Tribunal administratif N° 37597 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 mars 2016 2e chambre Audience publique du 19 janvier 2017 Recours formé par Monsieur ….., …., contre deux décisions du ministre de l’Economie en matière d’autorisation d’établissement
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 37597 du rôle et déposée le 2 mars 2016 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie Bauler, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur ….., demeurant à L-…., tendant à la réformation, sinon à l’annulation de deux décisions du ministre de l’Economie des 3 décembre 2015 et 11 janvier 2016 portant rejet de sa demande tendant à l’obtention d’une autorisation d’établissement ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 13 avril 2016 ;
Vu l’ordonnance du vice-président du tribunal administratif du 8 juillet 2016 autorisant la production de mémoires supplémentaires ;
Vu le mémoire supplémentaire déposé le 30 septembre 2016 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie Bauler pour compte du demandeur ;
Vu le mémoire supplémentaire du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 2 décembre 2016 ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jonathan Holler, en remplacement de Maître Jean-Marie Bauler, et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Guillou-Jacques en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 12 décembre 2016.
Le 21 septembre 2015, Monsieur ….. introduisit, par un formulaire de demande daté du 18 septembre 2015, une demande tendant à l’obtention d’une autorisation d’établissement pour l’exercice de l’activité de géomètre, qui fut rejetée par une décision du ministre de l’Economie, ci-après désigné par « le ministre », du 25 septembre 2015, libellée comme suit :
1« (…) Je reviens par la présente à votre demande d’autorisation d’établissement référencée sous rubrique, qui a entre-temps fait l’objet de l’instruction administrative prévue à l’article 28 de la loi d’établissement du 2 septembre 2011.
Il en résulte que vous ne remplissez pas la condition de qualification professionnelle légalement requise à l’article 3 de la loi d’établissement précitée pour l’exercice de la profession de géomètre.
En effet, la poursuite de la profession de géomètre que vous sollicitez est soumise, plus particulièrement, aux exigences de qualification suivantes, prescrites à l’article 26 de la loi d’établissement du 2 septembre 2011:
« La qualification professionnelle requise pour accéder à la profession de géomètre résulte de la possession d’un grade ou diplôme délivré par un établissement d’enseignement supérieur reconnu par l’Etat du siège de l’établissement et sanctionnant l’accomplissement avec succès d’un master en géodésie, topographie, cartographie, photogrammétrie, ou en géomatique ou de leur équivalent. » Or, votre titre de formation fourni à l’appui de la demande d’autorisation d’établissement n’est pas équivalent à un master tel exigé à l’article 26 de la loi d’établissement précitée, de sorte que je ne puis y réserver une suite favorable dans l’état actuel de votre dossier.
(…) ».
Par courrier de sa fiduciaire du 20 octobre 2015, erronément daté du 20 octobre 2014, Monsieur ….. fit parvenir au ministre une pièce supplémentaire.
Par courrier du 1er décembre 2015, réceptionné le 3 décembre 2015, Monsieur …..
demanda au ministre de reconsidérer sa situation.
Par une décision du 3 décembre 2015, le ministre confirma sa décision du 25 septembre 2015 en les termes suivants :
« (…) Je reviens par la présente à votre demande d’autorisation d’établissement référencée sous rubrique et plus particulièrement à votre courrier du 20 octobre 2015 ainsi qu’aux pièces supplémentaires ajoutées au dossier à cette occasion. Votre demande a entre-
temps fait l’objet d’une nouvelle instruction administrative prévue à l’article 28 de la loi d’établissement du 2 septembre 2011.
Il en résulte que le dirigeant social, Monsieur ….., ne remplit pas la condition de qualification professionnelle légalement requise à l’article 3 de la loi d’établissement précitée.
En effet, la poursuite de la profession de géomètre que vous sollicitez est soumise, plus particulièrement, aux exigences de qualification suivantes, prescrites à l’article 26 de la loi d’établissement du 2 septembre 2011:
2« La qualification professionnelle requise pour accéder à la profession de géomètre résulte de la possession d’un grade ou diplôme délivré par un établissement d’enseignement supérieur reconnu par l’Etat du siège de l’établissement et sanctionnant l’accomplissement avec succès d’un master en géodésie, topographie, cartographie, photogrammétrie, ou en géomatique ou de leur équivalent » Or, son titre de formation fourni à l’appui de la demande d’autorisation d’établissement n’est pas équivalent à un master tel exigé à l’article 26 de la loi d’établissement précitée, de sorte que je ne puis y réserver une suite favorable dans l’état actuel de votre dossier.
En effet le «diploma di Geometra» fourni correspond au diplôme de technicien dans l’enseignement secondaire technique luxembourgeois et non à un niveau master.
Pour ce qui est de la loi du 19 juin 2009, Monsieur ….. ne saurait bénéficier des dispositions prévues en matière de reconnaissance de l’expérience professionnelle.
En effet, en ce qui concerne la reconnaissance de l’expérience professionnelle, l’article 8 point 1 de la loi du 19 juin 2009 prévoit comme suit:
Art 8. Sont censées satisfaire aux conditions de formation et/ou d’expérience professionnelle pour les formations énumérées à l’article 3 ci-dessus, les personnes, qui, à la date de l’introduction de la demande visant à permettre au demandeur d’exercer les activités visées par les lois et règlements grand-ducaux énumérés à l’article 3 ci-dessus.
1° soit possèdent l’attestation de compétence ou le titre de formation qui est prescrit par un autre Etat membre pour accéder à cette même activité sur son territoire ou l’y exercer;
2° soit démontrent avoir exercé à plein temps l’activité visée pendant deux ans au cours des dix années précédant l’introduction de la demande dans un autre Etat membre qui ne réglemente pas ce type d’activité, à condition qu’elles détiennent une ou plusieurs attestations de compétence ou un ou plusieurs titres de formation qui attestent de la préparation du titulaire à l’exercice de l’activité concernée.
Les attestations de compétence ou les titres de formation visés au point 1° du présent article doivent remplir les conditions cumulatives suivantes:
a) avoir été délivrés par une autorité compétente dans un Etat membre, désignée conformément aux dispositions législatives, réglementaires ou administratives de cet Etat;
b) attester d’un niveau de qualification professionnelle au moins équivalent au niveau immédiatement inférieur à celui exigé par les lois et règlements grand-ducaux énumérés à l’article 3 ci-dessus.
Les attestations de compétence ou les titres de formation visés au point 2° du présent article doivent remplir les conditions cumulatives suivantes:
a) avoir été délivrés par une autorité compétente dans un Etat membre, désignée conformément aux dispositions législatives, réglementaires ou administratives de cet Etat;
3b) attester d’un niveau de qualification professionnelle au moins équivalent au niveau immédiatement inférieur à celui exigé par les lois et règlements grand-ducaux énumérés à l’article 3 ci-dessus;
c) attester de la préparation du titulaire à l’exercice de la profession concernée. Les deux ans d’expérience professionnelle ne sont pas exigés lorsque le demandeur dispose d’un diplôme ou d’un certificat qui sanctionne une formation réglementée et qui atteste de la préparation du titulaire à l’exercice de l’activité concernée.
Or le diplôme fourni n’atteste pas d’un niveau de qualification professionnelle au moins équivalent au niveau immédiatement inférieur à celui exigé par les lois et règlements grand-
ducaux. (…) ».
Cette décision du 3 décembre 2015 fut confirmée par une décision ministérielle du 11 janvier 2016, libellée comme suit :
« (…) Par la présente, j’ai l’honneur de me référer à votre requête sous rubrique et plus particulièrement aux pièces supplémentaires versées au dossier en date du 14 décembre 2015.
Votre demande a fait entre temps l’objet d’une nouvelle instruction prévue à l’article 28 de la loi d’établissement du 2 septembre 2011.
Il en résulte que Monsieur ….. ne remplit pas la condition de qualification professionnelle légalement requise à l’article 3 de la loi du 2 septembre 2011 pour l’exercice de la profession de géomètre.
Au vu des pièces versées au dossier, il s’avère que qu’en l’absence de tout élément probant nouveau, je suis au regret de maintenir la décision du 3 décembre 2015 (…). (…) ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 2 mars 2016, Monsieur ….. fit introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation des décisions ministérielles, précitées, des 3 décembre 2015 et 11 janvier 2016.
En date du 1er avril 2016, le ministre accorda au demandeur l’autorisation d’établissement sollicitée pour exercer en qualité de profession libérale l’activité de géomètre, ce dont il informa le litismandataire de l’intéressé par un courrier du 4 avril 2016, rédigé comme suit :
« (…) Je reviens par la présente à votre recours sous rubrique et je vous informe qu’il est fondé.
Par conséquent, une autorisation d’établissement pour l’exercice de la profession de géomètre a été délivrée à votre mandant sous le no 10062409/0 (…) ».
Par courrier de son litismandataire du 28 avril 2016, le demandeur réclama au ministre le paiement de la somme de 5.551,65 euros à titre de remboursement des frais et honoraires exposés dans le cadre du susdit recours du 2 mars 2016.
4Par courrier du 20 juin 2016, le ministre informa le demandeur du fait qu’il n’entendrait pas réserver de suites favorables à cette dernière demande.
Par courrier du 4 juillet 2016, le litismandataire du demandeur, en se référant au refus du ministre de prendre en charge les frais et honoraires exposés par son mandant, sollicita auprès du tribunal de céans l’autorisation de déposer un mémoire supplémentaire « (…) pour conclure sur ce point et plus particulièrement sur l’indemnité de procédure (…) ».
Par ordonnance du 8 juillet 2016, le vice-président du tribunal administratif autorisa les parties à déposer, chacune, un mémoire supplémentaire « (…) ayant pour unique finalité de prendre position sur la question de l’indemnité de procédure invoquée par Maître Jean-Marie Bauler à l’appui de sa demande tendant à pouvoir déposer un mémoire supplémentaire (…) ».
A l’audience publique des plaidoiries du 12 décembre 2016, le litismandataire du demandeur, a déclaré, sur question afférente du tribunal, renoncer au recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation des susdites décisions du ministre des 3 décembre 2015 et 11 janvier 2016, mais maintenir sa demande tendant à la condamnation de la partie étatique à une indemnité de procédure, au sens de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 ».
Le tribunal n’étant dès lors pas saisi du fond de l’affaire, il n’examinera par conséquent pas les développements afférents des parties.
A l’appui de sa demande tendant à l’obtention d’une indemnité de procédure, le demandeur fait valoir, dans son mémoire supplémentaire, qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge l’intégralité des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens, en ce compris, notamment, les frais d’avocat, au motif, en substance, que malgré la communication, à deux reprises, de pièces supplémentaires, le ministre ne serait – dans un premier temps – pas revenu sur sa décision de refus initiale, de sorte à l’obliger à recourir aux services d’un avocat à la Cour pour faire valoir ses droits dans le cadre d’un procès au cours duquel ses moyens et prétentions n’auraient cependant pas été contestés par la partie étatique, étant donné que l’autorisation sollicitée lui aurait été délivrée en cours d’instance. Le demandeur insiste encore sur le fait que, dans le cadre de l’appréciation de l’iniquité conditionnant l’octroi d’une indemnité de procédure, il ne serait pas nécessaire que l’illégalité de la décision attaquée procède d’une faute, contrairement à l’argumentation développée par le ministre dans son courrier, précité, du 4 juillet 2016. Il précise encore qu’ayant été contraint de charger un avocat de la défense de ses intérêts, il aurait dû prendre à sa charge, d’une part, des frais de bureau et de constitution de dossier, ainsi que des frais de correspondance et, d’autre part, des honoraires, à titre de rémunération des prestations effectuées par son litismandataire – à savoir l’instruction du dossier, des entretiens téléphoniques, des recherches en droit, l’analyse des différentes décisions du ministre, l’établissement d’une farde de pièces, la rédaction, la finalisation et le dépôt d’un recours et d’un mémoire supplémentaire, ainsi que sa représentation à l’audience des plaidoiries – ces prestations correspondant, selon le demandeur, à un total de 13 heures de travail.
5Dans son mémoire supplémentaire, le délégué du gouvernement soulève l’irrecevabilité de la demande de Monsieur ….. tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure de 5.000,- euros, telle que formulée dans le mémoire supplémentaire de l’intéressé, au motif qu’il s’agirait d’une demande nouvelle modifiant l’objet du litige, qui serait définitivement délimité par la requête introductive d’instance, en vertu de l’article 1er de la loi du 21 juin 1999.
A titre subsidiaire, il conclut au rejet de ladite demande, au motif qu’elle serait non justifiée, sinon exagérée, et qu’elle omettrait de spécifier la nature des sommes exposées et non comprises dans les dépens. Par ailleurs, il souligne que dans la requête introductive d’instance, le demandeur n’aurait sollicité qu’une indemnité de procédure de 1.500,- euros, de sorte que le tribunal ne saurait se prononcer sur une demande d’indemnité de procédure plus élevée. En outre, il cite un arrêt de la Cour administrative du 12 mars 2015, portant le numéro 35452C du rôle, ayant retenu qu’« (…) il n’appartient pas à une juridiction saisie de pousser plus loin que nécessaire l’analyse des questions de droit soulevées par rapport au fond en vue de toiser une demande en allocation d’une indemnité de procédure dans une affaire devenue entre-temps sans objet, sans que le fond n’ait dû être abordé plus en avant par ailleurs (…) ».
A l’audience publique des plaidoiries du 12 décembre 2012, le délégué du gouvernement a encore soutenu que le tribunal ne serait pas compétent pour connaître de la demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure de 5.000,- euros, telle que formulée par le demandeur, alors qu’il s’agirait d’une façon déguisée de demander des dommages-intérêts pour procédure abusive et vexatoire et que de telles demandes échapperaient à la compétence des juridictions administratives.
Les questions de compétence de la juridiction administrative saisie étant d’ordre public1, il appartient en premier lieu au tribunal de trancher le moyen d’incompétence ainsi soulevé par le délégué du gouvernement, bien que ledit moyen n’ait été formulé qu’oralement à l’audience.
A cet égard, le tribunal relève que l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 prévoit que « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine ».
Force est au tribunal de constater que la demande litigieuse ne constitue pas une demande tendant à l’allocation de dommages-intérêts en réparation d’un préjudice causé par une attitude procédurale jugée abusive et vexatoire, qui échapperait, en tant que telle, à la compétence des juridictions administratives2. Au contraire, elle s’inscrit manifestement dans le cadre dudit article 33 de la loi du 21 juin 1999, relatif aux indemnités de procédure pouvant être accordées par le juge administratif, en ce qu’elle a pour objet la condamnation de la partie étatique aux sommes exposées par la partie demanderesse et non comprises dans les dépens, dont notamment les frais et honoraires d’avocat, au motif que compte tenu des circonstances de la cause, il serait inéquitable de les laisser à la charge de Monsieur …… Le législateur ayant expressément accordé 1 Cour adm., 14 janvier 2010, n° 25846C du rôle, Pas. adm. 2016, V° Compétence, n° 24 et l’autre référence y citée.
2 Sur ce dernier point : Cour adm., 22 avril 1999, n° 10489C du rôle, Pas. adm. 2016, V° Compétence, n° 43 et les autres références y citées.
6au juge administratif la possibilité de condamner une partie à une telle indemnité de procédure, le moyen d’incompétence sous analyse est à rejeter.
Quant au moyen d’irrecevabilité de la demande d’octroi d’une indemnité de procédure, au motif qu’il s’agirait d’une demande nouvelle modifiant l’objet du litige, qui serait définitivement délimité par la requête introductive d’instance, tel que soulevé par le délégué du gouvernement, le tribunal relève que le demandeur avait déjà formulé une demande d’octroi d’une indemnité de procédure de 1.500,- euros dans sa requête introductive d’instance, dont il a cependant augmenté le quantum à 5.000,- euros, dans le cadre de son mémoire supplémentaire.
Or, outre le fait qu’en tout état de cause, une demande en allocation d’une indemnité de procédure, qui s’analyse en tant qu’accessoire s’attachant aux prétentions originaires de la partie demanderesse, ne constitue une demande nouvelle ni par sa cause, ni par son objet et peut dès lors être formulée en cours de procédure3, la simple augmentation, en cours d’instance, du quantum d’une telle demande formulée dans la requête introductive d’instance ne saurait pas non plus être qualifiée de demande nouvelle, mais constitue une demande additionnelle admissible, s’agissant d’une demande par laquelle le demandeur sollicite une condamnation plus importante que celle figurant dans sa demande initiale, mais qui se situe toujours dans le cadre de cette demande initiale telle que définie par son objet et sa cause.4 Le moyen d’irrecevabilité sous analyse est dès lors à rejeter.
Quant au bien-fondé de la demande en question, le tribunal précise, à titre liminaire, que dans une optique d’efficience de traitement du contentieux administratif et fiscal, il n’appartient pas à une juridiction saisie de pousser plus loin que nécessaire l’analyse des questions de droit soulevées par rapport au fond en vue de toiser une demande en allocation d’une indemnité de procédure dans une affaire où le demandeur a expressément déclaré renoncer à son recours au fond pour ne maintenir que sa demande d’octroi d’une indemnité de procédure, tel que c’est le cas en l’espèce.5 Le tribunal relève ensuite qu’il ne saurait suivre l’argumentation du délégué du gouvernement selon laquelle la demande sous examen ne spécifierait pas la nature des sommes exposées par le demandeur et non comprises dans les dépens, étant donné que le demandeur a clairement indiqué qu’il s’agirait de dépenses occasionnées par la défense de ses intérêts par son litismandataire, plus précisément, d’une part, de frais de bureau et de constitution de dossier, ainsi que de frais liés à la correspondance et, d’autre part, d’honoraires à titre de rémunération des prestations effectuées par ledit litismandataire – à savoir l’instruction du dossier, des entretiens téléphoniques, des recherches en droit, l’analyse des différentes décisions du ministre, l’établissement d’une farde de pièces, la rédaction, la finalisation et le dépôt d’un recours et d’un mémoire supplémentaire, ainsi que sa représentation à l’audience des plaidoiries.
3 Trib. adm., 23 mars 2005, n° 18825 du rôle, Pas. adm. 2016, V° Procédure contentieuse, n° 968 et les autres références y citées.
4 T. Hoscheit, Le droit judiciaire privé au Grand-Duché de Luxembourg, Editions Paul Bauler, 2012, n° 35 : « La demande additionnelle est la demande par laquelle le demandeur sollicite une condamnation différente, soit plus importante, soit moindre, que celle figurant dans sa demande initiale, mais qui se situe toujours dans le cadre de cette demande initiale telle que définie par son objet et sa cause. ».
5 Par analogie : Cour adm., 12 mars 2015, n° 35452C du rôle, Pas. adm. 2016, V° Procédure contentieuse, n° 974.
7Il est constant en cause que suite au dépôt de la requête introductive d’instance, le demandeur s’est vu accorder l’autorisation d’établissement sollicitée, au motif du caractère fondé du recours ainsi introduit et ce après trois décisions de rejet des 25 septembre et 3 décembre 2015, ainsi que du 11 janvier 2016, La partie étatique ayant ainsi confirmé à deux reprises sa décision initiale de refus, de sorte à obliger le demandeur à se pourvoir en justice sous l’assistance d’un avocat, pour ensuite, en cours de procédure contentieuse, se raviser et accorder l’autorisation initialement sollicitée, sans cependant s’être vu confrontée, au cours de la phase contentieuse, à des éléments de preuve dont elle n’aurait pas disposé auparavant, il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur …..
l’intégralité des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens, de sorte que la demande sous analyse est justifiée en son principe.
Compte tenu des éléments d’appréciation en possession du tribunal, des devoirs et du degré de difficulté de l’affaire ainsi que du montant réclamé, et au vu de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999, il y a lieu d’évaluer ex æquo et bono l’indemnité à allouer par l’Etat à Monsieur …..
à un montant de 1.000.- euros.
Quant aux dépens, le tribunal relève qu’en vertu de l’article 32 de la loi du 21 juin 1999, « Toute partie qui succombera sera condamnée aux dépens, sauf au tribunal à laisser la totalité, ou une fraction des dépens à la charge d’une autre partie par décision spéciale et motivée. ».
En matière administrative, la condamnation de l’autorité administrative aux frais et dépens ne se justifie par conséquent qu’au cas où celle-ci a été à l’origine d’une décision illégale ou au cas où, à la suite d’un recours contentieux, elle procède au retrait d’une telle décision avant le prononcé du jugement.6 Dès lors, dans la mesure où il est constant en cause que le ministre a délivré l’autorisation sollicitée suite à l’introduction, par le demandeur, d’un recours contentieux à l’encontre de ses décisions de refus des 3 décembre 2015 et 11 janvier 2016, au motif du caractère fondé dudit recours, il y a lieu de condamner la partie étatique aux dépens.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
donne acte au demandeur de ce qu’il déclare renoncer à son recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation des décisions du ministre de l’Economie des 3 décembre 2015 et 11 janvier 2016 portant rejet de sa demande d’octroi d’une autorisation d’établissement ;
reçoit le recours en la forme pour le surplus, à savoir en ce qui concerne la demande de Monsieur ….. tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure de 5.000,- euros ;
déclare cette demande partiellement fondée, partant, condamne l’Etat à payer à Monsieur ….. une indemnité de procédure de 1.000,- euros ;
6 Trib. adm., 23 septembre 1999, n° 10946 du rôle, Pas. adm. 2016, V° Procédure contentieuse, n° 1002.
8 condamne l’Etat aux frais.
Ainsi jugé par:
Françoise Eberhard, vice-président, Anne Gosset, premier juge, Daniel Weber, juge, et lu à l’audience publique du 19 janvier 2017 par le vice-président en présence du greffier Goreti Pinto.
s. Goreti Pinto s. Françoise Eberhard Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 20.1.2017 Le greffier du tribunal administratif 9