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26/07/2017 | LUXEMBOURG | N°39903

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 juillet 2017, 39903


Tribunal administratif Numéro 39903 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 juillet 2017 chambre de vacation Audience publique du 26 juillet 2017 Recours formé par Monsieur …, alias …, alias …, alias …, Findel, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 22, L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 39903 du rôle et déposée le 20 juillet 2017 au greffe du tribunal administratif

par Maître Mariana LUNCA, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Lu...

Tribunal administratif Numéro 39903 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 juillet 2017 chambre de vacation Audience publique du 26 juillet 2017 Recours formé par Monsieur …, alias …, alias …, alias …, Findel, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 22, L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 39903 du rôle et déposée le 20 juillet 2017 au greffe du tribunal administratif par Maître Mariana LUNCA, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né le …(Géorgie) et être de nationalité géorgienne, alias …, déclarant être né le … et être de nationalité russe, alias …, déclarant être né le … et être de nationalité géorgienne, alias …, déclarant être né le … et être de nationalité russe, demeurant actuellement au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 7 juillet 2017 ayant ordonné son placement au Centre de rétention pour une durée maximale de trois mois à partir de la notification de la décision en question ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 24 juillet 2017 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 25 juillet 2017 par Maître Mariana LUNCA au nom et pour compte du demandeur ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 juillet 2017 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Mariana LUNCA et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique de ce jour.

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En date du 9 septembre 2016, Monsieur …, alias …, alias …, alias …, ci-après désigné par « Monsieur … » introduisit auprès du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, une demande de protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Le même jour, il fut entendu par la police grand-ducale, section police des étrangers et des jeux, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Lors de la comparaison des empreintes digitales de Monsieur …, la base de données EURODAC releva qu’il avait déposé une demande de protection internationale en Autriche le 18 juillet 2009 et en Allemagne le 19 mai 2015.

Le 6 octobre 2016, Monsieur … passa un entretien auprès du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, en vue de déterminer l’Etat-membre responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après « le règlement Dublin III ».

Les autorités luxembourgeoises contactèrent les autorités allemandes en date du 11 octobre 2016 en vue de la prise, respectivement de la reprise en charge de Monsieur … conformément à l’article 18, paragraphe (1), b) du règlement Dublin III.

Cette demande de prise, respectivement de reprise en charge fut explicitement acceptée par les autorités allemandes le 20 octobre 2016.

Par décision du 26 octobre 2016, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », sur base de la considération que Monsieur … avait introduit une demande de protection internationale en Allemagne le 13 août 2015, et que le 20 octobre 2016, les autorités allemandes avaient accepté de prendre, respectivement de reprendre en charge l’examen de sa demande de protection internationale, informa celui-ci de sa décision de le transférer dans les meilleurs délais vers l’Allemagne sur base de l’article 28, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 et des dispositions de l’article 18, paragraphe (1), d) du règlement Dublin III.

En date du 11 novembre 2016, Monsieur … fit introduire un recours contentieux contre la décision ministérielle précitée du 26 octobre 2016, inscrit sous le numéro 38706 du rôle.

Suite à la communication d’une copie intégrale du passeport de Monsieur …, suivant lequel ce dernier disposerait une autorisation de séjour en Grèce, le ministre retira, par courrier du 22 décembre 2016, sa décision de transfert précitée du 26 octobre 2016.

A l’audience publique du tribunal administratif du 23 décembre 2016, le recours contentieux inscrit sous le numéro 38706 du rôle, fut rayé et retiré du rôle sur demande des parties en cause.

Par courrier du 20 mars 2017, le ministre demanda aux autorités grecques la réadmission de Monsieur … en application de l’article 6, paragraphe (2) de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.

Par courriel du 26 mars 2017, les autorités grecques rejetèrent la demande leur adressée en date du 20 mars 2017 au motif que l’autorisation de séjour de Monsieur … constitue un faux.

Par arrêté du 7 juillet 2017, notifié à l’intéressé en mains propres le 10 juillet 2017, le ministre ordonna le placement de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée maximale de trois mois à partir de la notification de la décision. Cette décision repose sur les considérations et motifs suivants :

« […] Vu l’article 22 de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire ;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu le rapport N°SPJ/15/2016/54833/1/SC du 9 septembre 2016 établi par le Service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux ;

Vu ma décision de transfert du 26 octobre 2016 ;

Attendu que l’intéressé est connu sous des différentes identités en Allemagne ;

Attendu que le transfert vers l’Allemagne n’a pas pu être effectué alors que l’intéressé se trouvait en détention préventive ;

Attendu que la mesure moins coercitive prévue à l’article 22, (3), point a) ne peut être efficacement appliquée, alors que le demandeur ne dispose d’aucun document d’identité et de voyage valable ;

Attendu que la mesure moins coercitive prévue à l’article 22, (3), point b) ne peut être efficacement appliquée, alors que le demandeur ne présente pas des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite ;

Attendu que la mesure moins coercitive prévue à l’article 22, (3), point c) ne peut être efficacement appliquée, alors que le demandeur n’est pas en mesure de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros ;

Attendu que les mesures moins coercitives telles qu’elles sont prévues par l’article 22, paragraphe (3), points a), b) et c) susmentionnées de la loi du 18 décembre 2015 précitée ne sauraient être efficacement appliquées ;

Attendu qu’il existe un risque de fuite non négligeable dans le chef de l’intéressé comme défini à l’article 22, (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015 précitée ;

Par conséquent la décision de placement s’avère nécessaire ;

Considérant que l’intéressé a introduit une demande de protection internationale au Luxembourg ;

Considérant qu’il est signalé au système EURODAC comme ayant introduit une demande de protection internationale en Autriche et une en Allemagne ;

Considérant qu’une demande de prise/reprise en charge en vertu de l’article 18§1b) du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 a été adressée aux autorités allemandes ;

Considérant que les autorités allemandes ont marqué leur accord de prise/ reprise en charge en vertu de l’article 18§1d) du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013;

Considérant qu’il est établi que le demandeur a l’intention de se soustraire aux autorités dans le seul but de faire obstacle à une mesure d’éloignement vers l’Allemagne ;

Arrête :

Art. 1er.- Le soi-disant …, né le …, de nationalité russe, alias …, né le …, de nationalité géorgienne, alias …, né le …, de nationalité géorgienne, alias …, né le …, de nationalité russe, dont l’éloignement immédiat n’est pas possible, est placé, dans l’attente de cet éloignement, au Centre de rétention pour une durée maximum de trois mois à partir de la notification. […] ».

Par une nouvelle décision du 18 juillet 2017, le ministre, sur base de la considération que Monsieur … avait introduit une demande de protection internationale en Allemagne le 13 août 2015, et que le 20 octobre 2016, les autorités allemandes avaient accepté de prendre, respectivement de reprendre en charge l’examen de sa demande de protection internationale, informa celui-ci de sa décision de le transférer dans les meilleurs délais vers l’Allemagne sur base de l’article 28, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 et des dispositions de l’article 18, paragraphe (1), d) du règlement Dublin III.

Par arrêté du 21 juillet 2017, notifié à l’intéressé en mains propres le même jour, le ministre ordonna la mainlevée de l’arrêté de placement du 7 juillet 2017 précité et ordonna de nouveau le placement de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée maximale de trois mois à partir de la notification de la décision. Cette décision repose sur les considérations et motifs suivants :

« […] Vu l’article 22 de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire;

Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;

Vu le rapport N°SPJ/15/2016/54833/1/SC du 9 septembre 2016 établi par le Service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux ;

Vu ma décision de transfert du 18 juillet 2017 ;

Attendu que l’intéressé est connu sous différentes identités en Allemagne ;

Attendu que le transfert vers l’Allemagne n’a pas pu être effectué alors que l’intéressé se trouvait en détention préventive ;

Attendu que la mesure moins coercitive prévue à l’article 22, (3), point a) ne peut être efficacement appliquée, alors que le demandeur ne dispose d’aucun document d’identité et de voyage valable ;

Attendu que la mesure moins coercitive prévue à l’article 22, (3), point b) ne peut être efficacement appliquée, alors que le demandeur ne présente pas des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite ;

Attendu que la mesure moins coercitive prévue à l’article 22, (3), point c) ne peut être efficacement appliquée, alors que le demandeur n’est pas en mesure de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros ;

Attendu que les mesures moins coercitives telles qu’elles sont prévues par l’article 22, paragraphe (3), points a), b) et c) susmentionnées de la loi du 18 décembre 2015 précitée ne sauraient être efficacement appliquées ;

Attendu qu’il existe un risque de fuite non négligeable dans le chef de l’intéressé comme défini à l’article 22, (2), point d) de la loi du 18 décembre 2015 précitée ;

Par conséquent la décision de placement s’avère nécessaire ;

Considérant que l’intéressé a introduit une demande de protection internationale au Luxembourg ;

Considérant qu’il est signalé au système EURODAC comme ayant introduit une demande de protection internationale en Allemagne et une en Autriche ;

Considérant qu’une demande de prise/reprise en charge en vertu de l’article 18§1b du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 a été adressée aux autorités allemandes ;

Considérant que les autorités allemandes ont marqué leur accord de prise/ reprise en charge ; Considérant qu’il est établi que le demandeur a l’intention de se soustraire aux autorités dans le seul but de faire obstacle à une mesure d’éloignement l’Allemagne ;

Arrête:

Art. 1er.-La mainlevée de l’arrêté de placement du 7 juillet 2017 est ordonnée.

Art. 2.- Le soi-disant …, né le …, de nationalité russe, alias …, né le …., de nationalité géorgienne, …, né le …, de nationalité géorgienne, alias …, né le …, de nationalité russe, est placé, dans l’attente de cet éloignement, au Centre de rétention pour une durée maximum de trois mois à partir de la notification. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 20 juillet 2017, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation de l’arrêté ministériel susmentionné du 7 juillet 2017 ordonnant son placement au Centre de rétention pour une durée maximale de trois mois à compter de la notification de la décision en question.

Etant donné que l’article 22, paragraphe (6), de la loi du 18 décembre 2015 institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit par Monsieur ….

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement fait valoir que le recours serait devenu sans objet, étant donné qu’un nouvel arrêté de placement au Centre de rétention aurait été pris à l’encontre de Monsieur … en date du 21 juillet 2017.

Dans son mémoire en réplique, Monsieur … indique avoir toujours un intérêt à faire réformer, sinon, dans le cadre de la réformation, à faire annuler l’arrêté ministériel du 7 juillet 2017, étant donné que celui-ci aurait porté atteinte à sa liberté individuelle pendant 11 jours.

En l’espèce, s’il ressort des pièces soumises à l’analyse du tribunal que la mainlevée de l’arrêté ministériel du 7 juillet 2017 a été ordonnée par l’arrêté ministériel du 21 juillet 2017 et que la mesure de placement en rétention administrative initiale n’est plus en vigueur au jour des plaidoiries, à savoir en date du 26 juillet 2017, et que partant le tribunal, au jour où il est amené à statuer, n’est plus en mesure de faire utilement droit à la demande de libération du demandeur par réformation de la décision litigieuse, il n’en reste pas moins, d’une part, que le demandeur avait été privé de sa liberté de circulation à partir de la notification de la décision litigieuse du 7 juillet 2017 jusqu’au 21 juillet 2017 de sorte à avoir un intérêt à agir contre la prédite décision, et, d’autre part, que son recours garde son objet, en ce que la décision litigieuse a sorti ses effets jusqu’à la notification de l’arrêté du 21 juillet 2017, de sorte que le tribunal reste valablement saisi des moyens de légalité invoqués dans la cadre du recours en réformation.

Au vu des considérations qui précèdent, le recours en réformation est recevable dans la limite des moyens d’annulation invoqués et doit être déclaré irrecevable pour le surplus. Il est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur expose tout d’abord les faits et rétroactes gisant à la base de la décision déférée, tout en soulignant plus particulièrement que par deux courriers lui adressés en date du 22 décembre 2016, le ministre l’aurait informé de retirer la décision de transfert du 26 octobre 2016.

En droit, il se prévaut d’une violation de l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 et de l’article 28, paragraphe (2) du règlement Dublin III, étant donné que la mesure de placement litigieuse serait fondée sur l’existence de la décision de transfert du 26 octobre 2016 et aurait été prise en vue de permettre l’exécution de celle-ci, décision qui aurait toutefois été retirée le 22 décembre 2016.

Sa rétention constituerait dès lors une privation de liberté illégale en violation de l’article 5, paragraphe (1), f) de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Dans son mémoire en duplique, le délégué du gouvernement fait valoir qu’une décision de transfert ne constituerait pas un préalable nécessaire à un arrêté de placement au Centre de rétention, dans la mesure où l’article 28, paragraphe (2) du règlement Dublin III prévoirait la possibilité d’un tel placement afin de garantir les procédures de transfert. Même si la décision de transfert du 26 octobre 2016 aurait été annulée en raison de l’existence d’une autorisation de séjour en Grèce dans le chef du demandeur, laquelle aurait cependant été démasquée comme constituant un faux par les autorités grecques, l’acceptation de reprise des autorités allemandes serait toujours valable, de sorte que le transfert du demandeur serait organisé en vertu d’une nouvelle décision de transfert vers l’Allemagne du 18 juillet 2017. Le fait de mentionner la décision de transfert annulée du 26 octobre 2016 ne rendrait pas l’arrêté du 7 juillet 2017 illégal, dans la mesure où cet arrêté serait encore motivé par un risque de fuite dans le chef du demandeur, son intention de se soustraire aux autorités afin d’éviter son éloignement et l’impossibilité d’appliquer des mesures moins coercitives. Par ailleurs, l’existence d’un nouvel arrêté de placement en rétention administrative du 21 juillet 2017, ayant encore ordonné la mainlevée de l’arrêté litigieux du 7 juillet 2017, s’expliquerait par le fait qu’une nouvelle décision de transfert du demandeur aurait été prise le 18 juillet 2017.

L’article 28 du règlement Dublin III, intitulé « Placement en rétention » dispose dans son paragraphe (2) que : « Les Etats membres peuvent placer les personnes concernées en rétention en vue de garantir les procédures de transfert conformément au présent règlement lorsqu’il existe un risque non négligeable de fuite de ces personnes, sur base d’une évaluation individuelle et uniquement dans la mesure où le placement en rétention est proportionnel et si d’autres mesures moins coercitives ne peuvent être effectivement appliquées. ».

Aux termes de l’article 22, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 « […] Un demandeur ne peut être placé en rétention que : […] d) conformément à l’article 28 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant d’un pays tiers ou un apatride et lorsqu’il existe un risque de fuite basé sur un faisceau de circonstances établissant que le demandeur a l’intention de se soustraire aux autorités dans le seul but de faire obstacle à une mesure d’éloignement ; […] ».

En vertu de l’article 22, paragraphe (4), de la loi du 18 décembre 2015 « […] La décision de placement en rétention indique les motifs de fait et de droit sur lesquelles elle est basée. Elle est prise pour une durée la plus brève possible ne dépassant pas trois mois. Sans préjudice des dispositions du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 en matière de rétention, la mesure de placement en rétention peut être reconduite par le ministre chaque fois pour une durée de trois mois tant que les motifs énoncés au paragraphe 2, sont applicables, mais sans que la durée de rétention totale ne puisse dépasser douze mois.

Les procédures administratives liées aux motifs de rétention énoncés au paragraphe (2) sont exécutées avec toute la diligence voulue. Les retards dans les procédures administratives qui ne sont pas imputables au demandeur ne peuvent justifier une prolongation de la durée de rétention. […] ».

L’article 22, paragraphe (3), de la même loi ajoute que le placement en rétention ne peut être ordonné que si aucune des mesures moins coercitives prévues à ses points a), b) et c) - à savoir, (i) l’obligation pour le demandeur de se présenter régulièrement, à des intervalles à fixer par le ministre, auprès des services de ce dernier ou d’une autre autorité désignée par lui, (ii) l’assignation à résidence, assortie, le cas échéant, d’une mesure de surveillance électronique, et, (iii) le dépôt d’une garantie financière d’un montant de cinq mille euros - ne peut être efficacement appliquée.

L’article 22, paragraphe (2), point d), de la loi du 18 décembre 2015, qui renvoie à l’article 28 du règlement Dublin III, permet dès lors de placer un demandeur de protection internationale en rétention administrative pour une durée maximale de trois mois en vue de garantir les procédures de transfert prévues par ledit règlement, sous condition, (i) qu’il existe un risque de fuite non négligeable dans le chef de cette personne, basé sur un faisceau de circonstances établissant que l’intéressé a l’intention de se soustraire aux autorités dans le seul but de faire obstacle à une mesure d’éloignement, (ii) que le placement en rétention soit proportionnel et, (iii) que d’autres mesures moins coercitives ne puissent être effectivement appliquées.

En l’espèce Monsieur … a été, par arrêté du 7 juillet 2017, placé au Centre de rétention en vue de son éloignement vers l’Allemagne.

Or, s’il ressort certes des éléments du dossier administratif que l’arrêté de placement en rétention précité fait, dans ses visas, état de la décision de transfert du 26 octobre 2016, décision retirée formellement par le ministre par courrier du 22 décembre 2016, selon lequel « la décision de transfert du 26 octobre 2016 est considérée comme nulle et non avenue », il n’en reste pas moins qu’une telle indication erronée, n’est pas à elle seule de nature à affecter la légalité même de l’arrêté en question.

En effet, il ressort du libellé de l’arrêté du 7 juillet 2017 que son objectif consiste dans le placement au Centre de rétention de Monsieur … afin de garantir son éloignement vers l’Allemagne et n’est pas, comme le prétend le demandeur pris sur la seule base d’une décision de transfert inexistante et en vue de permettre l’exécution de celle-ci. Il échet encore de relever à cet égard, comme soutenu à juste titre par le délégué du gouvernement, que l’article 28, précité, du règlement Dublin III ne limite pas la possibilité de placer une personne en rétention administrative à l’existence préalable d’une décision de transfert, un tel placement en rétention peut avoir lieu dès le dépôt d’une demande de protection internationale dans un Etat membre et ce « en vue de garantir les procédures de transfert » prévues par le règlement Dublin III et lorsque les conditions y posées se trouvent réunies.

Dans la mesure où il est établi en cause, tel qu’il résulte encore des considérants de l’arrêté du 7 juillet 2017, que Monsieur … avait déposé une demande de protection internationale tant en Autriche qu’en Allemagne, qu’une requête de prise, respectivement de reprise en charge a été adressée aux autorités allemandes en date du 11 octobre 2016, que cette requête a été explicitement acceptée par les autorités allemandes le 20 octobre 2016, acceptation qui était toujours valable à la date du placement en rétention du demandeur, il échet de retenir que c’est à juste titre que le ministre a pu, en application de l’article 22 de la loi du 18 décembre 2015 placer le demandeur au Centre de rétention en vue de garantir la procédure de transfert entamée à son encontre conformément aux dispositions du règlement Dublin III.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent et a défaut d’autres moyens, que le tribunal ne saurait utilement mettre en cause la légalité de la décision déférée, de sorte que le recours sous analyse est à rejeter comme non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme le recours en réformation dans la limite des moyens de légalité invoqués et le déclare irrecevable pour le surplus ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 26 juillet 2017 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Géraldine Anelli, juge, Emina Softic, attaché de justice, en présence du greffier en chef Arny Schmit.

Arny Schmit Thessy Kuborn 8


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 39903
Date de la décision : 26/07/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2017-07-26;39903 ?

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