 2018. Ce dernier explique que dans la mesure où dans le cadre du recours en annulation, l’analyse du tribunal ne saurait se rapporter qu’à la situation de fait et de droit telle qu’elle s’est présentée au moment de la prise de la décision déférée, le juge de l’annulation ne pourrait faire porter son analyse ni à la date où il statue, ni à une date postérieure au jour où la décision déférée a été prise.
Le tribunal ne saurait cependant partager cette argumentation. En effet, si effectivement, dans le cadre d’un recours en annulation, le juge administratif doit statuer suivant les éléments de fait et de droit tels qu’ils ont existé au moment de la prise de la décision administrative critiquée, il n’en reste pas moins qu’il est admis que tous les éléments de preuve et d’établissement de la véracité des éléments de fait ayant existé au moment pertinent peuvent néanmoins encore être réunis en instance contentieuse, même s’ils ne se sont pas entièrement trouvés dégagés au moment de la prise de la décision critiquée. Etant donné que ledit rapport, certes établi postérieurement à l’adoption de la décision déférée, relate d’événements ayant partiellement eu lieu antérieurement à ladite décision, le tribunal en tiendra compte en ce qui concerne les événements ayant eu lieu avant le 10 avril 2018, jour de la prise de la décision litigieuse, et en fera abstraction pour le surplus.
En ce qui concerne ensuite la légalité interne de l’arrêté ministériel attaqué, le tribunal relève, à titre liminaire, que la décision déférée comporte un double volet, à savoir, premièrement, une décision de retour, c’est-à-dire une décision déclarant irrégulier le séjour du demandeur et lui ordonnant de quitter le territoire sans délai et, deuxièmement, une interdiction d’entrée sur le territoire pour une durée de dix ans.
Quant au bien-fondé de la décision de retour prononcée à l’encontre du demandeur, le tribunal relève que l’article 100 de la loi du 29 août 2008, sur lequel ladite décision est, entre autres, basée, dispose que :
« (1) Est considéré comme séjour irrégulier sur le territoire donnant lieu à une décision de retour, la présence d’un ressortissant de pays tiers:
a) qui ne remplit pas ou plus les conditions fixées à l’article 34;
b) qui se maintient sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ou, s’il n’est pas soumis à l’obligation du visa, au-delà de la durée de trois mois à compter de son entrée sur le territoire;
c) qui n’est pas en possession d’une autorisation de séjour valable pour une durée supérieure à trois mois ou d’une autorisation de travail si cette dernière est requise;
d) qui relève de l’article 117. (…) ».
Force est au tribunal de constater qu’en son paragraphe (1), points a), b), c) et d), ledit article 100 prévoit des critères alternatifs permettant de conclure au caractère irrégulier du séjour d’un étranger, de sorte qu’il suffit que l’étranger en question tombe dans l’une des hypothèses visées auxdits points a), b), c) et d), pour que le ministre puisse déclarer irrégulier son séjour.
Etant donné qu’il est constant en cause qu’au moment de la prise de la décision déférée, le demandeur ne disposait pas d’une autorisation de séjour valable, celle-ci ayant expiré le 31 août 2008, ni d’une autorisation de travail, le ministre pouvait valablement, sur base de l’article 100 (1) c) de la loi du 29 août 2008, déclarer irrégulier le séjour de Monsieur … et prononcer un ordre de quitter le territoire à son égard.
Par ailleurs, le demandeur ne remplit pas non plus la condition inscrite au quatrième point du paragraphe (2) de l’article 34 de la loi du 29 août 2008, aux termes duquel « [Le ressortissant de pays tiers] ne [doit] pas être considéré comme constituant une menace pour l'ordre public, la sécurité intérieure, la santé publique ou les relations internationales du Grand-Duché de Luxembourg ou de l'un des Etats parties à une convention internationale relative au franchissement des frontières extérieures, liant le Grand-Duché de Luxembourg ».
En l'espèce, le ministre s'est notamment basé sur des raisons d'ordre public pour prendre la décision incriminée. Force est à cet égard au tribunal de constater qu'il ressort des pièces du dossier administratif que, depuis 2003, le demandeur a fait l'objet d'une multitude de rapports de police pour infractions à loi du 19 février 1973, coups et blessures et confiscation d’objets prohibés.
Par jugement du tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg du 17 novembre 2003, le demandeur a été condamné à une peine d'emprisonnement de cinq ans assortie d’un sursis intégral, à une amende de … euros et à une interdiction de conduire de 3 ans pour vente illicite de stupéfiants, offre illicite de stupéfiants, mise en circulation illicite de stupéfiants, détention illicite de stupéfiants en vue d’un usage par autrui, transport illicite de stupéfiants en vue d’un usage par autrui et détention d’arme prohibée.
Par jugement du tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg du 23 mars 2010, le demandeur a été condamné à une peine de réclusion de 16 ans pour tentative de meurtre. Suivant arrêt de la Cour d'appel du 9 novembre 2010, le jugement du 23 mars 2010 a été partiellement réformé et la peine de réclusion du demandeur a été réduite à douze ans.
Il ressort encore des rapports du comité de guidance des 2 juillet 2014, 19 octobre 2016, 8 février 2017 et 4 juillet 2018 que le demandeur a fait l’objet d’un très grand nombre de sanctions disciplinaires depuis le début de son incarcération, dont notamment pour consommation de stupéfiants et rixes.
Dès lors, s'il est vrai qu’en principe une condamnation pénale à elle seule ne peut motiver une décision de refus de séjour, il ressort cependant à suffisance des décisions judiciaires et rapports précitées que le comportement du demandeur se caractérise tant par une continuité d'atteintes à l'ordre public, dont une tentative de meurtre, sur une longue période, que par une incapacité persistante à s’adapter à la vie sociale, et ce depuis 2003, et dont il ne s'est jamais départi, malgré un premier sursis intégral et son incarcération. Par voie de conséquence, le tribunal est amené à conclure que le ministre a valablement pu estimer, sans commettre une erreur manifeste d'appréciation, que le comportement personnel du demandeur, tel qu'il se dégage de tous ces faits, ne saurait être considéré comme étant de nature à écarter toute potentialité dans son chef de compromettre à nouveau l'ordre public.
Cette conclusion n'est pas remise en cause par l'argumentation du demandeur selon laquelle il aurait soigné ses problèmes de santé et de dépendance lors de son incarcération en ayant notamment suivi, selon une attestation du 31 janvier 2014, le « Programme de Prévention à la Rechute de 16 modules » proposé par le « Programme Tox », ainsi qu’une « formation „Anti-Gewalt-Training im CPL” » organisée par l’« Anti-Gewalt-Training Luxembourg A.S.B.L. » en 2011 et suivi une psychothérapie en 2015, affirmation qui n'est pas appuyée par la réalité des faits puisque suite à ces formations et psychothérapie, le demandeur a fait l’objet de sanctions disciplinaires pour consommation de substances illicites et comportement agressif ayant été impliqué dans des rixes.
Quant à l'argumentation du demandeur fondée sur l'article 8 de la CEDH, qui dispose que: « 1) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.
2) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-
être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui », il convient de relever que s'il est de principe, en droit international, que les Etats ont le pouvoir souverain de contrôler l'entrée, le séjour et l'éloignement des étrangers, il n'en reste pas moins que les Etats qui ont ratifié la CEDH ont accepté de limiter le libre exercice de cette prérogative dans la mesure des dispositions de cette même convention.
Il convient néanmoins dans ce contexte de préciser que l'article 8 de la CEDH ne confère pas directement aux étrangers un droit de séjour dans un pays précis. S'il est vrai que sur base dudit article l'existence d'une vie familiale effective et stable, susceptible d'être protégée, peut effectivement constituer un éventuel obstacle à un refus de séjour, il faut encore que le demandeur puisse invoquer l'existence d'une vie familiale effective et stable que le refus du ministre perturbe de façon disproportionnée.
La question de l’existence ou de la non-existence d’une vie familiale est essentiellement une question de fait qui dépend de l’existence réelle, dans la pratique, de liens personnels étroits.
Or, dans les cas d’immigration, il n’y aura pas de vie familiale entre parents et enfants adultes à moins qu’ils ne puissent apporter la preuve d’éléments de dépendance supplémentaires. Les rapports entre adultes ne bénéficieront pas nécessairement de la protection de l'article 8 sans que soit démontrée l'existence d'éléments supplémentaires de dépendance, autres que les liens affectifs normaux2.
En l’espèce, le demandeur se limite à invoquer l'existence d'une vie familiale au Luxembourg avec sa mère et ses frères et sœurs, en mettant en avant sa présence sur le territoire luxembourgeois depuis son adolescence et le fait que sa mère, qui serait invalide à 75 %, nécessiterait qu’il la prenne en charge.
Force est cependant au tribunal de constater que le demandeur reste en défaut d’établir, comme retenu ci-avant, que de tels liens familiaux aient existé. S’il est vrai que les attestations testimoniales versées en cause témoignent d’un contact régulier par la voie des visites au CPL entre les personnes concernées, ces affirmations seules ne sont toutefois pas de nature à prouver, au-delà des liens de parenté existant entre le demandeur et sa mère, respectivement ses frères et sœurs, le degré d’intensité, et de stabilité permettant au tribunal de conclure à une protection de l’article 8 de la CEDH, le demandeur ne fournissant aucune preuve de l’existence d’éléments supplémentaires de dépendance autres que les liens affectifs normaux. Contrairement à sa déclaration, sa mère n’est pas non plus dépendante de lui, puisque celle-ci a été amenée à organiser sa vie sans sa présence depuis son incarcération en 2008 ne nécessitant ainsi pas la présence de son fils auprès d’elle pour s’occuper d’elle.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le demandeur est resté en défaut de prouver l’existence de liens familiaux d’une intensité et d’une stabilité telles qu’ils sont susceptibles de bénéficier de la protection de l’article 8 de la CEDH.
Par ailleurs et même en admettant l'existence d'une vie familiale effective au sens des dispositions de l'article 8 de la CEDH entre le demandeur, sa mère et ses frères et sœurs, de sorte que la décision de retour accompagnée d’une interdiction d’entrée sur le territoire serait à qualifier d'ingérence dans cette vie familiale, il se dégage des développements ci-avant exposés au niveau de la légalité de la décision querellée qu'elle s'analyse en une mesure légalement prévue en droit luxembourgeois, de sorte que la condition afférente énoncée à l'article 8, paragraphe 2 de la CEDH est remplie en l'espèce.
S'il est encore vrai qu'une ingérence est, en principe, justifiée lorsque le comportement de l'intéressé est constitutif d'un danger pour l'ordre public, c'est-à-dire lorsque la décision ministérielle s'insère dans le cadre de la prévention des infractions pénales, il n'en reste pas moins qu'aux termes de l'article 8, paragraphe (2) de la CEDH, l'ingérence doit être nécessaire dans une société démocratique. La vérification de cette exigence appelle le tribunal à mettre en balance l'ampleur de l'atteinte à la vie familiale dont il est question avec la gravité du trouble que l'étranger cause ou risque de causer à l'ordre public.3 En l'espèce, eu égard aux antécédents judiciaires du demandeur et à son comportement général et au non-respect répété par celui-ci de son interdiction de séjour sur le territoire 2 trib. adm., 7 juin 2010, n° 26270 du rôle, confirmé par Cour adm., 18 novembre 2010, n°27084C du rôle, Pas.
adm. 2018, V°Etrangers, n°458 et les autres références y citées.
3 trib. adm. du 23 décembre 1999, n° 11500 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Etrangers, n° 472 et autres références y citées.
luxembourgeois, le tribunal arrive à la conclusion que le refus de séjour ne s'analyse pas en une ingérence disproportionnée dans sa vie privée et familiale par rapport au but poursuivi par les autorités compétentes, tendant à assurer la défense de l'ordre public, étant donné la gravité des atteintes d'ores et déjà portées à l'ordre public luxembourgeois à travers le grand nombre et la nature des infractions pénales commises par le demandeur, dénotant dans son chef la constance d'un état d'esprit peu respectueux des lois du pays, de sorte que c'est à tort que le demandeur se prévaut d'une violation de l'article 8 de la CEDH. En effet, des condamnations pénales antérieures peuvent justifier une ingérence de l’autorité publique dans l’exercice du droit à la vie privée et familiale et permettre un éloignement du territoire, alors même qu’une telle mesure aboutit à entraver la vie familiale de leur auteur4.
Il s'ensuit que le moyen fondé sur une violation de l'article 8 de la CEDH est à rejeter comme étant non fondé.
Il suit partant de l'ensemble des considérations qui précèdent qu'au regard du comportement du demandeur et au regard de l'absence de preuves d'une vie familiale réelle et effective sur le territoire luxembourgeois, le ministre a valablement pu refuser le droit de séjour au demandeur, tout en lui enjoignant de quitter le territoire sans délai sans violer le principe de proportionnalité.
En ce qui concerne l’ordre de quitter le territoire sans délai, étant donné que l’article 111 (3) c) 1. de la loi du 29 août 2008 prévoit que « L’étranger est obligé de quitter le territoire sans délai (…) s’il existe un risque de fuite dans le chef de l’étranger. Le risque de fuite est présumé dans les cas suivant : (…) si l’étranger ne remplit pas ou plus les conditions de l’article 34 » et que le tribunal vient de retenir qu’au jour de la prise de la décision déférée, le demandeur ne remplissait pas les conditions dudit article 34, c’est encore à juste titre que le ministre n’a pas assorti l’ordre de quitter le territoire d’un délai de départ volontaire, le demandeur n’ayant, d’ailleurs, pas formulé de contestations spécifiques sur ce point.
Enfin, en ce qui concerne l’interdiction d'entrée sur le territoire, fixée, en l’espèce, à une durée de dix ans, l’article 112 (1) de la loi du 29 août 2008 dispose que « (…) Les décisions de retour peuvent être assorties d’une interdiction d’entrée sur le territoire d’une durée maximale de cinq ans prononcée soit simultanément à la décision de retour, soit par décision séparée postérieure. Le ministre prend en considération les circonstances propres à chaque cas. Le délai de l’interdiction d’entrée sur le territoire peut être supérieur à cinq ans si l’étranger constitue une menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale.
(…) ».
Cet article permet dès lors au ministre, en prenant en considération les circonstances propres à chaque cas, d’assortir une décision de retour, ainsi qu’une décision d’expulsion le cas échéant, d’une interdiction d’entrée sur le territoire dont la durée ne peut, en principe, pas excéder cinq ans - sauf dans l’hypothèse où l’intéressé constitue une menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale -, et ce, de manière discrétionnaire.
Le pouvoir discrétionnaire du ministre n’échappe, cependant, pas au contrôle des juridictions administratives, en ce que le ministre ne saurait verser dans l’arbitraire. Ainsi, confronté à une décision relevant d’un pouvoir d’appréciation étendu, le juge administratif, saisi 4 trib. adm. du 10 janvier 1997, n° 9754 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Etrangers, n° 501 et les autres références y citées.
d’un recours en annulation, est appelé à vérifier, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, si les faits sur lesquels s’est fondée l’administration, sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute et s’ils sont de nature à justifier la décision, de même qu’il peut examiner le caractère proportionnel de la mesure prise par rapport aux faits établis, en ce sens qu’au cas où une disproportion devait être retenue par le tribunal administratif, celle-ci laisserait entrevoir un usage excessif du pouvoir par l’autorité qui a pris la décision5.
En ce qui concerne les interdictions de territoire supérieur à cinq ans, la loi prévoit le critère supplémentaire que le demandeur doit constituer une menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale.
Toutefois, le tribunal constate que le demandeur s’est simplement contenté d’indiquer dans la partie relative à l’interdiction de territoire de son recours que la décision devrait être motivée, tout en soutenant que « l’existence de motifs est une des conditions essentielles de la validité d’un acte administratif ». Le tribunal est ainsi amené à constater de prime abord qu’en l’espèce et sur base des mêmes éléments retenus ci-dessus concernant la motivation de la décision de retour, le ministre et le délégué du gouvernement lors de la procédure contentieuse ont suffisamment motivé tant en fait qu’en droit les raisons ayant amené le ministre à considérer que Monsieur … constitue une menace pour l’ordre public et à prononcer contre lui une interdiction d’entrée sur le territoire de 10 ans.
Partant, et en l’absence de contestation de la part du demandeur sur la gravité de la menace pour l’ordre public qu’il constitue - ce dernier ayant simplement contesté l’absence de motivation de la décision ministérielle sur ce point -, il y a lieu de retenir qu’au vu des prédits antécédents judiciaire, le ministre a valablement pu, sans commettre une erreur manifeste d’appréciation, retenir que le demandeur constitue une menace grave pour l’ordre public et ordonner de ce fait une interdiction d’entrée sur le territoire de dix ans.
Dans la mesure où le demandeur n’a formulé aucun moyen d’annulation visant spécifiquement la décision d’interdiction d’entrée sur le territoire, il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence de la partie demanderesse et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de ses conclusions.
Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que le tribunal ne saurait utilement mettre en cause ni la légalité, ni le bien-fondé de la décision déférée portant interdiction d’entrée sur le territoire.
En ce qui concerne ensuite la demande introduite à titre subsidiaire par Monsieur … tendant à voir réduire l’interdiction d’entrée sur le territoire à 3 ans, celle-ci est à rejeter dans la mesure où le juge de l’annulation ne peut pas substituer son appréciation à celle de l’autorité administrative6 au risque de dépasser ses propres pouvoirs dans le cadre d’un recours en annulation, ce d’autant plus que, tel que retenu ci-dessus, le ministre n’a pas commis une erreur manifeste d’appréciation des faits.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours sous examen n’est fondé en aucun de ses moyens.
5 Trib. adm. 27 février 2013, n° du rôle 30584, Pas.adm. 2018, V° Etrangers, n° 667 et les autres références y citées.
6 En ce sens trib. adm., 16 juin 2016, n°36542 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Recours en annulation, n°17.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
reçoit le recours en annulation en la forme ;
au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par :
Hélène Steichen, juge, Daniel Weber, juge, Michèle Stoffel, juge, et lu à l’audience publique du 23 mai 2019 par le juge Hélène Steichen, en présence du greffier assumé Lejila Adrovic.
s.Lejila Adrovic s.Hélène Steichen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 23 mai 2019 Le greffier du tribunal administratif 12