Tribunal administratif N° 36195 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 avril 2015 3e chambre Audience publique du 1er juin 2016 Recours formé par Madame …, … (France) contre une décision du Secrétaire d’Etat à l’Enseignement supérieur et à la Recherche en matière d’homologation de diplômes
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 36195 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 24 avril 2015 par Maître Ludivine Peyrissaguet, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, …, demeurant à F-…, tendant principalement à l’annulation, sinon subsidiairement à la réformation d’une décision du Secrétaire d’Etat à l’Enseignement supérieur et à la Recherche du 21 janvier 2015 portant refus d’homologation du diplôme de médecine décerné en juin 2012 par l’« University of Science, Arts and Technology, Montserrat, College of medicine, Britisch West Indies » ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 23 juillet 2015 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 20 août 2015 par Maître Ludivine Peyrissaguet au nom et pour compte de Madame … ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Arnaud Freulet, en remplacement de Maître Ludivine Peyrissaguet, et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Jacques en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 25 mai 2016.
En date du 24 mars 2014, Madame … a demandé auprès du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche l’homologation de son diplôme de « Doctor of Medecine, Cum laude » de « l’University of Science, Arts and Technology – Montserrat – College of Medecine – British West Indies ».
Par décision du 21 janvier 2015 le secrétaire d’Etat à l’Enseignement supérieur et à la Recherche, ci-après désigné par « le secrétaire d’Etat », a refusé la demande en homologation précitée sur base de la considération que Madame … ne remplirait pas les conditions inscrites à l’article 5 du règlement grand-ducal du 10 septembre 2004 fixant les critères d’homologation des titres et des grades étrangers, ci-après désigné par « le règlement grand-
ducal du 10 septembre 2004 ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 24 avril 2015, inscrite sous le n° 36195 du rôle, Madame … a fait introduire un recours tendant principalement à l’annulation, sinon subsidiairement à la réformation de la décision précitée du 21 janvier 2015.
Etant donné que dans la présente matière aucun texte légal ne prévoit un recours au fond, le tribunal administratif est compétent pour connaître du recours principal en annulation, qui est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en réformation.
A l’appui de son recours, la demanderesse fait en substance valoir que son diplôme présenterait toutes les caractéristiques légales nécessaires afin d’être homologué au Luxembourg.
Le délégué du gouvernement fait valoir que ce serait à bon droit que le secrétaire d’Etat a refusé d’homologuer le diplôme litigieux dans la mesure où, au cours de sa formation universitaire, le demanderesse n’aurait pas effectué les heures nécessaires en la matière de médecine des enfants, de la chirurgie et de la gynécologie et obstétrique, tout en affirmant que les heures effectuées dans le Centre Médical Les Hortensias d’Avignon ne pourraient pas être prises en compte.
Force est de prime abord au tribunal de rappeler que lors de l’audience des plaidoiries du 20 avril 2016 il avait ordonné au mandataire de la demanderesse de verser trois pièces supplémentaires qui, selon les explications de ce dernier, prouveraient que les heures prestées dans la clinique d’Avignon précitée auraient été effectuées dans le cadre de ses études à la faculté de médecine de Montserrat sanctionnées par le diplôme litigieux. Afin de donner à la partie étatique la possibilité d’analyser ces pièces pour décider s’il y a lieu de maintenir le refus déféré, l’affaire a été refixée à l’audience des plaidoiries du 25 mai 2016.
Lors de l’audience des plaidoiries précitée, le délégué du gouvernement a informé le tribunal que l’Etat entendait maintenir son refus malgré les nouvelles pièces, que l’Etat ne souhaite plus prendre de mémoire supplémentaire et que la valeur probante des pièces déférées serait contestée ainsi que la compétence des auteurs qui ont signé ces pièces.
Par ailleurs, le délégué du gouvernement estima que ces nouvelles pièces ne pourraient pas être prises en considération par le tribunal dans le cadre d’un recours en annulation, mais que ces pièces seraient prises en considération lorsque les autorités administratives se prononceront au cours du mois de juin de l’année en cours sur une nouvelle demande déposée par la demanderesse tout en priant le tribunal de prendre l’affaire en délibéré.
Force est au tribunal de retenir de prime abord que dans le cadre d’un recours en annulation, le juge est appelé à prendre en compte de nouveaux éléments de preuve qui sont produits au cours de l’instance contentieuse permettant d’apprécier différemment les faits soumis à l’appréciation de l’autorité au moment de la prise de la décision,1 de sorte que les nouvelles pièces seront prises en considération par le tribunal.
En ce qui concerne les nouveaux moyens soulevés par le délégué du gouvernement au 1 Voir en ce sens Cour adm. 20 mars 2014, inscrit sous le n° 33780C du rôle, Pas. adm.2015, V° Recours en annulation, n° 23 cours de l’audience des plaidoiries du 25 mai 2016, force est au tribunal de constater qu’à défaut d’avoir accepté de les invoquer dans le cadre d’un mémoire supplémentaire et compte tenu du fait que la procédure devant le tribunal administratif est essentiellement écrite, ils ne sauraient être pris en considération dans la présente affaire.
Quant au fond, force est au tribunal de retenir qu’à défaut de contestations circonstanciées par rapport au nombre d’heures prestées par la demanderesse, tel que soutenu par elle, dans le cadre de son cursus universitaire, et documentés par les nouvelles pièces soumises à l’appréciation du tribunal, ce dernier est amené à conclure que le diplôme faisant l’objet de la demande d’homologation satisfait aux conditions légales.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que la décision déférée encourt l’annulation.
Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
reçoit le recours principal en annulation en la forme ;
au fond, le déclare justifié ;
partant annule la décision du ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche du 21 janvier 2015 ;
dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en réformation ;
condamne l’Etat aux frais.
Ainsi jugé par :
Claude Fellens, vice-président, Thessy Kuborn, premier juge Géraldine Anelli, attaché de justice, et lu à l’audience publique du 1er juin 2016 par le vice-président, en présence du greffier Judith Tagliaferri.
s. Judith Tagliaferri s. Claude Fellens Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 1er juin 2016 Le greffier du tribunal administratif 3