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13/04/2016 | LUXEMBOURG | N°36460

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 avril 2016, 36460


Tribunal administratif Numéro 36460 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 juin 2015 Ire chambre Audience publique du 13 avril 2016 Recours formé par la société anonyme …S.A., …, contre un règlement de l’Institut Luxembourgeois de Régulation en matière de télécommunications

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 36460 du rôle et déposée le 19 juin 2015 au greffe du tribunal administratif par Maître Gabriel Bleser, avocat à la Cour, inscrit au tableau

de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme …S.A., établie et ayant so...

Tribunal administratif Numéro 36460 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 juin 2015 Ire chambre Audience publique du 13 avril 2016 Recours formé par la société anonyme …S.A., …, contre un règlement de l’Institut Luxembourgeois de Régulation en matière de télécommunications

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 36460 du rôle et déposée le 19 juin 2015 au greffe du tribunal administratif par Maître Gabriel Bleser, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme …S.A., établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonction, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le n° B …, tendant à l’annulation d’un règlement pris par l’Institut Luxembourgeois de Régulation en date du 20 mars 2015 (n° 15/191/ILR) portant sur la définition des marchés pertinents de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7), l’identification des opérateurs puissants sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Patrick Kurdyban, demeurant à Luxembourg, du 22 juin 2015, portant signification de ladite requête introductive d’instance à l’Institut Luxembourgeois de Régulation, établissement public, établi et ayant son siège à L-1536 Luxembourg, 17, rue du Fossé, représenté par sa direction actuellement en fonction, inscrit au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le n° J 4 ;

Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif en date du 3 juillet 2015 par la société anonyme Arendt & Medernach S.A., avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, représentée aux fins de la présente instance par Maître Christian Point, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour la défense des intérêts de l’Institut Luxembourgeois de Régulation, préqualifié ;

Vu l’ordonnance du premier vice-président du tribunal administratif du 23 septembre 2015 par laquelle ont été abrégés les délais légaux pour déposer les mémoires en réponse, en réplique et en duplique ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 23 octobre 2015 par la société anonyme Arendt & Medernach S.A., représentée par Maître Christian Point, au nom de l’Institut Luxembourgeois de Régulation, ledit mémoire en réponse ayant été notifié par acte d’avocat à avocat du même jour au mandataire de la société anonyme …S.A. ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 23 novembre 2015 par Maître Gabriel Bleser, au nom de la société anonyme …S.A., préqualifiée, ledit mémoire en réplique ayant été notifié par acte d’avocat à avocat du même jour au mandataire de l’Institut Luxembourgeois de Régulation ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 23 décembre 2015 par la société anonyme Arendt & Medernach S.A., représentée par Maître Christian Point, ledit mémoire en duplique ayant été notifié par acte d’avocat à avocat du même jour au mandataire de la société anonyme …S.A. ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le règlement attaqué ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Gabriel Bleser, pour la partie demanderesse, et Maîtres Christian Point et Marianne Rau, pour la partie défenderesse, en leurs plaidoiries respectives.

Par une décision du 2 mai 2006, référencée sous le n° 06/92/ ILR, l’Institut Luxembourgeois de Régulation, dénommé ci-après l’« ILR », identifia l’Entreprise des Postes et Télécommunications, dénommée ci-après « l’EPT », la société anonyme Tango S.A., dénommée ci-après « Tango », ainsi que la société anonyme Voxmobile S.A., actuellement …S.A., dénommée ci-après « … », comme opérateurs puissants sur le marché de la terminaison d’appel vocal sur leurs propres réseaux respectifs (marché 16, actuellement « marché 7/2007 »), leurs imposa plusieurs obligations en matière de fourniture d’accès et d’interconnexion ainsi que des obligations de non-discrimination et de transparence, tout en leur imposant, après une transition linéaire, une évolution progressive des prix se rapprochant d’une orientation vers les coûts, sur la base d’un prix de référence prenant en compte les prix en vigueur sur des marchés comparables, aboutissant à un coût d’une terminaison d’appel sur réseau mobile (mobile termination rate), dénommé ci-après « MTR » fixé au 1er juillet 2008 à une moyenne de 8,2 centimes d’euro par minute pour l’EPT et Tango, ainsi qu’à une moyenne de 10,5 centimes d’euro par minute pour la société anonyme Voxmobile S.A. (…). L’ILR précisa qu’après l’année 2008, il envisagerait d’étudier la possibilité de développer un modèle de comptabilisation de coûts pour déterminer les prix de terminaison mobile des opérateurs au Luxembourg.

Après avoir procédé à une nouvelle analyse du marché de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7/2007), soumise à une procédure de consultation publique nationale et internationale, et sur avis favorable de la part du Conseil de la concurrence, la direction de l’ILR prit, en date du 6 janvier 2014, le règlement référencé sous le numéro 14/172/ILR portant sur la définition des marchés pertinents de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7), l’identification des opérateurs puissants sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre, dénommé ci -

après le « règlement 14/172/ILR », publié au Mémorial A n° 7 du 16 janvier 2014, et libellé comme suit :

«Vu la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive «cadre»);

Vu la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu'à leur interconnexion (directive «accès»);

Vu la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive «service universel»);

Vu les lignes directrices 2002/C 165/03 de la Commission des Communautés européennes du 11 juillet 2002 sur l'analyse du marché et l'évaluation de la puissance sur le marché en application du cadre réglementaire communautaire pour les réseaux et les services de communications électroniques (« lignes directrices»);

Vu la recommandation C(2003)2647 de la Commission des Communautés européennes du 23 juillet 2003 concernant les notifications, délais et consultations prévus par l'article 7 de la directive «cadre» (recommandation «notification »);

Vu la recommandation C(2007)5406 de la Commission des Communautés européennes du 17 décembre 2007 concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d'être soumis à une réglementation ex ante conformément à la directive «cadre» (recommandation «marchés pertinents») ;

Vu la recommandation de la Commission du 7 mai 2009 sur le traitement réglementaire des tarifs de terminaison d'appels fixe et mobile dans l'UE ;

Vu la loi du 27 février 2011 sur les réseaux et les services de communications électroniques;

Vu la consultation publique de l'Institut Luxembourgeois de Régulation relative à l'analyse du marché de la terminaison d'appel vocal sur réseaux mobiles individuels lancée le 12 juillet 2013 et clôturée le 6 septembre 2013;

Vu les réponses à la consultation publique susvisée;

Vu l'avis n° 2013-AV-05 du Conseil de la concurrence du 23 août 2013;

Vu l'accord du Conseil de la concurrence du 17 octobre 2013;

Vu la consultation publique concernant le projet de règlement relatif au marché d e la terminaison d'appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7/2007) lancée le 25 octobre 2013 et clôturée le 25 novembre 2013 ;

Vu les réponses à la consultation publique susvisée;

Vu la consultation publique internationale de l'Institut Luxembourgeois de Régulation relative à l'analyse du marché de la terminaison d'appel vocal sur réseaux mobiles individuels et le projet de règlement relatif au marché de la terminaison d'appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7/2007) lancée le 25 octobre 2013 et clôturée le 25 novembre 2013;

Les commentaires des autorités réglementaires de l'Union européenne et de l'ORECE ayant été demandés;

Vu les commentaires de la Commission européenne du 29 novembre 2013;

Considérant que l'analyse du marché de la terminaison d'appel vocal sur réseaux mobiles individuels telle que soumise à la consultation internationale du 25 octobre 2013 au 25 novembre 2013 sert notamment de motivation au présent règlement;

Arrête:

Titre I - Définition du marché pertinent et identification des opérateurs puissants Art. 1er. La dimension géographique du marché de la terminaison d'appel vocal sur les réseaux publics mobiles est nationale.

Art. 2. (1) Les marchés pertinents sont :

a) le marché de la terminaison d'appel vocal sur le réseau mobile de l'Entreprise des postes et télécommunications;

b) le marché de la terminaison d'appel vocal sur le réseau mobile Tango S.A.;

c) le marché de la terminaison d'appel vocal sur le réseau mobile d'…S.A. ;

(2) Si un nouvel entrant devenait opérateur de réseau mobile, le marché de la terminaison d'appel vocal sur son réseau mobile deviendrait également un marché pertinent.

(3) Si un full MVNO vendait un service de terminaison d'appel vocal vers ses abonnés, le marché de la terminaison d'appel vocal vers ses abonnés deviendrait également un marché pertinent.

Art. 3. (1) Les analyses d'évaluation de la puissance du marché de la terminaison d'appel vocal sur réseau mobile individuel permettent de conclure que:

a) l'Entreprise des postes et télécommunications occupe une position équivalente à une position dominante individuelle et est dès lors désignée comme opérateur puissant sur le marché de la terminaison d'appel vocal sur son réseau mobile;

b) Tango S.A. occupe une position équivalente à une position dominante individuelle et est dès lors désignée comme opérateur puissant sur le marché de la terminaison d'appel vocal sur son réseau mobile;

c) …S.A. occupe une position équivalente à une position dominante individuelle et est dès lors désignée comme opérateur puissant sur le marché de la terminaison d'appel vocal sur son réseau mobile.

(2) Si un nouvel entrant devenait opérateur de réseau mobile, il occuperait également une position équivalente à une position dominante individuelle et serait dès lors désigné comme opérateur puissant sur le marché de la terminaison d'appel vocal sur son réseau mobile.

(3) Si un full MVNO vendait un service de terminaison d'appel vocal vers ses abonnés, il occuperait également une position équivalente à une position dominante individuelle et serait dès lors désigné comme opérateur puissant sur le marché de la terminaison d'appel vocal sur ses abonnés.

Titre II — Détermination des obligations de gros appropriées Art. 4. (1) Les opérateurs identifiés comme puissants sur le marché sont soumis à l'obligation de prestation d'accès et d'interconnexion qui découle de l'article 32 de la loi du 27 février 2011 sur les réseaux et les services de communications électroniques (ci-après:

«la Loi de 2011») et qui consiste en l'obligation de fournir des services de terminaison d'appel pour permettre aux autres opérateurs d'offrir des services téléphoniques de détail.

(2) La fourniture d'une prestation d'accès ne doit pas être subordonnée à la fourniture de services, de moyens ou de toute autre ressource, qui ne seraient pas nécessaires à la fourniture de cette prestation.

(3) En vertu de cette obligation, les opérateurs identifiés comme puissants sur le marché devront notamment:

a) satisfaire les demandes raisonnables d'interconnexion des réseaux ou des ressources de réseau;

Cette obligation vise des prestations de terminaison proprement dites (services d'acheminement de trafic voix vers les numéros géographiques, mobiles et d'urgence ainsi que vers des numéros portés) et des prestations d'accès aux sites d'interconnexion (services de colocalisation. services d'interconnexion).

L'obligation de satisfaire les nouvelles demandes raisonnables d'interconnexion devra être remplie par la mise en service de la prestation dans un délai de six mois à compter de la date de la demande.

b) négocier de bonne foi avec les entreprises notifiées qui demandent un accès;

La bonne foi demande un comportement juste, raisonnable et intègre de la part des opérateurs qui négocient une convention d'interconnexion. Ce comportement est applicable notamment en ce qui concerne la durée et les conditions de négociation.

c) ne pas retirer l'accès et/ou l'interconnexion lorsqu'ils ont déjà été accordés;

L'opérateur prestataire ne pourra pas retirer cet accès ou cette interconnexion s'ils avaient déjà été consentis, sauf en cas de violation manifeste de ses obligations contractuelles par l'opérateur qui bénéficie des prestations d'accès ou d'interconnexion, par exemple en cas de défaut de paiement non motivé par une défaillance des obligations de l'opérateur ou du prestataire.

Art. 5. (1) Les opérateurs identifiés comme puissants sur le marché sont soumis à l'obligation de non-discrimination qui découle de l'article 30 de la Loi de 2011 et qui consiste en l'obligation d'appliquer des conditions équivalentes, dans des circonstances équivalentes, aux opérateurs fournissant des services équivalents.

(2) En vertu de cette obligation, les opérateurs identifiés comme puissants sur le marché devront notamment :

a) appliquer des prix de gros identiques aux prix de transfert interne et identiques aux prix de gros proposés à d'autres partenaires et filiales;

L'opérateur qui fournit le service doit appliquer à ses concurrents des prix de gros identiques aux prix des services qu'il propose à ses services internes ou offre à ses filiales ou à ses partenaires.

b) assurer une qualité de service équivalente à celle assurée à leurs propres services ou à leurs filiales et partenaires;

L'opérateur qui fournit le service doit garantir à l'entreprise bénéficiaire une qualité de service équivalente à celle qu'il assure à ses propres services ou à ses filiales ou partenaires.

c) permettre de fournir des services de détail dans la même zone géographique que celle desservie par leurs propres services ou par les services de leurs filiales et partenaires;

L'opérateur qui fournit le service doit permettre à l'entreprise bénéficiaire de proposer ses services sur l'ensemble de son réseau.

d) permettre la vente au détail d'un éventail de services équivalent à celui de leurs propres services ou de leurs filiales et partenaires ;

Les services de gros offerts doivent permettre au bénéficiaire de fournir au détail les mêmes services que ceux offerts par l'opérateur identifié comme puissant sur le marché sur base des services de gros en question sur le marché de détail.

e) donner accès, dans des conditions équivalentes, et notamment au même moment, aux informations (pertinentes pour l'achat de prestation de terminaison d'appel mobile) dont ils disposent ou dont disposent leurs filiales et partenaires;

L'opérateur qui fournit le service doit donner à l'entreprise bénéficiaire accès, dans des conditions équivalentes, et notamment au même moment, aux informations qu'il utilise pour ses propres services ou donne à ses filiales ou partenaires (pour l'utilisation de prestation de terminaison d'appel mobile).

Art. 6. Les opérateurs identifiés comme puissants sur le marché sont soumis à l'obligation de transparence qui découle de l'article 29 de la Loi de 2011 et qui consiste en l'obligation de communiquer à l'Institut :

a) les conventions d'interconnexion conclues avec les entreprises fournissant des réseaux ou des services de communications électroniques, au plus tard 30 jours après leur entrée en vigueur;

b) les éléments techniques, opérationnels et tarifaires fournis aux entreprises qui demandent un service d'interconnexion. Ceci comprend au moins un descriptif des services d'interconnexion et les délais de leur mise à disposition, la localisation des sites d'interconnexion, les normes et standards utilisés, la qualité technique des prestations et leur disponibilité.

Art 7. (1) Les opérateurs identifiés comme puissants sur le marché sont soumis à l'obligation de contrôle des prix qui découle de l'article 33 de la Loi de 2011 basée sur une orientation vers les coûts différentiels à long terme déterminés par un modèle de coûts ascendant pur LRIC (bottom-up pur LRIC) d'un opérateur générique efficace développé par l'Institut. Le contrôle des prix ainsi défini prend la forme de plafonds tarifaires.

(2) Jusqu'à la finalisation du modèle de coûts pur LRIC, l'Institut fixe le tarif de terminaison d'appel de manière transitoire sur base d'une comparaison internationale à 0,98 centimes d'euros par minute.

(3) Lorsque les coûts pur LRIC d'un opérateur générique efficace au Luxembourg calculés par le modèle de l'Institut seront connus, l'Institut ajustera la valeur du plafond applicable sur la base des résultats du modèle.

(4) L'Institut impose à chaque opérateur identifié comme puissant sur le marché la charge de la preuve que, sur la base du trafic réel terminé par lui, l'application de ses tarifs aboutit, en moyenne pondérée, à des prix au plus égaux au plafond tarifaire. Ce renversement de la charge de la preuve n'est opposable qu'à l'Institut.

Titre III — Dispositions abrogatoires et finales Art. 8. La décision 06/92/ILR du 2 mai 2006 concernant le marché de gros de la terminaison d'appel vocal sur les réseaux mobiles individuels (Marché 16) est abrogée.

Art. 9. Le présent règlement sera publié au Mémorial et sur le site Internet de l’Institut. ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 mars 2014, … introduisit un recours tendant à l’annulation du règlement 14/172/ILR et subsidiairement de l’article 7 dudit règlement, recours qui fut partiellement accueilli par un jugement du 23 mars 2015, inscrit sous le n° 34148 du rôle, qui procéda à l’annulation de l’article 7, paragraphe (2) du règlement 14/172/ILR, au motif que l’ILR n’aurait pas démontré avoir suffisamment pris en compte les spécificités du marché luxembourgeois dans la fixation du MTR provisoirement établi sur base d’une comparaison internationale. Ledit jugement fut cependant réformé par un arrêt de la Cour administrative du 17 décembre 2015, inscrit sous le n° 36217C du rôle, déclarant le recours initial d’… non fondé.

Le recours en annulation introduit, de son côté, par … contre le règlement 14/172/ILR fut également déclaré non fondé par un deuxième arrêt de la Cour administrative du 17 décembre 2015, inscrit sous le n° 36178 C du rôle.

Il ressort du dossier administratif, ensemble les explications non contestées de l’ILR, que par courrier du 28 février 2012, ce dernier demanda notamment à … de remplir un questionnaire dans le cadre d’une étude du régime de coûts « Bill & Keep » pour le 2 avril 2012 au plus tard.

L’analyse du marché de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7/2007), dénommés ci-après l’« analyse du Marché 7/2007 » voire « le Marché 7/2007 », fut soumise à une procédure de consultation publique du 12 juillet au 6 septembre 2013, en application de l’article 78 de la loi modifiée du 27 février 2011 sur les réseaux et les services de communications électroniques, dénommée ci-après « la loi du 27 février 2011 ».

Les 18 et 23 septembre 2013, les opérateurs luxembourgeois actifs sur le marché de la terminaison d'appel furent invités, dans les locaux de l'ILR, à une réunion d'information avec le consultant ayant développé le modèle des coûts, à savoir WIK-Consult, afin de se faire présenter un document intitulé « Bottom-up Cost Model for the Mobile Network of the Reference Operator in Luxembourg ».

Le 21 novembre 2013, l'ILR publia sur son site internet, une demande d'avis, à remettre jusqu’au 21 janvier 2014, relative au projet d'élaboration d'un modèle de coûts pour la détermination des MTR au Luxembourg, avec accès au document, intitulé « WIK-

Consult, Study for the Institut Luxembourgeois de Régulation (ILR) — Development of a Bottom-Up Mobile Network and Cost Model for the Determination of the Cost of Terminating Calls in Mobile Networks, November 2013 ».

En date du 10 décembre 2013, l'ILR organisa dans ce contexte une réunion d'information pour les opérateurs de téléphonie mobile en présence du consultant WIK-

Consult.

Le 19 mars 2014, l'ILR publia la prise de position des opérateurs sur la demande d'avis précitée.

Le même jour, l'ILR publia encore sa prise de position portant sur les contributions lui soumises suite à sa demande d'avis menée du 21 novembre 2013 au 21 janvier 2014.

Le 20 mars 2014, l'ILR publia une mise à jour du document de référence « WIK-

Consult, Study for the Institut Luxembourgeois de Régulation (ILR) — Development of a Bottom-Up Mobile Network and Cost Model for the Determination of the Cost of Terminating Calls in Mobile Networks ».

Du 17 novembre au 17 décembre 2014, l'ILR soumit ensuite à consultation publique nationale le projet de règlement 15/191/ILR ensemble avec son Mémorandum explicatif (Explanatory memorandum).

Pendant la période de consultation nationale, l'ILR proposa sur son site internet aux opérateurs un accès au modèle des coûts mobile suivant des règles définies dans un document intitulé « accès au modèle de coûts (mobile) » téléchargeable du même site internet.

Par un avis du 16 décembre 2014, le Conseil de la concurrence marqua son accord avec le projet du règlement 15/191/ILR.

Le 12 février 2015, l'ILR publia la version non confidentielle du résultat de la consultation publique nationale, reprenant les prises de position des différents opérateurs de téléphonie mobile.

Le même jour, l'ILR publia sa prise de position par rapport aux observations des opérateurs.

L'ILR soumit ensuite son projet du règlement 15/191/ILR ensemble avec le Mémorandum explicatif à la consultation internationale le 12 février 2015.

Dans le cadre de cette consultation internationale, la Commission européenne adressa à l'ILR le 23 février 2015 une demande d’informations supplémentaires (Request for information) à laquelle l'ILR répondit le 26 février 2015.

Finalement, la Commission européenne prit un avis favorable par décision du 12 mars 2015 concernant l'affaire LU/2015/1712 relative à la fourniture en gros de terminaison d'appel vocal sur réseaux mobiles individuels, dans laquelle elle formula encore certaines observations relatives au projet de règlement 15/191/ILR.

En date du 17 mars 2015, l’ILR prit le règlement n°15/190/ILR du 17 mars 2015 complétant la définition des marchés pertinents de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7), l’identification des opérateurs puissants sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre pour Join Experience S.A. et portant modification du règlement 14/172/ILR sur la définition des marchés pertinents de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7), l’identification des opérateurs puissants sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre – Secteur Communications électroniques, dénommé ci-après « le règlement n° 15/190/ ILR », par lequel il a été décidé que le nouvel opérateur de télécommunications mobiles, la société anonyme Join Experience S.A., dénommée ci-après « Join », occupe une position équivalente à une position dominante individuelle et est dès lors désignée comme opérateur puissant sur le marché de la terminaison d’appel vocal sur son réseau mobile virtuel et qu’elle est soumise aux obligations déterminées par les articles 4 à 7 du règlement n° 14/172/ILR.

En date du 20 mars 2015, la direction de l’ILR prit le règlement référencé sous le numéro 15/191/ILR portant fixation du plafond tarifaire pour les prestations de la terminaison d’appel vocal sur les réseaux mobiles individuels (Marché 7/2007) et portant modification du règlement 14/172/ILR sur la définition des marchés pertinents de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7/2007), l’identification des opérateurs puissants sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre, dénommé ci-

après le « règlement 15/191/ILR », publié au Mémorial A n° 53 du 24 mars 2015 et libellé comme suit :

« La Direction de l’Institut Luxembourgeois de Régulation, Vu la loi du 27 février 2011 sur les réseaux et les services de communications électroniques (ci-après la «Loi de 2011»);

Vu le règlement 14/172/ILR du 6 janvier 2014 portant sur la définition des marchés pertinents de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7), l’identification des opérateurs puissants sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre;

Vu le règlement 15/190/ILR du 17 mars 2015 complétant la définition des marchés pertinents de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7), l’identification des opérateurs puissants sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre pour Join Experience S.A. et portant modification du règlement 14/172/ILR sur la définition des marchés pertinents de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7), l’identification des opérateurs puissants sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre;

Vu le règlement 13/168/ILR du 21 août 2013 relatif à la procédure de consultation instituée par l’article 78 de la loi du 27 février 2011 sur les réseaux et les services de communications électroniques (ci-après la «Loi de 2011»);

Vu la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion (ci-après la «directive accès»);

Vu la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive «cadre»);

Vu la directive 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 modifiant les directives 2002/21/CE relative à un cadre règlementaire commun pour les réseaux et services de télécommunications électroniques, 2002/19/CE relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées ainsi qu’à leur interconnexion, et 2002/20/CE relative à l’autorisation des réseaux et services de communications électroniques;

Vu la recommandation de la Commission du 7 mai 2009 (2009/396/CE) sur le traitement réglementaire des tarifs de terminaison d’appels fixe et mobile dans l’UE;

Vu la recommandation de la Commission du 15 octobre 2008 concernant les notifications, délais et consultations prévus par l’article 7 de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques;

Vu les lignes directrices de la Commission (2002/C 165/03) sur l’analyse du marché et l’évaluation de la puissance sur le marché en application du cadre réglementaire communautaire pour les réseaux et les services de communications électroniques;

Vu la demande d’avis de l’Institut du projet de l’élaboration d’un modèle de coûts mobile du 21 novembre 2013 au 21 janvier 2014, le résultat y relatif et la réponse de l’Institut;

Vu la consultation publique nationale de l’Institut Luxembourgeois de Régulation concernant le projet de règlement portant fixation des plafonds tarifaires pour les prestations de la terminaison d’appel vocal sur les réseaux mobiles individuels (Marché 7/2007), et portant modification du règlement 14/172/ILR sur la définition des marchés pertinents de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7/2007), l’identification des opérateurs puissants sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre du 17 novembre 2014 au 17 décembre 2014;

Vu les réponses à la consultation publique susvisée;

Vu l’accord du Conseil de la concurrence du 16 décembre 2014;

Vu la consultation publique internationale concernant le projet de règlement portant fixation des plafonds tarifaires pour les prestations de la terminaison d’appel vocal sur les réseaux mobiles individuels (Marché 7/2007), et portant modification du règlement 14/172/ILR sur la définition des marchés pertinents de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7/2007), l’identification des opérateurs puissants sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre du 12 février 2015 au 12 mars 2015 ;

Vu les réponses à la consultation publique internationale susvisée;

Les commentaires des autorités règlementaires de l’Union européenne et de l’ORECE ayant été demandés;

Vu la décision C(2015) 1763 final de la Commission européenne du 12 mars 2015;

Considérant que la documentation concernant le modèle de coûts mobile et l’explanatory memorandum – Regulatory project regarding the determination of the price cap for the provisioning of voice call termination on individual mobile networks (market 7/2007) servent notamment de motivation au présent règlement;

Arrête:

Art. 1er. L’article 7 du règlement 14/172/ILR du 6 janvier 2014 portant sur la définition des marchés pertinents de la terminaison d’appel vocal sur réseaux mobiles individuels (Marché 7), l’identification des opérateurs puissants sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre est modifié comme suit:

(1) L’alinéa (2) est remplacé comme suit:

«(2) Le plafond tarifaire, calculé en fonction des coûts pur LRIC d’un opérateur générique efficace au Luxembourg sur base du modèle de coûts de l’Institut, pour la prestation de la terminaison d’appel sur leur réseau, s’élève au montant de 0,97 €cts/min.» (2) L’alinéa (3) est remplacé comme suit:

«Les opérateurs identifiés comme puissants sur le marché de la terminaison d’appel vocal sur les réseaux mobiles individuels (Marché 7/2007) portent à l’égard de l’Institut la charge de la preuve que, sur la base du trafic réel terminé par eux, l’application de leurs tarifs aboutit, en moyenne pondérée annuelle, à des prix au plus égaux au plafond tarifaire tel que fixé à l’alinéa (2).» (3) L’alinéa (4) est supprimé.

Art. 2. Le présent règlement entre en vigueur le premier jour du mois qui suit sa publication au Mémorial.

Art. 3. Le présent règlement sera publié au Mémorial et sur le site internet de l’Institut. » Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 19 juin 2015, … a introduit un recours tendant à l’annulation du règlement 15/191/ILR et subsidiairement de l’article 1er dudit règlement, suivant les indications figurant au dispositif de la requête sous examen.

En vertu de l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, dénommée ci-après « la loi du 7 novembre 1996 », « (1) Le tribunal administratif statue encore sur les recours dirigés pour incompétence, excès et détournement de pouvoir, violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, contre les actes administratifs à caractère réglementaire, quelle que soit l’autorité dont ils émanent. » Cette compétence résulte également plus spécialement de l’article 6 de la loi du 27 février 2011 qui dispose qu’ « (1) Un recours en annulation devant le tribunal administratif est ouvert contre les règlements et décisions de l’Institut. » A titre liminaire, l’ILR soulève l’irrecevabilité des critiques d’…, soulevées par elle dans le cadre du présent recours, relatives au choix pour un modèle des coûts suivant la méthode de coûts ascendant basée sur les coûts différentiels à long terme, en anglais bottom-up LRIC (Long Run Incremental Cost), dénommé ci-après « le modèle pur LRIC », alors que le choix pour cette méthode aurait déjà été pris à l’article 7 paragraphe (1) du règlement 14/172/ILR, disposition qui n’aurait subi aucune modification par le règlement 15/191/ILR attaqué. Par ailleurs, cette disposition n’aurait pas été annulée par le tribunal dans son jugement précité du 23 mars 2015 et n’aurait pas été mis en cause par … dans ses mémoires produits au cours de l’instance d’appel relatif au règlement 14/172/ILR.

Dans son mémoire en réplique, … souligne qu’il serait erroné, comme le ferait l’ILR, de suggérer l’irrecevabilité de son recours contre le règlement 15/191/ILR, alors qu’elle serait parfaitement en droit de diriger un recours en annulation contre le règlement 15/191/ILR qui aurait une portée générale et qui affecterait directement ses intérêts. Ainsi, l’ILR ne se tromperait par ailleurs pas sur l’objet du présent recours en répondant que le règlement 15/191/ILR serait conforme à la loi du 27 février 2011. Par ailleurs, il appartiendrait au tribunal, en vertu de l’article 95 de la Constitution, de refuser l’application d’un règlement édicté par l’ILR s’il n’est pas conforme à la loi du 27 février 2011.

Finalement … fait remarquer que le règlement 15/191/ILR et le règlement 14/172/ILR seraient intimement liés et que, même si elle n’avait pas attaqué le règlement 14/172/ILR en ce qu’il aurait choisi la méthode de calcul pur LRIC, elle aurait déjà à l’époque relevé que le résultat d’un tel modèle de coûts pourrait s’avérer disproportionné et non adapté à la situation luxembourgeoise. Il serait ainsi toujours possible d’attaquer les résultats de l’application du modèle pur LRIC contenus dans le règlement 15/191/ILR.

Force est au tribunal de retenir que l’irrecevabilité soulevée par l’ILR ne concerne pas le recours ou la requête en eux-mêmes – le recours, au regard du dispositif de la requête introductive d’instance, étant bien dirigé exclusivement contre le règlement 15/191/ILR -, mais consiste dans la circonstance que plusieurs moyens soulevés dans le cadre de ce recours seraient en fait dirigés contre les dispositions du règlement 14/172/ILR. Or, le tribunal, saisi d’un recours contre le règlement 15/191/ILR, devra se limiter à statuer sur la pertinence de tous les moyens invoqués par rapport au seul règlement attaqué, la circonstance que certains moyens visant à critiquer un autre acte que celui qui fait l’objet du présent recours n’a pas pour effet d’entraîner l’irrecevabilité de ces derniers, mais ne pourrait le cas échéant aboutir qu’à déclarer ces moyens inopérants, respectivement non fondés par rapport à l’acte déféré.

Il s’ensuit que le moyen d’irrecevabilité est à rejeter.

En ce qui concerne la référence, au sujet du règlement 15/191/ILR, à l’article 95 de la Constitution, il échet de rappeler que cet article dispose que « Les cours et tribunaux n’appliquent les arrêtés et règlements généraux et locaux qu’autant qu’ils sont conformes aux lois. (…) ».

Il s’agit dès lors d’un contrôle a posteriori, toujours possible, permettant aux juridictions de vérifier la conformité d’un règlement aux normes supérieures dans la hiérarchie des normes et ce, à chaque fois qu’elles sont amenées à devoir en faire application dans le cadre de la solution du litige dont elles sont saisies, c’est-à-dire pour le juge administratif dès lors qu’il est saisi du contrôle d’un acte individuel pris en application de ce règlement.

Or, le présent recours ne met pas en cause la légalité d’un acte individuel pris en application du règlement 15/191/ILR, mais est dirigé directement contre ce dernier sur base de l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996.

Quant à la question de savoir s’il est possible d’invoquer l’illégalité de dispositions résultant du règlement 14/172/ILR coulé en force de chose décidée, notamment sur base de l’article 95 de la Constitution, force est au tribunal de rappeler qu’il n’est saisi ni d’un recours contre le règlement 14/172/ILR ni de la légalité d’un acte individuel pris en application de ce dernier, de sorte qu’il ne sera pas possible de mettre en cause directement ou indirectement la légalité des dispositions du règlement 14/172/ILR dans le cadre du présent recours dirigé exclusivement contre le règlement 15/191/ILR venant seulement modifier le règlement du 14/172/ILR.

Il a par ailleurs également été retenu que la partie qui a attaqué un acte réglementaire par la voie directe en introduisant un recours en annulation à son encontre, n’est plus habilitée en principe à exciper de l’illégalité du même acte réglementaire de manière indirecte sur base de l’article 95 de la Constitution par la suite1.

Il s’ensuit que les moyens invoqués par la partie demanderesse ne seront à analyser que par rapport au seul acte attaqué, à savoir le règlement 15/191/ILR.

Aucun autre moyen d’irrecevabilité n’ayant été soulevé en cause, le recours en annulation est recevable pour avoir par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi.

A titre liminaire, le tribunal relève qu’au jour des plaidoiries de la présente affaire, la Cour administrative avait entretemps par les deux arrêts précités du 17 décembre 2015 rejeté les deux recours introduits par …, respectivement Tango, contre le règlement 14/172/ILR qui se trouve dès lors actuellement coulé en force de chose décidée. Cette circonstance soulevée une première fois par l’ILR dans son mémoire en duplique du 23 décembre 2015 et puis tant par le tribunal que par les parties au litige à l’audience des plaidoiries, n’a cependant pas donné lieu à des conclusions orales spécifiques, ni à une demande de pouvoir 1 trib. adm. 10 mars 2014, n° 29563a du rôle, confirmé par Cour adm. 7 octobre 2014, n° 34376C du rôle, Pas.

adm. 2015, V° Actes règlementaires, n° 6 prendre un mémoire supplémentaire quant à l’incidence de ces arrêts sur le présent recours.

A l’appui de son recours, et en fait, … rappelle le cadre légal et règlementaire ainsi que le contexte et l’historique de l’élaboration du règlement attaqué, tel qu’il résulte notamment des rétroactes repris ci-avant.

Elle souligne dans ce cadre qu’elle n’aurait jamais contesté le principe même d’une réduction du MTR, mais qu’elle aurait contesté la brutalité de cette baisse.

Elle rappelle que les autorités nationales de régulation disposeraient d’une certaine marge de manœuvre et ne seraient pas obligées de suivre aveuglément les recommandations de la Commission européenne, de sorte que l’ILR aurait dû, avant d’adopter des mesures contraignantes vis-à-vis des opérateurs du secteur, prendre en considération les spécificités nationales, telles qu’une économie d’échelle plus réduite que pour les opérateurs étrangers, et le cadre concurrentiel du Luxembourg où l’opérateur historique, l’EPT, occuperait toujours une position ultra dominante au détriment des opérateurs alternatifs.

Quant au fond, et avant d’analyser les différents moyens invoqués par la partie demanderesse, il y a lieu de relever que si le règlement attaqué en tant qu’acte administratif à caractère règlementaire n’a pas besoin d’indiquer les motifs à sa base dans son instrumentum même, il doit néanmoins reposer sur des motifs légaux qui doivent avoir existé au moment où il a été pris, motifs dont le juge administratif est appelé à vérifier tant l’existence que la légalité. Ces motifs doivent être retraçables, à la fois par la juridiction administrative saisie et par les administrés intéressés, afin de permettre l’exercice effectif du contrôle juridictionnel de légalité prévu par la loi2.

Cette exigence découle du fait que le juge administratif a l’obligation de vérifier si les autorités administratives compétentes n’ont pas violé la loi, commis un excès de pouvoir ou un détournement de pouvoir. S’il est vrai que les autorités publiques disposent d’un pouvoir discrétionnaire pour prendre des actes à caractère règlementaire, ceux-ci doivent toutefois être pris dans l’intérêt général. Il appartient partant auxdites autorités de faire connaître le ou les motifs qui les ont guidées dans leur décision3.

Il y a partant lieu d’examiner, au vu des moyens soulevés par la partie demanderesse, l’existence et la légalité des motifs indiqués par l’ILR à l’appui du règlement 15/191/ILR, étant entendu que le contrôle juridictionnel ne saurait s’étendre à des considérations de pure opportunité des mesures décidées et qu’il se limite, dans le cadre du recours en annulation, et au cas où une appréciation erronée des faits est reprochée à l’administration, à l’erreur manifeste d’appréciation des faits, de sorte à ce que ce ne sont que les cas les plus graves d’erreur d’appréciation qui sont sanctionnés par le juge. C’est ainsi que le juge administratif ne peut sanctionner que le dépassement de la marge d’appréciation dont dispose nécessairement l’autorité administrative. Seuls les cas dans lesquels une disproportion dans l’application de la règle de droit aux éléments de fait a été constatée entraînent une annulation de l’acte administratif pour erreur d’appréciation4. Cette faculté est néanmoins limitée aux cas exceptionnels où une flagrante disproportion des moyens laisse entrevoir un 2 Cour adm. 23 février 2006, n° 20173C du rôle, Pas. adm. 2015, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 95 et autres références y citées 3 trib. adm. 9 juin 2004, n° 11415a du rôle, Pas. adm. 2015, V° Actes règlementaires, n° 24 et autres références y citées 4 Cour adm. 14 juillet 2011, n°s 28611C et 28617C du rôle, Pas. adm. 2015 v° Recours en annulation, n° 26 usage excessif du pouvoir par l’autorité qui a pris la décision, voire un détournement du même pouvoir par cette autorité. Dans l’accomplissement de sa mission de juge de la légalité, il appartient encore au juge administratif, dans son analyse de l’existence d’un rapport de proportion adéquat, d’effectuer une mise en balance entre les intérêts publics et les intérêts privés qui, en règle générale, sont appelés à être servis et observés de façon complémentaire, l’intérêt public devant l’emporter sur l’intérêt privé en cas de conflit entre les deux5.

Enfin, il échet de rappeler que dans le cadre d’un recours en annulation, il n’appartient pas au juge administratif de substituer sa propre appréciation sur base de considérations d’opportunité à celle de l’autorité ayant pris l’acte attaqué6.

En ce qui concerne les différents moyens de droit invoqués, il échet de rappeler qu’il appartient au tribunal de déterminer la suite de traitement des moyens et arguments des parties compte tenu de la logique juridique dans laquelle ils s’insèrent.

Force est d’abord de constater que la partie demanderesse, en réaction au mémoire en réponse de l’ILR, émet des critiques quant à la procédure de consultation publique, notamment en ce qui concerne le fait que la documentation d’information fournie dans le cadre de la procédure d’élaboration du règlement attaqué ait été rédigée en anglais, ainsi que le fait que l’accès au modèle des coûts ait été limité.

Dans son mémoire en duplique, l’ILR demande le rejet de ce moyen, au motif qu’il serait nouveau pour ne pas avoir déjà été soulevé dans la requête introductive d’instance.

Alors même qu’il est a priori toujours possible de soulever un moyen pour la première fois dans un mémoire en réplique7, force est cependant au tribunal de relever que les critiques ainsi formulées par la partie demanderesse restent à l’état de simples observations de fait à l’appui de son recours en général, alors que cette dernière est en défaut d’avoir formulé un quelconque moyen spécifique y relatif. En effet, il n’appartient pas au tribunal de pallier la carence des parties dans la présentation de leurs moyens au risque de statuer ultra petita et de violer ainsi le principe du contradictoire. Pour le surplus, le tribunal n’entrevoit pas de moyen qu’il aurait, le cas échéant, été obligé d’invoquer d’office dans ce contexte.

Au fond, … conclut à l’annulation du règlement 15/191/ILR notamment pour violation de la loi.

A ce titre, … soutient, en premier lieu, que le règlement attaqué, en ce qui concerne le choix de la méthode pur LRIC, serait fondé sur une analyse entièrement reprise de la recommandation 2009/396/CE de la Commission européenne, ci-après dénommée « la recommandation 2009 », alors qu’une telle recommandation ne lierait pas les Etats membres de l’Union européenne en vertu de l’article 288 du traité sur le fonctionnement de l’Union 5 cf. Cour adm. 19 février 2009, n° 24834C du rôle, Pas. adm. 2015, V° Recours en annulation, n° 39 et autres références y citées.

6 trib. adm. 18 octobre 2004, n° 18264 du rôle, Pas. adm. 2015, V° Recours en annulation, n° 35 et autres références y citées.

7 Cour adm. 29 mai 2008, n° 23891C du rôle, Pas. adm. 2015, V° Procédure contentieuse, n° 694 et autre référence y citée.

européenne. Dans la matière spécifique des réseaux et services de communications électroniques, la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques, dénommée ci-après « la directive cadre », se limiterait à demander aux Etats membres de veiller à ce que leurs autorités réglementaires tiennent le plus grand compte des recommandations de la Commission européenne. Ainsi, l’ILR n’aurait pas été tenu de suivre la recommandation 2009 et aurait pu disposer d’une large marge de manœuvre dans le choix des moyens propres à atteindre les objectifs européens, à l’instar du régulateur allemand, la Bundesnetzagentur, qui aurait décidé de ne pas suivre la recommandation 2009 en ce qui concerne le choix du modèle pur LRIC. Dans ce même contexte, … estime, sur base des analyses du bureau d’études Marpij dans son rapport du 8 juin 2015, que la méthode de détermination du MTR choisie ne serait pas pertinente et résulterait d’une erreur manifeste d’appréciation entraînant des conséquences qui n’auraient pas été anticipées par l’ILR faute pour celui-ci d’avoir procédé à une étude d’impact certes non obligatoire.

Or, force est d’abord de retenir, conformément à ce qui a été souligné par l’ILR, que le choix pour la méthode pur LRIC pour le modèle des coûts luxembourgeois a effectivement déjà été pris dans le cadre du règlement 14/172/ILR, actuellement coulé en force de chose décidée. En effet, le règlement 15/191/ILR ne vient que modifier ponctuellement le règlement 14/172/ILR en remplaçant le MTR « provisoire » calculé à partir d’une comparaison internationale des MTR élaborés selon la méthode pur LRIC par un MTR qui est le résultat d’un modèle pur LRIC spécialement élaboré en fonction des spécificités du marché luxembourgeois. Il n’est dès lors pas possible de venir à l’heure actuelle contester le choix de principe de l’ILR d’utiliser un modèle de coûts basé sur la méthode pur LRIC, méthode qui est par ailleurs celle préconisée par la Commission européenne et qui est celle qui est actuellement utilisée, au vu des statistiques non contestées fournies par l’ILR, par la grande majorité (vingt pays) des Etat membres de l’Union européenne et dont le taux moyen s’élève en avril 2015 à 0,97722 centimes d’euro. Comme il a déjà été retenu ci-avant, il n’est pas non plus possible pour la partie demanderesse d’invoquer l’illégalité du règlement 14/172/ILR par la voie d’exception, l’acte administratif actuellement attaqué ne consistant pas en un acte administratif émis en application dudit règlement, mais en une modification ponctuelle de ce dernier.

Ainsi, nonobstant le fait que le caractère non obligatoire des recommandations de la Commission européenne n’est de toute façon pas de nature à empêcher un régulateur national d’effectivement suivre telle ou telle recommandation, le moyen visant à reprocher à l’ILR d’avoir suivi la recommandation 2009 de la Commission européenne est d’ores-et-

déjà à rejeter.

… conclut ensuite à une violation de la directive cadre, en ce qu’elle prévoit dans son article 8, paragraphe 5, que les obligations et conditions imposées par le régulateur national soient non discriminatoires, principe également repris dans les articles 5, paragraphe 2, et 8, paragraphe 4 de la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion, dénommée ci-après « la directive accès », alors que le fait par le règlement 15/191/ILR d’imposer le même MTR à tous les opérateurs reviendrait à traiter de manière égale des situations objectivement différentes, puisqu’…, contrairement à EPT et Tango, n’aurait pas atteint l’échelle minimale efficace malgré sa présence sur le marché depuis plusieurs années. Ainsi, l’ILR n’aurait pas tenu compte de cette situation et créé une mesure entraînant une discrimination injustifiée entre les opérateurs. Dans ce contexte, … relève également que la fixation du MTR au niveau de 0,97 centimes d’euros inférieur à celui des pays voisins aurait pour effet de subventionner les opérateurs étrangers, ce qui aurait par ailleurs déjà été critiqué par le Conseil de la concurrence dans son premier avis rendu dans le cadre de la procédure d’adoption du règlement 14/172/ILR. Ainsi pour …, la balance entre les revenus et charges d’interconnexion avec les opérateurs étrangers afficherait depuis 2014 un solde négatif d’ … millions d’euros, de sorte qu’elle reverserait plus aux opérateurs qu’elle ne serait en mesure d’encaisser de leur part, alors que le poids des appels internationaux serait proportionnellement plus élevé dans l’ensemble du trafic des opérateurs luxembourgeois.

Dans ce même contexte, … conclut encore à une violation du droit européen de la concurrence et notamment de l’article 2 de la directive 2002/77/CE de la Commission du 16 septembre 2002 relative à la concurrence dans les marchés des réseaux et des services de communications électroniques, interdisant aux Etats membres d’accorder ou de maintenir des droits exclusifs ou spéciaux pour l’établissement et l’exploitation de réseaux de communications électroniques ou pour la fourniture de services de communication électroniques accessibles au public. Elle se réfère dans ce contexte à une affaire Mobistar contre Commune de Fléron dans laquelle la Cour de Justice de l’Union européenne aurait confirmé que cette obligation exigerait également qu’il soit tenu compte des conséquences découlant du fait qu’un opérateur aurait bénéficié de droits exclusifs et spéciaux, afin de veiller à ce qu’une règlementation ne place pas les opérateurs alternatifs dans une situation moins favorables que l’opérateur historique. En l’espèce, le règlement attaqué serait de nature à renforcer la position dominante de l’opérateur historique au détriment des autres opérateurs sur le marché, de sorte qu’il ne serait pas à exclure que des abus de position dominante soient concevables. Dans ce contexte, … invoque encore un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 22 mai 2003, référencé sous le n° C-462/99, dans une affaire Connect Austria, qui aurait retenu qu’il serait fondamental dans un marché oligopolistique comme le marché de la téléphonie mobile d’éviter une règlementation qui permettrait à l’opérateur historique de renforcer sa position dominante sur le marché en affaiblissant la position des nouveaux entrants. A ce sujet, … souligne que même si l’EPT aurait émis des contestations lors de la période de consultation, elle n’aurait cependant pas attaqué le règlement 14/172/ILR, alors qu’elle serait beaucoup moins touchée financièrement que les trois autres opérateurs et ce, tant par le règlement 14/172/ILR que par le règlement 15/191/ILR. … rappelle encore que l’EPT aurait été condamnée pour abus de position dominante en date du 13 novembre 2014, ce qui démontrerait que les autres opérateurs auraient beaucoup de mal à se développer face à un concurrent présent et dominant sur les marchés et de compenser les baisses de chiffre d’affaires résultant du règlement attaqué.

Dans son mémoire en réponse, l’ILR relève qu’alors même qu’…, dénommée à l’époque Vox Mobile, n’aurait débuté son activité qu’en 2003/2004, il serait faux de prétendre que l’EPT serait à considérer comme opérateur historique sur le marché de la téléphonie mobile, alors que l’EPT aurait commencé cette activité en même temps que l’opérateur Tango en 1997/1998. Il ne saurait ensuite pas être prétendu qu’il y aurait un favoritisme d’un opérateur en particulier, alors que la méthode de calcul des coûts pur LRIC viserait justement à déterminer de façon objective les frais de terminaison d’appel. L’ILR donne encore à considérer que l’EPT, du fait de sa part de marché plus importante, subirait également une diminution plus importante de ses revenus provenant de la terminaison d’appel sur son réseau, de même que la baisse de l’MTR engendrerait une diminution des frais de terminaison d’appel qu’… serait amené à régler à l’EPT en raison de la circonstance que du fait de la taille plus importante de la part de marché de l’EPT, la probabilité que les appels des clients d’… seraient terminés sur le réseau de l’EPT serait plus élevée que celle que des clients de l’EPT appelleraient vers le réseau d’…. L’ILR souligne encore à l’inverse qu’au cas où les MTR facturés par l’EPT seraient plus élevés que les coûts d’un opérateur efficace, ce seraient les opérateurs alternatifs qui seraient amenés dans une proportion importante à financer le réseau de cette dernière, phénomène qui aurait d’ailleurs déjà fait l’objet de l’analyse de la Commission européenne dans ses documents de travail à la base de sa recommandation 2009. L’ILR rappelle ensuite que les coûts de terminaison auraient également été revus à la baisse en ce qui concerne la terminaison d’appel pour la téléphonie fixe, de sorte que l’EPT subirait également une baisse de ses revenus afférents. En tout état de cause, l’ILR renvoie finalement à l’analyse des commentaires soulevés par le cabinet Marpij contre le règlement 14/172/ILR du 6 janvier 2014 émise par la société Analyses Mason en date du 25 avril 2014, versée parmi ses pièces, qui aurait retenu que les conclusions du rapport Marpij relatives au renforcement potentiel de la position concurrentielle de l’EPT seraient fondées sur une analyse erronée alors que l’EPT subirait en fait une perte d’EBITDA (Earnings Before Interest, Taxes, Depreciation, and Amortization) du fait de la baisse des MTR.

En ce qui concerne le droit européen de la concurrence, l’ILR estime que les affaires Connect Austria et Mobistar ne seraient pas pertinentes en l’espèce, alors que l’affaire Mobistar aurait concerné un litige relatif aux taxes communales qui ne serait en rien lié aux tarifs imposés par un régulateur d’un marché et que dans l’affaire Connect Austria, il se serait effectivement avéré que le régulateur autrichien avait omis de réclamer à une entreprise publique une redevance pour l’allocation de fréquences supplémentaires, contrairement à ce qui aurait été le cas en l’espèce, où l’EPT se serait vu imposer le même plafond tarifaire que les autres opérateurs. L’ILR relève encore dans ce contexte qu’… aurait bénéficié pendant plus de huit ans d’une asymétrie tarifaire en sa faveur pour lui permettre d’entrer dans le marché et de gagner des parts de marché, l’abandon de cette asymétrie ne serait par ailleurs pas contesté par ….

Quant à une éventuelle discrimination des opérateurs luxembourgeois par rapport aux opérateurs étrangers, l’ILR estime qu’il serait faux de prétendre que la baisse du MTR aurait pour conséquence que les opérateurs luxembourgeois seraient amenés à subventionner les opérateurs étrangers, alors que la méthode pur LRIC serait appliquée dans la plupart des pays européens et serait justement destinée à éviter des subventionnements indus au niveau européens par la réduction des MTR au niveau des frais réellement encourus par les opérateurs efficaces pour la prestation de la terminaison d’appel, de sorte que les MTR étrangers auraient également fait l’objet de diminutions dont les opérateurs luxembourgeois pourraient profiter. L’ILR souligne encore que le MTR de 0,97 centimes d’euros tel que fixé par le règlement 15/191/ILR se situerait par ailleurs dans la moyenne des MTR européens et que les MTR en France et en Belgique évolueraient vers un niveau moins élevé qu’au Luxembourg. Ainsi, si, dans la balance, les dépenses des opérateurs luxembourgeois au titre des MTR qu’ils paient aux étrangers seraient plus élevées que les recettes provenant des MTR qu’ils pourraient facturer aux opérateurs étrangers, cela proviendrait simplement du fait que les résidents luxembourgeois téléphoneraient plus vers l’étranger. La partie défenderesse conteste encore les chiffres avancés par … en ce qui concerne la balance revenus/charges d’interconnexion avec les opérateurs étrangers, étant donné que ces chiffres ne seraient pas suffisamment précis pour ne pas faire la distinction entre terminaison mobile et fixe et pour ne pas mettre en évidence si la baisse des tarifs roaming est également pris en considération. Enfin, l’ILR estime que la baisse de revenus de l’étranger pourrait tout aussi bien résulter d’une baisse des volumes des appels provenant de l’étranger, respectivement que la situation antérieure à 2014 serait anormalement haute, notamment en raison des tarifs historiques particulièrement élevés au Luxembourg augmentés de l’asymétrie tarifaire dont … aurait bénéficié.

… fait répliquer que si l’EPT ne pouvait pas être désignée comme l’opérateur historique sur le marché de la téléphonie mobile, cette dernière serait néanmoins un opérateur ultra dominant. Elle relève ensuite que si la branche mobile de l’EPT souffrait d’une perte de revenus du fait du règlement attaqué, cette perte serait non seulement moins importante que celle subie par …, mais elle serait également plus que largement compensée par la diminution des coûts supportée par la branche fixe du groupe qui serait par conséquent largement bénéficiaire de la réglementation. Elle estime dans ce contexte que du fait que l’EPT, Tango et elle-même seraient tous les trois présents sur le marché de la téléphonie fixe et celui de la téléphonie mobile, il aurait lieu de mesurer l’impact de la baisse du MTR sur ces deux activités, d’autant plus que l’EPT ne publierait pas de comptes séparés pour ces deux branches. La partie défenderesse souligne encore qu’elle aurait encaissé une perte de … millions d’euros sur les 10 derniers mois de 2014 en raison de la seule baisse du MTR, et que pour la même année, le free Cash Flow, à savoir la capacité à investir, à se développer et à proposer des offres attractives sur le marché serait devenu négatif, ce qui la ferait revenir cinq ans en arrière dans son développement. En ce qui concerne les jurisprudences de la Cour de justice de l’Union européenne, … souligne que ces décisions auraient interdit de favoriser directement ou indirectement les opérateurs historiques, ce qui serait pourtant le cas du règlement attaqué, alors que l’EPT en tant qu’établissement public serait largement favorisée par la mesure de régulation attaquée.

Dans sa duplique, l’ILR fait souligner que la fixation du MTR par un modèle pur LRIC aurait justement comme but d’éviter que des opérateurs puissants puissent imposer des tarifs de terminaison d’appel injustifiés et de nuire ainsi aux opérateurs alternatifs.

L’ILR rappelle encore que du fait de la répartition des parts de marché respectives, la diminution du MTR profiterait proportionnellement plus à … qui devrait payer moins de frais de terminaison d’appel à l’EPT. Par ailleurs, le réseau de l’EPT serait d’ailleurs plus ancien que celui d’…, ce qui ne jouerait pas non plus en faveur de l’EPT. L’ILR invoque encore par analogie une décision du tribunal administratif en matière de terminaison d’appel de la téléphonie fixe, où les juges auraient estimé qu’au vu de la situation monopolistique sur les marchés respectifs des différents opérateurs, une asymétrie à charge de l’EPT ne serait pas justifiée. En ce qui concerne les observations d’… relatives à la nécessité de considérer la situation financière globale des opérateurs présents sur le marché de la téléphonie mobile et celui de la téléphonie fixe, l’ILR donne à considérer qu’une analyse globale ne serait pas méthodologiquement correcte en raison de l’obligation résultant de l’article 17, paragraphe 1 de la loi du 27 février 2011, de procéder à une analyse séparée pour les différents marchés identifiés par la Commission européenne. Par ailleurs, sur le marché de la téléphonie fixe, le FTR (Fixed Termination Rate) aurait, en février 2015, connu une baisse significative à 0,14 centimes d’euro par minute, de sorte à induire également une baisse des revenus y relatifs pour l’EPT. Une analyse globale telle que préconisée par … impliquerait également pour l’ILR d’analyser la situation financière de tout le groupe … qui serait le principal actionnaire de la société belge Mobistar, maison mère d’… à Luxembourg. En ce qui concerne l’impact financier de la baisse du MTR depuis 2014, l’ILR conteste les chiffres avancés relatifs à la perte EBITDA et souligne que, même si la baisse du chiffre d’affaires en 2014 est accentuée par la fin d’une asymétrie tarifaire en faveur d’…, la balance sur le marché de la communication vocale serait restée positive pour s’élever à … millions d’euros suivant le tableau y relatif présenté par … dans son mémoire en réplique.

En ce qui concerne la concurrence internationale, l’ILR rappelle que le MTR fixé par le règlement attaqué se situerait dans la moyenne des MTR applicable dans les vingt Etats membres sur vingt-huit qui auraient utilisé la méthode pur LRIC, tout en notant que le MTR en France se situerait actuellement à 0,78 centime d’euro et que dans un futur proche, la Belgique passerait à 0,74 centime d’euro pour conclure qu’il ne saurait être question d’un désavantage pour les opérateurs luxembourgeois. En tout état de cause, l’ILR met l’accent sur le fait que l’application généralisée de la méthode pur LRIC ferait en sorte que, même si leur MTR étaient plus élevés, les concurrents européens ne tireraient justement pas d’avantage en termes concurrentiels, alors que seulement leurs coûts relatifs à un service de terminaison d’appel efficace seraient couverts. L’ILR souligne qu’il aurait procédé à une analyse d’impact de la baisse du MTR à un centime d’euro dans le cadre de l’étude Bill & Keep pour réaliser qu’à défaut de réciprocité, un tel régime serait moins favorable que la méthode pur LRIC.

Force est d’abord au tribunal de relever qu’en ce qui concerne le moyen relatif à une violation du principe de non-discrimination en ce que l’ILR aurait traité … de manière identique, alors qu’elle se trouverait dans une situation différente par rapport à celle de l’EPT et de Tango en raison du fait de ne pas avoir atteint « l’échelle efficace minimum », … ne fournit aucune explication complémentaire relative à cette échelle efficace minimum et, au-delà du fait de réclamer « une mesure non-discriminatoire », ne donne pas non plus de précision quant à la mesure qui aurait dû être prise à cet égard, de sorte que ces contestations générales ne sont pas suffisamment pertinentes pour constituer le règlement en faute en ce qu’il a de manière a priori non discriminatoire imposé le même MTR à tous les opérateurs du secteur concerné. Par ailleurs, les affirmations de la part de l’ILR relatives à la non-

contestation par … de l’abandon par le règlement 14/172/ILR de l’asymétrie tarifaire qui avait été instaurée en sa faveur par la décision précitée du 06/92/ILR du 2 mai 2006, ne sont pas non plus contestées par la partie demanderesse. En effet, … reste en défaut d’établir que les conditions justificatives d’un traitement différencié, telles que notamment, à l’époque, son entrée récente sur le marché de la téléphonie mobile et ses difficultés de déploiement d’infrastructures, seraient encore d’actualité.

En ce qui concerne la crainte que le règlement serait contraire à la libre concurrence sur le marché, de sorte à privilégier l’opérateur EPT par rapport aux opérateurs alternatifs en général, l’ILR est à suivre en ce qu’il a souligné que le principe même d’une régulation sur le marché de gros de la terminaison d’appel est pleinement justifié par rapport à la situation monopolistique des différents opérateurs en ce qui concerne les terminaisons d’appels sur leurs propres réseaux. Il échet ensuite de constater que la demanderesse ne réfute pas à suffisance les conclusions de l’ILR quant au constat que l’EPT n’a pas profité positivement de la baisse importante du MTR en 2014, telle que cette conclusion résulte du rapport du 25 avril 2014 de la société Analyses Mason, alors qu’il y est expliqué que tous les opérateurs, y compris l’EPT, ont dû essuyer des pertes suite à la baisse importante du MTR au niveau de 0,98 centimes d’euro. Quant à l’argument selon lequel une économie d’échelle plus grande, en l’occurrence en fonction de la part de marché plus grande détenue sur le territoire luxembourgeois par l’EPT, permettrait de plus ou moins facilement estomper les pertes subies en raison de la baisse du MTR, ne saurait pas non plus tenir, notamment à cause de la circonstance que, pour un opérateur alternatif avec une part de marché plus faible, l’économie des coûts facturés par l’opérateur majoritaire est a priori supérieure au manque à gagner corrélatif, ce qui ressort par ailleurs également de la balance Voice National pour l’année 2014 présentée par … dans son mémoire en réplique. Dans ce contexte, l’ILR est également à suivre en ce qui concerne la non prise en compte dans cette analyse du fait que l’EPT est également largement majoritaire sur le marché de la terminaison d’appel fixe, étant donné que la terminaison d’appel fixe concerne effectivement un marché régulé à part qui ne saurait être pris en compte dans le cadre de la présente analyse. Il ressort par ailleurs des conclusions non énervées de l’ILR que le FTR a également fortement baissé en 2015, ce qui, en application du principe considéré ci-avant relatif aux rapports de force en fonction de la part de marché, a principalement pour effet de réduire non seulement les recettes de l’EPT, mais également de manière corrélative, pour les autres opérateurs, les frais à régler à cette dernière pour le service de terminaison d’appel fixe. Il résulte par ailleurs de la décision du Conseil de la concurrence à laquelle … a fait référence, que tout abus de position dominante de la part de l’EPT est bien susceptible d’être sanctionné.

Il résulte ainsi de ces conclusions que le règlement attaqué n’a ni directement, ni indirectement favorisé l’opérateur historique ou public, de sorte que le droit de la concurrence européen invoqué à travers les deux jurisprudences précitées de la Cour de justice de l’Union européenne ne s’en trouve pas non plus lésé.

En ce qui concerne l’argumentation de la partie demanderesse selon laquelle, en raison du règlement attaqué, les opérateurs luxembourgeois seraient réduits à subventionner les opérateurs étrangers, force est d’abord de constater qu’il ressort des statistiques non contestées présentées par l’ILR que l’application généralisée de la méthode pur LRIC a permis d’équilibrer globalement, en avril 2015, les MTR des différents pays concernés dans une fourchette allant de 0,80 centimes d’euro à 1,27 centimes d’euro et que le MTR fixé par le règlement 15/191/ILR se trouve dans la moyenne de ces MTR européens. L’ILR n’est pas non plus contredit lorsqu’il fait exposer que l’application ainsi généralisée de la méthode pur LRIC permet justement de garantir, en raison de la limitation des MTR aux coûts de terminaison d’un opérateur efficace, que les opérateurs ne soient pas amenés à devoir subventionner des opérateurs inefficaces même étrangers. Ainsi le fait que certains pays auraient toujours des MTR plus élevés par rapport au Luxembourg importe peu si ces MTR sont également fixés par la méthode pur LRIC. A l’inverse, fixer un MTR plus élevé, et qui ne serait de ce fait plus élaboré en accord avec les principes de la méthode pur LRIC, équivaudrait à créer un déséquilibre concurrentiel en faveur des opérateurs luxembourgeois, ce qui ne saurait pas valablement rencontrer le souhait de la demanderesse relatif au respect du principe de la non-discrimination et de la libre concurrence.

Il s’ensuit que le moyen relatif à une violation du principe de non-discrimination et du respect de la libre concurrence est à rejeter.

La partie demanderesse conclut également à une violation des dispositions de l’article 33, paragraphe 1 de la loi du 27 février 2011, alors que, tel que cela aurait par ailleurs déjà été relevé par les rapports Marpij, la méthodologie de tarification imposée ne serait pas de nature à promouvoir l’efficacité économique et la pérennité de la concurrence et n’optimiserait pas les avantages pour le consommateur. Ainsi, le Conseil de la concurrence aurait déjà estimé dans son avis n°2013-AV-05 du 23 août 2013 que la fixation d’un tarif tellement bas aurait probablement pour conséquence que le modèle des coûts ramènerait par la suite des tarifs plus élevés. En ce qui concerne la situation des consommateurs, … estime que la baisse du MTR aurait pour conséquence une vente du service de la terminaison d’appel à perte qui devrait être récupérée par l’augmentation des prix sur le marché de détail par l’effet dit waterbed. … explique encore à ce sujet qu’elle ne pourrait d’ailleurs en aucun cas envisager une baisse des tarifs de détail pour accroître ses revenus sous l’effet d’une augmentation des volumes facturés en raison des nombreuses offres prévoyant des appels illimités. Elle relève encore que cette baisse du MTR serait concomitante à d’importants investissements en vue du déploiement des réseaux 4G, de sorte que la baisse des revenus de détail ajoutée aux dépenses d’investissements serait fatalement répercutée sur les consommateurs. Ainsi, le règlement attaqué renforcerait incontestablement la position dominante de l’opérateur historique tout en fragilisant les autres opérateurs et en créant des entraves à l’entrée sur le marché de nouveaux concurrents, ce qui serait contraire à l’obligation de veiller à favoriser une concurrence durable et à optimiser les avantages pour les consommateurs. En ce qui concerne la venue sur le marché du nouvel opérateur Join, détenu à 50% par l’opérateur historique, … se réfère à un avis du Conseil de la concurrence n° 2014-AV-06 du 13 octobre 2014, pris dans le cadre de l’élaboration du règlement 15/190/ILR, regrettant qu’il ne disposerait pas d’un instrument spécifique de contrôle des concentrations.

Dans son mémoire en réponse, l’ILR souligne que le MTR issu de son modèle de coûts d’un opérateur générique au Luxembourg serait conforme aux dispositions des différentes directives de 2002, transposées à travers l’article 33 de la loi du 27 février 2011, permettant expressément une détermination des tarifs par une orientation sur les coûts telle que la méthode pur LRIC, et que par l’application harmonisée de la méthode pur LRIC souhaitée par la Commission européenne, celle-ci aurait envisagé, au bénéfice des consommateurs, d’inciter les opérateurs à augmenter leur efficacité tout en créant des conditions équitables de concurrence entre eux.

La partie défenderesse estime également que le nouveau MTR de 0,97 centimes d’euro ne serait pas de nature à empêcher les opérateurs à investir dans les réseaux de nouvelles technologies et conteste l’effet waterbed craint par la partie demanderesse dont la réalisation effective resterait à l’état de pure allégation. L’ILR souligne dans ce contexte que la Commission européenne aurait pris en considération et réfuté cette théorie dans sa recommandation de 2009. Ce serait aux opérateurs qu’il appartiendrait de répercuter sur leurs prix au détail la baisse des frais de terminaison d’appel qui leur sont facturés par leurs concurrents. Ainsi, dans l’hypothèse où un effet waterbed devait se vérifier, ce dernier ne serait pas dû à la baisse du MTR, mais au comportement des opérateurs cherchant à maximiser leurs profits.

… fait répliquer que le règlement attaqué ne remplirait aucun des trois critères cumulatifs de l’article 33 paragraphe (1) de la loi du 27 février 2011, alors qu’il renforcerait la position de l’opérateur dominant sur le marché, à savoir l’EPT, qu’il affaiblirait les opérateurs alternatifs et renforcerait les opérateurs étrangers et ce, sans que les consommateurs, ni l’Etat n’en tireraient le moindre bénéfice. Elle affirme que la Commission européenne aurait sous-estimé l’effet waterbed dans sa recommandation de 2009 et renvoie à ce titre à une étude de mai 2012 de la société Frontier Economics Ltd qui aurait conclu à l’absence de lien entre la baisse du MTR et les prix de détail, à l’absence d’éléments démontrant un effet positif de la baisse des MTR sur les petits opérateurs, ainsi qu’à un risque potentiel sur la pénétration du marché et les investissements. Elle fait ensuite plaider que la baisse des MTR ne serait pas pertinente pour justifier l’entrée sur le marché de nouveaux opérateurs qui serait en réalité principalement freinée par la rareté des licences d’opérateur, ainsi que par la position ultra-dominante de l’EPT et ses pratiques commerciales répréhensibles et réprimées par le Conseil de la concurrence.

L’ILR fait dupliquer que les prix de gros de la terminaison d’appel que les opérateurs pouvaient initialement fixer selon leur gré en raison de leur situation monopolistique sur ce marché, seraient nécessairement répercutés directement, sinon indirectement aux clients finaux sur les marchés de détail, ce qui, en dehors d’une régulation de ce marché basée sur la récupération des stricts coûts de terminaison d’appel, serait à l’origine d’une distorsion à la concurrence entre les opérateurs, permettant surtout à un opérateur puissant sur le marché de la téléphonie mobile de fixer un MTR très élevé et d’affaiblir ainsi les petits opérateurs qui ne pourraient pas offrir de bonnes conditions compétitives à leurs clients et qui pourraient effectuer moins d’investissements. Ainsi, des MTR moins élevés entraineraient des coûts inférieurs pour l’opérateur qui aura ainsi la capacité de proposer des offres de détail à des coûts moindres. L’effet waterbed ne serait pas vérifié, alors que depuis la baisse du MTR en janvier 2014 par le règlement 14/172/ILR, les prix au détail n’auraient pas augmenté, au contraire, … aurait même proposé un paquet complet de communication mobiles data 4G, voix et sms inclus pour seulement 15 euros par mois.

Aux termes de l’article 33, paragraphe (1) de la loi du 27 février 2011, « Tous les mécanismes de récupération des coûts ou les méthodologies de tarification qui sont imposés par l’Institut doivent promouvoir l’efficacité économique, favoriser une concurrence durable et optimiser les avantages pour le consommateur. A cet égard, l’Institut peut également prendre en compte les prix en vigueur sur les marchés concurrentiels comparables. » Force est d’abord de relever que l’interprétation de l’application concrète des trois conditions cumulatives de l’efficacité économique, de concurrence durable et d’avantages pour les consommateurs est principalement une question d’appréciation. Il ne suffit dès lors pas à un plaideur, pour mettre à mal la motivation derrière la mesure de régulation, de faire valoir que la mesure est éventuellement susceptible d’avoir tel ou tel effet contrairement aux buts poursuivis par la législation, mais il lui appartient de mettre en évidence une erreur manifeste d’appréciation y relative dans le chef du régulateur. Or, force est de constater que la partie demanderesse reste en défaut de ce faire.

En ce qui concerne la méthodologie utilisée pour le modèle de coûts litigieux, force est encore une fois au tribunal de rappeler qu’il a été retenu ci-avant que le choix d’un modèle pur LRIC a déjà été arrêté par le règlement 14/172/ILR et qu’il n’est pas possible de mettre en cause cette décision dans le cadre du présent recours dirigé exclusivement contre le règlement 15/191/ILR ayant fixé le MTR en application du modèle pur LRIC.

En ce qui concerne l’efficacité économique, l’argument selon lequel les pertes dues à la baisse du MTR ne pourraient pas être compensées par une augmentation du nombre des appels à prix plus bas, ne saurait tenir, alors que l’augmentation du nombre d’appels pour maximiser ses revenus n’a pas de pertinence directe au regard de l’objectif d’efficacité économique. Ainsi, tant la notion de l’efficacité, visant à atteindre des résultats escomptés, que celle de l’efficience économique, se mesurant sous la forme d'un rapport entre les résultats obtenus et les ressources utilisées, sont de nature à correspondre plutôt à l’argumentation de l’ILR relative à l’objectif d’inciter les opérateurs à réduire leurs coûts pour maximiser leurs marges. Par ailleurs, il échet de rappeler qu’… est également bénéficiaire de la baisse du MTR, alors que les frais de terminaisons d’appels qui lui sont facturés par les autres opérateurs sont également réduits ce qui entraîne ainsi une diminution de ses coûts lorsqu’un de ses abonnés fait un appel vers un autre réseau. Ainsi, l’ILR est encore à suivre en ce qu’il affirme qu’…, en tant qu’opérateur relativement petit, est susceptible de devoir plus souvent faire terminer des appels auprès de l’opérateur majoritaire EPT que d’en terminer à la demande de ce dernier, ce qui ressort d’ailleurs de ses propres chiffres avancés dans son mémoire en réplique. Il s’ensuit que dans cette optique, le nouveau MTR, s’il n’engendre certes plus les mêmes revenus qu’avant, est néanmoins de nature à réduire les coûts et à augmenter son efficience.

En ce qui concerne l’argumentation selon laquelle la fixation du nouveau MTR par le modèle LRIC ne permettrait plus aux opérateurs d’avoir suffisamment de ressources pour investir dans les nouvelles technologies, au-delà du constat que le choix pour cette méthode ne résulte pas du règlement attaqué, tel qu’il a été rappelé ci-avant, il échet de relever que les allégations à ce sujet par la partie demanderesse se résument à des craintes hypothétiques, alors qu’il n’est pas contesté que, malgré la baisse conséquente du MTR en janvier 2014, tous les opérateurs dits « MNO », c’est-à-dire exploitant un réseau de télécommunications mobiles physique, ont néanmoins pu largement investir dans l’installation de leurs réseaux 4G respectifs au Luxembourg.

Quant à l’influence du règlement attaqué sur la concurrence nationale et internationale, l’ILR est également à suivre en ce que le principe même d’une régulation sur le marché de gros de la terminaison d’appel est pleinement justifié par rapport à la situation monopolistique des différents opérateurs en ce qui concerne les terminaisons d’appel sur leurs propres réseaux. Pour le surplus, le tribunal ne saurait que renvoyer à ses considérations prises plus haut quant au moyen relatif au non-respect de la concurrence.

En ce qui concerne l’obligation d’optimiser les avantages pour les consommateurs, force est de retenir que les explications de l’ILR relatives à un possible effet bénéfique sur les prix de détail du fait de la réduction du MTR sont tout à fait valables, d’autant plus que le phénomène inverse d’une augmentation des tarifs de détail par l’effet waterbed reste à l’état d’une simple hypothèse, alors que non encore vérifié sur le marché luxembourgeois, alors même que le MTR est en baisse depuis plusieurs années. L’affirmation non vérifiée selon laquelle les prix de détail n’auraient pas effectivement diminué, n’est pas non plus de nature à invalider le fait que la réduction du MTR et la réduction corrélative des coûts y relatifs facturés aux opérateurs reste un des facteurs propices à une diminution des prix de détail, combien même tous les opérateurs n’auraient pas encore choisi de répercuter cette baisse des coûts sur leurs prix de détail.

Il résulte de ces considérations que le moyen relatif à une violation de l’article 33, paragraphe (1) de la loi du 27 février 2011 est à rejeter, la partie demanderesse n’ayant pas établi à suffisance que le règlement attaqué ne respecterait pas les conditions y énoncées.

… fait ensuite plaider que le règlement attaqué violerait l’article 28, paragraphe 1, point e) de la loi du 27 février 2011, en ce que le prix de 0,97 centimes d’euro ne permettrait certainement pas une rémunération raisonnable du capital engagé, alors que du fait de la baisse du MTR les revenus des opérateurs seraient amenés à diminuer, alors même qu’ils devraient continuer à financer d’importants investissements en particulier du fait du déploiement des réseaux 4G et des réseaux ultra-haut débit.

Dans son mémoire en réponse, l’ILR rétorque que le plafond tarifaire fixé par le règlement attaqué ne correspondrait pas aux coûts réels d’un opérateur donné, mais ne serait que le résultat de ses calculs issus de son modèle pur LRIC, qui déterminerait les coûts qu’un opérateur générique efficace encourrait pour une prestation de terminaison d’appel sur son réseau mobile. Cette méthode serait d’ailleurs celle qui serait conseillée par la Commission européenne dans sa recommandation de 2009, acte non obligatoire, mais dont les régulateurs nationaux devraient cependant prendre le plus grand compte en application de l’article 7 (5) de la directive cadre.

L’ILR souligne qu’il aurait bien pris en compte la rémunération du capital engagé en ayant appliqué un coût moyen pondéré du capital, dénommé ci-après « CMPC », de … %, taux correspondant à la valeur la plus élevée fournie par les opérateurs consultés à ce sujet, démarche qui aurait par ailleurs été critiquée par la Commission européenne en date du 12 mars 2015.

L’ILR précise encore dans ce contexte que les investissements nécessaires au service de terminaison d’appel auraient également été pris en compte par référence aux investissements à valeur actuelle qu’un opérateur efficace devrait réaliser sur son réseau afin de pouvoir assurer la seule prestation spécifique de la terminaison d’appel. Ainsi, les investissements dans le réseau 4G n’auraient pas été pris en compte du fait que les opérateurs nationaux auraient assuré à l’ILR que la transmission de la communication vocale par le réseau de données 4G par le biais de la technique voice over LTE (norme Long Term Evolution), dénommée ci-après « VoLTE », ne serait actuellement pas encore utilisée.

Par ailleurs, l’ILR estime à ce sujet qu’une fois que ce serait le cas, le niveau du MTR se rapprocherait de zéro.

L’ILR fait encore valoir que nonobstant la fixation du MTR à 0,98 centimes d’euro en janvier 2014 par le règlement 14/172/ILR, … aurait pu continuer à investir dans le réseau de nouvelle technologie LTE-Advanced.

La partie défenderesse estime finalement que le MTR retenu par le règlement attaqué et s’élevant à 0,97 centimes d’euro ne saurait être considéré comme étant trop bas, au motif que ce taux correspondrait à la valeur la plus élevée qu’elle aurait pu retenir de l’application de son modèle de coûts, tout en relevant que la moyenne des MTR résultant du modèle de coûts aurait abouti à une valeur entre 0,… et 0,… centimes d’euro. Dans la même optique, elle aurait décidé de choisir un taux CMPC de … %, correspondant à la valeur maximale recueillie auprès des opérateurs concernés, la valeur finale étant encore augmentée de 0,… centimes d’euro au titre des coûts commerciaux de gros. L’ILR rappelle à ce titre que la Commission européenne l’aurait d’ailleurs critiqué pour avoir choisi à chaque fois les valeurs maximales. Dans le même contexte, l’ILR fait valoir que la moyenne des MTR dans les pays européens appliquant la méthode pur LRIC s’élèverait à 0,… centimes d’euro, moyenne qui aurait encore tendance à baisser dans un futur proche. L’ILR conteste encore les chiffres avancés par … quant à l’impact réel de la baisse actuelle du MTR, relevant à ce titre que la baisse de 0,98 à 0,97 centimes d’euro ne serait pas de nature à avoir un impact important, … omettant d’ailleurs de prendre en compte la baisse corrélative de ses frais, en ce que la baisse du MTR aurait également entraîné une diminution de ce qu’elle serait obligée à régler aux autres opérateurs. Par ailleurs, en ce qui concerne l’impact de la baisse du MTR, il ne faudrait pas oublier de prendre en compte que le règlement 14/172/ILR aurait également mis fin à l’asymétrie de tarifs au bénéfice d’….

En ce qui concerne l’impact de la baisse du MTR de son taux historique de 8,2 centimes d’euro en moyenne, respectivement 10,5 centimes d’euro pour …, à celui de 0,98 centimes d’euro résultant du règlement 14/172/ILR, l’ILR fait valoir avoir valablement procédé à une analyse d’impact sur les opérateurs concernés lors de ladite procédure d’élaboration sur base des chiffres confidentiels fournis par les opérateurs dans le cadre de l’analyse Bill & Keep, exercice qui ne devrait pas être répété à l’heure actuelle, étant donné que la baisse actuellement concernée s’élèverait à seulement 0,… centimes d’euro.

… fait répliquer qu’il lui serait indispensable de continuer à investir dans son réseau 4G et que si, pour éviter des retombées négatives sur ses parts de marché, toute communication de presse y relative éviterait nécessairement de montrer le moindre signe de faiblesse de sa part, il ne pourrait pas en être déduit qu’elle n’aurait pas été affectée financièrement par la baisse du MTR.

Dans sa duplique, l’ILR rappelle que le modèle pur LRIC, tel qu’il a été élaboré, tiendrait compte des investissements dans les équipements réseau nécessaires à la fourniture de la prestation de la terminaison d’appel et non les investissements effectués dans le réseau pris en sa globalité, alors que dans cette hypothèse, les opérateurs seraient amenés à financer le développement des réseaux de leurs concurrents. En ce qui concerne les investissements adéquats à prendre en compte au regard de l’article 28 de la loi du 27 février 2011, modèle pur LRIC choisi tiendrait compte des investissements en considération des coûts actuels des équipements nécessaires pour construire un réseau mobile en considérant tant les coûts d’investissement des équipements de réseaux (CAPEX) que les coûts d’exploitation de ces équipements (OPEX), suivant le tableau figurant dans sa réponse aux contributions lors de la consultation publique nationale du 14 novembre au 17 décembre 2014, ainsi que du memorandum explicatif. Il fait encore valoir que l’application d’un taux CMPC serait généralement admise pour tenir compte du coût du capital engagé et que la partie demanderesse resterait en défaut d’expliquer pourquoi ce dernier ne serait pas adapté en matière de MTR.

En ce qui concerne les frais d’installation du réseau 4G, l’ILR relève qu’… ne contesterait pas qu’actuellement elle n’utiliserait pas ledit réseau pour les appels vocaux, de sorte qu’il n’y aurait pas lieu de prendre en considération ce dernier dans le modèle des coûts, basé uniquement sur les coûts réellement engendrés par le service de la terminai son mobile, au cas contraire, les investissements y non liés seraient financés de manière injustifiée sur le dos des autres opérateurs. L’ILR affirme que la prise en compte du réseau 4G se ferait à partir de l’année 2017, c’est-à-dire à partir du moment où tous les opérateurs seraient susceptibles d’utiliser leurs réseaux 4G respectifs pour la transmission des appels vocaux.

L’ILR relève enfin que le but de la fixation du MTR par rapport aux coûts d’un opérateur efficace serait d’inciter les opérateurs à diminuer leurs frais en investissant dans des équipements plus efficients. Ainsi, les MTR serait très vraisemblablement moins élevé sur un réseau 4G.

L’article 28, paragraphe (1) e) de la loi du 27 février 2011 dispose que « Si, à la suite d’une analyse du marché, l’Institut désigne un opérateur comme puissant sur un marché de l’accès ou de l’interconnexion, il peut lui imposer, sans préjudice d’autres dispositions légales: (…) e) des obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris les obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts et les obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d’interconnexion ou d’accès, lorsqu’une analyse du marché indique que l’opérateur concerné peut, en l’absence de concurrence efficace, maintenir des prix à un niveau excessivement élevé, ou comprimer les prix, au détriment des utilisateurs finals. Afin d’encourager l’opérateur à investir notamment dans les réseaux de prochaine génération, l’Institut tient compte des investissements qu’il a réalisés, et lui permettent une rémunération raisonnable du capital adéquat engagé, compte tenu de tout risque spécifiquement lié à un nouveau projet d’investissement particulier. » Force est encore une fois de rappeler que le choix pour la méthode pur LRIC pour le modèle des coûts luxembourgeois a déjà été pris dans le cadre du règlement 14/172/ILR, actuellement coulé en force de chose décidée.

En ce qui concerne les pertes essuyées par la partie demanderesse lors de l’introduction par le règlement 14/172/ILR d’un MTR fixé à 0,98 centimes d’euro, alors même si la baisse a été abrupte, le MTR passant pour … de 10,5 centimes d’euro en moyenne en 2008 à 0,98 centimes d’euro, le MTR était néanmoins en baisse continuelle depuis 2006 jusqu’à 2008 et avait vocation à baisser davantage. Le fait que l’ILR avait, depuis le dernier plafond fixé en 2008, ensuite pris six années pour fixer une nouvelle baisse du MTR, n’a finalement pas été au préjudice de la partie demanderesse qui a ainsi pu continuer depuis 2008 jusqu’en 2014 à facturer de façon constante un MTR à … centimes d’euro en moyenne au lieu d’avoir dû l’adapter progressivement à la baisse. Il est renvoyé à ce titre à l’arrêt précité de la Cour administrative du 17 décembre 2015 qui a estimé que l’opérateur concerné, prudent et prévoyant, aurait dû être conscient de ce que le nouveau tarif allait devenir inévitable, et que vu le temps durant lequel les anciens tarifs ont pu se déployer sans frein de régulation afférent vérifié, ensemble les avantages indéniables en découlant pour l’opérateur, aucun dépassement de sa marge d’appréciation ne saurait être valablement retenu dans le chef de la démarche de l’ILR ayant consisté en définitive à imposer avec effet immédiat la régulation provisoire telle qu’il l’a fait à travers son règlement 14/172/ILR.

Au vu des contestations de la partie demanderesse selon lesquelles le MTR finalement retenu ne serait pas suffisamment élevé au regard des prescriptions légales de l’article 28, paragraphe (1), point e) de la loi du 27 février 2011, il s’agit dès lors de vérifier si, en application de la disposition précitée, l’ILR a pris en considération les investissements des opérateurs, et si la mesure de régulation permet à ces derniers une rémunération raisonnable du capital adéquat engagé.

Il ressort des conclusions de l’ILR, ainsi que du mémorandum explicatif auquel elles se réfèrent, que le modèle pur LRIC élaboré pour le marché luxembourgeois prend bien en compte les frais d’installation du réseau d’un opérateur efficace dimensionné pour une part de marché de 33,33 % des communications mobiles au Luxembourg. A ce titre ont été considérés, sur base des informations recueillies auprès des différents opérateurs concernés, ainsi que de données statistiques, les investissements en installations, ainsi que les frais de maintenance nécessaires pour permettre de garantir le service de terminaison d’appel de manière efficace, par la différence chiffrée entre les coûts annuels de réseau avec le service de terminaison d’appel et les coûts de réseau sans la terminaison d’appel, et ce, compte tenu des spécificités du Luxembourg, telles que notamment les heures de pointe, les pôles de concentration de population, la topographie, ainsi que la circonstance que de nombreux frontaliers se trouvent au Luxembourg pendant la journée. La référence, préconisée par la Commission européenne, à un opérateur théorique efficace, détenant pour le Luxembourg un tiers du marché, en raison du nombre d’opérateurs luxembourgeois exploitant leur propre réseau physique, est encore valablement justifiée par la nécessité de garantir que le MTR ne dépasse pas les coûts réels strictement nécessaires pour le seul service de la terminaison d’appel sur un réseau efficace, le but étant d’éviter de reporter sur le MTR des coûts engendrés par une installation de réseau et/ou une gestion inefficace du service de la terminaison mobile. La circonstance que la part de marché théorique prise en compte pour le modèle des coûts est plus importante que celle de la partie demanderesse n’est a priori pas à son préjudice, alors qu’une part de marché plus importante implique nécessairement une augmentation des terminaisons d’appel et partant des investissements de réseau supérieurs pris en compte.

L’ILR est encore à suivre en ce qu’il a relevé que la partie demanderesse reste en défaut d’établir à suffisance que le modèle de coûts tel qu’il est décrit par les documents versés à cet effet par lui, serait basé sur de fausses prémisses. Dans ce contexte, l’ILR se justifie ainsi valablement en ce qui concerne la non prise en considération des frais de déploiement du réseau 4G qui n’est pas encore utilisé à l’heure actuelle pour transmettre les télécommunications vocales par la technique VoLTE. En effet, les investissements qui doivent être pris en compte se limitent aux vœux de l’article 28, paragraphe (1), point e) de la loi du 27 février 2011 au capital adéquat engagé, de sorte que seuls les investissements strictement liés au service régulé peuvent être pris en considération, en l’occurrence la terminaison d’appel mobile, et ce, qu’en ce qu’ils sont strictement nécessaires pour garantir le service en question de manière efficace.

En ce qui concerne la possibilité d’une rémunération raisonnable du capital adéquat engagé, la partie demanderesse reste également en défaut d’énerver à suffisance les considérations de l’ILR relatives au fait que la prise en compte d’un taux CMPC de 12 % serait suffisante à cet égard.

Il s’ensuit que la partie demanderesse ne justifie pas à suffisance que le MTR fixé en application du modèle pur LRIC serait de nature à violer l’article 28, paragraphe (1), point e) de la loi du 27 février 2011, de sorte que le moyen afférent est à rejeter.

… fait encore plaider que le règlement attaqué serait empreint d’un excès de pouvoir, alors qu’il violerait le principe de la confiance légitime et celui de la proportionnalité, en ce qu’il serait intervenu de manière trop brusque en l’absence de toute nouvelle étude d’impact, respectivement en ce qu’il ne constituerait pas une mesure raisonnable proportionnée à ses objectifs. L’obligation de proportionnalité serait notamment justifiée par le fait que la régulation des prix serait un régime exceptionnel dérogeant au principe de la libre détermination des prix tel qu’il résulterait de la loi modifiée du 23 octobre 2011 relative à la concurrence. Il aurait aussi été retenu par la jurisprudence administrative que le régulateur ne serait pas appelé à agir dans la fixation des remèdes en tant qu’autorité de police de concurrence, mais en tant que régulateur préventif agissant ex ante dont les régulations devraient se réduire au strict minimum. Or, la fixation d’un MTR à 0,97 centimes d’euros contraindrait les opérateurs à réduire de plus de … % la charge de terminaison par rapport au passé.

… rappelle que l’appréciation du caractère proportionnel d’une mesure se ferait en fonction de trois critères cumulatifs à savoir la nécessité de la mesure, la capacité de la mesure à atteindre l’objectif poursuivi et l’absence de solution moins contraignante apte à atteindre l’objectif poursuivi.

En ce qui concerne la nécessité de la mesure de régulation attaquée, … souligne d’abord que les recommandations de la Commission européenne ne seraient pas obligatoires pour les régulateurs nationaux. La demanderesse estime ensuite que le fait d’imposer un tarif pareil sans accorder une période d’adaptation aux opérateurs ne présenterait aucun intérêt et ne répondrait à aucune nécessité.

D’un autre côté, le règlement attaqué ne permettrait pas d’atteindre l’objectif poursuivi, alors qu’il aurait comme effet paradoxal de mener à une augmentation des prix à terme qui participerait à défavoriser les opérateurs du marché luxembourgeois par rapport à ceux des pays limitrophes. Il serait par ailleurs de nature à nuire à la concurrence nationale, alors que le modèle pur LRIC bénéficierait en premier lieu à l’opérateur historique, à savoir l’EPT, en renforçant encore davantage sa position sur le marché par le fait que ses pertes seraient nettement inférieures à celles subies par … qui ne pourrait pas non plus compenser ces pertes, à l’image de l’EPT, par le biais de sa branche de téléphonie fixe qui, selon les estimations du consultant Marpij, serait largement bénéficiaire de la baisse du MTR. … déclare avoir fait, depuis 2014, des pertes plus significatives qu’elle aurait elle-même estimé, sa perte de revenus se chiffrant à … % et son free cash flow décrivant sa capacité à investir étant devenu négatif. … fait ainsi plaider que si elle était incapable de reconstituer les marges perdues par d’autres actions, la situation financière aggravée pourrait l’entraîner dans un cercle vicieux de réduction drastique, de perte de compétivité, perte de parts de marché, perte de chiffre d’affaires et perte de capacité d’investissement. Pour maintenir son EBITDA constant, … estime devoir supprimer …% de sa masse salariale, ce qui aurait des répercussions sur son dynamisme commercial et/ou sur la qualité de son service, selon que ce serait le département marketing et vente ou le département réseau qui en serait affecté, de sorte que ce serait le consommateur luxembourgeois qui risquerait de perdre en raison d’un affaiblissement de l’innovation d’… et/ou d’une baisse de la qualité de ses services.

… fait valoir qu’en raison des offres d’appels illimités vers tous les opérateurs, les appels seraient déjà pour ses clients à tarif marginal nul dans l’essentiel de ses offres et que pour compenser la perte EBITDA, il lui faudrait gagner instantanément … clients représentant … points de part de marché. Le gain de part de marché nécessaire augmenterait à … points si elle envisageait de baisser ses prix de détail de …%. Une telle baisse pourrait par ailleurs aisément être répliquée par l’EPT en raison de la santé financière de cette dernière.

Selon …, tant l’étude faite par BEREC en juillet 2011, que l’avis de son consultant Marpij, démontreraient qu’il n’aurait de toute façon pas de corrélation entre le MTR et le tarif de détail.

Le règlement attaqué ne produirait par ailleurs aucune incitation à l’efficacité, alors qu’un petit opérateur comme … serait par nature efficace.

… fait finalement plaider qu’il y aurait eu une solution moins contraignante que l’imposition brutale d’une baisse significative du MTR, notamment par le mécanisme d’une adaptation progressive dite glide path de trois ans pour permettre aux opérateurs d’adapter les modèles d’affaires et les offres commerciales. Un tel glide path aurait d’ailleurs été préconisé par le régulateur belge, ainsi que par le consultant Marpij.

… ajoute encore dans sa réplique que l’ILR resterait en défaut de convaincre que le résultat du modèle pur LRIC serait approprié et proportionné, alors qu’aucune des trois conditions de l’article 33, paragraphe (1) de la loi ne serait remplie. Ainsi, selon le régulateur belge, la méthode pur LRIC présenterait l’inconvénient de ne pas permettre aux opérateurs de recouvrer leurs coûts conjoints et leurs coûts communs, ce qui entraînerait que les opérateurs seraient contraints de vendre leurs services de terminaison d’appel à perte. De plus, la société Analyses Mason, consultant d’ILR, aurait elle-même, lors d’une conférence en février 2009, indiqué que les erreurs dans les modèles LRIC seraient plus importantes et fréquentes que dans les modèles LRAIC (Long Run Average Incremental Cost). Le régulateur belge aurait également mis en évidence qu’un des problèmes de la méthode pur LRIC serait que ce seraient que les opérateurs mobiles écoulant les plus gros volumes de trafic de terminaison mobile qui auraient les coûts les plus élevés, de sorte qu’il serait clair que les plus gros opérateurs bénéficieraient de meilleures économies d’échelle. Il résulterait par ailleurs des analyses de la société Analyses Mason que les tarifs retenus par les régulateurs européens seraient largement supérieurs aux valeurs modélisées. Il serait par ailleurs difficile de comparer les résultats de différents modèles pur LRIC notamment en ce qui concerne la différence entre les grands et les petits pays, de sorte que la thèse de l’ILR relative à des MTR moins élevés pour les petits pays ne serait pas vérifiée par la comparaison des MTR retenus par les différents régulateurs. … souligne finalement encore une fois l’importance d’un glide path qui aurait évité une chute vertigineuse du MTR de 9 centimes d’euros en une fois, étant donné que les opérateurs organiseraient leur gestion sur la base d’un plan pluriannuel classiquement sur un horizon de cinq ans.

C’est d’abord à bon droit que l’ILR conclut au rejet du moyen relatif à une violation du principe de proportionnalité, en rappelant d’abord que le principe du choix de la méthode pur LRIC a été déjà décidé par le règlement 14/172/ILR, de sorte que toute discussion autour d’une autre méthode de calcul plus adéquate pour calculer les frais de terminaison d’appel manque de pertinence dans le cadre du présent litige. Il est renvoyé pour le surplus à ce qui a été retenu plus en avant à ce sujet.

Force est ensuite au tribunal de renvoyer à ses considérations relatives aux critères de l’article 33, paragraphe (1) de la loi du 27 février 2011 et notamment en ce qui concerne les effets du règlement attaqué sur la concurrence nationale et internationale, ainsi que l’effet sur les consommateurs dans le cadre desquelles il a été retenu que la partie demanderesse n’avait pas été en mesure de suffisamment énerver les explications afférentes de l’ILR.

En ce qui concerne l’argumentation de la partie demanderesse quant à la nécessité d’une intervention sur le marché de gros de la terminaison d’appel, hormis le constat que cette nécessité a déjà été retenue dans les règlements précédents, il échet de relever que l’ILR est à confirmer en ce qu’il rappelle que chaque opérateur dispose d’un monopole sur le marché de la terminaison mobile sur son propre réseau et qu’une régulation est indispensable pour permettre le développement en toute transparence du libre jeu de la concurrence sur les marchés de détail en évitant qu’un opérateur puisse fixer son MTR à un prix rédhibitoire et renforcer ainsi sa position par des prix excessivement bas sur son propre réseau. Il ne peut en effet pas être contesté que les prix facturés pour la terminaison d’appel sont nécessairement répercutés in fine sur les prix au détail. Les craintes émises par la partie demanderesse quant à une hausse possible à moyen terme des prix de détail induite par la diminution du MTR ne sont pas vérifiées et ne suffisent dès lors pas pour invalider le règlement attaqué.

En ce qui concerne d’éventuelles mesures moins contraignantes pour atteindre l’objectif fixé, et notamment l’instauration d’une baisse progressive par le mécanisme d’un glide path, il est d’abord évident que le passage du MTR de 0,98 centimes d’euro tel que fixé par le règlement 14/172/ILR vers l’MTR de 0,97 centimes d’euro résultant du règlement attaqué ne nécessite pas un tel glide path. En ce qui concerne ensuite la nécessité d’avoir dû prévoir un tel glide path pour passer du MTR valable en 2008, s’étant élevé pour … à 10,5 centimes d’euro en moyenne, vers le MTR de 0,98 centimes d’euro, il échet encore une fois de se référer à ce qui a été jugé par la Cour administrative dans son arrêt précité du 17 décembre 2015, à savoir que par l’imposition avec effet immédiat du tarif fixé par le règlement 14/172/ILR, le régulateur n’a pas dépassé sa marge d’appréciation. Il s’ensuit qu’il en est nécessairement de même en ce qui concerne la baisse induite par le règlement 15/191/ILR par rapport à la situation d’avant le règlement 14/172/ILR. Dans ce même contexte, l’ILR est encore à suivre en ce qu’il explique que la détermination d’un MTR fixe au lieu de plafonds pluriannuels est valablement justifié dans le but d’assurer une certaine stabilité et prévisibilité des prix au bénéfice de la partie demanderesse qui, selon ses propres considérations, ne plaide pas pour une baisse supplémentaire du MTR risquant pourtant d’intervenir en considération d’un gain d’efficacité ou d’une nouvelle technologie 4G plus efficiente.

Il ne saurait pas non plus être question d’une violation de la légitime confiance des opérateurs par l’intervention soudaine de l’ILR, étant donné que ce dernier a valablement précisé que la baisse du MTR au Luxembourg avait été inéluctable et prévisible, alors qu’il a été de loin le plus élevé en Europe et qu’il a dû être revu à la baisse depuis longtemps, de sorte que les opérateurs luxembourgeois auraient dû pouvoir anticiper un changement de la situation dont ils ont entretemps largement pu profiter. Par ailleurs, la fixation d’un MTR par le biais d’un modèle pur LRIC avait déjà été annoncée par le règlement 14/172/ILR et les opérateurs ont été impliqués tout au long de l’élaboration du règlement attaqué. En ce qui concerne l’absence d’une étude d’impact spécifique dans le cadre du projet de règlement 15/191/ILR, l’ILR a, à juste titre, souligné qu’une telle étude d’impact n’aurait pas été nécessaire en raison de la diminution de l’MTR de seulement 0,01 centimes d’euros et qu’il a ainsi valablement pu se baser sur ses analyses faites dans le cadre de l’élaboration du règlement 14/172/ILR ayant seul impliqué une baisse conséquente du MTR. Il en va de même en ce qui concerne la suggestion d’… relative à un glide path dans ce contexte.

Il résulte de ces considérations que le recours est à rejeter en tous ses moyens.

… réclame encore l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 3.000 € sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives. Toutefois, au vu de l’issue du litige, cette demande est à rejeter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, déclare le recours non justifié et en déboute ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure sollicitée par la partie demanderesse ;

condamne la partie demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par :

Carlo Schockweiler, premier vice-président, Olivier Poos, juge, Michèle Stoffel, juge et lu à l’audience publique du 13 avril 2016 par le premier vice-président, en présence du greffier Marc Warken.

s. Marc Warken s. Carlo Schockweiler Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 13/04/2016 Le Greffier du Tribunal administratif 32


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 36460
Date de la décision : 13/04/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2016-04-13;36460 ?

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