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19/12/2017 | LUXEMBOURG | N°38854

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 19 décembre 2017, 38854


Tribunal administratif N° 38854 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 décembre 2016 4e chambre Audience publique du 19 décembre 2017 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du directeur de l’administration des douanes et accises en matière d’affectation

JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 38854 du rôle, déposée au greffe du tribunal administratif le 13 décembre 2016 par Maître Jean-Marie Bauler, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, fonctionnaire de l’Etat, d

emeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation ...

Tribunal administratif N° 38854 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 décembre 2016 4e chambre Audience publique du 19 décembre 2017 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du directeur de l’administration des douanes et accises en matière d’affectation

JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 38854 du rôle, déposée au greffe du tribunal administratif le 13 décembre 2016 par Maître Jean-Marie Bauler, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, fonctionnaire de l’Etat, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des douanes et accises du 26 septembre 2016 par laquelle elle a été affectée à la Division Techniques de l’Information et de la Communication, Service Helpdesk, auprès de la Direction des douanes et accises à partir du 6 octobre 2016 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 17 février 2017 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 20 mars 2017 par Maître Jean-Marie Bauler pour compte de sa mandante ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 14 avril 2017 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jonathan Holler, en remplacement de Maître Jean-Marie Bauler, et Madame le délégué du gouvernement Betty Sandt en leurs plaidoiries respectives.

Vu l’avis du tribunal administratif du 12 décembre 2017 prononçant la rupture du délibéré et refixant l’affaire à l’audience des plaidoiries du 15 décembre 2017 en raison d’un changement de composition ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Danitza Greffrath en sa plaidoirie.

___________________________________________________________________________

Par un courrier du 4 juillet 2016, le directeur de l’administration des Douanes et Accises, ci-après dénommé le « directeur », s’adressa à Madame …, receveur, comme suit :

« (…) Madame le Receveur, Conformément à l'article 6.2. de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat, j'ai l'honneur de vous informer que j'envisage, pour des raisons de service, votre déplacement vers la Division Techniques de l'information et de la communication, service Helpdesk.

Veuillez me faire connaître par écrit vos observations éventuelles à l'égard de la décision projetée, dans les huit jours suivant la date de réception de la présente. Au cas où vous ne répondiez pas dans le délai fixé, j'admets que vous n'avez pas d'observations à formuler. (…) ».

Par un courrier du 12 juillet 2016, Madame … fit parvenir au directeur la prise de position suivante : « (…) Monsieur le Directeur, Je me permets de revenir à votre courrier du 4 juillet 2016, reçu en date du 6 juillet 2016, m'informant de votre intention de me déplacer en ma qualité de receveur de l'Administration des douanes et accises et du bureau de …, pour des raisons de service vers la Division technique de l'information et de la communication, service Helpdesk.

Dans le même courrier, vous m'attribuez un délai de huit jours pour présenter mes observations quant au changement d'affection projeté.

D'après l'article 6.2 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat, dans l'intérêt du service, le fonctionnaire peut être changé d'affectation avec ou sans changement de résidence, pourvu que le nouvel emploi ne soit inférieur ni en rang, ni en traitement. De plus, le fonctionnaire visé doit être entendu en ses observations.

Et d'après le même article n'est pas considérée comme diminution de traitement, la cessation d'emplois accessoires ni la cessation d'indemnités ou de frais de voyage, de bureau ou autre, lorsque la cause de ces indemnités vient à disparaître avec le nouvel emploi.

La lecture de l'article précité permet de dégager plusieurs conditions impérieuses pour qu'un changement d'affectation d'un fonctionnaire d'Etat, décidé par l'Administration, puisse s'effectuer.

La première et, par ailleurs, la condition maîtresse est celle de l'intérêt du service.

Selon la jurisprudence constante (TA 7.10.2002, n°14284, TA 23.7.2003, n°16017), le changement d'affectation opéré d'office, ce qui est le cas en l'espèce, peut être décidé à partir du moment où il intervient, soit dans l'intérêt du service dans lequel la nouvelle affectation doit être faite, soit dans celui où le fonctionnaire était affecté avant sa mutation. La liberté d'appréciation dont dispose l'administration pour décider un changement d'affectation d'un fonctionnaire se trouve limitée par la preuve à apporter par l'employeur que l'intérêt de l'un des deux services en question justifie le changement d'affectation projeté.

Malheureusement, votre courrier du 4 juillet 2016 fait ne me permet pas de dégager une quelconque preuve de l'intérêt du service sur lequel vous fondez votre intention de mon changement d'affectation.

Partant, Monsieur le Directeur, je vous prie de bien vouloir me faire parvenir la preuve exhaustive de l'intérêt du service concernant mon changement d'affectation projeté.

Par ailleurs, le changement d'affectation projeté concerne un poste où une grande partie des tâches à effectuer se fera par l'utilisation des technologies de l'information pour lequel le fonctionnaire, occupant le poste, doit avoir une affinité certaine et une qualification sans faille en matière informatique. (Référence :192/P du 25 janvier 2010) Selon description des tâches du receveur 1970/P Instruction sur le service des receveurs de l'administration des douanes et accises aucune mention ne qualifie un receveur pour une tâche au service Helpdesk.

Monsieur le Directeur, pourriez-vous me fournir les informations précises en quoi un receveur de l'administration des douanes et accises est dans l'intérêt du service la personne qualifiée pour occuper le poste précité qui prévoit des qualités professionnelles d'expert dans le domaine informatique.

A noter encore que d'après la même jurisprudence constante, le changement d'affectation du fonctionnaire d'Etat ne doit avoir aucune influence sur le rang, le traitement et la carrière du fonctionnaire concerné.

Il en résulte que l'administration doit garantir que le changement d'affectation ne comporte en aucun cas un préjudice disproportionné par rapport à l'intérêt du service.

D'après le règlement grand-ducal du 13 janvier 1994 déterminant les mesures d'exécution en matière de cabaretage et notamment celles concernant les formalités à observer lors de la renonciation à une licence volante de cabaretage, à un privilège de cabaretage et à un débit hors nombre de plein exercice ainsi que le transfert d'un tel droit de cabaretage, le receveur encaisse un salaire en sa qualité de fonctionnaire d'Etat. D'après la jurisprudence constante, le salaire d'un fonctionnaire d'Etat est à assimiler et à considérer comme faisant partie de son traitement de base. Il en résulte que mon changement d'affectation projeté aura une influence importante sur mon traitement ce qui est manifestement contraire aux dispositions de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat.

Par ailleurs, le poste de receveur et de préposé d'un bureau de douane d'une importance incontestable, est à considérer comme un poste à responsabilité. Le changement d'affectation projeté vers un poste sans aucune responsabilité notable me cause un préjudice disproportionné par rapport à l'intérêt du service non encore défini et prouvé. Le changement d'affectation projeté cause également préjudice à ma carrière. Il semble que ce changement a eu lieu après activités récentes dans ma fonction de président de l'… et que le déplacement vers la Division Techniques de l'information et de la communication, service Helpdesk est une sanction disciplinaire cachée.

En dernier lieu, et d'après la jurisprudence constante (TA 16.2.1998, CA 2.7.1998, TA 7.10.2002, CA 30.1.2003, TA 12.1.2005) le juge administratif doit rechercher si un changement d'affectation ne cache pas en réalité une sanction disciplinaire ou une mesure de harcèlement moral. A cette fin, il ne s'arrête pas à la lettre de la mesure prise par l'administration, mais lui restitue, s'il y a lieu, sa véritable qualification. Le tribunal doit s'interroger sur les effets de la mesure — existence d'une atteinte à la situation professionnelle du fonctionnaire — et sur ses motifs — grief contre le fonctionnaire -. La mesure prise est à considérer comme sanction disciplinaire ou harcèlement moral à partir du moment où la nature de la mesure est essentiellement répressive en ce sens qu'elle a objet de punir le fonctionnaire en raison de son sexe ou en raison d'autres fonctions. (Par ailleurs, toute mesure disciplinaire cachée par le biais d'un changement d'affectation est répréhensible au niveau administratif et pénal.) La présente ne peut en aucun cas être considérée comme un refus du changement d'affectation projetée. (…) ».

Par courrier du 20 juillet 2016, le directeur répondit en les termes qui suivent :

« (…) Madame le Receveur, Prenant référence à votre lettre du 12 juillet 2016 relative à ma proposition de vous affecter au service Helpdesk à la division Techniques de l'information et de la communication à la direction des douanes et accises, je prends note de votre prise de position.

Le poste au service Helpdesk, déclaré vacant sans succès à deux reprises, ne demande aucune connaissance informatique particulière. L'opérateur Helpdesk participe entre autres aux missions et tâches suivantes:

· soutien de première ligne des utilisateurs (externes et internes) des applications eDouane, · consignation des demandes d'aide des utilisateurs (externes et internes), · coordination des demandes de manière à assurer une résolution rapide et efficace des problèmes.

Il me tient à cœur non seulement de garantir, mais surtout d'augmenter la qualité des services offerts aux utilisateurs internes et externes. Non seulement l'expérience que vous avez acquise au cours des dernières années en tant que receveur au bureau de recette à … respectivement au Centre douanier … à …, mais également l'engagement dont vous faites preuve tous les jours, vous prédestinent pour le poste au service Helpdesk.

Je me dois de contredire énergiquement votre affirmation que le changement projeté a pour motif vos récentes activités en votre qualité de Président de l'….

Je conteste formellement votre annonce que le déplacement est une sanction disciplinaire cachée, cette affirmation ne base sur aucun élément tangible et factuel.

Tout en ayant pris en considération vos arguments, j'ai l'honneur de vous confirmer ma décision prise dans l'intérêt de service. La date d'entrée en fonction au service Helpdesk vous sera communiquée dans les meilleurs délais. (…) ».

Par un arrêté du ministre des Finances du 13 septembre 2016, Madame … a été nommé contrôleur adjoint à l’administration des Douanes et Accises avec effet au 19 septembre 2016.

En date du 26 septembre 2016, le directeur prit la décision suivante :

« (…) Vu la loi du 27 juillet 1993 portant organisation de l'administration des douanes et accises;

Vu l'article 6, chiffre 2. de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat, le fonctionnaire entendu en son avis;

Le Directeur des douanes et accises Décide:

Article 1er.- Madame … (Matricule …), contrôleur adjoint des douanes et accises, affecté au bureau de recette Centre douanier … à …, est affecté à la Division Techniques de l’Information et de la Communication, Service Helpdesk, à la Direction des douanes et accises, à partir du 6 octobre 2016. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 13 décembre 2016, Madame … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision précitée du 26 septembre 2016 décidant de son affectation, avec effet au 6 octobre 2016, à la Division Techniques de l’Information et de la Communication, Service Helpdesk, auprès de la Direction des douanes et accises.

Aucun recours au fond n’étant prévu en matière de changement d’affectation d’un fonctionnaire de l’Etat, de sorte que le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation lui soumis.

Il s’ensuit que seul un recours en annulation a pu être introduit en la matière.

Dans son mémoire en réponse, la partie gouvernementale conteste l'intérêt à agir de Madame …, alors que, quand bien même elle serait la destinataire d'une décision administrative organisationnelle interne à l'administration des douanes et accises, sa nouvelle affectation n'aurait pas d’impact sur ses droits statutaires.

Ainsi, le délégué du gouvernement souligne que le titre de receveur C serait une dénomination qui serait réservée au fonctionnaire qui occupe le poste de responsable d'un bureau de recette, de sorte que le titre en question s'acquerrait et se perdrait avec ledit emploi.

De même, le titre de receveur ne serait pas lié à une rémunération spécifique ou plus élevée que celui de contrôleur adjoint. Il s’en suivrait que Madame … n'aurait ni gagné ni perdu en termes de traitement, de grade ou d'avancement concernant sa carrière en vertu de la loi du 25 mars 2015 fixant le régime des traitements et les conditions et modalités d'avancement des fonctionnaires de l'État, dénommé ci-après « la loi du 25 mars 2015 », et ce, même si les primes perçues en raison de la fonction de receveur se verraient appelés « salaire » dans la règlementation afférente.

En ce qui concerne les responsabilités de Madame …, le délégué du gouvernement, s’il concède que le poste de receveur serait octroyé à des fonctionnaires très engagés et qu’une responsabilité particulière s'y trouverait rattachée, estime que l'intérêt personnel qu'un fonctionnaire tirerait de la responsabilité en tant que supérieur hiérarchique se trouverait toujours attaché à son emploi et non à sa personne, relevant à ce titre que, dans le cas de Madame …, son affectation au Helpdesk lui aurait permis de retrouver un poste à responsabilité en tant que supérieur hiérarchique dudit service de direction. Le délégué du gouvernement précise, dans son mémoire en réplique, que le grade d'un fonctionnaire définirait automatiquement sa place au sein de la hiérarchie dans l’administration des Douanes et Accises et que la qualité de supérieur hiérarchique deviendrait alors relative et se transmettrait d'un fonctionnaire à l'autre de façon automatique en fonction des agents des douanes et accises présents et de leurs grades respectifs. Une telle organisation fonctionnelle obligerait cependant le directeur à désigner des fonctionnaires afin d’assumer la fonction de responsable hiérarchique pour un service donné, même si, par après, un fonctionnaire supérieur en grade serait présent ensemble avec le désigné responsable, voire ferait partie du même service de ce dernier.

Quant aux indemnités particulières en relation avec le poste de receveur, la partie gouvernementale fait plaider que les indemnités revenant aux agents des douanes et accises du chef de leur intervention dans la perception de la taxe sur la valeur ajoutée et qui seraient allouées par l'administration de l'Enregistrement et des Domaines seraient en relation avec la mission où la tâche du responsable du bureau de recette, donc en contrepartie d'une mission ou d’une tâche spécifique. Même si Madame … n'assume dorénavant plus ladite mission, de sorte que les primes et indemnités ne lui sont plus dues, ceci n’aurait cependant aucune incidence sur les primes spécifiques rattachées à son grade, alors que les régimes de la prime d'astreinte et de la prime de risque lui resteraient entièrement acquis. Dans son mémoire en réplique, la partie gouvernementale précise en ce qui concerne les postes à responsabilité particulière et les primes y relatives, que le directeur aurait convenu avec la délégation du personnel de retenir, dans une phase transitoire, l'option de conférer lesdites primes aux fonctionnaires ayant pu prétendre au grade « bis » sous le régime statutaire avant la réforme dans la fonction publique de 2015.

En ce qui concerne le caractère subjectif d'une satisfaction certaine et personnelle, le délégué du gouvernement relève que la satisfaction personnelle ne saurait primer sur une décision traduisant un caractère nécessaire d'intérêt du service, qui, en l'occurrence, serait indiscutablement objectif, d'autant plus qu’il ne serait pas établi que la nouvelle fonction emporterait l’insatisfaction. Dans ce contexte, la partie gouvernementale souligne que la suppression du poste de receveur du bureau de … aurait été décidée par le directeur des douanes et accises ensemble avec la représentation du personnel, dont Madame … aurait fait partie en tant que co-présidente. De même, les nominations aux différents grades de la carrière du fonctionnaire et qui feraient l'objet d'arrêtés ministériels, ne seraient pas en relation immédiate avec l'emploi confié au fonctionnaire en vertu des décisions organisationnelles du directeur des douanes et accises. Même si l'affectation au Helpdesk plaisait moins à Madame …, l'insatisfaction subjective ressentie par elle et par d’autres personnes affectées par la réorganisation ne pourrait raisonnablement contrecarrer la réorganisation des services, négociée avec la délégation du personnel sous peine de faire échec à toute restructuration, adaptation, rationalisation et modernisation de l’administration des Douanes et Accises.

Madame …, dans son mémoire en réplique, estime que son intérêt à agir ne pourrait pas être remis en cause, alors que suite à la suppression du poste de receveur, elle perdrait notamment des indemnités de remplacement d'un receveur, ainsi qu'une indemnité pour perception TVA et salaire du receveur.

Elle relève que, sur le plan des responsabilités, elle serait devenue supérieur hiérarchique seulement en termes de grade, et non de fonction ou de poste, par rapport aux autres collaborateurs du Helpdesk, et ce, du seul fait qu’un collaborateur hiérarchiquement supérieur en grade aurait quitté le dit service en date du 1er janvier 2017.

En revanche, les postes à responsabilité n'auraient jamais été définis par la direction de l’administration des Douanes et Accises, pas plus que la prime pour poste à responsabilité n'aurait été publiée.

Ce serait encore manifestement à tort que la partie gouvernementale confondrait intérêt à agir et contrôle du bien-fondé des motifs de la décision sous examen, alors qu’au stade de la vérification de l'intérêt à agir individuel, il y aurait seul lieu d’apprécier la satisfaction certaine et personnelle et non l’intérêt général.

Il serait encore excessif de prétendre que la représentation du personnel aurait donné son accord à l'organigramme, puisque qu'aucun accord de suppression ne serait intervenu, compte tenu du fait qu'il n'y aurait jamais eu de discussion sur les tâches, ni concernant les missions et encore moins concernant les fonctions.

En ce qui concerne le défaut d’intérêt à agir, il y a lieu de rappeler que l’intérêt pour agir est l’utilité que présente pour le demandeur la solution du litige qu’il demande au juge d’adopter1.

Pour justifier d'un intérêt à agir il faut pouvoir se prévaloir de la lésion d'un intérêt personnel dans le sens que la réformation ou l'annulation de l'acte attaqué confère au demandeur une satisfaction certaine et personnelle2.

C’est d’abord à bon droit que Madame … a souligné que l'intérêt à agir n'est pas à confondre avec le fond du droit en ce qu'il se mesure non au bien-fondé des moyens invoqués à l'appui d'une prétention, mais à la seule satisfaction que la prétention est censée procurer à une partie, à supposer que les moyens invoqués soient justifiés3, de sorte que la mise en balance de l’intérêt à agir de Madame … avec l’intérêt général ayant justifié son affectation n’est pas à prendre en considération à ce stade-ci des développements.

En l’occurrence, force est au tribunal de retenir que Madame … a un intérêt manifeste à agir contre la décision litigieuse par laquelle elle est affectée à un nouveau service auprès duquel elle ne touchera plus les indemnités liées à la fonction de receveur qu’elle occupait auparavant. En effet, pareilles mesures dépassent la simple organisation de l’exécution du service de l’intéressée et elles modifient sensiblement sa situation professionnelle4.

Le moyen tendant à voir déclarer irrecevable le recours de Madame … pour défaut d’intérêt à agir dans son chef laisse partant d’être fondé, de sorte qu’il y a lieu de le rejeter.

1 Encyclopédie Dalloz, Contentieux administratif, V° Recours pour excès de pouvoir (Conditions de recevabilité), N°247.

2 trib. adm. 22 octobre 2007, n° 22489 du rôle, Pas. adm. 2017, Procédure contentieuse, n° 9 et les autres références y citées.

3 ordonnance prés., 27 septembre 2002, n° 15373 du rôle, Pas. adm. 2017, Procédure contentieuse, n° 4 et les autres références y citées.

4 En ce sens : Cour adm, 4 mars 2010, n°25876C du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu Aucun autre moyen d’irrecevabilité n’ayant été soulevé en cause, le recours en annulation est à déclarer recevable pour avoir été introduit, par ailleurs, dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours et en fait, la demanderesse explique être entrée au sein de la fonction publique le 1er juillet 2008 et avoir été nommée, le 5 février 2014, chargée de gestion faisant fonction du bureau de recette des douanes et accises à … à partir du 1er mars 2014 puisque à l'époque, elle n’aurait pas disposé du grade nécessaire pour exercer les fonctions de receveur. Ce serait par arrêté ministériel du 30 mai 2016 qu’elle aurait été nommée receveur C à l'administration des douanes et accises avec effet au 1er juin 2016.

Elle fait finalement valoir qu’en date du 4 février 2016, elle aurait fait l'objet d'un ordre de justification, alors qu'elle aurait participé à une réunion au ministère des Finances « à propos de l'affaire de la stagiaire [S. D.C.] ».

En ce qui concerne la réorganisation au sein de l’administration des Douanes et Accises, la demanderesse souligne que si le poste de receveur de … a été également aboli, le fonctionnaire concerné serait cependant maintenu physiquement dans son bureau.

Elle affirme également dans ce contexte que, contrairement aux assertions de la partie gouvernementale, il ressortirait très clairement de la lettre lui adressée de la part des chargés du groupe de travail de l'Organigramme en date du 16 mars 2017 en sa qualité de présidente de l'…, que ledit organigramme ne comporterait que des cases contenant le nom des services, mais sans description ni des tâches, ni des missions, ni des fonctions.

De même, la lettre du 14 juin 2016, des représentants du personnel des douanes et accises … et … aurait souligné que l'avis favorable donné ne se baserait que sur cet organigramme qui devrait être suivi d'une définition exacte des compétences et responsabilités ainsi que d'une description détaillée. Il n’y aurait, ainsi, jamais eu d’aval relatif à la suppression des postes de receveur des Bureaux … et … de la part de la représentation du personnel.

Il ne ressortirait, par ailleurs, pas du nouvel organigramme qu'une nouvelle affectation serait devenue nécessaire dans son chef.

D’après la demanderesse, ce serait encore à tort que la partie gouvernementale ferait référence à un « guichet régional », dans la mesure où cette qualification n'existerait pas officiellement. Il s'agirait en réalité du Bureau de recette Centre Douanier …, dont les tâches seraient restées inchangées, à savoir qu’il n'y aurait ni cessation d'indépendance, ni cessation d'autonomie et que ledit bureau devrait se trouver sous la responsabilité directe d'un receveur ayant son bureau sur place afin de pouvoir réceptionner les sommes dues au Trésor, ce qu’un receveur centralisé ne pourrait pas légalement faire, tel que les missions des receveurs seraient prévues par l'instruction concernant le service des receveurs (1970/P) du 14 décembre 2012.

De plus, la demanderesse relève que la partie gouvernementale n'expliquerait nullement pourquoi en date du 17 octobre 2016, c'est à dire quelques jours après son départ, la direction aurait procédé à une augmentation de l'effectif au Centre douanier … par l'affectation d'une collaboratrice supplémentaire, ce qui serait en parfaite contradiction avec les assertions de la partie gouvernementale selon lesquelles la nouvelle affectation litigieuse serait à considérer comme une « mesure de rationalisation laquelle permet[rait] de restructurer l’administration ».

Le fait que l'administration des Douanes et Accises n'ait enregistré aucune candidature pour le poste litigieux du Helpdesk démontrerait à suffisance les contraintes et les carences du poste en question. Par ailleurs, en date du 1er janvier 2017, le supérieur hiérarchique du Helpdesk aurait été réaffecté à un autre service.

Finalement, Madame … conteste formellement l'assertion selon laquelle elle aurait reçu une proposition pour le poste de responsable du service Helpdesk.

En droit, la demanderesse conclut à l’annulation de la décision déférée pour avoir été prise en violation des articles 2, paragraphe 2, 6 et 56 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, dénommé ci-après « le statut général », de même que de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l'Etat et des communes, dénommé ci-après « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », ainsi que pour être disproportionnée puisque basée sur une erreur manifeste d’appréciation.

Elle souligne finalement qu’il y aurait lieu de veiller au strict respect de l’article 8, paragraphe (5), de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, dénommée ci-après « la loi du 21 juin 1999 », et sollicite encore une indemnité de procédure d’un montant de 1.000,- €, ainsi que le bénéfice de l’effet suspensif de son recours pendant le délai et l’instance d’appel sur base des articles 33, respectivement 35, alinéa 1er de la même loi.

A titre liminaire et en ce qui concerne le souhait de la demanderesse de veiller au strict respect de l’article 8 (5) de la loi du 21 juin 1999, suivant lequel l'autorité qui a posé l'acte visé par le recours doit déposer le dossier au greffe sans autre demande, dans le délai de trois mois à partir de la communication du recours, force est au tribunal de relever que cette demande n’est plus réitérée suite à la communication par la partie gouvernementale du dossier administratif ensemble avec son mémoire en réponse, de sorte qu’à défaut pour la demanderesse d’avoir signalé dans son mémoire en réplique que le dossier tel que versé aux débats n’est pas complet, cette demande est à considérer comme étant devenue sans objet et doit être rejetée.

En ce qui concerne ensuite les différents moyens invoqués à l’encontre de la décision du 26 septembre 2016, il échet de rappeler qu’en présence de plusieurs moyens invoqués, le tribunal n'est pas lié par l'ordre dans lequel ils lui ont été soumis et détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l'effet utile s'en dégageant, de manière que les moyens tenant à la validité formelle d'une décision doivent être examinés, dans une bonne logique juridique, avant ceux portant sur son caractère justifié au fond.5 Quant à la légalité externe, la demanderesse fait notamment plaider que la décision déférée violerait l'article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, en raison du fait qu’elle ne serait pas motivée, la demanderesse faisant valoir que la simple référence à des « raisons d'intérêt du service » ne suffirait pas à cet égard, ainsi que cela se dégagerait des 5 trib. adm. du 31 mai 2006, n °21060 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 440 et les autres références y citées.

considérations d’un arrêt de la Cour administrative du 14 juin 2011, inscrit sous le n° 28069C du rôle.

Aux termes de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 « Toute décision administrative doit baser sur des motifs légaux.

La décision doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base, lorsqu’elle :

(…) révoque ou modifie une décision antérieure, sauf si elle intervient à la demande de l’intéressé et qu’elle y fait droit ; (…) ».

Si la décision déférée du 26 septembre 2016, outre les deux références expresses aux textes de loi sur lesquelles le directeur se fonde, ne comporte certes pas elle-même une indication au moins sommaire des circonstances de fait à sa base, c’est cependant à bon droit que le délégué du gouvernement a conclu au rejet de ce moyen, alors que la demanderesse n’ignore pas les motivations factuelles de la décision déférée, ressortant en effet de manière exhaustive du courrier du directeur du 20 juillet 2016, cité in extenso ci-avant, adressée à la demanderesse en réponse aux observations de cette dernière, ce courrier faisant référence à la procédure de réorganisation au sein de l’administration des Douanes et Accises, à la suppression du poste occupé auparavant par la demanderesse, ainsi qu’à l’intérêt du service à la base de la nouvelle affectation de cette dernière.

En effet, il est de jurisprudence que le reproche tiré d'une absence de motivation d'un acte administratif est à abjuger, dès lors que la décision attaquée ensemble avec les lettres antérieures adressées au même destinataire indiquent de manière détaillée et circonstanciée les motifs en droit et en fait sur lesquels l'administration s'est basée pour justifier sa décision, ces motifs ayant ainsi été portés à suffisance de droit à la connaissance de l'administré6.

Il s’ensuit que, par le fait de mentionner expressément que la demanderesse a été entendue en son avis dans le cadre de la phase précontentieuse, la décision incriminée est censée se baser sur les motifs d’ores et déjà communiqués à cette dernière, de sorte qu’elle n’est pas de nature à violer le prescrit de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, étant, par ailleurs, relevé que la motivation directoriale a encore été amplement précisée dans le cadre du mémoire en réponse déposé en la cause par la partie gouvernementale.

Il s’ensuit que le moyen relatif à une violation de l'article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 est à rejeter.

La demanderesse conclut ensuite à une violation de l’article 2, paragraphe 2 du statut général, alors que, contrairement aux exigences dudit article, il ne résulterait pas du dossier administratif qu'avant la prise de la décision litigieuse, le poste aurait été déclaré vacant, de sorte qu’en application d’une jurisprudence du tribunal administratif du 7 novembre 2013, inscrit sous le n° 31461 du rôle, la décision déférée serait à annuler de ce chef.

6 trib. adm 13 novembre 1997, n°10268 du rôle, conf. Cour adm. 24 mars 1998, n°10458C du rôle, Pas. adm.

2017, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 59 et les autres références y citées.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen, alors que cet article ne trouverait pas application en l'espèce.

Aux termes de l’article 2, paragraphe (2) du statut général, « Avant d'être pourvue d'un titulaire, toute vacance de poste doit obligatoirement être portée à la connaissance des intéressés par la voie appropriée. Il y a lieu de préciser à chaque fois si la vacance de poste doit être pourvue par voie de recrutement externe ou par voie de recrutement interne. ».

Mis à part le constat non énervé en cause qu’il ressort du dossier administratif que le poste auquel la demanderesse a été affectée a bel et bien été déclaré vacant notamment par des avis des 4 mai et 24 juin 2016, force est de relever que le moyen d’annulation invoqué par la demanderesse, sur base de la jurisprudence précitée, ne saurait aboutir, le jugement du tribunal administratif du 7 novembre 2013, inscrit sous le n° 31461 du rôle, ayant pris soin de préciser que l’obligation de publication de toute vacance de poste prévue à l’article 2, paragraphe 2 du statut général ne constitue pas une fin en soi, mais tend à assurer que tout intéressé ait connaissance de la vacance de poste, afin qu’il puisse, le cas échéant, poser sa candidature afférente. Dès lors, si l’administration n’est certes pas dispensée de l’obligation de publication d’un poste vacant imposée par l’article 2, paragraphe 2 du statut général, il n’en demeure pas moins qu’un fonctionnaire, ayant pu déposer sa candidature pour un poste vacant dans les formes et délai légaux, ne pourra pas valablement se prévaloir de l’absence de publication du poste à pourvoir, étant donné que ses droits ont été préservés et que le vice de procédure ne lui cause aucun grief. Seule la personne qui n’a pas eu la possibilité de postuler pour un poste donné peut invoquer une violation de l’article 2, paragraphe (2) du statut général.

La situation de la demanderesse, en raison du fait qu’elle occupe actuellement le poste litigieux, étant tout autre, le moyen relatif à une violation de l’article 2, paragraphe (2) du statut général est à rejeter.

La demanderesse conclut ensuite à une violation de l’article 6 du statut général, alors que, d'une part, la décision s'analysant de facto et de iure comme un changement de fonctions, il aurait appartenu au ministre des Finances et non au directeur de prendre la décision déférée, et, d'autre part, la décision déférée aurait entraîné, dans son chef, l’attribution d’un emploi inférieur en rang contrairement aux exigences de l'article 6, paragraphe (5), de sorte que la décision attaquée devrait encourir la nullité.

Dans son mémoire en réplique, la demanderesse précise, à ce sujet, que la partie gouvernementale se contredirait à cet égard en prétendant, d’un côté, qu’il n'y aurait pas eu de changement de fonction, pour constater, d’un autre côté, que le changement de fonction serait intervenu avec effet au 1er juin 2016.

Ce serait encore à tort que le délégué du gouvernement affirmerait notamment que la circulaire datant du début de la mise en œuvre du « Paperless Douanes et Accises (PLDA) » n'aurait plus rien à voir avec les réalités du rôle du Helpdesk en 2016, étant donné que, premièrement, il aurait été davantage pertinent de soutenir que les réalités du rôle du Helpdesk en 2016 n'auraient absolument rien à voir avec les réalités du rôle du receveur au bureau de recette et, en second lieu, le courrier du 20 juillet 2016 du directeur se contredirait lui-même en soutenant que le poste de l'opérateur Helpdesk, soutien de première ligne des utilisateurs des applications eDouane, ne demanderait aucune connaissance informatique particulière, alors que la lettre du 1er avril 2014 du responsable Division Technique énoncerait que le Helpdesk assurerait le suivi de la résolution des incidents techniques d'où la nécessité de continuellement former des ressources en supplément à leurs tâches quotidiennes, ainsi que la nécessité de parfaire la formation dans un horizon de trois à cinq ans. Elle rappelle qu’elle aurait occupé un poste de la carrière B1 administratif et non pas technique et qu’elle ne pourrait se prévaloir d'études ni de technicien, ni d'informaticien.

Contrairement aux assertions de la partie gouvernementale, les receveurs seraient devenus des gestionnaires du bureau dont les missions principales seraient l'organisation du personnel, les tâches administratives et la comptabilité.

Madame … souligne encore que le poste lui imposé serait bien un poste d'un simple « opérateur Helpdesk » et, en aucun cas, un poste de supérieur, de chef de service ou un poste à responsabilité.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen en soulignant qu'il ne se serait, en l’occurrence, pas agi d'un changement de fonction en vertu de l’article 6, paragraphe (3) du statut général, mais bien d’un changement d'affectation au sens du paragraphe (2) de ce même article, de sorte que le directeur aurait été compétent pour en décider en sa qualité de chef de l'administration.

Même s’il concède que la comparaison entre emplois au sein d'une même administration ne serait pas une science exacte, le délégué du gouvernement estime qu’il ressortirait de façon objective de l'organigramme fonctionnel de l'administration des Douanes et Accises que le nouvel emploi de Madame … relèverait des services de direction, alors qu'auparavant elle aurait occupé un poste classé parmi les services d'exécution, de sorte qu’il ne saurait en résulter un emploi inférieur en rang, tout en relevant que le poste auprès du Helpdesk serait un pilier essentiel de l'administration des Douanes et Accises en termes de prestataire de services, ainsi que pour l'image de marque de l'administration. Il ne s’agirait pas non plus d’un poste informatique. En effet, même si, suite à l'introduction de « Paperless douanes et accises (PLDA) », le Helpdesk a été conçu à ses débuts dans son essence comme une aide informatique aux clients, la circulaire afférente, qui daterait donc du début de la mise en œuvre du « PLDA » n'aurait plus rien à voir avec les réalités du rôle du Helpdesk en 2016, ce qui aurait été précisé par le directeur dans sa réponse du 20 juillet 2016 aux observations de Madame … du 12 juillet 2016. Cette dernière aurait également eu un entretien personnel avec la directrice adjointe de l’administration des Douanes et Accises qui lui aurait expliqué clairement que le Helpdesk assurerait à l'avenir aussi, entre autres, le nouveau rôle de centralisateur des statistiques de l'Administration, de gestionnaire de l'adresse de contact officiel de la direction des douanes et accises et de coordinateur du nouveau site Internet.

Le délégué du gouvernement fait finalement valoir que le nouvel emploi de la demanderesse ne serait pas non plus à considérer comme emploi inférieur en traitement alors que la décision du 26 septembre 2016 ne serait pas de nature à entraîner un impact sur le traitement de Madame ….

En ce qui concerne d’abord la compétence du directeur pour prendre la décision déférée, il échet au tribunal de déterminer si cette dernière doit être considérée comme un changement d’affectation ou un changement de fonction.

En effet, aux termes de l’article 6, paragraphe (2) du statut général « Le fonctionnaire peut faire l'objet d'un changement d'affectation, avec ou sans changement de résidence. Par changement d'affectation il y a lieu d'entendre l'assignation au fonctionnaire d'un autre emploi correspondant à la fonction dont il est investi au sein de son administration. Le changement d'affectation peut intervenir d'office dans l'intérêt du service ou à la demande de l'intéressé : il est opéré par le chef de l'administration dont le fonctionnaire relève. », alors qu’aux termes de du 3ième paragraphe de la même disposition « Le fonctionnaire peut faire l’objet d’un changement de fonction, avec ou sans changement de résidence. Par changement de fonction il y a lieu d’entendre la nomination du fonctionnaire à une autre fonction «du même sous-groupe» et du même grade, au sein de son administration.

Le changement de fonction peut intervenir d’office dans l’intérêt du service ou à la demande de l’intéressé; il est opéré par l’autorité investie du pouvoir de nomination. » Il est constant que la demanderesse a été nommé, par un arrêté du ministre des Finances non critiquée du 13 septembre 2016, à la fonction de contrôleur adjoint à l’administration des Douanes et Accises avec effet au 19 septembre 2016 et que, par la décision déférée du 26 septembre 2016, cette fonction de contrôleur adjoint n’a pas été remise en cause, étant donné que c’est dans cette fonction qu’elle est affectée au Helpdesk. Il en résulte que, par la décision litigieuse, la demanderesse n’a pas subi de changement de fonction au sens de l’article 6, paragraphe (3) du statut général, qui s’applique uniquement aux changements de fonction au sein du même sous-groupe de traitement, du même grade, au sein d’une même administration, en l’occurrence au grade 9 du sous-groupe douanes du groupe de traitement B1 de l’administration des Douanes et Accises, le dit sous-groupe comprenant, suivant l’annexe de la loi modifiée du 25 mars 2015 fixant le régime des traitements et les conditions et modalités d’avancement des fonctionnaires de l’Etat, dénommée ci-après « la loi du 25 mars 2015 », les fonctions suivantes : contrôleur adjoint, receveur C et chef de bureau informaticien adjoint.

Etant donné que la demanderesse continue, après le 6 octobre 2016, à occuper la fonction de contrôleur adjoint qu’elle occupait déjà depuis le 19 septembre 2016, la décision déférée du 26 septembre 2016 n’a pas eu pour conséquence d’opérer un changement de fonction dans son chef, de sorte que l’article 6, paragraphe (3) du statut général ne trouve pas application en l’espèce. Il s’ensuit que la décision déférée ne devait pas être prise par le ministre des Finances et que le moyen relatif à une violation de l’article 6, paragraphe (3) du statut général est partant à rejeter.

En ce qui concerne le deuxième volet du moyen, basé sur une prétendue violation de l’article 6, paragraphe (5) du statut général disposant que « Les changements d’affectation, de fonction et d’administration opérés d’office ne peuvent comporter l’attribution au fonctionnaire concerné d’un emploi inférieur en rang ou en traitement; avant toute mesure, le fonctionnaire concerné doit être entendu en ses observations.

N’est pas considérée comme diminution de traitement au sens du présent paragraphe la cessation d’emplois accessoires ni la cessation d’indemnités ou de frais de voyage, de bureau ou d’autres, lorsque la cause de ces indemnités vient à disparaître avec le nouvel emploi. », force est au tribunal de relever que c’est à bon droit que la partie gouvernementale souligne que ni le rang, ni le traitement de la demanderesse ne se trouvent affectés par la décision déférée.

Dans ce contexte, il a été jugé que l'appréciation du caractère inférieur en rang ou non d'un emploi ou d'une fonction n'est pas fonction d'éléments extérieurs au fonctionnaire concerné en ce sens qu'elle dépendrait de la nature des emplois ou fonctions revêtus par d'autres personnes au sein d'un même département ministériel, mais s'articule exclusivement autour des dispositions légales et réglementaires régissant intrinsèquement les fonctions et emplois revêtus respectivement avant et après le changement litigieux. Il s’ensuit qu’à partir du constat qu’un fonctionnaire, tout en ayant été affecté à un autre département est resté nommé à la même fonction au sein de la même administration, le moyen basé sur l’attribution dans son chef d’un emploi inférieur en rang par rapport à celui qu’il occupait préalablement laisse d’être fondé7. Ainsi, la comparaison avec les tâches d’un receveur, respectivement avec d’autres fonctionnaires du même rang ne sont d’aucune pertinence dans ce contexte.

Comme il vient d’être relevé ci-avant, la demanderesse a conservé tant son titre que son grade, de même que son traitement lors de sa réaffectation à la Division technique de l’information et de la communication, Service Helpdesk, au sein de la Direction des douanes et accises, de sorte qu’elle n’a subi aucun désavantage du fait du changement d’affectation opéré à son égard par la décision sous examen du 26 septembre 2016. Le fait qu’elle doive effectuer d’autres tâches que celles exécutées auparavant en tant que receveur ne saurait avoir la moindre influence à ce niveau, étant donné que, d’une part, au moment de la décision déférée, Madame … n’occupait déjà plus la fonction de receveur et, d’autre part, il est de jurisprudence qu’un changement d’affectation peut se traduire par un changement du lieu de travail ou par l’exercice d’autres responsabilités que celles que l’agent s’est vu assigner auparavant8.

Dans le même ordre d’idées - Madame … n’ayant plus été receveur au jour de la décision déférée - il n’y a pas non plus lieu de prendre en considération la perte des primes liées directement à la tâche spécifique de receveur, telles que notamment les « salaires » prévus dans la règlementation afférente, d’autant plus que ces primes sont expressément exclues en ce qui concerne l’appréciation d’une diminution de traitement en application de l’alinéa 2 du 5ième paragraphe de l’article 6 du statut général.

Le moyen relatif à une violation de l’article 6 du statut général est partant à rejeter en ses deux branches.

En quatrième lieu, la demanderesse estime que la décision déférée emporterait violation des articles 56 et suivants du statut général, alors qu’il s’agirait manifestement d’une sanction disciplinaire cachée, en ce qu’elle aurait ainsi subi de facto et de jure la peine disciplinaire du déplacement, de sorte qu’il appartiendrait au juge administratif, en application d’une jurisprudence constante et bien établie, de ne pas s'arrêter à la lettre de la mesure prise par l'administration, mais de lui restituer sa véritable qualification, en s'interrogeant sur les effets de la mesure, l’existence d'une atteinte à la situation professionnelle du fonctionnaire, ainsi que sur ses motifs, tels que des griefs contre le fonctionnaire. Ainsi, la mesure prise constituerait une sanction disciplinaire à partir du moment où la nature de la mesure serait essentiellement répressive du fait de sanctionner un manquement du fonctionnaire à l'une de ses obligations professionnelles.

7 En ce sens : trib. adm 18 mars 2002, n° 12086 du rôle, conf. Cour adm. 8 octobre 2002, n° 14845C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Fonction publique, n° 188.

8 Cour adm. 19 janvier 2012, n° 28923C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Fonction publique, n° 169 et l’autre référence y citée.

La demanderesse relève, à ce titre, que la décision litigieuse porterait en effet atteinte à sa situation professionnelle, étant donné qu’elle serait forcée de quitter ses fonctions pour un poste au Helpdesk pour lequel elle n'aurait aucune qualification idoine et que cette décision aurait comme conséquences une perte pécuniaire, ainsi qu’une perte de responsabilité. De même, sa situation privée et syndicale en serait négativement affectée en ce que ses droits de représentant du personnel se verraient enfreints du fait qu’elle ne disposerait plus de bureau individuel lui permettant d'exercer ses fonctions garanties par le statut. Elle rappelle, dans ce contexte, que ses nouvelles fonctions n’auraient pas suscité un grand intérêt auprès des autres fonctionnaires, puisque de l'aveu du directeur, le poste aurait été déclaré vacant sans succès à deux reprises.

Dans son mémoire en réplique, la demanderesse précise, à ce sujet, que la défiance de la direction à son égard ne serait pas récente et ne saurait être contestée, étant donné que ses rapports avec la hiérarchie se seraient détériorés dès le moment où elle aurait refusé, en sa qualité de représentante du personnel, de soutenir la position de la direction souhaitant résilier le stage d’un dénommé Monsieur D. C.. Ainsi, l'ordre de justification, dont elle n'aurait jamais été informée qu’il aurait fait l’objet d’un éventuel classement sans suite, de même que la décision litigieuse devraient être replacés dans ce contexte manifestement conflictuel.

La demanderesse souligne encore que la partie gouvernementale ferait preuve d'un « cynisme non équivoque » en soutenant, en vain, que la suppression du poste de responsable hiérarchique du bureau des recettes de … et l'affectation au Helpdesk devraient être considérées comme une promotion dans son chef, alors que la seule comparaison entre les intitulés des deux postes permettrait de soupçonner légitimement l'intention de nuire du directeur à son égard. Dans ce contexte, la comparaison de sa situation avec l'ancien receveur de … serait plus que pertinente, dans la mesure où le traitement lui réservé n'aurait absolument pas été le même. Elle relève encore que si sa nouvelle affectation était aussi valorisante que tenterait de le faire croire la partie gouvernementale, il y aurait lieu de s'interroger pourquoi elle aurait été le seul receveur à bénéficier d'une affectation d'office audit poste qu’aucun fonctionnaire n'aurait jamais sollicité.

Etant donné que le détournement de pouvoir à la base d’une sanction disciplinaire cachée, voire l'intention de la direction de porter atteinte aux droits syndicaux, ne se manifesterait rarement, sinon jamais de manière ouverte et aisément identifiable, il aurait lieu de considérer le faisceau d'indices à la base de son doute légitime y relatif, tout en relevant qu’il appartiendrait à la partie étatique d'apporter la preuve susceptible de contredire les moyens soulevés. Or, la partie étatique laisserait d'être convaincante lorsqu'elle se contenterait d'invoquer, de manière vague et générale, l'intérêt du service pour justifier l'affectation litigieuse tout en lui reprochant d'avoir exercé un recours juridictionnel.

Il s'ensuivrait que la décision serait à annuler puisque l'autorité aurait dû respecter les dispositions impératives régissant la procédure disciplinaire, ce qu'elle n'aurait pas fait.

Quant à l’absence de mise à disposition d’un bureau individuel lui permettant d'exercer ses fonctions garanties par le statut général, la demanderesse fait encore répliquer que l'affirmation selon laquelle la direction lui aurait assuré de pouvoir toujours recourir, en cas de besoin, à l'une des salles de réunion relèverait manifestement de la déclaration d'intention, alors que toutes les réservations de salles auraient été spontanément, et sans motif, supprimées par la direction.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen en soulignant que la décision d'affectation sous examen ne saurait être interprétée comme constituant un déplacement entaché d'illégalité car traduisant le caractère d'une sanction disciplinaire, alors que la demanderesse ferait un amalgame entre un ordre de justification lui décerné suite à une situation datant de janvier 2016 et l'annonce du directeur en juillet 2016 d'envisager son affectation à un nouvel emploi, suite à la suppression du sien.

En ce qui concerne l'ordre de justification, le délégué du gouvernement relève que le directeur l'aurait classé sans aucune suite après avoir reçu les explications de Madame …. Il fait encore remarquer, dans sa duplique, que la direction de l’administration des Douanes et Accises aurait d’ailleurs accepté le jugement administratif rendu dans l'affaire D. C..

Il s’oppose encore à l'assertion de la demanderesse selon laquelle le directeur l’aurait réaffectée à cause de son rôle de présidente du syndicat … et de co-présidente de la représentation du personnel, alors que le poste occupé par Madame … aurait été supprimé par la restructuration de l'organigramme élaborée et fixée par le directeur ensemble avec la représentation du personnel conformément à l'article 36 du statut général avant que le résultat de ces travaux conjoints aurait été soumis pour approbation au ministre de tutelle.

Il réfute également la pertinence de l’allégation de la demanderesse selon laquelle l'emploi lui confié auprès du Helpdesk serait un poste sans responsabilité lui causant ainsi un préjudice, En ce qui concerne la comparaison entre la situation de la demanderesse et celle du fonctionnaire, ancien receveur de …, affecté au bureau de recette de Luxembourg sis à …, le délégué du gouvernement réplique que le fait que ce dernier serait encore physiquement présent à …, alors qu'elle a été obligée de rejoindre le bureau du Helpdesk situé à la direction des douanes et accises à Hamm, s’expliquerait par la circonstance suivant laquelle que le Centre douanier … et donc aussi le bureau de recette de Luxembourg aurait fait l'objet de grands travaux de rénovations et de réfections qui ne seraient pas terminés, pour ce qui est du bureau à occuper par le fonctionnaire susvisé, avant le 2 janvier 2017. Il n’y aurait, dès lors, aucune discrimination préjudiciable à l’égard de la demanderesse.

Madame … aurait fait l'objet d'une décision d'affectation à un service de direction dont l'importance serait objectivement incontestable et pour lequel son profil correspondrait parfaitement, même si elle soutiendrait le contraire.

Quant au refus d’accepter sa candidature à un poste déclaré vacant auprès de l'Inspection douanes et accises le 28 septembre 2016, le délégué du gouvernement souligne qu'en tout, quatre demandes auraient été présentées au directeur dont, à côté de celle de Madame …, une deuxième demande émanant d'un fonctionnaire du groupe de traitement B1 affecté au Helpdesk et qu’aucune des deux demandes présentées par les fonctionnaires du Helpdesk n'aurait été retenue.

Madame … ne préciserait pas non plus de quelle manière ses droits syndicaux seraient enfreints par le directeur, alors que les réservations de salles effectuées par les syndicats … et … n'auraient pas été supprimées spontanément et sans motifs, relevant qu’à aucun moment une plainte y relative ni de l'… ni du … n’aurait d’ailleurs été réceptionnée par le directeur.

Même si la demanderesse n'a actuellement plus de bureau individuel à sa disposition, elle aurait elle-même, ensemble avec le président du deuxième syndicat, informé le directeur qu'ils entendraient se partager ensemble un bureau pour le travail en relation avec leurs tâches de co-présidents de la représentation du personnel, de sorte que la direction leur aurait assuré de pouvoir toujours recourir, en cas de besoin, à l'une des salles de réunion situées dans les bureaux de la direction de l’administration des Douanes et Accises.

S’il est vrai qu’une décision de changement d’affectation peut, dans certaines circonstances, constituer une sanction disciplinaire déguisée9 et qu’il appartient au juge administratif de s’interroger concrètement sur les effets de la décision sur la situation professionnelle de l’intéressé au regard des circonstances particulières l’ayant entourée pour vérifier si sa nature est essentiellement répressive causant un préjudice disproportionné au fonctionnaire par rapport à l'intérêt du service10, force est au tribunal de retenir qu’en l’espèce, la demanderesse ne fournit pas d’éléments permettant de parvenir à une telle conclusion, et ce, notamment au regard des explications circonstanciées, reproduites ci-avant, de la part de la partie gouvernementale au sujet du faisceau d’indices y relatifs invoqué par la demanderesse, ensemble la motivation exhaustive relative à l’intérêt de service telle qu’elle ressort du courrier directorial du 20 juillet 2016.

En effet, force est de relever qu’il ne ressort d’aucun élément objectif du dossier administratif que la décision ne serait pas fondée sur l’intérêt du service invoquée, mais qu’elle serait justifiée par un conflit personnel entre la direction de l’administration des Douanes et Accises et la demanderesse, conflit qui n’est établi ni d’un point de vue strictement professionnel ni d’un point de vue syndical, alors qu’aucun manquement professionnel n’est reproché à la demanderesse et qu’il ne ressort d’aucun élément tangible que la direction aurait désapprouvé l’engagement syndical de cette dernière. Cette conclusion n’est pas non plus énervée par l’envoi à la demanderesse d’un ordre de justification en date du 14 février 2016, alors qu’un tel ordre de justification n’est qu’une étape préalable à une éventuelle procédure disciplinaire qui, en l’occurrence, n’a justement pas été lancée, sans qu’il ne soit imposé à l’administration de notifier à l’intéressée une décision de classement sans suite dès l’obtention de justifications satisfaisantes. De plus, le 30 mai 2016, la demanderesse a été promue à la fonction de receveur C avec effet au 1er juin 2016, de sorte qu’en raison de ces considérations, le moyen relatif à une sanction déguisée en raison d’un conflit personnel entre la direction de l’administration des Douanes et Accises et la demanderesse est à rejeter.

A titre subsidiaire et quant au fond, la demanderesse fait finalement valoir que la décision déférée serait disproportionnée, puisque basée sur une erreur manifeste d'appréciation, alors qu’elle aurait de facto et de iure fait l'objet d'un déplacement qui constituerait une sanction disciplinaire, sans que la moindre preuve n'aurait été rapportée concernant une éventuelle exécution négligente ou déficiente de ses fonctions.

Dans son mémoire en réplique, la demanderesse précise encore, à ce sujet, que ce serait à tort que la partie étatique ferait référence à un « guichet régional », dans la mesure où cette qualification n'existerait officiellement pas. Il s'agirait, en réalité, du Bureau de recette Centre Douanier …. Or, les tâches dudit bureau seraient restées inchangées. Le Bureau …, nommé Centre douanier …, serait toujours un bureau de Recette et, à ce titre, il n'y aurait ni cessation d'indépendance, ni cessation d'autonomie. Il en résulterait que chaque Bureau de 9 Cour adm. 19 janvier 2012, n° 28923C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Fonction publique, n° 169.

10 Cour adm. 6 décembre 2012, n° 30546C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Fonction publique, n°180 et l’autre référence y citée.

recette devrait se trouver sous la responsabilité directe d'un receveur ayant son bureau sur place afin de pouvoir réceptionner les sommes dues au Trésor, ce qu’un receveur centralisé ne pourrait pas légalement effectuer en références aux missions prévues par l'instruction concernant le service des receveurs (1970/P) du 14 décembre 2012.

De plus, la partie étatique n'expliquerait nullement la raison pour laquelle, en date du 17 octobre 2016, c'est à dire quelques jours après son départ, la direction aurait procédé à une augmentation de l'effectif au Centre douanier … par l'affectation d'une collaboratrice supplémentaire au nom de Madame J. R.. L’argumentation concernant l'effectif serait dès lors en parfaite contradiction avec les assertions de la partie étatique selon lesquelles sa nouvelle affectation serait à considérer comme une « mesure de rationalisation laquelle permet de restructurer l’administration ».

La demanderesse fait finalement remarquer au sujet de la prétention de la partie gouvernementale suivant laquelle les procédures d'affectation d'office au Helpdesk seraient en cours, qu’en date du 1er janvier 2017, un collaborateur et plus précisément, le supérieur hiérarchique du Helpdesk, à savoir Monsieur M.M., aurait été réaffecté à un autre service.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen en rappelant, en fait, que la nouvelle affectation de Madame … serait devenue nécessaire suite aux décisions prises dans le cadre du nouvel organigramme dont l'administration des Douanes et Accises se serait dotée. En effet, le bureau de recette de …, comme d'ailleurs celui de …, se trouveraient dorénavant sous la responsabilité directe du receveur du bureau de recette de Luxembourg dans un souci de rationalisation, même si les bureaux de … et de … demeureraient et continueraient de fonctionner pour une période transitoire sans responsable hiérarchique régional, comme guichet régional du bureau de recette centralisé à Luxembourg. Etant donné que la cessation de l'indépendance et de l'autonomie des bureaux de recette de … et de … aurait été préparée et mise en œuvre par étapes successives, l'affectation des fonctionnaires ayant jusque-là assumé la gestion des bureaux de … et de … à un autre emploi ne pourrait donc pas avoir provoqué la surprise dans le chef de la demanderesse, d’autant plus que cette dernière n'en aurait pas été informée après coup, alors qu’elle aurait, dans sa qualité de présidente de l'association des cadres fonctionnaires des douanes (…), contribué à l’adoption du nouvel organigramme ensemble avec la direction des douanes et accises, conformément à l'article 36 du statut général.

Etant donné qu’un emploi vacant dans le groupe de traitement B1 auprès du Helpdesk se serait prêté pour être confié à Madame …, le directeur aurait informé cette dernière, par courrier du 4 juillet 2016, qu'il aurait été envisagé de l’affecter au Service Helpdesk de la Division Techniques de l'Information et de la Communication En ce qui concerne les nouveaux engagements dont la demanderesse fait état, le délégué du gouvernement soutient que l'affectation de Madame J. R. au bureau de … ne serait pas pertinente, alors que cette dernière serait un fonctionnaire de la carrière du groupe de traitement D1 et non celui de B1 et que cette affectation aurait été basée sur un certificat médical lié à l’état de grossesse de cette dernière qui n’aurait plus permis de maintenir cette dernière au sein d'une brigade.

En ce qui concerne l'affectation en date du 1er janvier 2017 de Monsieur M. M., groupe de traitement B1, à la division Affaires générales, il y aurait lieu de préciser que ledit poste, devenu vacant de façon imprévue, aurait dû être pourvu dans l'immédiat par la seule personne ayant montré de l'intérêt pour ledit poste, à savoir Monsieur M.M., qui aurait alors été remplacé par une réaffectation d'office en date du 13 février 2017 de Monsieur N. W., groupe de traitement B1.

En droit, la partie gouvernementale estime que la demanderesse affirmerait à tort que l'intérêt du service de l'affecter au Helpdesk n'existerait pas en prétendant ne pas avoir le profil professionnel requis, alors que, de par son parcours professionnel auprès de l'administration des Douanes et Accises, effectué à l'entière satisfaction du directeur, elle aurait acquis une connaissance parfaite de la matière douanière et accisienne, profil réclamé par le service Helpdesk qui deviendrait de plus en plus important du fait d’être l'interlocuteur premier pour les clients privés et professionnels dans le cadre de leurs démarches administratives en matière des douanes et d'accises. En effet, si, en cas de problèmes rencontrés lors de démarches administratives effectuées sur support papier, le receveur du bureau de recette des douanes et accises et son équipe ont toujours été les interlocuteurs des clients, aujourd'hui, où de plus en plus de démarches administratives seraient faites électroniquement et à distance, ce serait le Helpdesk qui gagnerait en importance et qui aurait vocation à remplacer le receveur dans cette charge. Contrairement à ce que la demanderesse laisserait croire, il ne s'agirait pas d'un poste créé auprès de l'Inspection Support Informatique, mais d'un poste auprès de la Division Techniques de l'Information et de la Communication de la direction des douanes et accises et tout problème éventuel de nature informatique serait à transmettre aux collaborateurs responsables de la gestion et de la maintenance des programmes informatiques, de sorte qu’aucune expertise dans le domaine informatique ne serait requise.

Ainsi, le Helpdesk requerrait des connaissances en matière de législation des douanes et accises, ainsi que de démarches et requis administratifs, de sorte que la demanderesse, de par la tâche assumée auparavant, justifierait du profil et de l'expérience professionnels adéquats pour cette charge.

Quant à la prétendue erreur manifeste d'appréciation, le délégué du gouvernement rappelle qu’il n'y aurait en l'occurrence pas de détachement de la demanderesse qui ne se verrait reprochée ni faute ni négligence ni déficience.

Force est d’abord au tribunal de rappeler qu’en l’espèce, la demanderesse, tout en gardant le même titre et le même grade que ceux dont elle disposait avant la prise de la décision sous examen, s’est vu attribuer d’autres tâches au sein de l’administration des Douanes et Accises, c’est-à-dire un autre emploi correspondant à sa fonction, de sorte qu’en l’espèce il s’agit clairement d’un changement d’affectation au sens de l’article 6, paragraphe 2 du statut général dont la demanderesse a fait l’objet, et non, tel que cela a été retenu ci-

avant, d’un déplacement à titre de sanction déguisée.

Un tel changement d’affectation opéré d’office peut être décidé à partir du moment où il intervient, soit dans l’intérêt du service dans lequel la nouvelle affectation doit être faite, soit dans celui du service dans lequel le fonctionnaire était affecté avant sa mutation. La liberté d’appréciation dont dispose l’administration pour décider d’un changement d’affectation d’un fonctionnaire se trouve limitée par la preuve à apporter par l’employeur suivant laquelle l’intérêt de l’un des deux services en question justifie le changement d’affectation projeté11.

Par ailleurs, il échet d’insister sur le fait que le chef d’administration dispose d’un large pouvoir discrétionnaire pour organiser les services qui se trouvent sous sa responsabilité et que ce n’est qu’au cas où il détourne son pouvoir à d’autres fins que celles qui sont légalement admissibles que la décision portant changement d’affectation peut encourir l’annulation, au cas où une erreur manifeste d’appréciation des faits soumis au ministre – ou se trouvant à sa disposition – a été établie.

En l’espèce, il échet de constater au regard des explications circonstanciées de la partie gouvernementale reprises ci-avant et non valablement mises en doute par la demanderesse que le changement d’affectation opéré dans son chef a été rendu nécessaire en raison du fait non contesté que le poste précédemment occupé par cette dernière a été supprimé suite à la réorganisation des services de l’administration des Douanes et Accises, de sorte que l’intérêt du service de départ se trouve entièrement justifié. En outre, le tribunal est amené à relever que le choix opéré par le directeur portant sur l’affectation de la demanderesse au service Helpdesk en raison de son expérience en la matière acquise en sa qualité de receveur constitue un critère objectif retraçable et justifiable dans l’intérêt du service de destination, étant relevé qu’il n’est pas contesté qu’un poste de la carrière B1 était vacant au service Helpdesk sans avoir pu être occupé par du personnel adéquat à la suite de deux appels de candidatures afférents.

Il échet partant d’en conclure que l’intérêt du service du changement d’affectation litigieux est établi en ses deux volets alternatifs.

Il suit partant des considérations qui précèdent que ce dernier moyen est également à rejeter pour ne pas être fondé.

Au vu de l’ensemble des développements qui précèdent, et en l’absence de tout autre moyen soulevé par la demanderesse, il échet dès lors de rejeter le recours sous examen dans sa globalité pour ne pas être fondé.

Quant à la demande introduite en application de l’article 35 de la loi du 21 juin 1999 aux fins d’ordonner l’effet suspensif du recours pendant le délai et l’instance d’appel, force est de constater que la demanderesse n’a pas précisé de quelle manière l’exécution de la décision déférée risquerait de lui causer un préjudice grave et définitif, la décision n’ayant, d’ailleurs, pas fait l’objet d’une demande en institution d’un effet suspensif en application de l’article 11 de la même loi, de sorte que cette demande est à rejeter.

Au vu de l’issue du litige, il n’y a pas non plus lieu de faire droit à la demande présentée par la demanderesse tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure de 1.000 €, basée sur l’article 33 de la loi du 21 juin 1999.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

11 trib. adm. 16 février 1998, n° 10264 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Fonction publique, n° 172 et les autres références y citées se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;

reçoit en la forme le recours subsidiaire en annulation ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande introduite sur base de l’article 35 de la loi du 21 juin 1999 ;

rejette la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure présentée par la demanderesse ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par :

Anne Gosset, premier juge, Olivier Poos, premier juge, Daniel Weber, juge, et lu à l’audience publique du 19 décembre 2017 par le premier juge, Anne Gosset, en présence du greffier Marc Warken.

s. Marc Warken s. Anne Gosset Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 19 décembre 2017 Le greffier du tribunal administratif 21


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 38854
Date de la décision : 19/12/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2017-12-19;38854 ?

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