Tribunal administratif Numéro 37272 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 décembre 2015 1e chambre Audience publique du 1er mars 2017 Recours formé par les époux …et …, … contre une décision implicte de refus, ainsi qualifiée, du directeur de l’administration des Contributions en matière d’impôt sur le revenu
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 37272 du rôle et déposée le 10 décembre 2015 au greffe du tribunal administratif par Maître Georges Pierret, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, et de son épouse Madame …, demeurant ensemble à L-…, tendant, aux termes de son dispositif, à la réformation « de la décision implicite de refus du directeur de l'administration des contributions directes, matérialisée par l'émission le 9 septembre 2015 d'un bulletin rectificatif insuffisant pour l'année 2011, d'un bulletin d'exonération totale pour l'année 2014 du même jour, et d'un extrait de compte faisant l'impasse sur le sort des exercices 2012 et 2013, [en ce] que le sieur…[aurait] droit au remboursement du trop payé d'impôt pour les années 2011, 2012 et 2013 en application du principe d'une exonération totale de ses revenus de pension consacré par le jugement définitif du tribunal administratif de Luxembourg du 15 décembre 2014, ainsi qu' à l'émission de bulletins d'impôt rectificatifs en ce sens, pour chacun des exercices concernés » ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 23 février 2016 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 23 mars 2016 par Maître Georges Pierret au nom des demandeurs, préqualifiés ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 avril 2016 ;
Vu les pièces versées en cause ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Pierre Medinger, en remplacement de Maître Georges Pierret, et Monsieur le délégué du gouvernement Sandro Laruccia en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 7 décembre 2016.
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Le 17 octobre 2012, le bureau d’imposition Wiltz de la section des personnes physiques de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le bureau d’imposition », émit à l’égard de Monsieur …et de son épouse, Madame …, ci-après désignés par « les époux…-… », imposés collectivement, le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2011 accompagné d’une fiche établie sur base de l’article 134 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, dénommée ci-après « LIR », relative à la détermination du taux d’impôt global.
Ce même bureau émit également le 17 octobre 2012 à l’égard de Monsieur …et de son épouse, Madame …, le bulletin de la contribution de crise pour l’année 2011.
Par une lettre de leur mandataire du 15 janvier 2013, les époux…-… firent introduire une réclamation à l’encontre desdits bulletins de l’année 2011 et de la fiche établie sur base de l’article 134 LIR auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après dénommé « le directeur ».
Le 26 juin 2013, le bureau d’imposition émit encore à l’égard des époux…-… le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2012. Ce bulletin n’a pas fait l’objet d’une réclamation de la part de ces derniers.
N’ayant pas reçu de réponse quant à leur réclamation, les époux…-… ont fait introduire, par requête déposée le 22 octobre 2013 au greffe du tribunal administratif et portant le numéro 33507 du rôle, un recours tendant à la réformation d’une décision implicite de refus du directeur résultant du silence gardé à la suite de cette réclamation, recours qui a été déclaré irrecevable par un jugement du tribunal administratif du 15 décembre 2014.
Les époux…-… ont encore fait introduire, par requête déposée le 18 février 2014 au greffe du tribunal administratif, inscrite sous le numéro 34056 du rôle, un recours tendant à la réformation du bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2011, émis le 17 octobre 2012 par le bureau d’imposition Wiltz.
Le 2 juillet 2014, le bureau d’imposition émit encore à l’égard des époux…-… le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2013, ce bulletin n’ayant pas non plus fait l’objet d’une réclamation de la part de ces derniers.
Par un jugement du 15 décembre 2014, inscrit sous le numéro 34056 du rôle, le tribunal administratif retint qu’en principe, l’intégralité de la pension de retraite perçue par Monsieur … par la Caisse commune des pensions du personnel des Nations-Unies, ci-après désignée par la « CCPPNU », est exemptée de l’impôt national, conformément à l’article 18 de la Convention sur les Privilèges et Immunités des Nations-Unies approuvée par l’Assemblée Générale des Nations Unies le 13 février 1946. Cependant, au regard du dispositif de la requête introductive d’instance du 18 février 2014, aux termes de laquelle « l’imposition des [demandeurs] pour l’exercice 2011 est à réformer, afin de n’être calculée que sur les deux-tiers des revenus perçus et déclarés par le sieur ……au titre de sa pension de retraite », le tribunal, sous peine de statuer ultra petita, ne put réformer le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2011, émis le 17 octobre 2012, qu’en ce sens qu’un tiers seulement des revenus provenant de la pension de retraite versée par la CCPPNU aux époux…-…, soit exonéré de toute imposition. Aucun appel n’a été interjeté contre ce jugement.
Les époux…-…, par courrier de leur mandataire du 12 juin 2015, sollicitèrent du directeur, d’une part, la réformation des bulletins de l’impôt sur le revenu pour les années 2011 à 2013 sur base d’une exemption totale des revenus de pension de Monsieur…, et, d’autre part, le remboursement des montants déjà payés au titre de l’impôt sur le revenu pour ces années d’imposition.
En exécution du jugement précité du tribunal administratif du 15 décembre 2014, inscrit sous le numéro 34056 du rôle, le bureau d’imposition émit, le 9 septembre 2015, à l’égard des époux…-… un bulletin de l’impôt sur le revenu rectificatif pour l’année 2011. Le même jour, ledit bureau émit encore à leur égard le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2014, ainsi qu’un décompte suite à l’émission des deux bulletins susmentionnés pour les années 2011 et 2014 reprenant un solde de 36.756 euros en leur faveur.
Par une lettre de leur mandataire du 10 décembre 2015, les époux…-… firent introduire, auprès du directeur, une réclamation à l’encontre du bulletin de l’impôt rectificatif de l’année 2011, émis le 9 septembre 2015.
Par requête déposée le même jour au greffe du tribunal administratif et portant le numéro 37272 du rôle, les époux…-… ont fait introduire un recours tendant, aux termes de son dispositif auquel le tribunal peut seul avoir égard, à la réformation de « […] la décision implicite de refus du directeur de l'administration des contributions directes, matérialisée par l'émission le 9 septembre 2015 d'un bulletin rectificatif insuffisant pour l'année 2011, d'un bulletin d'exonération totale pour l'année 2014 du même jour, et d'un extrait de compte faisant l'impasse sur le sort des exercices 2012 et 2013, [les demandeurs sollicitant du tribunal de retenir ] que le sieur…a droit au remboursement du trop payé d'impôt pour les années 2011, 2012 et 2013 en application du principe d'une exonération totale de ses revenus de pension consacré par le jugement définitif du tribunal administratif de Luxembourg du 15 décembre 2014, ainsi qu' à l'émission de bulletins d'impôt rectificatifs en ce sens, pour chacun des exercices concernés […] ».
Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement soulève, tout d’abord, l’irrecevabilité du recours, en ce qu’il est dirigé contre une décision implicite de refus du directeur, au motif qu’en vertu du § 228 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », et de l’article 8, paragraphe (3) 3. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions administrative, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », si une réclamation avait été introduite et qu’aucune décision directoriale n’était intervenue dans un délai de six mois, le recours contentieux serait à diriger contre la décision ayant fait l’objet de la réclamation, en l’occurrence les bulletins des années 2011 à 2013.
Sur base des mêmes articles, la partie étatique soulève encore l’irrecevabilité du recours dirigé contre le bulletin de l’impôt rectificatif du 9 septembre 2015 pour avoir été introduit de manière prématurée, le recours ayant été introduit le même jour que la réclamation contre ledit bulletin auprès du directeur.
En ce qui concerne les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2012 et 2013, le délégué du gouvernement fait valoir que le recours serait irrecevable omissio medio au motif que ces bulletins émis le 26 juin 2013, respectivement le 2 juillet 2014, n’auraient pas fait l’objet d’une réclamation des requérants endéans le délai légal de trois mois, conformément aux §§ 228 et 246 AO, de sorte à avoir acquis l’autorité de la chose décidée.
Les époux…-…, dans leur mémoire en réplique, concluent au rejet des moyens d’irrecevabilité ainsi soulevés par le délégué du gouvernement, en faisant valoir que ces moyens seraient basés sur la prémisse erronée que leur recours aurait été introduit suite au silence gardé par le directeur pendant plus de six mois, sans que la partie étatique n’ait précisé la nature de la réclamation introduite. Ils donnent à considérer que le recours sous examen aurait été introduit en ce qu’ils auraient raisonnablement pu considérer que le directeur aurait refusé de faire droit à leur demande en restitution d’impôt du 12 juin 2015 par l’émission, le 9 septembre 2015, du bulletin de l’impôt sur le revenu rectificatif pour l’année 2011, du bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2014, ainsi que d’un extrait de compte ne modifiant pas l’impôt fixé pour les exercices 2012 et 2013. L’émission de ces actes traduirait, de façon médiate et implicite, le refus du directeur de faire droit à leur demande de remboursement du 12 juin 2015. Les époux…-… ajoutent finalement, d’une part, qu’au moment de l’introduction de leur recours le 10 décembre 2015, le délai de six mois à compter de leur demande de restitution du 12 juin 2015 n’aurait pas encore été épuisé, et, d’autre part, qu’une réclamation formelle contre le bulletin de l’impôt rectificatif émis le 9 septembre 2015 aurait été introduite auprès du directeur le 10 décembre 2015.
Le délégué du gouvernement, dans son mémoire en duplique, précise qu’en matière d’impôts directs, seuls trois types de recours devant le directeur, conformément aux §§ 228, 237 et 131 AO seraient prévus en l’occurrence la réclamation, le recours hiérarchique formel, ainsi que la demande de remise gracieuse, les recours contentieux étant à diriger, en cas de silence du directeur pendant plus de six mois, concernant les réclamations, contre la décision ayant fait l’objet de la réclamation, et, concernant les demandes de remise gracieuse, contre la décision implicite de refus, conformément à l’article 8 de la loi du 7 novembre 1996. En présence d’un recours hiérarchique formel, le recours en annulation ne pourrait être dirigé que contre une décision directoriale formelle. Il en conclut que la loi ne prévoirait aucun recours contre une prétendue décision implicite de refus de restitution de l’impôt qui résulterait de l’émission d’un bulletin d’impôt ou d’un décompte. Il fait finalement valoir que le recours dirigé contre le décompte émis le 9 septembre 2015 serait également irrecevable au motif que ce dernier ne constituerait ni un bulletin au sens du § 228 AO, ni une autre décision au sens du § 237 AO.
Force est tout d’abord au tribunal de relever que la demande adressée par les époux…-
… au directeur, véhiculée à travers le courrier de leur mandataire du 12 juin 2015, comporte un double objet, contrairement aux développements contenus dans leur mémoire en réplique selon lesquels ils n’auraient réclamé que la restitution d’impôts.
D’une part, les requérants ont sollicité, de la part du directeur, la révision de leurs bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2011 à 2013, en exigeant le recalcul de « […] l’impôt de la communauté d’époux…-…, en veillant à exempter de l’impôt, l’entière pension du sieur…[…] ». Une telle demande doit être qualifiée de réclamation au sens du § 249, alinéa 2 AO qui impose comme seule exigence de fond que la formulation de la réclamation fasse ressortir que le contribuable se considère lésé par le bulletin d’impôt en cause et qu’il sollicite un réexamen de son imposition, cet alinéa commandant une interprétation large de la notion de réclamation1.
Le courrier des époux…-… du 12 juin 2015 comporte, d’autre part, une demande de restitution d’impôts concernant les années d’imposition 2011, 2012, et 2013, dans la mesure 1 Jean Olinger, La procédure contentieuse en matière d’impôts directs, études fiscales, numéros 81/82/83/84/85, novembre 1989, p. 48, n° 76 et cf. trib. adm. 15 juillet 2009, n° 24913 du rôle, Pas. adm. 2016, V° Impôts, n° 608 et autres références y citées.
où ils y sollicitent, à plusieurs reprises, le remboursement du « […] trop payé […] » au regard de l’exemption totale d’impôt de la retraite de Monsieur….
Ce constat que leur demande initiale du 12 juin 2015 comporte les deux objets susmentionnés est d’ailleurs expressément admis par les requérants, étant donné qu’ils précisent, dans leur requête introductive d’instance, déférer au tribunal une décision de refus implicite du directeur de « […] (i) procéder à l'émission de bulletins rectificatifs d'impôt pour les exercices 2011, 2012 et 2013 conformément au principe d'exonération totale d'impôt de la pension de retraite perçue par Monsieur ……de la Caisse commune des pensions du personnel des Nations-Unies, ci-après dénommée «CCPPNU », fixé par décision définitive du Tribunal administratif de Luxembourg du 15 décembre 2014 […] (ii) procéder au remboursement des impôts trop payés pour ces exercices 2011, 2012 et 2013 […] ».
En ce qui concerne la recevabilité du recours sous examen, en ce qu’il est dirigé contre une décision implicite de refus du directeur de faire droit à la réclamation du 12 juin 2015 des demandeurs portant sur les bulletins de l’impôt sur revenu des années 2011, 2012 et 2013, il y a lieu de rappeler que, conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 AO et de l’article 8, paragraphe (3), 3. de la loi du 7 novembre 1996, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours introduit contre la décision qui fait l’objet de la réclamation au sens du paragraphe 228 AO si aucune décision définitive n’est intervenue dans un délai de six mois à partir de la réclamation. S’il est exact que l’article 8, paragraphe (3), 3.
de la loi du 7 novembre 1996 dispose : « Lorsqu’une réclamation au sens du §228 de la loi générale des impôts […] a été introduite et qu’aucune décision définitive n’est intervenue dans le délai de six mois à partir de la demande, le réclamant […] peut considérer la réclamation […] comme rejetées et interjeter recours devant le tribunal administratif contre la décision qui fait l’objet de la réclamation […] » et reprend ainsi en partie l’article 4, paragraphe (1) de la même loi, à savoir « les parties intéressées peuvent considérer leur demande comme rejetée », disposition dont découle une décision implicite de refus, il n’en demeure pas moins qu’il résulte des documents parlementaires que le législateur n’a pas entendu créer une décision implicite de refus en cas de silence du directeur suite à l’introduction d’une réclamation contre un bulletin d’impôt2. Par voie de conséquence, le tribunal est amené à conclure que l’article 8, paragraphe (3) 3. précité de la loi du 7 novembre 1996 n’admet l’introduction d’un recours devant le tribunal administratif, en cas de silence du directeur suite à une réclamation, que contre « la décision qui fait l’objet de la réclamation », en l’occurrence les bulletins de l’impôt sur le revenu des années d’imposition litigieux et non pas contre une décision implicite de refus du directeur3.
Ainsi, dans la mesure où aucune décision directoriale ne se crée par le silence de plus de six mois après l’introduction de la réclamation et que les dispositions légales précitées ne permettent le recours, en cas de silence du directeur, que contre la décision ayant fait l’objet d’une réclamation, le recours sous examen est irrecevable pour défaut d’objet pour autant qu’il est dirigé contre une prétendue décision implicite de refus du directeur de faire droit à la réclamation des requérants.
2 Voir doc. parl.3940A2, amendements adoptés par la commission des institutions et de la révision constitutionnelle, p. 5, ad (3) 3.: « Par opposition au domaine administratif, le silence de l’administration n’est pas à considérer comme le rejet de la demande. (…) Il en résulte également que dans ce cas le recours est dirigé, non pas contre une décision implicite de rejet mais contre la déclaration initiale contre laquelle la réclamation avait été interjetée » 3 Voir en ce sens Cour adm. 26 juin 2012, n° 29808C du rôle, publié sur www.jurad.etat.lu A titre superfétatoire, force est au tribunal de constater que dans l’hypothèse où le recours sous examen aurait été introduit directement contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2011, 2012 et 2013, il aurait été irrecevable omissio medio conformément à l’article 8, paragraphe (3), 3) de la loi du 7 novembre 1996, précité, et du § 228 AO en vertu duquel « Les décisions visées aux §§ (…) 211 [les bulletins d’imposition de l’impôt sur le revenu conformément au paragraphe 210b AO](…) peuvent être attaquées dans un délai de trois mois par voie de réclamation devant le directeur de l’Administration des contributions directes. Il sera procédé conformément au § 299. La décision du directeur est susceptible d’un recours devant le tribunal administratif, qui statuera au fond. ». En effet, en ce qui concerne le bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2011, au moment de la réclamation des époux…-…, aucun bulletin rectificatif n’avait encore été émis par le bureau d’imposition suite au jugement, précité, du tribunal administratif du 15 décembre 2014, de sorte que la réclamation du 12 juin 2015 doit être considérée comme visant, à nouveau, le bulletin originaire émis le 17 octobre 2012, de sorte à être manifestement tardive. En ce qui concerne les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2012 et 2013, la réclamation du 12 juin 2015 doit également être considérée comme manifestement tardive, étant donné qu’elle a été introduite plus de trois mois après la notification des bulletins en question, intervenue le 26 juin 2013, respectivement le 2 juillet 2014. Il y a finalement lieu de relever, à titre superfétatoire, que, même à supposer que la réclamation du 12 juin 2015 n’ait pas été tardive concernant les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2011, 2012 et 2013, le recours sous examen, déposé le 10 décembre 2015, serait irrecevable pour avoir été déposé de manière prématurée, conformément à l’article 8, paragraphe (3), 3) de la loi du 7 novembre 1996, précité, étant donné que le délai de six mois endéans duquel une décision directoriale sur réclamation doit intervenir n’a expiré que le 15 décembre 2015, la réclamation du 12 juin 2015 ayant été réceptionnée, tel que cela ressort expressément de l’accusé de réception de la Post, par le directeur le 15 juin 2015. La même conclusion est à retenir concernant le bulletin de l’impôt sur le revenu rectificatif de l’année 2011, émis le 9 septembre 2015, étant donné que le recours sous examen a été introduit le même jour que la réclamation directement dirigé contre ledit bulletin rectificatif.
C’est encore à juste titre que la partie étatique conclut à l’irrecevabilité du recours dirigé contre une décision implicite de refus du directeur de la demande de restitution d’impôts des époux…-….
Une telle demande de restitution d’impôts s’inscrit, en effet, dans le cadre des §§ 150 et suivants AO, étant relevé qu’en vertu du § 150, alinéa 2 AO, dès lors que l’administration n’entend pas exécuter le remboursement dans la mesure voulue par le contribuable, elle doit matérialiser son refus par un bulletin qui constitue ainsi une décision autonome propre à la phase de recouvrement de l’impôt et soumise aux voies de recours prévues par le § 235, alinéa 5 AO. Ce bulletin de refus peut faire l’objet d’une réclamation devant le directeur dont la décision peut être déférée au tribunal, statuant comme juge du fond, conformément au § 228 AO. En cas de silence du directeur, le contribuable concerné peut directement agir contre le bulletin refusant de faire droit à sa demande de restitution d’impôt devant le tribunal administratif, sur base de l’article 8, paragraphe (3), 3) de la loi du 7 novembre 1996, précité.
En l’espèce force est tout d’abord au tribunal de constater que la demande de restitution d’impôts a été adressée au directeur et non pas à l’autorité matériellement compétente. Or en vertu § 150, alinéa 1er AO, seul le bureau d’imposition peut refuser ou accorder la restitution d’impôts, le refus se matérialisant par l’émission d’un bulletin susceptible d’une réclamation devant le directeur, conformément aux dispositions susmentionnées.
Dans la mesure où aucune décision directoriale implicite de refus ne se créée par le silence de plus de six mois après l’introduction d’une demande de restitution d’impôts auprès du directeur, le recours sous examen est irrecevable pour défaut d’objet en ce qu’il est dirigé contre une décision implicite de refus du directeur de procéder au remboursement des impôts trop payés pour les années d’imposition 2011 à 2013.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en réformation introduit par les époux…-… est irrecevable tant en ce qu’il est dirigé contre une décision implicite de refus du directeur de « […] procéder à l'émission de bulletins rectificatifs d'impôt pour les exercices 2011, 2012 et 2013 conformément au principe d'exonération totale d'impôt de la pension de retraite perçue par Monsieur ……de la Caisse commune des pensions du personnel des Nations-Unies, ci-après dénommée «CCPPNU », fixé par décision définitive du Tribunal administratif de Luxembourg du 15 décembre 2014 […] », qu’en ce qu’il porte sur une décision implicite de refus du directeur de « […] procéder au remboursement des impôts trop payés pour ces exercices 2011, 2012 et 2013 […] » et qu’il y a partant lieu de le rejeter.
Les époux…-… sollicitent encore l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 1.000 euros sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, demande qui est à rejeter comme non fondée eu égard à l’issue du litige.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
déclare le recours en réformation irrecevable ;
partant le rejette ;
rejette la demande en d’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 10.000 euros sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;
condamne les époux…-… aux frais.
Ainsi jugé par :
Annick Braun, vice-président, Paul Nourissier, premier juge, Alexandra Castegnaro, premier juge et lu à l’audience publique du 1er mars 2017 par le vice-président, en présence du greffier Michèle Hoffmann.
s. Michèle Hoffmann s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 2/3/2017 Le Greffier du Tribunal administratif 8