Tribunal administratif N° 37658 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 11 mars 2016 2e chambre Audience publique du 9 octobre 2017 Recours formé par Monsieur ….., ….
contre deux décisions du conseil communal de Käerjeng et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 37658 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 mars 2016 par Maître Georges Krieger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur ….., sans état connu, demeurant à L-…., tendant à l’annulation de :
« 1) la délibération du conseil communal de la commune de Käerjeng du 24 septembre 2014 prise en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ;
2) la délibération du conseil communal de la commune de Käerjeng du 7 avril 2015 portant adoption du projet d’aménagement général, parties écrites et graphique ;
3) la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur du 7 décembre 2015 portant la référence no. 30C-010-2014 PAG KAERJENG » ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Frank Schaal, demeurant à Luxembourg, du 15 mars 2016, portant signification de ce recours à l’administration communale de Käerjeng, établie à L-4920 Bascharage, 24, rue de l’Eau, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;
Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 25 mars 2016 par Maître Georges Pierret, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Käerjeng, préqualifiée ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 26 mai 2016 ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 14 juin 2016 par Maître Georges Pierret, au nom l’administration communale de Käerjeng, préqualifiée, lequel mémoire fut notifié en date du même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de la partie demanderesse ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 14 juillet 2016 par Maître Georges Krieger au nom de la partie demanderesse, lequel mémoire fut notifié en date du même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de l’administration communale de Käerjeng ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 29 septembre 2016 ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 13 octobre 2016 par Maître Georges Pierret, au nom de l’administration communale de Käerjeng, lequel mémoire fut notifié en date du même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de la partie demanderesse ;
Vu les pièces versées en cause ainsi que les décisions attaquées ;
Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Sébastien Couvreur en remplacement de Maître Georges Krieger, Maître Pierre Medinger, en remplacement de Maître Georges Pierret, et Monsieur le délégué du gouvernement Yves Huberty en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 27 février 2017 lors de laquelle l’affaire a été refixée à l’audience publique du 6 mars 2017, audience à laquelle l’affaire a encore été refixée à l’audience publique 13 mars 2017 pour continuation des débats en attendant que le dossier administratif soit déposée dans son intégralité ;
Vu le dossier administratif déposé au greffe du tribunal administratif par le délégué de gouvernement en date des 6 et 13 mars 2017 ;
Entendu le juge-rapporteur en son rapport complémentaire, ainsi que Maître Sébastien Couvreur en remplacement de Maître Georges Krieger, Maître Pierre Medinger, en remplacement de Maître Georges Pierret, et Monsieur le délégué du gouvernement Yves Huberty en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 13 mars 2017.
Lors de sa séance publique du 24 septembre 2014, le conseil communal de Käerjeng, ci-après désigné par le « conseil communal », fut saisi par le collège des bourgmestre et échevins de Käerjeng, ci-après désigné par « le collège des bourgmestre et échevins », en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet 2004 », d’un projet d’aménagement général pour la commune de Käerjeng, à l’égard duquel il décida d’« (…) émet[tre] un vote positif (…) de sorte que le collège des bourgmestre et échevins peut procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi (…) du 19 juillet 2004 (…) ».
Par courrier du 29 octobre 2014, Monsieur ….., propriétaire de la parcelle inscrite au cadastre de la commune de Käerjeng, section CA de …., sous le numéro ….., désignée ci-
après par « la parcelle …..», soumit au collège des bourgmestre et échevins une objection à l’encontre dudit projet d’aménagement général.
Lors de sa séance publique du 27 avril 2015, le conseil communal décida d’approuver :
« ● la partie graphique du projet d'aménagement général, modifiée suivant l'avis de la commission d'aménagement, les avis du Ministre délégué du Développement durable et des infrastructures, matérialisée par 16 pages, numérotés de 1 à 16, document annexé à la présente ainsi que sur base des réclamations, matérialisée par 38 pages, numérotées de 1 à 38, document annexé à la présente matérialisée ;
● la partie écrite du projet d'aménagement général, modifiée suivant l'avis de la commission d'aménagement, les avis du Ministre délégué du Développement durable et des infrastructures, matérialisée par 16 pages, numérotés de 1 à 16, document annexé à la présente ainsi que sur base des réclamations, matérialisée par 38 pages, numérotées de 1 à 38, document annexé à la présente ;
● l'étude préparatoire, subdivisée en 4 sections, à savoir :
- Section 1 : analyse globale de la situation existante — non modifiée - Section 2 : stratégie et développement — non modifiés - Section 3 : mise en œuvre de la stratégie de développement — non modifiée - Section 4 : schéma directeur, modifiée suivant l'avis de la commission d'aménagement, les avis du Ministre délégué du Développement durable et des infrastructures, matérialisée par 16 pages, numérotés de 1 à 16, document annexé à la présente ainsi que sur base des réclamations, matérialisée par 38 pages, numérotées de 1 à 38, document annexé à la présente ;
● le rapport de présentation du projet d'aménagement général non modifié ;
● le rapport sur les incidences environnementales (SUP) non modifié.(…) ».
Dans la décision précitée, le conseil communal fit référence à un document intitulé :
« tableau récapitulatif sur l'aplanissement des réclamations présentées avec les propositions de modifications du collège des bourgmestre et échevins soumises pour approbation au conseil communal, matérialisé par 38 pages, numérotées de 1 à 38, document annexé à la présente », dans le cadre duquel il prit position comme suit quant à la réclamation introduite par Monsieur ….. :
« Les bâtiments classés au niveau communal résultent d'une liste établie ensemble avec le service des sites et monuments nationaux. Les classements repris sur cette liste ont été repris intégralement dans le noyau protégé des différentes localités. - 21 réclamants ont demandé que la protection soit enlevée - La Commission demande dans son avis que les bâtiments protégés ne puissent être démolis et que plusieurs maisons le long de l'avenue de Luxembourg soient également classées. Le CC ne souhaite pas restreindre les droits des propriétaires à un tel point, la démolition des bâtiments protégés doit rester possible. De plus, le CC juge que l'approche initiale, de reprendre l'entièreté des bâtiments protégés de la liste dans le secteur protégé et pas autour, est cohérente. Aucune construction ne sera rajoutée, ni supprimée des bâtiments remarquables. Pour éviter toute confusion, une liste des bâtiments sera jointe à la partie écrite du PAG. ».
Le même document poursuivit, sous la rubrique intitulée : « modifications apportées », comme suit : « Sans objet. Néanmoins, suite à l'avis de la Commission, le chapitre 20 de la partie écrite sera adapté. Voir le tableau sur les adaptations suivant avis. L'inventaire des bâtiments protégés au niveau communal proposés initialement par le CC restera inchangé dans la version finale. ».
Par courrier de son litismandataire du 6 mai 2015, Monsieur ….., introduisit auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », une réclamation à l’encontre de la susdite délibération du conseil communal du 27 avril 2015.
Par décision du 7 décembre 2015, le ministre approuva ladite délibération du conseil communal du 27 avril 2015 portant adoption du plan d’aménagement général et déclara recevable mais non fondée la réclamation de Monsieur …… Ladite décision ministérielle est libellée comme suit :
« (…) Vu la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l'aménagement communal et le développement urbain ;
Vu la délibération du 27 avril 2015 du conseil communal de Käerjeng portant adoption du projet d'aménagement général, parties écrite et graphique ;
Vu l'article 18 de la loi précitée, en vertu duquel le Ministre ayant l'aménagement communal et le développement urbain dans ses attributions statue sur les réclamations lui soumises, en même temps qu'il décide de l'approbation du projet d'aménagement général ;
Vu les réclamations introduites par Maître Jean-Luc Gonner au nom et pour le compte de Monsieur et Madame ….., par Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur ….., par les consorts ….., par Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur ….., par Maître Laurent Niedner au nom et pour le compte de la société ….., par Monsieur ….., par Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Madame ….., par Monsieur ….., par Maître Georges Krieger au nom et pour le compte des consorts ….., par Maître Arsène Kronshagen au nom et pour le compte de Monsieur et Madame ….., par Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur ….., par Monsieur ….., par Maître Franca Allegra au nom et pour le compte de Monsieur ….. et de Madame ….., par Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur ….., par les consorts ….., par les consorts ….., par Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur et Madame ….., par Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur ….., de Madame ….., de Monsieur ….., ainsi que de Monsieur ….., par Madame ….., par Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Madame …..-….., par Maître Pierre Goerens au nom et pour le compte de Madame ….., par la société ….., par Maître Arsène Kronshagen au nom et pour le compte de Madame …..-REUTER, par Madame ….., Madame ….. et Monsieur ….., par la société ….., ainsi que par Madame ….. et consorts ;
Vu l'avis de la Commission d'aménagement des 8 juillet et 7 août 2015 au sujet des réclamations parvenues au ministre de l'Intérieur ;
Vu l'avis du conseil communal de Käerjeng du 8 septembre 2015 au sujet des mêmes réclamations ;
Considérant qu'aucun réclamant ne s'est prévalu du fait qu'il n'a pas été en mesure de présenter ses observations et objections endéans les délais légaux prévus par la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l'aménagement communal et le développement urbain. Que dès lors aucun grief n'a été porté à la connaissance du Ministre de l'Intérieur, et que par conséquent rien ne s'oppose à l'approbation du projet d'aménagement général, conformément à la jurisprudence des juridictions administratives en la matière (voir à cet égard notamment l'affaire n° 32463C du rôle portée devant la Cour Administrative) ;
Considérant qu'avant de statuer, le Ministre vérifie la conformité du projet d'aménagement général avec les dispositions de la loi précitée et notamment les objectifs énoncés à l'article 2, ainsi qu'avec les plans et programmes déclarés obligatoires en vertu de la loi du 30 juillet 2013 concernant l'aménagement du territoire ou se trouvant à l'état de projet soumis aux communes ;(…) Considérant que la réclamation émanant de Monsieur ….. et contestant le classement de la maison au ….., sur la parcelle cadastrale n° ….., sise à Clemency, en «secteur protégé d'intérêt communal "bâtiment protégé au niveau communal"» est non fondée, alors que les bâtiments classés au niveau communal ont été définis en tant que tels en conformité avec l'article 33, alinéa 2, du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le contenu du plan d'aménagement général, article qui stipule que « Les secteurs protégés de type « environnement construit » constituent les parties du territoire communal qui comprennent des immeubles ou parties d'immeubles dignes de protection et qui répondent à un ou plusieurs des critères suivants : authenticité de la substance bâtie, de son aménagement, rareté, exemplarité du type de bâtiment, importance architecturale, témoignage de l'immeuble pour l'histoire nationale, locale, sociale, politique, religieuse, militaire, technique ou industrielle »; qu'en effet, les bâtiments remarquables résultent d'une liste établie en collaboration étroite avec le Service des Sites et Monuments Nationaux ; que par ailleurs les classements repris sur cette liste ont été repris intégralement et seulement dans le noyau protégé des différentes localités ;
que par ailleurs, la réclamation est partiellement fondée en ce qui concerne la formulation de l'article 20 (2) de la partie écrite du projet d'aménagement général, intitulé (2) Bâtiments protégés au niveau communal ; que le texte en question est à réécrire de la manière suivante :
« La liste des bâtiments qui font l'objet d'une protection communale est reprise dans l'Annexe- Liste des bâtiments et des gabarits protégés au niveau communal, qui visualise chaque bâtiment à protéger.
Ces bâtiments ne pourront, en principe, en ce qui concerne leur seul aspect extérieur, subir aucune modification, transformation ou agrandissement qui serait susceptible de porter préjudice à leur intérêt historique, artistique, architectural ou esthétique.
De telles altérations sont cependant permises au cas où elles ne portent pas préjudice aux composantes remarquables qui caractérisent la substance bâtie qui fait l'objet de la protection communale.
S'il s'avère qu'un bâtiment protégé présenterait un danger d'écroulement ou qu'il se trouve dans un tel état de vétusté qu'il risquerait de porter préjudice à la sécurité publique, il pourra fait l'objet d'une démolition partielle, ou le cas échéant, intégrale.
A l'extérieur du bâtiment, les composantes remarquables dignes de protection sont :
- le rythme entre pleins et vides ;
- les formes et les éléments de toiture ;
- la dimension, la forme et la position des baies ;
- les modénatures ;
- les éléments de décoration qui caractérisent ledit bâtiment ;
- les matériaux utilisés traditionnellement ;
- les teintes et revêtements traditionnels.
Tout bâtiment protégé au niveau communal présente un gabarit à respecter.
En ce qui concerne l'assainissement énergétique, des dérogations au niveau du respect des exigences minimales peuvent être octroyées par l'autorité compétente pour les bâtiments protégés afin que le caractère et la valeur historique de ces bâtiments puissent être sauvegardés. ». (…) arrête :
Art. 1er: La délibération du 27 avril 2015 du conseil communal de Käerjeng portant adoption du projet d'aménagement général, parties graphiques et écrite, est approuvée.
Art. 2 : Les réclamations émanant de Maître Jean-Luc Gonner au nom et pour le compte de Monsieur et Madame ….., des consorts ….., de Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur ….., de Maître Laurent Niedner au nom et pour le compte de la société ….., de Monsieur ….. de Monsieur ….., de Maître Georges Krieger au nom et pour le compte des consorts ….., de Maître Arsène Kronshagen au nom et pour le compte de Monsieur et Madame ….., de Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur ….., de Maître Franca Allegra au nom et pour le compte de Monsieur ….. et de Madame ….., de Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur ….., des consorts ….., de Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur et Madame ….., de Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur ….., de Madame ….., de Monsieur ….., ainsi que de Monsieur ….., de Madame ….., de Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Madame …..-….., de Maître Pierre Goerens au nom et pour le compte de Madame ….., de la société ….., de Maître Arsène Kronshagen au nom et pour le compte de Madame ….., de Madame ….., Madame ….. et Monsieur ….., de la société ….., ainsi que de Madame …..
et consorts, sont recevables en la forme et non fondées.
Art. 3 : Les réclamations émanant de Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Monsieur ….., de Maître Georges Krieger au nom et pour le compte de Madame ….., de Monsieur ….. ainsi que des consorts ….., sont déclarées recevables en la forme et partiellement fondées.
Art. 4 : L'article 20 (2) de la partie écrite du projet d'aménagement général, intitulé (2) Bâtiments protégés au niveau communal est reformulé comme suit :
« La liste des bâtiments qui font l'objet d'une protection communale est reprise dans l'Annexe- Liste des bâtiments et des gabarits protégés au niveau communal, qui visualise chaque bâtiment à protéger.
Ces bâtiments ne pourront, en principe, en ce qui concerne leur seul aspect extérieur, subir aucune modification, transformation ou agrandissement qui serait susceptible de porter préjudice à leur intérêt historique, artistique, architectural ou esthétique.
De telles altérations sont cependant permises au cas où elles ne portent pas préjudice aux composantes remarquables qui caractérisent la substance bâtie qui fait l'objet de la protection communale.
S'il s'avère qu'un bâtiment protégé présenterait un danger d'écroulement ou qu'il se trouve dans un tel état de vétusté qu'il risquerait de porter préjudice à la sécurité publique, il pourra fait l'objet d'une démolition partielle, ou le cas échéant, intégrale.
A l'extérieur du bâtiment, les composantes remarquables dignes de protection sont :
- le rythme entre pleins et vides ;
- les formes et les éléments de toiture ;
- la dimension, la forme et la position des baies ;
- les modénatures ;
- les éléments de décoration qui caractérisent ledit bâtiment ;
- les matériaux utilisés traditionnellement ;
- les teintes et revêtements traditionnels.
Tout bâtiment protégé au niveau communal présente un gabarit à respecter.
En ce qui concerne l'assainissement énergétique, des dérogations au niveau du respect des exigences minimales peuvent être octroyées par l'autorité compétente pour les bâtiments protégés afin que le caractère et la valeur historique de ces bâtiments puissent être sauvegardés. ». (…) ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 mars 2016, Monsieur …..
a fait introduire un recours tendant à l’annulation (i) de la décision du ministre du 7 décembre 2015 portant approbation de la délibération du conseil communal du 27 avril 2015 portant adoption du projet d’aménagement général, parties graphique et écrite, et ayant déclaré recevable et partiellement fondée sa réclamation introduite à l’encontre de cette délibération, (ii) de ladite délibération du conseil communal du 27 avril 2015, ainsi que (iii) de la délibération du conseil communal du 24 septembre 2014 « prise en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ».
1. Quant à la compétence Les décisions sur les projets d’aménagement, lesquelles ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre, intervenue après réclamation de particuliers, comme c’est le cas en l’espèce, participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé1, étant entendu que le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision litigieuse ayant statué sur la réclamation introduite par le demandeur, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.
Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, désignée ci-après par « la loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire. Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en annulation introduit à l’encontre des actes déférés.
2. Quant à la loi applicable Le tribunal précise que la procédure d’adoption d’un plan d’aménagement général, ci-
après désigné par « PAG », est prévue par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, et (iv) par loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017.
Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des actes déférés et, d’autre part, que dans le cadre 1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2016, V° Actes réglementaires, n° 46 et les autres références y citées.
d’un tel recours, le juge administratif est amené à apprécier la légalité de la décision déférée en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où elle a été prise2, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par ladite loi « Omnibus », adoptée et entrée en vigueur postérieurement à la prise des actes litigieux, ne sont pas à prendre en considération en l’espèce.
Selon les dispositions transitoires figurant à l’article 108ter de la loi du 19 juillet 2004, tel que modifiée en dernier lieu par la loi précitée du 1er août 2011, « (1) La procédure d’adoption des projets d’aménagement général, dont la refonte complète a été entamée par la saisine de la commission d’aménagement avant le 1er août 2011, peut être continuée et achevée conformément aux dispositions du Titre 3 de la présente loi qui était en vigueur avant le 1er août 2011. ». En l’espèce, il est constant que les actes déférés ont trait à l’adoption du PAG de la commune de Käerjeng. Il est encore constant en cause que le conseil communal a émis son vote positif, au sens de l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004, en date du 24 septembre 2014, de sorte que la saisine de la commission d’aménagement en application de l’article 11 de la même loi s’est a fortiori opérée après la date butoir du 1er août 2011, fixée par l’article 108ter de la loi du 19 juillet 2004. Il s’ensuit que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013 et 14 juin 2015, sous réserve du fait que la loi du 14 juin 2015, qui s’est limitée à modifier les dispositions de la loi du 19 juillet 2004 quant aux délai endéans lequel les communes doivent procéder à la refonte complète de leurs PAG et quant aux conséquences attachées au non-respect de cette exigence, ainsi qu’à abroger l’article 108 (3) de ladite loi du 19 juillet 2004, relatif à l’obligation de remplacer les règlements communaux sur les bâtisses, les voies publiques et les sites édictés en exécution de l’article 52 de la loi du 12 juin 1937 concernant l'aménagement des villes et autres agglomérations importantes par ceux prévus à l’article 38 de ladite loi – questions non litigieuses en l’espèce –, est susceptible de s’appliquer à l’examen de la légalité de la seule décision ministérielle du 7 décembre 2015, qui est, parmi les actes litigieux, le seul à avoir été adopté postérieurement à son entrée en vigueur.
3. Quant à la recevabilité A l’audience publique des plaidoiries du 27 février 2017, le tribunal a invité les parties à prendre oralement position quant à la recevabilité du recours, pour autant qu’il vise la délibération du conseil communal du 24 septembre 2014, par laquelle ledit conseil a « (…) ém[is] un vote positif au sujet du projet d’aménagement général de sorte que le collège des bourgmestre et échevins peut procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi (…) du 19 juillet 2004 (…) ». Plus précisément, les parties ont été invitées à se prononcer sur la question du caractère décisionnel de ladite délibération, eu égard aux enseignements se dégageant d’un arrêt de la Cour administrative du 15 décembre 2016, portant le numéro 38139C du rôle, en ce qui concerne la nature juridique du vote du conseil communal prévu par l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004.
Le délégué du gouvernement et le litismandataire de l’administration communale de Käerjeng, ci-après désignée par « l’administration communale », n’ont pas pris position de façon spécifique quant à cette question.
2 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2016, V° Recours en annulation, n° 18 et les autres références y citées.
Le litismandataire des demandeurs a conclu à la recevabilité du volet du recours dirigé contre ladite délibération du conseil communal du 24 septembre 2014, en faisant valoir que le caractère décisionnel du vote du conseil communal prévu par l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004 serait confirmé par le fait que le conseil communal disposerait de la possibilité de rejeter l’adoption du projet d'aménagement général et de prendre, de la sorte, une décision définitive, mettant fin à la procédure d’élaboration du plan d'aménagement général. Il a ajouté que par son arrêt précité du 15 décembre 2016, la Cour administrative ne se serait prononcée que par rapport à la portée du vote du conseil communal prévu par l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004, sans pour autant mettre en question le caractère décisionnel de ladite délibération.
A titre liminaire, le tribunal est amené à préciser que l’acte administratif susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux doit constituer une véritable décision de nature à faire grief, c’est-à-dire un acte susceptible de produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle et patrimoniale de celui qui réclame. N’ont pas cette qualité de décision faisant grief, comme n’étant pas destinées à produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, les informations données par l’administration, tout comme les déclarations d’intention ou les actes préparatoires d’une décision.3 S’il est exact que dans son arrêt, précité, du 15 décembre 2016, portant le numéro 38139C du rôle, la Cour administrative n’a pas directement abordé la question du caractère décisionnel du vote du conseil communal prévu par l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004, mais n’a précisé la nature juridique de ce dernier que dans le cadre de l’examen de la question de savoir à quel moment de la procédure le rapport sur les incidences environnementales, tel que prévu par la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, ci-après désignée par « la loi du 22 mai 2008 », ayant, le cas échéant, été élaboré doit être mis à la disposition du public, au regard des exigences découlant des dispositions de droit international applicables en la matière, il n’en reste pas moins que les précisions ainsi fournies par la Cour quant à la nature juridique dudit vote sont d’une pertinence certaine au regard de la question de son caractère décisionnel.
Dans l’arrêt en question, la Cour administrative, après avoir relevé qu’avant la prise d’effet des modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par la loi du 28 juillet 2011, les PAG étaient soumis à la « (…) procédure classique d’adoption et d’approbation (…) en deux temps (…)[, qui] comprenait d’abord un vote provisoire par le conseil communal contre lequel des objections étaient ouvertes, elles-mêmes vidées par le même conseil communal à travers le vote définitif, contre lequel des réclamations pouvaient être introduites devant le ministre de l’Intérieur qui, dans le cadre de ses attributions de tutelle d’approbation, était amené à vider les réclamations ainsi portées devant lui, et à approuver ou non le PAG, de sorte à revêtir une double casquette à ce sujet. (…) », et après avoir précisé que dans le cadre de cette procédure classique « (…) le conseil communal, en adoptant provisoirement un projet de PAG, avait en quelque sorte fait sien le projet d’une manière effective en l’adoptant à un premier stade, quitte à ce que des objections puissent être formulées relativement à cette première adoption communale (…) », constata que cette procédure fut modifiée par ladite loi du 28 juillet 2011. A cet égard, après avoir cité l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004, dans sa version résultant de cette modification législative, libellé comme suit : « Le projet d’aménagement général ensemble avec l’étude préparatoire, le rapport de présentation ainsi que, le cas échéant, le rapport sur les incidences environnementales élaboré conformément à 3 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, confirmé sur ce point par Cour adm. 19 février 1998, n° 10263C du rôle, Pas. adm. 2016, V° Actes administratifs, n° 57 et les autres références y citées.
la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement est soumis au conseil communal.
Le conseil communal délibère sur le projet d’aménagement général; en cas de vote positif, le collège des bourgmestre et échevins procède aux consultations prévues aux articles 11 et 12. », la Cour administrative releva que « (…) L’article 11, tel que résultant de la modification du 28 juillet 2011, prévoit dorénavant que c’est ce projet de PAG, mis sur orbite par le conseil communal conformément à l’article 10, précité, qui est soumis par le collège échevinal à la commission d’aménagement auprès du ministère de l’Intérieur dans les quinze jours de « l’accord » du conseil communal prévu audit article 10. » et que « L’article 12 règle la publication du projet de PAG ensemble toutes les pièces mentionnées à l’article 10, précité, (…), ainsi que les possibilités du public d’y réagir, l’article 13 prévoyant, sous « réclamation », la possibilité des personnes intéressées de formuler leurs objections auprès du collège échevinal. ». Après avoir fourni un certain nombre de précisions d’ordre terminologique et cité l’article 14 de la loi du 19 juillet 2004, tel que modifié par la loi du 28 juillet 2011, libellé comme suit : « Le projet d’aménagement général ensemble avec toutes les pièces mentionnées à l’article 10 est soumis avec l’avis de la commission d’aménagement et, le cas échéant, avec l’avis du ministre ayant dans ses attributions l’environnement, le rapport sur les incidences environnementales, les réclamations et les propositions de modifications du collège des bourgmestre et échevins, au conseil communal.
Au plus tard dans les trois mois à compter de l’échéance du délai prévu à l’article 11, alinéa 2, le conseil communal décide de l’approbation ou du rejet du projet d’aménagement général.
Il peut approuver le projet dans sa forme originale ou y apporter des modifications qui soit sont proposées par la commission d’aménagement, soit répondent en tout ou en partie à l’avis émis par le ministre ayant l’Environnement dans ses attributions, soit prennent en compte en tout ou en partie des observations et objections présentées.
Si le conseil communal entend apporter des modifications autres que celles visées à l’alinéa qui précède, il renvoie le dossier devant le collège des bourgmestre et échevins qui est tenu de recommencer la procédure prévue aux articles 10 et suivants. », la Cour administrative s’interrogea quant à la nature de « (…) la démarche effectuée par le conseil communal lorsque, saisi du projet de plan par le collège échevinal, il décide de voir procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 en application de l’alinéa 2 de cet article 10.
(…) ». Sur ce point, elle retint ce qui suit : « Au niveau de l’alinéa 2 en question, le législateur mentionne que le conseil communal « délibère » sur le projet d’aménagement général. Il s’agit dès lors de cadrer le terme « délibérer » dans le contexte de la procédure menée. Si en matière de procédure contentieuse, le terme « délibérer » revêt une signification précise en ce qu’il vise l’opération des juges consistant à discuter les moyens en droit et en fait relatifs à une affaire prise en délibéré, par rapport à laquelle ils sont appelés à rendre leur arrêt ou jugement, il est patent que le conseil communal n’est pas habilité à rendre pareille décision juridictionnelle.
Dès lors, le terme « délibérer » prévu à l’article 10, alinéa 2, sous revue, doit être lu dans une acception plus générale équivalant à « discuter » sur le PAG. Pareille discussion a néanmoins un objectif. Cet objectif est de faire avancer la procédure en vue de l’adoption du PAG par le conseil communal. Une branche possible du résultat de la discussion se trouve à l’alinéa 2 de l’article 10 en question en ce qu’ « en cas de vote positif, le collège des bourgmestre et échevins procède aux consultations prévues aux articles 11 et 12 ».
Il est clair que ce vote positif n’est pas celui du collège des bourgmestre et échevins.
Ce doit bien être celui du conseil communal pour que la procédure fasse un sens. A ce stade, le collège échevinal ne fait qu’exécuter un choix porté par le conseil communal. Pour qu’il y ait choix, il faut que deux branches au moins soient possibles, celle d’un vote positif ou celle d’un vote négatif.
Le vote positif, tel que visé à l’article 10, alinéa 2, en question doit être lu en ce sens que le conseil communal est d’accord à ce que le projet de PAG soit mis sur orbite, du moment qu’il déclare que ce projet est suffisamment élaboré pour qu’il puisse continuer la procédure et être soumis aux consultations prévues par la loi, tant au niveau de la commission d’aménagement qu’à celui du public intéressé qu’à celui encore du ministre de l’Environnement, appelé à intervenir en la matière, et dont l’avis est cité à l’article 14, alinéa 3, de la même loi, en tant que susceptible de voir modifier le projet à travers la décision d’adoption du conseil communal.
Si, toutefois le conseil communal est d’avis que le projet n’est pas encore suffisamment élaboré pour être soumis aux consultations prévues par la loi, un vote nécessairement négatif consistera à le renvoyer au collège échevinal afin d’obtenir une élaboration plus en avant du projet en question.
C’est précisément l’alinéa 3 de l’article 14 de la loi sous revue qui prévoit que si le conseil communal peut adopter le projet de PAG dans sa forme originale, il peut également y apporter des modifications. Ces modifications sont en principe issues de propositions pouvant émaner de manière formelle de trois sources, à savoir qu’elles peuvent émaner des propositions de la commission d’aménagement, sinon répondre en tout ou en partie à l’avis émis par le ministre ayant l’environnement dans ses attributions et finalement résulter de la prise en compte de toute ou partie des objections présentées par le public intéressé. Pour que la procédure fasse un sens, il doit être possible au conseil communal de relayer, le cas échéant, ces trois sources de modification et d’y ajouter à titre accessoire des éléments nécessairement complémentaires par rapport à ceux proposés par l’un ou l’autre de ces trois initiateurs de modifications.
Si toutefois le conseil communal voulait aller plus fondamentalement au-delà de ces modifications proposées, toujours au niveau de l’adoption du projet de PAG prévue par l’article 14 sous revue, il lui est loisible, conformément au dernier alinéa de cet article, de renvoyer le dossier devant le collège échevinal qui, dans cette hypothèse, sera tenu de recommencer la procédure prévue aux articles 10 et suivants de la même loi.
A partir d’une lecture cohérente des articles 10 à 14 de la loi du 19 juillet 2004, tels que résultant de la modification du 28 juillet 2011 – la loi du 30 juillet 2013 n’ayant pas interféré à ce niveau précis – la Cour vient à la multiple conclusion suivante : le vote du conseil communal prévu à l’article 10, alinéa 2, de la loi sous revue n’est plus comparable à l’adoption provisoire du PAG et ne saurait dès lors être analysé en adoption du projet de plan, mais en une sorte de mise sur orbite dudit projet qui, par les soins non pas du conseil communal, mais du collège échevinal, dès ce feu vert donné, procède aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la même loi. Complémentairement, sur les consultations menées, l’opération visée à l’article 14 consiste en règle générale dans l’adoption unique et définitive par le conseil communal du projet de PAG qui devient le PAG adopté par l’organe compétent de la commune. Cette adoption peut se faire soit sous la forme originale, soit, dans la majorité des cas, sur les modifications opérées par le conseil communal compte tenu des consultations menées. (…) ».
Dès lors, le vote positif émis par le conseil communal le 24 septembre 2014, en application de l’article 10, alinéa 2 de la loi du 19 juillet 2004, n’est pas à qualifier de décision administrative, étant donné qu’aux termes dudit arrêt de la Cour administrative, le vote en question n’est plus comparable à l’adoption provisoire du PAG à laquelle le conseil communal procédait sous l’empire de la loi du 19 juillet 2004, dans sa version antérieure à la modification intervenue par la loi du 28 juillet 2011, en ce qu’il ne constitue qu’une « (…) mise sur orbite [du] projet (…) », respectivement un « feu vert » que le conseil communal donne au collège échevinal pour continuer la procédure et pour procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004, après avoir constaté que le projet est suffisamment élaboré à cette fin.
Or, une telle « mise sur orbite », respectivement un tel « feu vert », qui n’emporte aucune adoption ou approbation du PAG, mais qui traduit le seul constat du conseil communal que le projet est suffisamment élaboré pour que le collège échevinal puisse continuer la procédure, ne fait que préparer l’adoption ultérieure du PAG, sans être susceptible de produire par elle-même, respectivement par lui-même des effets juridiques sur la situation personnelle ou patrimoniale des administrés, de sorte à constituer, non pas un acte administratif de nature à faire grief, mais un simple acte préparatoire ne pouvant, en tant que tel, faire l’objet d’un recours contentieux.
Il s’ensuit que le recours en annulation est à déclarer irrecevable pour autant qu’il vise la délibération du conseil communal du 24 septembre 2014.
Ceci étant dit, les deux autres volets du recours sous examen, dirigés à l’encontre de la délibération du conseil communal du 27 avril 2015, ainsi que de la décision d’approbation ministérielle du 7 décembre 2015 sont recevables pour avoir été introduits dans les formes et délai prévus par la loi.
4. Quant au fond • Quant au moyen tiré d’une violation de l'article 18 de la loi du 19 juillet 2004, de l'article 107 de la Constitution, ainsi que ses prérogatives d'autorité de tutelle d'approbation, voire de tutelle spéciale.
La partie demanderesse fait valoir qu’il y aurait d’abord lieu de retracer les pouvoirs du ministre lorsque ce dernier interviendrait dans le cadre de l'article 18 de la loi du 19 juillet 2004, lequel lui attribuerait une double compétence, à savoir une « tutelle d'approbation et une tutelle spéciale ». Les contours des pouvoirs de l'autorité de tutelle auraient été très retracés au travers d'un arrêt de la Cour administrative du 6 février 2014, inscrit sous le numéro 33257C du rôle, ainsi que d’un arrêt de la Cour Constitutionnelle du 20 juin 2014, inscrit sous le numéro 00111 du registre. Au vu de ces jurisprudences, il serait admis que le ministre disposerait d'un pouvoir de réformation, c’est-à-dire d'un pouvoir de tutelle spéciale lorsqu'il statue sur les réclamations portées devant lui, et consistant, en quelque sorte, en des reliquats des réclamations portées antérieurement devant l'autorité communale. Ainsi, la Cour constitutionnelle aurait retenu que l'article 18 de la loi du 19 juillet 2004, en ce qu'il accorde, conformément à l'interprétation de la Cour administrative, au ministre, autorité de tutelle par rapport à la gestion communale, un pouvoir de réformation dans le cadre de l'adoption et de l'approbation de plans d'aménagement communaux, plus particulièrement lorsque le ministre statue sur les réclamations portées devant lui, ne serait pas contraire à l'article 107 de la Constitution.
La partie demanderesse estime ensuite que le ministre devrait exercer ses pouvoirs dans les limites des compétences lui attribuées. Ainsi, le pouvoir de tutelle spéciale du ministre, lui permettant de réformer le PAG dans sa forme adoptée par l'autorité communale, serait limité, en ce que celui-ci ne saurait s'exercer que par rapport à des objections portées devant lui. Par ailleurs, selon la jurisprudence, la tutelle spéciale devrait s'exercer préalablement à la tutelle d'approbation. Il ressortirait de cette chronologie que le ministre ne serait admis à faire droit à une réclamation que si celle-ci soulève de manière pertinente que le PAG comporte une illégalité, respectivement serait contraire à l'intérêt général. Il ne serait pas concevable que le ministre empiète, même au titre de la tutelle spéciale, sur les prérogatives réservées à la commune en vertu du principe de l'autonomie communale En l'espèce, en considérant la réclamation comme étant « partiellement fondée », et en modifiant en conséquence le texte de l'article 20 (2) de la partie écrite du PAG, pour le rendre encore davantage contraignant, le ministre aurait méconnu l'article 18 de la loi du 19 juillet 2004 et ses pouvoirs de tutelle spéciale. Ainsi, la partie demanderesse fait valoir qu’à travers son objection auprès du collège des bourgmestre et échevins, elle se serait opposée au classement de sa maison d'habitation en tant que bâtiment protégé, « [n]i plus, ni moins ».
Dans la mesure où le conseil communal n'aurait pas fait droit à cette réclamation, la partie demanderesse aurait poursuivi sa réclamation auprès du ministre, en exposant, par l'organe de son mandataire, en conclusion de celle-ci :« Il y a lieu, au vu de ce qui précède, de supprimer le classement de l'immeuble de mon mandant comme bâtiment protégé au niveau communal. ». Elle n’aurait dès lors à aucun moment souhaité solliciter auprès du ministre que les servitudes urbanistiques applicables aux « secteurs protégés » et aux « bâtiments protégés » soient durcies, sous le prétexte d'accueillir prétendument favorablement sa réclamation, tout au plus aurait-elle indiqué que le texte applicable à pareil classement « induit une insécurité juridique majeure pour les propriétaires concernés par un tel classement dès lors qu'ils ne peuvent connaître à l'heure actuelle, l'étendue des limitations à leur droit de propriété qui seront imposées par la suite ».
La partie demanderesse argumente qu’avant l'intervention du ministre, les bâtiments protégés au niveau communal auraient dû, avant tout projet de démolition, de transformation, de modification ou d'agrandissement, être obligatoirement soumis à un avis de l'organisme ayant la protection des sites et monuments nationaux dans ses attributions, tandis qu’après l'intervention du ministre, tous les travaux de modification, de transformation ou d'agrandissement concernant un bâtiment protégé seraient en principe interdits s'ils « sont susceptibles » de porter atteinte à leur intérêt historique, artistique, architectural ou esthétique.
Cette modification aurait été introduite à l'initiative du ministre, en dehors de ses compétences de tutelle spéciale et de tutelle d'approbation et en dehors d'une réclamation afférente de la partie demanderesse, de sorte qu’elle méconnaîtrait l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004, ainsi que l’article 107 de la Constitution.
Le délégué du gouvernement, rejoint en ses explications par l’administration communale de Käerjeng, répond que la partie écrite du PAG, telle qu’approuvée par le conseil communal le 27 avril 2015, aurait soumis tout projet de démolition, de transformation, de modification ou d'agrandissement concernant un bâtiment protégé au niveau communal, respectivement un bâtiment remarquable à un avis préalable facultatif, respectivement obligatoire du Service des Sites et Monuments. De cette manière, les autorités communales auraient méconnu le principe selon lequel le bourgmestre devrait se prononcer purement et simplement sur la conformité du projet de construction respectivement de démolition aux règlements de police urbanistique.
En effet, en application de l'article 37 de la loi du 19 juillet 2004 ainsi que de la jurisprudence des juridictions administratives, le bourgmestre ne saurait faire dépendre la délivrance d'une autorisation de construire de l'obtention préalable d'un avis d'une autorité qui ne disposerait d'ailleurs d'aucune compétence légale en la matière. Or, la partie demanderesse aurait à juste titre relevé dans le cadre de sa réclamation qu’il ne serait pas suffisamment précisé quand un projet pourrait être soumis ou quand il échapperait à la formalité d’un avis préalable et que la conséquence en serait que le bourgmestre disposerait d'une marge d'appréciation lui permettant, le cas échéant, de retarder l'octroi d’une autorisation de bâtir via la saisine du Service des Sites et Monuments nationaux qui ne se verrait imposé aucun délai pour rendre son avis.
Le délégué du gouvernement affirme qu’il serait constant en cause que la partie écrite soumise pour approbation au ministre n’aurait pas été satisfaisante, de sorte qu’elle aurait dû être redressée et ce notamment en vue de la rendre conforme avec l'article 2 de la loi du 19 juillet 2004. Ainsi, sur base des observations et objections présentées par la partie demanderesse, le ministre aurait, en vertu de l'article 18 de la loi du 19 juillet 2004, substitué à la décision du conseil communal une décision nouvelle sous forme d'une reformulation de l'article 20 de la partie écrite du PAG de manière à le faire concorder avec les exigences légales. En ce faisant, le ministre aurait partiellement tenu compte des observations formulées par la partie adverse. Ainsi, toute intervention du Service des Sites et Monuments dans la procédure de délivrance d’une autorisation de construire aurait, tel que souhaité par la partie adverse, été supprimée.
Le représentant étatique conclut que lorsqu'un réclamant rendrait le ministre attentif au fait que le texte lui soumis pour approbation comporterait des insécurités juridiques, il serait par la suite malvenu de critiquer les modifications entreprises rendant le texte remanié conforme aux exigences légales et le débarrassant de contraintes notables pour les administrés. Les modifications entreprises par le ministre seraient ainsi à mettre en balance avec l'ancien libellé de la partie écrite du PAG. De surplus, le ministre aurait estimé qu'in fine, le texte remanié ne serait pas moins favorable à l'administré, bien au contraire.
Dans le cadre de son mémoire en réplique, la partie demanderesse argumente en substance que la version de la partie écrite du PAG telle que soumise pour approbation au ministre aurait constitué ni une entrave à l'autorité du bourgmestre, ni une incohérence par rapport à l'article 37 de la loi du 19 juillet 2004.
Toutefois, la version actuelle, développée par le ministre à sa propre initiative, serait nettement plus contraignante. Enfin, la partie demanderesse conteste formellement que la modification formulée par le ministre aurait été demandée directement ou indirectement que ce soit par l'administration communale, ou par elle-même.
Force est au tribunal de constater que si les parties s’accordent en principe sur la question des compétences du ministre en matière d’approbation d’un PAG découlant de l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004, elles sont cependant en désaccord sur la question de savoir si, concrètement en l’espèce, le ministre a agi dans les limites des compétences lui attribuées ou s’il les a dépassées.
En ce qui concerne les compétences du ministre en matière d’approbation d’un PAG, c’est à juste titre que la partie demanderesse se réfère à l’arrêt précité de la Cour administrative du 6 février 2014, ainsi qu’à l’arrêt précité de la Cour constitutionnelle du 20 juin 2014. Dans le cadre de son arrêt précité, la Cour administrative a retenu que le ministre statuant dans le cadre de l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004 revêt deux compétences.
Ainsi : « D’une part, il est appelé à toiser les réclamations portées devant lui dans le cadre du processus visant à résoudre autant que possible les doléances des administrés dont la participation est censée être garantie à travers la procédure de collaboration et de participation organisée depuis la loi de 1937 et reprise par la loi de 2004 au double échelon communal et étatique, à travers respectivement les objections devant le conseil communal et les réclamations devant le ministre de l’Intérieur, sans préjudice d’une possibilité de participation dès avant que les aiguillages ne fussent posés en vertu des dispositions pertinentes en matière d’environnement dont notamment la Convention faite à Aarhus (Danemark) le 25 juin 1998 sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, approuvée par la loi du 31 juillet 2005. (…) D’un autre côté, en tant qu’autorité tutélaire statuant dans le cadre de ses attributions prévues par l’article 107 de la Constitution et dans le respect des exigences découlant de la Charte d’autonomie locale, le ministre est appelé à contrôler, suivant l’article 18 pertinent, la légalité de la procédure et de la démarche des autorités communales dans le cadre de l’adoption du projet d’aménagement général appelé à devenir PAG. Il s’agit ici d’une attribution tutélaire classique suivant le mécanisme de la tutelle d’approbation. Ces deux compétences ne sont pas inconciliables, mais complémentaires. Même si elles s’expriment à travers un seul et même document, elles ne sont pas simultanées. Compte tenu de la systématique régissant ces deux compétences de nature différente, le ministre est nécessairement d’abord appelé à toiser les réclamations. Compte tenu de l’état de la délibération communale portant adoption définitive de la réglementation communale d’urbanisme et du résultat du toisement ministériel des réclamations inclus, le ministre, en tant qu’autorité de tutelle est, dans un deuxième stade, amené soit à approuver dans sa globalité la délibération communale d’adoption définitive du projet d’aménagement communal, le cas échéant amendé suite aux réclamations accueillies par le ministre, soit à le désapprouver dans sa globalité. (…) ».
En ce qui concerne plus particulièrement la compétence du ministre pour statuer sur les réclamations présentées devant lui à l’encontre de la décision du conseil communal portant approbation du PAG, la Cour administrative a retenu que le ministre : « vide ces réclamations par rapport auxquelles il statue suivant un recours administratif en réformation. Il revêt à ce sujet un pouvoir de tutelle spéciale qui lui permet de substituer à la décision communale contrôlée une décision nouvelle. Ce droit de réformation sur recours, comme les autres mesures de tutelle spéciale, n’existe que dans les cas où le législateur l’a expressément consacré ». La Cour a détaillé les attributions en la matière du ministre en retenant qu’« en statuant à nouveau sur la même problématique, le ministre est dès lors, par la systématique du texte, appelé à siéger en lieu et place du conseil communal pour juger du bien-fondé de l’ancienne objection devenue réclamation, non retenue par hypothèse par le conseil communal, du moins pas entièrement.
Le système ainsi instauré comporte nécessairement que le ministre, en statuant sur la réclamation, prenne sa décision en tenant compte de la logique intrinsèque du plan, de la différenciation des optiques urbanistiques épousée par la commune, de la systématique des options opérées et de la cohérence surtout du système global instauré. La réclamation portée devant le ministre correspond dès lors à un dernier échelon précontentieux d’un recours administratif prévu par la loi. L’intervention du ministre elle-même se trouve à nouveau soumise au contrôle juridictionnel à travers le recours contentieux prévu, à charge d’appel, devant les juridictions administratives. » Par son arrêt précité du 20 juin 2014, la Cour constitutionnelle, saisie, par la Cour administrative à travers son arrêt précité du 6 février 2014, d’une question de constitutionnalité de l’article 18 de la loi du 19 juillet 2014 a retenu que « l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, dans sa version antérieure à la loi du 28 juillet 2011, est conforme à l’article 107 de la Constitution pris plus particulièrement en ses paragraphes 1er et 6, en ce qu’il accorde au ministre de l’Intérieur, autorité de tutelle par rapport à la gestion communale, un pouvoir de réformation dans le cadre de l’adoption et de l’approbation de plans d’aménagement communaux, plus particulièrement lorsque celui-ci statue sur les réclamations portées devant lui dans le cadre de l’aplanissement des difficultés prévu par ladite loi ».
Avant d’aborder plus en avant la question du respect, en l’espèce, par le ministre des compétences lui attribuées pour statuer sur les réclamations introduites contre la décision du conseil communal portant adoption du PAG, il convient de préciser que si, dans le cadre de leurs arrêts précités, la Cour administrative ainsi que la Cour constitutionnelle se sont prononcées par rapport à l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004 dans sa version antérieure à la modification opérée par la loi du 28 juillet 2011, la solution retenue dans ce contexte par la Cour administrative et la Cour constitutionnelle reste transposable au recours sous examen, régi, tel que retenu ci-avant, par la version de la loi du 19 juillet 2004, telle que modifiée par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013 et 14 juin 2015.
En effet, avant l’adoption de la loi du 28 juillet 2011, l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004 disposait que : « Le ministre statue dans les trois mois suivant la réception de l’avis du conseil communal prévu à l’article qui précède sur les réclamations en même temps qu’il décide de l’approbation définitive du projet d’aménagement général, qui prend dès lors la désignation de « plan d'aménagement général », ledit article, dans sa version telle que remaniée par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013 et 14 juin 2015, disposant que : « Le ministre statue sur les réclamations dans les trois mois qui suivent le délai prévu à l’article 16 alinéa 1, respectivement dans les trois mois suivant la réception des avis de la commission d’aménagement et du conseil communal prévus à l’article qui précède, en même temps qu’il décide de l’approbation définitive du projet d’aménagement général, qui prend dès lors la désignation de plan d’aménagement général.
Avant de statuer, le ministre vérifie la conformité et la compatibilité du projet de plan d’aménagement général avec les dispositions de la loi, et notamment les objectifs énoncés à l’article 2, avec ses règlements d’exécution ainsi qu’avec les plans et programmes déclarés obligatoires en vertu de la loi précitée du 30 juillet 2013 ou se trouvant à l’état de projet soumis à l’avis des communes ». Si, dès lors, l’article 18, dans sa version issue des modifications législatives de 2011, 2013 et 2015, comporte, par rapport à son ancienne version, quelques précisions quant à l’analyse de la légalité du PAG à effectuer par le ministre avant l’approbation dudit plan, il n’a pas été remanié en ce qui concerne la question de la compétence du ministre pour statuer sur les réclamations lui présentées, de sorte que la jurisprudence de la Cour administrative et de la Cour constitutionnelle en la matière garde toute sa pertinence, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté en cause.
Plus concrètement, quant à la question de savoir si, en l’espèce, le ministre s’est conformé à son pouvoir de réformation en statuant sur la réclamation introduite par devant lui par la partie demanderesse contre la décision du conseil communal du 27 avril 2015, il convient d’abord de constater que l’article 20 (2) de la partie écrite du PAG, telle qu’approuvée par le conseil communal le 27 avril 2015 disposait que :
« Article 20. Secteur protégé d'intérêt communal de type « environnement construit » et gabarits ou alignements à respecter (…) (2) Bâtiments protégés au niveau communal La liste des bâtiments protégés au niveau communal est jointe en annexe à la présente partie écrite.
Tout projet de démolition, de transformation, de modification ou d'agrandissement concernant un bâtiment protégé au niveau communal peut être soumis pour avis au Service des sites et monuments nationaux.
A l'extérieur du bâtiment, les composantes remarquables dignes de protection sont:
- le rythme entre pleins et vides;
- la forme et les éléments de toiture; la dimension, forme et position des baies;
- les modénatures;
- les éléments de décoration qui caractérisent ledit bâtiment;
- les matériaux utilisés traditionnellement;
- les teintes et revêtements traditionnels.
Tout bâtiment protégé au niveau communal présente un gabarit à respecter.
A la demande du propriétaire ou de l'autorité compétente, un inventaire peut encore être établi pour les éléments identitaires se trouvant sur la parcelle et aux alentours du bâtiment protégé. L'autorité compétente peut ordonner la conservation de la structure et des éléments historiques et identitaires inventoriés.
En ce qui concerne l'assainissement énergétique, des dérogations au niveau du respect des exigences minimales peuvent être octroyées par l'autorité compétente pour les bâtiments protégés afin que le caractère et la valeur historique de ces bâtiments puissent être sauvegardés.
Le bourgmestre pourra autoriser une dérogation aux dispositions réglementaires, la commission des bâtisses entendue en son avis, pour les bâtiments protégés au niveau communal ou national afin que le caractère et la valeur historique de ces bâtiments puissent être sauvegardés. » A travers sa décision déférée du 7 décembre 2015, le ministre a reformulé l’article 20 (2) de la partie écrite du PAG de sorte à revêtir la teneur reprise in extenso ci-avant. En substance, le ministre a retiré du libellé de l’article 20 (2) de la partie écrite du PAG le passage suivant : « Tout projet de démolition, de transformation, de modification ou d'agrandissement concernant un bâtiment protégé au niveau communal peut être soumis pour avis au Service des sites et monuments nationaux. », pour le remplacer par les dispositions suivantes : « Ces bâtiments ne pourront, en principe, en ce qui concerne leur seul aspect extérieur, subir aucune modification, transformation ou agrandissement qui serait susceptible de porter préjudice à leur intérêt historique, artistique, architectural ou esthétique.
De telles altérations sont cependant permises au cas où elles ne portent pas préjudice aux composantes remarquables qui caractérisent la substance bâtie qui fait l'objet de la protection communale.
S'il s'avère qu'un bâtiment protégé présenterait un danger d'écroulement ou qu'il se trouve dans un tel état de vétusté qu'il risquerait de porter préjudice à la sécurité publique, il pourra fait l'objet d'une démolition partielle, ou le cas échéant, intégrale. ».
Le ministre a encore retiré du libellé de l’article 20 (2) de la partie écrite du PAG, sans les remplacer, les passages suivants : « A la demande du propriétaire ou de l'autorité compétente, un inventaire peut encore être établi pour les éléments identitaires se trouvant sur la parcelle et aux alentours du bâtiment protégé. L'autorité compétente peut ordonner la conservation de la structure et des éléments historiques et identitaires inventoriés. » et « Le bourgmestre pourra autoriser une dérogation aux dispositions réglementaires, la commission des bâtisses entendue en son avis, pour les bâtiments protégés au niveau communal ou national afin que le caractère et la valeur historique de ces bâtiments puissent être sauvegardés. ». Enfin, le ministre a ajouté au libellé de l’article 20 (2) la phrase suivante :« Tout bâtiment protégé au niveau communal présente un gabarit à respecter. » Afin de déterminer si les modifications ainsi opérées au libellé de l’article 20 (2) de la partie écrite du PAG ont été effectuées par le ministre dans le cadre de son pouvoir de tutelle spéciale lui permettant de siéger en lieu et place du conseil communal pour juger du bien-
fondé de l’objection devenue réclamation, il convient d’analyser la réclamation introduite par la partie demanderesse auprès du ministre.
Il ressort ainsi du courrier de réclamation adressé le 6 mai 2015 par le mandataire de la partie demanderesse au ministre qu’à l’appui de sa réclamation, la partie demanderesse a critiqué le libellé de l’article 20 (2) la partie écrite du PAG, notamment dans la mesure où en prévoyant la possibilité de soumettre pour avis au Service des Sites et Monuments tout projet de démolition, de transformation, de modification ou d’agrandissement concernant un bâtiment protégé au niveau communal, ledit article 20 (2) ne préciserait pas « quand un projet peut être soumis ou quand il échappe à cette formalité », de sorte que « la conséquence en est que le bourgmestre disposera d’une marge d’appréciation lui permettant, le cas échéant, de retarder l’octroi de l’autorisation de bâtir via la saisine du Service des sites et Monuments nationaux qui ne se voit imposé aucun délai pour rendre son avis ». La demanderesse a encore critiqué, dans le cadre de sa réclamation, l’article 20 (2) de de la partie écrite du PAG, telle qu’adoptée par le conseil communal le 27 avril 2015, dans la mesure où il permettrait qu’à la demande du propriétaire ou de l'autorité compétente, un inventaire puisse être établi pour les éléments identitaires se trouvant sur la parcelle et aux alentours du bâtiment protégé.
A cet égard, la partie demanderesse a argumenté, dans le cadre de sa réclamation, que le PAG délèguerait à l’autorité compétente, dont l’identité ne serait pas précisée, le soin d’inventorier les « éléments identitaires » d’un bâtiment, notion, qui ne serait à son tour pas définie. La partie demanderesse a donc conclu, dans le cadre de sa réclamation, que les imprécisions invoquées induiraient une « insécurité juridique majeure pour les propriétaires concernés par un tel classement dès lors qu’ils ne [pourraient] connaître à l’heure actuelle, l’étendue des limitations à leur droit de propriété qui [seraient] imposées par la suite ».
L’analyse de la réclamation introduite par la partie demanderesse amène le tribunal à conclure que même si l’ultime finalité de la réclamation introduite par la partie demanderesse auprès du ministre contre la partie écrite du PAG, telle qu’adoptée par le conseil communal le 27 avril 2015, était certes de voir « supprimer le classement de l’immeuble [lui appartenant] comme bâtiment protégé au niveau communal », elle a toutefois critiqué le libellé dudit article 20 (2), tel qu’adopté par le conseil communal, en lui reprochant (i) de laisser une marge d’appréciation trop large au bourgmestre et (ii) de permettre la création d’un « inventaire », dont l’auteur et le contenu ne seraient pas précisés à suffisance. Force est, par ailleurs, de constater que ce sont précisément les passages de l’article 20 (2) de la partie écrite du PAG critiqués par la partie demanderesse que le ministre a enlevé, respectivement reformulé, à travers sa décision déférée du 7 décembre 2015.
Il s’ensuit que les modifications dudit article 20 (2), telles qu’opérées par le ministre, s’inscrivent dans le contexte de son pouvoir de réformation particulier lui permettant de substituer sa propre décision à celle du conseil communal dans le cadre bien délimité de la réclamation portée devant lui, de sorte à ne pas contrevenir à l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004, ni d’ailleurs aux prérogatives d’autorité de tutelle, voire de tutelle spéciale du ministre.
Enfin, dans la mesure où la Cour constitutionnelle a retenu, dans son arrêt précité du 20 juin 2014, la conformité de l’article 18 de la loi du 19 juillet 2004 à l’article 107 de la Constitution et où, tel que retenu ci-avant, la solution ainsi dégagée par la Cour constitutionnelle est transposable en l’espèce, le moyen tiré d’une méconnaissance par la décision ministérielle déférée du 7 décembre 2015 de l’article 107 de la Constitution est également à rejeter pour ne pas être fondé.
• Quant au moyen tiré d’un défaut de base légale ou réglementaire ainsi que d’une violation de la Constitution par les décisions déférées en créant un secteur protégé de type environnement construit surplombant la parcelle ….. et en classant à l’intérieur dudit secteur protégé un immeuble en tant que « bâtiment protégé au niveau communal ».
La partie demanderesse s’interroge sur le principe même de la possibilité pour une commune de procéder au classement individuel d'un immeuble, pour lui imposer un certain nombre de contraintes, limitant les droits du propriétaire. Elle soutient que cette possibilité ne serait pas prévue par la loi du 19 juillet 2004. Seul l'article 2 de la loi préciserait que « le respect du patrimoine culturel » serait l'un des objectifs de l'aménagement communal, à prendre en considération dans le cadre des autres objectifs de la loi. Par ailleurs, l'article 33 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le contenu du plan d'aménagement général d'une commune, désigné ci-après par « le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 », permettrait aux communes de déterminer uniquement des secteurs, constituant des parties du territoire communal, pour lesquels des servitudes spéciales seraient imposées. Cependant, ledit règlement grand-ducal ne permettrait pas aux communes de désigner individuellement des immeubles pour leur imposer, individuellement, des servitudes spéciales. Dès lors, les servitudes urbanistiques liées aux « bâtiments protégés au niveau communal » et aux « gabarit protégé au niveau communal » seraient contraires à la réglementation grand-ducale.
La partie demanderesse se réfère dans le même contexte à un jugement du tribunal administratif du 30 juin 2011, inscrit sous le numéro 27398 du rôle, qui aurait censuré un classement individuel d’un immeuble par une administration communale sous l’approbation du ministre sur base du règlement grand-ducal du 25 octobre 2004 concernant le contenu du PAG d’une commune.
Pour autant que le tribunal arriverait à la conclusion que le conseil communal pouvait procéder au classement d’un immeuble individuel en tant que bâtiment protégé, la partie demanderesse fait valoir qu’une administration communale ne serait pas autorisée à procéder à la détermination de secteurs et de bâtiments protégés pour ensuite décider elle-même des limitations concrètes qu'elle entendrait apporter aux droits du propriétaire. Ainsi, le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 prévoirait le principe d'une servitude d'utilité publique, tout en confiant au pouvoir communal le soin de définir le contenu (régime juridique) et l'assiette (emprise) de cette servitude. Or, de l’avis de la partie demanderesse, ceci serait parfaitement anticonstitutionnel. Elle se réfère dans ce contexte aux débats menés dans le cadre des travaux parlementaires ayant abouti à la loi précitée du 3 mars 2017 dite « Omnibus », ainsi qu’à un avis du Conseil d’Etat, émis le 18 novembre 2014 par rapport au projet de loi relatif à la modification de la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire4, dans le cadre duquel le Conseil d’Etat aurait retenu que les servitudes d'utilité publique ayant pour effet de restreindre les droits de propriété seraient à considérer comme des matières réservées à la loi. La partie demanderesse, en partant du principe que les servitudes urbanistiques seraient des matières réservées à la loi, conclut que le Grand-Duc ne pourrait que se borner à prendre des règlements aux fins, conditions et suivant les modalités spécifiées par la loi.
Ainsi, le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 outrepasserait le cadre légal, de sorte que son application devrait être écartée, en vertu de l'article 95 de la Constitution. Elle continue en affirmant que même à supposer que cette matière ne soit pas réservée à la loi, la limitation du droit de propriété, à travers le classement individuel de l'immeuble concerné, ne serait « prise ni par la loi, ni en vertu de la loi, mais bien par le pouvoir réglementaire communal, sur base d'une délégation irrégulière du pouvoir réglementaire ».
Le délégué du gouvernement, rejoint en son argumentation par l’administration communale de Käerjeng, répond en substance que les servitudes litigieuses ne seraient pas à considérer comme œuvrant dans une matière réservée à la loi. Elles s'analyseraient en une réglementation de l'usage des biens, et échapperaient à l'empire de l'article 16 de la Constitution qui ne viserait que la privation de la propriété. Elles ne sauraient être considérées comme attentatoires à l'article 16 de la Constitution que si elles opèrent un changement dans les attributs de la propriété qui est substantiel au point qu'il prive le propriétaire des aspects essentiels de son droit de propriété. Dans ce contexte, le délégué du gouvernement renvoie à un arrêt de la Cour administrative du 28 avril 2015, inscrit sous le numéro 35396C du rôle.
Dans le cadre de son mémoire en réplique, la partie demanderesse maintient son argumentation et expose que le fait que l’administration communale procèderait à la désignation d’une maison bien déterminée comme bâtiment à protéger ne pourrait être autrement considéré que comme acte administratif individuel. En prenant l’initiative d’intégrer des actes individuels dans le PAG « pour en faire un melting pot règlementaire », l’administration communale violerait le texte et l’esprit de la loi du 1er décembre 1978 réglant la procédure administrative non contentieuse.
L’administration communale répond que le PAG constituerait un règlement communal ayant trait à l’aménagement du territoire communal, ou au développement urbain, de sorte qu’il serait nécessaire de pouvoir y repérer, dans les zones déterminées, les immeubles dignes de protection et donc soumis à un régime particulier.
Force est d’abord au tribunal de constater qu’il ressort de la partie graphique du PAG, ainsi que des extraits cadastraux versés en cause que la parcelle ….., appartenant à la partie demanderesse, a été classée par les décisions déférées en « secteur protégé de type environnement construit ». Par ailleurs, l’immeuble situé sur ladite parcelle au numéro ….. a été désigné comme « bâtiment protégé au niveau communal ».
4 Conseil d’Etat, avis n° 50.683, disponible sur http://www.conseil-etat.public.lu/fr.
Quant à la compétence des autorités communales en matière de protection du patrimoine culturel, il échet en premier lieu de signaler l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, aux termes duquel : « Les communes ont pour mission de garantir le respect de l’intérêt général en assurant à la population de la commune des conditions de vie optimales par une mise en valeur harmonieuse et un développement durable de toutes les parties du territoire communal par: (…) (e) le respect du patrimoine culturel et un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage lors de la poursuite des objectifs définis ci-dessus;
(…) ».
Il s’ensuit qu’un des objectifs à poursuivre par les autorités communales dans le cadre de l’élaboration d’un plan d'aménagement général est d’assurer le respect du patrimoine culturel.
L’article 9 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit qu’entre autres, le contenu des parties graphique et écrite du plan d'aménagement général est arrêté par règlement grand-ducal. En application dudit article 9 a été adopté le règlement grand-ducal du 28 juillet 20115, disposant dans son article 33 intitulé : « Secteurs protégés d’intérêt communal » que : « On distingue les secteurs protégés de type «environnement construit» et les secteurs protégés de type «environnement naturel et paysage» d’importance communale.
Les secteurs protégés de type «environnement construit» constituent les parties du territoire communal qui comprennent des immeubles ou parties d’immeubles dignes de protection et qui répondent à un ou plusieurs des critères suivants : authenticité de la substance bâtie, de son aménagement, rareté, exemplarité du type de bâtiment, importance architecturale, témoignage de l’immeuble pour l’histoire nationale, locale, sociale, politique, religieuse, militaire, technique ou industrielle.
Les secteurs protégés de type «environnement naturel et paysage» constituent les parties du territoire communal qui comprennent des espaces naturels et des paysages dignes de protection ou de sauvegarde.
Ces secteurs sont soumis à des servitudes spéciales de sauvegarde et de protection définies dans le plan d’aménagement général. Les secteurs protégés de type «environnement construit» sont marqués de la surimpression «C». Les secteurs protégés de type «environnement naturel et paysage» sont marqués de la surimpression «N». ».
Dès lors, étant donné que les autorités communales sont habilitées à procéder à la création de secteurs protégés de type environnement construit et que, par ailleurs, l’article 33 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 prévoit expressément que les secteurs protégés de type environnement construit comprennent des immeubles ou parties d’immeubles dignes de protection, il relève de la logique du système mis en place par le législateur pour assurer le respect du patrimoine culturel que les autorités communales sont autorisées à désigner de manière individuelle à l’intérieur des secteurs protégés de type environnemental construit tout immeuble ou parties d’immeuble digne de protection.
En créant, en l’espèce, un secteur protégé de type environnement construit surplombant la parcelle ….. appartenant à la partie demanderesse et en classant à l’intérieur 5 Entretemps abrogé par le règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d'aménagement général d’une commune, mais applicable au moment de la prise des décisions déférées et partant au recours sous examen, dans la mesure où le tribunal qui statue dans le cadre d’un recours en annulation est amené à apprécier la situation de droit et de fait telle qu’elle s’est présentée au moment de la prise de la décision déférée.
dudit secteur protégé un immeuble en tant que « bâtiment à protéger au niveau communal », les décisions déférées ne contreviennent partant pas aux articles 2 de la loi du 19 juillet 2004 et 33 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011. Par ailleurs, il relève de la compétence des autorités communales de déterminer le régime auquel les bâtiments situés en secteur protégé de type environnement construit sont soumis, dans la mesure où l’article 33 du règlement grand-ducal précité précise expressément que : « Ces secteurs sont soumis à des servitudes spéciales de sauvegarde et de protection définies dans le plan d’aménagement général. ». Dès lors, le volet du moyen selon lequel les autorités communales ne seraient pas habilitées à procéder au classement individuel d’un immeuble en tant que secteur protégé de type environnement construit est à rejeter pour ne pas être fondé.
Il convient d’ajouter que la conclusion ainsi retenue n’est pas énervée par les explications de la partie demanderesse relatives au jugement précité du tribunal administratif du 30 juin 2011. En effet, force est de constater, d’une part, que la conclusion dudit jugement n’est pas transposable au recours sous examen, étant donné qu’elle est fondée sur le règlement grand-ducal du 25 octobre 2004 concernant le contenu du PAG d’une commune qui a entretemps été abrogé par le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 et qui n’est partant pas applicable au recours sous examen et, d’autre part, que par un jugement du 9 juin 2016, inscrit sous le numéro 35751 du rôle, le tribunal administratif a rejeté sur base des dispositions du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 le moyen – similaire à celui dont il est saisi en l’espèce – selon lequel les autorités communales ne seraient pas habilitées à procéder au classement individuel d’un immeuble en tant que secteur protégé de type environnement construit.
Enfin, et toujours dans le même contexte, le tribunal ne saurait suivre le raisonnement de la partie demanderesse selon lequel, en désignant certains immeubles en tant que « bâtiment protégé au niveau communal », l’administration communale aurait procédé à l’adoption d’autant d’actes administratifs individuels et violé de cette manière le texte et l’esprit de la loi précitée du 1er décembre 1978. Force est, en effet, au tribunal de constater de manière générale que selon la jurisprudence constante des juridictions administratives, les décisions sur les projets d’aménagement, lesquelles ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. Plus particulièrement en l’espèce, s’il est certes vrai que l’administration communale a désigné des immeubles isolés sur son territoire comme « bâtiment protégé au niveau communal », voire comme « gabarit protégé au niveau communal », il n’en demeure pas moins que le régime juridique auquel sont soumis ces immeubles est déterminé par des dispositions générales6 qui s’appliquent de manière identique à l’intégralité des immeubles ainsi classés sur le territoire de la commune et qui revêtent dès lors un caractère réglementaire. L’argument afférent est partant, à son tour, à rejeter pour ne pas être fondé.
Quant à l’argument selon lequel le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 prévoirait le principe d’une servitude d’utilité publique et contreviendrait de la sorte aux articles 16, respectivement 32 (2) et (3) de la Constitution, il échet de préciser que par un arrêt rendu en date du 4 octobre 20137, la Cour constitutionnelle tout en consacrant le principe de la mutabilité des plans d’aménagement général et en soulignant que le juge administratif n’était pas autorisé à sanctionner un reclassement d’un terrain précédemment classé en zone constructible en zone non constructible, mais que les propriétaires concernés pouvaient se 6 en l’occurrence l’article 20 de la partie écrite du PAG 7 Cour constitutionnelle, 4 octobre 2013, n° 00101 du registre pourvoir, le cas échéant, devant le juge judiciaire en vue de l’allocation d’une indemnité éventuelle, a déclaré contraires à l’article 16 de la Constitution les dispositions de la loi du 19 juillet 2004 posant en principe que les servitudes résultant d’un plan d'aménagement général n’ouvrent droit à aucune indemnité et prévoyant des exceptions à ce principe qui ne couvrent pas toutes les hypothèses dans lesquelles la privation de la jouissance du terrain frappé par une telle servitude est hors de proportion avec l’utilité publique. Dans le même arrêt, la Cour constitutionnelle a réaffirmé la considération qu’elle avait retenue dans son arrêt du 26 septembre 20088, selon laquelle un changement dans les attributs de la propriété, qui est à tel point substantiel qu’il prive celle-ci d’un de ses aspects essentiels, peut constituer une expropriation.
Force est à cet égard de prime abord au tribunal de constater que, contrairement aux explications de la partie demanderesse, la Cour constitutionnelle n’a pas retenu que de manière générale toute servitude d’urbanisme constituait une expropriation, mais elle a en revanche retenu de manière nuancée que seul un changement dans les attributs de la propriété à tel point substantiel qu’il prive celle-ci d’un de ses aspects essentiels peut constituer une expropriation. Cette nuance a, d’ailleurs, bien été relevée par le Conseil d’Etat dans son avis précité du 18 novembre 2014 auquel se réfère la partie demanderesse. De même, contrairement à ce que la partie demanderesse tente de faire croire, il ne peut pas être déduit des travaux parlementaires relatifs à la loi précitée du 3 mars 2017 dite « Omnibus », et plus particulièrement du procès-verbal de la réunion du 13 novembre 2014 de la commission de la Fonction publique et de la Réforme administrative et de la Commission des Affaires intérieures de la Chambre des députés que toute servitude urbanistique était à considérer comme expropriation. Lesdites commissions n’ont en effet pas spécifiquement insisté sur cette problématique dans le cadre de leur avis, mais se sont concentrées sur le droit à indemnisation résultant, le cas échéant, des servitudes urbanistiques9.
Quant au bien-fondé de l’argument de la partie demanderesse, le tribunal est amené à constater en l’espèce au vu de la solution dégagée par la Cour constitutionnelle dans son arrêt précité du 4 octobre 2013, que s’il est certes vrai que le reclassement de la parcelle de la partie demanderesse en « secteur protégé de type environnement construit » et la désignation à l’intérieur dudit secteur d’un immeuble en tant que « bâtiment protégé au niveau communal » affecte le droit de propriété de la partie demanderesse, dans la mesure où toute modification, transformation ou agrandissement dudit immeuble est subordonné à des conditions, ces 8 inscrit sous le numéro 00046 du registre 9 Doc. parl. 6704 : Réunion jointe de la Commission de la Fonction publique et de la Réforme administrative et de la Commission des Affaires intérieures du 13/11/2014 « (…) Ce système de non-indemnisation systématique des servitudes sauf exceptions bien restrictives a été déclaré inconstitutionnel par arrêt n° 101/13 de la Cour constitutionnelle du 4 octobre 2013 au motif qu'il ne couvrait pas toutes les hypothèses dans lesquelles la privation de jouissance du terrain frappé par une telle servitude est hors de proportion avec l'utilité publique à la base de la servitude. La Cour a rappelé en outre que l'article 16 de la Constitution garantit la protection du droit de propriété et prohibe l'expropriation autrement que pour cause d'utilité publique et moyennant juste indemnité. Elle a enfin relevé que conformément au droit commun, les propriétaires touchés ont toujours la possibilité, suivant la situation concrète du cas d'espèce, de faire valoir devant le juge judiciaire un droit à indemnisation dépendant notamment, de la situation du terrain, du caractère contraignant de la servitude et des projets concrets de viabilisation du terrain. La Cour constitutionnelle ayant tout aussi clairement confirmé que l'article 16 de la Constitution n'entrave en rien le droit des pouvoirs publics d'instaurer des servitudes d'urbanisme dans un but d'utilité publique et laisse ainsi intact le principe de la mutabilité des plans d'aménagement général, il est proposé de supprimer toute disposition restrictive du droit à indemnisation et de s'en remettre au droit commun en la matière. Pour des raisons de sécurité juridique il est toutefois proposé de limiter la prescription d'éventuelles demandes en indemnisation à 5 ans. S'agissant en fin de compte d'une question de juste équilibre et de proportionnalité à apprécier au cas par cas, il n'est pas opportun de traduire l'apport de l'arrêt de la Cour constitutionnelle dans un texte normatif rigoureux et précis (article 15).(…) » classements n’entravent cependant pas les attributs du droit de propriété d’une manière telle que la limitation opérée puisse être qualifiée d’équivalente à une expropriation. Le classement opéré de la parcelle ….. de la partie demanderesse n’étant dès lors pas à considérer comme expropriation, il ne tombe pas dans le champ d’application de l’article 16 de la Constitution.
Le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011, tout comme, d’ailleurs, les décisions déférées, n’intervenant pas en matière d’expropriation réservée à la loi par l’article 16 de la Constitution, l’analyse du moyen tiré d’une violation de l’article 32 (2) et (3) de la Constitution au motif que le règlement grand-ducal serait intervenu en matière réservée à la loi, devient surabondante.
Il s’ensuit que le moyen de la partie demanderesse tiré d’une violation de l’article 16 en combinaison avec l’article 32 (2) et (3) de la Constitution, est partant à rejeter pour ne pas être fondé.
Si la partie demanderesse fait encore valoir que les servitudes urbanistiques ayant pour effet de restreindre le droit de propriété seraient des matières réservées à la loi et qu’à travers l’article 33 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011, la limitation au droit de propriété fixée à travers les « secteurs protégés de type environnement construit » ne serait prise ni par la loi, ni en vertu de la loi, mais par le pouvoir réglementaire communal en vertu d’une délégation irrégulière du pouvoir réglementaire, force est de rejeter cet argument pour ne pas être fondé. D’une part, le tribunal vient de rejeter le moyen tiré d’une violation de l’article 16 de la Constitution au motif que les servitudes adoptées en l’espèce ne constituent pas une matière réservée à la loi. D’autre part, tel que précisé ci-avant, la loi du 19 juillet 2004 confie à travers son article 2 (e) aux autorités communales la mission de veiller, par le mécanisme des PAG, au respect du patrimoine culturel et ainsi, implicitement mais nécessairement, la mission de poser des servitudes urbanistiques sur certains immeubles, dont des bâtiments, dignes de protection. A cet égard, il y a lieu de rappeler qu’en vertu du principe de l’autonomie communale, consacré par l’article 107 de la Constitution, aux termes duquel « (…) Les communes forment des collectivités autonomes, à base territoriale, possédant la personnalité juridique et gérant par leurs organes leur patrimoine et leurs intérêts propres (…) », les autorités communales sont investies d’une certaine puissance de commandement, appelée pouvoir communal, par opposition au pouvoir central. Ce pouvoir communal, qui dérive de la puissance souveraine, n’existe qu’en vertu de la loi et dans les limites qu’elle détermine et il est fonction du pouvoir central en ce sens que le pouvoir central est diminué dans la proportion où la loi le décharge de certains devoirs d’intérêt purement local pour les conférer aux autorités communales.10 En d’autres termes, la loi peut charger directement les autorités communales de la mission de réglementer, en vertu de leur pouvoir réglementaire propre, certaines matières d’intérêt communal, dans les limites qu’elle détermine, sans devoir passer par un règlement grand-ducal. C’est ce que le législateur a fait par le biais de l’article 2 (e) de la loi du 19 juillet 2004, en permettant aux autorités communales de définir elles-
mêmes, par voie réglementaire communale, des servitudes urbanistiques destinées garantir le respect du patrimoine culturel. Si le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 est venu réglementer en détail le régime du contenu des PAG, il n’en demeure pas moins que la délégation au pouvoir réglementaire communal provient directement de la loi du 19 juillet 2004. Il s’ensuit que l’argumentation afférente est à rejeter pour ne pas être fondée.
10 P. Majerus, « L’Etat luxembourgeois », Luxembourg, Imprimerie Editpress, 6e édition, 1990, p. 324.
• Quant au moyen tiré d’une violation des dispositions de la loi modifiée du 18 juillet 1983 concernant la conservation et la protection des sites et monuments nationaux et d’un détournement de procédure La partie demanderesse fait valoir sous ce volet de son recours que la législation luxembourgeoise permettrait le classement individuel d'immeubles dont la conservation présente un intérêt public d’un point de vue archéologique, historique, artistique ou esthétique. Ce classement comme monument national ou à l'inventaire supplémentaire en application des dispositions de la loi du 18 juillet 1983 concernant la conservation et la protection des sites et monuments nationaux, désigné ci-après par « la loi du 18 juillet 1983 », ferait l’objet d'une procédure qui garantirait les droits du propriétaire concerné, par différentes mesures, telles que la notification du projet de décision, la possibilité de faire valoir ses observations, des avis consultatifs et enfin des subsides de l'Etat pour les travaux à réaliser en vue du maintien des éléments identitaires de l'immeuble classé. Toutefois, en classant, via le PAG, des immeubles pour leur imposer des servitudes urbanistiques en vue de leur conservation, la commune de Käerjeng aurait contourné la procédure prescrite par la loi du 18 juillet 1983 ainsi que les garanties pour le propriétaire qui y seraient reprises.
Le délégué du gouvernement, de nouveau rejoint en son argumentation par l’administration communale de Käerjeng, fait valoir qu’outre la compétence conférée par les dispositions de la loi du 18 juillet 1983 au gouvernement en conseil en matière de conservation et de protection des sites et monuments nationaux, la loi du 19 juillet 2004 aurait également attribué compétence en matière de protection du patrimoine culturel aux autorités communales à travers son article 2. Le délégué du gouvernement argumente à ce sujet que la protection communale à travers la création d’ensembles sensibles et de secteurs protégés s’analyserait le plus souvent comme une protection des façades, des volumes et gabarits et serait ainsi davantage assimilable à une mesure de protection esthétique, alors que la protection nationale à travers un classement comme monument national ou par une inscription à l'inventaire supplémentaire serait plutôt à entrevoir comme une protection du patrimoine (« Denkmalschutz ») à proprement parler.
Force est à cet égard au tribunal de constater que le législateur a mis en place deux régimes distincts de protection des sites et monuments en adoptant, d’une part, la loi du 18 juillet 198311 et en insérant, d’autre part, à l’article 2 (e) de la loi du 19 juillet 2004 parmi les missions mises à charge des communes le « respect du patrimoine culturel ». Ces deux régimes de protection sont distincts comme relevant de la compétence d’autorités différentes et répondant à des critères spécifiques inscrits de part et d’autre dans des corps de textes différents à appliquer respectivement, chacun dans son contexte propre concerné12. Ainsi, tandis que l’article 2 (e) de la loi du 19 juillet 2004 vise à assurer une protection des sites et monuments culturels et historiques au niveau communal, les dispositions de la loi du 18 juillet 1983 s’inscrivent plutôt dans un contexte général et tendent au niveau national à la protection du patrimoine culturel et historique13. Il s’ensuit que le ministre, voire le gouvernement en conseil, au niveau de la 11 modifiée par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », qui n’est pas applicable au recours sous examen dans la mesure où elle est intervenue ultérieurement à la prise des décisions déférées et où le tribunal qui statue dans le cadre d’un recours en annulation, est amené à apprécier la situation de droit et de fait telle qu’elle s’est présentée au moment de la prise des décisions déférées.
12 Trib. adm. 26 février 2003, n° 14987 du rôle, Pas. adm. 2016, V° Urbanisme, n°268 13 V. à ce sujet l’exposé des motifs du projet de loi ayant abouti à la loi du 18 juillet 1983, énonçant l’objectif dudit projet comme suit : « la préservation de la continuité historique dans l'environnement est essentielle pour le maintien ou la création d'un cadre de vie qui permette à l'homme de trouver son identité et d'éprouver un sentiment de sécurité face aux mutations brutales de la société : un nouvel urbanisme cherche à retrouver les espaces clos, l'échelle humaine, l'interprétation des fonctions et la diversité socio-culturelle qui caractérisent les procédure prévue par la loi du 18 juillet 1983 et le conseil communal au niveau de la procédure mise en place par la loi du 19 juillet 2004, statuent chacun dans sa propre sphère de compétence14.
Force est dès lors au tribunal de constater que le conseil communal de Käerjeng, en créant, en l’espèce, un « secteur protégé de type environnement construit » surplombant la parcelle ….. appartenant à la partie demanderesse et en classant à l’intérieur dudit secteur protégé un immeuble en tant que « bâtiment protégé au niveau communal », a agi dans le cadre de sa propre sphère de compétence, lui attribuée par l’article 2 (e) de la loi du 19 juillet 2004, et n’a point, tel que soutenu par la partie demanderesse, contourné la procédure prescrite par la loi du 18 juillet 1983, ni commis un détournement de pouvoir. Le moyen afférent est partant à rejeter.
• Quant au moyen tiré d’un défaut de motivation et d’une disproportion du classement en secteur protégé de type environnement construit et du classement en « bâtiment protégé au niveau communal ».
La partie demanderesse soutient que le classement en secteur protégé de type environnement construit et la désignation de l’immeuble situé au numéro ….. à …. en tant que « bâtiment protégé au niveau communal » ne reposeraient sur aucun motif de fait ou de droit admissible et ne trouveraient ainsi aucune justification. Elle explique que son immeuble serait dépourvu de grand intérêt historique, culturel, artistique ou architectural. Ainsi, l’immeuble n’aurait ni une forme ni une dimension extraordinaires et ne serait pas marqué par des décorations, teintes ou matériaux traditionnels. Il s’agirait d’une maison à caractère rural telle qu’on pourrait en trouver dans n’importe quel autre village. Elle ne présenterait aucun caractère étonnant ou digne de protection, ni en ce qui concerne sa façade, la forme de ses fenêtres ou de son toit, ni en ce qui concerne sa structure architecturale. La partie demanderesse s’interroge encore sur le fait que sa maison a été désignée comme « bâtiment protégé au niveau communal », alors que les immeubles avoisinants auraient été classés comme « gabarit protégé au niveau communal ». Elle signale qu’elle ignorerait les critères appliqués par l’administration communale, d’une part, pour procéder à un tel classement et, d’autre part, pour distinguer entre les immeubles désignés comme « bâtiment protégé au niveau communal » et ceux désignés comme « gabarit protégé au niveau communal ».
La partie demanderesse s’interroge ensuite de manière générale sur la question de savoir si la politique en matière d'urbanisme consisterait à figer, ad vitam aeternam, une localité en ce qu'elle aurait été à une période donnée.
Elle expose ensuite que le classement en « bâtiment protégé au niveau communal » et les conséquences qu'il implique constitueraient une atteinte disproportionnée au droit de propriété. En effet, les contraintes en découlant seraient majeures, dans la mesure où elle serait obligée de « devoir en tout état de cause, sauf possibilité de dérogation floue, reconstruire un bâtiment à l'identique, devoir respecter les éléments identitaires de l'immeuble, alors que ces éléments identitaires ne sont à ce stade pas définis, etc. ». La demanderesse conclut qu’au vu de l'absence totale d'intérêt historique, architectural et esthétique de l’immeuble lui appartenant, le classement apparaîtrait comme totalement contraire au principe de proportionnalité.
tissus urbains anciens". (Déclaration d'Amsterdam adoptée en 1975 à l'issue du Congrès sur le patrimoine architectural européen). ». Doc. parl 2191, p.2164 14 V. en ce sens : Cour adm. 14 juillet 2011, n° 28102C du rôle, Pas. adm. 2016, V° Sites et monuments, n°23 L’administration communale de Käerjeng, rejointe en ses explications par le délégué du gouvernement, se réfère à un article publié dans la Revue Technique Luxembourgeoise15, intitulé : « Identifier et sauvegarder le patrimoine bâti » qu’elle verse à l’appui de ses explications pour : « renseigner le tribunal sur la démarche exacte d’inventaire des bâtiments à protéger, respectivement leur gabarit ». Quant à l’immeuble appartenant à la partie demanderesse et sis au numéro ….. à …., elle expose qu’il serait en bon état et serait caractéristique de la période de construction du XIX siècle. Sa rénovation récente respecterait la pente de terrain et reprendrait le style de l’époque quant à son volume et ses proportions. Le bâtiment concerné aurait une valeur historique et pourrait participer à une vocation touristique de la localité. L’administration communale ajoute qu’il y aurait lieu de noter que l'immeuble serait situé dans l'ancien secteur sauvegardé du village de …. à proximité de son centre, de sorte que sous l'ère de l'ancien PAG, il aurait d’ores et déjà fait partie du secteur protégé de …. Enfin, l’immeuble formerait avec les bâtiments sis aux numéros …, …, … et … de la même rue, un ensemble caractéristique et harmonieux dans un contexte rural. Elle conclut que la motivation du classement de l’immeuble comme « bâtiment protégé au niveau communal » serait donnée et qu’aucune disproportion avec le prétendu préjudice financier dont arguerait la partie demanderesse ne serait établie.
A titre liminaire, le tribunal rappelle que saisi d’un recours en annulation, sa mission de juge de la légalité exclut le contrôle des considérations d’opportunité et notamment d’ordre politique, à la base de l’acte administratif attaqué et inclut la vérification, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, de ce que les faits et considérations sur lesquels s’est fondée l’administration sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute. Dans cette démarche de vérification des faits et des motifs à la base de l’acte déféré, le tribunal est encore amené à analyser si la mesure prise est proportionnelle par rapport aux faits dont l’existence est vérifiée, une erreur d’appréciation étant susceptible d’être sanctionnée dans la mesure où elle est manifeste, au cas notamment où une flagrante disproportion des moyens laisse entrevoir un usage excessif du pouvoir par l’autorité qui a pris la décision, voire un détournement du même pouvoir par cette autorité.
En ce qui concerne concrètement le classement en secteur protégé de type environnemental construit de la parcelle ….. de la partie demanderesse, il échet de constater qu’un tel secteur doit remplir au moins un des critères énumérés de manière alternative à l’article 33 précité du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 à savoir : « authenticité de la substance bâtie, de son aménagement, rareté, exemplarité du type de bâtiment, importance architecturale, témoignage de l’immeuble pour l’histoire nationale, locale, sociale, politique, religieuse, militaire, technique ou industrielle ».
Il ressort en l’espèce de la décision déférée du conseil communal du 27 avril 2015 citée ci-avant par extraits que « les bâtiments classés au niveau communal résultent d'une liste établie ensemble avec le service des sites et monuments nationaux. Les classements repris sur cette liste ont été repris intégralement dans le noyau protégé des différentes localités. - 21 réclamants ont demandé que la protection soit enlevée - La Commission demande dans son avis que les bâtiments protégés ne puissent être démolis et que plusieurs maisons le long de l'avenue de Luxembourg soient également classées. Le CC ne souhaite pas restreindre les droits des propriétaires à un tel point, la démolition des bâtiments protégés doit rester possible. De plus, le CC juge que l'approche initiale, de reprendre l'entièreté des bâtiments protégés de la liste dans le secteur protégé et pas autour, est cohérente. Aucune construction ne sera rajoutée, ni 15 N° 3/2014.
supprimée des bâtiments remarquables. Pour éviter toute confusion, une liste des bâtiments sera jointe à la partie écrite du PAG. ».
Par ailleurs, l’administration communale a complété utilement la motivation à la base du classement en secteur protégé de type environnement construit, ainsi que de la désignation de « bâtiment protégé au niveau communal » à travers son mémoire en réponse, en fournissant en cause une explication détaillée à la base du classement de la parcelle ….. en secteur protégé de type environnement construit et de la désignation de l’immeuble situé sur ladite parcelle en « bâtiment protégé au niveau communal ». Elle souligne ainsi en substance que l’immeuble concerné, situé à proximité du centre de la localité de …, date du XIXe siècle et relève quant à son volume, ses percements et ses proportions du style dudit siècle. Ladite explication, qui, certes, n’a pas été corroborée concrètement par des documents versés en cause n’a toutefois pas non plus été valablement contestée par la partie demanderesse - qui se limite à contester de manière générale toute valeur historique des immeubles - et met bien en exergue la valeur surtout historique mais également architecturale de l’immeuble situé sur la parcelle ….., de sorte que le classement de ladite parcelle en secteur protégé de type environnement construit, ainsi que la désignation de l’immeuble sis au numéro …. à …. en « bâtiment protégé au niveau communal » se trouvent justifiés à suffisance de droit, sans qu’une disproportion entre ledit classement et les droits de la partie demanderesse ne puisse être constatée. Le moyen afférent est partant à rejeter pour ne pas être fondé.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en annulation est à rejeter dans son intégralité pour ne pas être fondé.
5. Quant à la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure Enfin, la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 euros telle que formulée par la partie demanderesse est à rejeter au vu de l’issue du litige.
L’administration communale de Käerjeng sollicite à son tour l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.500 euros. Cette demande est à rejeter étant donné qu’elle omet de spécifier la nature des sommes exposées non comprises dans les dépens et qu’elle ne précise pas en quoi il serait inéquitable de laisser des frais non répétibles à charge de la partie défenderesse.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
déclare le recours en annulation irrecevable pour autant qu’il vise la délibération du conseil communal du 24 septembre 2014 ;
le déclare recevable pour le surplus ;
au fond, le déclare non justifié, partant le rejette ;
rejette la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 euros formulée par Monsieur ….. ;
rejette la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.500 euros formulée par l’administration communale de Käerjeng ;
condamne Monsieur ….. aux frais.
Ainsi jugé par :
Françoise Eberhard, vice-président, Daniel Weber, juge, Michèle Stoffel, juge, et lu à l’audience publique du 9 octobre 2017 par le vice-président, en présence du greffier Marc Warken.
s. Marc Warken s. Françoise Eberhard Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 9.10.2017 Le greffier du tribunal administratif 29