Tribunal administratif Numéro 37744 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er avril 2016 2e chambre Audience publique du 11 avril 2016 Recours formé par Monsieur …, Findel contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.8.2008)
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 37744 du rôle et déposée le 1er avril 2016 au greffe du tribunal administratif par Maître Philippe Stroesser, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né le … à … (Sud-Soudan), et être de nationalité sud-soudanaise, actuellement retenu au Centre de rétention au Findel, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d'une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 10 mars 2016 ordonnant la prorogation de son placement au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de ladite décision ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 4 avril 2016 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Denise Parisi, en remplacement de Maître Philippe Stroesser, et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Guillou-Jacques en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 11 avril 2016.
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En date du 3 novembre 2014, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, ci-après désignée par « la loi du 5 mai 2006 ».
Suite à une demande des autorités luxembourgeoises du 26 novembre 2014, les autorités espagnoles acceptèrent la prise en charge de Monsieur … le 15 décembre 2014 en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, dénommé ci-après « le règlement Dublin III ».
Par une décision du 26 mars 2015, notifiée à l’intéressé en mains propres le 20 avril 2015, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après dénommé le « ministre », informa Monsieur … que le Grand-Duché de Luxembourg n’était pas compétent pour examiner sa demande de protection internationale, en se référant aux dispositions de l’article 15 de la loi du 5 mai 2006 et à celles de l’article 13, paragraphe 1, du règlement Dublin III, au motif que ce serait le Royaume d’Espagne qui serait responsable du traitement de sa demande d’asile.
Dans la même décision, le ministre annonça à Monsieur … que son transfert vers l’Espagne serait organisé dans les meilleurs délais.
Par arrêté ministériel du 20 avril 2015, notifié en mains propres le même jour, le ministre ordonna la rétention administrative de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée maximale de trois mois à partir de la notification de l’arrêté en question sur le fondement de l’article 28, paragraphe 2, du règlement Dublin III et de l’article 10 de la loi du 5 mai 2006.
Monsieur … fut éloigné vers l’Espagne le 11 mai 2015.
Le 11 juillet 2015, il fit l’objet d’un contrôle d’identité sur le territoire luxembourgeois au cours duquel il se prévalut d’une autorisation de séjour espagnole falsifiée.
Par jugement du 17 décembre 2015 du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, Monsieur … fut condamné à une peine d’emprisonnement de 3 mois, assortie d’un sursis intégral, pour avoir, en violation de l’article 199 du Code pénal, pris un nom et un prénom supposés dans un papier de légitimation falsifié relevant de la compétence d’une autorité publique étrangère, plus particulièrement pour avoir pris les noms et prénoms supposés de « … », né le …, dans une autorisation de séjour espagnole falsifiée.
Par arrêté du 17 décembre 2015, notifié à l’intéressé en mains propres le même jour, le ministre constata que le séjour de Monsieur … sur le territoire luxembourgeois était irrégulier, lui ordonna de quitter le territoire sans délai et prononça une interdiction d’entrer sur le territoire luxembourgeois d’une durée de trois ans à son encontre, sur le fondement des articles 100 et 109 à 115 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après désignée par « la loi du 29 août 2008 », et après avoir constaté que l’intéressé n’était pas en possession d’un passeport, respectivement d’un visa en cours de validité, ni d’une autorisation de séjour valable pour une durée de plus de trois mois, ni d’une autorisation de travail et qu’il existait un risque de fuite dans son chef.
Par un deuxième arrêté pris et notifié le même jour, le ministre ordonna le placement en rétention de Monsieur … pour une durée d’un mois à partir de la notification de la décision en question, sur base des motifs et considérations suivants :
« (…) Vu les articles 111, 120 à 123 et 125 (1) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration ;
Vu la loi du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;
Vu ma décision d’incompétence du 26 mars 2015 ;
Vu ma décision de retour du 17 décembre 2015 comportant une interdiction d’entrée sur le territoire de 3 ans ;
Attendu que l’intéressé est démuni de tout document d’identité et de voyage valable ;
Attendu qu’au vu de la situation particulière de l’intéressé, il n’existe pas de mesure suffisante, mais moins coercitive qu’une mesure de placement alors que les conditions d’une assignation à domicile conformément à l’article 125 (1) ne sont pas remplies ;
Attendu qu’il existe un risque de fuite dans le chef de l’intéressé ;
Considérant que l’intéressé a déjà été éloigné en date du 11 mai 2015 vers l’Espagne en vertu du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;
-
qu’il est revenu au pays malgré ma décision d’incompétence du 26 mars 2015 ;
-
qu’une demande de reprise en charge en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 sera adressée aux autorités espagnoles dans les meilleurs délais ;
Considérant que les démarches nécessaires en vue de l’éloignement de l’intéressé seront engagées dans les plus brefs délais ;
Considérant que l’exécution de la mesure d’éloignement est subordonnée au résultat de ces démarches ; (…) ».
Par arrêtés des 14 janvier et 10 février 2016, le ministre prorogea, chaque fois pour une durée d’un mois à compter de la notification de l’arrêté en question, le placement en rétention de Monsieur ….
Par jugement du tribunal administratif du 15 février 2016, inscrit sous le numéro 37500 du rôle, Monsieur … fut débouté de son recours contentieux introduit le 8 février 2016 à l’encontre de l’arrêté ministériel, précité, du 14 janvier 2016.
Par arrêté du 10 mars 2016, le ministre prorogea le placement en rétention de Monsieur … pour une nouvelle durée d’un mois à compter de la notification de l’arrêté en question. Ledit arrêté, notifié à l’intéressé le lendemain, est fondé sur les considérations et les motifs suivants :
« (…) Vu les articles 111 et 120 à 123 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration ;
Vu la loi modifiée du 28 mai 2009 concernant le Centre de rétention ;
Vu mes arrêtés des 17 décembre 2015, notifié le même jour, (…) 14 janvier 2016, notifié en date du 15 janvier 2016 et 10 février 2016, notifié en date du 11 février 2016, décidant de soumettre l’intéressé à une mesure de placement ;
Attendu que les motifs à la base de la mesure de placement du 17 décembre 2015 subsistent dans le chef de l’intéressé ;
Considérant que l’intéressé a déjà été éloigné en date du 11 mai 2015 vers l’Espagne en vertu du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;
Considérant que l’intéressé se trouve de nouveau sur le territoire luxembourgeois ;
Considérant que les démarches en vue de l’éloignement ont été engagées en date du 14 janvier 2016 ;
Considérant que toutes les diligences en vue de l’identification de l’intéressé afin de permettre son éloignement ont été entreprises auprès des autorités compétentes ;
Considérant que l’intéressé a été présenté aux autorités sud-soudanaises en date du 19 février 2016 ;
Considérant que l’intéressé a été soumis à un test linguistique en date du 22 février 2016 :
- qu’en attendant le résultat de ce test et les démarches qui en découleront, Considérant que l’exécution de la mesure d’éloignement est subordonnée au résultat de ces démarches ; (…) ».
Par jugement du tribunal administratif du 17 mars 2016, inscrit sous le numéro 37616 du rôle, Monsieur … fut débouté de son recours contentieux introduit le 7 mars 2016 à l’encontre de l’arrêté ministériel, précité, du 10 février 2016.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 1er avril 2016, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de l’arrêté ministériel, précité, du 10 mars 2016.
Etant donné que l'article 123 (1) de la loi du 29 août 2008 institue un recours de pleine juridiction contre une décision de rétention administrative, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal, qui est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.
A l’appui de son recours, le demandeur expose les faits et rétroactes à la base de la décision déférée.
En droit, il soutient, en substance, que le maintien de son placement en rétention ne serait pas justifié, au motif qu’il n’existerait aucune chance raisonnable de croire que son éloignement puisse être mené à bien. Dans ce contexte, il donne à considérer, d’une part, que le 24 février 2016, l’ambassade du Sud-Soudan à Bruxelles aurait informé les autorités luxembourgeoises qu’il ne serait pas un ressortissant sud-soudanais et, d’autre part, que les résultats du test linguistique auquel il aurait été soumis le 22 février 2016 « (…) ne parviendr[aient] pas au [m]inistre dans les prochains jours, voire semaines (…) », même si, dans un courriel du 9 mars 2016, le « Bundesamt für Migration und Flüchtlinge » allemand, ci-après dénommé « BAMF », chargé par les autorités luxembourgeoises de l’analyse de son audition réalisée dans le cadre dudit test linguistique, avait confirmé que son dossier serait traité prioritairement, le demandeur insistant encore sur le fait qu’il serait placé en rétention depuis quatre mois, « (…) dont un mois depuis le test linguistique (…) ».
Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours.
Il y a lieu de rappeler qu’en vertu de l’article 120 (1) de la loi du 29 août 2008 : « Afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement en application des articles 111, 116 à 118 ou d’une demande de transit par voie aérienne en vertu de l’article 127 ou lorsque le maintien en zone d’attente dépasse la durée de quarante-huit heures prévue à l’article 119, l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une structure fermée, à moins que d’autres mesures moins coercitives telles que prévues à l’article 125, paragraphe (1), ne puissent être efficacement appliquées. Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. (…) » et de l’article 120 (3) de la même loi : « (…) La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Elle peut être reconduite par le ministre à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois si les conditions énoncées au paragraphe (1) qui précède sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien. Si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de la rétention peut être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire (…) ».
L’article 120 (1) de la loi du 29 août 2008 permet ainsi au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite en premier lieu l’identification de l’intéressé et la mise à la disposition de documents d’identité et de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères en vue de l’obtention d’un accord de reprise de l’intéressé. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour la durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.
En vertu de l’article 120 (3) de la même loi, le maintien de la rétention est cependant conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et soit exécuté avec toute la diligence requise, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter l’éloignement dans les meilleurs délais.
Une décision de prorogation est partant soumise à la réunion de quatre conditions, à savoir que les conditions ayant justifié la décision de rétention initiale soient encore données, que le dispositif d’éloignement soit toujours en cours, que celui-ci soit toujours poursuivi avec la diligence requise et qu’il y ait des chances raisonnables de croire que l’éloignement en question puisse être « mené à bien ».
En l’espèce, si le demandeur affirme certes de manière générale que « (…) les quatre conditions cumulatives énoncées par la jurisprudence [du tribunal administratif] ne [seraient] pas réunies (…) », seule la quatrième de ces conditions fait l’objet de contestations circonstanciées à travers les développements figurant dans la requête introductive d'i nstance, de sorte que le tribunal limitera son analyse à cette seule condition, étant rappelé, pour le surplus, qu’il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence de la partie demanderesse et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de ses conclusions et plus spécifiquement les moyens relatifs aux autres conditions.
En ce qui concerne les démarches entreprises par le ministre pour organiser l’éloignement du demandeur, démarches dont les chances de succès sont critiquées par ce dernier, il se dégage du dossier administratif et, plus particulièrement, du jugement, précité, du tribunal administratif du 15 février 2016 que le ministre a contacté dès le 18 décembre 2015, c’est-à-dire le lendemain de la notification du premier arrêté de placement en rétention, les autorités espagnoles en vue d’une reprise du demandeur sur base des dispositions du règlement Dublin III. Suite à la réception du refus de réadmission du 29 décembre 2015 de la part des autorités espagnoles, refus confirmé par courrier de ces mêmes autorités du 4 janvier 2016, les autorités luxembourgeoises ont adressé le 14 janvier 2016 un courrier à l’ambassadeur sud-soudanais à Bruxelles, ensemble avec une photo et une copie des empreintes digitales de Monsieur …, en vue de son identification. Par courrier du 3 février 2016, l’ambassade de la République du Sud-Soudan a proposé deux dates aux autorités luxembourgeoises afin de procéder à un entretien avec le demandeur, à savoir les 18 et 19 février 2016. Cet entretien a finalement eu lieu le 19 février 2016, ainsi que cela se dégage du rapport rédigé à cette occasion par l’agent ministériel en charge du dossier du demandeur, aux termes duquel « (…) L’intéressé a été présenté en date d’aujourd’hui auprès des agents de l’ambassade afin de déterminer s’il pourrait être originaire du Sud Soudan. L’intéressé a expliqué son voyage depuis son départ jusqu’à son arrivée au Luxembourg. (…) Il a confirmé [qu’il] ne parle pas la langue arabe, juste quelques mots qu’il aurait appri[s] au Maroc pour se débrouiller. A noter aussi que l’intéressé ne parle aucun dialect[e] du pays, ni l’arabe qui est pourtant très répandu au Sud-Soudan et qu’il parle très bien l’anglais, plu(…)tôt « pidgin ». Un test linguistique est prévu pour le 22 février prochain. (…) ». Le 22 février 2016, le demandeur a été auditionné dans le cadre d’un test linguistique, cette audition ayant fait l’objet d’un enregistrement, qui a été transmis le même jour à la section « Sprach-
und Textanalyse » du BAMF, aux fins d’analyse. Par courrier du 24 février 2016, l’ambassade de la République du Sud-Soudan a informé les autorités luxembourgeoises que le demandeur ne serait pas un ressortissant sud-soudanais, pour les raisons suivantes : « (…) 1. Mr. … alleges to be a South Sudanese National, but he does not have any contact with his relatives in South Sudan so that the Embassy can verify his identity. 2. Mr. … claims to have left South Sudan between 2009 and 2010, probably at the age of 15 years (…), while unfortunately he does not speak any local languages. (…) ». Suite à la demande des autorités luxembourgeoises du 9 mars 2016 de traiter le dossier du demandeur en priorité, compte tenu de l’urgence attachée à son identification, le BAMF s’adressa, par courrier électronique du même jour, auxdites autorités en ces termes : « (…) diese Aufnahme befindet sich seit Donnerstag, 03.03.2016, bei unserem Gutachter. Gerne werden wir ihn kontaktieren und auf die Dringlichkeit des Falles hinweisen. Sobald das Gutachten vorliegt, erhalten Sie dieses im vorab per E-Mail (…) ». Il se dégage du rapport d’expertise linguistique du BAMF du 10 mars 2016, réceptionné par les autorités luxembourgeoises le 12 mars 2016, selon les explications du délégué du gouvernement, que « (…) Die durchgeführte Analyse ermöglicht eine sprachliche Zuordnung des Ausländers mit Sicherheit zu folgender Herkunftsregion :
Westafrika [und mit] hoher Wahrscheinlichkeit zu folgendem Herkunftsland : Nigeria. Die Analyse schließt eine sprachliche Zuordnung des Ausländers aus zu folgendem Herkunftsland: Südsudan (…) ». Par courrier du 21 mars 2016, auquel étaient jointes une photo et une copie des empreintes digitales de l’intéressé, les autorités luxembourgeoises ont soumis à l’ambassade du Nigéria à Bruxelles une demande d’identification de Monsieur …. Il ressort d’une note au dossier administratif du 24 mars 2016, qu’à cette date, les autorités luxembourgeoises se sont renseignées par voie téléphonique auprès de ladite ambassade sur la question de savoir si Monsieur … avait fait l’objet d’une audition lors de la venue au Centre de rétention d’un représentant de la susdite ambassade en date du 23 mars 2016 en vue de l’identification d’autres personnes faisant l’objet d’une mesure de placement en rétention, ce qui n’a pas pu être confirmé. Par ailleurs, il ressort d’une note au dossier administratif du 8 avril 2016 qu’à cette date, la demande d’identification de Monsieur … a été renvoyée par télécopie à l’ambassade du Nigéria et que les services de celles-ci ont annoncé aux autorités luxembourgeoises leur intention de leur communiquer dans un bref délai une date en vue de l’audition de l’intéressé.
S’il se dégage de ces éléments que malgré les démarches entreprises à cette fin par le ministre, l’identification du demandeur, en vue de son éloignement, n’a pas encore abouti, cette seule circonstance est insuffisante pour conclure à l’absence de chances raisonnables de croire que ledit éloignement puisse être mené à bien, étant donné que l’autorité ministérielle est actuellement dans l’attente de la fixation, par les autorités nigérianes, d’une date à laquelle le demandeur sera auditionné en vue de son identification, qui permettrait aux autorités luxembourgeoises d’entreprendre les démarches nécessaires auprès des autorités compétentes en vue de l’organisation matérielle de son éloignement. Dans ce contexte, le tribunal rappelle encore qu’il se dégage du courrier, précité, du 24 février 2016 des autorités sud-soudanaises et du résultat du susdit test linguistique que, contrairement à ce qu’il prétend, le demandeur n’est pas un ressortissant sud-soudanais. En induisant ainsi les autorités luxembourgeoises en erreur quant à son identité et en refusant de révéler son identité réelle, Monsieur … est lui-même responsable des difficultés rencontrées par lesdites autorités en vue de son identification et il ne saurait, de ce fait, valablement se prévaloir du fait que son identité n’a toujours pas pu être établie pour conclure à l’absence de chances raisonnables de croire que son éloignement puisse être mené à bien. Le moyen afférent du demandeur est partant à rejeter pour ne pas être fondé.
Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’en l’état actuel du dossier et compte tenu des moyens figurant dans la requête introductive d’instance, le tribunal ne saurait utilement mettre en cause ni la légalité ni le bien-fondé de la décision déférée. Il s’ensuit que le recours sous analyse est à rejeter comme non fondé.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
reçoit le recours principal en réformation en la forme ;
au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;
dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par :
Françoise Eberhard, vice-président, Hélène Steichen, juge, Daniel Weber, juge, et lu à l’audience publique du 11 avril 2016 à 17:15 heures par le vice-président, en présence du greffier Goreti Pinto.
s. Goreti Pinto s. Françoise Eberhard Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 12 avril 2016 Le greffier du tribunal administratif