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10/10/2016 | LUXEMBOURG | N°36718

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 10 octobre 2016, 36718


Tribunal administratif N° 36718 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 août 2015 Ire chambre Audience publique du 10 octobre 2016 Recours formé par Madame …, … contre une décision du Syndicat pour le transport Intercommunal de personnes dans le canton d’Esch (TICE) en matière de révocation

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 36718 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 août 2015 par Maître Nicolas Decker, avocat à la Cour,

inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, fonctionnaire...

Tribunal administratif N° 36718 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 août 2015 Ire chambre Audience publique du 10 octobre 2016 Recours formé par Madame …, … contre une décision du Syndicat pour le transport Intercommunal de personnes dans le canton d’Esch (TICE) en matière de révocation

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 36718 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 août 2015 par Maître Nicolas Decker, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, fonctionnaire, demeurant à L…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du Comité du Syndicat pour le transport Intercommunal de personnes dans le canton d’Esch du 30 juin 2015 de procéder à la révocation de son service provisoire de chauffeur d’autobus receveur avec effet au 1er février 2015 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Michèle Wantz, agissant en remplacement de l’huissier de justice Tom Nilles, les deux demeurant à Esch-sur-Alzette, du 3 août 2015, portant signification de ce recours au Syndicat pour le transport Intercommunal de personnes dans le canton d’Esch, établi à L-4083 Esch/Alzette, 290, boulevard Charles de Gaulle, représenté par son président actuellement en fonctions, sinon par ses organes statutaires actuellement en fonctions ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 12 novembre 2015 par Maître Jean Tonnar, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte du Syndicat pour le transport Intercommunal de personnes dans le canton d’Esch, ledit mémoire en réponse ayant été signifié à Madame … par exploit de l’huissier de justice Nadine, dite Nanou Tapella, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 11 novembre 2015 et notifié en date du même jour par acte d’avocat à avocat au litismandataire de celle-ci ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 9 décembre 2015 par Maître Nicolas Decker pour compte de Madame …, ledit mémoire en réplique ayant été notifié par acte d’avocat à avocat du même jour au litismandataire de la partie défenderesse ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 21 décembre 2015 par Maître Jean Tonnar, pour compte de sa mandante, ledit mémoire en duplique ayant été signifié à Madame … par exploit de l’huissier de justice Nadine, dite Nanou Tapella, du 23 décembre 2015 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Nicolas Decker et Maître Christian Bock, en remplacement de Maître Jean Tonnar, en leurs plaidoiries respectives.

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Par contrat de louage de services à durée déterminée pour salariés du 10 août 2012, le Syndicat pour le transport Intercommunal de personnes dans le canton d’Esch, ci-après dénommé le « TICE », procéda à l’engagement de Madame … « en qualité de chauffeur d’autobus, pour assurer le remplacement des agents de transport libérés pour réduire les heures supplémentaires accumulées pour parer aux absences générées par les congés de maladie et autres absences non prévisibles. La phase de récupération des heures précitées s’échelonnera sur une période de 24 mois ; et ce dans le régime du salarié (anciennement employé privé) ». Ledit contrat de louage de services fut conclu pour une durée prenant effet le 1er septembre 2012 et expirant le 31 août 2013 « de plein droit et sans préavis », de sorte que le contrat d’emploi en question était considéré comme étant conclu « pour une durée déterminée », étant entendu que « la période du 1er septembre 2012 au 30 novembre 2012 est à considérer comme engagement à l’essai ».

Par décision du comité du TICE du 8 octobre 2012, le contrat de louage de services précité signé entre parties en date du 10 août 2012 fut ratifié, ladite décision ayant été approuvée par le ministre de l’Intérieur et à la Grande Région en date du 8 novembre 2012.

Par décision du comité du TICE du 31 janvier 2013, Madame … fut nommée provisoirement à un poste de chauffeur d’autobus receveur sous le statut du fonctionnaire.

Par décision du comité du TICE du 3 février 2015, le service provisoire de Madame … fut prolongé pour une période de 6 mois, à savoir du 1er février au 31 juillet 2015, d’un côté, en considération de ce que Madame … avait passé avec succès l’examen d’admission définitive dans la carrière de l’agent de transport, ayant eu lieu en date du 25 novembre 2014 et, d’un autre côté, au vu de « multiples réclamations et faits très récents quant à son comportement professionnel », ayant donné lieu à un ordre de justification à son encontre, et en considération de ce que « à l’état actuel des choses [le Bureau du TICE] se voit dans l’impossibilité de fournir, avant le terme de la période de stage, un bilan définitif concernant les qualifications professionnelles de la dame … et d’exprimer ses recommandations concernant la nomination définitive de la dame concernée », au vu de ce que son stage de six mois avait expiré en date du 31 janvier 2015.

Par décision du comité du TICE du 26 mars 2015, Madame … fut révoquée du service provisoire avec effet au 30 avril 2015 de sa fonction de chauffeur d’autobus, et ce, pour les motifs figurant dans une lettre de licenciement figurant en annexe à la délibération en question. Cette décision fut prise au vu d’un « entretien préalable » qui aurait eu lieu en date du 3 mars 2015 entre Madame … et le bureau du TICE et l’avis de la délégation du personnel du TICE du 20 janvier 2015. Cette lettre de licenciement, datée au 27 mars 2015, est libellée dans les termes suivants :

« Le Comité du Syndicat T.I.C.E. a décidé à l'unanimité des membres présents en sa séance du 26 mars 2015 de procéder à la révocation de votre service provisoire avec préavis d'un mois.

2 L'évolution possible envers cette décision vous a été communiquée lors d'une entrevue avec le Bureau du TICE en date du 3 mars 2015 et en présence de M. …, directeur, où vous avez pris confirmation des faits qui vous ont été reprochés dans l'ordre de justification vous adressé le 3 février 2015 et qui restait sans réponse dans les délais imposés.

Le préavis d'un mois prend cours le 1ier avril 2015.

La raison de votre révocation du service provisoire est liée au fait que vous n'avez pas rempli les exigences nécessaires pour exécuter consciencieusement la profession de chauffeur d'autobus.

Le TICE qui, conformément à sa mission de service public, veut assurer un service de première qualité à ses usagers, a ainsi décidé de révoquer votre service provisoire.

Votre comportement professionnel a entraîné une perte de confiance importante dans le chef des TICE qui a rendu impossible le maintien de toute relation de travail.

Nous vous signalons finalement que vous êtes dispensée de toute prestation de travail pendant le délai de préavis. ».

Par lettre du 27 avril 2015, le ministre de l’Intérieur retourna au comité du TICE sa délibération concernant « la révocation du service provisoire du chauffeur d’autobus … au 30 avril 2015 », et ce, par l’intermédiaire du commissaire de district de Luxembourg, avec l’information qu’il n’était pas en mesure d’approuver la délibération en question. Ce courrier est motivé comme suit :

« Soit la présente délibération du comité du syndicat intercommunal TICE du 9 mars 2015 concernant la révocation du service provisoire du chauffeur d’autobus … au 30 avril 2015, retournée aux autorités du syndicat intercommunal par l’intermédiaire de Monsieur le Commissaire de district à Luxembourg avec prière de bien vouloir informer les autorités syndicales que je ne suis pas en mesure d’approuver la délibération dont il s’agit.

Dans ma décision du 31 mars 2015 concernant la prolongation du service provisoire attribuée à Madame … avec effet au 1er février 2015 et votée par le comité du TICE dans sa séance du 3 février 2015, je faisais appel au comité du TICE de revenir sur sa décision. En effet, l’intéressée remplit toutes les conditions légales pour obtenir une nomination définitive avec effet au 1er février 2015, date de l’échéance du service provisoire ou bien une révocation à la fin du service provisoire. La décision du comité du TICE pour attribuer une prolongation du service provisoire n’est pas fondée.

Je prie les autorités du comité du TICE de se prononcer une nouvelle fois sur le cas de Madame … en tenant compte de la date de l’échéance de son service provisoire. » Par décision du 30 juin 2015, le comité du TICE décida « de procéder à la révocation du service provisoire de la dame … , chauffeur d’autobus receveur (…) avec effet au 1er février 2015 » et ce, au vu des considérations suivantes :

« Vu sa délibération du 31 janvier 2013, approuvée par l'Autorité Supérieure en date du 07 février 2013 N°L/13305/13, portant nomination provisoire de la dame … aux fonctions d'agent de transport;

3 Considérant que la dame … est entrée en fonction en date du 1er février 2013;

Revu la délibération du Comité du TICE en date du 03 février 2015 portant prolongation du stage de la dame … de six mois, suite à la décision du Bureau du TICE, du même jour, d'adresser un ordre de justification à la dame … ;

Considérant la décision de l'Autorité Supérieure en date du 31 mars 2015 N° L/13305/15, de refuser l'approbation de la décision du Comité du TICE du 03 février 2015 portant prolongation du stage provisoire de la dame … de six mois tout en recommandant aux autorités syndicales de procéder au vote concernant un nomination définitive ou de révoquer la dame … de son stage provisoire pour l'échéance du 1ier février 2015 ;

Vu la décision de l'Autorité Supérieure en date du 27 avril 2015 N° L13305/15, de refuser l'approbation de la décision du Comité du TICE du 26 mars 2015 portant révocation de la dame … de son service provisoire avec effet au 1er mai 2015 avec l'argumentation que les autorités syndicales doivent avant tout autre chose d'abord revenir sur leur décision concernant la prolongation de stage pré-mentionnée;

Considérant que le refus par 1'Autorité Supérieur de la délibération du Comité du TICE prononçant une prolongation du stage provisoire de la dame … de six mois et daté au 31 mars 2015, donc après la décision du Comité du TICE de révoquer la dame …, décision prise en date du 26 mars 2015 ;

Considérant que le Comité du TICE doit impérativement revenir sur sa décision du 03 février 2015 ;

Considérant que la dame … n'a pas daigné répondre dans le délai lui imposé, en l'occurrence le 18 février 2015, à l'ordre de justification lui transmis en date du 03 février 2015 ;

La dame … entendu en ses explications par le Bureau du TICE en date du 03 mars 2015;

Vu l'avis de la délégation du personnel; ».

Le comité du TICE adressa en date du 1er juillet 2015 une lettre recommandée avec accusé de réception à Madame … pour l’informer de la décision précitée du TICE du 30 juin 2015 ayant pour objet de « confirmer » la décision de sa révocation de son service provisoire pour la porter avec effet au 1er février 2015, à savoir à la date de la fin de son service provisoire, et ce, pour les motifs suivants :

« La raison de votre révocation du service provisoire est liée au fait que vous n'avez pas rempli les exigences nécessaires pour exécuter consciencieusement la profession de chauffeur d'autobus.

Le TICE qui, conformément à sa mission de service public, veut assurer un service de première qualité à ses usagers, a ainsi décidé de révoquer votre service provisoire.

4 Votre comportement professionnel a entraîné une perte de confiance importante dans le chef des TICE qui a rendu impossible le maintien de toute relation de travail. ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 août 2015, Madame … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision précitée du TICE du 30 juin 2015.

En l’absence de prise de position circonstanciée de la part du litismandataire du TICE quant à la compétence du tribunal administratif pour connaître le cas échéant du recours en réformation introduit en ordre principal, voire quant à la recevabilité du recours en annulation introduit en ordre subsidiaire, il y a lieu de se référer à la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux, ci-après dénommée le « statut général », applicable également aux fonctionnaires des « syndicats de communes » suivant son article 1er, paragraphe 1, alinéa 1er, de sorte à s’appliquer également au TICE qui constitue de manière non contestée un syndicat de communes.

Ceci étant relevé, il échet de constater qu’il n’existe aucune disposition du statut général ni aucune autre disposition légale suivant laquelle il existerait un recours au fond à l’encontre d’une décision du comité d’un syndicat de communes prononçant la révocation de l’admission au service provisoire ainsi que le licenciement avec préavis, de sorte que le tribunal doit se déclarer incompétent pour connaître du recours principal en réformation.

Il s’ensuit que seul un recours en annulation a pu être introduit contre la décision déférée qui est par ailleurs à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A titre liminaire, il échet de constater que la demanderesse entend voir traiter le recours sous examen à titre subsidiaire par rapport à son recours introduit en date du 9 juin 2015, sous le numéro 36395 du rôle, et dirigé contre la décision précitée du comité du TICE du 26 mars 2015. Elle estime dans ce contexte que dans la mesure où, par la décision précitée du 26 mars 2015, il aurait été procédé à la révocation de son service provisoire, il y aurait lieu d’en conclure que ses liens statutaires auraient été rompus avec le TICE à la même date. Du fait que la décision en question du 26 mars 2015 serait à considérer comme étant définitive, il appartiendrait par conséquent à la juridiction administrative d’examiner la régularité et subsidiairement le bien-fondé de celle-ci.

Il échet tout d’abord de relever que la partie défenderesse n’a pas pris position par rapport à une telle demande de traitement subsidiaire du recours sous examen par rapport à celui introduit en date du 9 juin 2015 et dirigé contre la décision précitée du TICE du 26 mars 2015.

Abstraction faite du constat que la demande ainsi présentée par la demanderesse ne saurait être considérée comme constituant un moyen de recevabilité voire d’irrecevabilité du recours sous examen, il échet encore de constater à la lecture de la requête sous examen que la demanderesse n’a pas autrement précisé quelles devraient être les conséquences de la décision à prendre par le tribunal administratif dans le cadre de la requête lui soumise en date du 9 juin 2015 et inscrite sous le numéro 36395 du rôle, et ce, par rapport aux suites qu’il y aurait lieu de réserver au recours sous examen suivant la décision favorable ou défavorable à la demanderesse, à prendre par le tribunal dans le cadre de cet autre recours.

Par ailleurs, il échet de relever que chaque recours introduit auprès du tribunal administratif est à traiter de manière indépendante par rapport à tout autre recours introduit auprès de lui et il n’appartient pas à un demandeur de déterminer la chronologie à observer par le tribunal dans le cadre de l’examen de plusieurs recours introduit devant lui par ce même demandeur et dirigés contre des actes certes différents, mais ayant entre eux un lien juridique certain.

Enfin, le principe d’une bonne administration de la justice commande au tribunal d’examiner le recours sous examen de manière indépendante par rapport aux deux autres recours introduits par la demanderesse en date des 3 et 9 juin 2015, inscrits sous les numéros 36365 et 36395 du rôle, et ce, d’autant plus que cette dernière décision prise en date du 30 juin 2015 pourrait, à ce stade de l’examen du litige sous examen, être considérée comme ayant annulé et remplacé non seulement la décision précitée du comité du TICE du 3 février 2015, mais également celle, subséquente, du 26 mars 2015 en remplacement de laquelle elle a décidé la révocation du service provisoire de la demanderesse avec effet au 1er février 2015.

Ainsi, et au cas où la décision sous examen devrait être considérée comme étant valablement prise par le comité du TICE, les recours dirigés contre les décisions antérieures des 3 février et 26 mars 2015 pourraient être considérés comme étant sans objet du fait du retrait de celles-

ci par la décision sous examen.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il échet de ne pas faire droit au traitement « subsidiaire » du présent recours par rapport à celui introduit en date du 9 juin 2015, et inscrit sous le numéro 36395 du rôle.

Ceci étant relevé, la demanderesse fait état de ce qu’elle bénéficierait d’une nomination définitive à partir du 1er février 2015, de sorte que sa révocation de son service provisoire devrait être considérée comme étant « nulle ». Elle se base à cet effet sur le fait qu’à partir du 1er février 2015, elle se serait vu accorder « un traitement de fonctionnaire ».

En droit, la demanderesse reproche tout d’abord au TICE d’avoir violé l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après dénommé le « règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », du fait que sa révocation aurait été décidée à un moment où elle aurait déjà été engagée comme fonctionnaire auprès du TICE.

Après avoir contesté que la demanderesse a bénéficié, au jour de la décision sous examen du 30 juin 2015, d’une nomination définitive en tant que fonctionnaire, du fait qu’une décision expresse de la part de l’organe habilité à procéder à une telle nomination ferait défaut et qu’en date du 3 février 2015, il aurait pris une décision de prolongation du service provisoire de la demanderesse, en relevant encore que le simple fait par la demanderesse d’avoir perçu un « salaire supérieur » à partir du 1er février 2015 ne saurait être interprété comme lui « conférant une nomination définitive », le TICE estime, dans son mémoire en réponse, ne pas être en mesure de prendre position par rapport à ce premier moyen tiré d’une violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, du fait que ce moyen ne serait pas suffisamment étayé, de sorte qu’il ne serait pas en mesure d’en saisir l’étendue. Il soutient encore dans ce contexte que la décision sous examen du 30 juin 2015 aurait annulé et remplacé la décision antérieure précitée du 26 mars 2015, et ce, conformément à « l’avis » «de l’autorité supérieure » du 27 avril 2015.

Alors que principalement le TICE souhaite voir déclarer « irrecevable sinon non fondé » ce premier moyen tiré d’une prétendue violation de la légalité externe de la décision sous examen, il soutient à titre subsidiaire, et pour le cas où le tribunal estimerait que ce premier moyen serait suffisamment étayé, que l’article 9, paragraphe 1er du règlement grand-

ducal du 8 juin 1979 aurait été respecté, du fait que les décisions antérieures des 3 février et 26 mars 2015 ne sauraient valablement être considérées comme étant des décisions ayant créé ou reconnu des droits dans le chef de la demanderesse. En outre, la décision sous examen ne saurait être considérée, d’après le TICE, comme ayant pour objet respectivement la révocation de la demanderesse ou la modification pour l’avenir d’un droit dont elle aurait bénéficié. Il s’ensuivrait que ce moyen devrait être déclaré non fondé.

Dans son mémoire en réplique, la demanderesse rétorque, en substance, que du fait que depuis le 1er février 2015 elle serait rémunérée « à titre de fonctionnaire communal dans l’échelon 204 du grade 4 » alors que pour le mois de janvier 2015, elle aurait été rémunérée à l’échelon 168 du grade 3, la décision sous examen constituerait une décision qui aurait porté modification de droits qui aurait été créés dans son chef, de sorte qu’il y aurait lieu de retenir une violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979.

Dans son mémoire en duplique, la partie défenderesse fait état de ce que par la décision sous examen du 30 juin 2015, la demanderesse aurait été révoquée de son service provisoire au vu du fait qu’elle n’aurait pas rempli « les exigences nécessaires à la fonction de chauffeur d’autobus », en se référant pour le surplus à ses développements antérieurs contenus dans son mémoire en réponse par rapport à ce premier moyen tiré d’une violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979.

L’article 9, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 dispose comme suit :

« Sauf s'il y a péril en la demeure, l'autorité qui se propose de révoquer ou de modifier d'office pour l'avenir une décision ayant créé ou reconnu des droits à une partie, ou qui se propose de prendre une décision en dehors d'une initiative de la partie concernée, doit informer de son intention la partie concernée en lui communiquant les éléments de fait et de droit qui l'amènent à agir ».

A la lecture de la décision sous examen du 30 juin 2015, il échet de constater qu’au vu de ses considérants, elle avait non seulement pour objet de décider la révocation du service provisoire de la demanderesse avec effet au 1er février 2015, mais en outre pour objet de « revenir » sur la décision précitée du 3 février 2015, au vu du refus de l’approbation tutélaire du 31 mars 2015, et de procéder également au retrait de la décision précitée du 26 mars 2015 au vu du refus de l’approbation tutélaire du 27 avril 2015.

Etant donné que par les décisions antérieures, précitées, des 3 février et 26 mars 2015, le TICE avait décidé, en premier lieu, de prolonger le service provisoire de la demanderesse pour une durée de six mois et puis, dans un deuxième temps, de révoquer ledit service provisoire avec effet au 1er mai 2015, la décision sous examen du 30 juin 2015 est à considérer comme étant nouvelle par rapport aux deux décisions antérieures, du fait que par la décision en question, le TICE a décidé de procéder à la révocation, d’ailleurs rétroactive, de la demanderesse avec effet au 1er février 2015.

Abstraction faite de la question de savoir, dans ce contexte, s’il y a lieu de faire droit à l’argumentation de la demanderesse suivant laquelle elle aurait eu la qualité de fonctionnaire communal à partir du 1er février 2015, voire si la décision sous examen est à considérer comme constituant un retrait rétroactif des décisions antérieures, au sens de l’article 8 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, il y a pour le moins lieu de retenir que la décision en question a été prise en dehors de l’initiative de la partie concernée, à savoir la demanderesse, et qu’à aucun moment, celle-ci ne s’est vu communiquer les éléments de fait et de droit qui ont amené le TICE à agir ainsi, en la mettant dans l’impossibilité d’exercer ses droits, et ce, en conformité avec l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979. S’il est vrai qu’il ressort de la décision en question que la demanderesse aurait été entendue « en ses explications par le Bureau du TICE » en date du 3 mars 2015, cet entretien avec la demanderesse ne saurait être considéré comme constituant l’accomplissement de la formalité telle que prévue par l’article 9 précité, au vu de ce que l’initiative de la décision sous examen n’a été prise qu’à la suite du refus de l’approbation tutélaire précité du 27 avril 2015, survenu ainsi postérieurement audit entretien qui ne pouvait partant avoir pour objet de permettre à la demanderesse de prendre position par rapport au projet de sa révocation avec effet au 1er février 2015.

Il suit de ce qui précède, et sans qu’il n’y ait lieu de prendre position par rapport aux autres moyens développés en cause, que la décision sous examen du 30 juin 2015 encourt l’annulation.

Au vu de l’issue du litige, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure sollicitée par le TICE d’un montant de 1.500 € basée sur l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

PAR CES MOTIFS, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;

reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;

au fond, le déclare justifié, partant annule la décision du comité du TICE du 30 juin 2015 portant révocation de Madame … du service provisoire comme chauffeur d’autobus receveur avec effet au 1er février 2015 et renvoie le dossier en prosécution de cause au TICE ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure sollicitée par le TICE ;

condamne le TICE aux frais.

Ainsi jugé par :

Carlo Schockweiler, premier vice-président, Thessy Kuborn, vice-président, Michèle Stoffel, juge, et lu à l’audience publique du 10 octobre 2016 par le premier vice-président, en présence du greffier Marc Warken.

s. Marc Warken s. Carlo Schockweiler Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 10/10/2016 Le Greffier du Tribunal administratif 9


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 36718
Date de la décision : 10/10/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2016-10-10;36718 ?

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