La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/01/2016 | LUXEMBOURG | N°36409

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 11 janvier 2016, 36409


Tribunal administratif N° 36409 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 11 juin 2015 1re chambre Audience publique du 11 janvier 2016 Recours formé par la société …, … en matière de nomination d’un commissaire spécial

______________________________________________________________________________


JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le n° 36409 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 juin 2015 par Maître Georges Krieger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société

anonyme … établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au Registre de Commerce et des Soc...

Tribunal administratif N° 36409 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 11 juin 2015 1re chambre Audience publique du 11 janvier 2016 Recours formé par la société …, … en matière de nomination d’un commissaire spécial

______________________________________________________________________________

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le n° 36409 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 juin 2015 par Maître Georges Krieger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au Registre de Commerce et des Sociétés de Luxembourg sous le n° B …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant à la nomination d’un commissaire spécial à la suite d’un jugement du tribunal administratif du 1er décembre 2014, inscrit sous le n°33666 du rôle ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Laura Geiger, en remplacement de l’huissier de justice Carlos Calvo, demeurant à Luxembourg, du 17 juin 2015, portant signification de ladite requête à l’administration communale de la Ville d’Esch-sur-Alzette, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions, ayant sa maison communale à L-4002 Esch-sur-Alzette, Hôtel de Ville ;

Vu la requête en abréviation des délais déposée au greffe du tribunal administratif le 11 novembre 2015 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Laura Geiger, en remplacement de l’huissier de justice Frank Schaal, demeurant à Luxembourg, du 17 novembre 2015, portant signification de ladite requête à l’administration communale de la Ville d’Esch-sur-Alzette, préqualifiée ;

Vu les pièces versées en cause ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport ainsi que Maître Sébastien Couvreur, en remplacement de Maître Georges Krieger, en ses explications à l’audience publique du 4 janvier 2016.

______________________________________________________________________________

Par une décision du 10 novembre 2013, une demande de morcellement d’un terrain sis à Esch-sur-Alzette en deux unités, introduite le 28 mars 2013 par la société anonyme …, ci-après désignée par « la société …», fut refusée par un courrier du 10 octobre 2013, signé par Madame …relevant de l’administration de l’architecte, division du développement urbain, de la Ville d’Esch-sur-Alzette.

Par un jugement du 1er décembre 2014, inscrit sous le numéro 33666 du rôle, non frappé d’appel, le tribunal administratif annula ladite décision pour incompétence de son auteur et renvoya le dossier en prosécution de cause au bourgmestre de la Ville d’Esch-sur-Alzette.

Aucune nouvelle décision délivrée par le bourgmestre de la Ville d’Esch-sur-Alzette n’étant intervenue à la suite de ce jugement, la société …a fait introduire, par une requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 juin 2015, une demande en nomination d’un commissaire spécial en application des articles 84 et suivants de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 ».

Il convient de relever à titre liminaire que l’administration communale de la Ville d’Esch-

sur-Alzette n’a pas fourni de mémoire en réponse dans le délai légal, étant relevé que le courrier de son mandataire du 1er décembre 2015 n’est pas à qualifier de mémoire, bien que la requête introductive ait été signifiée par voie d’huissier de justice en date du 17 juin 2015. Conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », le tribunal statue néanmoins à l’égard de toutes les parties par un jugement ayant les effets d’une décision contradictoire, même si la partie défenderesse n’a pas comparu dans le délai prévu par la loi.

Aux termes de l’article 84 de la loi du 7 novembre 1996: « Lorsqu’en cas d’annulation ou de réformation, coulée en force de chose jugée, d’une décision administrative qui n’est pas réservée par la Constitution à un organe déterminé, la juridiction ayant annulé ou réformé la décision a renvoyé l’affaire devant l’autorité compétente et que celle-ci omet de prendre une décision en se conformant au jugement ou à l’arrêt, la partie intéressée peut, à l’expiration d’un délai de trois mois à partir du prononcé de l’arrêt ou du jugement, saisir la juridiction qui a renvoyé l’affaire en vue de charger un commissaire spécial de prendre la décision aux lieu et place de l’autorité compétente et aux frais de celle-ci. La juridiction fixe au commissaire spécial un délai dans lequel il doit accomplir sa mission. La désignation du commissaire spécial dessaisit l’autorité compétente ».

Dans la mesure où il est constant en cause qu’aucune décision en exécution du jugement prévisé du 1er décembre 2014, entretemps coulé en force de chose jugée, n’avait été prise jusqu’à la date d’introduction de la requête en désignation d’un commissaire spécial, en l’occurrence le 11 juin 2015, cette requête est recevable pour avoir par ailleurs été introduite dans les formes prévues par la loi.

Force est cependant de constater que par un courrier daté du 1er décembre 2015, déposé le 3 décembre 2015 au greffe du tribunal administratif, le mandataire de l’administration communale de la Ville d’Esch-sur-Alzette a informé le tribunal qu’en date du 25 novembre 2015 une nouvelle décision a été prise par le bourgmestre de la Ville d’Esch-sur-Alzette.

A l’audience des plaidoiries du 4 janvier 2016, le tribunal a soulevé la question de l’objet du recours au regard de la décision entretemps prise par le bourgmestre de la Ville d’Esch-sur-

Alzette.

Le mandataire de la société requérante a déclaré maintenir la requête dans la mesure où elle réclame une indemnité de procédure.

Force est de constater que la décision entretemps prise le 25 novembre 2015 doit être qualifiée comme décision prise en conformité avec le jugement du 1er décembre 2014, précité, au vœu de l’article 84 de la loi du 7 novembre 1996.

Or, dans la mesure où, au moment où le juge administratif est appelé à statuer sur la demande en désignation d'un commissaire spécial, l'autorité administrative a pris une nouvelle décision, la demande en désignation d'un commissaire est à considérer comme étant devenue sans objet1.

Il en découle que la requête en désignation d’un commissaire spécial introduite par la société …est à rejeter pour être devenue sans objet.

Quant à l’indemnité de procédure de 1.500 € réclamée par la demanderesse, qui fait valoir qu’il serait injuste de laisser à sa charge les frais et les honoraires de son avocat eu égard au refus de collaboration de l’administration communale de la Ville d’Esch-sur-Alzette, il convient de relever qu’aux termes de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999, « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine ».

Force est de constater que depuis le jugement du 1er décembre 2014, aucune décision n’était intervenue de la part du bourgmestre de la Ville d’Esch-sur-Alzette au moment de l’introduction de la demande en nomination d’un commissaire spécial.

Le mandataire de la société demanderesse a adressé en date du 21 mai 2015, soit presque six mois après le prononcé du jugement ayant annulé la décision du 10 octobre 2013, un rappel au bourgmestre compétent. Pourtant une nouvelle décision n’est intervenue qu’à la suite de l’introduction de la requête sous analyse.

S’il est vrai que l’introduction de la requête en nomination d’un commissaire spécial est intervenue dans un laps de temps relativement bref à la suite de la mise en demeure précitée, force est néanmoins de constater que le bourgmestre de la Ville d’Esch-sur-Alzette a attendu jusqu’au 25 novembre 2015, soit plus de cinq mois après l’introduction de la présente requête, pour émettre une nouvelle décision, qui de plus est fondée en substance sur les mêmes considérations que celles à la base de la décision du 10 octobre 2013 prise par un auteur incompétent. Il s’ensuit que le délai entre le jugement du 1er décembre 2014 et la prise de la décision nouvelle le 25 novembre 2015, soit quasiment un an, reste inexpliqué, de sorte que le tribunal doit l’attribuer à un défaut de collaboration de l’administration communale. Dans ces conditions, le tribunal estime qu’il serait inéquitable de laisser à l’unique charge de la partie demanderesse les frais non compris dans les dépens et liés à l’introduction d’une requête en nomination d’un commissaire spécial, la nouvelle décision n’étant intervenue qu’à la suite de l’introduction de cette requête.

1 Cour adm. 8 février 2007, n° 22027C du rôle, Pas. adm. 2015, V° Procédure contentieuse, n° 972 Le tribunal accorde dès lors à la partie demanderesse une indemnité de procédure sur le fondement de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 qu’il évalue ex aequo et bono au montant de 800 €.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit la demande en nomination d’un commissaire spécial en la forme ;

constate qu’elle est devenue sans objet, partant la rejette ;

condamne l’administration communale de la Ville d’Esch-sur-Alzette au paiement d’une indemnité de procédure d’un montant de 800 € ;

condamne l’administration communale de la Ville d’Esch-sur-Alzette au paiement des frais.

Ainsi jugé par :

Annick Braun, premier juge, Paul Nourissier, juge, Alexandra Castegnaro, juge, et lu à l’audience publique du 11 janvier 2016, par le premier juge, en présence du greffier en chef Arny Schmit.

s. Arny Schmit s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 11/1/2016 Le Greffier du Tribunal administratif 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 36409
Date de la décision : 11/01/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2016-01-11;36409 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award