Tribunal administratif N° 39798 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 28 juin 2017 Chambre de vacation Audience publique du 16 juillet 2017 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 35 (3), L. 18.12.2015)
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 39798 du rôle et déposée le 28 juin 2017 au greffe du tribunal administratif par Maître Nour E. HELLAL, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Maroc), de nationalité marocaine, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 13 juin 2017 par laquelle les autorités luxembourgeoises ont pris la décision de le transférer vers l’Allemagne, l’Etat membre compétent pour connaître de sa demande de protection internationale ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 14 juillet 2017 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Nour E. HELLAL et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline JACQUES en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique de ce jour.
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Le 26 mai 2017, Monsieur … introduisit auprès du ministère des Affaires étrangères et européennes une demande de protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».
Le même jour, Monsieur … fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg. Il s’avéra à cette occasion, suite à la comparaison des empreintes digitales de l’intéressé avec la base de données EURODAC, que ses empreintes digitales avaient précédemment été enregistrées en Allemagne et aux Pays-Bas.
Le même jour, Monsieur … passa encore un entretien auprès du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de 1protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, dénommé ci-après « le règlement Dublin III ».
Par arrêté du 26 mai 2017, lui notifié le même jour, le ministre assigna le demandeur à résidence en application des articles 22, paragraphe (2), point d) et 22, paragraphe (3), point a), b) et c) de la loi du 18 décembre 2015 précitée.
En date du 31 mai 2017, les autorités luxembourgeoises contactèrent les autorités allemandes en vue de la prise, respectivement de la reprise en charge de Monsieur …, sur base de la considération que suivant les indications se dégageant de la banque de données EURODAC, l’intéressé aurait précédemment, à savoir le 11 novembre 2015, introduit une demande de protection internationale en Allemagne. Cette demande de prise, respectivement de reprise en charge fut explicitement acceptée par les autorités allemandes le même jour.
Par décision datée du 13 juin 2017, envoyée le lendemain par lettre recommandée, le ministre informa Monsieur … que le Grand-Duché de Luxembourg a pris la décision de le transférer dans les meilleurs délais vers l’Allemagne sur base de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 et des dispositions de l’article 25, paragraphe (2), du règlement Dublin III, la décision étant libellée comme suit :
« J’accuse réception de votre demande en obtention d’une protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire que vous avez présentée le 26 mai 2017.
Il résulte des informations dont nous avons connaissance que vous avez introduit deux demandes de protection internationale en Allemagne en date du 11 novembre 2015.
L’Allemagne a accepté en date du 31 mai 2017 de prendre/reprendre en charge l’examen de votre demande de protection internationale.
Au vu de ce qui précède, je tiens à vous informer qu’en vertu des dispositions de l’article 28(1) de la loi précitée et des dispositions de l’article 18 § 1d du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013, le Grand-Duché de Luxembourg a pris la décision de vous transférer dans les meilleurs délais vers l’Allemagne, qui est l’Etat membre responsable pour examiner votre demande de protection internationale.
La présente décision est susceptible d’un recours en annulation devant le Tribunal administratif. Ce recours doit être introduit par requête signée d’un avocat à la Cour dans un délai de 15 jours à partir de la notification de la présente. La décision du Tribunal administratif ne sera susceptible d’aucun appel.
Une procédure de référé en vue de l’obtention d’un sursis à l’exécution ou d’une mesure de sauvegarde peut être introduite auprès du Président du Tribunal administratif par requête signée d’un avocat à la Cour. » Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 28 juin 2017, inscrite sous le numéro 39798 du rôle, Monsieur … a fait introduire un recours en annulation contre la décision ministérielle précitée du 13 juin 2017.
Aucune disposition légale ne prévoit de recours au fond en la présente matière, de sorte 2que seul un recours en annulation a pu être introduit contre la décision ministérielle du 13 juin 2017. Le recours en annulation introduit en l’espèce est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
A l’appui de sa requête au fond, Monsieur … expose d’abord avoir quitté son pays d’origine, le Maroc, pour des raisons qu’il aurait aimé détailler lors d’un entretien individuel.
En droit, Monsieur … met en exergue l’importance des garanties procédurales instituées par le règlement Dublin III, en soutenant, en substance, que la décision attaquée ne renverrait à aucune possibilité de formuler des observations et d’« individualiser convenablement sa demande », de sorte qu’il aurait appartenu au ministre de procéder à une audition supplémentaire en vue de recueillir son avis et ses observations, sous peine de violer les articles 3, 4, 5 et 27 du règlement Dublin III.
Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour n’être fondé en aucun de ses moyens.
Force est en premier lieu au tribunal de constater que le demandeur, en invoquant les articles 3, 4, 5 et 27 du règlement Dublin III sans autre développement, précision ou argumentation, se prévaut de dispositions visant des questions aussi diverses et disparates que les principes généraux régissant la détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale (article 3), le droit d’un demandeur de protection internationale à des informations relatives à l’application du règlement Dublin III (article 4), le droit d’un tel demandeur de protection internationale à un entretien individuel en vue de la détermination de l’Etat membre responsable (article 5) ou encore le droit à un recours effectif contre une décision de transfert (article 27).
Force est plus particulièrement de constater que le demandeur est en défaut de préciser, concrètement et par rapport à sa situation personnelle, comment, respectivement pourquoi ces différentes dispositions auraient été violées, le demandeur restant de même en défaut de préciser quelles règles de détermination précises n’auraient pas été respectées, l’article 3 invoqué renvoyant en effet au chapitre III du règlement Dublin III qui, quant à lui, énonce neuf critères distincts et hiérarchisés, articulés en autant d’articles.
Il convient à cet égard de rappeler que l’exposé d’un moyen de droit requiert non seulement de désigner la règle de droit qui serait violée, mais également la manière dont celle-
ci aurait été violée par l’acte attaqué. Aussi, la seule affirmation non autrement précisée et circonstanciée selon laquelle acquiescer à une telle procédure reviendrait à vider de sens les dispositions du règlement Dublin III et plus particulièrement les articles 3, 4, 5 et 27, prétendument applicables directement au Luxembourg, laisse manifestement de rencontrer les exigences pourtant peu élevées relativement à la précision de l’exposé des moyens. S’il suffit en effet que cet exposé soit simplement sommaire pour satisfaire aux exigences légales afférentes, il ne saurait pour autant se réduire à une motivation stéréotypée indéfiniment transposable à tout autre recours en la même matière, sans la moindre indication d’éléments concrets, spécifiques à la situation particulière du demandeur.
Comme les moyens simplement suggérés, sans être soutenus effectivement, ne sont pas à prendre en considération par le tribunal, étant donné qu’il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence du demandeur et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de ses conclusions, il y a lieu de rejeter le moyen en question.
3Il s’ensuit qu’à défaut d’autres moyens valablement développés, le recours en annulation est à rejeter pour ne pas être fondé.
Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;
reçoit le recours en annulation en la forme ;
au fond le dit non justifié, partant en déboute ;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique de vacation du 16 août 2017 par :
Marc Sünnen, président, Olivier Poos, premier juge, Michèle Stoffel, juge, en présence du greffier Monique Thill.
s. Monique Thill s. Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 16/8/2017 Le Greffier du Tribunal administratif 4