Tribunal administratif N° 36047 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 mars 2015 3e chambre Audience publique extraordinaire du 15 mai 2015 Recours formé par Monsieur …, … contre trois décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 20, L.5.5.2006)
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 36047 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 24 mars 2015 par Maître Nicky Stoffel, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Bosnie-
Herzégovine), de nationalité serbe, de Madame …, née le … à … (Monténégro), de nationalité monténégrine, agissant en leur nom personnel et au nom de leurs enfants mineurs communs …, né le … à … (Serbie) et …, née le … à …, les deux de nationalité serbe, demeurant actuellement tous ensemble à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 13 mars 2015 de statuer sur le bien-fondé de leur demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, à la réformation de la décision portant refus de faire droit à leur demande de protection internationale et à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 10 avril 2015 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions déférées ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Marcel Marigo, en remplacement de Maître Nicky Stoffel, et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Jacques en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 13 mai 2015.
Le 4 décembre 2014, Monsieur … et son épouse, Madame …, accompagnés de leurs enfants mineurs … et …, ci-après désignés par « les consorts … », introduisirent auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, ci-après désignée par « la loi du 5 mai 2006 ».
Les déclarations de Monsieur … et de Madame … sur leurs identités et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg furent actées par un agent de la police grand-ducale, section police des étrangers et des jeux, dans un rapport du même jour.
Au moment du dépôt de leur demande de protection internationale, les consorts … déclarèrent être venus au Luxembourg en raison des inondations ayant emporté tous leurs biens et en raison du fait qu’ils n’avaient plus les moyens pour vivre.
En date du 9 décembre 2014, Monsieur … et Madame … firent séparément l’objet d’un entretien auprès du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement UE 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des états membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, dit « règlement de Dublin III ».
Monsieur … et Madame … furent encore entendus séparément en date du 2 février 2015 par un agent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, sur leur situation et sur les motifs se trouvant à la base de leur demande de protection internationale.
A cette occasion, Monsieur … déclara être de nationalité serbe et appartenir à l’ethnie bosniaque et avoir grandi chez sa grand-mère depuis le décès de ses parents.
Il déclara avoir été à charge de sa grand-mère jusqu’à son mariage il y environ 10 ans et avoir, en dernier lieu, vécu de l’aide sociale en Serbie.
Il aurait quitté son pays d’origine au motif que l’épilepsie dont il souffrirait n’aurait pas été traitée convenablement par les médecins dans son pays d’origine.
Il serait encore venu en raison des inondations ayant détruit sa maison et à défaut d’avoir obtenu des aides de sa commune d’origine. Depuis la destruction de sa maison à la suite des inondations il aurait vécu près de son oncle.
Monsieur … affirma encore s’être vu refuser des aides de la part des autorités communales de son village d’origine à plusieurs reprises, en supposant que tel serait le cas en raison du fait qu’il n’aurait pas voté pour les autorités en place, tout en admettant néanmoins qu’à sa connaissance ceux-ci n’étaient pas au courant du vote qu’il avait émis lors des élections.
De manière générale, Monsieur … déclara avoir quitté son pays d’origine au motif qu’ils n’avaient plus les moyens pour vivre dans leur pays d’origine et que l’aide sociale touchée était insuffisante.
Monsieur … fit enfin état d’un conflit avec sa grand-mère, qui n’aurait pas accepté son mariage et qui aurait systématiquement appelé la police. Pareillement, il releva un conflit familial à propos du partage d’un terrain familial, dans lequel sa grand-mère serait impliquée.
Madame … confirma en substance les déclarations de son mari et affirma être venue au Luxembourg pour faire soigner médicalement son mari, tout en soulignant que dans leur pays ils n’auraient pas les moyens financiers pour vivre.
Madame … ajouta avoir demandé en 2010 et en 2012 de l’aide pour faire soigner la maladie de son mari auprès des autorités communales de leur village d’origine, mais que ces demandes n’auraient pas été accordées et que, par ailleurs, elle-même ne bénéficierait pas des services de la caisse de maladie, étant donné qu’elle n’est pas ressortissante serbe.
Par décision du 13 mars 2015, notifiée aux intéressés par lettre recommandée envoyée le 16 mars 2015, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, désigné ci-après par « le ministre », informa les consorts … qu’il avait statué sur le bien-fondé de leur demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée en se basant sur les dispositions de l’article 20, paragraphe (1) sous a), b) et c) de la loi du 5 mai 2006 et que leur demande avait été refusée comme non fondée tout en leur ordonnant de quitter le territoire dans un délai de trente jours à destination de la Serbie ou du Monténégro, ou de tout autre pays dans lequel ils seraient autorisés à séjourner.
Le ministre releva que Monsieur … et ses enfants ont la nationalité serbe et proviendraient d’un pays d’origine sûr au sens du règlement grand-ducal du 1er avril 2011 ayant modifié le règlement grand-ducal du 21 décembre 2007 fixant une liste de pays d’origine sûr au sens de la loi du 5 mai 2006.
Par ailleurs, Madame … aurait la nationalité monténégrine, pays figurant également sur la liste des pays d’origine sûr instaurée par le règlement grand-ducal du 21 décembre 2007 précité.
Le ministre retint encore que les raisons ayant amené les consorts … à quitter la Serbie ne seraient motivées par aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951, ci-après désignée par « la Convention de Genève », et de la loi du 5 mai 2006.
A cet égard, il donna à considérer que Monsieur … a déclaré souffrir d’épilepsie et de ne pas être soigné convenablement en Serbie, en faisant valoir que des raisons médicales ne rentreraient pas dans le champ d’application de la Convention de Genève. Le ministre donna encore à considérer que les consorts … auraient eu accès aux soins médicaux dans différents hôpitaux et auprès des différents médecins, tout en ajoutant que l’assurance maladie serait obligatoire en Serbie.
Le ministre releva encore que Madame … aurait contredit son mari en affirmant que son médecin ne l’aurait pas envoyé à Belgrade et à Ujice et releva par ailleurs que Monsieur … n’aurait pas invoqué un manque de ressources financières pour couvrir les frais de son traitement.
Le ministre considéra encore, sources internationales à l’appui, que les personnes souffrant d’épilepsie seraient couvertes par l’assurance maladie en Serbie.
Par rapport à l’affirmation de Madame … qu’elle aurait été contrainte de se rendre au Monténégro pour avoir accès aux soins médicaux, le ministre considéra que cela s’expliquerait plutôt par le fait qu’elle n’est pas enregistrée auprès de l’administration de l’emploi en Serbie et non par le fait qu’elle est de nationalité monténégrine.
S’agissant des conséquences des inondations de mai 2014, le ministre releva que les catastrophes naturelles ne rentreraient pas dans le champ d’application de la Convention de Genève. Il en serait de même des difficultés rencontrées avec la grand-mère de Monsieur …, ainsi que des raisons économiques sous-tendant leur demande de protection internationale.
Enfin, le ministre conclut que le récit des consorts … ne contiendrait pas de motifs sérieux et avérés permettant de croire qu’ils courraient un risque réel de subir des atteintes graves définies à l’article 37 de la loi du 5 mai 2006.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 24 mars 2015, les consorts … ont fait déposer un recours tendant à l’annulation de la décision du ministre du 13 mars 2015 de statuer sur le bien-fondé de leur demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, à la réformation de la décision du ministre portant refus de faire droit à leur demande de protection internationale, et à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte.
Quant aux faits, les demandeurs déclarent avoir quitté leur pays d’origine en raison d’un défaut d’accès au système de santé respectivement de la défaillance de ce système, du fait de la situation politico-économique en Serbie et en raison des « relations électriques » entre Monsieur … et sa commune de résidence, surtout suite aux inondations de mai 2014. Par ailleurs, leur mariage serait à l’origine de tensions avec la grand-mère du demandeur.
Ils précisent que le demandeur souffrirait depuis son enfance d’épilepsie et il n’aurait aucune chance d’être pris en charge par les autorités de son pays d’origine. Tout en admettant que les difficultés d’accès aux soins médicaux ne figureraient pas parmi les critères d’obtention d’une protection internationale, les demandeurs donnent à considérer que leur cas présenterait des caractéristiques permettant de les ranger dans le champ d’application de la Convention de Genève, étant donné que les causes de l’inaccessibilité aux soins médicaux ainsi que celles à l’origine de la défaillance du système de santé dans leur pays d’origine relèveraient essentiellement de la situation politico-économique de la Serbie.
Par ailleurs l’immixtion de la grand-mère du demandeur dans leur vie de couple ainsi que l’utilisation de la police par celle-ci à des fins d’intimidation ne serait qu’une des facettes des effets de la corruption en Serbie.
1) Quant au recours tendant à l’annulation de la décision du ministre du 13 mars 2015 de statuer sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée Etant donné que l’article 20, paragraphe (4) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en annulation contre les décisions du ministre de statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, un recours en annulation a valablement pu être dirigé contre la décision du ministre déférée.
Le recours est encore recevable pour avoir été introduit selon les formes et délai de la loi.
A l’appui de ce volet de la requête introductive d’instance, les demandeurs soutiennent que les conditions d’application de l’article 20 de la loi du 5 mai 2006 ne seraient pas remplies en l’espèce, étant donné que ni la Serbie ni le Monténégro ne seraient des pays d’origine sûr.
Leurs pays d’origine respectifs n’auraient pas une bonne réputation en matière de respect des droits de l’homme. L’instabilité des institutions étatiques se traduirait par un manque d’indépendance du système judiciaire et par la corruption, ce qui serait à l’origine des défaillances du système de santé.
Ils soutiennent en substance que leur vécu démontrerait que leurs pays d’origine ne seraient pas à considérer comme pays d’origine sûr malgré leur inscription sur la liste des pays d’origine sûr.
Ils ajoutent encore que le ministre aurait fait une interprétation erronée des faits, pour conclure que les faits exposés par eux seraient sans pertinence et insignifiants au regard de leur demande de protection internationale.
Le délégué du gouvernement estime que le ministre aurait statué à juste titre sur la demande de protection internationale des demandeurs dans le cadre d’une procédure accélérée et conclut partant au rejet du recours en annulation afférent.
Tel que relevé ci-avant, la décision ministérielle déférée est fondée sur les dispositions des points a), b) et c) de l’article 20, paragraphe (1) de la loi du 5 mai 2006 aux termes desquelles « Le ministre peut statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée dans les cas suivants :
a) le demandeur, en déposant sa demande et en exposant les faits, n’a soulevé que des questions sans pertinence ou d’une pertinence insignifiante au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale ;
b) il apparaît clairement que le demandeur ne remplit pas les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale ;
c) le demandeur provient d’un pays d’origine sûr au sens de l’article 21 de la présente loi ;
[…] ».
Il s’ensuit qu’aux termes de l’article 20, paragraphe (1) sous a), b) et c) de la loi du 5 mai 2006, le ministre peut statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale par voie de procédure accélérée, soit s’il apparaît que les faits soulevés lors du dépôt de la demande sont sans pertinence ou d’une pertinence insignifiante au regard de l’examen de cette demande, soit s’il apparaît clairement que le demandeur ne remplit pas les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale ou, encore, si le demandeur provient d’un pays d’origine sûr au sens de l’article 21 de la loi du 5 mai 2006.
Les conditions pour pouvoir statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée sont énumérées à l’article 20, paragraphe (1) de la loi du 5 mai 2006 de manière alternative et non point cumulative, de sorte qu’une seule condition valablement remplie peut justifier la décision ministérielle à suffisance.
Il appartient au tribunal, statuant en tant que juge de l’annulation dans le cadre et les limites de la procédure accélérée prévue à l’article 20, paragraphe (4) de la loi du 5 mai 2006 de vérifier, sur base des moyens invoqués, si c’est à bon droit que le ministre a fait application du prédit article afin de décider de statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée.
Concernant plus particulièrement le point c) de l’article 20, paragraphe (1) précité, visant l’hypothèse où le demandeur provient d’un pays d’origine sûr, un pays est à considérer comme sûr au sens de l’article 21 de la loi du 5 mai 2006 dans les conditions suivantes : « (1) Un pays peut être désigné comme pays d’origine sûr pour les besoins de l’examen de la demande de protection internationale.
(2) Un pays qui est désigné comme pays d’origine sûr conformément aux paragraphes (3) et (4) du présent article peut uniquement, après examen individuel de la demande de protection internationale, être considéré comme étant un pays d’origine sûr pour un demandeur, s’il possède la nationalité de ce pays ou s’il avait précédemment sa résidence habituelle dans ce pays, et que le demandeur n’a soumis aucune raison valable permettant de penser qu’il ne s’agit pas d’un pays d’origine sûr en raison de sa situation personnelle.
(3) Une demande de protection internationale est rejetée, sans préjudice du paragraphe (2) qui précède, lorsqu’un pays est désigné comme pays d’origine sûr soit par l’Union européenne, soit par règlement grand-ducal.
(4) Un règlement grand-ducal pourra désigner un pays comme pays d’origine sûr s’il est établi qu’il n’y existe généralement et de façon constante pas de persécution au sens de la Convention de Genève. Les critères suivants seront pris en considération pour la désignation d’un pays comme pays d’origine sûr :
(a) l’observation des droits et libertés prévus par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le Pacte international des droits civils et politiques ou la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
(b) le respect du principe du non-refoulement prévu par la Convention de Genève ;
(c) la prévision d’un système de recours efficace contre les violations de ces droits et libertés. » Il est constant que le règlement grand-ducal du 1er avril 2011 ayant modifié le 21 décembre 2007 fixant une liste de pays d’origine sûrs au sens de la loi du 5 mai 2006 a désigné la République de Serbie comme pays d’origine sûr.
Il se dégage en l’espèce des éléments du dossier que le demandeur et ses enfants ont la nationalité Serbie, et qu’ils ont habité la Serbie avant de rejoindre le Luxembourg, et que la demanderesse, de nationalité monténégrine, a résidé de manière habituelle en Serbie avant de venir au Luxembourg, de sorte que c’est a priori à bon droit que le ministre a décidé de statuer en l’espèce dans le cadre de la procédure accélérée.
Au vu du libellé des différents paragraphes de l’article 21 de la loi du 5 mai 2006, le fait qu’un règlement grand-ducal désigne un pays comme sûr n’est cependant pas suffisant pour justifier le recours à une procédure accélérée, étant donné que l’article 21, paragraphe (2) de la même loi oblige le ministre, nonobstant le fait qu’un pays ait été désigné comme pays d’origine sûr par règlement grand-ducal, à procéder, avant de pouvoir conclure que le demandeur provient d’un pays d’origine sûr, à un examen individuel de sa demande de protection internationale, et qu’il incombe par ailleurs au ministre d’évaluer si le demandeur ne lui a pas soumis d’éléments permettant de penser qu’il ne s’agit pas, dans son chef, d’un pays d’origine sûr en raison de sa situation personnelle.
En l'espèce, le ministre, après examen de la demande de protection internationale des demandeurs, a conclu qu’ils proviendraient d’un pays qui, dans leur chef, est à qualifier de pays d’origine sûr, de sorte qu'il appartient au tribunal, statuant comme juge de l’annulation dans le cadre et les limites de la procédure accélérée prévue à l’article 20, paragraphe (4) de loi du 5 mai 2006, de vérifier, dans le cadre des moyens invoqués, si les demandeurs lui soumettent, conformément à l’article 21, paragraphe (2) de la loi du 5 mai 2006, des raisons valables permettant de penser qu’il ne s’agit pas d’un pays d’origine sûr en raison de leur situation personnelle.
Or, l'analyse de la situation décrite par les demandeurs lors de leurs auditions respectives ainsi que dans le cadre du présent recours ne permet pas au tribunal d'en dégager des éléments convaincants pour renverser cette présomption en ce qui les concerne et pour conclure en conséquence à l’illégalité de la décision ministérielle sous analyse.
En effet, il ressort d’aucun élément soumis à l’appréciation du tribunal que les conditions pour qualifier un pays d’origine sûr ne seraient pas, dans leur chef, vérifiées en l’espèce. Ainsi, les demandeurs ne soumettent au tribunal aucun élément concret tendant à renverser la présomption qu’il existe en Serbie un système judiciaire indépendant, que les libertés et les droits démocratiques de base y sont reconnues et que des mécanismes de recours y existent si ces droits ou libertés sont violés ou encore qu’il y existe des organisations de la société civile dans leur pays d’origine.
En effet, au-delà de l’affirmation tout à fait générale quant à un non-respect des droits de l’homme dans leur pays d’origine et d’un manque d’indépendance du système judiciaire et de corruption, respectivement de défaillances du système de santé, sans étayer ces affirmations par des sources internationales ou en indiquant un lien concret de leur vécu personnel avec les défaillances du système judiciaire et politique de leur pays d’origine qu’ils allèguent, les demandeurs n’invoquent aucun éléments concret à cet égard.
En ce qui concerne la situation concrète des demandeurs, force est encore de constater qu’il se dégage de leurs déclarations lors de leurs auditions respectives qu’ils ont quitté leur pays d’origine essentiellement pour faire soigner l’épilepsie dont est touché le demandeur, au motif qu’il n’était pas satisfait des soins obtenus dans leur pays d’origine, en raison de la destruction de leur maison suite aux inondations en mai 2014, de manière générale, en raison de difficultés financières dans leur pays d’origine, et, enfin, en raison d’un conflit avec la grand-mère du demandeur se manifestant plus particulièrement par le mécontentement de celle-ci avec leur mariage et par un litige en raison du partage d’un terrain.
Les demandeurs restent cependant en défaut d’établir en quoi ces difficultés refléteraient une situation amenant à conclure qu’il n’existe en Serbie pas un système judiciaire indépendant, que les libertés et les droits démocratiques de base y ne sont reconnues et que des mécanismes de recours n’y existent pas si ces droits ou libertés sont violés ou encore qu’il n’y existe pas des organisations de la société civile.
S’il est vrai qu’ils déclarent ne pas être satisfaits des soins médicaux obtenus par les médecins de leur pays d’origine, le tribunal ne dispose cependant pas d’élément permettant de retenir que ce mécontentement trouve son origine dans une situation où les droits élémentaires ne seraient pas respectés en Serbie.
Si le mandataire des demandeurs fait encore, pour la première fois à l’appui de la présente requête, un lien entre un problème de corruption en Serbie et le fait que la grand-
mère du demandeur ait à plusieurs reprises appelé la police dans le cadre du conflit familial dont ont fait état les demandeurs, le tribunal ne dispose cependant d’aucune précision ou élément permettant de retenir le bien-fondé d’un tel reproche.
Enfin, la circonstance que les demandeurs se seraient, à plusieurs reprises, vus refuser des aides par les autorités communales de leur pays d’origine et encore celle que la demanderesse déclare ne pas bénéficier des services de la caisse de maladie en Serbie, ne permet pas, à défaut d’autres précisions et à défaut par les demandeurs d’avoir réclamé auprès d’autres autorités supérieures de ce fait, de renverser la présomption que la Serbie est un pays d’origine sûr.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent, que les demandeurs n’ont pas apporté des éléments permettant de renverser le constat que la Serbie est à qualifier de pays d’origine sûr, de sorte que le ministre a valablement pu statuer dans le cadre de la procédure accélérée sur le fondement du point c) de l’article 20, paragraphe (1), sans qu’il n’y ait lieu d’examiner si le Monténégro est à qualifier de pays d’origine sûr et sans qu’il n’y ait, par ailleurs, lieu d’examiner le bien-fondé de l’application des points a) et b) de l’article 20, paragraphe (1) précité invoqué par ailleurs par le ministre, cet examen devenant surabondant.
Il s’ensuit que le recours tendant à l’annulation de la décision de statuer sur le bien-
fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée est à rejeter pour ne pas être fondé.
2) Quant au recours tendant à la réformation de la décision du ministre du 13 mars 2015 portant refus d’une protection internationale Etant donné que l’article 20, paragraphe (4) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en réformation en matière de demande de protection internationale déclarée non fondée, le tribunal administratif est compétent pour connaître du recours en réformation introduit contre cette décision ministérielle. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.
A l’appui de ce volet de la requête introductive d’instance, les demandeurs concluent en substance que les conditions d’obtention de la protection internationale seraient données dans leur chef.
Ils soutiennent que la situation de précarité à l’origine de leur départ forcé de leur pays d’origine s’analyserait en une violation flagrante de leurs droits de l’homme en ce qu’elle serait le vecteur de traumatismes tant psychologique et psychique. Leur situation serait principalement due à l’inaction coupable des autorités étatiques qui refuseraient d’apporter une quelconque assistance à la population qui se trouverait continuellement en danger. Cette situation serait à qualifier de « non-assistance de personne en danger ».
Les persécutions subies par eux seraient d’ordre physique et mental, de sorte que la demande de protection internationale devrait être déclarée fondée.
Le délégué du gouvernement soutient que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation des demandeurs et conclut partant au rejet du recours.
Le tribunal relève de prime abord que les contradictions mises en avant par le ministre relativement à la question de savoir si le demandeur a été envoyé par son médecin à Belgrade et à Ujice et sur la question de savoir si un manque de ressources financières pour couvrir les frais du traitement a été invoqué par les demandeurs, n’est pas de nature à énerver la crédibilité globale du récit des demandeurs, dont les déclarations se recoupent sur les divers motifs de leur départ de leur pays d’origine, à savoir les problèmes de santé du demandeur, leur situation familiale et plus particulièrement les relations avec la grand-mère du demandeur, les difficultés financières essentiellement dues aux inondations ayant eu lieu en mai 2014 et les problèmes de santé du demandeur.
Aux termes de l’article 2 a) de la loi du 5 mai 2006, la notion de « protection internationale » se définit comme correspondant au statut de réfugié et au statut conféré par la protection subsidiaire.
La notion de « réfugié » est définie par l’article 2 d) de ladite loi comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner […] ».
Il convient de relever qu’aux termes de l’article 31, paragraphe (1) de la loi du 5 mai 2006 : « Les actes considérés comme une persécution au sens de l’article 1A de la Convention de Genève doivent :
a) être suffisamment graves du fait de leur nature ou de leur caractère répété pour constituer une violation grave des droits fondamentaux de l’homme, en particulier des droits auxquels aucune dérogation n’est possible en vertu de l’article 15, paragraphe 2, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
ou b) être une accumulation de diverses mesures, y compris des violations des droits de l’homme, qui soit suffisamment grave pour affecter un individu d’une manière comparable à ce qui est indiqué au point a). […] » L’article 31, paragraphe (2) précise que : « Les actes de persécution, au sens du paragraphe (1), peuvent notamment prendre les formes suivantes :
a) violences physiques ou mentales, y compris les violences sexuelles ; » Finalement, aux termes de l’article 28 de la loi du 5 mai 2006 : « Les acteurs des persécutions ou atteintes graves peuvent être :
a) l’Etat ;
b) des partis ou organisations qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci ;
c) des acteurs non étatiques, s’il peut être démontré que les acteurs visés aux points a) et b), y compris les organisations internationales, ne peuvent pas ou ne veulent pas accorder une protection contre les persécutions ou atteintes graves. », et aux termes de l’article 29 de la même loi : « (1) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves ne peut être accordée que par :
a) l’Etat, ou b) des partis ou organisations, y compris des organisations internationales, qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci, pour autant qu’ils soient disposés à offrir une protection au sens du paragraphe (2) et en mesure de le faire.
(2) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves doit être effective et non temporaire. Une telle protection est généralement accordée lorsque les acteurs visés au paragraphe (1) points a) et b) prennent des mesures raisonnables pour empêcher la persécution ou des atteintes graves, entre autres lorsqu’ils disposent d’un système judiciaire effectif permettant de déceler, de poursuivre et de sanctionner les actes constituant une persécution ou une atteinte grave, et lorsque le demandeur a accès à cette protection. » Il se dégage des articles précités de la loi du 5 mai 2006 que l’octroi du statut de réfugié est notamment soumis à la triple condition que les actes invoqués soient motivés par l’un des critères de fond définis à l’article 2 d) de la loi du 5 mai 2006, à savoir la race, la religion, la nationalité, les opinions politiques ou l’appartenance à un certain groupe social, que ces actes soient d’une gravité suffisante au sens de l’article 31, paragraphe (1) de la loi du 5 mai 2006, et qu’ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes des articles 28 et 29 de la loi du 5 mai 2006, étant entendu qu’au cas où les auteurs des actes sont des personnes privées, elles sont à qualifier d’acteurs seulement dans le cas où les acteurs visés aux points a) et b) de l’article 28 de la loi du 5 mai 2006 ne peuvent ou ne veulent accorder une protection contre les persécutions et, enfin, que le demandeur ne peut ou ne veut pas se réclamer de la protection de son pays d’origine.
Dans la mesure où les conditions sus-énoncées doivent être réunies cumulativement, le fait qu’une d’elles ne soit pas valablement remplie est suffisant pour conclure que le demandeur ne saurait bénéficier du statut de réfugié.
Force est encore de relever que la définition du réfugié contenue à l’article 2 d) de la loi du 5 mai 2006 retient qu’est un réfugié une personne qui « craint avec raison d’être persécutée », de sorte à viser une persécution future sans qu’il n’y ait nécessairement besoin que le demandeur ait été persécuté avant son départ de son pays d’origine. Par contre, s’il s’avérait que tel avait été le cas, l’article 26, paragraphe (4) de la loi du 5 mai 2006 instaure une présomption simple que des persécutions antérieures d’ores et déjà subies se poursuivront en cas de retour dans le pays d’origine, étant relevé que cette présomption pourra être renversée par le ministre par la justification de l’existence de bonnes raisons de penser que ces persécutions ne se reproduiront pas. L’analyse du tribunal devra par conséquent en définitive porter sur l’évaluation, au regard des faits que le demandeur avance, du risque d’être persécuté qu’il encourt en cas de retour dans son pays d’origine.
C’est à bon droit que le ministre a retenu que les faits invoqués par les demandeurs ne rentrent pas dans le champ d’application de la Convention de Genève.
En effet, les difficultés soulevées par eux sont essentiellement d’ordre médical, économique et familial, problèmes qui sont étrangers aux critères de fond définis à la Convention de Genève, à savoir la race, la religion, la nationalité, les opinions politiques ou l’appartenance à un certain groupe social, et aucun élément concret du dossier ne permet de retenir que ces difficultés soient dues à ces mêmes critères.
Quant aux conséquences des inondations, le tribunal est amené à conclure qu’il s’agit de circonstances ayant comme origine une catastrophe naturelle, de sorte qu’à défaut d’intervention humaine, ces faits ne tombent pas dans le champ d’application de la Convention de Genève.
Il s’ensuit que c’est à bon droit que le ministre a refusé aux demandeurs l’octroi du statut de réfugié.
Quant au volet de la décision litigieuse portant refus dans le chef des demandeurs d’un statut de protection subsidiaire, il y a lieu de relever qu’aux termes de l’article 2 f) de la loi du 5 mai 2006, est une « personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire », « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 37, l’article 39, paragraphes (1) et (2), n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays ».
L’article 37 de la même loi énumère, en tant qu’atteintes graves, sous ses points a), b) et c), « la peine de mort ou l’exécution ; la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine ; des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».
Il s’ensuit que l’octroi de la protection subsidiaire est notamment soumis à la double condition que les actes invoqués par le demandeur, de par leur nature, entrent dans le champ d’application de l’article 37 précité de la loi du 5 mai 2006, à savoir qu’ils répondent aux hypothèses envisagées aux points a), b) et c), précitées, de l’article 37, et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens des articles 28 et 29 de cette même loi, étant relevé que les conditions de la qualification d’acteur sont communes au statut de réfugié et à celui conféré par la protection subsidiaire.
Par ailleurs, l’article 2 f) précité, définissant la personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire comme étant celle qui avance « des motifs sérieux et avérés de croire que », si elle est renvoyée dans son pays d’origine, « courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 37 », vise partant une personne risquant d’encourir des atteintes graves futures, sans qu’il n’y ait nécessairement besoin que le demandeur ait subi des atteintes graves avant son départ de son pays d’origine. Par contre, s’il s’avérait que tel avait été le cas, l’article 26 (4) de la loi du 5 mai 2006 instaure une présomption réfragable que de telles atteintes graves se reproduiront en cas de retour dans le pays d’origine, étant relevé que cette présomption pourra être renversée par le ministre par la justification de l’existence de bonnes raisons de penser que ces atteintes graves ne se reproduiront pas. L’analyse du tribunal devra par conséquent en définitive porter sur l’évaluation, au regard des faits que le demandeur avance, du risque réel de subir des atteintes graves qu’il encourt en cas de retour dans son pays d’origine.
A l’appui de leur demande en obtention du bénéfice de la protection subsidiaire, les demandeurs se basent en substance sur les mêmes faits et arguments que ceux avancés dans le cadre de leur demande en obtention du statut de réfugié.
Le délégué du gouvernement estime que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation des demandeurs, de sorte que c’est à bon droit que le ministre leur aurait refusé le bénéfice du statut de la protection subsidiaire.
Le tribunal est amené à relever de prime abord que les demandeurs n’allèguent pas qu’il y a des motifs sérieux et avérés de croire qu’ils risquent la peine de mort, la torture ou d’être victimes de menaces graves et individuelles contre leur vie ou leur personne en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.
Par ailleurs, le tribunal est amené à retenir que les difficultés invoquées par les consorts … ne sont pas d’une gravité suffisante pour être qualifiées de traitements inhumains ou dégradants.
En effet, il se dégage des explications fournies par le demandeur qu’il a pu avoir accès aux soins médicaux dans son pays d’origine. Si, le cas échéant, il n’est pas satisfait de ces services, cela ne permet pas de déduire, à défaut d’explications concrètes quant aux circonstances de ces traitements et à défaut d’élément concret permettant de retenir qu’une intervention humaine soit à l’origine de ces difficultés, qu’il ait de ce fait subi un traitement inhumain ou dégradant dans son pays d’origine.
Pareillement, le fait de se voir refuser des aides par les autorités communales de son village d’origine, aussi regrettable que cette situation ne soit, ne peut, au regard des éléments à la disposition du tribunal, au regard des explications peu détaillées des demandeurs et à défaut par eux d’avoir réclamé auprès d’autorités supérieures, être qualifié de traitement inhumain ou dégradant.
Il en est de même des difficultés rencontrées par les demandeurs avec la grand-mère du demandeur. Une situation conflictuelle familiale telle que décrite par les demandeurs, qui est certes humainement regrettable, ne revêt pas un caractère de gravité suffisant pour pouvoir être qualifiée de traitement inhumain ou dégradant.
S’agissant de l’affirmation de la demanderesse qu’elle aurait dû se rendre au Monténégro pour se faire soigner médicalement, au regard de ses explications tout à fait générales et vagues et à défaut d’autres précisions, le tribunal ne dispose pas de suffisamment d’éléments permettant de retenir l’existence d’un refus d’accès des autorités serbes aux soins médicaux.
Enfin, en ce qui concerne d’une manière générale la situation économique des demandeurs, qui s’est essentiellement aggravée en raison des inondations ayant eu lieu en mai 2014, force est de constater à cet égard, d’une part, que l’article 37 de la loi du 5 mai 2006 se réfère à des traitements ou des sanctions « infligées », tandis que l’article 28 de la même loi énumère les acteurs des persécutions et des atteintes graves, de sorte à nécessiter une intervention, une responsabilité humaine et à exclure de son champ d’application l’éventualité d’« atteintes graves » lorsqu’aucun acteur ne peut en être tenu responsable. Il en résulte qu’un état de précarité et de pauvreté, impliquant aussi des difficultés de payer des soins médicaux adéquats à eux seuls, en l’absence de toute circonstance permettant de déduire qu’ils auraient été infligés ou qu’ils résulteraient d’une intervention directe ou indirecte humaine, ne constitue pas un motif valable d’obtention de la protection subsidiaire au sens de la loi du 5 mai 2006.
C’est dès lors à juste titre que le ministre a refusé d’accorder aux demandeurs la protection subsidiaire au sens de l’article 2 f) de la loi du 5 mai 2006.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a déclaré la demande de protection internationale sous analyse comme non fondée, de sorte que le recours en réformation est à rejeter pour ne pas être fondé.
3) Quant au recours tendant à l’annulation de la décision du ministre du 13 mars 2015 portant ordre de quitter le territoire Etant donné que l’article 20, paragraphe (4) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en annulation contre l’ordre de quitter le territoire, une requête sollicitant l’annulation de pareil ordre contenu dans la décision déférée du 13 mars 2015 a valablement pu être dirigée contre la décision ministérielle litigieuse. Le recours en annulation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai prévus par la loi, il est recevable.
A l’appui de ce volet de la requête introductive d’instance les demandeurs font valoir que l’ordre de quitter le territoire devrait encourir l’annulation dans la mesure où la décision portant refus d’une protection internationale devrait être réformée.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours.
Aux termes de l’article 20, paragraphe (2) de la loi du 5 mai 2006, « une décision négative du ministre vaut décision de retour. […] ». En vertu de l’article 2 r) de la loi du 5 mai 2006, la notion de « décision de retour » se définit comme « la décision négative du ministre déclarant illégal le séjour et imposant l’ordre de quitter le territoire ». Il s’ensuit que l’ordre de quitter est la conséquence automatique du refus de protection internationale.
Dans la mesure où le tribunal vient de retenir que c’est à juste titre que le ministre a rejeté la demande de protection internationale des demandeurs et que, par conséquent, un retour dans leur pays d’origine ne les expose ni à des persécutions, ni à des atteintes graves au sens de l’article 37 de la loi du 5 mai 2006, il a également pu valablement assortir cette décision d’un ordre de quitter le territoire.
A défaut d’autres moyens soulevés par les demandeurs, le tribunal ne saurait mettre en cause la légalité de l’ordre de quitter le territoire pris à leur égard.
Il s’ensuit que le recours en annulation est à rejeter comme étant non fondé.
Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
reçoit en la forme le recours en annulation introduit contre la décision ministérielle du 13 mars 2015 de statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée ;
au fond, le déclare non justifié et en déboute ;
reçoit en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 13 mars 2015 portant refus d’une protection internationale ;
au fond, le déclare non justifié et en déboute ;
reçoit en la forme le recours en annulation introduit contre la décision ministérielle du 13 mars 2015 portant ordre de quitter le territoire ;
au fond, le déclare non justifié et en déboute ;
condamne les demandeurs aux frais.
Ainsi jugé par :
Claude Fellens, vice-président, Annick Braun, premier juge, Jackie Maroldt, attaché de justice, et lu à l’audience publique extraordinaire du 15 mai 2015, à 17.00 heures, par le vice-
président, en présence du greffier Goreti Pinto.
s. Goreti Pinto s. Claude Fellens Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 15 mai 2015 Le greffier du tribunal administratif 14