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27/04/2015 | LUXEMBOURG | N°34757

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 27 avril 2015, 34757


Tribunal administratif Numéro 34757 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 25 juin 2014 Ire chambre Audience publique du 27 avril 2015 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 19, L.5.5.2006)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 34757 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 25 juin 2014 par Maître Daniel Cravatte, avocat à la Cour, inscrit

au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, agissant en sa qualité d’administrateur ad ...

Tribunal administratif Numéro 34757 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 25 juin 2014 Ire chambre Audience publique du 27 avril 2015 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 19, L.5.5.2006)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 34757 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 25 juin 2014 par Maître Daniel Cravatte, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, agissant en sa qualité d’administrateur ad hoc et au nom de Monsieur …, né le … à … (Albanie), de nationalité albanaise, demeurant actuellement à L-…, tendant, d’une part, à la réformation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 26 mai 2014 en ce que celle-ci porte refus de sa demande d’une protection subsidiaire et, d’autre part, à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire inscrit dans le même acte ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 20 août 2014 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Daniel Cravatte et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Jacques en leurs plaidoiries respectives.

Le 31 mai 2013, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères, direction de l’Immigration, une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, ci-après dénommée « la loi du 5 mai 2006 ».

Les déclarations de Monsieur … sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg furent actées par un agent de la police grand-ducale, section police des étrangers et des jeux, dans un rapport du même jour.

Monsieur … fut entendu le 31 mars 2014 par un agent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.

1 Par décision du 26 mai 2014, notifiée par lettre recommandée envoyée le 28 mai 2014, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après dénommé « le ministre », informa Monsieur … de ce que sa demande de protection internationale avait été rejetée comme étant non fondée, tout en lui ordonnant de quitter le territoire dans un délai de trente jours. Cette décision est libellée comme suit :

« J’ai l’honneur de me référer à votre demande en obtention d’une protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection que vous avez présentée auprès du service compétent du Ministère des Affaires étrangères en date du 31 mai 2013.

Quant à vos déclarations auprès du Service de Police Judiciaire En mains le rapport du Service de Police Judiciaire du 31 mai 2013.

Il ressort dudit rapport que vous êtes entré en Union Européen par la Hongrie en date du 18 mai 2013.

Vous présentez un passeport albanais établi le 10 mai 2012.

Quant à vos déclarations auprès du Service des Réfugiés En mains la retranscription de l’entretien de l’agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes du 31 mars 2014 sur les motifs sous-tendant votre demande de protection internationale.

Il résulte de vos déclarations qu’en 2007 ou 2008, votre sœur aurait été victime d’un viol de la part d’un certain …, fils du président d’un parti yougoslave nommé ….

Votre père aurait eu l’intention de se venger [sur] la famille … selon la loi Kanun.

Votre mère ainsi que votre grand-mère auraient dénoncé l’acte de … à la police et elles l’auraient averti que votre père aurait l’intention de se venger. Ainsi, votre père aurait tenté d’assassiner … mais étant donné que la police aurait été au courant de ses intentions, il aurait été sous leur protection. Depuis cet incident votre père serait devenu violent envers vous et le reste de la famille.

Un an après l’incident, … aurait perdu la vie sous des conditions mystérieuses.

Dès lors, sa famille aurait pensé que votre père aurait été responsable de son décès et elle aurait déclaré par voie téléphonique de se venger [sur] vous.

En 2010 ou 2011, … vous aurait appelé personnellement afin de vous menacer de mort.

En 2012, votre père se serait bagarré avec des membres de la famille …. Un mois plus tard, il aurait insisté pour que vous ne sortiez plus de la maison. De plus, il vous aurait fait travailler dans son magasin. Votre père lui-même ne serait pas sorti 2librement par peur mais il aurait encore exercé sa profession de chauffeur de camion.

En mai 2013, votre mère aurait pris la décision que vous partiez de l’Albanie.

Selon vos dires elle aurait pensé que vous devriez être suivi par un psychologue parce que vous vous seriez senti mal à l’aise. De plus, elle aurait craint pour votre vie. Vous auriez pris un taxi de Shkodër à Podgorica, d’où vous auriez pu prendre un bus pour gagner le Luxembourg.

Votre père vous aurait visité à deux reprises au Luxembourg. Lors de sa deuxième visite il aurait perdu la vie suite au stress. Selon vos dires la vengeance tomberait maintenant sur vous.

Enfin, il ressort de la retranscription de l’entretien qu’il n’y a plus d’autres faits à invoquer au sujet de votre demande de protection internationale et [des] déclarations faites dans ce contexte.

Analyse ministérielle en matière de Protection internationale En application de la loi précitée du 5 mai 2006, votre demande de protection internationale est évaluée par rapport aux conditions d’obtention du statut de réfugié et de celles d’obtention du statut conféré par la protection subsidiaire.

Soulignons dans ce contexte que l’examen et l’évaluation de votre situation personnelle ne se limitent pas à la pertinence des faits allégués, mais qu’il s’agit également d’apprécier la valeur des éléments de preuve et la crédibilité de vos déclarations.

1. Quant à la Convention de Genève Il y a d’abord lieu de relever que la reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur qui doit établir, concrètement, que sa situation individuelle est telle qu’elle laisse supposer une crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève de 1951 relative au statut des Réfugiés.

Rappelons à cet égard que l’octroi du statut de réfugié est soumis à la triple condition que les actes invoqués sont motivés par un des critères de fond définis à l’article 2 c) de la loi modifiée du 5 mai 2006, que ces actes sont d’une gravité suffisante au sens de l’article 31(1) de la prédite loi, et qu’ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes de l’article 28 de la loi susmentionnée.

Selon l’article 1A paragraphe 2 de ladite Convention, le terme de réfugié s’applique à toute personne qui crai[nt] avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe s ocial ou de ses opinions politiques, qui se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou 3qui si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels évènements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner.

Monsieur, relevons en premier lieu que vous possédez la nationalité albanaise et que selon l’article 1 (1) du règlement grand-ducal du 21 décembre 2007 fixant une liste de pays d’origine sûrs au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, votre pays d’origine, l’Albanie doit être considérée comme pays d’origine sûr au sens de l’article 21 de la prédite loi, les conditions du point c) de l’article 20§1 étant donc également remplies.

Un pays est considéré comme sûr s’il veille au respect des principes de liberté, de la démocratie et de l’état de droit, ainsi que des droits de l’homme et des libertés fondamentales. De plus, lorsque sur la base de la situation légale, de l’application du droit dans le cadre d’un régime démocratique et des circonstances politiques, il peut être démontré que, d’une manière générale et de manière durable, il n’existe pas de recours à des persécutions au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, ni des motifs sérieux de croire que le demandeur de protection internationale court un risque réel de subir une atteinte grave telle que déterminée à l’article 37 de la loi modifiée du 5 mai 2006, le pays d’origine concerné peut valablement être considéré comme pays d’origine sûr.

A titre complémentaire, il convient également de relever qu’en Albanie, les critères suivants sont garantis :

-

l’existence d’un système judiciaire indépendant ;

-

la reconnaissance des libertés et des droits démocratiques de base, y compris de mécanismes de recours si ces droits ou libertés sont violés ;

-

l’existence d’organisations de la société civile.

Cet aspect est renforcé par le fait que l’Albanie se rapproche davantage des normes européennes et [du] statut de candidat à l’élargissement : « Le président Barroso a salué les progrès réalisés par l’Albanie sur un programme de réformes européen grâce aux efforts communs du gouvernement et de l’opposition. Il a encouragé le pays à continuer sur son élan et à poursuivre les réformes importantes:

"Le statut de pays candidat est accessible." ».

Compte tenu des constatations qui précèdent concernant la situation juridique, l’application du droit dans le cadre d’un régime démocratique et la mesure dans laquelle une protection est offerte dans votre pays d’origine contre d’éventuels persécutions ou mauvais traitements, le Ministère des Affaires étrangères et européennes est d’avis que, d’une manière générale et uniformément, il n’est pas recouru en Albanie à la persécution au sens de la Convention relative au statut des réfugiés. Ainsi, force est donc de constater que les critères du paragraphe 4 article 21 sont clairement remplis. De plus, il n’existe pas de motif sérieux de croire que vous 4courez un risque réel de subir une atteinte grave telle que déterminée à l’article 37 de la loi précitée du 5 mai 2006.

En l’espèce, il ressort de votre dossier administratif que les raisons qui vous ont amenées à quitter votre pays d’origine, à savoir la prétendue dette de sang, pourraient à priori rentrer dans le champ d’application de ladite Convention, toutefois elles ne sont pas suffisamment graves pour pouvoir retenir dans votre chef l’existence d’une crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève et de la loi modifiée du 5 mai 2006. En effet, les actes invoqués, tels que les menaces de vengeance à l’égard de votre famille, constituent des délits relevant du droit commun, punissables selon la loi albanaise et qui ne répondent à aucun des critères prévus par la Convention de Genève et la loi modifiée du 5 mai 2006.

De plus, les membres de la famille … sont à considérer comme des personnes privées. S’agissant d’actes émanant de personnes privées, une persécution commise par des tiers peut être considérée comme fondant une crainte légitime au sens de la Convention de Genève uniquement en cas de défaut de protection de la part des autorités politiques pour l’un des motifs énoncés par ladite Convention et dont l’existence doit être mise suffisamment en évidence par le demandeur d’asile. Or, tel n’est pas le cas en l’espèce. En application de l’article 29 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection au cas de l’espèce, il ne ressort pas du rapport d’audition que l’Etat ou d’autres organisations étatiques présentes sur le territoire de votre pays ne peuvent ou ne veulent pas vous accorder une protection à l’encontre de la famille .. Monsieur, vous dites vous-même que la police aurait protégé … après que votre mère et votre grand-mère auraient averti les autorités que votre père planifierait un acte de vengeance. Il n’est dès lors pas établi que la police ne pourrait pas assurer votre protection.

De plus, vous ne faites état de quelconques problèmes concrets au sens de la Convention de Genève durant tous ces années. Contrairement à vos dires, vous ne vous seriez pas caché car vous auriez travaillé pendant une année dans le magasin de votre père, un travail qui vous expose au public. De même, contrairement à vos dires, votre père ne se serait pas caché mais aurait effectué son travail de chauffeur de camions et il serait souvent allé au casino. Vous n’auriez reçu qu’un appel menaçant en 2010. Or, ceci ne constitue qu’un incident isolé. De plus, une simple menace n’est pas d’une gravité telle à fonder une crainte de persécution.

Cependant, indépendamment de l’absence d’un quelconque élément de preuve de vos déclarations, les craintes que vous exprimez s’analysent en l’expression d’un simple sentiment général d’insécurité, plutôt qu’en une crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève.

Quant aux problèmes de vengeance, la police albanaise montre une détermination particulière à rayer ces pratiques. Ainsi, il ressort d’informations obtenues auprès du CEDOCA (centre de recherche et de documentation du Commissariat général aux réfugiés et apatrides — Belgique) que :

5« Des formations spécifiques ont été données au personnel de la police sur la prévention, l’élucidation des meurtres en général et en particulier dans le cadre des représailles et de la vendetta. Une unité spécialisée de la police a également été créée.

(…) La police elle-même a signalé au rapporteur spécial des Nations Unies, que l’unité spécialisée de Shkoder menait des enquêtes sur les crimes et offrait une protection aux familles qui vivaient dans l’isolement. Toujours d’après la police, s’il y a une diminution du nombre de meurtres à cause de la vendetta, elle est due aux efforts de cette unité. Entre-temps, l’unité spéciale a été réintégrée dans les services réguliers de police. (…) Les autorités ont rouvert divers dossiers de crimes et délits non résolus dans le cadre de vendettas et ce, pour mettre un terme à l’impunité. Ainsi, les autorités sont aussi intervenues dans une vendetta célèbre entre les familles Haklaj et Hoxha. En septembre 2006, le journal Shekulli annonçait que le parquet de Tropojë avait rouvert 150 dossiers. Ces dossiers avaient tous un lien avec des crimes commis depuis 1997 à Tropojë, dans le cadre d’une vendetta entre les familles Haklaj et Hoxha. Il s’est avéré des statistiques de la police qu’au moins 16 personnes avaient perdu la vie, mais l’on estimait officieusement que le nombre total de morts pouvait concerner 150 personnes.

Le parquet a déclaré que l’enquête sur les crimes non résolus pouvait être rouverte grâce à de nouvelles preuves. En 2008 aussi, la police a rouvert des dossiers de vendetta des années précédentes et de nouvelles enquêtes ont été menées. Un dossier a été rouvert à l’encontre de 81 meurtriers. ».

Concernant l’accès à la protection des autorités, il convient de mentionner un extrait de la loi albanaise no. 8224 sur l’organisation et le fonctionnement de la police municipale : « (…) are mandated to perform functions that "serve the public order, tranquillity, and the progress of public works within the territory of the municipality or commune, [and] which are not under the competence of other state authorities in compliance with the provisions of this law ».

Concernant la police albanaise, il convient de noter que: « Selon la loi de 2007 de l’Albanie sur la police d’État, la force policière albanaise est une institution relevant du ministère de l’Intérieur (Albanie 2007, art. 6). D’après l’article 12 de la loi, la police est organisée centralement et localement; la Direction générale, située à Tirana, supervise le niveau central, alors que les directions régionales et les directions régionales de la frontière et des migrations administrent les fonctions au niveau local (ibid., art. 12, 13). Le paragraphe 13(3) de la loi prévoit que la Direction générale de la police • supervise l’exécution des fonctions et des tâches policières par les directions régionales de la police ;

• coordonne les questions touchant le recrutement et la formation des employés de la police ;

• coordonne la mise en œuvre de stratégies pour la prévention et la réduction du crime, le maintien de l’ordre public, la supervision et le contrôle des frontières de l’État et, en collaboration avec d’autres organisations désignées, la protection de la sécurité nationale ;

6• coordonne l’exécution des fonctions et des tâches policières ;

• coordonne la mise en œuvre d’accords internationaux concernant la police ;

• traite les données collectées par la police dans la mesure où cela est nécessaire pour remplir les fonctions de la police ;

• exécute des tâches policières conformément à la présente loi, à d’autres lois et aux lois normatives s’appuyant sur la présente loi et sur d’autres lois (ibid., paragr. 13(3)). (…) ».

Finalement, il convient de rappeler que la notion de protection de la part du pays d’origine n’implique pas une sécurité physique absolue des habitants contre la commission d’actes de violences, mais suppose des démarches de la part des autorités en place en vue de la poursuite et de la répression des actes de violence commis, d’une efficacité suffisante pour maintenir un certain degré de dissuasion. Une persécut ion ne saurait être admise dès la commission matérielle d’un acte criminel, mais seulement dans l’hypothèse où les agressions commises par un groupe de population seraient encouragées par les autorités en place, voire où celles-ci seraient incapables d’offrir une protection appropriée. Or, tel n’est également pas le cas en l’espèce.

Quoi qu’il en soit, Monsieur, même à supposer une telle vengeance établie en l’espèce, il convient de souligner qu’il s’agit de délits de droit commun, aucun arrière-

fond politique, racial ou ethnique n’existe. Il a d’ailleurs été jugé par le Tribunal administratif que :

« Quant aux menaces de vengeance émanant de la famille du dénommé … dont les demandeurs font état, force est au tribunal de constater que les demandeurs restent en défaut de fournir des précisions qui permettraient de donner à ces menaces une qualification autre que celle d’infractions de droit commun, lesquelles menaces sont dès lors à considérer comme des problèmes interpersonnels et d’ordre privé qui ne peuvent de ce fait être rattachés à l’un des critères de persécution prévus à l’article 2 c) de la loi du 5 mai 2006 ou par la Convention de Genève relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951. » (TA ; n°30.681 du rôle ; 12 juin 2012) Rappelons, Monsieur, que pendant sept ans, rien ne vous serait personnellement arrivé.

Soulevons par la suite que l’autorité ministérielle a été amenée à émettre des doutes quant à la crédibilité de votre récit, alors qu’il résulte de l’examen des rapports d’entretien que vos déclarations présentent des incohérences.

Ainsi, il convient de mentionner qu’il ne ressort pas des recherches ministérielles qu’un certain … aurait été président d’un parti yougoslave. Même en supposant qu’une personne de ce nom aurait été président connu d’un parti politique, il ne ressort pas de nos recherches qu’un … aurait perdu la vie sous des conditions 7mystérieuses. Il est à supposer que la mort mystérieuse d’un leader politique figurerait dans des articles de presse.

De plus, en date du 31 mars 2013, vous avez indiqué sur la fiche des motifs que vous auriez quitté votre pays d’origine car votre père vous aurait maltraité, forcé de quitter l’école et de travailler. Vous n’avez à aucun moment fait allusion à une peur d’un acte de vengeance dans votre fiche de motifs bien que ceci est la motivation principale de votre demande de protection internationale selon vos dires lors de l’entretien du 31 mars 2014. Dès lors, des doutes sont à formuler quant à votre récit.

Soulevons à titre complémentaire que les violences de la part de votre père constituent des infractions relevant du droit commun, punissables selon la loi albanaise, qui ne sauraient être considérés comme des actes de persécution tombant sous un des cas prévus par la Convention de Genève et la loi modifiée du 5 mai 2006.

Ainsi: « La loi sur les mesures contre la violence dans les relations familiales (Law on Measures Against Violence in Family Relations) de l’Albanie a été adoptée en 2006 et comprend une déclaration visant son entrée en vigueur le 1er juin 2007 (Albanie 2006, art. 26). Elle a pour objet de [traduction] « prévenir et de réduire la violence familiale sous toutes ses formes à l’aide des mesures légales appropriées » et de « garantir la protection des membres de la famille qui sont victimes de violence familiale par l’entremise de mesures légales, en portant une attention particulière aux besoins des enfants, des personnes âgées et des personnes handicapées » (ibid., art. 1).

La loi permet aux victimes de violence familiale d’obtenir des ordonnances de protection, prévoit des unités spéciales en matière de violence familiale dans les services de police et souligne les responsabilités précises des ministères de l’Intérieur, de la Santé et de la Justice, ainsi que des autorités locales (ibid., art. 7, 13). Des modifications y ont été apportées le 30 septembre 2010 (Al 2011; CLCI 6 sept. 2011).

Elles portent sur la mise sur pied d’un refuge pour victimes de violence familiale et d’un système de coordination des mesures prises par les autorités auxquelles sont déférés les cas (ibid.; Al 2011). ».

Dans le même contexte: “Domestic violence remains a deeply worrying phenomenon in Albania. Viewed and treated as a family issue within a broader patriarchal socio-cultural context, domestic violence in Albania, differently from human traficking, is extended across the country, affecting all strata of society.

Currently, there are only three Centers which are managed by NGOs that provide accommodation and rehabilitation services for victims of violence, including victims of traficking. In September 2010, the GoA [Government of Albania] approved the Law 10329, dated 30 September 2010, which provides for the establishment and operation of a National Centre of Social Care Service for victims of domestic violence. (…) The Child Helpline ‘ALO 116’ has been one of the first aid and counseling services for children who want to speak about their problems. The Hotline staff is trained to refer acts of violence or other forms of abuse to appropriate authorities.

During interviews with children who drafted the UNCRC alternative report, ALO 116, was mentioned as one of the few methods children use to address their problems. ».

8Le site de « Humanium Help the Children » énumère des ONG qui sont actives en Albanie pour défendre les droits des enfants :

« Defence for Children International (DCI) : Defence for Children International (DCI) focuses on promoting and protecting children’s rights on a global, regional, national and local level.

Ecouter l’enfant : The primary mission of this NGO is to improve living conditions for children facing difficulties throughout the world.

Enfants du monde : This association is devoted to the protection of children throughout the world, through assistance, direct or indirect, for impoverished and wounded children.

LIVIA : Livia’s objective is to fight against inequality, food insecurity, poverty and assure concrete action towards peace and human development.

Terre des hommes ; The crucial mission at Terre des hommes (TDH) is to provide aid during childhood. ».

Notons également dans ce contexte qu’en janvier 2013, le projet de développer un réseau de protection de l’enfance, mené par l’organisation non-gouvernementale « Terre des hommes », est entré dans sa deuxième phase. Le but de cette nouvelle phase du projet est d’accompagner la réforme des services sociaux actuellement menée par le ministère albanais du Travail, des Affaires sociales et de l’égalité des chances, en collaboration avec l’UNICEF et avec le soutien de la SDC [Swiss Agency for Development and Cooperation], de développer durablement les structures, les mécanismes et les compétences nécessaires pour assurer des interventions coordonnées entre les secteurs et les acteurs non formels, y compris les enfants eux-mêmes, pour la protection des enfants contre toute forme de négligence, d’abus et d’exploitation dans le pays.

Par ailleurs, l’Albanie a ratifié la Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) le 4 février 2013.

Il y a ensuite lieu de relever que votre père en tant que personne privée ne saurait être considéré comme agent de persécution au sens de la Convention de Genève et de la loi modifiée du 5 mai 2006. D’ailleurs étant donné que selon vos dires votre père serait décédé, la crainte qu’il ne vous maltraite n’existe plus.

En conclusion, les faits que vous alléguez ne peuvent, à eux seuls, établir dans votre chef une crainte fondée d’être persécuté dans votre pays d’origine du fait de votre race, de votre religion, de votre nationalité, de votre appartenance à un groupe social ou de vos convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section 1, § 2 de la Convention de Genève ainsi que les articles 31 et 32 de la loi précitée du 5 mai 2006.

9De tout ce qui précède, les conditions permettant l’octroi du statut de réfugié ne sont pas remplies.

2. Quant à la Protection subsidiaire L’octroi de la protection subsidiaire est soumis à la double condition que les actes invoqués par le demandeur, de par leur nature, entrent dans le champ d’application de l’article 37 précité de la loi modifiée du 5 mai 2006, à savoir qu’ils répondent aux hypothèses envisagées aux points a), b) et c) de l’article 37 de ladite loi, et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens de l’article 28 de cette même loi, étant relevé que les conditions de la qualification d’acteur sont communes au statut de réfugié et à celui conféré par la protection subsidiaire.

En l’espèce, il ressort de votre dossier administratif que vous basez votre demande de protection subsidiaire sur les mêmes motifs que ceux exposés à la base de votre demande de reconnaissance du statut du réfugié. En effet, vous indiquez que vous craindriez un acte de vengeance de la part de la famille ….

Au vu de ce qui précède, il convient de conclure que votre récit ne contient pas de motifs sérieux et avérés permettant de croire que vous courez un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 37 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection. En effet, les faits invoqués à l’appui de votre demande, ne nous permettent pas d’établir que a) vous craignez de vous voir infliger la peine de mort ou de vous faire exécuter, b) vous risquez de subir des actes de torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants, c) vous êtes susceptible de faire l’objet de menaces graves et individuelles contre votre vie en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.

De tout ce qui précède, les conditions permettant la reconnaissance du statut conféré par la protection subsidiaire ne sont pas remplies.

Votre demande en obtention d’une protection internationale est dès lors refusée comme non fondée au sens de l’article 19 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection.

Votre séjour étant illégal, vous êtes dans l’obligation de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours à compter du jour où la présente décision sera devenue définitive, à destination de l’Albanie, ou de tout autre pays dans lequel vous êtes autorisé à séjourner (…) » Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 25 juin 2014, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision ministérielle du 24 mai 2014 en ce que celle-ci porte refus de sa demande d’une protection subsidiaire et un recours tendant à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte.

1. Quant au recours tendant à la réformation de la décision du ministre portant 10refus d’une protection subsidiaire.

Etant donné que l’article 19 (3) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours au fond en matière de demandes de protection internationale déclarées non fondées, un recours en réformation a valablement pu être introduit contre la décision ministérielle déférée. Le recours en réformation est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi dans le mesure où il vise exclusivement le seul volet de la décision déférée portant refus de la protection subsidiaire.

A l’appui de son recours, Monsieur … fait plaider qu’il remplirait les conditions légales afin de se voir attribuer le statut mis en place par la protection subsidiaire.

Le demandeur explique qu’un dénommé …, fils d’un « ancien président d’un parti yougoslave » du nom de … aurait commis un viol sur sa sœur. Il fait valoir que, depuis la mort mystérieuse de …, la famille de ce dernier aurait commencé de proférer des menaces contre sa propre famille, étant donné que son père serait soupçonné de s’être vengé pour le viol de sa sœur.

S’il concède que de tels faits de vengeance constituent des infractions de droit commun commises par des personnes privées, le demandeur estime néanmoins que les autorités de son pays d’origine ne seraient pas disposées à lui accorder une protection adéquate du fait de l’implication de la famille … au sein d’un « parti politique yougoslave ».

Le délégué du gouvernement fait valoir pour sa part que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et conclut au rejet du recours.

Quant à la crédibilité du demandeur, force est au tribunal de relever que si ce dernier ne prend certes pas position, dans le cadre de sa requête introductive d’instance, par rapport aux doutes soulevés par le ministre dans sa décision du 26 mai 2014 relatifs aux fonctions politiques et à la mort suspecte de Monsieur …, ainsi que quant à la possibilité que le motif de la demande de protection internationale résiderait plutôt dans la seule crainte des violences de son père entretemps décédé, il échet néanmoins de soulever que ces doutes ne sont pas de nature à ébranler la crédibilité du récit du demandeur en sa globalité, étant relevé qu’une éventuelle imprécision en ce qui concerne certains détails sur l’origine de la vendetta dont il fait état peut s’expliquer par le fait que ce dernier n’était âgé que de 14 ans au jour de son audition par les services du ministère des Affaires étrangères et européennes et que les faits qu’il a relatés datent d’une époque encore plus éloignée dans le temps, le demandeur n’ayant été âgé que de 7 ou 8 ans au moment du viol de sa sœur.

Si le doute sur le passé politique du dénommé … n’a certes pas pu être dissipé par des éléments nouveaux, le récit, pris en sa globalité, est cependant à considérer comme crédible.

11Aux termes de l’article 2 a) de la loi du 5 mai 2006, la notion de « protection internationale » se définit comme correspondant au statut de réfugié et au statut conféré par la protection subsidiaire.

Or, en ce qui concerne la demande en obtention du statut de réfugié, force est de relever que le demandeur, dans sa requête introductive d’instance se limite à se voir accorder, par réformation de la décision déférée, la protection subsidiaire, de sorte que le bien fondé de la décision de refus d’un statut de réfugié n’est pas mis en cause.

Quant au volet de la décision litigieuse portant refus dans le chef du demandeur d’un statut de protection subsidiaire, il y a lieu de relever qu’aux termes de l’article 2 f) de la loi du 5 mai 2006, est une « personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire », « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 37, l’article 39, paragraphes (1) et (2), n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays ».

L’article 37 de la même loi énumère, en tant qu’atteintes graves, sous ses points a), b) et c), « la peine de mort ou l’exécution ; la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine ; ou des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

Finalement, aux termes de l’article 28 de la loi du 5 mai 2006 : « Les acteurs des persécutions ou des atteintes graves peuvent être:

a) l’Etat;

b) des partis ou organisations qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci;

c) des acteurs non étatiques, s’il peut être démontré que les acteurs visés aux points a) et b), y compris les organisations internationales, ne peuvent pas ou ne veulent pas accorder une protection contre les persécutions ou les atteintes graves. », et aux termes de l’article 29 de la même loi : « (1) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves ne peut être accordée que par:

a) l’Etat, ou 12b) des partis ou organisations, y compris des organisations internationales, qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci, pour autant qu’ils soient disposés à offrir une protection au sens du paragraphe (2) et en mesure de le faire.

(2) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves doit être effective et non temporaire. Une telle protection est généralement accordée lorsque les acteurs visés au paragraphe (1) points a) et b) prennent des mesures raisonnables pour empêcher la persécution ou des atteintes graves, entre autres lorsqu’ils disposent d’un système judiciaire effectif permettant de déceler, de poursuivre et de sanctionner les actes constituant une persécution ou une atteinte grave, et lorsque le demandeur a accès à cette protection. (…) » Il s’ensuit que l’octroi de la protection subsidiaire est notamment soumis aux conditions que les actes invoqués par le demandeur, de par leur nature, entrent dans le champ d’application de l’article 37 précité de la loi du 5 mai 2006, à savoir qu’ils répondent aux hypothèses envisagées aux points a), b) et c), précitées, de l’article 37, et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens des articles 28 et 29 de cette même loi.

Par ailleurs, l’article 2 f) précité, définissant la personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire comme étant celle qui avance « des motifs sérieux et avérés de croire que », si elle était renvoyée dans son pays d’origine « elle courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 37 (…) », cette définition vise partant une personne risquant d’encourir des atteintes graves futures, sans qu’il n’y ait nécessairement besoin que le demandeur ait subi des atteintes graves avant son départ de son pays d’origine. Par contre, s’il s’avérait que tel avait été le cas, l’article 26 (4) de la loi du 5 mai 2006 établit une présomption simple que les atteintes graves antérieures d’ores et déjà subies se reproduiront en cas de retour dans le pays d’origine, étant relevé que cette présomption pourra être renversée par le ministre par la justification de l’existence de bonnes raisons de penser que ces atteintes graves ne se reproduiront pas.

L’analyse du tribunal devra par conséquent en définitive porter sur l’évaluation, au regard des faits que le demandeur avance, du risque réel de subir des atteintes graves qu’il encourt en cas de retour dans son pays d’origine.

En l’espèce, si les faits invoqués par le demandeur, à savoir la situation de vendetta de la part de la famille …, concrétisée notamment par la menace de mort directement adressée au demandeur en 2010, alors qu’il avait seulement 11 ans, seraient a priori susceptibles de rentrer dans les prévisions de l’article 37 b) de la loi du 5 mai 2006, d’autant plus que le risque personnel du demandeur a augmenté suite au récent décès accidentel de son père, le tribunal constate néanmoins que les personnes par lesquelles le demandeur déclare avoir été menacé sont des personnes privées, sans lien avec l’Etat, de sorte que la crainte de faire l’objet d’atteintes graves ne saurait être considérée comme fondée que si les autorités albanaises ne veulent ou ne peuvent pas fournir une protection effective au demandeur ou s’il n’y a pas d’Etat susceptible d’accorder une protection :

c’est l’absence de protection qui est décisive, quelle que soit la source des atteintes graves.

13 Or, la notion de protection n’implique pas une sécurité physique absolue des habitants d’un pays contre la commission de tout acte de violence, mais suppose des démarches de la part des autorités en place en vue de la poursuite et de la répression des actes de violence commis, d’une efficacité suffisante pour maintenir un certain niveau de dissuasion. L’existence d’une atteinte grave ne saurait être admise dès la commission matérielle d’un acte criminel, mais seulement dans l’hypothèse où les agressions commises par une personne ou un groupe de la population seraient encouragées ou tolérées par les autorités en place, voire où celles-ci seraient incapables d’offrir une protection appropriée.

Dès lors, chaque fois que la personne concernée est admise à bénéficier de la protection du pays dont elle a la nationalité, et qu’elle n’a aucune raison, fondée sur une crainte justifiée, de refuser cette protection, l’intéressé n’a pas besoin de la protection internationale. En toute hypothèse, il faut que l’intéressé ait tenté d’obtenir la protection des autorités de son pays pour autant qu’une telle tentative paraisse raisonnable en raison du contexte. Cette position extensive se justifie au regard de l’aspect protectionnel du droit international des réfugiés qui consiste à substituer une protection internationale là où celle de l’État fait défaut.

A cet égard, il ressort des déclarations du demandeur lors de son audition par un agent du ministère des Affaires étrangères et européennes que ni lui-même, ni sa famille n’a jamais recherché une protection de la part des autorités albanaises à cet égard, ni même chargé dans ce contexte une association de réconciliation, et ce, sans faire état d’un motif valable qui les en aurait empêchés, de sorte que le demandeur reste en défaut d’établir que les autorités de son pays d’origine, à savoir l’Albanie, seraient en défaut de lui fournir une protection adéquate à cet égard, d’autant plus que les considérations générales présentées par la partie étatique sur la disposition et la volonté des autorités publiques albanaises de lutter contre le phénomène de la vengeance en application de la loi du Kanun ne sont pas valablement énervées par le demandeur. Force est dans ce contexte de relever que l’affirmation selon laquelle les forces de l’ordre albanaises refuseraient d’intervenir en raison de l’activité politique du dénommé … ne repose sur aucun élément objectif et reste à l’état d’une allégation contestée en raison du doute subsistant sur ce point.

Au vu de ce qui précède, il n’est dès lors pas démontré que les autorités albanaises seraient dans l’incapacité ou auraient refusé de fournir au demandeur une protection au sens de l’article 29 (2) de la loi du 5 mai 2006 contre le risque d’atteinte grave de la part de la famille ….

Force est ainsi de retenir qu’en l’absence d’autres éléments, le demandeur reste en défaut d’établir qu’en cas de retour dans son pays d’origine, il risquerait la peine de mort ou l’exécution, la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants, ou encore des menaces graves et individuelles contre sa vie ou sa personne en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international. C’est partant à juste titre que le ministre a retenu que le demandeur n’a pas fait état de motifs sérieux et avérés 14permettant de croire qu’il courrait le risque de subir des atteintes graves au sens de l’article 37 de la loi du 5 mai 2006 et qu’il lui a refusé l’octroi d’une protection subsidiaire au sens de l’article 2 f) de ladite loi.

Il s’ensuit que le recours en réformation limité à ce volet de la demande de protection internationale est à rejeter comme étant non fondé.

2. Quant au recours dirigé contre l’ordre de quitter le territoire Etant donné que l’article 19 (3) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en annulation contre l’ordre de quitter le territoire, une requête sollicitant l’annulation de pareil ordre contenu dans la décision déférée du 26 mai 2004 a valablement pu être dirigée contre la décision ministérielle entreprise.

Le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Le demandeur se limite à solliciter l’annulation de l’ordre de quitter sans autre précision.

Aux termes de l’article 19 (1) de la loi du 5 mai 2006, une décision négative du ministre vaut décision de retour, laquelle est définie par l’article 2 r) de la même loi comme étant la décision négative du ministre déclarant illégal le séjour et imposant l’ordre de quitter le territoire. L’ordre de quitter le territoire y prononcé comporte l’indication du délai pour quitter le territoire ainsi que le pays à destination duquel le demandeur sera renvoyé en cas d’exécution d’office.

Or, le tribunal vient, tel que développé ci-dessus, de retenir que c’est à bon droit que le ministre a déclaré la demande de protection internationale du demandeur comme non justifiée, de sorte que compte tenu des moyens figurant dans la requête introductive d’instance, le tribunal ne saurait utilement mettre en cause ni la légalité ni le bien-fondé de la décision déférée portant ordre de quitter le territoire.

Partant, le recours en annulation est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs;

le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 26 mai 2014 en ce qui concerne le seul volet ayant pour objet le refus d’une protection subsidiaire ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

15 reçoit en la forme le recours en annulation introduit contre la décision déférée portant ordre de quitter le territoire ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Carlo Schockweiler, premier vice-président, Paul Nourissier, juge, Olivier Poos, juge, et lu à l’audience publique du 27 avril 2015 par le premier vice-président, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Carlo Schockweiler Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 27/04/2015 Le Greffier du Tribunal administratif 16


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 34757
Date de la décision : 27/04/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2015-04-27;34757 ?

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