Tribunal administratif N° 41161 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 mai 2018 2e chambre Audience publique du 23 mai 2019 Recours formé par Monsieur … et consort, … (Suisse) contre un bulletin de l’impôt sur le revenu en matière d’impôts sur le revenu
________________________________________________________________________
JUGEMENT
Vu la requête, inscrite sous le numéro 41161 du rôle et déposée le 18 mai 2018 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme Elvinger Hoss Prussen S.A., étabie et ayant son siège social à L-1340 Luxembourg, 2, place Winston Churchill, immatriculée au registre de commerce et des sociétés sous le numéro B209469, inscrite à la liste du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, représentée aux fins de la présente procédure par Maître André Elvinger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … et de son épouse, Madame …, demeurant à CH-…, …, tendant à la réformation du bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2010, émis le 28 juin 2017 par le bureau d’imposition Luxembourg X de la section des personnes physiques de l’administration des Contributions directes, une réclamation dirigée le 7 juillet 2017 contre ledit bulletin d’imposition étant restée sans réponse de la part du directeur de l’administration des Contributions directes ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 10 octobre 2018 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 8 novembre 2018 par la société anonyme Elvinger Hoss Prussen S.A., préqualifiée, au nom et pour compte de ses mandants ;
Vu les pièces versées en cause et notamment le bulletin entrepris ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Marc Elvinger, en remplacement de Maître André Elvinger, et Madame le délégué du gouvernement Caroline Peffer en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 28 janvier 2019.
________________________________________________________________________
Monsieur … et son épouse, Madame …, ci-après désignés par « les consorts … », déposèrent leur déclaration pour l’impôt sur le revenu de l’année 2010 en date du 7 janvier 2012, réceptionnée en date du 13 janvier 2012.
1 En date du 27 mai 2015, le bureau d’imposition Luxembourg X de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le bureau d’imposition », adressa aux consorts … un courrier conformément au prescrit du paragraphe 205(3) de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », leur signalant préalablement à l’émission de leur bulletin pour l’année 2010 que le bureau d’imposition procédera à l’imposition de leur revenu 2010 en apportant certaines modifications au titre (1) de la déduction des dépenses spéciales et charges extraordinaires et (2) des revenus provenant de plus-values réalisées lors de la cession d’immeubles du patrimoine privé.
Par courrier daté du 2 juin 2015, les consorts … prirent position sur les deux points litigieux.
Le bureau d’imposition émit, en date du 3 juin 2015, le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2010 sans mention particulière sur les points litigieux sus-visés dans la rubrique relative au « Détail concernant l’imposition ».
Par lettre du 30 juin 2015, le litismandataire des consorts … introduisit une réclamation auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur », contre le bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2010.
Par jugement du 25 avril 2017, inscrit sous le numéro 37808 du rôle, le tribunal administratif annula dans le cadre du recours en réformation le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2010, émis le 3 juin 2015 et renvoya le dossier en prosécution de cause au directeur au motif que « les demandeurs n’ont matériellement pas pu faire raisonnablement usage de leur droit d’être entendu dès lors que le délai entre l’envoi de la lettre du bureau d’imposition du 27 mai 2015 et l’émission du bulletin litigieux fut réduit à sa plus simple expression, à savoir une semaine et que nonobstant la promptitude que les demandeurs ont démontrée à répondre au courrier du 27 mai 2015 dans un délai extrêmement court pour assurer leur droit de la défense, à savoir à peine six jours, le bureau d’imposition a émis le bulletin litigieux en omettant d’attendre leur prise de position, de sorte qu’il a vidé de sa substance la formalité prévue au paragraphe 205(3) AO ».
Par courrier du 1er juin 2017, le bureau d’imposition informa les consorts … comme suit :
« (…) Imposition partielle par le bureau d’imposition Luxembourg X pour la période de non résidence du 16 juillet 2010 au 31 décembre 2010 Les dispositions de l’article 6, alinéa 3 de la loi concernant l’impôt sur le revenu (LIR) prévoient que lorsqu’une personne a été contribuable résident pendant une partie et contribuable non résident pendant une autre partie de l’année d’imposition, l’impôt 2frappe distinctement le revenu imposable réalisé par cette personne pendant chacune de ces périodes.
S’en suit que les dispositions de l’article 157ter LIR ne sont pas applicables. Ainsi ni les dépenses spéciales ni les charges extraordinaires ne sont pris en compte.
Conformément à l’article 157bis, alinéa 3 une imposition collective n’a pas lieu étant donné que seulement un des époux perçoit des revenus professionnels aux Luxembourg.
Pendant la période de non résidence seuls les revenus provenant de la location de biens et le revenu net divers provenant de la plus-value réalisée lors de la cession d’immeubles du patrimoine privé de Mme … sont à imposer.
Imposition en classe d’impôt 1 étant donné que les revenus de Mme … ne sont pas des revenus professionnels.
Revenus provenant de plus-values réalisées lors de la cession d’immeubles du patrimoine privé :
Les immeubles avec les numéros cadastraux … ne font pas partie de votre habitation principale et dégagent de ce fait une plus-value lors de leur vente.
Le prix de vente en relation avec votre habitation principale (numéro cadastral :
…) est taxé à …..-€.
Prix de vente des terrains agricoles (numéros cadastraux : …, …, …, …, …) taxé à …€/are : … ares * … € = …€ Prix de vente Garages + Maison de Weekend (numéro cadastral …) …: … – …– … = … €.
Calcul des plus-values :
1. Garages + Maison de Weekend … Prix de vente :
… EUR - Prix d’acquisition forfaitaire Valeur unitaire … … EUR Plus-value dégagée …EUR - Abattement 130 (4) LIR …EUR 3Revenu net divers …EUR 2. Terrains agricoles …, …, …, …, … Prix de vente :
… EUR - Prix d’acquisition réévalué :
- 4,2 ares. … Prix d’acquisition forfaitaire :
54,46 ares : … … EUR Plus-value dégagée :
… EUR - Abattement 130 (4) LIR … EUR Revenu net divers :
…EUR Revenus nets divers imposables :
1. …EUR 2. …EUR =
…EUR (…) ».
Par courrier du 20 juin 2018, les consorts … formulèrent par l’intermédiaire de leur litismandataire leurs observations quant au courrier précité du bureau d’imposition du 1er juin 2017.
Le bureau d’imposition émit, en date du 28 juin 2017, un nouveau bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2010 en indiquant dans la rubrique relative au « Détail concernant l’imposition » « Imposition partielle de la période de non résidence du 16 juillet au 31 décembre 2010 En dépit de votre lettre du 20 juin l’imposition est établie conformément à notre courrier svt §205 AO du 1er juin 2017 ».
Par lettre du 7 juillet 2017, le litismandataire des consorts … introduisit une nouvelle réclamation auprès du directeur contre le bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2010.
Au vu du silence gardé par le directeur à la suite de cette réclamation, les consorts … ont fait introduire, par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mai 2018, un recours en réformation à l’encontre du bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2010.
Il résulte de la lecture combinée des dispositions du paragraphe 228 AO et de l’article 8 (3) 3. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, dénommée ci-après « la loi du 7 novembre 1996 », 4que lorsqu’une réclamation au sens du paragraphe 228 AO a été introduite et qu’aucune décision définitive n’est intervenue dans un délai de six mois à partir de la demande, le réclamant peut considérer la réclamation comme rejetée et peut introduire un recours devant le tribunal administratif contre la décision qui a fait l’objet de la réclamation.
En l’espèce, le délai de plus de six mois entre la date de l’introduction de la réclamation par lettre du 7 juillet 2017 du litismandataire des consorts … et celle du dépôt de la requête au greffe du tribunal administratif au sens de l’article 8 (3) 3. de la loi du 7 novembre 1996 s’étant écoulé, le tribunal est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours introduit contre un bulletin de l’impôt sur le revenu en l’absence d’une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation contre un tel bulletin.
Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en réformation introduit à l’encontre du bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2010 émis en date du 28 juin 2017, lequel est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
A titre liminaire, le tribunal est amené à rejeter la demande formulée par les demandeurs dans le cadre du dispositif de leur requête introductive d’instance et tendant à la jonction du recours sous examen avec l’affaire inscrite sous le numéro 37808 du rôle, étant donné que dans le cadre de ladite affaire le tribunal administratif a rendu un jugement en date du 25 avril 2017, entretemps revêtu de l’autorité de la chose jugée, de sorte que cette affaire n’est plus pendante devant le tribunal et que toute jonction avec ladite affaire est donc exclue.
Après avoir exposé les faits et rétroactes de l’affaire, les demandeurs soulèvent d’abord l’incompétence du bureau d’imposition d’émettre le bulletin du 28 juin 2017. Ils soutiennent à cet égard que ledit bulletin ne se référerait pas au jugement du tribunal administratif du 25 avril 2017, précité, de sorte qu’ils ne seraient pas en mesure de savoir si ledit bulletin interviendrait « en prosécution de cause » dudit jugement. Dans la mesure où le bulletin déféré resterait encore muet quant à la question de savoir s’il a été pris sur délégation ou sur ordre du directeur et où il ne serait pas possible de savoir si le bulletin se substituerait à une décision du directeur, il serait manifeste qu’en présence du renvoi en prosécution de cause au directeur par le jugement du 25 avril 2017, le bureau d’imposition aurait été incompétent pour agir en telle prosécution de cause.
Ils soutiennent que pour autant que le bulletin d’impôt du 28 juin 2017 aurait été pris indépendamment de la procédure se déroulant en prosécution de cause du jugement du 25 avril 2017, l’imposition par ce bulletin serait irrecevable, sinon mal fondée, au motif qu’il y aurait prescription depuis le 31 décembre 2015, voire l’imposition serait irrecevable en vertu de l’article 223 AO, alors qu’il s’agirait d’impôts supplémentaires par rapport à ceux antérieurement établis, notamment pour imposition au titre de non-résident.
Pour autant que le bulletin du 28 juin 2017 interviendrait en prosécution de cause du jugement rendu par le tribunal en date du 25 avril 2017, les demandeurs font valoir que le bureau d’imposition serait incompétent pour émettre ledit bulletin, étant donné que l’affaire aurait été renvoyée au directeur. En ordre subsidiaire, ils soutiennent que le 5bulletin violerait l’article 97 (3) 8) de la loi du 7 novembre 1996, qui dispose que les paragraphes 243 et 244 AO, qui permettent une réformation in pejus, seraient inapplicables devant le tribunal administratif. Dans la mesure où le bulletin du 3 juin 2015 aurait précisé qu’il y avait imposition collective et que « le contribuable [serait] rangé dans la classe d’impôt 2 » pour toute l’année 2010, le bulletin du 28 juin 2017 aggraverait la situation des demandeurs par l’application du régime des non-résidents et le reclassement de Madame … dans la classe d’impôt 1.
Le délégué du gouvernement expose qu’étant donné que le tribunal aurait annulé le bulletin d’impôt émis en date du 3 juin 2015, il n’existerait plus aucun « acte d’administration » sur lequel aurait pu statuer le directeur, de sorte que l’imposition proprement dite aurait été à refaire. L’émission d’un bulletin d’impôt serait de la compétence exclusive du bureau d’imposition qui aurait agi conformément tant à la loi qu’aux instructions lui données. Si, dans le cas de l’annulation d’un bulletin d’imposition par le tribunal, les bases d’imposition étaient établies par voie d’une décision directoriale, cela priverait le contribuable du droit d’introduire une réclamation.
Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs font valoir qu’il n’existerait aucune preuve au dossier que le directeur aurait instruit le bureau d’imposition d’établir un nouveau bulletin d’imposition et soulignent encore que ledit bulletin, qui se présenterait dans la forme d’un bulletin ordinaire, ne mentionnerait pas une telle instruction. Ils soutiennent encore qu’ils auraient reçu un autre bulletin émis en date du 8 août 2018, non par le bureau d’imposition en charge des non-résidents, mais par le bureau d’imposition de …, selon lequel « le contribuable [serait] rangé dans la classe d’impôt 2 », avec en annexe un décompte du bureau de recette d’… qui ignorerait le fait qu’ils auraient payé le total des montants figurant dans les bulletins d’imposition du 3 juin 2015, respectivement du 28 juin 2017 et ne reprendrait plus aucune imposition de plus-value sur l’immeuble sis à ….
Ledit bulletin porterait par ailleurs sur des chiffres qui ne correspondraient ni aux indications des contribuables, ni au bulletin d’imposition émis en date du 3 juin 2015, ni à celui du 28 juin 2017. Il serait dès lors manifeste que les deux bureaux d’imposition auraient agi de leur propre gré et indépendamment de toute « instruction » de la part du directeur. Il serait univoque que le tribunal aurait renvoyé l’affaire en prosécution de cause devant le directeur et non devant le bureau d’imposition.
Force est au tribunal de relever à cet égard qu’il ressort d’un courrier adressé par le directeur au préposé du bureau d’imposition du 30 mai 2017 intitulé « Exécution du jugement numéro 37808 du tribunal administratif du 25 avril 2017 », figurant parmi les documents constituant le dossier fiscal, que le directeur a donné les instructions suivantes au bureau d’imposition : « (…) Le bureau d’imposition Luxembourg X établira les impositions pour la période allant du 16 juillet au 31 décembre de l’année 2010, ceci conformément aux dispositions particulières applicables aux contribuables non résidents et plus particulièrement en conformité avec l’article 156, n°4, lettre a), n° 7 et n° 8, lettre a) L.I.R. et l’article 157bis, alinéas 2 et 3 L.I.R. et 157ter L.I.R., en tenant compte, d’un côté, du salaire de Monsieur …, et de l’autre côté, du revenu de location et du bénéfice de cession réalisés par Madame …. Les bureaux Luxembourg X et … se concerteront tant 6pour les besoins de l’instruction du dossier fiscal, que pour les besoins de l’imposition proprement dite. (…). ».
Il s’ensuit que l’argumentation des demandeurs selon laquelle il ne serait pas établi que le bureau d’imposition aurait agi sous instruction du directeur est à rejeter pour manquer en fait, étant encore précisé que le paragraphe 46 (1) AO confère au directeur la mission de diriger l’administration des Contributions directes et de superviser les bureaux d’imposition pour s’assurer du respect, par ces derniers, du principe d’égalité et de la bonne gestion des cas d’imposition. Ainsi, cette disposition du paragraphe 46 (1), 2e phrase AO doit être rapprochée de celle du paragraphe 29 (2) AO dans le sens que le préposé du bureau d’imposition est investi d’une compétence propre pour le traitement des cas d’imposition individuels, mais qu’il doit l’exercer en conformité aux principes de légalité et d’égalité et que l’exercice de la compétence et plus particulièrement le respect de ces principes est soumis à la surveillance du directeur. Le paragraphe 46 (2) AO prévoit deux instruments d’exercice de cette surveillance par le directeur, en l’occurrence d’abord le pouvoir de rapporter d’office une décision (« Verfügungen untergeordneter Behörden von Amts wegen oder auf Gegenvorstellung hin außer Kraft setzen »), ainsi que le pouvoir d’enjoindre aux autorités subordonnées de faire quelque chose (« diese Behörden anweisen »), pouvoir dont il a usé en l’espèce. Conformément à cette disposition, le directeur peut utiliser ces deux instruments, tant pour donner des directives générales que dans le cadre d’un cas d’imposition individuel1, tel qu’en l’espèce, étant rappelé que la direction n’a pas de responsabilités opérationnelles, en ce sens que le pouvoir d’imposition appartient exclusivement aux services d’imposition, qui peuvent seuls émettre des bulletins d’imposition tout en restant soumis hiérarchiquement à l’autorité supérieure2.
Il s’ensuit que c’est à bon droit que le directeur a renvoyé le cas d’imposition des consorts … au bureau d’imposition après que le tribunal lui a renvoyé le dossier en prosécution de cause à travers le jugement du 25 avril 2017, étant encore précisé qu’un tel renvoi par le directeur au bureau d’imposition est de nature à respecter l'exigence du préalable administratif prévu à l'article 8, (3) 1. de la loi du 7 novembre 1996, tout en étant en outre de nature à sauvegarder le droit des demandeurs à l'accès à toutes les instances de décision et de recours prévues par la loi3.
Il s’ensuit que le bulletin du 28 juin 2017 est intervenu en prosécution de cause du jugement du 25 avril 2017, sans que le fait qu’il ne mentionne pas explicitement ledit jugement aurait une incidence quant à sa validité.
S’agissant de la prétendue incompétence du bureau d’imposition ayant émis le bulletin d’imposition du 28 juin 2017, dont le tribunal se trouve seul saisi, il y a lieu de relever que l’article 12, paragraphe (1), sub 2° de la loi modifiée du 17 avril 1964 portant réorganisation de l’administration des Contributions directes tend à organiser la 1 Cour adm. 29 juillet 2009, n° 25165C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Impôts, n° 693.
2 Alain Steichen, Manuel de droit fiscal – Droit fiscal général – Tome 1, éditions Saint Paul, 2006, p.781, points 869 et 870.
3 trib. adm., 17 novembre 1997, n°9788 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Impôts, n° 1036.
7compétence territoriale des différents services et bureaux. Il dispose que des règlements grand-ducaux détermineront « la répartition parmi les différents services et bureaux des contribuables et autres personnes soumises à des obligations ou prestations en vertu des dispositions légales et réglementaires dont l’exécution appartient à l’administration des Contributions directes ».
Il se dégage ainsi des dispositions applicables de l’article 1er du règlement ministériel modifié du 9 août 1993 fixant la compétence des bureaux d’imposition et de recette de l’administration des contributions directes que « 10. Le bureau d’imposition Luxembourg X est compétent pour les contribuables non résidents, résidents à l’étranger, à l’exception de ceux résidents en Allemagne ou en France ; (…) ».
S’il est vrai que le bulletin d’imposition émis en date du 28 juin 2017 a été établi par le bureau d’imposition Luxembourg X comme si les demandeurs avaient résidé à l’étranger l’année toute entière, il y a lieu de considérer que dans la mesure où il ressort de façon non contestée d’une inscription au registre national des personnes physiques, dont l’extrait figure parmi les pièces du dossier fiscal, qu’ils ont été résidents en Suisse depuis le 16 juillet 2010, le bureau d’imposition Luxembourg X était compétent pour la déclaration d’impôt sur le revenu pour la partie de l’année d’imposition 2010 se situant après le 16 juillet, de sorte que le moyen des demandeurs laisse d’être fondé.
Quant à la prétendue violation de l’article 97, paragraphe (3), point 8 de la loi du 7 novembre 1996, il échet d’abord de rappeler que suivant ladite disposition législative « Les §§ 243 et 244 [AO] sont inapplicables au tribunal administratif et à la Cour administrative ».
Le paragraphe 243 AO prévoit que « (1) Soweit die Rechtsmittelbehörden zur Nachprüfung tatsächlicher Verhältnisse berufen sind, haben sie den Sachverhalt von Amts wegen zu ermitteln.
(2) Sie sind an die Anträge dessen, der das Rechtsmittel eingelegt hat, nicht gebunden.
(3) Sie können die Entscheidung auch zum Nachteil dessen, der das Rechtsmittel eingelegt hat, ändern. ».
Le paragraphe 244 AO prévoit quant à lui que « Die Rechtsmittelbehörden haben die Befugnisse, die den Steuerkontrollstellen im Besteuerungsverfahren gegeben sind.
Soweit die Ausübung dieser Befugnisse an die Genehmigung des Steuerdirektors gebunden ist, bedarf es dieser nur, wenn Steuerkontrollstellen als Rechtsmittelbehörden tätig werden. ».
Force est au tribunal de relever que les paragraphes 243 et 244 AO permettent au directeur, grâce à l’effet dévolutif intégral et du principe du réexamen d’office, de fixer une cote d’impôt plus élevée que celle initialement fixée par les services fiscaux, pouvoir, qui selon la loi du 7 novembre 1996 n’appartient pas aux juridictions administratives. En l’espèce, s’il est vrai que le bulletin d’imposition du 28 juin 2017 a a priori aggravé la situation des demandeurs par rapport à celle ayant existé à la suite du bulletin du 3 juin 2015, il n’en reste pas moins qu’au vu de l’annulation du bulletin du 3 juin 2015 par le jugement du tribunal du 25 avril 2017, le bureau d’imposition était obligé d’établir un 8nouveau bulletin d’impôt en fixant une nouvelle cote d’impôt suivant les instructions lui données par le directeur selon les principes dégagés ci-avant, de sorte qu’il n’y a pas eu de réformation in pejus par le directeur.
Le moyen afférent des demandeurs encourt dès lors le rejet.
Les demandeurs invoquent ensuite la prescription de l’impôt réclamé aux termes de l’article 10 de la loi du 27 novembre 1933 concernant le recouvrement des contributions directes, des droits d’accise sur l’eau-de-vie et des cotisations d’assurance sociale, ci-après désignée par « la loi du 27 novembre 1933 ». Ils soutiennent à cet égard que la prescription de cinq ans concernant l’impôt de l’année d’imposition 2010 serait acquise depuis le 31 décembre 2015, dans la mesure où le bulletin d’imposition du 3 juin 2015 aurait été annulé par le jugement du tribunal de céans du 25 avril 2017, de sorte à ne plus pouvoir produire d’effet. Ils rappellent dans ce contexte qu’ils n’auraient pas donné suite à un formulaire de renonciation à la prescription leur remis le 6 août 2015. Les consorts … font valoir que ni la réclamation ni le recours n’auraient pu suspendre la prescription prévue par l’article 3 de la loi du 22 décembre 1951 portant prorogation du délai de prescription de certains impôts directs et précision des conditions dans lesquelles les prescriptions fiscales peuvent être interrompues, ci-après désignée par « la loi du 22 décembre 1951 », modifié par l’article 12, paragraphe (1) de la loi du 21 décembre 2001 portant réforme de certaines dispositions en matière des impôts directs et indirects, ci-
après désignée par « la loi du 21 décembre 2001 », en insistant plus particulièrement sur le fait que la loi du 21 décembre 2001 distinguerait nettement entre les notions de réclamation et de recours, de sorte qu’il y aurait lieu de retenir que le libellé de l’article 3, alinéa 1er de la loi du 22 décembre 1951, tel que modifié, viserait le seul cas d’introduction d’un recours devant les juridictions administratives.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen.
Aux termes de l’article 10 de la loi du 27 novembre 1933 : « (1) La créance du trésor se prescrit par cinq ans.(…) » et « (…) La prescription prend cours à partir du 1er janvier qui suit l´année pendant laquelle la créance est née. ».
L’article 3, alinéa 1er de la loi du 22 décembre 1951, tel que modifié par la loi du 21 décembre 2001, prévoit que « Les délais de prescription pour l’établissement et le recouvrement des sommes, en principal, intérêts et amendes fiscales, dues au titre des impôts visés à l’alinéa 2 de l’article 1er de la présente loi4 ainsi que des impôts extraordinaires sur les bénéfices de guerre et sur le capital sont interrompus, soit de la manière et dans les conditions prévues par les articles 2244 et suivants du Code civil, soit par une renonciation du contribuable au temps déjà couru de la prescription. En cas d’introduction d’un recours, ils sont suspendus jusqu’à la décision définitive des instances 4 Article 1er alinéa 2 de la loi du 22 décembre 1951 : « Les dispositions qui précèdent s’appliquent à toutes les sommes, en principal, intérêts et amendes fiscales, dues à titre d’impôt sur le revenu, d’impôt sur la fortune, d’impôt commercial communal proprement dit et d’impôt sur le chiffre d’affaires, pour autant que la perception de ce dernier impôt est confiée à l’administration des contributions. ».
9de recours, et ce à compter du moment où le montant des sommes dues a été entièrement réglé mais au plus tôt à compter de l’introduction du recours. Il en est de même des délais de prescription pour le recouvrement de toutes autres sommes, en principal, intérêts et amendes fiscales dont la perception est confiée à l’administration des contributions ».
Il s’ensuit que le délai de prescription est suspendu tant que la décision à intervenir à la suite d’une réclamation ou de l’introduction d’un recours contentieux n’a pas été rendue5. Ainsi, en vertu de l’article 3, tel que modifié, de la loi précitée du 22 décembre 1951, les délais de prescription sont suspendus jusqu’à la décision définitive des instances de recours, et ce à compter du moment où le montant des sommes dues a été entièrement réglé, mais au plus tôt à compter de l’introduction du recours. En effet, dans la mesure où une partie se trouve dans l’impossibilité d’agir avant la décision définitive des instances de recours, la prescription est suspendue pendant la période où celles-ci sont saisies. Le bureau d’imposition est complètement dessaisi en ce sens qu’il ne peut plus modifier l’imposition, lorsque le contribuable interjette une réclamation auprès du directeur. Le même dessaisissement vaut durant la saisine des juridictions de l’ordre administratif 6.
S’il est vrai que la loi du 22 décembre 1951 mentionne indistinctement le « cas d’introduction d’un recours » comme cause de suspension, il n’en reste pas moins qu’il ressort des travaux parlementaires ayant abouti à la loi du 21 décembre 20017 que « Sur un plan technique, il y a lieu de préciser que le terme de « recours » utilisé vise aussi bien les réclamations au sens du paragraphe 228 AO que les contestations au sens du paragraphe 237 AO introduites devant le Directeur des contributions directes. ». Ce constat, tel qu’il a été relevé à juste titre par le délégué du gouvernement, se trouve corroboré par le fait que l’AO regroupe sous le terme général de « Rechtsmittel » tant la réclamation (« Anfechtung ») que les recours hiérarchiques formels (« Beschwerde »), de sorte que la référence au terme « recours » vise tant les recours introduit devant le tribunal administratif que les recours à introduire devant l’administration des Contributions directes.
En l’espèce, la créance du Trésor public relative à l’impôt sur le revenu concernant l’année 2010, est née en 2010, de sorte que le délai de prescription de cinq ans a pris cours le 1er janvier 2011.
Le délai a été suspendu par l’introduction d’une première réclamation auprès du directeur en date du 1er juillet 2015 à l’encontre du bulletin du 3 juin 2015. Dans la mesure où le jugement du 25 avril 2017 a annulé dans le cadre du recours en réformation ledit bulletin en renvoyant l’affaire devant le directeur en prosécution de cause, ledit jugement ne saurait être considéré comme ayant le caractère définitif au sens de l’article 3, alinéa 1er de la loi du 22 décembre 19518 et le délai de prescription n’a plus repris dans la suite du jugement précité.
5 Jean Olinger, Le droit fiscal, études fiscales, septembre 1994, numéros 93/ 94/ 95, p.99, n° 125.
6 trib. adm. 16 mars 1999, n° 10942 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Impôts, n° 638 et les autres références y citées.
7 Projet de loi n° 4855/5, Avis du Conseil d’Etat, p.17.
8 Cour adm. 31 janvier 2017, n° 38343C du rôle, Pas adm. 2018, V° Impôts, n° 644.
10 Eu égard aux éléments qui précèdent, la prescription quinquennale n’était pas acquise au moment de l’émission du bulletin litigieux en date du 28 juin 2017. Par conséquent le moyen afférent des demandeurs est à rejeter pour ne pas être fondé.
Quant au fond, les consorts … concluent d’abord à une violation de l’article 157ter de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après désignée par « LIR », et contestent le bien-fondé du classement de la demanderesse dans la classe d’impôt 1. Ils soutiennent à ce titre que par courrier du 20 juin 2017, ils auraient expressément invoqué cette disposition législative prévoyant l’application aux non-
résidents, concernant leurs revenus imposables indigènes, de l’imposition qui leur serait applicable s’ils étaient des résidents du Luxembourg et y étaient imposables en raison de leurs revenus tant indigènes qu’étrangers, à la condition qu’ils y soient imposables du chef d’au moins 90% du total de leurs revenus indigènes et étrangers. Ils estiment que cette condition serait remplie et bien au-delà de 90% par la demanderesse en ce qui concerne l’année d’imposition 2010.
Ils font ensuite valoir que l’immeuble sis à … qu’ils auraient vendu par acte notarié du 14 décembre 2010, constituerait un tout inséparable comprenant les dépendances normales de la résidence principale, au sens de l’article 102 bis (5) LIR et du règlement grand-ducal du 4 juin 1992 portant exécution de l’article 102bis, alinéa 5 LIR, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 4 juin 1992 ». Les parcelles qualifiées par l’administration des Contributions directes de terrains agricoles constitueraient le jardin-
parc d’agrément contigu à la maison de maître et seraient d’une dimension qui serait en proportion avec l’importance de la maison. Ces parcelles n’auraient pas été séparées de la maison depuis plus d’un siècle et n’auraient jamais servi à d’autres fins. Quant aux parcelles situées en face de la maison de l’autre côté de la …, les demandeurs soutiennent qu’elles auraient servi de potager, de fruitier et de parterres fleuris à l’usage de la maison.
Les parcelles inscrites au cadastre sous les numéros … et … auraient été acquises par adjudication publique le 5 décembre 2005 au prix de …euros, seraient contiguës au potager et serviraient au même usage. Ils font valoir que l’ensemble de ces parcelles serait loin de dépasser 15 fois la surface des bâtiments au sens de l’article 1er du règlement grand-ducal du 4 juin 1992.
S’agissant de la partie de la propriété ayant appartenu aux consorts … qualifiée par l’administration des Contributions directes de « Garages + maison de Weekend », les demandeurs font valoir qu’il s’agirait depuis plus de 100 ans de dépendances normales de la maison. Un garage ferait toujours partie de l’habitation ou serait à considérer comme dépendance normale. La « maison de Weekend » serait une ancienne grange contiguë et n’aurait jamais été séparée de la maison. L’installation aurait été rudimentaire et n’aurait plus été utilisée comme séjour depuis des décennies.
L’acquéreur de l’immeuble continuerait à utiliser l’ensemble de la maison, de ses dépendances et des jardins de la même manière que les consorts …. Il ressortirait par ailleurs de l’acte notarié que le caractère d’habitation de l’immeuble aurait été invoqué en vue de bénéficier du crédit d’impôt prévu par la loi du 30 juillet 2002 déterminant 11différentes mesures fiscales destinées à encourager la mise sur le marché et l’acquisition de terrains à bâtir et d’immeubles d’habitation qui exclurait expressément, pendant la durée prévue par la loi, toute location même partielle de l’immeuble, la cession et l’interruption de l’occupation.
En ordre subsidiaire, pour autant que le tribunal considérerait les biens comme n’étant pas des dépendances normales de la maison d’habitation, les demandeurs soutiennent que l’évaluation faite par le bureau d’imposition serait « hors de toute proportion », dans la mesure où les dépendances auraient été évaluées à plus de la moitié de la maison principale, alors que leur valeur équivaudrait tout au plus à un dixième de celle-ci au vu de leur vétusté et de leur aménagement rudimentaire. Les demandeurs sollicitent dans ce contexte une visite des lieux, respectivement une expertise.
Le délégué du gouvernement fait d’abord valoir que l’article 157ter LIR ne s’appliquerait pas aux cas où une imposition porterait sur une partie de l’année seulement et où la faculté contributive, définie par rapport à l’année toute entière en vertu de l’article 1er LIR9 et de l’article 100 de la Constitution10, ne pourrait être déterminée. Il précise à cet égard qu’entre le 16 juillet et le 31 décembre 2010, la demanderesse n’aurait touché d’autres revenus que des revenus de location et des revenus nets divers imposables suivant l’article 156, n° 7 et 8, lettre a LIR au Luxembourg ainsi qu’un salaire payé en Suisse, non imposable. Etant donné que la demanderesse n’aurait pas eu de revenus professionnels au Luxembourg, les dispositions de l’article 157bis LIR ne lui seraient pas applicables, de sorte que, suivant l’article 157, alinéa 5 LIR elle serait à ranger dans la classe d’impôt 1.
La partie gouvernementale rappelle que les demandeurs auraient vendu en date du 14 décembre 2010 un ensemble d’immeubles englobant 8 parcelles cadastrales d’une superficie totale de 75,88 ares, dont la majeure partie aurait été cédée par acte de donation du 2 décembre 1993 à Madame …, qui aurait elle-même acquit … ares de jardins par adjudication publique en date du 5 décembre 2005. Après avoir rappelé les articles 99, 2., 99ter, 100, 101 et 102bis LIR ainsi que le règlement grand-ducal du 4 juin 1992, le délégué du gouvernement expose qu’il y aurait lieu de considérer comme dépendances normales de la résidence principale les parties du terrain qui formeraient l’assiette du bâtiment et les éléments non bâtis situés auprès du bâtiment et nécessaires à celui-ci, ainsi que les dépendances situées auprès du bâtiment qui seraient nécessaires à l’habitation.
Ainsi, ne constitueraient pas des dépendances normales de la résidence principale les parties du terrain qui dépasseraient quinze fois la surface de l’assiette du bâtiment hors dépendances normales, les superficies qui constitueraient d’après les normes prévues par le règlement de bâtisse de la commune de situation un terrain à bâtir et les parties du terrain et des bâtiments qui ne seraient pas considérées comme dépendances normales suivant l’article 2 du règlement grand-ducal susvisé ou celles ne dépassant pas une superficie de 10 ares. Il explique que le bureau d’imposition aurait considéré comme 9 Article 1er LIR : « Il est perçu annuellement au profit de l’Etat un impôt sur le revenu des personnes physiques. L’année d’imposition cadre avec l’année civile ».
10 Article 100 de la Constitution : « Les impôts au profit de l’Etat sont votés annuellement. Les lois qui les établissent n’ont de force que pour un an, si elles ne sont renouvelées ».
12formant la résidence principale de la demanderesse la parcelle sur laquelle se dresserait l’immeuble d’habitation principale et l’ancienne maisonnette de service, d’une contenance de …ares. « Malgré le fait que la superficie de ce terrain dépasse[rait] les …ares qui nécessite[raient] que soit déterminé si une partie du terrain ne dépasse pas une surface de quinze fois l’assise du bâtiment, et malgré la maisonnette qui se trouve sur le même terrain, il [y aurait lieu de] conclure, compte tenu de la taille du bâtiment, que cette parcelle est intégralement à considérer comme dépendance normale de la résidence principale ».
La parcelle n° … d’une contenance de … ares et contenant la grange serait classée « bâtiment à habitation », de sorte à représenter un immeuble à part pouvant être cédé séparément de l’immeuble principal et pouvant être réaménagé en logement à part entière.
La superficie de ce terrain ne serait pas inférieure à la majorité des terrains se trouvant dans ce village et le bâtiment qui s’y trouverait ne serait pas nécessaire à l’immeuble voisin qui serait aménagé de façon à réunir toutes les commodités d’habitation dans ses propres murs.
S’agissant des jardins et parcs se trouvant derrière les trois bâtiments, le délégué du gouvernement fait valoir que suivant les plans cadastraux, aussi bien l’habitation proprement dite que les bâtiments attenants seraient entourés de jardins suffisamment étendus sur leurs parcelles respectives, limitées seulement par le cours de la …, de sorte que les prés situés au-delà du ruisseau, à savoir les parcelles n° … et …, d’une superficie de …, respectivement de … ares ne sauraient être considérés comme parties nécessaires des jardins entourant les bâtiments, dans la mesure où ils ne feraient pas partie de ces parcelles et pourraient servir à tous usages de pâture ou de labour indépendants de l’habitation. Il en serait de même des jardins se composant de 4 parcelles dont la plus étendue serait de … ares se trouvant en face des bâtiments, de l’autre côté de la chaussée. Dans la mesure où une des parcelles serait classée « place » elle pourrait servir de terrain à bâtir.
La partie gouvernementale expose que suivant les plans cadastraux de la propriété, même les assises des trois bâtiments réunis, à savoir … ares, ne feraient pas le quinzième de la surface totale des terrains cédés, à savoir … ares. L’assise du bâtiment principal et la maisonnette attenante ne représenterait que 3,15% de la surface totale des terrains, de sorte que la partie des terrains dépassant une surface de … ares ne saurait donc être considérée comme dépendance normale de la résidence principale. Elle en conclut que seule la parcelle n° … serait à considérer comme résidence principale.
S’agissant de l’argument des demandeurs ayant trait au fait que le nouveau propriétaire des immeubles litigieux aurait pu bénéficier d’un crédit d’impôt sur les droits d’enregistrement, le délégué du gouvernement conclut qu’un tel avantage n’entraînerait pas que l’ensemble de la propriété devrait être considéré comme « résidence principale », notion spécifique à la matière des plus-values de cession, d’autant plus que l’acte notarié de vente ne préciserait pas de façon explicite sur quelles parties de la propriété porterait l’abattement en cause. L’abattement serait par ailleurs limité à un montant maximal de …euros.
13Dans la mesure où la vente du hangar et des prés composant le parc et les jardins resterait imposable et où l’acte notarié de vente aurait arrêté un prix de cession unique de ….- euros, le bureau d’imposition aurait été dans l’obligation de répartir ce prix de vente entre les différentes parcelles par voie d’une taxation selon le paragraphe 217 AO.
Quant aux montants retenus pour les différentes parcelles par le bureau d’imposition, le délégué du gouvernement soutient que le montant de ….- euros, soit ….-
euros par are pour les jardins et les prés, serait parfaitement adapté pour des terrains agricoles à …. Toutefois, la parcelle de jardin classée « place » aurait pu être taxée à une valeur supérieure. S’agissant du hangar, ce serait encore à juste titre que le bureau d’imposition l’aurait taxé à ….- euros, dans la mesure où les clichés présentés par les demandeurs ne représenteraient pas un bâtiment délabré, tel qu’ils l’aimeraient faire croire, d’autant plus que la stabilité de ladite construction ne serait pas contestée et que des bâtiments semblables seraient couramment rachetés dans le même village à des prix élevés et transformés en immeubles à appartements. Il expose qu’étant donné que les jardins en face des bâtiments représenteraient des terrains constructibles de fait, alors que tout ce côté de la route serait bordé de maisons et que l’une des parcelles de jardin serait déjà aménagée en place constructible, il pourrait être admis que « même si le hangar serait quelque peu surévalué, une sous-évaluation correspondante des jardins compenserait cela ». Il serait « bien sûr difficile d’évaluer correctement tous ces terrains, néanmoins, le bâtiment d’habitation, splendide maison de maître et certainement l’une des plus belles du village, ne [pourrait] être évalué[e] à plus de …euros », dans la mesure où à …, village situé dans le canton de …, sans liaison directe avec la Ville de Luxembourg, les prix de l’immobilier n’auraient pas permis en 2010 de proposer à la vente un bâtiment à … d’euros. Il conteste l’évaluation forfaitaire des demandeurs consistant dans neuf dixièmes pour la maison principale et un dixième pour tout le reste, évaluation qui ne permettrait pas d’invalider la taxation du bureau d’imposition « réfléchie et motivée en comparaison d’une évaluation estimant à … euros le prix de … ares de terrain, dont … constructibles et … potentiellement constructibles et à … euros une maison d’habitation sur un terrain de …ares ». Il souligne par ailleurs que les demandeurs ne remettent pas en cause les prix d’acquisition.
Le délégué du gouvernement conteste finalement la demande d’expertise formée par les demandeurs « pour ne pas être pertinente ».
Dans leur mémoire en réplique, les demandeurs précisent que la parcelle n° …, d’une superficie de …ares, comprendrait la grande maison de maître avec le jardin situé à côté et en arrière jusqu’au ruisseau …. Ce que le délégué du gouvernement qualifierait de « maisonnette destinée à l’époque à servir de logement de service » serait une petite construction contiguë à la maison qui aurait contenu à l’époque un four à pain et un âtre et servirait actuellement de cave supplémentaire et de dépôt. Afin de faciliter l’accès à l’un des enfants atteint d’un handicap, les demandeurs y auraient fait installer un ascenseur. La parcelle n° … d’une superficie de …ares se situerait en contigu à la maison de maître et aurait contenu antérieurement des étables et serait actuellement aménagé en garage pour deux voitures. Après l’aménagement de cet immeuble dans les années 1960, il aurait servi à titre de « lieu de séjour rustique » pour les enfants durant le weekend. Les demandeurs 14estiment que le fait que ce garage se situerait latéralement à l’immeuble, au lieu d’être situé à l’arrière ou d’être souterrain, ne changerait rien au caractère normal de cette dépendance. La grange n’aurait jamais été utilisée à des fins autres que ceux du propriétaire. Les numéros cadastraux … et … qualifiés de prés et contenant …., respectivement … ares constitueraient un parc attenant les parcelles précitées relié à celles-ci par un pont pédestre sur le ruisseau …. La parcelle n° … d’une contenance de ….
ares serait située en face de la maison de maître de l’autre côté de la … et aurait depuis toujours figuré dans la propriété de la famille des demandeurs. Les parcelles n° … et …, d’une contenance totale de … ares, se trouveraient également de l’autre côté de la … et seraient contiguës à la parcelle n° …. Les demandeurs soutiennent encore que le propriétaire actuel des parcelles continuerait à user de l’ensemble des parcelles.
Les demandeurs critiquent ensuite le règlement grand-ducal du 4 juin 1992 en ce qu’il fixerait une limite arithmétique en imposant un chiffre en termes absolus à la surface de terrains qui sont, par leur nature, des dépendances normales, alors qu’une telle limite arbitraire ne tiendrait pas compte « de la nature des travaux ni même de leur situation géographique ». Ils estiment qu’un terrain situé dans la campagne justifierait une limite plus large qu’un terrain situé dans une ville.
A titre subsidiaire, au cas où le tribunal aboutirait à la conclusion que la limitation prévue par l’article 1er sub 1 du règlement grand-ducal du 4 juin 1992 serait admissible, les demandeurs font valoir qu’il faudrait d’abord déterminer l’étendue des surfaces bâties.
Dans la mesure où le délégué du gouvernement conclurait à une « assise » de … ares sans pour autant indiquer « la provenance de ce calcul », l’application du coefficient de 15 aboutirait à un terrain admissible comme dépendance de … ares. Or, selon les demandeurs, le total de la superficie des terrains litigieux équivaudrait à … ares. Ils insistent encore sur le fait que l’ensemble des terrains aurait toujours constitué un tout et que ni les demandeurs ni le nouveau propriétaire n’auraient songé à faire une séparation.
Le fait de transformer la partie au-delà du ruisseau de … en « prés ou labours », tel que le suggérerait le délégué du gouvernement, enlèverait à la propriété « son réel intérêt et sa valeur ».
En ordre plus subsidiaire, les demandeurs critiquent l’évaluation de la « grange » à …euros. Ils rappellent qu’ils estiment que le garage constituerait une dépendance nécessaire de la maison, de sorte que cette parcelle ne pourrait faire partie d’une « place à bâtir » qui serait susceptible d’être vendue séparément, tel qu’affirmé par le délégué du gouvernement. Ils soutiennent qu’il serait inconcevable qu’un terrain de 3 ares soit évalué à près de …euros en comparaison avec l’évaluation à près de …euros de la « magnifique maison de maître avec son terrain près de dix fois supérieur » et soulignent le fait que le délégué du gouvernement aurait lui-même reconnu dans son mémoire en réponse que « la grange » pourrait être « quelque peu surévaluée » tout en précisant que « la sous-
évaluation correspondant aux jardins compenserait cela ». Quant à la parcelle …, les demandeurs soutiennent qu’il serait à tort que le délégué du gouvernement conclurait que cette parcelle, d’une contenance d’un are, pourrait servir de terrain à bâtir. Ils précisent que cette parcelle aurait été acquise en 2005 au prix de …euros, prix qui comprendrait encore deux autres parcelles, à savoir les parcelles n° … et … qualifiées de jardin, d’une 15contenance de …., respectivement … ares. Le prix de …euros pour ces trois parcelles d’un total de … ares donnerait une indication de la valeur qu’aurait l’autre parcelle située au de-
là de la …, d’une contenance de … ares, soit d’une superficie de cinq fois les terrains acquis en 2005 pour …euros, à savoir …euros.
Quant au moyen des demandeurs relatif à l’imposition des revenus de Madame … selon la classe d’impôt 1, il échet de rappeler qu’aux termes de l’article 156 LIR « Sont considérés comme revenus indigènes des contribuables non résidents : (…) 4.les revenus d’une occupation salariée au sens de l’article 95 :
a) lorsque l’occupation est ou a été exercée au Grand-Duché ; (…) 7.les revenus de la location de biens au sens de l’article 98, lorsque les immeubles sont situés au Grand-Duché ;
8. les revenus divers au sens des articles 99bis à 101 :
a) lorsque, en ce qui concerne les revenus visés aux articles 99bis et 99ter, les immeubles aliénés sont situés au Grand-Duché, (…) ».
L’article 157, alinéa 1er LIR dispose que : « Les contribuables non résidents ne sont autorisés à défalquer leurs dépenses d’exploitation ou leurs frais d’obtention que pour autant que ces dépenses ou frais sont en rapport économique direct avec des revenus indigènes. ». L’alinéa 5 du même article prévoit que « Les contribuables non résidents qui ne rentrent pas dans les prévisions de l’article 157bis, sont rangés, en vue de l’imposition de leurs revenus non soumis à la retenue à la source, dans la classe 1 sans que le taux de l’impôt puisse être inférieur à 15 pour cent. Nonobstant les dispositions de l’article 131, le taux appliqué aux revenus énumérés à l’article 132, alinéas 1er et 2 autres que les revenus soumis à la retenue à la source, ne peut pas être inférieur à 15 pour cent et le taux de l’impôt correspondant aux revenus visés au 3e alinéa de l’article 132 ne peut pas être inférieur à 7,5 pour cent. » L’article 157bis LIR précise que : « 1. Par revenus professionnels au sens des alinéas qui suivent, il y a lieu d’entendre les revenus visés à l’article 10, numéros 1 à 5, à l’exclusion :
1. des revenus désignés à l’article 10, numéro 4, réalisés par un enfant mineur faisant partie du ménage du contribuable ;
2. des pensions et rentes visées à l’article 96, alinéa 1er, numéros 3 et 4.
2.Les contribuables non résidents mariés, ne vivant pas en fait séparés, réalisant des revenus professionnels imposables au Grand-Duché, sont rangés dans la classe d’impôt 1a.
3.Par dérogation aux dispositions de l’alinéa 2 les contribuables non résidents, mariés et ne vivant pas en fait séparés, sont imposés dans la classe d’impôt 2, s’ils sont imposables au Grand-Duché du chef de plus de 50 pour cent des revenus professionnels de leur ménage. Si les deux époux réalisent des revenus professionnels imposables au Grand-Duché, l’octroi de la classe 2 entraîne leur imposition collective (…) ».
16Aux termes de l’article 157ter LIR : « 1. Par dérogation aux dispositions correspondantes des articles 157 et 157bis, les contribuables non résidents imposables au Grand-Duché du chef d’au moins 90 pour cent du total de leurs revenus tant indigènes qu’étrangers sont, sur demande, imposés au Grand-Duché, en ce qui concerne leurs revenus y imposables, au taux d’impôt qui leur serait applicable s’ils étaient des résidents du Grand-Duché et y étaient imposables en raison de leurs revenus tant indigènes qu’étrangers. Pour l’application de la disposition qui précède, les contribuables mariés ne vivant pas en fait séparés sont imposables collectivement au titre des revenus indigènes.
Dans ce contexte, les revenus étrangers des deux époux sont pris en compte en vue de la fixation du taux d’impôt applicable.
2. Aux fins du calcul du seuil prévu à l’alinéa 1er, entrent en ligne de compte les revenus professionnels définis à l’article 157bis, alinéa 1er, réalisés au cours de l’année civile. En ce qui concerne les contribuables non résidents mariés, ne vivant pas en fait séparés, l’alinéa 1er du présent article peut, sur demande, s’appliquer lorsque l’un des époux satisfait à la condition du seuil d’au moins 90 pour cent du total de ses revenus tant indigènes qu’étrangers.
3. La demande visée à l’alinéa 1er entraîne une imposition par voie d’assiette.
4. Aux fins de l’application du présent article, les contribuables non résidents sont tenus de justifier leurs revenus annuels étrangers par des documents probants (…) ».
Il résulte des dispositions qui précèdent qu’en règle générale, les contribuables non résidents qui réalisent un revenu imposable non soumis à la retenue à la source au Grand-
Duché de Luxembourg, sont rangés dans la classe d’impôt 1 et le taux d’impôt ne peut être inférieur à 15%. Toutefois, les contribuables non résidents mariés, ne vivant pas en fait séparés, dont l’un des deux époux réalise un revenu professionnel au Grand-Duché de Luxembourg sont rangés dans la classe d’impôt 1a. Les contribuables non résidents mariés, ne vivant pas en fait séparés, sont rangés dans la classe d’impôt 2 si plus de 50% des revenus professionnels de leur ménage provient du Grand-Duché de Luxembourg et ils y sont imposés. 11 Cependant, sur demande, les contribuables non résidents qui réalisent au moins 90% de leur revenu mondial au Luxembourg sont imposés, en ce qui concerne leurs revenus y imposables, au taux d’impôt qui leur serait applicable s’ils étaient résidents du Grand-Duché. Cette demande entraîne l’imposition par voie d’assiette des contribuables concernés. Les contribuables mariés ne vivant pas en fait séparés sont imposables collectivement au titre des revenus indigènes.
Le tribunal précise que la formulation de l’article 157ter, alinéa 1er, première phrase et alinéa 2, deuxième phrase LIR est le résultat d’une modification législative introduite par la loi du 26 juillet 2010 modifiant les articles 157, 157bis et 157ter de la loi 11 Doc. Parl. 6130, sess. Ord. 2009-2010, Avis de la Chambre des Salariés, pages 1 et 2.
17modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu12, ci-après désignée par « la loi du 26 juillet 2010 ». En effet, cette loi, applicable, selon son article 2, à partir de l’année d’imposition 2010, a remplacé la formulation ancienne des alinéas 1er et 2 de l’article 157ter LIR qui se limitait expressément aux revenus professionnels indigènes et étrangers, par l’expression actuelle, à savoir celle, plus générale, de « revenus tant indigènes qu’étrangers ».
Il s’ensuit que si, avant la réforme de 2010, l’article 157ter alinéa 1er LIR visait exclusivement les revenus professionnels, ladite disposition ne connaît actuellement plus cette restriction, de sorte à englober tous les revenus imposables quelle que soit leur nature.
Cette interprétation ressort d’ailleurs sans équivoque des travaux parlementaires relatifs à la loi précitée de 2010, et plus particulièrement du commentaire des articles, dans lequel il est précisé que « La modification prévue à l’article 157ter LIR permettra à tous les contribuables non résidents qui réalisent au moins 90 pour cent de leur revenu mondial au Luxembourg d’être imposés sur les revenus indigènes imposables au Grand-
Duché au taux qui leur serait applicable s’ils étaient des résidents du Grand-Duché.
Dorénavant, il n’est plus requis que la quasi-totalité des revenus professionnels soit réalisée au Grand-Duché mais que la quasi-totalité de l’ensemble des revenus soit réalisée au Luxembourg. »13.
D’après l’exposé des motifs de cette même loi, cette modification a été rendue nécessaire, alors qu’« En date du 14 avril 2009, la Commission européenne a émis à l’encontre du Luxembourg une mise en demeure en application de l’article 226 TCE. La Commission a fait savoir qu’elle estime que le Grand-Duché de Luxembourg manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 56 du Traité CE, (…) en refusant d’accorder le bénéfice de la tranche de base non imposable aux contribuables non résidents réalisant au Luxembourg la quasi-totalité de leurs revenus mondiaux, lorsque la quasi-totalité des revenus mondiaux se compose de revenus indigènes non professionnels. »14.
Force est au tribunal de constater que l’alinéa 1er précité de l’article 157ter LIR désigne le total des revenus tant indigènes qu’étrangers, sans en spécifier la nature exacte et que la première phrase du 2e alinéa de ce même article ne mentionne, par renvoi à l’article 157bis, alinéa 1er LIR précité, que les revenus professionnels au sens de l’article 10 points 1 à 5 LIR réalisés au cours de l’année civile. Or, eu égard à l’intention du législateur, telle qu’elle se dégage des susdits travaux parlementaires, la formulation « entrent en ligne de compte les revenus professionnels » est simplement de nature à préciser que les revenus professionnels, tels qu’ils sont définis à l’article 157bis LIR, sont à considérer dans le calcul du revenu mondial des contribuables, sans pour autant exclure 12 Article 1er, 3° de la loi du 26 juillet 2010: « A l’article 157ter, alinéa 1er première phrase et alinéa 2, deuxième phrase l’expression “revenus professionnels indigènes et étrangers” est remplacée par celle de “revenus tant indigènes qu’étrangers. ».
13 Doc. Parl. 6130, sess. ord 2009-2010, commentaire des articles, ad article 1er, 3°.
14 Doc. Parl. 6130, sess. ord 2009-2010, exposé des motifs.
18les autres revenus, tels que des revenus locatifs ou des plus-values réalisés à la suite de ventes immobilières. Au cas où, tel qu’en l’espèce les contribuables se sont en cours d’année d’imposition installés dans un autre pays, il appartient à l’administration des Contributions directes d’appliquer ce même principe à la partie de l’année pendant laquelle les contribuables étaient des non-résidents. Ce principe découle en effet de l’article 6, alinéa 3 LIR, selon lequel « Lorsqu’une personne a été contribuable résident pendant une partie et contribuable non résident pendant une autre partie de l’année d’imposition, l’impôt frappe distinctement le revenu imposable réalisé par cette personne pendant chacune de ces périodes ».
En l’espèce, afin de vérifier si Madame … satisfait à la condition du seuil d’au moins 90 pour cent du total de ses revenus tant indigènes qu’étrangers, l’administration des Contributions directes aurait dû additionner le total de ses revenus mondiaux réalisés entre le 16 juillet 2010 et le 31 décembre 2010, à savoir les revenus provenant de la location de biens, les revenus provenant de la réalisation de la plus-value à la suite de la vente immobilière réalisée par acte notarié du 14 décembre 2010, ainsi que les revenus perçus en Suisse, tels qu’ils ressortent de son certificat de salaire figurant au dossier fiscal, et vérifier ensuite si le seuil de 90% est atteint par rapport à ce total.
Par conséquent, il échet de conclure que le bureau d’imposition a violé l’article 157ter LIR, de sorte que le bulletin litigieux encourt l’annulation dans le cadre du recours en réformation sans qu’il n’y ait lieu de statuer sur les autres moyens soulevés par les demandeurs, étant rappelé que dans la mesure où il était dans l’intention du législateur de ne pas faire du tribunal un « taxateur » et de ne pas l’amener à « s’immiscer dans le domaine de l’administration » sous peine de « compromettre son statut judiciaire »15, son rôle consiste à dégager les règles de droit et à opérer les qualifications nécessaires à l’application utile de la législation fiscale, sans pour autant porter sur l’intégralité de l’imposition, ni aboutir à fixer nécessairement une nouvelle cote d’impôt16.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
reçoit en la forme le recours en réformation;
au fond, le déclare justifié, partant, dans le cadre du recours en réformation, annule le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2010, émis le 3 juin 2015 à l’encontre des consorts … et renvoie l’affaire en prosécution de cause au directeur de l’administration des Contributions directes.
15 doc. Parl. 39402, p. 11, ad (3) 8. et doc. parl. 3940A4, avis complémentaire du Conseil d’Etat, p. 7, ad amendement 5.
16 trib. adm. 29 mars 1999, n° 10428, confirmé par Cour adm. 11 janvier 2000, n° 11285C, Pas. adm. 2018, V° Impôts, n° 1040 et les autres références y citées.
19 condamne l’Etat aux frais.
Ainsi jugé par :
Françoise Eberhard, vice-président, Daniel Weber, juge, Michèle Stoffel, juge, et lu à l’audience publique du 23 mai 2019 par le vice-président, en présence du greffier assumé Lejila Adrovic.
s.Lejila Adrovic s.Françoise Eberhard Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 23 mai 2019 Le greffier du tribunal administratif 20