Tribunal administratif N° 34567 du rôle du Grand-Duché de Luxem… Inscrit le 21 mai 2014 1re chambre Audience publique du 17 février 2016 Recours formé par Monsieur …et consorts, …, contre une décision du …mestre de la commune de Strassen, en présence de Monsieur …, …, en matière de permis de construire
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 34567 du rôle et déposée le 21 mai 2014 au greffe du tribunal administratif par Maître Roland Assa, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxem…, au nom de Monsieur …et de Madame …, les deux demeurant à L-…, et de la société à responsabilité limitée …, établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son gérant actuellement en fonction, inscrite au registre de Commerce et des Sociétés sous le n°B…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une autorisation de construire n° 14/14 délivrée en date du 11 avril 2014 par le …mestre de la commune de Strassen à Monsieur …, demeurant à L-…, et portant sur la construction de deux résidences dénommées … et …, sises respectivement aux numéros … à …, parcelle …, section B dite « … », au lieu-dit « …» ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Geoffrey Gallé, demeurant à Luxembourg, portant signification de ladite requête à Monsieur …, demeurant à L-…, et à l’administration communale de la commune de Strassen, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, établie à L-8041 Strassen, 1, place Grande-Duchesse Charlotte ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif en date du 30 mai 2014 par Maître Christian Point, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de la commune de Strassen ;
Vu le mémoire en réponse, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 16 septembre 2014 par Maître Anne-Laure Jabin au nom de de Monsieur …, et notifié à Maître Roland Assa et à Maître Christian Point en date du même jour ;
Vu la constitution de nouvel d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif en date du 22 septembre 2014 par la société anonyme Arendt & Medernach, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, en remplacement de Maître Christian Point ;
Vu le mémoire en réponse, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 21 octobre 2014 par la société anonyme Arendt & Medernach au nom de l’administration communale de Strassen, et notifié à Maître Anne-Laure Jabin et à Maître Roland Assa en date du même jour ;
1Vu la requête en prorogation du délai pour notifier le mémoire en réplique déposée au greffe du tribunal administratif en date du 27 octobre 2014 par Maître Roland Assa ;
Vu l’ordonnance du tribunal administratif du 5 novembre 2014 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 mars 2015 par Maître Roland Assa au nom de Monsieur …et consorts et notifié à Maître Anne-Laure Jabin et à la société Arendt & Medernach en date du même jour ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 avril 2015 par la société anonyme Arendt & Medernach au nom de l’administration communale de Strassen et notifié à Maître Anne-Laure Jabin et à Maître Roland Assa en date du même jour ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 13 avril 2015 par Maître Anne-Laure Jabin au nom de Monsieur … et notifié à Maître Roland Assa et à la société Arendt & Medernach en date du même jour ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jonathan Michel, en remplacement de Maître Roland Assa, la société anonyme Arendt & Medernach, représentée par Maître Martial Barbian, et Maître Anne-Laure Jabin en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 18 janvier 2016.
___________________________________________________________________________
Le 21 juin 2010, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Strassen, dénommé ci-après le « collège échevinal », avisa favorablement un projet de plan d’aménagement particulier portant sur des fonds sis au lieu-dit « … », tel qu’établi par la société anonyme …, pour le compte de l’administration communale de Strassen en vue de l’exécution du plan directeur …, approuvé par le conseil communal de Strassen en date du 7 décembre 2009, ainsi que d’une modification ponctuelle du plan d’aménagement général de la commune de Strassen, telle qu’approuvée à titre définitif par le conseil communal de Strassen en date du 7 décembre 2009 et approuvée par le ministre de l’Intérieur et à la Grande Région, ci-après désigné par le « ministre », le 17 mars 2010.
Par délibération du 6 décembre 2010, le conseil communal de la commune de Strassen adopta provisoirement, à l’unanimité des voix, le projet d’aménagement particulier portant sur les fonds sis à Strassen, commune de Strassen, au lieu-dit « … », présenté par le collège échevinal pour le compte de l’administration communale de Strassen, dénommé ci-après « le PAP ».
Par courrier du 17 décembre 2010, Monsieur …et son épouse, Madame …, ainsi que la société à responsabilité limitée …, ci-après dénommés les « consorts … », informèrent le collège échevinal que des terrains leur appartenant seraient intégrés « dans un projet d’aménagement privé sans que leur avis et accord n’aient jamais été demandés ». Par courrier de leur mandataire du 1er février 2011, les consorts … introduisirent une réclamation auprès du collège des bourgmestre et échevins de la commune de Strassen contre le PAP.
2Le 28 février 2011, le conseil communal de Strassen adopta, à l’unanimité des voix, et à titre définitif, le PAP.
Le 31 mars 2011, les consorts … saisirent le ministre d’une réclamation contre ladite décision d’adoption définitive du PAP par le conseil communal de Strassen.
Le 14 juillet 2011, le ministre rejeta la réclamation des consorts … et approuva la décision d’adoption définitive du PAP.
Faisant suite à un recours des consorts … tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation « 1) d’une décision qui aurait été prise par le collège échevinal de Strassen et portant sur l’intégration de leur propriété dans le PAP, 2) d’une décision qui aurait été prise par le collège échevinal « d’engager sous forme de projet communal la procédure d’adoption du [PAP] », 3) d’une « décision intervenue sous forme d’avis le 15 octobre 2010 » par le ministre, 4) de la décision d’approbation provisoire du PAP par le conseil communal de Strassen en date du 6 décembre 2010, 5) de la décision d’approbation définitive du PAP par le conseil communal de Strassen en date du 28 février 2011 et 6) de la décision d’approbation prise par le ministre en date du 14 juillet 2011 et portant sur l’adoption définitive du PAP par le conseil communal de Strassen » et à un jugement interlocutoire du 6 mai 2013, le tribunal administratif, par jugement du 5 mai 2014, annula les décisions d’adoption provisoire et définitive des 6 décembre 2010 et 28 février 2011 du PAP, de même que la décision ministérielle d’approbation du 14 juillet 2011, tout en ordonnant l’effet suspensif du recours introductif d’instance en cause pendant le délai et l’instance d’appel.
Par un arrêt du 12 février 2015, inscrit sous les n° 34664C, 34671C et 34683C du rôle, la Cour administrative réforma le jugement du 5 mai 2014 et annula les délibérations communales d’adoption, respectivement provisoire et définitive du PAP des 6 décembre 2010 et 28 février 2011, ainsi que la décision ministérielle d’approbation du 14 juillet 2011 dans la mesure des huit lots IV.1b.02, IV.1b.03, IV.1b.04, IV.5b.02, IV.5b.05, IV.5b.06, IV.5b.09 et IV.5b.10 de la zone HAB 1, ainsi que des deux lots IV.2 et IV.6 de la zone HAB 2, du chef des dépassements de COS et CMU retenus dans ledit arrêt, renvoya l’affaire dans cette mesure devant le conseil communal de la commune de Strassen, et confirma le jugement du 5 mai 2014 pour le surplus.
Par requête déposée le 21 mai 2014 au greffe du tribunal administratif, inscrite sous le numéro 34567 du rôle, les consorts … ont introduit un recours en réformation, sinon en annulation d’une autorisation de construire que le …mestre de la commune de Strassen, ci-
après dénommé le « bourgmestre », a délivrée le 11 avril 2014, sous le numéro 14/14, à Monsieur …, demeurant à L-…, pour la réalisation de « deux nouvelles résidences dénommées … et …, sises respectivement aux numéros … et …à …, parcelle … (erronément renseignée comme ….) section B dite « des Bois », au lieu-dit « …», sans préjudice quant aux désignations et dates exactes ».
Par requête séparée déposée le même jour, inscrite sous le numéro 34568 du rôle, ils ont encore demandé à voir prononcer un sursis à exécution de ladite décision du bourgmestre en attendant la solution de leur recours au fond.
Par une ordonnance du 30 mai 2014, le président du tribunal administratif débouta les consorts … de leur requête en sursis à exécution.
3 Aucune disposition légale ne prévoit de recours au fond en matière d’autorisation de construire, de sorte que le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal, tel que cela a été relevé à juste titre par l’administration communale de Strassen et par Monsieur ….
En revanche, le tribunal est compétent pour connaître du recours subsidiaire en annulation.
S’agissant de la recevabilité du recours subsidiaire en annulation, les consorts … justifient leur intérêt à agir par la considération que leur intérêt découlerait de l’annulation de l’intégralité du PAP, cela afin de garantir que les effets du jugement précité du tribunal administratif du 5 mai 2014 soient pleinement respectés.
Ils auraient encore un intérêt renforcé à agir en leurs qualités respectives de propriétaires et locataire de la parcelle portant le numéro cadastral …, puisque le projet entrepris serait situé à une distance d’à peine 70 mètres de leur propriété, en pleine visibilité directe, de sorte qu’ils seraient à considérer comme voisins directs et immédiatement concernés par le projet et par l’autorisation litigieuse.
A cet égard, ils relèvent encore une erreur matérielle contenue dans l’autorisation de construire litigieuse puisqu’en réalité serait visée la parcelle portant le numéro … et non celle portant le numéro ….
L’administration communale de Strassen en revanche conclut à l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des consorts ….
A cet égard, elle fait valoir que le simple constat de l’annulation des décisions portant adoption du PAP par le tribunal administratif ne conférerait pas un intérêt suffisant aux consorts … pour attaquer l’autorisation de construire déférée, mais que ceux-ci devraient, par ailleurs, démontrer que la construction autorisée est de nature à affecter négativement et concrètement leur situation.
De prime abord, l’administration communale de Strassen relève que les résidences autorisées ne seraient pas destinées à être implantées sur la parcelle n° … des consorts … et actuellement exploitée en tant que parking de l’hôtel-restaurant ….
En se référant à la jurisprudence des juridictions administratives, l’administration communale de Strassen fait valoir qu’un voisin ne pourrait se prévaloir d’un intérêt à agir à l’encontre d’un permis de construire qu’à la condition de démontrer que l’exécution dudit permis est de nature à aggraver concrètement sa situation de voisin, tout en soulignant que les consorts … ne pourraient être considérés comme voisins directs des constructions projetées ni même comme des seconds voisins dont le champ de vision direct risquerait d’être obstruée par les construction litigieuses, dans la mesure où leur parcelle serait séparée des constructions autorisées non seulement par une place publique destinée à être entourée de plus d’une vingtaine d’arbres, mais encore par la résidence à construire sur le lot n° … de la partie graphique du PAP. S’y ajouterait encore que les nouvelles résidences à ériger seraient distantes de plus d’une centaine de mètres de l’hôtel … et que les parties requérantes n’auraient aucune vue immédiate et directe sur les constructions à ériger.
4En renvoyant à l’ordonnance précitée du président du tribunal administratif du 30 mai 2014, l’administration communale de Strassen affirme qu’un écran de verdure, implanté sur les propres parcelles des parties requérantes et non incluses dans le PAP et partant non destiné à disparaître par l’effet de l’exécution du PAP, empêcherait toute vue directe ou immédiate sur les constructions projetées. Cette situation serait encore renforcée par les arbres destinés à être implantés autour de la place publique projetée.
S’agissant d’une éventuelle vue directe sur les nouvelles résidences à partir du seul parking appartenant aux parties requérantes, l’administration communale de Strassen met en avant le fait que celle-ci ne serait pas de nature à entraîner une aggravation concrète de la situation des consorts … puisque le parking serait utilisé par les clients de l’hôtel-restaurant et que les résidences n’impliqueraient aucune gêne pour ceux-ci, ni a fortiori pour les parties requérantes.
Toujours en renvoyant à l’ordonnance du président du tribunal administratif du 30 mai 2014 précitée, l’administration communale de Strassen souligne que les consorts … n’auraient introduit aucun recours contre les autorisations délivrées en vue de la réalisation des travaux d’infrastructures du PAP, respectivement contre les quatre autres autorisations de construire délivrées précédemment par le bourgmestre et portant sur la construction de 14 résidences comportant au total 126 logements, ni n’auraient-ils introduit une demande tendant au sursis à l’exécution de ces diverses autorisations de construire. Dès lors, à supposer que les consorts … subiraient un quelconque préjudice du fait de la construction des résidences autorisées aux termes de la décision déférée, leur inertie aurait contribué à causer le préjudice allégué.
Pour le surplus, les consorts … ne pourraient prétendre que leur situation serait négativement affectée par la délivrance de l’autorisation de construire litigieuse puisqu’ils auraient laissé construire, sans formuler une réclamation, d’autres résidences dans le quartier en question ainsi que l’ensemble des équipements d’infrastructure de lotissement.
Enfin, l’administration communale de Strassen souligne que, dans le cadre du recours introduit contre les décisions d’approbation du PAP, les consorts … auraient justifié leur intérêt à agir en arguant que le reclassement de leur parcelle n° … dans le périmètre du PAP aurait pour conséquence une suppression du parking susceptible de mettre en péril l’exploitation de l’hôtel-restaurant. Elle relève, en renvoyant pour le surplus à ses explications fournies dans son mémoire en réplique dans le cadre de l’instance d’appel contre le jugement du 5 mai 2014, que la construction des deux résidences autorisées aux termes de l’autorisation de construire critiquée n’aurait aucune incidence préjudiciable sur la parcelle appartenant aux parties requérantes et partant sur le parking se situant à plus de 70 mètres de la parcelle devant accueillir les nouvelles résidences.
En guise de conclusion, l’administration communale de Strassen estime qu’au regard des craintes exprimées par les consorts … pour justifier leur intérêt à agir contre le PAP, la construction des résidences faisant l’objet de l’autorisation déférée n’aurait aucune incidence préjudiciable sur l’exploitation de leur parking.
Monsieur …, pour sa part, conclut également à l’irrecevabilité du recours pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des consorts …, en faisant état de ce qu’un écran de verdure séparerait l’hôtel … des résidences en cause, de sorte qu’il serait impossible de voir, à partir de la construction litigieuse, ne serait-ce qu’une partie de l’hôtel, à l’exception de l’antenne fixée sur le toit. Cet écran de verdure serait composé d’arbres non implantés sur une des parcelles 5faisant partie du PAP, de sorte que cet écran de verdure ne serait pas détruit en exécution du PAP.
De même, la distance la plus courte entre l’hôtel et la parcelle devant accueillir les deux résidences litigieuses serait de 110,5 mètres et, par ailleurs, une place publique séparerait les parcelles litigieuses et celles de l’hôtel.
En se référant aux conclusions du président du tribunal administratif dans l’ordonnance de référé précitée, Monsieur … conclut que les consorts … n’auraient aucun intérêt à agir, cela en raison de leur situation de voisins éloignés et en l’absence de vue directe sur la résidence.
Monsieur … invoque encore, à l’instar de l’administration communale de Strassen, que l’autorisation de construire litigieuse ne serait pas la première à avoir été délivrée en exécution du PAP, mais que d’autres résidences avec une vue plus directe mais tout aussi éloignées seraient en voie d’achèvement du gros œuvre et que de même l’intégralité des infrastructures du PAP auraient d’ores et déjà été réalisées, sans que les consorts … n’aient protesté à ce titre.
Par ailleurs, dans le cadre de leur recours contre les décisions d’approbation du PAP, les consorts … se seraient plaints de ce que leur parking temporaire serait inclus dans un lot dans lequel ils seraient en indivision, lot sur lequel une résidence serait prévue, en faisant valoir qu’ils préféreraient construire leur propre résidence sans être en indivision, ce qui signifierait que, par principe, ils seraient d’accord avec une construction sur leur parking, construction qui serait, elle, directement dans le champ de vision de l’hôtel ce qui nierait davantage l’existence d’un préjudice susceptible de découler de l’autorisation de bâtir querellée.
Dans leur mémoire en réplique, les consorts … font valoir que par l’arrêt du 12 février 2015 (numéros 34667C, 34671C et 34683 du rôle), la Cour administrative leur aurait reconnu un intérêt à agir contre le PAP, de sorte qu’ils estiment que leur intérêt à agir ne pourrait pas non plus être remis en cause dans le cadre de la présente instance, puisque celle-ci porterait précisément sur les actes, certes distincts, mais découlant néanmoins directement d’un acte réglementaire supérieur ayant été mis à néant par la Cour administrative.
Ils estiment que si le contraire était retenu, cette conclusion viderait de son sens l’utilité d’agir contre ce type d’acte réglementaire puisque l’intérêt à agir contre les actes individuels serait variable en fonction de la situation particulière du requérant. Une telle conception impliquerait que les actes individuels découlant de l’acte réglementaire retenu comme illégal, ne serait pas susceptible d’un contrôle judiciaire du fait de l’intérêt à agir variable des éventuels requérants.
Comme ils auraient contesté en justice tant l’acte réglementaire que l’autorisation de construire litigieuse, un raisonnement consistant à leur méconnaître un intérêt à agir se heurterait aux règles supérieures d’un Etat de droit, telles que le principe d’égalité devant la loi et de l’efficacité de la justice.
Pour le surplus et à titre subsidiaire, les consorts … renvoient aux photos produites par eux aux débats qui étayeraient qu’ils auraient une vue directe depuis leur exploitation 6hôtelière, avec une distance de moins de 100 mètres avec vue directe et avec une distance d’à peine 70 mètres entre les limites de propriété.
Ils font encore valoir que la jurisprudence de la Cour administrative se contenterait d’une proximité immédiate afin de retenir un intérêt à agir, sans exiger une vue directe. Ils font par ailleurs état d’une aggravation substantielle de la fluidité du trafic sur la route d’Arlon qui serait d’ores et déjà saturée, à laquelle s’ajouterait le trafic inhérent à la construction de plusieurs dizaines de résidences dont les deux constructions en cause, y compris encore une ligne de tramway projetée.
Les deux résidences présenteraient un CMU dépassant la norme autorisée, de sorte que les logements supplémentaires auraient irrégulièrement été autorisés du fait d’une augmentation irrégulière de la surface brute constructible, soit 3.276 m2 au lieu de 2.952 m2 autorisés en respectant un CMU égal à 1, impliquant un « charroi » accru et une dégradation de la vue.
En guise de conclusion, ils estiment qu’ils justifieraient d’un intérêt légitime, déjà reconnu par la Cour administrative, pour agir contre l’autorisation de construire litigieuse et cela en leurs qualités respectives de propriétaires et locataire de la parcelle portant le numéro cadastral ….
Monsieur …, dans son mémoire en duplique, s’oppose à l’argumentation des consorts … suivant laquelle ils auraient un intérêt à agir contre l’autorisation de construire du seul fait qu’ils avaient un intérêt à agir contre le PAP, en soulignant que l’intérêt à agir se mesurerait à la satisfaction que la prétention est censée procurer à une partie. Or, les consorts … n’obtiendraient aucune satisfaction de l’annulation de l’autorisation de construire litigieuse comme n’étant pas voisins directs de la parcelle accueillant les deux résidences querellées et n’ayant aucune vue directe sur ces résidences. Il ajoute que les photos versées par les consorts … seraient dénuées de pertinence puisqu’il serait manifeste que celles-ci, à l’exception de la première page, auraient été prises aux abords directs du chantier puisqu’on en verrait les barrières. En revanche, une photo qui semblerait avoir été prise à partir du parking de l’hôtel-
restaurant … serait tout à fait révélatrice de la situation puisque le seul élément des deux résidences réellement visible serait la grue, qui de l’évidence disparaîtrait une fois la construction achevée, alors que les résidences seraient dissimulées derrière les arbres et cela même pendant la période hivernale tel que cela ressortirait des photos versées aux débats. Elle ajoute que les photos ne renseigneraient par ailleurs qu’une situation provisoire, étant donné qu’entre le parking et l’hôtel …, d’une part, et les deux résidences, d’autre part, une place publique entourée de nombreux arbres s’insérerait dans le champ de vue. S’y ajouterait que la résidence à ériger sur le lot …, qui n’aurait pas été visé par l’annulation partielle du PAP par l’arrêt précité de la Cour administrative, aurait prévu cinq étages et un mètre supplémentaire par rapport au niveau du sol, et que la résidence à ériger sur le lot… aurait, selon le PAP, cinq étages et un mètre supplémentaire, tandis que les deux résidences visées par l’autorisation litigieuse n’en auraient que quatre, dont un étage en retrait. Monsieur … souligne encore que le lot n° … serait en copropriété entre les consorts … et la société …, d’une part, et la société …, d’autre part. Ainsi pour renforcer encore l’absence de vue sur les deux résidences du lot …, il suffirait que les consorts … et la société … acceptent qu’une autorisation de bâtir visant ce lot soit déposée et que cette résidence soit construite. Il s’ensuivrait que les consorts … ne pourraient prétendre avoir une vue directe, puisque le moyen ultime pour empêcher toute vue serait la construction de la résidence sur le lot n° ….
7Pour le reste, Monsieur … fait valoir que les consorts … se trouveraient d’ores et déjà entourés de nombreux bâtiments, sans ceux du PAP, de sorte que toute vue serait directe et adjacente sur ces bâtiments et que la construction des deux résidences litigieuses ne changerait ou n’aggraverait en rien leur situation.
Enfin, Monsieur … s’empare de l’arrêt précité de la Cour administrative du 12 février 2015 ayant désigné, entre autres, la zone sur laquelle porte l’autorisation de construire litigieuse comme « zones plutôt éloignées par rapport à la propriété des recourants », pour en conclure que la Cour administrative aurait déjà considéré que le lot n° IV 6, correspondant à la parcelle sur laquelle les deux résidences querellées sont érigées, serait trop éloigné de la propriété des consorts … et aurait été d’avis que ce n’est pas parce ceux-ci ont eu un intérêt à agir contre le PAP qu’ils en auraient nécessairement un pour agir contre l’autorisation de construire visant le lot n° ….
En matière de contentieux administratif portant sur des droits objectifs, l'intérêt ne consiste pas dans un droit allégué, mais dans le fait vérifié qu'une décision administrative affecte négativement la situation en fait ou en droit d'un administré qui peut partant tirer un avantage corrélatif de la sanction de cette décision par le juge administratif1.
Un demandeur, pour justifier d’un intérêt à agir, doit justifier d’un intérêt personnel et certain, en ce sens que la réformation ou l’annulation de l’acte litigieux doit lui procurer une satisfaction certaine et personnelle2. L’intérêt invoqué doit encore être distinct de l’intérêt général, le demandeur devant justifier de l’existence d’un lien suffisamment direct entre la décision querellée et sa situation personnelle3.
L’intérêt à agir s’apprécie non pas de manière abstraite, mais concrètement au regard de la situation de fait invoquée4 : s’agissant plus particulièrement d’un voisin introduisant un recours contre une autorisation de construire, le juge doit ainsi rechercher si la construction est susceptible d’avoir une incidence sur la situation du demandeur compte tenu de sa proximité par rapport à son domicile ou des caractéristiques mêmes de la localité. Il faut bien savoir que la seule et simple qualité de voisin ne suffit pas à établir l’intérêt pour agir contre un permis de construire ; c’est au regard de l’incidence concrète du projet sur la situation du demandeur que l’intérêt pour agir de ce dernier devant le juge de l’excès de pouvoir doit être apprécié5.
En résumé, les consorts … justifient leur intérêt à agir, premièrement, par le fait de l’annulation du PAP, deuxièmement, par leur qualité de propriétaires respectivement locataire de la parcelle n°… du cadastre, impliquant une visibilité directe sur les constructions litigieuses, troisièmement, par le constat qu’un intérêt à agir leur aurait été reconnu par la Cour administrative dans son arrêt du 12 février 2015 précité, et, quatrièmement, par la 1 Cour adm. 14 juillet 2009, n°s 23857C et 23871C du rôle, Pas. adm. 2015, V° Procédure contentieuse, n° 2 et autres références y citées.
2 Trib. adm. 11 octobre 2007, n°22489 du rôle, Pas. adm. 2015, V° Procédure contentieuse, n° 7 et autres références y citées.
3 Trib. adm. 27 juin 2001, n°22489 du rôle, Pas. adm. 2015, V° Procédure contentieuse, n° 9 et autres références y citées.
4 Trib. adm. 15 décembre 2004, n° 17824 du rôle, Pas. adm. 2015, V° Procédure contentieuse, n° 63 et autres références y citées.
5 Trib. adm. 22 janvier 1997, n°9443 du rôle, V° Procédure contentieuse, n° 63 et autres références y citées ;
Trib. adm. 9 novembre 2015, n° 35074 du rôle, disponible sub www.jurad.etat.lu 8référence à une aggravation substantielle de la fluidité du trafic sur la route d’Arlon en raison des résidences qui créeraient des logements supplémentaires irrégulièrement autorisés en raison d’un dépassement du CMU autorisable.
Il est certes vrai que la Cour administrative a, dans son arrêt précité du 12 février 2015, reconnu aux consorts … un intérêt à agir contre les délibérations communales d’adoption respectivement provisoires et définitives du PAP des 6 décembre 2010 et 28 février 2011, ainsi que contre la décision ministérielle d’approbation du 14 juillet 2011. Cette circonstance n’implique toutefois pas ipso facto qu’ils ont un intérêt à agir contre l’autorisation de construire délivrée par rapport à un des lots faisant partie dudit PAP ayant fait l’objet du recours qui s’est soldé par l’arrêt de la Cour administrative du 12 février 2015, l’intérêt à agir devant être apprécié in concreto et par rapport à la décision attaquée, tel que cela a été retenu ci-avant.
En effet, si la Cour administrative a reconnu aux consorts … un intérêt à agir, cette conclusion a été justifiée par la considération que ceux-ci sont les propriétaires d’un terrain faisant partie de l’assiette du PAP litigieux, à savoir la parcelle inscrite sous le n° … du cadastre. Or, cette même considération ne saurait justifier un intérêt à agir contre l’autorisation de construire litigieuse portant sur un autre lot, certes faisant partie du même PAP, mais distinct du lot n° … du cadastre ayant justifié la reconnaissance d’un intérêt à agir dans l’affaire tranchée par la Cour administrative.
Il convient à cet égard encore de relever que dans l’arrêt précité la Cour administrative, loin de confirmer un intérêt à agir également contre une autorisation de construire délivrée par rapport à un des lots faisant partie du PAP, comme l’entendent les consorts …, a au contraire expressément mis l’accent sur des considérations permettant de nuancer leur intérêt à agir dans le cadre d’autres recours.
En effet, la Cour administrative a, après avoir relevé que dans la mesure où les terrains des consorts … font partie de l’assiette du PAP, ils ont eu qualité et intérêt à agir contre les actes d’approbation du PAP, constaté qu’en fin de compte l’annulation partielle du PAP retenue porte sur des lots autres que ceux appartenant aux consorts … et ayant justifié leur intérêt à agir, tout en relevant que les juridictions administratives ne vérifient pas l’intérêt au moyen. Dans ce contexte, la Cour a fait la distinction entre les lots concernant directement les demandeurs, non affectés par l’annulation partielle des actes réglementaires attaqués, et les zones, qualifiées par la Cour administrative comme « plutôt éloignées par rapport à la propriété des requérants », en l’occurrence le lot … sur lequel porte l’autorisation de construire litigieuse, qui trouvent affectés par l’annulation. En ce faisant, la Cour a implicitement mais nécessairement laissé sous-entendre que l’intérêt à agir retenu par elle ne peut pas nécessairement être transposé à d’autres recours contre des décisions administratives visant les lots individuels faisant partie du PAP.
Il s’ensuit que c’est à tort que les consorts … argumentent que le fait que la Cour administrative leur a reconnu un intérêt à agir contre les actes réglementaires visant le PAP impliquerait nécessairement l’existence d’un intérêt à agir dans leur chef s’agissant d’un recours contre une autorisation de construire visant un lot particulier faisant partie de ce PAP.
D’autre part, le seul constat que les actes réglementaires visant le PAP ont été partiellement annulés, plus particulièrement en ce qu’ils visent le lot sur lequel porte l’autorisation de construire litigieuse, n’implique pas non plus automatiquement que les 9consorts … aient un intérêt à agir contre cette autorisation de construire, étant donné que l’intérêt à agir n’est pas mesuré au regard du bien-fondé des moyens présentés au fond, mais au regard de la question de savoir en quoi l’autorisation de construire litigieuse affecte concrètement la situation personnelle du requérant.
Cette conclusion n’est pas énervée par la référence faite par les consorts … au principe d’égalité devant la loi et « l’efficacité de la justice », ceux-ci restant en défaut d’expliquer en quoi les principes invoqués seraient violés si l’intérêt à agir contre l’autorisation de construire litigieuse leur était méconnu malgré la circonstance qu’ils ont introduit un recours contre les actes d’approbation du PAP.
Il appartient dès lors au tribunal saisi du présent recours dirigé contre une autorisation de construire visant un lot faisant partie du PAP d’apprécier si, concrètement, par rapport à ce lot, les requérants voient leur situation personnelle directement affectée, et cela indépendamment de la considération qu’ils ont valablement pu attaquer les actes d’adoption du PAP et la décision ministérielle d’approbation, l’appréciation de l’intérêt à agir par rapport aux recours respectifs se faisant in concreto.
Il est constant que ni la parcelle sur laquelle est construit l’hôtel-restaurant appartenant aux, respectivement exploité par les consorts …, ni celle utilisée en tant que parking pour l’exploitation de l’hôtel-restaurant, sont directement adjacents à la parcelle sur laquelle sont construites les deux résidences autorisées à travers la décision litigieuse. Suivant la partie graphique du PAP, la distance entre l’immeuble de l’hôtel restaurant exploité par les demandeurs et l’angle le plus proche de la construction litigieuse est d’environ 110 mètres, ce qui représente une distance déjà non négligeable. Les consorts … ne sauraient dès lors être considérés comme voisins directs, mais tout au plus comme étant voisins en deuxième, voire en troisième ligne par rapport au lot sur lequel porte l’autorisation de construire litigieuse.
S’agissant de la question de savoir si, malgré la circonstance que les consorts … ne sont pas les voisins directs, ils ont néanmoins un intérêt à agir pour être affectés par l’autorisation litigieuse en termes de visibilité, force est de constater qu’il se dégage des explications concordantes de l’administration communale de Strassen et de Monsieur …, appuyées par les photos produites en cause ainsi que par un extrait du site geoportail, qu’un écran de verdure, implanté sur la propriété des consorts … qui ne fait pas partie du PAP et qui partant n’est pas destiné à disparaître par l’effet des travaux d’aménagement du PAP, empêche la vue sur les résidences litigieuses à partir de l’hôtel-restaurant appartenant aux, respectivement exploité par les consorts …, étant précisé que l’existence de cet écran de verdure n’est pas contestée par ces derniers. Si les consorts … affirment avoir une vue directe sur la résidence, cette affirmation est toutefois contredite par les photos versés par eux-mêmes aux débats, puisque, d’une part, il se dégage de ces photos que l’hôtel-restaurant est entouré d’arbres d’une hauteur ne laissant entrevoir que la partie supérieure de la toiture de l’immeuble, et, d’autre part, il découle de la première photo de la farde de pièces produite par eux que pendant la phase de construction seule la grue de chantier était visible à partir de leur propriété, cette grue disparaissant nécessairement une fois que la construction est achevée.
Le tribunal constate encore qu’il se dégage de la partie graphique du PAP qu’une place publique est projetée autour de laquelle les plans renseignent la plantation additionnelle d’arbres, de sorte à obstruer encore davantage toute vue possible sur les résidences litigieuses à partir de la propriété des consorts ….
10Il se dégage, par ailleurs, des plans à la disposition du tribunal ainsi que d’une simulation 3D des résidences projetées sur les lots n° … et …, telle que fournie par la partie …, non autrement contestée par les consorts …, que les deux résidences litigieuses implantées sur le lot n° … se trouvent en second plan par rapport aux résidences prévues sur les lots nos … et …et à la place publique prémentionnée, de sorte que ces résidences vont obstruer, au-delà de l’écran de verdure implanté sur le terrain-même des consorts … et de l’écran de verdure à réaliser sur la place publique, la vue sur les résidences litigieuses à partir de l’hôtel-
restaurant.
Le tribunal est amené à conclure qu’à partir de ces constats, appuyés par les plans versés en cause et par les reportages photographiques versés aux débats par la partie …, que la vue sur les résidences litigieuses à partir de l’hôtel-restaurant est inexistante, voire tellement négligeable, qu’elle est insuffisante pour retenir que l’implantation de ces résidences affecte négativement la situation des consorts … en termes de visibilité.
A cet égard, il convient encore de relever que la question d’une gêne causée par les résidences faisant l’objet de l’autorisation déférée doit être appréciée par rapport aux caractéristiques mêmes des lieux. Or, force est de constater qu’il ressort du reportage photographique versé par la partie … et non contesté à cet égard par les consorts …, que la propriété de ces derniers se trouve encadrée d’immeubles d’une certaine importance, bien plus proches de leur propriété que les résidences litigieuses.
D’autre part, il se dégage des pièces versées par la partie … que trois permis de construire ont été émis les 29 octobre 2012, 3 septembre 2013 et 14 février 2014, portant chacune sur quatre immeubles résidentiels, créant en tout une centaine de logements, sans que les consorts … n’aient introduit de recours, de manière à retenir que ceux-ci ont estimé que leur situation ne se trouve pas particulièrement aggravée par l’existence de ces résidences, bien que celles-ci se trouvent situées également en deuxième plan par rapport à leur propriété et à une distance même plus proche de leur propriété que le lot sur lequel porte l’autorisation qui fait l’objet du présent recours.
S’agissant de la partie du terrain exploitée comme parking de l’hôtel-restaurant, qui se situe, d’après les plans, à une distance plus rapprochée, sans être inférieure à 70 mètres des résidences litigieuses à admettre les conclusions des consorts …, ce qui représente déjà une distance considérable, il est certes vrai que cette partie du terrain n’est pas séparée des résidences litigieuses par l’écran de verdure prédécrit implanté près de l’hôtel-restaurant.
Force est cependant au tribunal de constater que non seulement la vue directe reste atténuée par les quelques arbres longeant en partie le terrain suivant les photos versées aux débats ainsi que par les arbres projetés sur la place publique mentionnée ci-avant, mais aussi par les autres résidences projetées sur les lots … et …, qui, tel que cela se dégage des explications fournies par la partie … et non contestées par les consorts …, ont une hauteur projetée plus importante que les deux résidences litigieuses. D’autre part, les consorts … restent en défaut d’établir en quoi l’exploitation d’un parking, destiné exclusivement à l’emplacement de voitures des clients de leur exploitation, puisse être négativement affectée par une vue, en majeure partie obstruée, sur les résidences litigieuses.
Enfin, s’agissant de l’argumentation tirée d’une augmentation du trafic engendrée par les habitants des constructions envisagées, force est au tribunal de constater que Monsieur … et Madame … n’habitent eux-mêmes pas en proximité des résidences litigieuses, mais à …, de sorte que par rapport à leur vie privée, des considérations tenant à une augmentation de trafic 11ne sauraient entrer en ligne de compte. S’agissant de l’exploitation de l’hôtel-restaurant, il convient de prendre en compte que celui-ci est situé d’ores et déjà dans une route à forte circulation, en l’occurrence la route d’Arlon, de sorte que le grief que les demandeurs avancent, au-delà du constat qu’une forte fréquentation d’un quartier n’est pas nécessairement et en toute hypothèse nuisible pour l’exploitation d’un hôtel-restaurant, doit être apprécié et nuancé par rapport à cette situation existante. Si la mise en œuvre des constructions prévues par le PAP est certes susceptible d’augmenter davantage la circulation, cet accroissement de circulation n’est pas directement lié aux deux immeubles concernés par la décision déférée, mais plutôt au lotissement dans son ensemble, prévoyant d’après les termes de l’approbation définitive du PAP par le conseil communal de la commune de Strassen la réalisation de 16 maisons et de 30 immeubles à habitation collective. De ce fait, la gêne alléguée au niveau du trafic ne résulte pas des constructions faisant l’objet de l’autorisation litigieuse, mais de la prévision au niveau du PAP de la construction de nombreuses nouvelles habitations dont les habitants sont susceptibles d’emprunter, entre autres mais pas forcément exclusivement, la route d’Arlon passant devant l’hôtel-restaurant exploité par les consorts ….
Force est dès lors de constater que les consorts … restent en défaut d’expliquer, au-delà d’affirmations tout à fait générales, en quoi les logements créés par les deux résidences litigieuses soient de nature à augmenter le trafic sur la route d’Arlon, de toute façon fortement fréquentée, d’une manière telle que leur situation personnelle soit aggravée, et cela d’autant plus, qu’ils ne se sont pas particulièrement sentis lésés par les 12 résidences prémentionnées et contre les autorisations desquelles ils n’ont pas introduit de recours.
S’ils argumentent que les surfaces autorisables auraient été dépassées pour les deux résidences autorisées par la décision faisant l’objet du présent recours, ils restent toutefois en défaut d’indiquer dans quelle mesure l’annulation sollicitée de l’autorisation à bâtir déférée, portant sur deux immeubles résidentiels accueillant chacun 14 logements, apporterait un remède aux griefs mis en avant, puisque, tel que relevé ci-avant, le PAP dans le cadre duquel les deux résidences sont érigées est appelé à terme à accueillir un multiple des logements créées par les deux résidences, le PAP prévoyant 30 immeubles collectifs et 16 maisons, dont la construction ne serait pas entravée par l’éventuelle annulation recherchée de l’autorisation de construire des deux immeubles résidentiels visés.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours sous analyse est à déclarer irrecevable pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des consorts ….
Enfin, la demande tendant à voir ordonner l’effet suspensif du recours sur le fondement de l’article 35 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », en vertu duquel « Par dérogation à l’article 45, si l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif, le tribunal peut, dans un jugement tranchant le principal ou une partie du principal, ordonner l’effet suspensif du recours pendant le délai d’appel. […] », est rejetée. En effet, cette disposition doit être lue ensemble avec l’article 45 de la même loi, en vertu duquel « Sans préjudice de la disposition de l’article 35, pendant le délai et l’instance d’appel, il est sursis à l’exécution des jugements ayant annulé ou réformé des décisions attaquées. ». Il s’ensuit que l’effet suspensif du recours ne peut être ordonné que dans l’hypothèse d’un jugement tranchant le principal ou une partie du principal, ayant annulé ou réformé la décision. Or, dans la mesure où le tribunal a déclaré irrecevable le présent recours, l’article 35 précité ne trouve pas application.
12Compte tenu de l’issue du litige, la demande en paiement d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 euros formulée par les consorts … sur le fondement de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 est rejetée.
La demande en paiement d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.500 euros formulée par Monsieur … est pareillement rejetée en ce qu’il n’est pas établi en quoi il serait inéquitable de laisser à son unique charge les frais non compris dans les dépens.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;
déclare irrecevable le recours subsidiaire en annulation ;
rejette les demandes en paiement d’une indemnité de procédure formulées par les consorts …, respectivement par Monsieur … ;
rejette la demande tendant à voir ordonner l’effet suspensif du recours sur le fondement de l’article 35 de la loi du 21 juin 1999 ;
condamne les consorts … au paiement des frais.
Ainsi jugé par :
Annick Braun, premier juge, Paul Nourissier, juge, Alexandra Castegnaro, juge, et lu à l’audience publique du 17 février 2016 par le premier juge, en présence du greffier Michèle Hoffmann.
s. Michèle Hoffmann s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 18/2/2016 Le Greffier du Tribunal administratif 13