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16/08/2018 | LUXEMBOURG | N°41561

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 août 2018, 41561


Tribunal administratif N° 41561 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 août 2018 chambre de vacation Audience publique de vacation du 16 août 2018 Recours formé par Monsieur …, alias …, alias …, Findel contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 120. L.29.08.2008)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 41561 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 août 2018 par Maître Nour E. Hellal, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxe

mbourg, au nom de Monsieur …, alias …, alias …, déclarant être né le … à … (Tunisie) et ê...

Tribunal administratif N° 41561 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 août 2018 chambre de vacation Audience publique de vacation du 16 août 2018 Recours formé par Monsieur …, alias …, alias …, Findel contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 120. L.29.08.2008)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 41561 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 août 2018 par Maître Nour E. Hellal, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, alias …, alias …, déclarant être né le … à … (Tunisie) et être de nationalité tunisienne, actuellement retenu au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de l'Immigration et de l’Asile du 2 août 2018 prorogeant son placement au Centre de rétention pour la durée d’un mois à partir de la notification de la décision en question ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 10 août 2018 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Nour E. Hellal et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul Reiter en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 16 août 2018.

Le 15 janvier 2013, Monsieur …, alias …, alias …, déposa une demande de protection internationale auprès du ministère des Affaires étrangères, direction de l’Immigration.

Par décision du 4 juin 2013, notifiée à l’intéressé en mains propres le 10 juin 2013, le ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration considéra la demande de protection internationale comme implicitement rejetée en application de l’article 11 de la loi du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, entretemps abrogée par la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, désignée ci-après par « la loi du 18 décembre 2015 », au motif que Monsieur … (i) ne s’était plus présenté auprès du service des réfugiés afin de fournir les éléments à l’appui de sa demande de protection internationale et (ii) qu’il n’a pas prolongé la pièce attestant l’enregistrement de sa demande de protection internationale pendant une durée de deux mois au moins.

Suivant un procès-verbal dressé par la police grand-ducale, circonscription régionale Luxembourg, référencé sous le numéro 52584/2013 du 23 juillet 2013, Monsieur … fut interpellé à cette date au quartier de la gare à Luxembourg-ville pour vol d'un portable. Par arrêté du même jour, le ministre prit à l’égard de Monsieur … une décision de retour comportant ordre de quitter le territoire sans délai et une interdiction d'entrée sur le territoire pour une durée de trois années. Par arrêté séparé du même jour, il fit l'objet d'une mesure de placement en rétention pour la durée d'un mois qui fut prorogée par arrêté du 16 août 2013 notifié le 23 août 2013 pour une durée d’un mois.

Par courrier du 24 juillet 2013, les autorités luxembourgeoises contactèrent les autorités consulaires tunisiennes à … en vue de l'identification de Monsieur …. Par courrier du 4 septembre 2013, lesdites autorités tunisiennes informèrent le ministre que Monsieur … était « inconnu auprès des services tunisiens compétents ». Monsieur … fut libéré du centre de rétention en date du 2 octobre 2013.

Un test linguistique daté au 6 novembre 2013, arriva à la conclusion que Monsieur … était « mit einiger Wahrscheinlichkeit » originaire de Tunisie.

Le 10 décembre 2013, le greffe du centre pénitentiaire de Luxembourg informa le ministre des Affaires étrangères que Monsieur … était placé en détention préventive pour homicide volontaire.

Par jugement du Tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg, neuvième chambre, siégeant en matière criminelle, inscrit sous le numéro LCRI 36/2014 du rôle, du 30 octobre 2014, Monsieur … fut condamné à 3 années d'emprisonnement du chef de coups et blessures volontaires. Par un second jugement du tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg, neuvième chambre, siégeant en matière correctionnelle, inscrit sous le numéro 2864/2014 du rôle du 30 octobre 2014, Monsieur … fut encore condamné à 4 années d'emprisonnement du chef de coups et blessures volontaires.

Moniseur … fut libéré du Centre pénitentiaire de Luxembourg pour avoir subi sa peine le 17 novembre 2017.

Il ressort d’un rapport de la police grand-ducale du 6 juin 2018 que Monsieur … fut soumis au quartier de la gare à Luxembourg-ville à un contrôle d'identité. Il s'avéra lors de ce contrôle qu’il faisait l'objet d'un signalement au système d’information Schengen, désigné ci-

après par « le SIS », par les autorités belges, et qu’il était connu sous diverses identités comme étant ressortissant marocain.

Par arrêté du 6 juin 2018, le ministre déclara irrégulier le séjour de Monsieur … sur le territoire luxembourgeois, lui ordonna de quitter le territoire sans délai à destination du pays dont il a la nationalité, ou à destination du pays qui lui aura délivré un document de voyage en cours de validité, ou à destination d’un autre pays dans lequel il est autorisé à séjourner et prononça à son encontre une interdiction d’entrée sur le territoire luxembourgeois pour une durée de cinq ans.

Par un second arrêté du même jour, notifié à l’intéressé le même jour, le ministre ordonna le placement de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée d’un mois. Cette décision est libellée comme suit :

« (…) Vu les articles 111, 120 à 123 et 125, paragraphe (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration ;

Vu la loi du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu le procès-verbal n° 51992/2018 du 6 juin 2018 établi par la police grand-ducale ;

Vu ma décision de retour du 6 juin 2018, assortie d’une interdiction d’entrée sur le territoire de cinq ans ;

Attendu que l’intéressé est dépourvu de tout document d’identité et de voyage valable ;

Attendu que l’identité de l’intéressé n’est pas établie ;

Attendu qu’il existe un risque de fuite dans le chef de l'intéressé, alors qu’il ne dispose pas d’une adresse au Grand-Duché de Luxembourg ;

Attendu par conséquent que les mesures moins coercitives telles qu’elles sont prévues par l’article 125, paragraphe (1), points a), b) et c) de la loi modifiée du 29 août 2008 précitée ne sauraient être efficacement appliquées ;

Considérant que les démarches nécessaires en vue de l’éloignement de l’intéressé seront engagées dans les plus brefs délais ;

Considérant que l’exécution de la mesure d’éloignement est subordonnée au résultat de ces démarches ; (…) ».

Par un arrêté du 3 juillet 2018, notifié en date du 6 juillet 2018, le ministre prorogea la mesure de placement de Monsieur … pour une durée d’un mois à partir de la notification de la décision.

Par un jugement du 4 juillet 2018, inscrit sous le numéro 41338 du rôle, le tribunal administratif déclara non justifié le recours introduit par Monsieur … à l’encontre de l’arrêté ministériel précité du 6 juin 2018 ayant ordonné son placement en rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de ladite décision.

Par un arrêté du 2 août 2018, notifié le 6 août 2018, le ministre prorogea une deuxième fois la mesure de placement de Monsieur … pour une durée d’un mois à partir de la notification, ledit arrêté étant fondé sur les motifs et considérations suivants :

« (…) Vu les articles 111 et 120 à 123 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu mes arrêtés des 6 juin et 3 juillet 2018, notifiés le 6 juin respectivement le 6 juillet 2018, décidant de soumettre l'intéressé à une mesure de placement ;

Attendu que les motifs à la base de la mesure de placement du 6 juin 2018 subsistent dans le chef de l'intéressé ;

Considérant que toutes les diligences en vue de l'identification de l'intéressé afin de permettre son éloignement ont été entreprises auprès des autorités compétentes ;

Considérant que ces démarches n’ont pas encore abouti ;

Considérant qu'il y a lieu de maintenir la mesure de placement afin de garantir l'exécution de la mesure de l'éloignement ; (…) ».

Etant donné que l’article 123, paragraphe (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après désignée par la « loi du 29 août 2008 », institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative, le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

Le recours en réformation ayant, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai prévus par la loi, est recevable.

A l’appui de son recours et en fait, le demandeur souligne avoir déjà été placé au centre de rétention en 2014 pour une période maximale de rétention sans que cela n’aurait abouti à une identification de la part du pays susceptible de l’accueillir. Il insiste sur le fait, qu’à ce stade, aucun pays ne l’aurait identifié, de sorte que la mesure de rétention décidée à son encontre ne laisserait envisager aucune perspective de renvoi, ce d’autant plus qu’une demande d’identification aurait été formulée aux autorités consulaires marocaines, bien qu’un test linguistique préciserait qu’il serait d’origine tunisienne.

En droit, le demandeur reproche en premier lieu à la décision déférée d’être motivée de manière stéréotypée, dans la mesure où elle ne laisserait pas « transparaître la réelle situation du requérant, ou du moins la genèse et l’historique de son cas ».

En second lieu, le demandeur reproche à la décision d’être « contraire à la légalité », alors qu’une décision ordonnant le placement en rétention d’un étranger ne pourrait être prononcée qu’à condition qu’il existe dans le chef de l’étranger un risque de fuite ou s’il évite ou empêche la préparation de son retour ou la procédure de son éloignement, et que la mesure puisse concrètement aboutir, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.

En effet, il précise qu’il aurait été appréhendé sur les mêmes lieux que la fois où il aurait fait l’objet de sa première mise en rétention.

En ce qui concerne ensuite l’affirmation du ministre selon laquelle « des démarches nécessaires en vue de l'éloignement du requérant ont été engagées dans les plus brefs délais », le demandeur donne à considérer qu'une mesure de rétention serait indissociable de l'attente de l'exécution de l'éloignement d'un étranger non autorisé à séjourner légalement sur le territoire luxembourgeois. Il incomberait ainsi à l'autorité administrative d'engager des démarches, de faire état, et de documenter les démarches qu'elle estimerait requises, et qu'elle serait en train d'exécuter afin d'écourter justement au maximum sa privation de liberté. Si la rétention administrative serait certes une privation de liberté spécifique prévue par le législateur pour les étrangers « en instance d'éloignement du territoire », il s'agirait néanmoins d'un placement à vocation précise « dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire » d'un étranger qui ferait l'objet d'une mesure d'éloignement forcé et qui ne pourrait quitter immédiatement le territoire luxembourgeois « pour le temps strictement nécessaire à son départ ».

Le demandeur fait ainsi valoir que son dossier n’avancerait pas et qu’il semblerait « certain que se profile une rétention maximale sans perspective finale comme pour la fois précédente », tout en précisant que si l’administration n’arrivait pas à éloigner un étranger dans la période prévue par la loi, il devrait être remis en liberté. En effet, le délai maximal prévu par le législateur pour procéder à l'éloignement d'une personne en situation irrégulière serait à considérer comme un délai limite.

En conclusion, le demandeur estime que les conditions requises par l'article 120, paragraphes (1) et (3) de la loi du 29 août 2008 ne seraient plus réunies, en ajoutant que « Ce délai ne [pourrait] être constitutif, à terme d'une peine privative de liberté (…) » et qu’ « Aucunes démarches efficaces n'ayant été entreprises par les autorités pour permettre un éloignement ou un transfert rapide du requérant, il y [aurait] lieu d'en conclure que la nécessité requise pour ordonner le placement [ferait] défaut (…) », de sorte qu’il faudrait ordonner sa libération immédiate.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

Force est de constater que le demandeur réitère dans le cadre du présent recours l’intégralité de ses moyens opposés à la décision de prorogation du 3 juillet 2018, rejetés par jugement du tribunal administratif du 4 juillet 2018, numéro 41338 du rôle, et à l’encontre duquel le demandeur n’a pas interjeté appel. Par conséquent, le tribunal, dans le cadre du présent recours, fait somme la motivation du jugement du 4 juillet 2018, précité.

Par conséquent, en ce qui concerne le moyen de légalité externe tenant à un défaut de motivation de la décision déférée, force est de rappeler qu’il n’existe aucun texte légal ou réglementaire exigeant l’indication des motifs se trouvant à la base d’une mesure de placement en rétention, sans demande expresse de l’intéressé, de sorte que le ministre n’avait pas à motiver spécialement la décision déférée. Partant, le moyen fondé sur un défaut d’indication des motifs doit en tout état de cause être rejeté pour ne pas être fondé.

En ce qui concerne ensuite la légalité interne de la décision déférée en ce que celle-ci aurait violé l’article 120, paragraphes (1) et (3) de la loi du 29 août 2008, il échet d’abord de rappeler qu’aux termes de l’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 : « Afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement en application des articles 111, 116 à 118 (…) l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une structure fermée, à moins que d’autres mesures moins coercitives telles que prévues à l’article 125, paragraphe (1), ne puissent être efficacement appliquées. Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. (…) ».

Par ailleurs, en vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la même loi : « La durée de la rétention est fixée à un mois. La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Elle peut être reconduite par le ministre à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois si les conditions énoncées au paragraphe (1) qui précède sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien. Si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de rétention peut être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire.

».

L’article 120, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008 permet ainsi au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite notamment la mise à disposition de documents de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères notamment en vue de l’obtention d’un accord de reprise en charge de l’intéressé. Elle nécessite encore l’organisation matérielle du retour, en ce sens qu’un moyen de transport doit être choisi et que, le cas échéant, une escorte doit être organisée. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour une durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.

En vertu de l’article 120, paragraphe (3), de la même loi, le maintien de la rétention est cependant conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et soit exécuté avec toute la diligence requise, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter l’éloignement dans les meilleurs délais.

Une mesure de placement peut être reconduite à trois reprises, chaque fois pour une durée d’un mois, si les conditions énoncées au paragraphe (1) de l’article 120, précité, sont réunies et s’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.

Une décision de prorogation d’un placement en rétention est partant en principe soumise à la réunion de quatre conditions, à savoir que les conditions ayant justifié la décision de rétention initiale soient encore données, que le dispositif d’éloignement soit toujours en cours, que celui-ci soit toujours poursuivi avec la diligence requise et qu’il y ait des chances raisonnables de croire que l’éloignement en question puisse être « mené à bien ».

A cet égard, il échet de rappeler qu’une mesure de rétention s’analyse en une mesure administrative privative de la liberté de mouvement de la personne concernée et qu’elle doit être limitée à la durée strictement nécessaire afin de permettre l’exécution d’une mesure d’éloignement. A cette fin, le ministre est dans l’obligation de faire entreprendre avec la diligence requise toutes les démarches nécessaires afin d’organiser cette mesure d’éloignement.

Tel que retenu par le tribunal administratif dans son jugement du 4 juillet 2018, il n’est pas contesté, en l’espèce, que le demandeur ne dispose ni d’un passeport ou d’un document de voyage valable, ni d’un visa, ni d’une autorisation de séjour ou de travail en cours de validité, de sorte qu’il se trouve en séjour irrégulier au Luxembourg. De ce fait, il a fait l’objet d’une décision de retour et d’interdiction du territoire le 6 juin 2018, décision qui ne fait pas l’objet du présent recours. En vertu de l’article 111, paragraphe (3), point c) de la loi du 29 août 2008, aux termes duquel le risque de fuite est présumé plus particulièrement si l’étranger ne remplit pas ou plus les conditions de l’article 34 de la même loi, respectivement s’il ne peut pas justifier de la possession de documents d’identité ou de voyage et s’il se trouve donc en séjour irrégulier sur le territoire luxembourgeois, le risque de fuite est présumé dans le chef du demandeur, sans qu’il ne dégage du dossier soumis au tribunal des éléments permettant de renverser la présomption du risque de fuite dans son chef, de sorte que le ministre a valablement pu le placer au centre de rétention.

S’agissant des contestations actuelles du demandeur quant aux diligences entreprises par le ministre afin d’organiser son retour, force est au tribunal de constater que par jugement précité du 4 juillet 2018, inscrit sous le numéro 41338 du rôle, ayant autorité de chose jugée, le tribunal administratif a retenu que les diligences employées par les autorités luxembourgeoises jusqu’alors étaient suffisantes, de sorte que l’analyse du tribunal se limite aux diligences employées par les autorités administratives postérieurement à cette date.

Le tribunal relève, à cet égard, qu’il ressort du dossier administratif, qu’après avoir été relancé par les services du ministre en date du 13 juillet 2018, le consulat général du Royaume du Maroc à Liège a informé la direction de l’Immigration par un courrier du 18 juillet 2018 que la demande d’identification du demandeur n’avait pas encore reçu de réponse des autorités marocaines compétentes.

Par des courriers des 27 juillet et 9 août 2018, les autorités consulaires marocaines ont encore été relancées en vue de connaître l’état d’avancement de la procédure d’identification du demandeur.

Au regard de ces éléments, le tribunal est amené à retenir, qu’en l’espèce, le dispositif d’éloignement est actuellement toujours en cours et est toujours poursuivi avec la diligence requise conformément aux exigences posées par l’article 120, paragraphe (3) de la loi du 29 août 2008, ce d’autant plus que les autorités luxembourgeoises sont tributaires de la collaboration et de l’efficacité des autorités marocaines, étant à cet égard relevé qu’elles ne sauraient nuire aux relations diplomatiques par un nombre exagéré de rappels adressés aux autorités étrangères compétentes. Les contestations du demandeur quant aux diligences entreprises sont partant rejetées.

De même, le tribunal ne décèle, en l’état actuel du dossier, aucune raison permettant de penser que l’éloignement n’aura aucune perspective d’aboutir, de sorte que l’affirmation du demandeur suivant laquelle il semblerait « certain que se profile une rétention maximale sans perspective finale comme pour la fois précédente » est à rejeter. En effet, tel que cela a été relevé ci-avant, il ressort du dossier administratif et plus précisément du courrier précité du 18 juillet 2018 du consulat général du Royaume du Maroc que la demande d’identification concernant le demandeur est actuellement en cours de traitement, de sorte qu’il ne saurait d’ores et déjà être conclu qu’il n’existe pas de chances raisonnables de croire que son éloignement puisse être mené à bien. Ce constat n’est pas ébranlé par le fait que le test linguistique du 6 novembre 2013 est arrivé à la conclusion que Monsieur … est « mit einiger Wahrscheinlichkeit » originaire de Tunisie au vu, d’une part, du courrier du 4 septembre 2013 par lequel les autorités tunisiennes ont informé le ministre que le demandeur était inconnu auprès des services tunisiens compétents et, d’autre part, des différentes identités utilisées dans le passé par le demandeur ayant affirmé être tant ressortissant tunisien que marocain, tel que cela ressort du dossier administratif.

Il s’ensuit que le moyen afférent est également à rejeter.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’en l’état actuel du dossier et compte tenu des moyens figurant dans la requête introductive d’instance, le tribunal ne saurait utilement mettre en cause ni la légalité ni le bien-fondé de la décision déférée. Il s’ensuit que le recours sous analyse est à rejeter comme non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours principal en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique de vacation du 16 août 2018 par :

Marc Sünnen, président, Michèle Stoffel, juge, Alexandra Bochet, attaché de justice, en présence du greffier Lejila Adrovic.

s.Lejila Adrovic s.Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 16 août 2018 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 41561
Date de la décision : 16/08/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2018-08-16;41561 ?

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