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03/07/2018 | LUXEMBOURG | N°41894

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 03 juillet 2018, 41894


Tribunal administratif N° 41894 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 octobre 2018 3e chambre Audience publique du 3 juillet 2018 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du conseil communal de la commune de Lintgen et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de servitudes

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 41894 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 30 octobre 2018 par Maître Marc THEWES, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation, sinon subsi

diairement à l’annulation de la décision du conseil communal de Lintgen du 21 août 201...

Tribunal administratif N° 41894 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 octobre 2018 3e chambre Audience publique du 3 juillet 2018 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du conseil communal de la commune de Lintgen et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de servitudes

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 41894 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 30 octobre 2018 par Maître Marc THEWES, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation, sinon subsidiairement à l’annulation de la décision du conseil communal de Lintgen du 21 août 2018 portant introduction des servitudes prévues à l’article 20 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain les parcelles inscrites au cadastre de la commune de Lintgen, section B de …, sous les numéros … et …, ainsi que de la décision tutélaire d’approbation du 30 août 2018 du ministre de l’Intérieur ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Laura GEIGER, en remplacement de l’huissier de justice Carlos CALVO, demeurant à Luxembourg, du 30 octobre 2018, portant signification de la prédite requête à :

1) l’administration communale de Lintgen « représentée par son collège des Bourgmestre et Echevins », établie à la maison communale sise à L-7440 Lintgen, 2, rue de Diekirch ;

2) Monsieur …, demeurant à L- …, …, …, 3) Madame …, demeurant à L- …, …, … ;

4) Monsieur …, demeurant à L- …, …, … ;

5) Monsieur …, demeurant à L- …, …, … ;

6) Madame …, demeurant à L- …, …, … ;

7) Monsieur …, demeurant à L- …, …, … ;

8) Monsieur …, demeurant à L-…, …, … ;

9) Monsieur …, demeurant à L- …, …, … ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée le 7 novembre 2011 au greffe du tribunal administratif par Maître Georges KRIEGER au nom et pour le compte de Monsieur …, préqualifié, Madame …, préqualifiée, Monsieur …, préqualifié, Monsieur …, préqualifié, Madame Monique …, préqualifiée, Monsieur …, préqualifié, Monsieur …, préqualifié et Monsieur …, préqualifié, ci-après désignés par « les consorts … »;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée le 9 novembre 2018 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-François STEICHEN au nom et pour le compte de l’administration communale de Lintgen, préqualifiée ;

1 Vu le mémoire en réponse déposé en date du 5 décembre 2018 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Fançois STEICHEN au nom et pour le compte de l’administration communale de Lintgen ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 18 janvier 2019;

Vu le mémoire en réplique de Maître Marc THEWES, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 18 février 2019, au nom et pour le compte de Monsieur … ;

Vu le mémoire en duplique, erronément intitulé « mémoire en réponse », du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 28 février 2019 ;

Vu le mémoire en duplique déposé par Maître Jean-François STEICHEN au greffe du tribunal administratif en date du 12 mars 2019 au nom et pour le compte de l’administration communale de Lintgen ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment les décisions attaquées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Ana-Lisa Franco FERRO, en remplacement de Maître Marc THEWES, Maître Jean-François STEICHEN et Madame le délégué du gouvernement Hélène MASSARD en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 mai 2019.

___________________________________________________________________________

Dans le cadre d’un projet d’aménagement d’un poulailler « bio » pour 6.000 animaux, sur un terrain situé dans la commune de Lintgen, section B de … et …, inscrit au cadastre sous les numéros … et …, Monsieur …, obtint en date du 2 septembre 2016 une autorisation pour réaliser les infrastructures d’assainissement en rapport avec le projet en question de la part du ministre de l’Environnement, En date du 12 décembre 2016, le ministre de l’Environnement autorisa encore la construction d’une étable pour poules, d’une dalle à fumier, d’un bassin de rétention, ainsi que l’aménagement d’une cour.

En date du 28 décembre 2016, Monsieur … saisit le bourgmestre de la commune de Lintgen, ci-après désigné par « le bourgmestre », d’une demande d’autorisation de construire un bâtiment agricole (« Hühnerstall, Mistplatte ») et d’aménager une cour et un bassin de rétention.

En date du 9 mai 2017, le ministre de l’Environnement autorisa encore l’implantation d’une exploitation conformément au plan d’implantation dénommé « Vorprojekt – Neubau einer Aussiedlung » sur un fonds inscrit au cadastre de la commune de Lintgen, section B de … et …, sous le numéro ….

En sa séance du 11 mai 2017, le conseil communal de Lintgen décida de frapper, en exécution de l’article 20 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par « la loi du 19 juillet 2004 », les parcelles cadastrales précitées numéros … et …, d’une servitude, décision ayant fait l’objet 2d’un recours introduit devant le tribunal administratif, inscrit numéro 39964 du rôle, qui s’est soldé par un jugement du tribunal administratif du 21 juin 2018 ayant, dans le cadre de la réformation, annulé le volet de la décision du conseil communal de Lintgen du 11 mai 2017 ayant imposé une servitude en application de l’article 20 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 sur les parcelles … et …, ainsi que la décision du ministre du 12 juin 2017 ayant approuvé ladite décision du conseil communal.

Par une décision du 18 juillet 2017, le bourgmestre refusa de faire droit à une demande en vue de l’obtention d’une autorisation d’exploitation d’une ferme d’élevage de plus de 5.000 poules sur le site litigieux sur le fondement de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, ladite décision ayant fait l’objet d’un recours inscrit sous le numéro 40080 du rôle, qui s’est soldé par un jugement du 4 octobre 2018 ayant, dans le cadre du recours en réformation, annulé ladite décision du bourgmestre de la commune de Lintgen du 18 juillet 2017.

A défaut de réponse à la suite de la demande, précitée, en obtention d’une autorisation de construire introduite le 28 décembre 2016 auprès du bourgmestre, Monsieur … a fait introduire, par une requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 27 novembre 2017, inscrite sous le numéro 40430 du rôle, un recours tendant à l’annulation d’une décision implicite de refus, recours qui a été déclaré fondé par un jugement du tribunal administratif du 30 janvier 2019, le tribunal ayant annulé ladite décision de refus implicite du bourgmestre et lui ayant renvoyé le dossier en prosécution de cause.

Lors de sa délibération du 21 août 2018, le conseil communal de Lintgen décida de frapper les parcelles n° … et … appartenant à Monsieur …, « d’une servitudes interdisant toute modification de limites de terrains en vue de l’affectation de ceux-ci à la construction, toute construction ou réparation confortative ainsi que tous travaux généralement quelconques qui sont contraires aux dispositions du projet d’aménagement général, les propriétaires restant toutefois libres de procéder à des travaux d’entretien et de réparation » et ce « en exécution de l’article 20 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ». Ladite décision du conseil communal est motivée comme suit :

« Considérant que l’article 20 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain permet au Conseil communal, sous réserve de l’approbation par le Ministre, de frapper, au cours des études ou travaux tendant à établir à modifier ou à réviser un plan ou projet d’aménagement général (PAG) et jusqu’au moment de sa décision intervenant dans les conditions de l’article 10, alinéa 2, tous ou partie des immeubles touchés par ce plan des servitudes visées à l’article 21, alinéa 1er de la loi ci-dessus, sauf que les propriétaires restent libres de procéder aux travaux d’entretien et de réparation, que ces servitudes frappent les propriétés sans conférer de droit à indemnité ;

Considérant que ces servitudes consistent en l’interdiction de toute modification de limites de terrains en vue de l’affectation de ceux-ci à la construction, de toute construction ou réparation confortative ainsi que de tous travaux généralement quelconques qui sont contraires aux dispositions du projet, à l’exception des travaux de conservation et d’entretien ;

3Considérant que la validité de la décision d’interdiction est limitée à une période d’un an, prorogeable chaque fois d’un an au plus, sans que le total des prolongations successives ne dépasse deux années ;

Revu la délibération du Conseil communal du 11 mai 2017 relatif à l’imposition d’une servitude sur les parcelles … et …, approuvé par l’autorité supérieure en date du 12 juin 2017 sous la référence 9c ;

Vu le jugement du 21 juin 2018 du Tribunal administratif n° 39964 portant annulation de la décision du Conseil communal du 11 mai 2017 ayant imposé une servitude en application de l’article 20 de la loi du 19 juillet 2004 sur les parcelles cadastrales … et … ;

Considérant que le Conseil communal peut prendre une nouvelle décision quant à l’imposition d’une servitude sur les parcelles … et … ;

Revu la délibération du Conseil communal du 23 novembre 2017 approuvée par Monsieur le Ministre de l’Intérieur et à la Grande Région le 10 janvier 2008 sous la référence 226/08/CAC (14019) portant approbation du contrat d’ingénieur avec le bureau d’études … & … relatif à l’établissement d’un nouveau plan d’aménagement général (PAG) sur base des nouvelles dispositions de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ;

Considérant que le plan d’aménagement général (PAG) fait l’objet d’une refonte complète et que toutes les prescriptions relatives au mode d’utilisation du sol sont soumises à une révision complète ;

Considérant que les dispositions en vigueur concernant l’affectation des terrains sont en cours d’évaluation et qu’il pourrait en découler une modification nécessaire ;

Considérant que certains fonds doivent être réévalués fondamentalement en ce qui concerne leur affectation et leur constructibilité ;

Considérant que lors de la refonte complète du PAG, un reclassement des terrains ou de partie des terrains « zone destinée au logement social » pourrait être envisagé ;

Considérant que l’aménagement de ces terrains ou parties de terrains dans le cadre du PAG en vigueur serait contraire aux objectifs de développement de la commune ;

Considérant qu’une prescription d’interdiction immédiate paraît nécessaire pour garantir un développement urbanistique harmonieux ;

Considérant que ne sont pas visés par la servitude tous travaux qui ne sont pas contraires aux dispositions du projet d’aménagement général en élaboration ;

Considérant qu’il importe que les parcelles cadastrales concernées soient grevées dans les meilleurs délais des servitudes prévues à l’article 21 de la loi ;

Vu la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ;

4Vu la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 ; […] ».

Par décision du 30 août 2018, le ministre de l’Intérieur, désigné ci-après par « le ministre », approuva sur base des articles 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004 la décision précitée du conseil communal de Lintgen du 21 août 2018.

Par courrier du 18 septembre 2018, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Lintgen informa Monsieur … que le conseil communal a décidé de frapper les parcelles lui appartenant et portant les numéros cadastraux n° … et … de la servitude prévue aux articles 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 30 octobre 2018, inscrite sous le numéro 41894 du rôle, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision prévisée du conseil communal de Lintgen du 21 août 2018, ainsi que de la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur du 30 août 2018.

Etant donné qu’en application de l’article 20, alinéa 4 de la loi du 19 juillet 2004 un recours en réformation est prévu contre la décision du conseil communal qui décide de frapper de servitudes « tous ou partie des immeubles touchés par un plan à l’étude ou en élaboration », seul un recours en réformation a pu être dirigé contre la décision du conseil communal déférée ainsi que contre la décision ministérielle déférée, entérinant la décision du conseil communal du 21 août 2018 instaurant une servitude sur les parcelles portant les numéros cadastraux … et … de Monsieur …, recours qui est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il s’ensuit qu’il n’y pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

A l’appui de son recours le demandeur précise être propriétaire des parcelles inscrites au cadastre de la commune de Lintgen, section B de … et … sous les numéros … et …, lesquelles se trouveraient hors « périmètre d’agglomération » et seraient classées, d’après le plan d’aménagement général actuellement en vigueur, en zone d’intérêt paysager.

Le demandeur ajoute que ces mêmes parcelles seraient actuellement des labours et qu’il souhaiterait y construire et exploiter un poulailler « bio » de 6.000 animaux. Pour ce faire, il aurait déjà introduit diverses demandes en vue d’obtenir les autorisations requises, le demandeur précisant avoir entretemps reçu (i) l’autorisation de l’administration de la Gestion de l’Eau nécessaire en vue de la réalisation des infrastructures d’assainissement, (ii) l’autorisation du ministre de l’Environnement de construire une étable pour poules, une dalle à fumier, un bassin de rétention et d’aménager une cour, ainsi que (iii) l’autorisation du même ministre d’implanter son exploitation conformément au plan d’implantation soumis, à l’exception de la construction destinée à l’habitation. Il se serait par contre vu refuser l’autorisation d’établissement classé, ainsi que l’autorisation de construire, sollicitées auprès de la commune de Lintgen, le demandeur précisant encore que le conseil communal de Lintgen aurait déjà « à plusieurs reprises » décidé d’instituer des servitudes sur les parcelles en question.

En droit, et en ce qui concerne la légalité externe de la décision du conseil communal de Lintgen du 21 août 2018, le demandeur donne à considérer que même si des actes à caractère réglementaire, telle que la décision en question, n’auraient pas besoin d’être 5motivés de la même manière que les actes administratifs individuels, ils seraient néanmoins conditionnés à l’existence de motifs légaux, motifs légaux qui feraient toutefois défaut en l’espèce, de sorte que la décision sous analyse serait à annuler dans le cadre de la réformation.

Dans un deuxième temps, le demandeur conclut à une violation des articles 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004 en faisant valoir que les conditions cumulatives qui seraient requises par le prédit article 20 ne seraient pas réunies en l’espèce. Ainsi, et en ce qui concerne la « condition temporelle » y visée, le demandeur fait plaider qu’il résulterait du libellé de la décision du conseil communal du 21 août 2018 qu’elle a été prise sur base de la simple approbation du contrat conclu avec le bureau d’études en vue de la refonte du PAG, le demandeur contestant ainsi qu’il y aurait eu « ouverture des études ou travaux tendant à établir » le nouveau plan d’aménagement général, ci-après désigné la « le PAG ». Il estime en effet qu’en l’absence de toute référence à des travaux concrets en vue de l’élaboration d’un nouveau PAG au cours de la décennie qui se serait écoulée depuis la conclusion et l’approbation du contrat avec le bureau d’études, il y aurait lieu de conclure que les travaux en vue de l’élaboration du nouveau PAG ne seraient pas réellement en cours, de sorte que la décision du conseil communal aurait été prise prématurément et ne serait dès lors pas conforme aux exigences de l’article 20 de la loi du 19 juillet 2004.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur, en se basant sur un jugement du tribunal administratif1 fait encore valoir que la servitude visée à l’article 21 de la loi du 19 juillet 2004 ne saurait intervenir que si le projet d’aménagement particulier est suffisamment élaboré pour entraîner la saisine du Conseil du Gouvernement ou du conseil communal. En l’espèce, les échanges entre le bureau d’études et la commune qui auraient eu lieu entre le 27 octobre 2017 et le 17 octobre 2018, ne permettraient pas de conclure à l’existence d’un concept de développement, ou encore d’un schéma directeur, éléments qui seraient pourtant requis par l’article 7 de la loi du 19 juillet 2004. Le demandeur en conclut que la commune n’aurait pas prouvé qu’il existe un projet suffisamment élaboré au sens de l’article 20 de la même loi, de sorte que les décisions litigieuses devraient encourir l’annulation dans le cadre de la réformation.

En admettant que la deuxième condition visée à l’article 20 de la loi du 19 juillet 2004, tenant à l’approbation titulaire serait remplie en l’espèce, le demandeur souligne néanmoins « poursui[vre] la réformation, sinon l’annulation de cette approbation ».

Quant à la troisième condition inscrite à l’article 20 de la loi 19 juillet 2004, le demandeur, en se référant toujours au même jugement du tribunal administratif2, fait valoir en ce qui concerne « les immeubles touchés par le plan à l’étude » que si en principe tous les immeubles inscrits au registre cadastral d’une commune étaient visés, la « mesure d’interdiction » n’accompagnerait toutefois pas nécessairement toutes les études préparatoires à tous les plans d’aménagement. Ainsi, et afin d’éviter l’immuabilité totale des terrains inscrits au registre cadastral, le caractère automatique des servitudes visés à l’article 21 serait proscrit, le demandeur soutenant que pour déterminer les immeubles pouvant faire l’objet de telles servitudes le projet d’aménagement général devrait être suffisamment élaboré pour permettre la saisine du Conseil du Gouvernement ou du conseil communal. Il donne ensuite à considérer que le conseil communal aurait motivé sa décision de frapper les 1 Trib. adm. 29 septembre 2014, n° 33346 du rôle.

2 Ibidem.

6parcelles litigieuses par les servitudes visées à l’article 21 de la loi du 19 juillet 2004 par les mêmes considérations que celles exprimées lors de l’adoption des servitudes en date du 11 mai 2017. Il ne ressortirait toutefois pas de ces considérations que le projet d’aménagement général soit suffisamment élaboré au sens de la loi, alors que la commune formulerait des « considérants » au conditionnel, ce qui laisserait conclure à l’inexistence d’un projet concret et détaillé, le demandeur ajoutant que ce que la commune « envisage » serait non seulement impossible en droit alors que le règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement général ne prévoirait pas de « zone destinée au logement social », mais aurait en outre comme conséquence une extension tentaculaire de la localité de …. Dans la mesure où les parcelles en question se trouveraient en outre classées en zone verte, leur classement en zone constructible nécessiterait encore l’accord du ministre de l’Environnement, le demandeur rappelant à cet égard que celui-ci serait toutefois favorable à son projet de poulailler. En ce qui concerne les « objectifs de développements de la Commune », le demandeur fait plaider qu’il s’agirait là de considérations et d’objectifs politiques qui ne seraient pas soumis à l’appréciation du tribunal et qui n’auraient pas fait l’objet d’une concrétisation effective par le biais de dispositions réglementaires claires en voie d’élaboration et ne sauraient partant pas justifier l’instauration des servitudes litigieuses.

Dans la mesure où la simple existence d’une étude d’élaboration du PAG ne suffirait pas pour édicter une servitude sur base de l’article 20 de la loi du 19 juillet 2014, le demandeur conclut au caractère justifié de son recours sous analyse.

Finalement, le demandeur donne à considérer que la décision d’approbation tutélaire devrait également être annulée dans le cadre de la réformation, alors qu’il aurait appartenu au ministre de vérifier, en tant qu’autorité de tutelle, si toutes les conditions visées à l’article 20 de la loi du 19 juillet 2004 sont remplies en l’espèce, ce qui ne serait toutefois pas le cas. La décision ministérielle litigieuse devrait partant être annulée dans le cadre de la réformation et ce pour erreur manifeste d’appréciation, sinon pour absence d’examen du cas d’espèce.

La commune de Lintgen, de même que la partie étatique estiment quant à elles que les décisions sous analyse seraient fondées en fait et en droit et elles concluent au rejet du recours sous analyse.

En ce qui concerne d’abord le moyen tenant à la légalité externe et plus précisément celui relatif à la motivation de la décision du conseil communal du 21 août 2018, laquelle est un acte à caractère réglementaire, il y a lieu de rappeler que contrairement à ce qui est imposé pour les décisions administratives individuelles par l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, inapplicable en matière règlementaire, aucun texte n’oblige le pouvoir exécutif à formuler de manière expresse et explicite les motifs gisant à la base d’un acte à caractère règlementaire dont toutefois le motif doit être légal et à cet égard vérifiable par la juridiction administrative3.

Or, et même si aucune motivation explicite n’est exigée en l’espèce, il n’en reste pas moins que le conseil communal, dans sa décision du 21 août 2018 a non seulement indiqué les bases légales sur lesquelles elle est fondée, à savoir les articles 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004, mais il a également précisé que l’instauration des servitudes litigieuses est justifiée par le fait que les dispositions urbanistiques en ce qui concerne l’affectation des 3 Cour adm., 7 décembre 2004, n° 18142C du rôle, Pas. adm. 2018, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 107.

7terrains litigieux sont en cours d’évaluation et qu’il pourraient en découler une modification nécessaire non seulement en ce qui concerne leur affectation, mais également leur constructibilité, le conseil communal ayant encore précisé qu’un classement en « zone destinée au logement social » pourrait être envisagé pour ces mêmes parcelles et que leur aménagement, réalisable d’après le PAG en vigueur, serait contraire aux objectifs de développement de la commune. Dans son mémoire en réponse, la commune de Lintgen a par ailleurs relevé que les études en vue de l’élaboration du nouveau PAG seraient actuellement en cours et qu’elle avait comme projet de destiner les terrains de Monsieur … à d’autres fins que celle d’une exploitation agricole, la commune précisant encore qu’une exploitation agricole à l’endroit projeté aurait une influence significative sur les infrastructures communales, compte tenu notamment de ses besoins en énergie et en eau.

Il s’ensuit que le moyen tiré d’un défaut de motivation de la décision déférée est à rejeter pour ne pas être fondé.

Ensuite et en ce qui concerne la légalité interne des décisions litigieuses, force est de constater que les contestations du demandeur consistent en substance à affirmer que les conditions cumulatives visées à l’article 20 de la loi du 19 juillet 2004 ne seraient pas remplies en l’espèce. A cet égard, il y a lieu de rappeler que ledit article 20, dans sa version pertinente issue de la loi du 3 mars 2017, est intitulé « Interdictions pouvant frapper les immeubles pendant la période d’élaboration d’un projet d’aménagement général » et dispose en son alinéa 1er qu’ : « Au cours des études ou travaux tendant à établir ou à modifier un plan ou projet d’aménagement général et jusqu’au moment de sa décision intervenant dans les conditions de l’article 10, alinéa 2, le conseil communal peut décider, sous l’approbation du ministre, que tous ou partie des immeubles touchés par le plan à l’étude ou en élaboration sont frappés des servitudes visées à l’article 21, alinéa 1er, sauf que les propriétaires restent libres de procéder aux travaux d’entretien et de réparation. ».

L’article 20, alinéa 1er de la loi du 19 juillet 2004 pose dès lors trois conditions. Une première condition à caractère temporel impose que la décision de frapper de servitudes certains fonds intervienne dans une période qui débute par l’ouverture d’études ou travaux tendant à établir, à modifier, à compléter ou à réviser un plan ou projet d’aménagement général et qui s’achève avec la délibération du conseil communal sur le plan d’aménagement général.

L’article 21 de la même loi, intitulé « Servitudes », dispose en ses alinéas 1er et 2 qu’ : « A partir de la décision du conseil communal intervenue dans les conditions de l’article 10, alinéa 2, toute modification de limites de terrain en vue de l’affectation de ceux-

ci à la construction, toute construction où réparation confortative ainsi que tous travaux généralement quelconques qui sont contraires aux dispositions du projet sont interdits, à l’exception des travaux de conservation et d’entretien.

Ces servitudes deviennent définitives au moment de l’entrée en vigueur du plan d’aménagement général ».

Il convient de relever que dès le feu vert donné par le conseil communal en application de l’article 10, alinéa 2, de la loi du 19 juillet 2004 correspondant à la mise en procédure effective du projet de PAG, les servitudes prévues à l’article 21, alinéa 1er, de la même loi trouvent immédiatement application et, parallèlement celles qui auraient été prononcées en application de l’article 20 au cours des études ou travaux préalables à 8l’élaboration d’un projet voire d’une modification de PAG cessent nécessairement leurs effets et se trouvent relayées par les servitudes découlant de la première délibération du conseil communal telle que prévue par l’article 10, alinéa 2, de la loi du 19 juillet 2004 combiné à son article 21, alinéa 1er.

Il découle de l’agencement des articles 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004 que contrairement aux affirmations du demandeur, pour que des servitudes visées à l’article 21 puissent être valablement mises en place en vertu de l’article 20, il n’est pas exigé qu’un véritable projet de PAG ait déjà été élaboré, mais il suffit, aux termes de l’alinéa 1er de l’article 20, précité, que l’on se trouve au niveau des études ou de travaux tendant à mettre en place pareil projet voire modification du PAG, étant entendu que les études et travaux en question doivent, par la force des choses, être suffisamment précisé et circonstanciés pour qu’une servitudes, qui constitue néanmoins une modalité passablement incisive dans l’usage du droit de propriété des propriétaires concernés, puisse valablement être prise 4.

En ce qui concerne la principale condition visée au prédit article 20 paragraphe 1er de la loi du 19 juillet 2004, à savoir celle ayant trait à l’objet même de la décision, c’est-à-dire celle qui détermine que tout ou partie des immeubles touchés par le plan à l’étude ou en élaboration peuvent être frappés de servitudes visées à l’article 21, alinéa 1er, sauf que les propriétaires restent libres de procéder aux travaux d’entretien et de réparation, il y lieu de rappeler qu’il y a a priori lieu de comprendre les termes « immeubles touchés par le plan à l’étude ou en élaboration » comme visant tous les terrains inscrits au registre cadastral d’une commune, lesquels sont potentiellement « touchés » par des études visant à l’élaboration d’un PAG. Cela étant, si cette règle devait être appliquée stricto sensu, elle conduirait à l’immuabilité totale des terrains inscrits au registre cadastral pendant toute la durée de l’élaboration du PAG, de sorte qu’il y a lieu de rechercher si l’intention du législateur était celle visant à consacrer l’immutabilité totale de tous les terrains d’une commune dans le cadre de l’élaboration d’un PAG.

De manière fondamentale, les servitudes prévues par les articles 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004, en ce qu’elles s’analysent grosso modo en des servitudes non aedificandi, se justifient par un souci des autorités communales, sous le contrôle tutélaire étatique, de geler des projets de viabilisation de terrains directement visés par la réglementation d’urbanisme nouvelle en gestation afin d’éviter que des éléments de viabilisation ponctuelle ne contreviennent à des vecteurs d’urbanisation en élaboration pour des ensembles de terrains plus étendus et de mettre ainsi, dès ce stade, à néant des tentatives de mise en place d’un urbanisme harmonieux et cohérent5.

En effet, la ratio legis de l’article 16 de la loi du 20 mars 1974 concernant l’aménagement général du territoire dont le libellé a été repris à l’article 20 paragraphe 1er de la loi du 19 juillet 2004 consiste à mettre en place une procédure de nature à maintenir l’état des lieux pendant toute la période d’élaboration ou de révision d’un PAG afin que l’action des autorités communales ne soit pas entravée au moment de l’adoption du PAG, en d’autres termes, afin d’éviter que la destination des terrains ne soit profondément modifiée durant cette période empêchant ainsi les autorités communales à mettre en œuvre le PAG qu’elles auraient adopté.

4 Cour adm. 22 juin 2017, n° 39166C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu.

5 Trib. adm., 29 septembre 2014 n° 33346 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Urbanisme n° 72.

9Il ressort ainsi des travaux parlementaires ayant abouti à l’article 16 de la loi précitée du 20 mars 1974 que l’article en question fut introduit dans le « but de combler une lacune de notre législation à laquelle les administrations se heurtent de plus en plus souvent. L’état des lieux auxquels doit s’appliquer un plan déterminé peut varier considérablement entre le moment où le plan est mis à l’étude et le moment où il devient applicable. Ainsi, tel terrain sur lequel doit passer le tracé d’une nouvelle route se présente-t-il comme terre vague au moment des études et comme cité résidentielle au moment où les plans doivent être réalisés.

Les administrations ne disposent d’aucun moyen légal pour maintenir les terres dans l’état où ils se trouvent initialement […] ».6 Le législateur explique ensuite que l’objectif poursuivi est d’éviter de devoir recourir à la procédure d’expropriation. En effet : « Une expropriation au moment de la mise à l’étude du plan ne peut entrer en ligne de compte, les plans n’étant pas encore assez concrets et leur réalisation demeurant incertaine. Une expropriation au moment de l’exécution des plans peut imposer aux finances de l’Etat des charges telles que les plans doivent être abandonnés tout simplement. C’est pour éviter de telles situations que le présent projet de loi introduit le mécanisme de la mesure d’interdiction. Les modalités de ce mécanisme tiennent compte à la fois des exigences administratives et des intérêts des particuliers. Une interdiction de deux ans doit normalement suffire aux administrations pour mettre au point leurs plans. Le même délai de deux ans évitera que la charge imposée aux particuliers du fait de l’interdiction ne devienne trop lourde. D’autres mesures encore sont destinées à protéger les particuliers contre les abus éventuels des administrations. […] ».

Enfin le commentaire de l’article poursuit en indiquant que « La mesure d’interdiction n’accompagnera pas nécessairement toutes les études préparatoires à tous les plans d’aménagement. Il faut qu’il s’agisse d’un projet suffisamment élaboré pour que suivant le cas le Conseil de Gouvernement ou le conseil communal puisse en être saisi. L’interdiction sera décidée seulement à l’occasion de telles études, lorsque la réalisation ultérieure du plan serait compromise par des changements d’affectation des immeubles ou par l’exécution de certains travaux. […] »7.

En l’espèce, le conseil communal de Lintgen a motivé sa décision de frapper les parcelles litigieuses des servitudes prévues à l’article 21 de la loi du 19 juillet 2004 par le fait que l’affectation des terrains litigieux, actuellement classés en zone verte, est en cours d’évaluation et qu’une autre affectation pourrait s’avérer nécessaire dans la mesure où les autorités communales destinent ces mêmes parcelles à accueillir des logements sociaux, le conseil communal de Lintgen ayant encore précisé que leur affectation actuelle et surtout l’aménagement y projeté par le demandeur seraient contraires aux objectifs de développement de la commune.

Cette motivation a encore été complétée à travers le mémoire déposé par la commune dans le cadre du recours sous analyse, celle-ci ayant encore insisté sur le fait qu’une exploitation agricole à l’endroit projeté aurait une influence significative sur les infrastructures communales, compte tenu notamment de ses besoins en énergie et en eau. La commune de Lintgen a, par ailleurs, donné à considérer que dans le cadre du plan sectoriel « logement » elle aurait été désignée comme « commune prioritaire » et qu’elle aurait en tout état de cause toujours considéré ces mêmes terrains comme faisant partie des réserves foncières disponibles et destinées à la construction de logements sociaux.

6 Doc. parl. N° 1427, sess. ord. 1969-1970, p. 1214.

7 Doc. parl. N° 1427, sess. ord. 1969-1970, p. 1214.

10A cet égard, il convient de souligner que s’il est vrai que des considérations d’opportunité politique échappent, comme l’affirme à juste titre le demandeur, au contrôle des juridictions administratives, et que le classement même des terrains en zone constructible en vue de la réalisation de logements sociaux relève de la pure opportunité politique urbanistique, il n’en reste pas moins que pour se prononcer sur le bien-fondé du recours lui soumis, le tribunal de céans est amené à contrôler si matériellement, il n’existe pas d’erreur de fait.

A cet égard et en ce qui concerne l’argumentation du demandeur selon laquelle les travaux préparatoires du PAG ne seraient pas encore assez avancés et précis pour permettre le recours au servitudes prévues à l’article 20 de la loi du 19 juillet 2004, force est de constater qu’il n’est pas contesté en cause qu’en 2017, la commune de Lintgen a chargé le bureau d’études en aménagement du territoire et urbanisme « … & … » de l’établissement d’un projet de plan d’aménagement général, couvrant l’ensemble du territoire de la commune de Lintgen.

Il ressort en outre des pièces versées en cause, ainsi que des explications circonstanciées de la commune qu’elle a entretemps non seulement fait réaliser une étude de terrain sur la présence de différentes espèces de chauve-souris en voie de disparition, étude qui a été conduite entre autres dans la zone où se trouvent les parcelles litigieuses, mais qu’elle a également d’ores et déjà procédé à une étude environnementale (« strategische Umweltprüfung »), laquelle couvre, quant à elle, également les fonds du demandeur et se prononce en détail sur le classement de ces fonds et de fonds avoisinants en zone constructible et révèle ainsi avec suffisamment de précision la destination projetée par la commune des fonds litigieux, de sorte que les contestations y relatives laissent d’être fondées.

Par ailleurs, et comme retenu ci-avant il y a lieu de souligner que le but des servitudes visées à l’article 20 de la loi du 19 juillet 2004 réside dans le fait d’éviter que « la réalisation ultérieure du plan serait compromise par des changements d’affectation des immeubles ou par l’exécution de certains travaux ». Il est toutefois incontestable que la réalisation d’une exploitation agricole et plus particulièrement d’un poulailler destiné à accueillir 6.000 animaux compromettrait définitivement la réalisation du PAG telle que projetée par la commune, à savoir l’utilisation de ces terrains, considérés comme réserves foncières, en vue de la création de logements sociaux. Par ailleurs, et indépendamment de la question de savoir si les logements projetés pourront être réalisés compte tenu du fait que la commune n’est pas propriétaire des terrains en question, il résulte des pièces versées en cause8, et il n’est en outre pas contesté que ces même terrains, compte tenu de leur proximité de la gare CFL, des infrastructures sportives et des transports en communs en général, voire du réseau des pistes cyclables s’apprêtent a priori à être classés en zone constructible, de sorte qu’aucune erreur de fait n’a été commise en l’espèce.

Cette conclusion n’est pas ébranlée par les affirmations du demandeur selon lesquelles le classement projeté serait juridiquement impossible, alors que s’il est vrai qu’une « zone destinée au logement social » n’est pas prévue en tant que telle par le règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune, il n’en reste pas moins que ledit règlement prévoit en son article 10 des « Zones de bâtiments et d’équipements publics [BEP] » lesquelles, outre d’être réservées aux « constructions et aménagements d’utilité publique et sont destinées à satisfaire des besoins collectifs » peuvent encore accueillir des « logements de service ainsi que les logements situés dans les structures médicales ou paramédicales, les maisons de retraite, les internats, 8 Courrier de la commune de Lintgen adressé en date du 6 novembre 2014 au ministre de l’Environnement.

11les logements pour étudiants, les logements locatifs sociaux9 et les logements destinés à l’accueil de demandeurs de protection internationale […] », cette zone explicitement prévue par le législateur, étant ainsi destinée notamment à accueillir des logements sociaux.

Quant aux affirmations du demandeur selon lesquelles le reclassement projeté des terrains litigieux aurait comme conséquence une extension tentaculaire de la localité de …, respectivement qu’il ne serait pas établi en cause que le ministre de l’Environnement donne son accord à ce même reclassement, celles-ci ne sont également pas de nature à ébranler la légalité des servitudes sous analyse étant donné qu’il s’agit de considérations ayant trait au reclassement effectif desdites parcelles et partant à l’adoption du nouveau PAG et sont de ce fait étrangères à la validité des servitudes litigieuses décidées avant même le vote provisoire de ce même PAG.

Au vu des considérations qui précèdent, la condition essentielle consistant en une incompatibilité prévisible suffisamment caractérisée entre la réalisation d’une exploitation agricole, et plus particulièrement d’un poulailler destiné à accueillir 6.000 animaux, à l’endroit litigieux face à la destination projetée de ces mêmes terrains par la commune de Lintgen, se trouve caractérisée d’une manière suffisamment concrète et précise à partir des études d’ores et déjà réalisées dans le cadre de la refonte du PAG, pour que les servitudes mises en place sont justifiées.

Quant à la condition temporelle visée à l’article 20 précité de la loi du 19 juillet 2004, à savoir la condition que les servitudes y visées ont une validité limitée à un an, avec possibilité de prolonger cette servitudes chaque fois d’un an au plus, sans que le total des prolongations successives ne dépasse deux années, force est de constater que cette condition est également remplie en cause, alors qu’il résulte sans équivoque de la délibération du conseil communal du 21 août 2008 que les servitudes litigieuses sont prévues pour un an et ne sauront dépasser une durée totale de 3 ans. Il ressort encore des pièces versées en cause que les décisions portant adoption, respectivement approbation des servitudes litigieuses ont été publiées aux bans de la commune par avis du 22 septembre 2018, de sorte que les servitudes en question ont pris effet trois jours plus tard, à savoir le 25 septembre 2018 et perdront leurs effets, faute d’être prolongées en temps utile, le 25 septembre 2019.

Finalement et en ce qui concerne la condition de l’approbation nécessaire du ministre de tutelle de la décision prise par le conseil communal de frapper certains fonds de servitudes, force est de constater qu’il est constant en cause que par décision du 30 août 2018, le ministre a approuvé la décision déférée du conseil communal de la commune de Lintgen du 21 août 2018, de sorte que cette condition est également remplie en l’espèce.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent et à défaut de tout autre moyen soulevé en l’espèce, le recours sous analyse est à rejeter pour ne pas être fondé.

Monsieur … demande encore que tant la commune de Lintgen que la partie étatique soient condamnées à lui payer chacune une indemnité de procédure sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, demande qui est toutefois à rejeter compte tenu de l’issue du présent litige.

9 Souligné par le tribunal.

12Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en réformation introduit à titre principal en la forme ;

au fond, le dit non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée par le demandeur ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par et prononcé à l’audience publique du 3 juillet 2019 :

Thessy Kuborn, vice-président, Paul Nourissier, premier juge, Stéphanie Lommel, juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 4 juillet 2019 Le greffier du tribunal administratif 13


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 41894
Date de la décision : 03/07/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2018-07-03;41894 ?

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