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30/01/2018 | LUXEMBOURG | N°39041

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 30 janvier 2018, 39041


Tribunal administratif N° 39041 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 janvier 2017 4e chambre Audience publique du 30 janvier 2018 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’appel en garantie

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 39041 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 janvier 2017 par Maître Véronique de Meester, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à L-â€

¦, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du directeur de l’admini...

Tribunal administratif N° 39041 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 janvier 2017 4e chambre Audience publique du 30 janvier 2018 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes, en matière d’appel en garantie

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 39041 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 janvier 2017 par Maître Véronique de Meester, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 27 octobre 2016 déclarant non fondée sa réclamation du 20 septembre 2016 introduite contre un bulletin d’appel en garantie du 29 juin 2016 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 25 avril 2017 ;

Vu le mémoire en réplique, erronément intitulé « mémoire en réponse » déposé au greffe du tribunal administratif en date du 24 mai 2017 par Maître Veronique de Meester pour compte de sa mandante ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Véronique de Meester et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Lou Thill en leurs plaidoiries respectives.

En date du 29 juin 2016, le bureau d’imposition RTS Luxembourg 1 de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « bureau d’imposition », émit un bulletin d’appel en garantie (« Haftungsbescheid ») en vertu du paragraphe 118 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », à l’encontre de Madame …, en sa qualité d’administrateur de la société anonyme … SA, déclarée en état de faillite, dénommée ci-après « la société … », ledit bulletin étant motivé comme suit :

« (…) Il est dû à l'Etat du Grand-Duché de Luxembourg par la société … S.A. en faillite ayant eu son siège à L-… immatriculée sous le numéro fiscal … à titre de l'impôt sur les traitements et salaires:

Année principal Intérêts Total 2013 … € … € … € 2014 … € … € … € Total … € … € … € Il résulte de la publication au Mémorial Numéro … du … que vous étiez nommée administrateur de la société … S.A. en faillite.

En cette qualité vous avez eu le pouvoir d'engager la société sous signature conjointe depuis le 06/04/2011.

En votre qualité d'administrateur vous étiez en charge de la gestion journalière de la société … S.A. en faillite.

Par conséquent et conformément aux termes du § 103 AO, vous étiez personnellement tenue à l'accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la société … S.A. en faillite, dont notamment le paiement des impôts dus par la société … S.A. en faillite à l'aide des fonds administrés.

Par conséquent et conformément aux termes des §§108 et 103 AO, vous étiez personnellement tenue à l'accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à … S.A.

en faillite, dont notamment le paiement des impôts dus par … S.A. en faillite à l'aide des fonds administrés.

En vertu de l'article 136 alinéa 2 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu, l'employeur est tenu de retenir l'impôt qui est dû sur les traitements et salaires de son personnel.

En vertu de l'article 136 alinéa 6 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu, l'employeur est tenu à déclarer et à verser l'impôt retenu à l'Administration des contributions directes.

En vertu de l'article 136 alinéa 6 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu et du règlement grand-ducal modifié du 27 décembre 1974 concernant la procédure de la retenue d'impôt sur les salaires et les pensions, l'employeur est tenu de présenter au bureau RTS compétent les comptes de salaires ainsi que tous autres documents comptables.

Dans le cas d'une société, conformément aux termes du § 103 AO, ces obligations incombant aux employeurs sont transmises à celui qui a le pouvoir de représenter la société à l'égard des tiers.

Conformément au § 106 AO il vous incombait de prélever sur les fonds administrés les fonds nécessaires pour acquitter les impôts nés avant la disparition de la société … S.A. en faillite et d'assurer leur paiement.

En votre qualité de représentante de la société … S.A. en faillite il vous a appartenu de déclarer et de verser/de veiller à la retenue, à la déclaration et au versement de la retenue d'impôt due sur les traitements et les salaires du personnel.

Or pour les années 2013 et 2014 le paiement des salaires a été fait sans que les montants à retenir aient été continués entièrement au receveur.

L'omission de retenir, de déclarer et de payer les sommes dues à titre de retenue d'impôt est à qualifier d'inexécution fautive de vos obligations en tant que représentante de la société … S.A. en faillite.

Suite à l'inexécution fautive de vos obligations, le receveur de l'Administration des contributions directes n'a pas perçu les retenues d'impôt d'un montant de … €.

Ce montant de … euros se compose comme suit:

Année principal Intérêts Total 2013 … € … € … € 2014 … € … € … € Total … € … € … € En vertu du § 110 AO votre responsabilité pour les actes accomplis pendant la période de vos fonctions survit à l'extinction de votre pouvoir de représentation.

Considérant qu'en vertu du § 103 AO vous étiez tenue de remplir les obligations fiscales incombant à la société … S.A. en faillite.

Considérant que l'inexécution des ces obligations est à qualifier de fautive.

Considérant que l'inexécution fautive de vos obligations a empêché la perception d'impôt sur les traitements et salaires d'un montant de … €.

Considérant que dans la mesure où, par l'inexécution fautive de vos obligations, vous avez empêché la perception de l'impôt légalement dû, vous êtes constituée codébitrice solidaire de ce montant conformément au § 109 AO.

Considérant que le § 118 AO m'autorise à engager votre responsabilité.

Considérant le fait qu'en votre qualité de représentante vous étiez chargée de la gestion journalière de la société … S.A. en faillite j'engage votre responsabilité, l'appel en garantie s'élève au montant de … €, sans préjudice des intérêts de retard ultérieurs.

Par conséquent, vous êtes invitée à payer sans délai le montant de … euros, sans préjudice des intérêts de retard ultérieurs, au receveur de l'Administration des contributions directes à Luxembourg (…) ».

Par courrier daté au 16 septembre 2016, adressé au « préposé », Madame … fit introduire par son litismandataire une réclamation auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après dénommé le « directeur », à l’encontre du prédit bulletin d’appel en garantie.

Cette réclamation fut rejetée par une décision du directeur du 27 octobre 2016 inscrite sous le n° C 22737 du rôle, avec la motivation suivante :

« (…) Vu la requête introduite le 20 septembre 2016 par Me Véronique De Meester, au nom de la dame …, demeurant à L-…, pour réclamer contre le bulletin d'appel en garantie émis en vertu du § 118 de la loi générale des impôts (AO) par le bureau d'imposition RTS 1 en date du 29 juin 2016 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu le § 119, alinéa 1er AO, ensemble les §§ 228 et 301 AO ;

Considérant que la réclamation a été introduite par qui de droit (§ 238 AO) dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 245 AO) de la loi, qu'elle est partant recevable ;

Considérant que le bulletin attaqué a déclaré la réclamante co-débitrice solidaire de l'impôt sur les traitements et salaires des années 2013 et 2014 au motif qu'elle aurait, en sa qualité de représentante légale de la société anonyme …, actuellement en état de faillite, commis une faute en ne veillant pas à ce que soient payées au receveur des Contributions, sur les fonds administrés, les sommes qui ont été retenues ou qui auraient dû être retenues à titre d'impôt sur les salaires, et dont la société était redevable ;

Considérant, à titre liminaire tout comme en matière de principe, que le représentant d'une personne morale est responsable du paiement des dettes d'impôt de la personne morale qu'il représente dans les conditions prévues aux §§ 103 et 109 AO ;

qu'aux termes du § 103 AO il est tenu de remplir les obligations fiscales incombant à la société, notamment de remettre les déclarations fiscales dans les délais légaux et de payer sur les fonds qu'il gère les impôts dont la société est redevable (CE du 20 octobre 1981, n° 6902) ;

Considérant dès lors que dans la mesure où le gérant, par l'inexécution fautive de ces obligations, a empêché la perception de l'impôt légalement dû, il est, en principe, constitué co-

débiteur solidaire des arriérés d'impôt de la société, conformément au § 109 AO ; que la responsabilité du gérant est à qualifier de fautive du moment que les impôts échus, même avant son entrée en fonction, ne sont pas payés sur les fonds disponibles de la société à l'administration ;

Considérant qu'il s'avère nécessaire dans ce contexte de mettre en exergue qu'en matière de responsabilité du fait personnel (article 1382 du code civil), l'auteur du dommage ne peut pas s'exonérer en invoquant une prétendue faute d'un tiers, lequel n'entrera en ligne de compte qu'au stade du recours entre les coresponsables ; que le gérant responsable sur le fondement du § 109 AO ne peut s'opposer à une poursuite au motif qu'elle n'a pas été engagée contre l'autre, quod non en l'espèce, étant donné que deux autres bulletins d'appel en garantie ont été émis à l'encontre des sieurs… et …, les rendant ainsi codébiteurs solidaires au sens du § 7 de la loi d'adaptation fiscale (StAnpG) ;

Considérant, matériellement, qu'en vertu de l'article 136, alinéa 4 de la loi concernant l'impôt sur le revenu (L.I.R.) l'employeur est tenu de retenir, de déclarer et de verser l'impôt qui est dû sur les traitements et salaires de son personnel ; que dans le cas d'une société, cette obligation incombant aux employeurs est transmise à celui qui a le pouvoir de représenter la société à l'égard des tiers (§ 103 AO) ; que la responsabilité de l'administrateur délégué, voire du gérant, selon le cas, est à qualifier de fautive du moment que des paiements de salaires sont effectués sans retenue d'impôt et sans continuation des montants à retenir à l'administration (Cour administrative du 6 mai 2003, n° 15989C du rôle) ; qu'il en est de même en ce qui concerne les retenues échues avant son entrée en fonction, si, par sa faute, elles ne sont pas payées sur les fonds disponibles de la société ;

Considérant que sous l'empire du § 118 AO la poursuite du tiers responsable, à la différence de l'imposition du contribuable, est toujours discrétionnaire et exige de ce fait et en vertu du § 2 de la loi d'adaptation fiscale (StAnpG) une appréciation effective et explicite des circonstances qui justifient la décision en raison et en équité (BFH du 19 février 1965 StRK § 44 EStG R.13 ; jurisprudence constante pour RTS, notamment BFH du 24 novembre 1961, BStBl.

1962.37 ; 3 février 1981, BStBl. 1981 II 493 ; cf Becker-Riewald-Koch § 2 StAnpG Anm. 5 Abs.

3); que l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire implique une motivation quant au principe même de la mise en œuvre de la responsabilité d'un ou de plusieurs représentants, quant à la désignation du représentant dont la responsabilité est engagée et quant au quantum de sa responsabilité ;

Considérant qu'un manquement à une obligation fiscale découlant du § 103 AO dans le chef de l'administrateur délégué d'une société n'est pas suffisant pour engager sa responsabilité en application du § 109, alinéa 1er AO et pour voir émettre à son encontre un bulletin d'appel en garantie, le législateur ayant posé à cet égard l'exigence supplémentaire d'une inexécution fautive - « schuldhafte Verletzung » - des obligations du représentant de la société envers le fisc (Cour administrative du 22 février 2000, n° 11694C du rôle) ;

Considérant que la responsabilité du gérant est cependant à qualifier de fautive du moment qu'il n'accomplit pas ses obligations fiscales, dont notamment celle de veiller à ce que les impôts dus soient payés, même ceux datant d'avant son entrée en fonction, à l'aide des fonds administrés ; que cette dernière prémisse l'emporte, le cas échéant, ainsi de plein droit sur la situation telle qu'elle s'est présentée durant les années antérieures ;

Considérant dans ce contexte, et notamment d'après une jurisprudence constante, que le paiement de salaires sans retenue d'impôt et sans continuation des montants à retenir à l'administration des contributions directes est à qualifier de fautif per se (Cour administrative du 6 mai 2003, n° 15989C du rôle ; Cour administrative du 6 janvier 2011, n° 27126C du rôle ;

Tribunal administratif du 15 janvier 2009, n° 24145 du rôle) ; qu'il découle de tout ce qui précède que la mise à charge des arriérés de la société au titre de la retenue d'impôt sur les salaires et traitements pour les années 2013 et 2014, ainsi que les intérêts de retard y afférents, est parfaitement justifiée ; (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 30 janvier 2017, Madame … a fait introduire un recours tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision directoriale précitée du 27 octobre 2016 ayant rejeté sa réclamation à l’encontre du bulletin d’appel en garantie précité du 29 juin 2016.

En vertu du paragraphe 119 AO, les personnes à l’encontre desquelles un bulletin d’appel en garantie a été émis bénéficient des mêmes voies de recours que celles ouvertes aux contribuables. Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 AO et de l’article 8 (3) 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours introduit contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation contre un bulletin de l’impôt sur le revenu des collectivités, un bulletin de l’impôt commercial communal, un bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux et un bulletin d’établissement de la fortune.

Il s’ensuit qu’en l’espèce le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation introduit par Madame … à l’encontre de la décision directoriale précitée, ayant statué sur les mérites d’une réclamation introduite contre le bulletin d’appel en garantie dont elle a fait l’objet.

Le recours en réformation ayant été introduit dans les formes et délai prévus par la loi, est recevable.

Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation dirigé contre la décision directoriale déférée.

A l’appui de son recours, la partie demanderesse fait d’abord valoir que ce serait à tort que le directeur aurait retenu qu’en sa seule qualité d'administrateur, elle aurait été en charge de la gestion journalière de la société …, alors qu’elle n’aurait jamais exercé un mandat d’administrateur délégué à la gestion journalière dans ladite société.

Elle relève qu’à la constitution de la société … en date du 7 décembre 2010, il y aurait eu un seul actionnaire et un seul administrateur en la personne de Monsieur … qui aurait également été nommé administrateur délégué avec un pouvoir de signature unique. Cela aurait d'ailleurs été au seul nom de ce dernier que l'autorisation d'établissement pour le compte de la société … aurait été accordée par le Ministère des Classes Moyennes. Elle précise, à ce sujet, dans son mémoire en réplique, que, dans statuts coordonnés de la société …, ainsi que dans l'extrait du registre de commerce et des sociétés, il serait indiqué qu’:« Envers les tiers, en toutes circonstances, la société sera engagée, en cas d'administrateur-délégué nommé pour la gestion et la représentation dans les opérations courantes de la société, par la seule signature de l'administrateur délégué, mais seulement dans les limites de ce pouvoir. » Ainsi, le dénommé … aurait été la seule personne active dans la société, gérant seul toutes les activités de la société et procédant seul à tous les paiements des fournisseurs. Il aurait d’ailleurs été le seul administrateur à avoir des compétences dans le domaine particulier des activités de la société et également le seul administrateur à être dédié à 100 % à cette activité.

La partie demanderesse explique que lorsqu’elle serait devenue actionnaire de la société … le 6 avril 2011, elle aurait demandé à être nommée administrateur afin de pouvoir surveiller la société dans laquelle elle avait investi des sommes importantes. Elle précise, à ce sujet, qu’il serait néanmoins évident qu'il n'aurait été ni dans ses intentions, ni dans ses compétences, de remplacer l'administrateur délégué.

Elle souligne qu’il ne résulterait ni des dispositions du droit des sociétés, ni des statuts de la société, qu'un simple administrateur serait de facto ou de jure responsable de l'administration des fonds disponibles de la société, a fortiori si un administrateur a été spécialement désigné pour être délégué à la gestion journalière avec un pouvoir de signature individuel, comme en l'espèce où l'administrateur délégué aurait d’ailleurs déjà été nommé avant qu’elle ne devienne elle-même administrateur, de sorte qu’il ne saurait être affirmé qu’elle aurait délégué ses responsabilités à ce dernier.

La partie demanderesse fait plaider que l'organe de l'administrateur-délégué trouverait son fondement dans l'article 60 de la loi modifiée du 10 août 1915 sur les sociétés commerciales, ci-

après dénommée « la loi du 10 août 1915 » et que cette fonction, qui serait, d'après l'alinéa 3 de ce même article, opposable aux tiers, donc également à l’administration des Contributions directes, aurait précisément été prévue afin de permettre au conseil d'administration de confier les soins de la gestion journalière à un de ses membres et d’éviter ainsi aux autres administrateurs de s'occuper des tâches relevant de la gestion journalière de la société. Exiger de chaque administrateur d'une société qu'il réponde de toutes les obligations découlant de la gestion journalière, dont les obligations fiscales, alors qu'un administrateur délégué a reçu une délégation de pouvoirs lui attribuant la charge de cette gestion journalière, reviendrait ainsi à mettre à néant l'utilité de cette fonction pourtant voulue par le législateur. Il y aurait ainsi lieu d'entendre le devoir de surveillance d'un administrateur de manière raisonnable et de ne pas exiger qu'il s'exerce à tous les instants de la vie de la société, car ce serait faire renaître les désagréments que le législateur aurait voulu éviter en autorisant le conseil à lui déléguer une partie de ses pouvoirs.

Ce serait partant, sans la moindre base légale, que l’administration des Contributions directes induirait de la seule qualité d'administrateur que ce dernier serait obligé de gérer les fonds de la société, alors même qu’elle reconnaîtrait la coexistence de plusieurs catégories d'administrateurs, notamment en faisant une distinction entre le régime d'imposition des rémunérations des administrateurs délégués à la gestion quotidienne et celui des autres administrateurs.

En deuxième lieu, la partie demanderesse estime que la décision directoriale litigieuse méconnaîtrait les conditions de mise en œuvre de la responsabilité personnelle des dirigeants de société dans l'hypothèse d'un appel en garantie fiscal en vertu du paragraphe 109 AO, alors que, d’après le paragraphe 103 AO, un constat de manquement à une obligation fiscale ne suffirait pas pour engager la responsabilité personnelle de l'administrateur concerné, le législateur ayant posé comme condition supplémentaire celle de la preuve par l'administration des Contributions directes d'une inexécution fautive des obligations dudit représentant social.

Si le mandat social devait lui permettre d'avoir un droit d'information et de contrôle sur la direction de la société dans laquelle elle a investi, la partie demanderesse donne à considérer qu’elle n'aurait jamais eu à administrer personnellement les fonds de la société, comme le prouveraient les attestations bancaires versées à l’appui de son recours. Ainsi, l'exigence supplémentaire d'une inexécution fautive dans son chef en application du §109 AO ne serait pas remplie.

Dans son mémoire en réplique, elle ajoute que, tout au plus, il pourrait lui être reproché une certaine crédulité, du fait qu’elle aurait régulièrement été rassurée par l'administrateur délégué sur les perspectives de se faire relayer par l'entrée de nouveaux investisseurs, ce qui l'aurait conduite à avancer des fonds à la société pour un montant significativement supérieur aux seuls revenus que cette dernière aurait dégagés.

La partie demanderesse relève, dans ce contexte, que le Conseil d'Etat aurait récemment pris soin de faire préciser l'étendue et les limitations de la responsabilité personnelle des administrateurs quant au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, en retenant que le fait de rendre les dirigeants de sociétés personnellement et solidairement responsables non seulement de la déclaration correcte de la TVA, mais également du paiement de celle-ci, apparaîtrait disproportionnée par rapport à l'objectif poursuivi étant donné que de telles dispositions aboutiraient, en fait, à la suppression non seulement de l'exigence de la faute dans le chef des dirigeants, mais aussi de celle d'une relation causale avec la taxe non payée.

Ainsi, la partie demanderesse reproche à l’administration des Contributions directes de lui avoir appliqué un régime de responsabilité sans faute, sans avoir cherché à savoir si elle avait eu connaissance du défaut de paiement par la société des retenues sur salaires dues, d’autant plus que dans le même temps, la quasi-totalité des entrées de fonds dans la société … seraient dues aux avances en compte courant apportées par elle.

Dans son mémoire en réplique, la partie demanderesse invoque finalement, dans ce contexte, des arrêts récents de la Cour administrative qui auraient rappelé que le simple constat d'un manquement à une obligation fiscale découlant du paragraphe 103 AO dans le chef d'un administrateur de société ne serait pas suffisant pour engager sa responsabilité personnelle en application du paragraphe 109 (1) AO et pour voir émettre à son encontre un bulletin d'appel en garantie, alors que le législateur aurait posé à cet égard l'exigence supplémentaire d'une inexécution fautive, « schuldhafte Verletzung », des obligations du représentant de la société envers l'administration fiscale. Dans ces affaires, il aurait été retenu que l’administrateur n'aurait pas personnellement eu les pouvoirs de procéder directement au règlement de la dette, faute de disposer d'un pouvoir sur le fonctionnement des comptes bancaires de la société, et qu’il n’aurait pas pu connaître la situation financière détaillée de la société vis-à-vis de chacun de ses débiteurs au jour le jour, alors que tout le courrier serait arrivé à l'adresse du siège social, où l'activité aurait été exercée et où l'administrateur délégué aurait œuvré quotidiennement.

Il en serait de même dans le cas d’espèce, étant donné qu’elle n'aurait pas eu accès au compte en banque de la société, s'expliquant par le fait qu’elle n'aurait pas eu pour prérogative de faire des virements ou de vérifier les paiements au jour le jour. Elle n’aurait pas non plus pu prendre connaissance des courriers, des factures et des rappels.

En dernier lieu, la partie demanderesse fait relever que le pouvoir discrétionnaire de l'administration impliquerait une appréciation effective et explicite des circonstances et des faits du cas d'espèce, ce qui ne serait pas le cas en l'espèce, étant donné que la motivation de l’administration des Contributions directes aurait tout d'une décision non personnalisée viserait, de surcroît, la situation de l'administrateur délégué, sinon d’un gérant, cas de figure non applicables à sa situation personnelle.

Elle estime encore qu’il aurait appartenu à l’administration des Contributions directes d’informer immédiatement chacun des administrateurs du défaut de la société … de remplir ses obligations fiscales, afin de leur permettre, une fois avertis, de prendre toutes les dispositions possibles.

La partie gouvernementale conclut au rejet du recours en tous ses moyens.

Il échet d’abord de rappeler qu’en vertu des dispositions de l’article 136 (4) LIR, l’employeur est tenu de retenir et de verser l’impôt qui est dû sur les salaires et traitements de son personnel. Dans le cas d’une société, cette obligation incombant aux employeurs est transmise aux représentants de celle-ci, conformément au paragraphe 103 AO, qui dispose que « Die gesetzlichen Vertreter juristischer Personen und solcher Personen, die geschäftsunfähig oder in der Geschäftsfähigkeit beschränkt sind, haben alle Pflichten zu erfüllen, die denen Personen, die sie vertreten, obliegen ; insbesondere haben sie dafür zu sorgen, dass die Steuern aus den Mitteln die sie verwalten, entrichtet werden. Für Zwangsgeldstrafen und Sicherungsgelder die gegen sie erkannt, und für Kosten von Zwangsmitteln die gegen sie festgesetzt werden, haften neben ihnen die von ihnen vertretenen Personen ».

Il s’ensuit que les administrateurs composant le conseil d’administration d’une société anonyme sont tenus de remplir les obligations fiscales incombant à cette dernière et notamment celle de payer, sur les fonds qu’ils gèrent, les impôts dont la société est redevable directement, respectivement ceux dont elle est redevable pour compte d’autrui.

Quant à la mise en œuvre de la responsabilité personnelle des représentants du fait du non-

paiement des impôts dont est redevable une personne morale, le paragraphe 109 AO dispose dans son alinéa 1er : « Die Vertreter und die übrigen in den §§ 103 bis 108 bezeichneten Personen haften insoweit persönlich neben dem Steuerpflichtigen, als durch schuldhafte Verletzung der ihnen in den §§ 103 bis 108 auferlegten Pflichten Steueransprüche verkürzt oder Erstattung oder Vergütung zu Unrecht gewährt worden sind ».

Ces dispositions légales mettent ainsi une obligation personnelle à charge des représentants légaux de la société.

Il se dégage encore de ces dispositions, que le simple constat d’un manquement à une obligation fiscale découlant du paragraphe 103 AO précité n’est pas suffisant pour engager la responsabilité personnelle des dirigeants d’une société en application du paragraphe 109 (1) AO et pour voir émettre à leur encontre un bulletin d’appel en garantie, le législateur ayant en effet posé à cet égard l’exigence supplémentaire d’une inexécution fautive (« schuldhafte Verletzung ») des obligations du représentant de la société envers l’administration fiscale.

Par ailleurs, le paragraphe 7 (3) StAnpG dispose que « Jeder Gesamtschuldner schuldet die ganze Leistung. Dem Finanzamt steht es frei an welchen Gesamtschuldner es sich halten will. Es kann die geschuldete Leistung von jedem Gesamtschuldner ganz oder zu einem Teil fordern ». Dès lors, en cas de pluralité de responsables, la possibilité de poursuivre simultanément tous les responsables résulte implicitement du paragraphe 7 StAnpG en vertu duquel ceux qui sont poursuivis en qualité de responsables sont tenus solidairement. Le bureau d'imposition n'est par contre pas obligé de poursuivre tous les co-responsables et peut limiter son recours contre un ou plusieurs d'entre eux.

En toute hypothèse, il appartient cependant au bureau d'imposition de relever les circonstances particulières qui ont déterminé son choix. Le pouvoir du bureau d’imposition d’engager une poursuite contre un tiers responsable, et, plus particulièrement, contre le représentant d’une société, ne relève en effet pas d’une compétence liée, mais constitue un pouvoir d’appréciation dans son chef et ce, à un double titre, d’abord en ce qui concerne l’appréciation du degré fautif du comportement de la personne visée, et, ensuite, en ce qui concerne le choix du ou des codébiteurs contre lesquels l’émission d’un bulletin d’appel en garantie est décidée, chaque fois compte tenu des circonstances particulières de l’espèce. Il appartient dès lors à l’administration de justifier la décision à ce double égard.

Quant à l’exercice de ce pouvoir d’appréciation par l’administration, le paragraphe 2 StAnpG dispose dans son alinéa (1) que « Entscheidungen, die die Behörden nach ihrem Ermessen zu treffen haben (Ermessens-Entscheidungen), müssen sich in den Grenzen halten, die das Gesetz dem Ermessen zieht. (2) Innerhalb dieser Grenzen sind Ermessensentscheidungen nach Billigkeit und Zweckmässigkeit zu treffen ». Ainsi, l’administration investie d’un pouvoir d’appréciation doit procéder selon des considérations d’équité et d’opportunité et partant se livrer à une appréciation effective et explicite des circonstances particulières susceptibles en raison et en équité de fonder sa décision.

En l’espèce, le bureau d’imposition a décidé de mettre en œuvre la responsabilité personnelle de la partie demanderesse en sa qualité d’administrateur de la société … en relevant à l’appui de sa décision notamment l’omission, non contestée, de verser à l’administration les sommes dues au titre de l’impôt sur les traitements et salaires des années 2013 à 2014, empêchant de ce fait le receveur de l’administration des Contributions directes de percevoir les impôts d’un montant total de …,- euros, intérêts compris.

En ce qui concerne d’abord le moyen de la partie demanderesse selon lequel aucune responsabilité ne saurait être engagée dans son chef du fait de sa qualité de « simple » administrateur de la société … et du fait que cette dernière ait nommé un administrateur délégué en charge de la gestion journalière, force est d’abord de relever que l’obligation fiscale découlant du paragraphe 109 (1) AO précité dans le chef des dirigeants d’une société se base sur le principe selon lequel celui qui agit en lieu et place d’autrui doit veiller à l’exécution des obligations fiscales de celui qu’il représente. Une de ces obligations consiste ainsi pour le représentant légal d’une société à opérer, déclarer et verser les retenues d’impôt et, de manière générale, à payer sur les fonds qu’il gère les impôts dont la société est redevable.

A cet égard, le représentant qui a accepté sa fonction ne peut pas se contenter de contester son pouvoir. En effet, en n’exécutant pas les obligations légales de la société, il manque à son premier devoir, celui d’administrer1.

1 trib. adm. 8 novembre 2016, n° 36410 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu Il convient également de rappeler à cet égard que les administrateurs sont, en tout état de cause, responsables d’un défaut de surveillance du délégué à la gestion journalière2. Par ailleurs, il est admis que les administrateurs sont nommés parce que l’on attend d’eux la compétence nécessaire pour l’accomplissement de leurs fonctions, de sorte qu’actifs et non-actifs répondent de leurs actes de la même façon. Ni une éventuelle incompétence technique, ni le motif philanthropique pour lequel il aurait accepté sa mission, ni d’éventuelles absences au sein du conseil ne pourraient limiter la responsabilité d’un administrateur, le seul fait de ne pas exercer ses fonctions dans la société étant en soi une faute de gestion. En effet, la faute n’implique pas de la part de l’administrateur un agissement actif. La responsabilité de l’administrateur peut être engagée par son attitude passive, sa négligence, son incurie ; aussi, le comportement d’un administrateur, consistant en une légèreté ou une insouciance impardonnable doit être considéré comme faute grave, à savoir une faute qu’un dirigeant raisonnablement diligent et prudent n’aurait pas commise et qui heurte les normes essentielles de la vie en société, ou du moins les normes importantes3.

Il est rappelé qu’en tant que personne étant de jure en charge de l’administration de la société, la partie demanderesse, conformément au paragraphe 103 AO, était en effet personnellement tenue, indépendamment de la question du pouvoir de signature afin d’engager la société … pendant les périodes correspondant à l’exercice de cette fonction, à l’accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la société, de sorte qu’elle était obligée de retenir, lors du paiement des salaires, l’impôt sur les salaires, ainsi que de le verser au Trésor public, ou, du moins, de faire en sorte que cela soit fait par l’administrateur délégué.

Cette conclusion n’est pas énervée par l’affirmation de la partie demanderesse selon laquelle elle n’aurait de facto pas été en charge de l’administration de la société, respectivement de la gestion journalière de la société et que cette tâche aurait été effectuée par le dénommé Mensuelle. En effet, il convient de rappeler qu’en tout état de cause, les membres du conseil d’administration n’échappent pas à leurs responsabilités parce qu’ils délèguent en tout ou en partie celles-ci à d’autres ; ils doivent au contraire assumer une surveillance constante de ceux à qui ils donnent pareille délégation4.

Dès lors, le fait de ne pas s’être activement impliquée dans la gestion de la société et de ne pas avoir surveillé la gestion faite par l’administrateurs délégué à la gestion journalière est de nature à engager la responsabilité de la partie demanderesse, d’autant plus qu’elle souligne elle-

même qu’ayant investi des sommes importantes dans la société …, elle aurait insisté pour être nommée administrateur justement afin de pouvoir surveiller la gestion de cette dernière, de sorte qu’elle ne saurait se retrancher ni derrière une « certaine crédulité » de sa part vis-à-vis des assurances présentées par l'administrateur délégué, ni derrière le fait qu’elle n’aurait pas disposé des compétences dans le domaine particulier d’activité de la société à l’instar de Monsieur Mensuelle, la surveillance de la gestion journalière d’un administrateur délégué à cette fin ne nécessitant pas d’aptitudes et de capacités particulières, autres que celles qui sont requises dans le chef d’un administrateur de sociétés raisonnable et prudent.

2 trib. adm. 6 juillet 2016, n° 36437 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu 3 trib. adm. 8 novembre 2016, n° 36410 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu 4 Cour adm. 18 octobre 2016, n°37845C et 37846C du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu Il ne saurait partant s’agir en l’occurrence, tel que le prétend la partie demanderesse, de la mise en cause d’une responsabilité sans faute, alors qu’elle est, elle-même, en aveu de ne pas avoir suffisamment exercé le pouvoir de surveillance sur lequel elle affirme avoir pourtant insisté lors de son investissement dans la société.

Ainsi, force est de relever, dans ce contexte, qu’il n’est nullement exigé de la partie demanderesse, en tant qu’administrateur de s’occuper elle-même de la gestion journalière de la société en dépit du fait qu’un administrateur délégué ait été nommé pour ce faire, mais de surveiller la bonne gestion de ce dernier.

La faute commise est d’autant plus reprochable qu’en ne payant pas des sommes qui sont dues au fisc, la partie demanderesse a ainsi arrogé un crédit à la société …, qui a alors pu détourner l’argent qu’elle était tenue de payer pour compte des salariés, étant relevé qu’il s’agit de sommes d’argent qui, dès le versement du salaire, ne doivent pas recevoir une affectation autre que le seul paiement de l’impôt dû par le salarié. Or, en ne donnant pas à ces montants l’affectation qu’ils doivent recevoir, le représentant de la société détourne lesdits montants à d’autres fins, ce qui constitue à l’évidence une inexécution gravement fautive de ses devoirs, qu’il n’a d’ailleurs pas pu ignorer.

Il s’ensuit que la partie demanderesse ne saurait valablement minimiser voire rejeter sa responsabilité en se retranchant derrière le fait que la gestion journalière de la société aurait été exercée par le dénommé Mensuelle et qu’elle n’aurait eu aucun pouvoir de signature pour la société ou vis-à-vis de la banque. Le moyen afférent est partant à rejeter.

Il en est de même de l’argumentation suivant laquelle, l’administration des Contributions directes serait en faute pour ne pas l’avoir personnellement avertie, en sa qualité d’administrateur, des dettes fiscales en souffrance, alors qu’il lui incombait de surveiller la gestion de l’administrateur délégué à la gestion journalière, d’autant plus que ce dernier a été la « seule personne active dans la société », et partant celle qui réceptionne le courrier et qui gère les comptes en banque.

Dans ce contexte, la partie demanderesse se saurait pas non plus se retrancher derrière la circonstance suivant laquelle l’administrateur délégué aurait déjà été en place au moment de sa nomination en tant qu’administrateur pour alléguer que ce l’administrateur délégué n’aurait pas été spécialement désigné par elle, étant donné qu’à défaut pour elle, en sa qualité d’actionnaire de proposer la révocation de l’administrateur en question, respectivement en sa qualité de membre du conseil d’administration d’avoir fait en sorte que ledit administrateur soit déchargé de sa délégation à la gestion journalière, elle est censée, du fait d’avoir adhéré aux statuts sociaux, avoir accepté la présence et les pouvoirs de l’administrateur délégué en fonctions, et ce, d’autant plus qu’elle invoque justement cette délégation de pouvoirs afin de se délier de toute responsabilité en ce qui concerne la gestion quotidienne de la société ….

Quant à la décision de l’administration des Contributions directes de se tourner spécialement vers la partie demanderesse, il échet de rappeler que le paragraphe 7 (3) StAnpG, dispose que « jeder Gesamtschuldner schuldet die ganze Leistung. Dem Finanzamt steht es frei an welchen Gesamtschuldner es sich halten will. Es kann die geschuldete Leistung von jedem Gesamtschuldner ganz oder zu einem Teil fordern », de sorte que le pouvoir du bureau d’imposition d’engager une poursuite contre un tiers responsable, et, plus particulièrement, contre le représentant d’une société, ne relève pas d’une compétence liée, mais constitue un pouvoir d’appréciation dans son chef et ce, à un double titre, d’abord en ce qui concerne l’appréciation du degré fautif du comportement de la personne visée, et, ensuite, en ce qui concerne le choix du ou des codébiteurs contre lesquels l’émission d’un bulletin d’appel en garantie est décidée, chaque fois compte tenu des circonstances particulières de l’espèce.

En cas de pluralité de responsables, la possibilité de poursuivre simultanément tous les responsables résulte implicitement du paragraphe 7 StAnpG qui dispose que ceux qui sont poursuivis en qualité de responsables sont tenus solidairement. Le bureau d’imposition n’est par contre pas obligé de poursuivre tous les co-responsables et peut limiter son recours contre un ou plusieurs d’entre eux5. En toute hypothèse, il appartient au bureau d’imposition de relever les circonstances particulières qui ont déterminé son choix. En effet, conformément au paragraphe 2 StAnpG disposant dans son alinéa (1) que « Entscheidungen, die die Behörden nach ihrem Ermessen zu treffen haben (Ermessensentscheidungen) müssen sich in den Grenzen halten, die das Gesetz dem Ermessen zieht. (2) Innerhalb dieser Grenzen sind Ermessensentscheidungen nach Billigkeit und Zweckmässigkeit zu treffen », l’administration investie d’un pouvoir d’appréciation doit procéder selon des considérations d’équité et d’opportunité et partant se livrer à une appréciation effective et explicite des circonstances particulières susceptibles en raison et en équité de fonder sa décision.

En l’espèce, le bureau d’imposition a décidé de mettre en œuvre la responsabilité personnelle de la partie demanderesse en sa qualité d’administrateur personnellement responsable des insuffisances d’impôt qui sont la conséquence de son comportement fautif, à savoir son défaut d’avoir fait en sorte que la dette fiscale soit réglée.

En avançant ces considérations à l’appui de sa décision, le directeur s’est livré à une appréciation effective et explicite des circonstances particulières susceptibles de fonder sa décision. Force est encore de constater que la partie demanderesse, n’a de son côté pas utilement renversé les conclusions du directeur à cet égard, en ce qu’elle est restée en défaut d’énerver concrètement les faits relevés par lui pour conclure au caractère fautif de son comportement en tant qu’administrateur de la société en question, de sorte que le moyen y relatif est également à rejeter.

Il se dégage dès lors des développements qui précèdent que le recours est à rejeter comme étant non fondé en tous ses moyens.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

5 trib. adm. 8 novembre 2016, n° 36410 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu reçoit en la forme le recours principal en réformation en ce qu’il est dirigé contre la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 27 octobre 2017 ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation dirigé contre la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 27 octobre 2017 ;

condamne la partie demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 30 janvier 2018 par :

Annick Braun, vice-président, Anne Gosset, premier juge, Olivier Poos, premier juge, en présence du greffier Marc Warken.

s. Marc Warken s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 30 janvier 2018 Le greffier du tribunal administratif 14


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 39041
Date de la décision : 30/01/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2018-01-30;39041 ?

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