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16/08/2017 | LUXEMBOURG | N°39997

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 août 2017, 39997


Tribunal administratif Numéro 39997 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 août 2017 Chambre de vacation Audience publique extraordinaire du 16 août 2017 Recours formé par Monsieur ….., …., contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.8.2008)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 39997 du rôle et déposée le 8 août 2017 au greffe du tribunal administratif par Maître Louis Tinti,

avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieu...

Tribunal administratif Numéro 39997 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 août 2017 Chambre de vacation Audience publique extraordinaire du 16 août 2017 Recours formé par Monsieur ….., …., contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.8.2008)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 39997 du rôle et déposée le 8 août 2017 au greffe du tribunal administratif par Maître Louis Tinti, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur ….., déclarant être né le …. à Gaza (Israel), alias ….., né le ….. à Gaza (Israel), alias ….., né le …., alias ….., né le ….., alias ….., né le ….., alias ….., né le ….., alias ….., né le ….., et être de nationalité israélienne, actuellement retenu au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 31 juillet 2017 ordonnant son placement au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de la décision en question ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 10 août 2017 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 11 août 2017 par Maître Louis Tinti pour compte de son mandant ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Louis Tinti et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Jacques en leurs plaidoiries respectives à l’audience de ce jour.

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Le 29 janvier 2010, Monsieur Monsieur ….., alias ….., alias ….., alias ….., alias ….., alias ….., alias ….., ci-après dénommé « Monsieur ….. », introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères, Direction de l’Immigration, une demande en obtention du statut de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, désignée ci-après par « la loi du 5 mai 2006 », entretemps abrogée par la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Les déclarations de Monsieur ….. sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg furent actées par un agent de la police grand-ducale, section police des étrangers et des jeux, dans un rapport du même jour.

Une recherche effectuée par la police Grand-ducale auprès de leurs confrères étrangers les renseigna que Monsieur ….. est connu en Belgique sous 11 « alias » différents et qu’il avait introduit une demande d’asile en Belgique le 11 octobre 2002, un refus de séjour ayant été notifié par les autorités belges le 12 novembre 2003.

Le 17 février 2010, les autorités luxembourgeoises contactèrent les autorités belges en vue de la reprise en charge du demandeur.

Par courrier du 1er mars 2010, les autorités belges informèrent les autorités luxembourgeoises qu’elles acceptaient de reprendre en charge l’examen de la demande de protection internationale de Monsieur …… Par une décision du même jour, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », informa Monsieur ….., que le Grand-Duché de Luxembourg était incompétent pour traiter sa demande de protection internationale et que le Royaume de Belgique en est responsable en vertu des dispositions de l’article 15 de la loi du 5 mai 2006, et des dispositions de l’article 16 paragraphe 1 point e) du règlement (CE) n°343/2003 du Conseil du 18 février 2003, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des Etats membres par un ressortissant d’un pays tiers, ci-après désigné par « le règlement 343/2003/CE ».

Par arrêté du même jour, le ministre constata le séjour irrégulier de celui-ci au Luxembourg, lui ordonna de quitter le territoire sans délai à destination du pays dont il a la nationalité, ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité, ou à destination du pays dans lequel il est autorisé à séjourner.

Par arrêté du 16 avril 2010, le ministre ordonna le placement de Monsieur ….. au Centre de rétention pour une durée maximale de trois mois à partir de la notification.

Le 22 avril 2010, Monsieur ….. fut transféré en Belgique.

Le 15 octobre 2010, les autorités allemandes adressèrent aux autorités luxembourgeoises une demande de reprise en charge du demandeur sur base du règlement 343/2003/CE. Par courrier du 28 octobre 2010 cette demande fut refusée au motif que le demandeur avait été transféré en Belgique, Etat compétent du traitement de la demande d’asile.

Le 12 juillet 2017, Monsieur ….. fut intercepté à Dudelange par la Police grand-ducale, Circonscription Régionale d’Esch-sur-Alzette, unité CP-SI Dudelange, dans une affaire de vol à l’étalage dans un supermarché, et ayant fait l’objet d’un procès-verbal n°2017/25724/530/SP du même jour, constant qu’il n’était ni en possession d’un passeport ni d’un document d’identité en cours de validité.

Le 31 juillet 2017, Monsieur ….. fut encore intercepté à Capellen par la Police grand-

ducale, Circonscription Régionale de Capellen, unité CP-SI Capellen, pour violences commises dans un restaurant, et ayant donné lieu à l’établissement d’un procès-verbal n°R15091 du même jour, ayant constaté qu’il n’était ni en possession d’un passeport ni d’un document d’identité en cours de validité.

Une recherche effectuée le même jour dans la base de données européenne EURODAC confirma que Monsieur ….. avait introduit diverses demandes de protection internationale, à savoir au Luxembourg le 29 janvier 2010, en Belgique les 23 avril 2010 et 12 janvier 2011 et aux Pays-Bas le 16 novembre 2016.

Par arrêté du même jour, le ministre prit à l’égard de Monsieur ….. une décision constatant son séjour irrégulier et lui ordonnant de quitter le territoire sans délai.

Par un second arrêté du même jour, le ministre ordonna le placement de Monsieur ….. au Centre de rétention pour une durée d’un mois, sur base des considérations et motifs suivants :

« Vu les articles 111, 120 à 123 et 125 (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu le rapport no R15091 du 31 juillet 2017 établi par la Police grand-ducale, unité CPI-

SI Capellen et le rapport no 2017/25557/524/PJ du 11/07/2017 établi par la Police grand-

ducale, unité Dudelange ;

Vu ma décision de retour du 31 juillet 2017, lui notifiée le le même jour ;

Attendu que l'intéressé est démuni de tout document d'identité et de voyage valable ;

Attendu que l'intéressé s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ;

Attendu que l'intéressé s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de trois mois à compter de son entrée sur le territoire ;

Attendu qu'il existe un risque de fuite dans le chef de l'intéressé, alors qu'il ne dispose pas d'une adresse au Grand-Duché de Luxembourg ;

Attendu que l'intéressé est connu sous un nombre important de noms alias ;

Attendu que l'intéressé fait l'objet de signalements multiples dans le Système d'information Schengen ;

Attendu que l'intéressé est enregistré dans la base de données EURODAC comme ayant précédemment introduit quatre demandes de protection internationale ;

Attendu par conséquent que les mesures moins coercitives telles qu'elles sont prévues par l'article 125, paragraphe (1), points a), b) et c) de la loi modifiée du 29 août 2008 précitée ne sauraient être efficacement appliquées ;

Considérant que les démarches nécessaires en vue de l'éloignement de l'intéressé seront engagées dans les plus brefs délais ;

Considérant que l'exécution de la mesure d'éloignement est subordonnée au résultat de ces démarches ; (…) ».

Le 1er août 2017, les autorités luxembourgeoises contactèrent les autorités belges en vue de la reprise en charge du demandeur en application du règlement UE 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, dit « règlement Dublin III », demande qui fût acceptée suivant courrier du 8 août 2017.

Par arrêté du 9 août 2017, le ministre ordonna le transfert de Monsieur ….. vers la Belgique, sur base des considérations suivantes :

« Vu le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

Vu ma décision de retour du 31 juillet 2017 ;

Attendu qu'en date du 1er août 2017 une demande de reprise en charge a été adressée aux autorités belges ;

Attendu qu'en date du 8 août 2017 la reprise en charge a été accordée ;

Attendu que le transfert vers la Belgique sera organisé dans les meilleurs délais et les modalités du transfert vous seront communiquées en temps utile. (…) ».

Par requête déposée le 8 août 2017 au greffe du tribunal administratif, Monsieur ….. a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision de placement en rétention précitée du 31 juillet 2017.

Etant donné que l’article 123, paragraphe (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après désignée par la « loi du 29 août 2008 », institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation.

Ledit recours ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai prévus par la loi, est recevable.

A l’appui de son recours et en fait, le demandeur fait valoir qu’il se trouve sur le sol de l’Union européenne depuis environ 35 ans et qu’il a présenté plusieurs demandes de protection internationale, ayant toutes été rejetées. Il admet ne plus avoir de passeport valable, le passeport remis lors de la première demande de protection internationale ayant expiré.

Il expose avoir été systématiquement rapatrié en Belgique, pays où il aurait présenté sa première demande de protection internationale, de sorte que toutes ses attaches se situeraient actuellement en Belgique, étant le pays où il a vécu la plupart du temps. Il explique être moralement épuisé et que sa condition de santé morale ne serait « pas des meilleurs ».

En droit, le demandeur reproche d’abord au ministre de ne pas avoir choisi une mesure moins coercitive que son placement en rétention administrative. A cet égard, il renvoie aux considérants numéros 15 et 16 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dénommée ci-

après « la directive 2008/115/CE », transposée en droit interne par les articles 120 (1) et 125 (1) de la loi du 29 août 2008. Il fait valoir qu’en application des prédits articles, la légalité d’une mesure de placement en rétention devrait s’apprécier en tenant en compte des critères suivants, à savoir le risque de fuite apprécié à la lumière de la situation individuelle de l’étranger, le caractère proportionné de la mesure et l’inexistence de mesures adéquates moins coercitives.

Le demandeur fait valoir que sa situation particulière permettrait de soutenir qu’aucun pays de l’Union européenne ne serait en mesure de le rapatrier. Or, la mesure de rétention ne se justifierait que pour autant que le retour du concerné vers son pays d’origine sinon son éloignement vers un autre pays de l’Union européenne présenteraient des perspectives raisonnables de réalisation. Dans ce contexte, la mesure de rétention ne serait à considérer que comme « moyen d’atteindre l’objectif du retour ».

Au vu du fait qu’un retour vers le pays d’origine serait in fine impossible, la mesure de rétention n’aurait aucune justification légale et serait disproportionnée.

Le délégué du gouvernement conclut au bien-fondé de la mesure prise par le ministre au vu de la situation irrégulière du demandeur au pays et sollicite le rejet du recours.

Ainsi, quant à la demande tendant à pouvoir bénéficier de mesures moins coercitives qu’un placement au Centre de rétention, il répond que de telles mesures ne pourraient être envisagées que s’il n’existe aucun risque de fuite dans le chef de la personne concernée. Or, le demandeur présenterait indubitablement un risque de fuite au sens de l’article 111 de la loi du 19 août 2008, puisqu’il ne remplirait pas les conditions prévues aux articles 34 et 100 de ladite loi. En outre, le demandeur ne présenterait aucune garantie de représentation, de sorte que seule une rétention administrative au Centre de rétention aurait été appropriée en l’espèce.

Le délégué du gouvernement conteste, par ailleurs, tout défaut de diligences de la part du ministre en vue du rapatriement du demandeur. Il explique que dès le placement du demandeur en rétention le 31 juillet 2017, le ministre aurait entrepris des démarches qu’il énumère de façon chronologique.

Quant aux affirmations du demandeur au sujet de l’impossibilité d’éloignement vers son pays d’origine, le délégué du gouvernement soulève que ces dernières seraient sans pertinence par rapport à la mesure de placement en rétention, mais concerneraient tout au plus la légalité de la décision de transfert qui ne serait toutefois pas concernée par le présent recours. Il soulève encore que le fait que les autorités belges ne seraient pas en mesure de l’éloigner vers son pays d’origine serait une question qui ne tomberait pas dans le champ de compétence des juridictions luxembourgeoises mais relèverait des autorités belges.

Afin d’appuyer son argumentation quant au manque de diligences de la part du ministre, le demandeur fait répliquer qu’aucune date pour un transfert vers Arlon n’aurait été fixée à ce jour. Etant donné qu’Arlon se situerait à faible distance, il apparaitrait raisonnable de pouvoir s’attendre à ce que le transfert se réalise dans un bref délai.

Aux termes de l’article 120, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008, tel que modifié par la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection subsidiaire, désignée ci-après par « la loi du 18 décembre 2015 », : « Afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement en application des articles 111, 116 à 118 (…), l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une structure fermée, à moins que d’autres mesures moins coercitives telles que prévues à l’article 125, paragraphe (1), ne puissent être efficacement appliquées. Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. (…) ».

En vertu de l’article 120, paragraphe (3), de la loi du 29 août 2008 : « La durée de la rétention est fixée à un mois. La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. (…) » L’article 120, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008 permet ainsi au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite notamment la mise à disposition de documents de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères notamment en vue de l’obtention d’un accord de reprise en charge de l’intéressé. Elle nécessite encore l’organisation matérielle du retour, en ce sens qu’un moyen de transport doit être choisi et que, le cas échéant, une escorte doit être organisée. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour une durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.

Le tribunal retient qu’en l’espèce, il n’est pas contesté que le demandeur se trouve en séjour irrégulier au Luxembourg, ayant fait l’objet d’une décision de retour le 31 juillet 2017, et qu’il ne dispose, par ailleurs, ni de documents d’identité ni de documents de voyage, de sorte qu’en vertu de l’article 111, paragraphe (3), point c) de la loi du 29 août 2008, aux termes duquel le risque de fuite est présumé plus particulièrement si l’étranger ne dispose pas de documents d’identité ou de voyage en cours de validité, le ministre pouvait a priori valablement, sur base de l’article 120, paragraphe (1), précité de la loi du 29 août 2008, qui renvoie expressément, notamment, à l’article 111 de la loi du 29 août 2008, placer le demandeur en rétention afin d’organiser son éloignement, d’autant plus que le demandeur n’a pas soumis au tribunal des éléments de nature à renverser la présomption du risque de fuite qui existe dans son chef.

En ce qui concerne le moyen du demandeur relatif au fait que le ministre aurait pu ordonner une autre mesure moins coercitive qu’un placement en rétention à son encontre, le tribunal relève que l’article 125, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008 prévoit ce qui suit : « Dans les cas prévus à l’article 120, le ministre peut également prendre la décision d’appliquer une autre mesure moins coercitive à l’égard de l’étranger pour lequel l’exécution de l’obligation de quitter le territoire, tout en demeurant une perspective raisonnable, n’est reportée que pour des motifs techniques et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111, paragraphe (3) [de la loi du 29 août 2008] (…).

On entend par mesures moins coercitives :

a) l’obligation pour l’étranger de se présenter régulièrement, à intervalles à fixer par le ministre, auprès des services de ce dernier ou d’une autre autorité désignée par lui, après remise de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d’un récépissé valant justification de l’identité ;

b) l’assignation à résidence pour une durée maximale de six mois dans les lieux fixés par le ministre ; l’assignation peut être assortie, si nécessaire, d’une mesure de surveillance électronique qui emporte pour l’étranger l’interdiction de quitter le périmètre fixé par le ministre. Le contrôle de l’exécution de la mesure est assuré au moyen d’un procédé permettant de détecter à distance la présence ou l’absence de l’étranger dans le prédit périmètre. La mise en œuvre de ce procédé peut conduire à imposer à l’étranger, pendant toute la durée du placement sous surveillance électronique, un dispositif intégrant un émetteur. Le procédé utilisé est homologué à cet effet par le ministre. Sa mise en œuvre doit garantir le respect de la dignité, de l’intégrité et de la vie privée de la personne.

La mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance et le contrôle à distance proprement dit, peuvent être confiés à une personne de droit privé ;

c) l’obligation pour l’étranger de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros à virer ou à verser soit par lui-même, soit par un tiers à la Caisse de consignation, conformément aux dispositions y relatives de la loi du 29 avril 1999 sur les consignations auprès de l’Etat. Cette somme est acquise à l’Etat en cas de fuite ou d’éloignement par la contrainte de la personne au profit de laquelle la consignation a été opérée. La garantie est restituée par décision écrite du ministre enjoignant à la Caisse de consignation d’y procéder en cas de retour volontaire.

Les décisions ordonnant des mesures moins coercitives sont prises et notifiées dans les formes prévues aux articles 109 et 110. L’article 123 est applicable. Les mesures prévues peuvent être appliquées conjointement. En cas de défaut de respect des obligations imposées par le ministre ou en cas de risque de fuite, la mesure est révoquée et le placement en rétention est ordonné. ».

Les dispositions des articles 120 et 125 de la loi du 29 août 2008, précités, sont à interpréter en ce sens qu’en vue de la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement, les trois mesures moins coercitives énumérées à l’article 125, paragraphe (1), sont à considérer comme mesures proportionnées bénéficiant d’une priorité par rapport à une rétention pour autant qu’il soit satisfait aux deux exigences posées par ledit article 125, paragraphe (1), de sorte que pour considérer ces autres mesures moins coercitives comme suffisantes et que la rétention ne répond à l’exigence de proportionnalité et de subsidiarité, aucune des autres mesures moins coercitives ne doit entrer en compte au vu des circonstances du cas particulier.

L’article 125, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008, prévoit plus particulièrement que le ministre peut prendre la décision d’appliquer, soit conjointement, soit séparément, les trois mesures moins coercitives y énumérées à l’égard d’un étranger pour lequel l’exécution de l’obligation de quitter le territoire, tout en demeurant une perspective raisonnable, est reportée pour des motifs techniques, à condition que l’intéressé présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111, paragraphe (3), de la même loi. Ainsi, s’il existe, comme en l’espèce, une présomption légale d’un risque de fuite dans le chef de l’étranger se trouvant en situation irrégulière sur le territoire national, celui-ci doit la renverser en justifiant notamment de garanties de représentation suffisantes1.

Or, en l’espèce, le demandeur ne soumet aucun élément concret au tribunal permettant de retenir que le ministre ait violé les dispositions de la loi en décidant de ne pas recourir à une mesure moins coercitive qu’un placement en rétention et plus particulièrement il ne fournit aucun élément susceptible de constituer des garanties de représentation effectives permettant de prévenir le risque de fuite qui est présumé dans son chef, en vertu de l’article 111, paragraphe (3), point c) de la loi du 29 août 2008, tel que cela a été retenu ci-avant, étant encore rappelé à cet égard qu’il n’est pas contesté en cause qu’il ne dispose pas d’adresse fixe au Luxembourg, ni d’une quelconque autre attache particulière.

1 trib. adm. 6 mai 2016, n° 37829 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.

Il suit des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a retenu que les mesures moins coercitives prévues par l’article 125, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008 ne sauraient être efficacement appliquées en l’espèce.

Quant aux contestations soulevées par le demandeur relatives aux diligences accomplies par le ministre en vue d’organiser son éloignement, force est de constater que le jour même du placement en rétention le 31 juillet 2017, les autorités luxembourgeoise avaient entrepris des démarches en vue de vérifier l’identité du demandeur.

Ainsi, le 31 juillet 2017, le service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, a vérifié les empreintes du demandeur dans le système « EURODAC » qui a relevé que le demandeur avait introduit diverses demandes de protection internationale dans différents pays, notamment au Luxembourg le 29 janvier 2010, en Belgique les 23 avril 2010 et 12 janvier 2011 et au Pays-Bas le 16 novembre 2016, de sorte que la Belgique est le pays responsable du traitement de la demande.

Le lendemain du placement en rétention, soit le 1er août 2017, le ministre a contacté les autorités belges en vue de la reprise en charge du demandeur.

Par courrier du 8 août 2017, les autorités belges informèrent le ministre que la demande de reprise en charge est acceptée.

Par arrêté du 9 août 2017, le ministre décida le transfert du demandeur vers la Belgique.

Au vu des considérations qui précèdent, le tribunal constate d’abord que le demandeur estime à tort que le ministre n’aurait pas entrepris de diligences appropriées auprès des autorités compétentes, alors qu’il ressort du dossier administratif que le ministre a déployé toutes les démarches nécessaires auprès desdites autorités en vue d’une reprise en charge du demandeur par la Belgique. En l’état actuel du dossier, le moyen fondé sur une absence de diligences du ministre en vue d’organiser le transfert rapide du demandeur est dès lors à rejeter pour ne pas être fondé, alors même que la date exacte du transfert n’est pas encore fixée.

Concernant l’argumentation relative à l’impossibilité de son éloignement vers son pays d’origine, le tribunal relève que c’est à bon droit que le délégué du gouvernement soutient que cet argument est sans pertinence quant à la légalité de la mesure de placement, objet du présent recours. En effet, ladite mesure de placement est prise en vue de pouvoir organiser le transfert du demandeur vers la Belgique, de sorte que seules les diligences entreprises en vue de l’organisation du transfert vers la Belgique sont à considérer par le tribunal, l’éloignement subséquent vers son pays d’origine étant de la compétence des autorités belges. Ce moyen est dès lors à rejeter pour ne pas être fondé.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent, et en l’absence d’autres moyens, que le recours en réformation est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit en la forme le recours en réformation ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Olivier Poos, premier juge, Michèle Stoffel, juge, Anne Foehr, attaché de justice délégué, et lu à l’audience publique extraordinaire du 16 août 2017 à 15.00 heures par le premier juge, en présence du greffier Michèle Hoffmann.

s. Michèle Hoffmann s. Olivier Poos Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 16/8/2017 Le Greffier du Tribunal administratif 9


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 39997
Date de la décision : 16/08/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2017-08-16;39997 ?

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