Tribunal administratif N° 39934 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 juillet 2017 1re chambre Audience publique extraordinaire du 13 juillet 2018 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du bourgmestre de la commune de Grosbous, en matière de permis de construire en présence de Monsieur …, …
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 39934 du rôle et déposée le 26 juillet 2017 au greffe du tribunal administratif par Maître Daniel Baulisch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation sinon subsidiairement à l’annulation d’une décision n° B-
2016-51 du bourgmestre de la commune de Grosbous du 27 février 2017 autorisant Monsieur … à construire un « car-port » sur un terrain sis à L-…;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Georges Weber, demeurant à Diekirch, du 28 juillet 2017 portant signification de ce recours à 1) l’administration communale de Grosbous, établie en sa maison communale à L-9154 Grosbous, 1, rue de Bastogne, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions et 2) Monsieur …, indépendant, demeurant à L-…;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif en date du 11 octobre 2017 par Maître Jean-Luc Gonner, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de la commune de Grosbous, préqualifiée ;
Vu l’ordonnance du président du tribunal administratif du 5 octobre 2017 portant le n° 39935 du rôle ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 20 novembre 2017 par Maître Jean-Luc Gonner, au nom de la commune de Grosbous, préqualifiée ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 27 décembre 2017 par Maître Daniel Baulisch, au nom …, préqualifié ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 12 janvier 2018 par Maître Jean-Luc Gonner, au nom de la commune de Grosbous, préqualifiée ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Daniel Baulisch et Maître 1Marc Becker, en remplacement de Maître Jean-Luc Gonner, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 30 mai 2018.
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Il résulte des explications non contestées de Monsieur … qu’il est propriétaire d’un terrain sis à L-….
Par une décision portant le numéro B-2016-51 du 27 février 2017, le bourgmestre de la commune de Grosbous, ci-après désigné par « le bourgmestre », accorda à Monsieur …, demeurant à L-…, l’autorisation pour la construction d’un car-port sur un terrain sis à L-…, inscrit au cadastre de la commune de Grosbous sous le numéro …, section A de Grosbous, terrain adjacent à celui de Monsieur ….
Par une requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 26 juillet 2017 et inscrite sous le numéro 39934 du rôle, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation sinon subsidiairement à l’annulation de la décision n° B-
2016-51 du bourgmestre de la commune de Grosbous du 27 février 2017, précitée.
Par une requête séparée du même jour, inscrite sous le numéro 39935 du rôle, Monsieur … a encore fait introduire un recours tendant à voir ordonner qu’il soit sursis à l’exécution de la décision du bourgmestre du 27 février 2017, ce recours ayant été rejeté par une ordonnance du 5 octobre 2017 du président du tribunal administratif.
Si la requête introductive d’instance a été signifiée régulièrement à Monsieur …, préqualifié, en date du 28 juillet 2017, le tribunal constate qu’aucun mémoire en réponse n’a été déposé au greffe du tribunal administratif de sa part. Or, en vertu de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, désignée ci-après par « la loi du 21 juin 1999 », le tribunal est amené à statuer à l’égard de toutes les parties même si la partie défenderesse ou un tiers intéressé ne comparaît pas dans le délai prévu à l’article 5 de cette même loi.
Etant donné que la loi ne prévoit aucun recours de pleine juridiction en matière de permis de construire, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre la décision déférée.
Il est, par contre, compétent pour connaître du recours subsidiaire en annulation.
Quant à l’admissibilité du mémoire en réplique A titre liminaire, il échet au tribunal d’examiner la question de l’admissibilité du mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 27 décembre 2017 dans la mesure où la communication du mémoire en réponse, déposé au greffe du tribunal administratif le 20 novembre 2017, est intervenue le 16 novembre 2017, cette question d’ordre public ayant été soulevée d’office par le tribunal à l’audience des plaidoiries.
A l’audience des plaidoiries, les parties se sont rapportées à prudence de justice quant à l’admissibilité du mémoire en réplique.
Aux termes de l’article 5, paragraphe (5), de la loi du 21 juin 1999 : « (5) Le demandeur peut fournir une réplique dans le mois de la communication de la réponse ; la partie défenderesse et le tiers intéressé sont admis à leur tour à dupliquer dans le mois. ».
2 Le point de départ du délai pour le dépôt du mémoire en réplique étant la communication de la réponse à la partie défenderesse, c’est à partir de la réception du mémoire en réponse par cette dernière que court le délai de fourniture de la réplique1.
En l’espèce, force est de constater qu’il résulte de l’accusé de réception du mémoire en réponse signé par le litismandataire du demandeur ainsi que des indications figurant dans son mémoire en réplique que le mémoire en réponse lui a été communiqué en date du 16 novembre 2017, ce constat n’ayant, par ailleurs, pas été contesté par les parties à l’audience des plaidoiries.
Or, dans la mesure où le mémoire en réplique, communiqué le 15 décembre 2017 au litismandataire de la commune, n’a été déposé au greffe du tribunal administratif qu’en date du 27 décembre 2017, il est à écarter des débats pour être tardif, le tribunal rappelant, à cet égard, qu’au vœu de l’article 5 de la loi du 21 juin 1999, précité, la fourniture du mémoire en réplique dans le délai d’un mois de la communication du mémoire en réponse inclut – implicitement, mais nécessairement – l’obligation de le déposer au greffe du tribunal et de le communiquer à la partie, voire aux parties défenderesses dans ledit délai d’un mois2.
Au vu du fait qu’une duplique de la partie défenderesse ne constitue qu’une réponse à la réplique3, le mémoire en duplique est également à écarter des débats, l’analyse du tribunal se limitant, par conséquent, aux seuls moyens invoqués et arguments développés dans le cadre de la requête introductive d’instance et du mémoire en réponse.
Quant à la recevabilité du recours La commune de Grosbous invoque l’irrecevabilité ratione temporis du recours sous analyse pour avoir été introduit en dehors du délai contentieux prévu par la loi.
Elle donne à considérer qu’il résulterait clairement des attestations testimoniales versées par elle que Monsieur …, …, après avoir affiché en date du 27 février 2017 le certificat afférent à l’autorisation de bâtir à l’adresse … à …, aurait, sur instructions du technicien de la commune, Monsieur …, ensemble avec son collègue de travail, Monsieur …, affiché ledit certificat à l’endroit prévu pour la construction, à savoir au …à …et ce avant la fin du mois de mars 2017.
Elle avance qu’au vu du fait que Monsieur … serait non seulement le voisin direct du terrain devant accueillir le car-port litigieux, mais également propriétaire de tous les autres terrains et immeubles entourant cette parcelle, il serait irrelevant de savoir si le certificat avait été affiché dès le début au bon endroit.
A cet égard, elle insiste sur le fait que si Monsieur … avait parfaitement pu se rendre compte de l’affichage afférent à l’autorisation de bâtir litigieuse dès le 27 février 2017, le 1 Cour adm., 18 mai 2006, n° 21112C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 783 et les autres références y citées.
2 Trib.adm., 23 février 2005, n° 18555 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 767 et les autres références y citées.
3 Trib. adm. 12 juin 2002, n° 13063 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 794 et les autres références y citées.
3certificat en question aurait en tout état de cause été affiché au bon endroit dès la fin du mois de mars 2017, de sorte que le délai de 3 mois pour introduire un recours contentieux serait nécessairement écoulé.
Aux termes de l’article 13, paragraphe (1), de la loi du 21 juin 1999 : « (1) Sauf dans les cas où les lois ou les règlements fixent un délai plus long ou plus court et sans préjudice des dispositions de la loi du 22 décembre 1986 relative au relevé de la déchéance résultant de l’expiration d’un délai imparti pour agir en justice, le recours au tribunal n’est plus recevable après trois mois du jour où la décision a été notifiée au requérant ou du jour où le requérant a pu en prendre connaissance. ».
Aux termes de l’article 37, alinéas 6 et 7, de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet 2004 », pris en sa version applicable au moment de la délivrance de l’autorisation litigieuse : « Un certificat délivré par le bourgmestre attestant que la construction projetée a fait l’objet de son autorisation est affiché aux abords du chantier par le maître de l’ouvrage. Ce certificat mentionne notamment qu’à la maison communale le public peut prendre inspection des plans afférents pendant le délai de recours devant les juridictions administratives.
Le délai de recours devant les juridictions administratives court à compter de la date de délivrance du certificat signé par le bourgmestre. Le bourgmestre est tenu de faire afficher le certificat le jour même de sa délivrance. ».
Cette disposition, encore qu’elle fasse conformément à une lecture littérale courir le délai à partir de la date de délivrance du certificat, doit toutefois être comprise comme faisant néanmoins courir le délai de recours à partir la date d’affichage du certificat - sensé être réalisé le même jour que celui de sa délivrance - alors que la seule délivrance d’un tel certificat, à défaut de toute publicité effective, est insuffisante pour faire courir le délai de recours.
Il convient encore de relever que l'article 13, paragraphe (1), de la loi du 21 juin 1999 et l'article 37, alinéas 6 et 7, de la loi du 19 juillet 2004, précités, sont à lire conjointement4.
Ainsi, l'article 13, paragraphe (1), de la loi du 21 juin 1999 prévoit deux hypothèses alternatives dans lesquelles un recours peut être déclaré irrecevable faute d'avoir été introduit dans les délais, à savoir celle où le demandeur dépose son recours plus de trois mois après s'être vu formellement notifier la décision litigieuse, et celle où il introduit un recours plus de trois mois après avoir pu prendre connaissance de l'acte faisant grief. Ces deux hypothèses ne sont pas énervées par l'article 37 de la loi du 19 juillet 2004 qui dispose que le délai de recours contre l'autorisation court à compter de la date de délivrance du certificat signé par le bourgmestre, sans qu'il n'exclut la deuxième hypothèse consacrée par l'article 13, paragraphe (1), de la loi du 21 juin 1999 selon laquelle le délai peut courir à compter de la prise de connaissance de la décision litigieuse. En effet, si le législateur, partant du constat, d'une part, qu'une notification individuelle aux personnes intéressées par une autorisation de construire n'est pas toujours possible pour des raisons pratiques, liées notamment à l'impossibilité d'identifier toutes les personnes susceptibles d'être intéressées, et d'autre part, que l'affichage in extenso des autorisations de construire avec les plans afférents est impraticable, a estimé nécessaire d'imposer la formalité d'une notification générale telle que retenue à l'article 37 de 4 Trib. adm. 31 janvier 2008, n° 22929 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Urbanisme, n° 755 et les autres références y citées.
4la loi du 19 juillet 2004, à savoir l'affichage d'un certificat aux abords du chantier, et ceci afin de faire courir le délai du recours contentieux, cette formalité, qui a été prévue pour des raisons de sécurité juridique, ne s'impose cependant pas dans l'hypothèse où les intéressés ont eu une connaissance effective de l'autorisation de construire, la preuve de pareille connaissance appartenant cependant à la partie qui l'invoque5.
Au vu de ce qui précède, le tribunal est amené à retenir que le point de départ du délai de recours contentieux est la date d’affichage effective du certificat prévu à l’article 37, alinéa 6, de la loi du 19 juillet 2004 sur les abords du chantier, de sorte qu’il échet au tribunal de vérifier, en l’espèce, à quel moment ledit certificat a été effectivement affiché, étant précisé, à cet égard, que seul l’affichage aux abords même du chantier peut constituer une publication valable de nature à attirer l’attention des personnes intéressées sur l’imminence de la réalisation d’un projet immobilier en cet endroit précis.
A cet égard, il y a tout d’abord lieu de préciser que si l’autorisation de construire désigne le terrain sis au numéro 20, route d’Arlon comme étant celui destiné à recevoir la construction litigieuse, il se dégage des explications non contestées du demandeur que le chantier en question se situe en réalité au numéro 16 de la même rue, de sorte que c’est à cet endroit que doit être affiché ledit certificat afin de faire courir le délais de recours.
Il ressort des pièces versées en cause que le bourgmestre a, conformément à l’article 37 de la loi du 19 juillet 2004, délivré en date du 27 février 2017 le certificat afférent à l’autorisation de bâtir n° B-2016-51 du 27 février 2017 autorisant Monsieur … à construire un « car-port » sur un terrain sis à ….
Il ressort des attestations testimoniales établies respectivement le 4 août 2017 par Monsieur … et Monsieur …, ouvriers communaux, et le 3 octobre 2017 par Monsieur …, technicien communal, que Monsieur …, après avoir affiché en date du 27 février 2017 le certificat litigieux au …sis à … à …, aurait, sur instructions du technicien communal, Monsieur …, ensemble avec son collègue de travail, Monsieur …, affiché ledit certificat « 2 oder 3 Wochen später, auf jeden Fall bis spätestens vor Ende März 2017 » à l’endroit prévu pour le chantier, à savoir le terrain qui se trouve entre les numéros … et … à …, où, selon les affirmations de Monsieur …, il se serait toujours trouvé au moment de la rédaction de l’attestation testimoniale.
Il ressort, toutefois, des attestations testimoniales établies les 18 et 19 septembre 2017 par Madame … et Madame …, demeurant toutes les deux à …, que le certificat litigieux aurait été affiché sur le terrain inscrit sous le numéro cadastral … seulement quelques jours avant le 3 mai 2017, date à laquelle celles-ci déclarent avoir signé un compromis de vente pour la maison sise au …, les dames … et … insistant sur le fait que le « point rouge » ne s’y serait pas trouvé une semaine avant.
Force est au tribunal de constater que ni les attestations testimoniales des sieurs …, …et … versées en cause par la commune, ni celles des dames … et …produites par le demandeur, n’énoncent de façon claire, précise et non équivoque la date à laquelle le certificat litigieux a été effectivement affiché sur les lieux du chantier, à savoir au …à ….
5 Trib.adm., 15 mai 2006, n° 20625 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Urbanisme, n° 753 et les autres références y citées.
5Au regard des témoignages contradictoires en ce qui concerne la date d’affichage effective du certificat sur les abords du chantier, le tribunal retient que la commune, sur laquelle repose la charge de la preuve, n’établit pas que le certificat a été affiché à l’endroit prévu pour le chantier avant le 25 mars 2017 afin d’appuyer sa thèse suivant laquelle le recours sous analyse devrait être déclaré irrecevable ratione temporis.
Au vu de ce qui précède, et à défaut d’autres éléments permettant au tribunal de déterminer la date d’affichage exacte du certificat voire la date de la prise de connaissance du demandeur de la décision litigieuse, le moyen d’irrecevabilité ratione temporis invoqué par la commune est à rejeter pour ne pas être fondé.
Le recours subsidiaire en annulation ayant, par ailleurs, été introduit dans les formes de la loi, il est recevable.
Quant au fond A l’appui de son recours et en fait, le demandeur précise qu’il serait le voisin direct du terrain devant accueillir la construction litigieuse qui, outre le fait d’être destiné à abriter au moins 12 voitures, accuserait, par ailleurs, un gabarit important en limite de sa propriété.
En droit, il invoque de prime abord une violation de l’article 5 du règlement grand-
ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », en ce qu’il n’aurait été informé ni par le voisin ni par la commune du projet de construction litigieux, le demandeur mettant plus particulièrement en exergue ne pas avoir été en mesure de faire valoir ses droits et moyens devant la commune avant la délivrance de l’autorisation de construire.
Il invoque, ensuite, une violation de l’article 15 du plan d’aménagement particulier « quartiers existants » (PAP QE) de la commune de Grosbous, en ce que Monsieur …, bénéficiaire du permis de construire déféré, n’aurait aucunement l’intention de construire une maison d’habitation sur le terrain concerné, c’est-à-dire annexer un abri de garage à une construction principale, mais y établirait, au contraire, un car-port à destination de « show-
room open space » non loin de son garage (« Autowerkstatt »), de sorte à ne pas remplir les conditions réglementaires prévues pour les emplacements.
Il renvoie, à cet égard, à l’esquisse reproduite à l’article 15 du PAP QE, qui, sous son point d), établirait clairement qu’un car-port devrait être accolé contre une construction existante, plus précisément à une maison d’habitation, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.
Le demandeur donne, par ailleurs, à considérer qu’au vu de son implantation en limite de propriété, le car-port projeté dépasserait la hauteur maximale de 2 mètres prévue par le point 1, paragraphe 2, de l’article 15 du PAP QE.
Il invoque, dans ce contexte, une violation des articles 671 et 673 du Code civil relatifs à la plantation d’arbres, d’arbrisseaux et d’arbustes entre deux terrains contigus. Il considère, en effet, que, par analogie à l’article 671 du Code civil stipulant qu’un arbre supérieur à deux mètres devrait être implanté à une distance d’au moins deux mètres de la ligne séparative de deux héritages, il serait de même interdit d’ériger un car-port d’une hauteur de trois mètres en limite de deux propriétés. Il se réfère, à cet égard, à l’article 95 de la Constitution pour 6soutenir que les juridictions administratives seraient amenées à examiner l’article 15 du PAP QE au regard de sa conformité et de sa légalité en général et par rapport à sa conformité au Code Civil en particulier.
Il invoque, enfin, une violation des articles 67 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, 50 du décret du 14 décembre 1789 relatif la constitution des municipalités et 3 du titre XI du décret des 16-24 août 1790 sur l’organisation judiciaire, en ce que le bourgmestre, gardien de l’ensemble des dispositions légales et réglementaires de police applicables dont, notamment, celles ayant trait à la sécurité et à la commodité des passages dans les rues, quais, places et voies publics, aurait été obligé de refuser l’autorisation de construire litigieuse alors qu’elle aurait des effets négatifs sur la sécurité et la commodité de passage dans la rue d’Arlon au vu, notamment, de l’accès très étroit de la propriété de Monsieur … vers la rue principale.
Il met en avant que la circulation serait d’ores et déjà compliquée et dangereuse dans la rue … suite à un flux de circulation important tout au long de la journée. Le demandeur conteste, par ailleurs, l’existence d’une permission de voirie dans le chef de Monsieur … telle que requise par la loi, tout en insistant sur le fait que, bien que relevant de la compétence du ministre du Développement durable et des Infrastructures, celle-ci aurait néanmoins une incidence sur l’organisation des accès et, partant, sur l’autorisation de construire délivrée par le bourgmestre.
Dans son mémoire en réponse et quant à la prétendue violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, la commune fait valoir qu’il serait de jurisprudence établie qu’en matière d’urbanisme, le législateur aurait explicitement exclu l’obligation de procéder antérieurement à une information de toutes les personnes intéressées au motif qu’une notification individuelle à celles-ci n’était pas possible pour des raisons pratiques liées notamment à l’impossibilité d’identifier ex ante toutes les personnes susceptibles d’être intéressées, de sorte à ne retenir a priori, que l’obligation d’une information ex post, par la voie de l’affichage.
En ce qui concerne la violation alléguée de l’article 15 du PAP QE, la commune donne à considérer que si un car-port était « toute construction ouverte sur au moins deux côtés, réalisée en principe en matériel léger et servant à abriter un ou plusieurs véhicules en stationnement », la construction litigieuse concernerait un local d’exposition de véhicules mis en vente par la société à responsabilité limitée …, respectivement un local de parcage pour véhicules en attente d’une réparation, de sorte que l’article 15 précité ne trouverait pas application.
Elle avance que la construction litigieuse serait, en revanche, autorisable en vertu de l’article 8 d) de la partie écrite de son plan d’aménagement général (PAG), autorisant sous certaines conditions, l’implantation de places de stationnement sur un terrain situé dans un rayon de 300 mètres de l’immeuble desservi, c’est-à-dire sans être accolée directement à une construction principale et sans exiger la préexistence d’une construction principale, respectivement en vertu de l’article 9 du PAP QE prévoyant que des emplacements de stationnement pourraient être aménagés, soit sous forme de garages ou de car-ports, soit sous forme de parking à ciel ouvert, tout en insistant sur le fait que ces deux articles ne seraient pourtant pas visés par le demandeur dans son recours.
7En ce qui concerne la hauteur de la construction par rapport à son implantation, la commune met en exergue que le car-port n’accueillerait qu’une hauteur de 2 mètres et que seule la toiture se trouverait à une hauteur de 3 mètres. Elle ajoute que comme la construction litigieuse serait la seule construction à ériger sur la parcelle inscrite au cadastre sous le numéro …, l’argumentation du demandeur basée sur le fait que la construction devrait respecter un recul latéral de 2 mètres au vu de sa hauteur ne trouverait pas application en l’espèce, le car-port ne pouvant, en effet, à défaut de construction principale, se situer dans le recul latéral de celle-ci.
Quant à la prétendue violation des articles 671 et 673 du Code civil, elle donne à considérer que si certaines servitudes pourraient relever de la compétence du bourgmestre, telles les servitudes d’utilité publique, les servitudes d’intérêt privé ne relèveraient, en revanche, pas des compétences de police du bourgmestre, la commune soulevant, plus particulièrement, que les servitudes prévues par les articles 671 et 673 du Code civil n’auraient pas pour objet des règles de police voire un objet d’utilité publique ou communale relevant de l’urbanisme, mais concerneraient exclusivement l’utilité des particuliers.
Elle cite, à cet égard, un jugement du tribunal administratif6 selon lequel les règles protectrices du droit de propriété ne relèveraient pas du champ de compétence du bourgmestre, ni, par voie de conséquence, du contrôle du juge administratif, mais du juge judicaire qui disposerait d’instruments très efficaces pour sanctionner la violation du droit de propriété ou de servitudes relevant du droit civil.
Quant à la prétendue violation des articles 67 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, 50 du décret du 14 décembre 1789 relatif la constitution des municipalités et 3 du titre XI du décret des 16-24 août 1790 sur l’organisation judiciaire, la commune fait valoir que l’exercice par le bourgmestre de son pouvoir général de police ne saurait tenir directement en échec les dispositions urbanistiques applicables, de sorte qu’il ne pourrait se prévaloir d’un problème général de sécurité ou de tranquillité pour refuser un projet de construction conforme aux règles urbanistiques en vigueur.
Elle avance, dans ce contexte, que s’il incombe au bourgmestre, dans la cadre de sa mission d’exécution des lois de police, de faire jouir les habitants de la commune des avantages d’une bonne police, notamment de la propreté, de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité publiques, il devrait, lors de la délivrance d’une autorisation de construire, uniquement vérifier la conformité de la demande d’autorisation par rapport au plan d’aménagement et au règlement sur les bâtisses de la commune.
Enfin, quant au prétendu problème d’accès, la commune fait valoir qu’il s’agirait d’un faux problème soulevé par le demandeur, tout en soulignant que Monsieur … devrait solliciter une permission de voirie auprès du ministre compétent.
En ce qui concerne le premier moyen invoqué par le demandeur basé sur une violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, aux termes duquel : « lorsqu´une décision administrative est susceptible d´affecter les droits et intérêts de tierces personnes, l´autorité administrative doit lui donner une publicité adéquate mettant les tiers en mesure de faire valoir leurs moyens. Dans la mesure du possible, l´autorité administrative doit rendre 6 Trib. adm., 4 mai 2009, n° 23190 du rôle ; Trib. adm. 21 octobre 2012, n° 27540 du rôle, disponibles sous www.jurad.etat.lu.
8publique l´ouverture de la procédure aboutissant à une telle décision. Les personnes intéressées doivent avoir la possibilité de faire connaître leurs observations. La décision définitive doit être portée par tous moyens appropriés à la connaissance des personnes qui ont présenté des observations », il échet de constater que cette disposition n’impose pas une obligation générale et stricte aux autorités administratives, mais elle leur impose seulement d’informer les tiers intéressés « dans la mesure du possible ». Or, il résulte, à cet égard, des travaux parlementaires ayant abouti à la loi du 19 juillet 2004 qu’en cette matière, le législateur a explicitement exclu l'obligation de procéder antérieurement à une information de toutes les personnes intéressées, au motif qu'une notification individuelle des personnes intéressées n'est pas possible pour des raisons pratiques, liées notamment à l'impossibilité d'identifier ex ante toutes les personnes susceptibles d'être intéressées, de sorte à ne retenir a priori en matière d'urbanisme que l'obligation d'une information ex post par la voie de l'affichage7, de sorte que l’article 5, précité, ne peut être appliqué en l’espèce.
Ce principe n’est battu en brèche que lorsque des personnes effectivement intéressées ont manifesté préalablement et valablement leur intérêt à être informées d’un projet de construction, respectivement l’hypothèse dans laquelle l’administration ne pouvait pas raisonnablement ignorer l’intérêt de ces tiers à être informés du sort réservé à un projet.
Or, en l’espèce, il ne se dégage pas des éléments soumis au tribunal que le demandeur ait manifesté préalablement son intérêt à être informé du projet de construction litigieux, de sorte que le moyen ayant trait à une obligation d’information préalable est à rejeter.
Quant à la légalité interne de la décision litigieuse, il échet de relever de prime abord qu’aux termes de l’article 37, alinéas 1er et 2 de la loi du 19 juillet 2004 pris en sa version applicable au moment de la délivrance de l’autorisation litigieuse : « Sur l’ensemble du territoire communal, toute réalisation, transformation, changement du mode d’affectation, ou démolition d’une construction, ainsi que les travaux de remblais et de déblais sont soumis à l’autorisation du bourgmestre.
L’autorisation n’est accordée que si les travaux sont conformes au plan ou au projet d’aménagement général et, le cas échéant, au plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », respectivement au plan ou projet d’aménagement particulier « quartier existant» et au règlement sur les bâtisses, les voies publiques et les sites. ».
Une autorisation de construire n’est dès lors accordée que si les travaux sont conformes soit au plan ou au projet d’aménagement général et, le cas échéant, au plan ou au projet d’aménagement particulier « nouveau quartier » respectivement « quartier existant », ainsi qu’au règlement sur les bâtisses.
La finalité de l’exigence légale de l’obtention d’une autorisation de construire consiste, en effet, à vérifier si un projet de construction est conforme aux règles d’urbanisme applicables, à savoir essentiellement les plans d’aménagement général et particulier et le règlement sur les bâtisses, et une autorisation de construire s’analyse partant en la constatation officielle par l’autorité compétente, en l’occurrence le bourgmestre, de la conformité d’un projet de construction aux dispositions d’urbanisme applicables, ce principe étant rappelé par l’article 37, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004 s’agissant des PAG ayant fait l’objet d’une refonte et par l’article 108bis, dernier alinéa de la même loi s’agissant des PAG n’ayant pas encore fait 7 Trib. adm. 7 juillet 2008, n° 23654 du rôle, confirmé par Cour adm. 29 janvier 2009, n° 24748C du rôle, Pas.
adm. 2017, V° Urbanisme, n° 636 et les autres références y citées.
9l’objet d’une refonte. Ainsi, le bourgmestre, en délivrant l’autorisation de bâtir, constate dans la forme passive d’une autorisation que la réalisation du projet est permise sur base du plan d'aménagement général et du règlement sur les bâtisses de la commune8, textes d’interprétation stricte. Le bourgmestre, appelé à statuer sur une demande de permis de construire, agit dès lors en organe d’exécution et s'il refusait un permis de construire pour une construction dont la mise en place ne serait point empêchée par la réglementation communale d'urbanisme existante, il suspendrait de ce fait l’exécution même de ladite réglementation, sinon encore rendrait de ce fait non constructible une parcelle ayant vocation à recevoir des constructions, pareille façon de procéder n'étant pas seulement prohibée par la loi, mais encore contraire à l’essence même des attributions exécutives du bourgmestre en la matière9.
Dans ce contexte, il convient encore de relever que toutes les règles quant au respect du droit de propriété de tiers et à la prise en compte de considérations d’intérêt privé, tel le respect d’une servitude de droit privé, qui ne font pas partie des règles d’urbanisme applicables sont étrangères au champ du contrôle de l’autorité compétente pour la délivrance d’une autorisation de construire10, le bourgmestre, à l’occasion de la délivrance d’une autorisation de construire, ne devant prendre en considération que les prescriptions administratives11, alors qu’il ne lui appartient pas de prendre en compte des considérations d'intérêt privé de voisins12 sans commettre un excès de pouvoir13.
Quant au moyen ayant trait à une prétendue violation de l’article 15 du PAP QE, cette disposition est libellée comme suit :
« Implantation La construction de garages ou de car-ports (en dehors du gabarit autorisé pour la construction principale de la maison d’habitation) ne sera admise que :
Dans le recul latéral (voir Fig. B), en limite de propriété, en respectant les conditions suivantes :
1. la construction devra se faire de part et d’autre des deux propriétés voisines et avec l’accord du voisin ou avec un recul latéral d’au moins 2,0 mètres de la limite de propriété pour les garages ; un car-port pourra être implanté sans recul latéral, à condition que la face donnant sur la limite de propriété ne dépassera pas la hauteur de 2,0 mètres ;
2. la distance minimale de l’abord de la voirie de l’Etat sera de 5,0 mètres au moins ;
3. la limite arrière ne dépassera pas la façade arrière de la maison d’habitation.
(…) ».
Si le demandeur estime que l’article 15 précité ne serait pas respecté au motif que le car-port ne serait pas annexé à une construction principale consistant en une maison d’habitation, mais constituerait, au contraire, un car-port à destination de « show-room open 8 Cour adm. 27 avril 2006, n° 20250C du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu.
9 Idem.
10 Cour adm., 22 mars 2011, n°27064C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Urbanisme, n°634 et les autres références y citées.
11 CE 14 décembre 1972, Bull. doc. comm. n° 13, p.79.
12 CE 14 mars 1928, Pas. 11, 481, CE 27 avril 1932, Pas. 12, p. 458.
13 Voir trib. adm. 14 avril 2005, n° 17935 du rôle ; trib. adm. 10 juin 2009, n° 25016 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.
10space », la commune invoque la non-applicabilité de la disposition précitée au motif justement que la construction litigieuse concernerait un local d’exposition de véhicules mis en vente par la société à responsabilité limitée …, respectivement un local de parcage pour véhicules en attente d’une réparation.
En combinant les termes de l’article 15 du PAP QE et l’esquisse figurant sous cette même disposition, suivant laquelle le « recul latéral » est défini par rapport à une construction principale, le garage ou le car-port étant accolé à la construction principale, le tribunal arrive à la conclusion que l’article 15 du PAP QE ne trouve application que dans l’hypothèse de la construction d’un garage ou d’un car-port par rapport à une construction principale, mais ne trouve pas application s’il s’agit de la construction d’un garage ou d’un car-port implanté seul sur un terrain. L’article 15 du PAP QE se réfère, en effet, expressément à la construction de garages ou de car-ports « en dehors du gabarit autorisé pour la construction principale de la maison d’habitation », soit l’implantation d’une construction légère destinée à accueillir les véhicules des habitants accolée à une construction principale. Il s’ensuit que la construction litigieuse, qui consiste en l’aménagement d’un show-room, voire d’un local d’exposition de véhicules mis en vente ou de parcage de véhicules en attente de réparation, tel que cela résulte des affirmations des parties en cause, ne peut être soumis à l’application de cette disposition.
Le moyen du demandeur fondé sur une violation du paragraphe 2, point 1, de l’article du 15 PAP QE est partant rejeté. En effet, dans la mesure où, tel que cela se dégage des affirmations des parties en cause, la construction projetée est la seule construction à être érigée sur la parcelle litigieuse, l’argumentation du demandeur basée sur la considération que le car-
port ne respecterait pas le recul latéral prescrit au vu de sa hauteur supérieure à 2 mètres laisse d’être fondée, la notion de « recul latéral » supposant, en effet, tel que cela a été retenu ci-
avant, l’existence d’une construction principale, dans le sens que le car-port ne peut, à défaut de construction principale existante, se situer dans le recul latéral de celle-ci.
Ainsi, à l’instar de l’argumentation de la commune, le tribunal retient que la conformité du car-port est plutôt à entrevoir par rapport à la combinaison de l’article 8 d) de la partie écrite du PAG de la commune de Grosbous aux termes duquel : « S'il s'avère impossible d'implanter ces emplacements de stationnement sur la parcelle à construire, ils peuvent être aménagés sur des terrains situés dans un rayon de 300 mètres, appartenant au même propriétaire. Ces terrains perdent dès lors leur constructibilité dans la mesure où ils sont affectés à de pareils emplacements de stationnement qui ne peuvent pas être aliénés à leur destination ni à leur affectation. Les mêmes emplacements ne peuvent être mis en compte que pour un seul immeuble. » et de l’article 9 du PAP QE qui dispose que : « Les emplacements pourront être aménagés soit sous forme de garage ou de car-port, soit sous forme de parking à ciel ouvert.
Le nombre minimal d’emplacements de stationnement et les prescriptions y liées sont définis dans l’article 7 de la partie écrite du Plan d'Aménagement Général (PAG) ».
Or, étant donné que le demandeur ne formule aucun moyen à cet égard, le tribunal n’est pas en mesure de contrôler la légalité du projet de construction sous cet angle, étant précisé, à cet égard, qu’il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence d’une partie et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de ses conclusions, en procédant ainsi indépendamment des moyens effectivement soutenus à un réexamen général et global de la situation14.
14 Trib. adm., 11 février 2015, n° 35704 du rôle, Pas. adm. 2017, n° 414.
11 En ce qui concerne le moyen fondé sur une violation des articles 671 et 673 du Code civil relatifs à la plantation d’arbres, d’arbrisseaux et d’arbustes entre deux terrains contigus, force est au tribunal de soulever qu’au-delà du fait que ces dispositions ne sauraient être appliquées par analogie à une construction, en l’espèce la construction d’un car-port, il échet de rappeler que, tel que cela a été retenu ci-avant, toutes les règles quant au respect du droit de propriété de tiers et à la prise en compte de considérations d’intérêt privé qui ne font pas partie des règles d’urbanisme applicables, parmi lesquelles figurent les dispositions du Code civil invoqués par le demandeur, sont étrangères au champ de contrôle de l’autorité compétente pour la délivrance d’une autorisation de construire15, de sorte que le bourgmestre, à l’occasion de la délivrance d’une autorisation de construire, ne doit prendre en considération que les prescriptions administratives à l’exclusion des considérations d'intérêt privé de voisins sous peine de commettre un excès de pouvoir.
S’agissant de l’exception d’illégalité de l’article 15 du PAP QE invoqué dans ce contexte par le demandeur par rapport au Code civil, le moyen afférent est rejeté comme étant en toute hypothèse inopérant dans la mesure où le tribunal vient de retenir que l’article 15 du PAP QE ne trouve pas application en l’espèce, et cela indépendamment du constat que les dispositions du Code civil invoquées en l’espèce ne forment pas la base légale de la réglementation urbanistique communale formée essentiellement par les dispositions d’un PAG ou d’un PAP, ayant pour objet de régler l’implantation rationnelle, selon certains principes directeurs, des constructions sur l’ensemble d’un territoire délimité.
En ce qui concerne, enfin, le moyen fondé sur une violation des articles 67 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, 50 du décret du 14 décembre 1789 relatif la constitution des municipalités et 3 du titre XI du décret des 16-24 août 1790 sur l’organisation judiciaire, basé en substance sur la sécurité et la commodité de passage dans la rue d’Arlon au vu, notamment, de l’accès très étroit de la propriété de Monsieur … vers la rue principale, le tribunal relève tout d’abord que s’il incombe au pouvoir communal de faire jouir les habitants des avantages d'une bonne police, notamment de la propreté, de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité dans les rues, lieux et voies publiques, ainsi que de la commodité de passage dans les rues, quais, places et voies publiques et que le bourgmestre est chargé de l'exécution des lois et règlements de police en ayant, à titre personnel, le droit et le devoir d'assurer l'exécution des lois de police et de la législation sur l'urbanisme et l'aménagement du territoire16, force est néanmoins de constater que, tel que cela a été retenu ci-avant, lors de la délivrance d'une autorisation de construire, le bourgmestre est appelé à vérifier la seule conformité d'un projet de construction avec les prescriptions du PAG et du règlement sur les bâtisses communaux.
En effet, il convient de souligner que la jurisprudence des juridictions administratives a eu l’occasion de retenir que l’exercice, par le bourgmestre, de son pouvoir général de police ne saurait tenir directement en échec les dispositions urbanistiques en ce sens qu’il pourrait se prévaloir d’un problème général de sécurité, de tranquillité ou autre, pour tenir en échec le principe même de l’implantation d’une construction conforme aux règles urbanistiques17, et que la conformité de la demande d’autorisation par rapport aux dispositions d’urbanisme 15 Cour adm., 22 mars 2011, n°27064C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Urbanisme, n°634 et les autres références y citées.
16 Trib. adm. 15 avril 1997, n° 9510 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Urbanisme, n° 652 et les autres références y citées.
17 Trib. adm. 4 novembre 2002, n° 14597 ; trib. adm. 15 décembre 2004, n° 17971, confirmé par arrêt du 9 juin 2005, n° 19200C, disponibles sous www.jurad.etat.lu.
12existantes entraîne en principe dans le chef du bourgmestre l’obligation de délivrer le permis sollicité sans prendre en considération d’autres considérations d’intérêt privé ou tenant à l’exécutabilité technique ou matérielle du projet18.
Dès lors, contrairement à ce qui est soutenu par le demandeur, si certes le bourgmestre est chargé de l’exécution des lois et règlements de police, lorsqu’il est saisi d’une demande d’autorisation de construire, il ne peut contrôler le projet que par rapport à la réglementation urbanistique en vigueur et doit accorder son autorisation du moment que le projet est conforme à cette règlementation. En revanche, il ne saurait refuser son autorisation en matière d’urbanisme sur la seule base de son pouvoir général de police découlant des décrets précités, indépendamment des dispositions afférentes contenues dans la réglementation urbanistique applicable.
Le tribunal précise, à cet égard, que le bourgmestre ne saurait de même faire dépendre la délivrance de l’autorisation de construire sollicitée de l’obtention d’une permission de voirie, laquelle ne relève pas de sa compétence, mais de celle du ministre ayant la voirie publique dans ses compétences19.
Il s’ensuit que le moyen du demandeur fondé en substance sur la sécurité et la commodité de passage dans la rue d’Arlon ainsi que sur l’accès prétendument étroit à la voie publique est rejeté.
Au vu des considérations qui précèdent et à défaut d’autres moyens invoqués par le demandeur, le recours introduit est à rejeter pour ne pas être fondé.
Le demandeur réclame encore l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.750 euros sur base de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999, demande qu’il y a lieu de rejeter au vu de l’issue du litige.
La demande en indemnité de procédure de 2.500 euros formulée par la commune de Grosbous est également à rejeter, alors que celle-ci ne démontre pas en quoi il serait inéquitable de laisser à sa seule charge les frais non compris dans les dépens.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;
reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;
au fond le déclare non justifié et partant en déboute ;
rejette les demandes en allocation d’une indemnité de procédure telles que formulées par Monsieur …, d’une part, et la commune de Grosbous, d’autre part ;
condamne le demandeur aux frais.
18 En ce sens : Cour adm. 22 mars 2011, n°064C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Urbanisme, n° 648 .
19 Trib. adm. 30 juin 2010, n° 25920 du rôle, confirmé par Cour adm. 4 janvier 2011, n° 27186C du rôle, Pas.
adm. 2017, V° Urbanisme, n° 684 et les autres références y citées.
13 Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique extraordinaire du 13 juillet 2018 par :
Annick Braun, vice-président, Alexandra Castegnaro, premier juge, Alexandra Bochet, attaché de justice, en présence du greffier Michèle Hoffmann.
s. Michèle Hoffmann s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 13/7/2018 Le Greffier du Tribunal administratif 14