Tribunal administratif N° 40370 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 14 novembre 2017 3e chambre Audience publique extraordinaire du 15 janvier 2018 Recours formé par Monsieur … et consort, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 35 (3), L. 18.12.2015)
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 40370 du rôle et déposée le 14 novembre 2017 au greffe du tribunal administratif par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Irak), et de Madame …, née le … à … (Irak), tous les deux de nationalité irakienne, ayant demeuré ensemble à L-…, élisant domicile en l’étude de leur litismandataire sis à L-1940 Luxembourg, 310, route de Longwy, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 31 octobre 2017 ayant déclaré leur demande de protection internationale irrecevable sur le fondement de l’article 28, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 27 décembre 2017 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Louis TINTI et Madame le délégué du gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 janvier 2017.
Le 18 mars 2015, Monsieur … et Madame …, ci-après désignés par « les consorts … », introduisirent auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères, direction de l’Immigration, une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, entretemps abrogée par la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».
Par décision ministérielle du 8 juin 2016, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-
après désigné par « le ministre », rejeta la demande de protection internationale des consorts … et leur ordonna de quitter le territoire dans un délai de trente jours.
Par un arrêt de la Cour administrative du 7 mars 2017, portant le numéro 38697C du rôle, les consorts … furent, par réformation du jugement du tribunal administratif du 26 octobre 2016, inscrit sous le numéro 38146 du rôle, déboutés de leur recours contentieux introduit à l’encontre de la décision ministérielle, précitée, du 8 juin 2016.
Le 28 septembre 2017, les consorts … introduisirent auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, ci-après désigné « le ministère », une nouvelle demande de protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015.
Les déclarations des consorts … sur leur identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg furent actées dans un rapport de la police grand-ducale, section police des étrangers et des jeux, du même jour.
Le 9 octobre 2017, les consorts … furent entendus séparément par un agent du ministère sur leur situation et sur les motifs se trouvant à la base de leur nouvelle demande de protection internationale.
Par décision du 31 octobre 2017, notifiée aux intéressés par courrier recommandé envoyé le 2 novembre 2017, le ministre informa les consorts … que leur nouvelle demande de protection internationale avait été déclarée irrecevable sur base de l’article 28, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015. Cette décision est libellée comme suit :
« […] J'ai l'honneur de me référer à vos deuxièmes demandes en obtention d'une protection internationale que vous avez introduites auprès du service compétent du Ministère des Affaires étrangères et européennes en date du 28 septembre 2017.
Il ressort de votre dossier que vous avez introduit des premières demandes de protection internationale au Luxembourg le 18 mars 2015 qui ont été refusées par décision ministérielle du 8 juin 2016.
Monsieur, vous aviez invoqué à la base de cette demande que vous auriez fui l'Irak à cause de vos craintes de vous faire tuer par des membres de famille de votre compagne, si elle était mise au courant de votre relation. D'ethnie kurde et de confession sunnite, vous auriez quitté le Kurdistan après vos études pour aller travailler à Bagdad en 1998. Après un séjour de cinq ans en Suède entre 2004 et 2008, vous seriez retourné vivre à Bagdad où vous auriez travaillé dans un restaurant jusqu'à votre départ en 2015. En 2013, vous auriez fait la connaissance de votre compagne et vous auriez alors entretenu une relation en secret. Ayant eu des relations sexuelles, vous devriez vous cacher pour avoir « dépassé la ligne rouge » alors que vous vous trouveriez tous les deux « sous le poids des traditions ». En 2014, votre compagne aurait essayé d'informer sa mère de votre relation, mais cette dernière lui aurait fait comprendre qu'elle serait mariée à un de ses cousins. Début 2015, la famille de votre compagne et celle de son cousin se seraient mises d'accord sur la « date de mariage, les cadeaux, les bijoux ». Etant donné qu'elles auraient accéléré les préparatifs et que la date du mariage se serait rapprochée, vous auriez été obligés de vous enfuir en février 2015. Vous vous seriez alors installés pendant un mois dans un appartement à Istanbul, où vous vous seriez mariés en « dix minutes » auprès d'un imam à qui vous auriez fait croire que vous seriez des touristes pour justifier le manque de documents relatifs au mariage civil. Vous seriez par la suite montés à bord d'un camion pour venir au Luxembourg.
Vous ajoutez que la famille de votre compagne appartiendrait au « clan … » qui constituerait un clan chiite des plus fanatiques, traditionaliste, « très dangereux » et qui se caractériserait par une réprobation totale des sunnites. Selon les membres de ce clan, en tant que kurde, sunnite et étranger à la famille, vous auriez tous les défauts possibles et il ne vous serait donc pas possible d'avoir leur accord pour épouser votre compagne. Vous précisez que vous n'auriez eu aucun contact avec un membre de ce clan et que vous seriez un inconnu à leurs yeux mais que vous risquiez de vous faire exécuter si jamais ils étaient au courant de votre relation. Bien qu'ils n'aient jamais été informés de votre identité, vous supposeriez qu'entretemps, ils auraient fait une enquête et qu'ils l'auraient découverte, tout en ignorant où vous vous trouveriez.
Madame, vous aviez confirmé les dires de votre compagnon. D'ethnie arabe et de confession musulmane chiite, vous auriez vécu à Bagdad auprès de vos parents et de votre soeur. Vous précisez faire partie d'une tribu très conservatrice qui pratiquerait le mariage « endogène » et qui, dès la naissance, promettrait les filles du clan à un autre membre de la tribu. Vos deux soeurs auraient été immédiatement mariées après l'abandon de leurs études, mais vous auriez insisté pour terminer vos études secondaires et même pour vous inscrire à l'université de Kirkuk pour éviter un pareil sort. Dans ce contexte, vous affirmez avoir par le passé refusé de vous fiancer à une multitude de « prétendants » parce que ces derniers auraient déjà été mariés ou auraient déjà eu des enfants; vous auriez alors été frappée par votre frère, mais vos parents, bien que ne vous comprenant pas, auraient toujours accepté votre choix. Vous signalez avoir été acceptée à l'université de Kirkuk mais que votre famille aurait refusé de vous laisser partir. De même, on ne vous aurait pas permis d'assister à des cours à l'université de Bagdad. Comme vous n'auriez donc plus étudié, vos problèmes avec votre famille auraient commencé et vous auriez eu peur de « terminer » comme vos soeurs.
Vous auriez par la suite informé vos parents que votre compagnon kurde et de confession musulmane sunnite voudrait vous épouser mais vos parents auraient refusé toute idée de mariage avec cet homme du fait de son ethnicité kurde. En plus, votre père vous aurait signalé qu'il vous aurait promise à votre cousin depuis votre enfance et que vous devriez vous sentir comme sa fiancée. Etant donné que ce cousin aurait fini par découvrir que vous ne seriez plus vierge, vous seriez d'avis que vous allez être tuée tôt ou tard. Vous ajoutez que vous auriez été frappée par votre frère qui aurait voulu avoir plus d'informations sur votre compagnon.
Vous craindriez d'être tuée pour avoir quitté votre clan et refusé d'épouser votre cousin.
Vous avez été définitivement déboutés de vos premières demandes de protection internationale par arrêt de la Cour administrative du 7 mars 2017 (Numéro 38697C du rôle) au motif que « (…) la Cour constate qu'en l'espèce, le ministre a relevé des incohérences dans les déclarations des intimés, et plus particulièrement dans celles de Madame …, sans pour autant considérer que la crédibilité de leur récit en soit intégralement compromise. ll a surtout mis en doute le fait pour Madame …de ne pas être mariée à son cousin, alors qu'elle lui aurait été promise depuis son enfance, et d'avoir pu refuser de nombreux prétendants avec l'accord de ses parents pour ensuite se voir obligée, à l'âge de 47 ans, à devoir néanmoins épouser son cousin. Si les doutes exprimés par le ministre à cet égard ne sauraient, contrairement à ce qui a été retenu par les premiers juges, être considérés comme touchant des « indications factuelles secondaires », puis qu'ils se situent au coeur des problèmes invoqués par les intimés, ils ne sont toutefois pas suffisants pour remettre en cause la crédibilité du récit des intimés dans leur ensemble. S'y ajoute le fait non contesté invoqué par les intimés qu'ils forment un couple mixte, d'origines ethniques et d'obédiences musulmanes différentes.
Ainsi, les intimés font essentiellement état de leurs craintes, en cas de retour en Irak, de subir des violences de la part des membres de la famille de Madame …en raison du couple mix chiite - sunnite qu'elle forme avec Monsieur… qui, de surcroît, est kurde. Ils font ainsi valoir des problèmes certes d'ordre familial mais en lien avec les différences religieuses et ethniques en Irak, de nature à pouvoir être rattachés aux critères prévus par l'article 1er, section A, § 2, de la Convention de Genève. La Cour partage cependant la position de la partie étatique en ce que les intimés n'ont pas fait état d'actes dont ils auraient été victimes qui seraient suffisamment graves pour pouvoir être qualifiés de persécution au sens de l'article 42, paragraphe (1), point a), de la loi du 18 décembre 2015 ou d'atteintes graves au sens de l'article 48, points a) et b).
En effet, l'intimée a uniquement fait état de l'opposition de son père à son union avec Monsieur…et du fait d'avoir été frappée par son frère dans le but de lui révéler l'identité de Monsieur ….
D'autre part, il convient de relever que les consorts … ont déclaré avoir eu une relation durant deux ans sans rencontrer de problèmes particuliers, de sorte que les craintes exprimées par les intimés à l'égard de la famille de Madame … en cas de retour en Irak sont essentiellement de nature hypothétique. Il convient également de relever que les auteurs des actes mis en avant par les intimés, à savoir des membres de la famille de Madame … , sont des acteurs non étatiques, de sorte qu'une crainte fondée de persécution ou un risque réel d'atteintes graves ne sauraient être retenus que s'il peut être démontré que les autorités étatiques ou des partis ou organisations qui contrôlent l'État ou une partie importante du territoire de celui-ci, ne peuvent pas ou ne veulent pas accorder aux intimés une protection contre les persécutions ou les atteintes graves.
Ainsi une persécution ou une atteinte grave ne saurait être admise dès la commission matérielle d'un acte criminel mais seulement dans le cas où les agressions commises par une personne ou un groupe de la population seraient encouragées ou tolérées par les autorités en place, voire où celles-ci seraient incapables d'offrir une protection appropriée. Or, force est de constater que les intimés n'ont pas véritablement recherché la protection des autorités. La seule déclaration de Monsieur … d'avoir cherché conseil auprès d'un ami policier qui leur aurait conseillé de quitter le pays, étant donné que la police n'interviendrait pas dans ce type de conflit privé, ne suffit guère à démontrer que les intimés n'auraient pas pu compter sur une protection de la part des autorités de leur pays.
Il y a partant lieu de conclure que les consorts … n'ont pas établi à suffisance de droit qu'ils aient été victimes de traitements considérés par la Convention de Genève et la loi du 18 décembre 2015 comme justifiant dans leur chef la reconnaissance du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire. L'examen de la question de l'existence d'une possibilité de fuite interne est partant surabondant. (…) ».
Le 12 avril 2017, vous étiez convoqués au Ministère des Affaires étrangères et européennes en vue de préparer votre retour volontaire en Irak, mais vous ne vous êtes pas présentés.
Le 9 mai 2017, vous avez été signalés disparus de votre foyer d'accueil.
Le 26 juin 2017, les autorités allemandes ont envoyé aux autorités luxembourgeoises une demande de reprise en charge sur base du règlement Dublin III.
Le 27 septembre 2017, vous avez été transférés au Luxembourg et vous avez alors signalé ne pas vouloir retourner volontairement en Irak et avoir l'intention d'introduire des nouvelles demandes de protection internationale en vue de bénéficier à nouveau d'un logement.
En mains le rapport du Service de Police Judiciaire du 28 septembre 2017 et les rapports d'entretien du 9 octobre 2017 sur les motifs sous-tendant vos deuxièmes demandes de protection internationale.
Il ressort du rapport du Service de Police Judiciaire que vous êtes entrés en Allemagne le 24 avril 2017 et que vous y avez introduit des demandes de protection internationale le 29 mai 2017. En outre, il en ressort que vous êtes connus en France pour entrée irrégulière le 23 avril 2017 et vous, Monsieur, pour détention de faux documents administratifs en avril 2017.
Monsieur, il résulte de vos déclarations auprès de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes que vous et votre compagne souffririez de problèmes psychiques depuis que vos attestations de demandeurs de protection internationale vous ont été retirées et que vous avez été informés que vous devriez quitter le Luxembourg. Vous seriez alors partis en Allemagne où vous auriez eu droit à une carte de crédit et 700 euros par mois, ainsi qu'à une autorisation de travail et une assurance maladie.
Vous signalez que vous ne retourneriez jamais volontairement en Irak parce que les problèmes mentionnés lors de votre première demande de protection internationale seraient toujours d'actualité et que la situation ne serait pas sécurisée.
Ainsi, la situation sécuritaire serait devenue instable au Kurdistan suite à la tenue du référendum et des menaces quotidiennes envers la population de la part de « Hashd AL SHABI ». En plus, votre famille aurait reçu des menaces sur facebook et par téléphone de la part de peshmergas pour ne pas avoir pris part au référendum. De plus, votre famille y aurait été menacée par le PDK ou du PUK, « Sie haben die Asaish Brigaden », parce que votre beau-
frère aurait critiqué le gouvernement Barzani et Talabani dans un journal en demandant des explications quant au flux des recettes liées au pétrole et en pointant du doigt le non versement de salaires aux fonctionnaires depuis deux ans. Votre famille chercherait actuellement un moyen de quitter le pays alors qu'une fuite vers Bagdad ne serait pas envisageable parce que « Hashd AL SHABI » empêcherait les gens à se déplacer vers le sud et que la relation entre Kurde et Arabes serait « très mauvaise » ces temps-ci.
Pour étayer vos dires, vous avez versé huit certificats et rapports médicaux établis en Allemagne en 2017 concernant l'opération et le traitement pour dépression de votre compagne.
Madame, vous signalez être partis en Allemagne en avril 2017, par peur d'un rapatriement en Irak suite au retrait de votre « papier rose ». Après votre transfert au Luxembourg depuis l'Allemagne, vous auriez introduit une deuxième demande de protection internationale parce que l'agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes chargé de votre dossier vous avait signalé que la procédure concernant votre première demande était terminée.
Vous affirmez que « Was mich betrifft sind meine Asylgründe die gleichen wie beim ersten Antrag (…) Nein es hat sich nichts geändert, Sie können sich im Internet über meine Stamm informieren. Sie sind sehr radikal, wenn es um Ehrensachen geht ».
Vous ajoutez que, bien que les conflits entre Kurdes et Arabes ne seraient pas nouveaux, la situation en Irak aurait changé pour le pire et qu'en tant qu'Arabe vous ne pourriez pas vous déplacer en territoire kurde tandis que vous auriez peur des membres de votre tribu en territoire arabe. De même, votre compagnon en tant que Kurde ne pourrait pas aller à Bagdad où la milice « radicale et criminelle » Al BADR aurait fait surface ces derniers temps. Vous dites qu'en tant que chiite, cette milice vous condamnerait à la peine de mort si elle était informée de votre liaison avec un sunnite.
Madame, Monsieur, je suis au regret de vous informer qu'en vertu des dispositions de l'article 28 (2) d) de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, vos demandes de protection internationale sont irrecevables au motif que vous n'avez présenté aucun élément ou fait nouveau relatifs à l'examen visant à déterminer si vous remplissez les conditions requises pour prétendre au statut de bénéficiaire d'une protection internationale.
Il s'agit dans un premier temps de constater que vous confirmez vous-même, Madame, que votre nouvelle demande de protection internationale reposerait sur les mêmes motifs que ceux exposés dans le cadre de votre première demande, à savoir votre provenance d'une famille traditionnaliste combinée au fait que vous auriez décidé de vous lier, à l'âge de quarante-cinq ans, en tant que chiite à votre compagnon d'ethnie kurde. De même, Monsieur, vous confirmez que les problèmes mentionnés lors de votre première demande de protection internationale seraient toujours d'actualité.
Ainsi, il s'agit de constater que vos craintes ou vos problèmes en rapport avec votre prétendue relation ou votre famille, Madame, ont déjà été traités et toisés dans le cadre de vos précédentes demandes de protection internationale et ne sauraient donc pas être considérés comme des faits nouveaux au sens de l'article 32 qui augmenteraient de manière significative la probabilité que vous remplissiez les conditions prévues pour bénéficier du statut de réfugié.
Madame, ce constat vaut d'autant plus que le Ministre avait dans le cadre de la décision de refus susmentionnée, rejeté l'authenticité de certains éléments clé de votre récit au sujet de votre famille et des prétendus mariages « endogènes »; un constat qui a par la suite été confirmé par le jugement et l'arrêt de la Cour administrative du 7 mars 2017.
Concernant vos craintes plus générales ayant trait à la vie en tant que couple mixte (sunnite/chiite et kurde/arabe) à Bagdad, force est de constater qu'il ressortait de vos dires que vous auriez prétendument vécu en couple à Bagdad entre 2013 et 2015, sans faire état d'un problème particulier ou d'un incident concret, alors que vous signalez en même temps, Madame, que le conflit entre Kurdes et Arabes ne serait pas nouveau. Il n'est donc nullement établi qu'il ne vous serait dans le futur plus possible d'entretenir votre relation en Irak; vos craintes en rapport à votre sécurité personnelle devant dès lors être perçues comme manifestement hypothétiques. Ce constat vaut d'autant plus que la milice « AI-Badr » que vous semblez craindre particulièrement, était déjà présente à Bagdad au moment où vous y viviez en couple et qu'il ne vous serait jamais rien arrivé.
Au vu de ce qui précède, il faut donc encore ajouter que vous n'étiez manifestement pas dans l'incapacité de faire part de vos prétendues craintes liées à la présence de la milice « AI-
Badr » à Bagdad dans le cadre de vos précédentes demandes de protection internationale. Il s'ensuit que vos craintes en rapport avec cette milice ne sauraient pas être perçues comme des éléments nouveaux au sens dudit article 32.
Monsieur, quant à la situation sécuritaire qui aurait empiré et les prétendues menaces dont auraient souffert des membres de votre famille au Kurdistan, il s'agit d'abord de constater que si les donnes au Kurdistan irakien ont effectivement changé après la tenue du référendum sur l'indépendance en septembre 2017, il n'en reste pas moins que vous n'y auriez plus vécu depuis les années 1990 et que vous n'êtes donc pas touché par les éventuels problèmes auxquels seraient exposés des habitants du Kurdistan.
Il en est de même des prétendues menaces proférées par des Peshmergas envers des membres de votre famille, alors que de tels faits, à les supposer établis, seraient à considérer comme non personnels. Or, des faits non personnels mais vécus par d'autres membres de la famille ne sont susceptibles de fonder une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève que si le demandeur d'asile établit dans son chef un risque réel d'être victime d'actes similaires en raison de circonstances particulières. Vous restez toutefois en défaut d'étayer un lien entre le prétendu traitement de membres de famille au Kurdistan et des éléments liés à votre personne vous exposant à des actes similaires. En effet vous n'y auriez plus habité depuis les années 1990 et n'y étiez donc pas non plus présent au moment du référendum et vous ne vous êtes pas non plus fait remarquer par le passé par des prises de paroles publiques critiquant des dirigeants politiques kurdes.
De plus, même si vous aviez appris les prétendues critiques de votre beau-frère envers des dirigeants politiques après le 7 mars 2017 (date de clôture de vos premières demandes de protection internationale), il n'en reste pas moins qu'il s'agirait de problèmes non personnels qui ne vous concerneraient pas en tant qu'habitant hors du Kurdistan et qui ne sauraient donc pas non plus constituer des éléments nouveaux au sens de l'article 32.
A supposer que votre beau-frère aurait critiqué les gouvernements Barzani et Talabani avant mars 2017, ce qui semble logique vu que la présidence de Talabani à la tête de l'Irak a terminé en 2014, alors il faudrait de nouveau en déduire que vous n'étiez pas dans l'incapacité d'en faire état dans le cadre de vos premières demandes de protection internationale, tel que prévu par l'article 32.
Finalement, notons que conformément à l'article 9 de la loi du 18 décembre 2015, il est dérogé au droit de rester sur le territoire lorsqu'une personne n'a introduit une première demande ultérieure considérée comme irrecevable, qu'afin de retarder ou d'empêcher l'exécution d'une décision qui entraînerait son éloignement imminent du territoire. Or, il ressort de votre dossier qu'une décision de retour a été prise en date du 8 juin 2016 et que vous êtes déboutés de vos premières demandes depuis le 7 mars 2017. Vous avez d'ailleurs disparu de votre foyer d'accueil et êtes partis en Allemagne après que vos attestations de demandeurs de protection internationale vous avaient été retirées et que vous avez été informés du fait que vous devriez quitter le Luxembourg en direction de l'Irak ou tout autre pays dans lequel vous avez le droit de résider.
Notons que vous avez également signalé aux autorités luxembourgeoises que vous ne retourneriez jamais volontairement en Irak et que vous auriez introduit des nouvelles demandes de protection internationale parce qu'on vous aurait fait comprendre que la procédure concernant vos premières demandes serait terminée. Il est donc évident que vous avez aussi introduit ces nouvelles demandes de protection internationale dans le seul but d'empêcher votre éloignement du territoire luxembourgeois.
Par conséquent la prédite dérogation au droit de rester sur le territoire luxembourgeois s'applique en l'espèce.
Les éléments sous-jacents à vos deuxièmes demandes de protection internationale ne sauraient donc pas être perçus comme des faits nouveaux augmentant de manière significative la probabilité que vous remplissiez les conditions prévues pour bénéficier du statut de réfugié conformément à l'article 32 de la loi du 18 décembre 2015. […] ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 14 novembre 2017, les consorts … ont fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision ministérielle, précitée, du 31 octobre 2017.
Etant donné que la décision déférée déclare irrecevable la demande de protection internationale des consorts … sur base de l’article 28, paragraphe (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015 et que l’article 35, paragraphe (3), de ladite loi prévoit un recours en annulation en matière de demandes de protection internationale déclarées irrecevables sur base de l’article 28, paragraphe (2), de la même loi, un recours en annulation a valablement pu être dirigé contre la décision ministérielle déférée. Le recours en annulation est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi, étant précisé que les demandeurs ont procédé à une élection de domicile auprès de leur litismandataire suite aux observations du délégué du gouvernement quant à l’inexactitude de leur adresse, telle qu’indiquée dans la requête introductive d’instance, en ce qu’ils ne seraient plus hébergés dans leur foyer d’accueil située à Luxembourg-Ville.
A l’appui de leur recours, les demandeurs, de nationalité irakienne, exposent constituer un couple mixte, dans la mesure où Monsieur … serait d’origine kurde et de confession sunnite, tandis que Madame … serait arabe et de confession chiite. Après avoir rappelé les faits et rétroactes à la base de la décision déférée, ils font valoir que leur deuxième demande de protection internationale serait fondée sur une aggravation de la situation générale régnant en Irak qui serait marquée, d’une part, par une instabilité accrue de la région du Kurdistan suite à la tenue du référendum le 25 septembre 2017, et, d’autre part, par le développement de milices chiites et notamment la milice « Al Badr ».
Ils sollicitent l’annulation de la décision déférée pour violation de la loi, sinon pour erreur manifeste d’appréciation des faits en ce que le ministre aurait à tort retenu qu’ils n’auraient présenté aucun élément ou fait nouveau, par rapport à leur première demande de protection internationale, augmentant de manière significative la probabilité qu’ils remplissent les conditions requises pour prétendre au statut de bénéficiaire d’une protection internationale.
En tant qu’éléments nouveaux par rapport à leur première demande de protection internationale, ils soutiennent, d’une part, être exposés à un risque accru de subir des persécutions, sinon des atteintes graves au regard de la situation générale régnant en Irak et, d’autre part, que les autorités irakiennes ne seraient pas disposées, respectivement capables de leur fournir une protection.
En ce qui concerne plus particulièrement la situation dans le Kurdistan irakien, les demandeurs se prévalent d’un rapport de l’organisation « Amnesty International » et intitulé « Irak 2016/2017 », ainsi que de trois articles de presse des 30 septembre, 16 et 18 octobre 2017 intitulés « Référendum kurde : l’Iran et l’Irak préparent des manœuvres à la frontière », « Les forces irakiennes reprennent des sites aux Kurdes à Kirkouk », respectivement « La prise de Kirkouk aux Kurdes par les Irakiens risque de déclencher une guerre plus large » faisant état d’une situation conflictuelle dans cette partie d’Irak, en raison des revendications d’indépendance des Kurdes, pour en conclure qu’il serait trop dangereux pour eux, au regard de la circonstance que Madame … serait d’origine arabe et de confession chiite, de s’y rendre en cas de retour dans leur pays d’origine. Ils mettent encore en exergue l’expansion de l’influence de la milice chiite « Al Badr », qui commanderait, dans certaines parties d’Irak les forces armées et policières et qui serait responsable d’un nombre important d’exactions, de pillages et d’enlèvements contre les irakiens de confession sunnite, tel que cela ressortirait du rapport de l’OFPRA du 15 avril 2016 sur les milices chiites, du rapport de l’organisation « Human Rights Watch » du 18 mars 2015 et intitulé « After Liberation Came Destruction », ainsi que d’un article de presse du 16 août 2017 et intitulé « Organisation BADR – La 52ème Brigade de la mobilisation populaire chiite, milice Turkmène Pro-Iranienne en Irak ». Ce serait surtout Monsieur …, en raison de ses croyances religieuses sunnites, dont la vie serait particulièrement en danger en cas de retour en Iraq en raison des agissements de ces milices chiites. Finalement, sur base du rapport, précité, d’« Amnesty International », les demandeurs font valoir que la situation régnant actuellement en Irak serait chaotique et apocalyptique, en ce qu’un conflit armé y sévirait entre, d’une part, les forces gouvernementales, les milices paramilitaires et les peshmergas, et, d’autre part, l’organisation terroriste se nommant « L’Etat Islamique », tous responsables d’exécutions judiciaires, d’actes de torture et de la disparition forcée d’un nombre important de personnes, respectivement d’attentats suicides et d’autres attaques meurtrières. Ces agissements seraient souvent dirigés contres des personnes de confession sunnite, les demandeurs précisant encore que les autorités irakiennes ne seraient pas capables, voire disposées de protéger les victimes de tels actes.
Les demandeurs concluent de l’ensemble des considérations qui précèdent que les éléments présentés à l’appui de leur deuxième demande de protection internationale devraient être considérés comme nouveaux par rapport à ceux présentés dans le cadre de leur première demande et comme augmentant de manière significative la probabilité qu’ils remplissent les conditions d’octroi d’un statut de protection internationale, de sorte que le ministre aurait dû déclarer leur demande recevable au sens de l’article 32, paragraphe (4), de la loi du 18 décembre 2015.
Le délégué du gouvernement soutient que ce serait à juste titre que le ministre a déclaré irrecevable la deuxième demande de protection internationale des consorts … et conclut au rejet du recours.
L’article 28, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015 prévoit que « […] le ministre peut prendre une décision d’irrecevabilité, sans vérifier si les conditions d’octroi de la protection internationale sont réunies, dans les cas suivants: […] d) la demande concernée est une demande ultérieure, dans laquelle n’apparaissent ou ne sont présentés par le demandeur aucun élément ou fait nouveau relatifs à l’examen visant à déterminer si le demandeur remplit les conditions requises pour prétendre au statut de bénéficiaire d’une protection internationale […] ».
Aux termes de l’article 32 de la même loi, « (1) Constitue une demande ultérieure une nouvelle demande de protection internationale présentée après qu’une décision finale a été prise sur une demande antérieure, y compris le cas dans lequel le demandeur a explicitement retiré sa demande et le cas dans lequel le ministre a rejeté une demande à la suite de son retrait implicite, conformément à l’article 23, paragraphes (2) et (3).
(2) Lorsqu’une personne qui a demandé à bénéficier d’une protection internationale fait de nouvelles déclarations ou présente une demande ultérieure, ces nouvelles déclarations ou les éléments de la demande ultérieure sont examinés dans le cadre de l’examen de la demande antérieure par le ministre ou, si la décision du ministre fait l’objet d’un recours juridictionnel en réformation, par la juridiction saisie.
(3) Le ministre procède à un examen préliminaire des éléments ou des faits nouveaux qui ont été présentés par le demandeur, afin de prendre une décision sur la recevabilité de la demande en vertu de l’article 28, paragraphe (2), point d). Le ministre peut procéder à l’examen préliminaire en le limitant aux seules observations écrites présentées hors du cadre d’un entretien.
(4) Si les éléments ou faits nouveaux indiqués augmentent de manière significative la probabilité que le demandeur remplisse les conditions requises pour prétendre à une protection internationale, l’examen de la demande est poursuivi, à condition que le demandeur concerné a été, sans faute de sa part, dans l’incapacité de les faire valoir, au cours de la précédente procédure, y compris durant la phase contentieuse. […] ».
Il ressort de ces dispositions que le ministre peut déclarer irrecevable une demande ultérieure - c’est-à-dire une demande de protection internationale introduite après qu’une décision finale a été prise sur une demande antérieure émanant de la même personne, y compris, notamment, le cas dans lequel une demande de protection internationale a fait l’objet d’une décision de retrait implicite -, sans vérifier si les conditions d’octroi de la protection internationale sont réunies, dans le cas où le demandeur n’invoque aucun élément ou fait nouveau relatifs à l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour prétendre au statut de bénéficiaire d’une protection internationale. Saisi d’une telle demande ultérieure, le ministre effectue un examen préliminaire des éléments ou des faits nouveaux qui ont été présentés par le demandeur, afin de prendre une décision sur la recevabilité de la demande en question. L’examen de la demande n’est poursuivi que si les éléments ou faits nouveaux indiqués augmentent de manière significative la probabilité que le demandeur remplisse les conditions requises pour prétendre à une protection internationale et à condition que le demandeur concerné ait été, sans faute de sa part, dans l’incapacité de les faire valoir, au cours de la précédente procédure, y compris durant la phase contentieuse. Dans le cas contraire, la demande est déclarée irrecevable.
Il s’ensuit que la recevabilité d’une demande ultérieure est soumise à trois conditions cumulatives, à savoir, premièrement, que le demandeur invoque des éléments ou des faits nouveaux, deuxièmement, que les éléments ou les faits nouveaux présentés augmentent de manière significative la probabilité qu’il remplisse les conditions requises pour prétendre à une protection internationale et, troisièmement, qu’il ait été, sans faute de sa part, dans l’incapacité de se prévaloir de ces éléments ou de ces faits nouveaux au cours de la précédente procédure, y compris durant la phase contentieuse.
Il est constant en cause que la demande de protection internationale des consorts … ayant donné lieu à la décision déférée a été introduite le 28 septembre 2017, soit après que leur première demande de protection internationale avait été définitivement rejetée par un arrêt de la Cour administrative du 7 mars 2017, inscrit sous le numéro 38697C du rôle, de sorte que la demande en question doit être qualifiée de demande ultérieure au sens de l’article 32, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015.
Il se dégage des éléments du dossier et plus particulièrement des déclarations des demandeurs auprès du service compétent du ministère lors de leurs auditions respectives en date du 9 octobre 2017 que les motifs invoqués à la base de leur nouvelle demande de protection internationale se résument à mettre en avant les risques de persécution, respectivement d’atteintes graves résultant de l’évolution négative de la situation, d’une part, au Kurdistan irakien, où Madame … serait exposée à de tels actes en raison de ses origines arabes et de sa confession religieuse chiite, et, d’autre part, de manière générale, en Irak, à cause de la prise d’influence de milices chiites, et plus particulièrement de la milice « Al Badr » qui poursuivrait les sunnites, tel que Monsieur …, ainsi qu’à cause de la situation de conflit armé interne y régnant.
Force est tout d’abord au tribunal de constater que les faits invoqués par les demandeurs à l’appui de leur deuxième demande de protection internationale diffèrent de ceux dont ils s’étaient prévalus au cours de leur précédente demande qui se sont résumés en des prétendus actes de persécution, respectivement d’atteintes graves de la part de la famille de Madame … qui aurait été opposée à leur union en raison des origines kurdes et de la confession religieuse sunnite de Monsieur … et qui aurait projeté de marier cette dernière de force.
En ce qui concerne les risques mis en avant par les demandeurs dans le cadre de la demande en obtention d’une protection internationale sous analyse en raison de la situation régnant au Kurdistan irakien, c’est à juste titre que la partie étatique a fait valoir que ces faits ne peuvent pas être considérés comme pouvant justifier, dans le chef des consorts …, l’octroi d’un statut de protection internationale. Il y a en effet, tout d’abord, lieu de relever que Monsieur … a quitté cette partie d’Irak depuis les années 1990. Même si d’autres membres de sa famille y vivent encore et sont, d’après les déclarations des demandeurs, ainsi susceptibles d’être exposés à des actes de persécution, respectivement à des atteintes graves, en raison notamment du fait d’avoir ouvertement critiqué des dirigeants politiques kurdes, ces actes doivent être considérés comme non personnels pour les demandeurs, ces derniers étant, par ailleurs, restés en défaut d’établir des circonstances particulières permettant au tribunal de retenir qu’ils seraient susceptibles de faire l’objet d’actes similaires.
Concernant les menaces pesant sur les demandeurs de la part de milices chiites à cause de la confession religieuse sunnite de Monsieur …, telles que soulevées dans le cadre de la seconde demande de protection internationale, force est au tribunal de relever que ces craintes doivent être qualifiées, en ce qui concerne le cas particulier des consorts …, de purement hypothétiques, dans la mesure où les demandeurs ont vécu en Irak, et même de 2008 à 2015 à Bagdad, sans faire l’objet d’une quelconque menace, tant verbale qu’écrite, de la part d’une milice chiite.
S’agissant finalement de l’argumentation des consorts … quant à l’existence d’un conflit armé interne sévissant en Irak, il y a lieu de relever que la Cour administrative a, dans une série d’arrêts récents1, retenu que la situation conflictuelle y régnant actuellement ne saurait être qualifiée de conflit armé interne au sens de l’article 48 de la loi du 18 décembre 2015 en retenant que « […] Au regard de l’ensemble des éléments d’appréciation lui soumis, la Cour est amenée à reconnaître que la situation de sécurité était et reste dangereuse et précaire dans différentes parties de l'Irak, dont en particulier la ville de Bagdad, étant donné que les incidents violents continuent d’être nombreux et largement répandus. Si les derniers chiffres dont la Cour dispose témoignent indubitablement de nombreuses victimes dans la ville de Bagdad […], à savoir 86 civils tués dans des attentats au mois de mai 2017, 22 au courant du mois de juin 2017 et 38 au courant du mois de juillet 2017, et si le sort de chacune de ces victimes est en soi une tragédie épouvantable, il n’en reste pas moins que ces chiffres doivent être mis en relation avec le nombre total de la population vivant à Bagdad, à savoir environ 8 1 Cour adm. 7 décembre 2017, n°s 39944C, 39969C, 39992C, 40005C du rôle et du 12 décembre 2017, n°s 39980C et 39993C du rôle, ainsi que du 27 décembre 2017, n°40490C du rôle, disponibles sur www.ja.etat.lu millions d’habitants. Or, sur base de la mise en relation du nombre des victimes d’incidents violents avec la population totale, il n’appert pas que la simple présence d’un individu à Bagdad, l’expose ipso facto, avec un degré de probabilité certain, à des menaces individuelles graves. Ainsi, le seul fait d'être originaire d'Irak et, plus particulièrement, de Bagdad n’est pas un élément justifiant à lui seul et automatiquement l'octroi du statut conféré par la protection subsidiaire. […] ». Force est encore au tribunal de constater que les demandeurs sont restés en défaut de lui soumettre des éléments probants permettant d’invalider, en ce qui les concerne, ce constat.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à juste titre que le ministre a conclu qu’à l’appui de leur deuxième demande de protection internationale, les demandeurs n’ont pas fait valoir des éléments ou faits nouveaux augmentant de manière significative la probabilité qu’ils remplissent les conditions d’octroi d’un statut de protection internationale dont ils auraient été dans l’incapacité de se prévaloir dans le cadre de leur première demande de protection internationale, de sorte qu’il a valablement pu déclarer ladite demande irrecevable, en application des articles 28, paragraphe (2), point d) et 32 de la loi du 18 décembre 2015.
Il s’ensuit qu’à défaut d’autres moyens, le recours en annulation est à rejeter pour ne pas être fondé.
Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;
reçoit le recours en annulation en la forme ;
au fond le déclare non justifié, partant en déboute ;
condamne les demandeurs aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique extraordinaire du 15 janvier 2018 par :
Thessy Kuborn, vice-président, Paul Nourissier, premier juge, Géraldine Anelli, juge, en présence du greffier Marc Warken.
s.Marc Warken s.Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 15 janvier 2018 Le greffier du tribunal administratif 12