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22/01/2015 | LUXEMBOURG | N°34235

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 22 janvier 2015, 34235


Tribunal administratif Numéro 34235 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 mars 2014 2e chambre Audience publique du 22 janvier 2015 Recours formé par l’administration communale d’….., …..

contre une décision du ministre de l’Environnement en présence de la société anonyme ….., en matière d’établissements classés

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 34235 du rôle et déposée le 24 mars 2014 au greffe du tribunal administratif par Maîtr

e Steve Helminger, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration com...

Tribunal administratif Numéro 34235 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 mars 2014 2e chambre Audience publique du 22 janvier 2015 Recours formé par l’administration communale d’….., …..

contre une décision du ministre de l’Environnement en présence de la société anonyme ….., en matière d’établissements classés

___________________________________________________________________________

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 34235 du rôle et déposée le 24 mars 2014 au greffe du tribunal administratif par Maître Steve Helminger, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de ….., établie à L- ….., , représentée par son Collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions tendant à la réformation d’un arrêté du ministre de l’Environnement du 11 février 2014, référencé sous le numéro …., autorisant la société anonyme ….. à installer et à exploiter une installation de production d’asphalte avec et sans recyclage à L-…., zone industrielle « ….. », sur un terrain inscrit au cadastre de la commune de ….., section … de ….., sous le numéro cadastral …., au lieu-dit « ….. » et au cadastre de la Ville d’….., section … de ….., sous le numéro cadastral …., au lieu-dit « ….. » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Luc Konsbruck, en remplacement de l’huissier de justice Pierre Biel, demeurant à Luxembourg, du 28 mars 2014, portant signification de ladite requête introductive d’instance à la société anonyme ….., établie et ayant son siège social à L-….., Zone Industrielle « ….. », inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro ….., représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement le 20 juin 2014 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 27 juin 2014 par Maître Laurent Niedner, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de la société anonyme ….., lequel mémoire fut notifié en date du même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de l’administration communale de ….. ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 29 septembre 2014 par Maître Steve Helminger au nom de l’administration communale de ….., notifié en date du 26 septembre 2014 au mandataire de la société anonyme ….. ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement le 27 octobre 2014 ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 27 octobre 2014 par Maître Laurent Niedner au nom de la société anonyme ….., lequel mémoire fut notifié en date du même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de l’administration communale de ….. ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Steve Helminger, Maître Laurent Niedner, et Monsieur le délégué du gouvernement Daniel Ruppert en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 1er décembre 2014.

Par arrêté du 11 février 2014, référencé sous le numéro …., le ministre de l’Environnement, désigné ci-après par « le ministre », autorisa la société anonyme ….., désignée ci-après par « la société ….. », à installer et exploiter une installation de fabrication d’asphalte avec et sans recyclage à L-….., zone industrielle « ….. », sur un terrain inscrit au cadastre de la commune de ….., section … de ….., sous le numéro cadastral …., au lieu-dit « ….. » et au cadastre de la Ville d’….., section … de ….., sous le numéro cadastral …, au lieu-

dit « ….. ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 24 mars 2014, l’administration communale de ….. a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision précitée du ministre du 11 février 2014.

Le tribunal étant compétent par application de l’article 19 de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés, désignée ci-après par « la loi du 10 juin 1999 », pour statuer en tant que juge du fond en la présente matière, un recours en réformation a valablement pu être introduit à l’encontre de l’arrêté ministériel déféré.

Le délégué du gouvernement a soulevé dans le cadre de son mémoire en réponse que dans la mesure où le conseil communal de l’administration communale d’….. aurait autorisé le collège des bourgmestre et échevins à ester en justice contre la décision ministérielle déférée du 11 février 2014, il appartiendrait à l’administration communale d’….. de verser une copie de la délibération afférente du conseil communal.

A l’audience publique des plaidoiries du 1er décembre 2014, le tribunal a encore invité le litismandataire de l’administration communale de ….. à verser en cause ladite autorisation d’ester en justice. L’administration communale d’….. a par la suite fait parvenir au tribunal un extrait de la délibération du conseil communal du 7 mars 2014 suivant lequel le conseil communal a décidé d’autoriser le collège des bourgmestre et échevins d’ester en justice contre « l’arrêté N° 1/13/0175 du ministère du Développement durable et des infrastructures du 11 février 2014 ». Il y a partant lieu de constater que le collège des bourgmestre et échevins d’ …. a valablement pu introduire le recours sous examen auprès du tribunal administratif.

Aucun autre moyen d’irrecevabilité n’ayant été soulevé et dans la mesure où une commune doit avoir à charge de veiller à ce qu'un établissement dangereux soit installé dans le respect des dispositions arrêtées par elle dans le cadre du plan d'aménagement général et du règlement sur les bâtisses, qui tend notamment à préserver un environnement naturel non pollué, le recours est recevable pour avoir été, par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi.

Quant au fond 1.

En premier lieu l’administration communale d’….. invoque une violation de l’article 17.2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, désignée ci-après par « la loi du 19 juillet 2004 », disposant que les établissements classés ne peuvent être exploités que lorsqu’ils sont situés dans une zone prévue à ces fins en conformité avec les dispositions de la loi du 19 juillet 2004. L’usine d’asphalte litigieuse en l’espèce serait située à cheval sur le territoire de la commune de ….. et celui de la ville d’…… Sur le terrain de la Ville d’….. serait installée la partie de l’exploitation procédant au concassage, cette partie du territoire communal étant classée suivant le plan d'aménagement général de la Ville d’….. en zone d’industrie légère et d’artisanat. Or, l’activité de concassage ne rentrerait pas dans la définition d’industrie légère et d’artisanat telle que figurant à l’article 2.6 de la partie écrite du plan d'aménagement général de la Ville d’….., mais constituerait plutôt une activité d’industrie lourde. L’administration communale d’….. ajoute qu’en vertu de la partie écrite du plan d'aménagement général de la commune de ….. il faudrait respecter un coefficient maximum d’utilisation du sol de 10. Elle affirme qu’étant donné que la majeure partie de la usine d’asphalte semblerait être projetée sur le seul territoire de la commune de ….. elle contesterait que la valeur de 10 du coefficient maximum d’utilisation du sol puisse être respectée.

Le délégué du gouvernement ainsi que la société ….. répondent que tant le plan d'aménagement général de la commune de ….. que celui de la Ville d’….. seraient respectés en l’espèce et que l’activité de concassage serait à ranger parmi les activités d’industrie légère.

Le délégué du gouvernement ajoute que la demanderesse n’aurait formulé qu’une suspicion quant au respect de la valeur de 10 du coefficient maximum d’utilisation du sol. La société …..

verse à cet égard un calcul destiné à démontrer que la valeur maximale du coefficient d’utilisation du sol serait bien respectée, tout en signalant que de toute façon la question du respect du coefficient d’utilisation du sol ne relèverait pas de la compétence du ministre de l’environnement qui serait limitée à la vérification de la compatibilité du projet avec la destination de la zone dans laquelle il est projeté.

Aux termes de l’article 17.2 de la loi du 10 juin 1999 : « Sous réserve de droits acquis en matière d’établissements classés, les établissements ne pourront être exploités que lorsqu’ils sont situés dans une zone prévue à ces fins en conformité avec les dispositions de la loi précitée du 19 juillet 2004 et, le cas échéant, des lois précitées du 21 mai 1999 et du 19 janvier 2004. ».

L’article 2.5 de la partie écrite du plan d'aménagement général de la Ville d’….. intitulé « Secteurs industriels (industrie lourde) » prévoit que : « Les secteurs industriels comprennent les parties du territoire de la ville dans lesquelles peuvent être maintenues, développées ou crées des installations industrielles qualifiées de lourdes par la nature de leurs activités (sidérurgie, cimenterie, etc. …), par la taille de leurs constructions et équipements industriels et par leurs investissements qui nécessitent la garantie d’une implantation à long terme. (…) ». L’article 2.6. réservé aux « Secteurs d’industrie légère et d’artisanat » dispose que : « Ces secteurs ne peuvent recevoir que des manufactures, ateliers, usines, magasins dépôts, et, en général, tous les établissements d’industrie légère et d’artisanat dont les conditions d’exploitation ne constituent pas de gêne pour le voisinage au point de vue de la sécurité, de la salubrité et de l’hygiène ainsi que du bruit. (…) ».

Le plan d'aménagement général de la Ville d'….. distingue partant parmi les secteurs d’industrie légère et d’artisanat et les secteurs industriels, sans pour autant fournir une définition concrète desdits secteurs, mais, d’une part, en donnant une liste d’exemples non exhaustive d’exploitations autorisées dans les secteurs respectifs, ne comprenant cependant pas l’activité de concassage et, d’autre part, en fixant des critères pour procéder à la détermination des installations industrielles qualifiées de lourdes, à savoir la nature de leurs activités, la taille de leurs constructions et équipements industriels et leurs investissements nécessitant une garantie d’implantation à long terme, de sorte qu’il échet de déterminer dans quel secteur il y a lieu de ranger l’activité de concassage litigieuse en l’espèce.

A cet égard, il ressort des explications de la société ….., non contestées sur ce point par l’administration communale de ….., que le concasseur en cause est un concasseur mobile sur roues admis à la circulation sur les voies publiques et utilisé dans un hall fermé. Par ailleurs, il n’est pas contesté qu’il s’agit d’un concasseur destiné à servir les seuls besoins de la société ….. et non point destiné à la production en gros pour la vente publique. Tant l’envergure de la production du concasseur en cause que la taille des constructions et équipements industriels sont partant nécessairement restreintes. Il s’ensuit qu’en l’espèce, l’activité de concassage de la société ….. est à considérer comme rentrant dans les activités autorisées en secteur d’industrie légère et d’artisanat.

Aucune incompatibilité entre les activités de concassage autorisées et exercées sur le territoire de la Ville d'….. et les dispositions du plan d'aménagement général de la Ville d'…..

ne peut partant être constatée, de sorte que le moyen afférent de l’administration communale de ….. est à rejeter pour ne pas être fondé.

Enfin, quant au moyen ayant trait à la question du respect de la valeur maximale du coefficient d’utilisation du sol, outre le fait que ledit moyen n’est formulé que de manière vague et hypothétique sans être développé ni étayé concrètement, force est au tribunal de constater que la société ….. a affirmé à juste titre que cette question ne relève pas de la compétence du ministre de l’Environnement, de sorte que le moyen afférent est à rejeter pour ne pas être pertinent dans le cadre du recours sous examen dirigé précisément contre une autorisation délivrée par le ministre de l’Environnement.

2.

L’administration communale demanderesse fait encore valoir que l’autorisation déférée contreviendrait aux dispositions de la loi du 10 juin 1999, ainsi qu’à son règlement grand-ducal d’exécution du 10 mai 2012 portant nouvelle nomenclature et classification des établissements classés, désigné ci-après par « le règlement grand-ducal du 10 mai 2012 », dans la mesure où non seulement les établissements seraient individuellement soumis à une autorisation d’exploitation, mais que les zones d’activités à caractère commercial, artisanal ou industriel devraient également suivre une procédure d’autorisation de la classe 1.

Le délégué du gouvernement répond en se référant à un jugement du tribunal administratif du 15 décembre 2004, inscrit sous le numéro 17705 du rôle, confirmé en instance d’appel par la Cour administrative dans un arrêt rendu le 7 juillet 2005, inscrit au numéro 19221C du rôle, que l’obligation de suivre une procédure d’autorisation de la classe 1 n’existerait que pour la création, voire l’aménagement de nouvelles zones d’activités et que la zone concernée en l’espèce aurait d’ores et déjà existé de sorte qu’aucune violation des dispositions de la loi du 10 juin 1999 ne saurait être constatée en l’espèce.

La société ….. fait valoir qu’aux termes du point 060102 de l’annexe du règlement grand-ducal du 10 mai 2012, seuls la création ou l’aménagement de zones d’activités seraient soumis à l’obligation de suivre une procédure d’autorisation de classe 1, mais non point les zones d’activités d’ores et déjà existantes. Une règlementation contraire aurait d’ailleurs engendré la fermeture de toutes zones d’activités existantes. La société ….. ajoute que les administrations communales seraient mal venues de se prévaloir du défaut de l’existence d’une autorisation pour la zone d’activité litigieuse, étant donné que, le cas échéant, il leur aurait appartenu de solliciter une telle autorisation. Enfin, elle argumente qu’un accroissement de la circulation constituerait une répercussion normale dans l’hypothèse de l’installation d’une exploitation supplémentaire, non spécifiquement liée au type d’établissement.

L’article 1er de la loi du 10 juin 1999 dispose que : « (…) 2. Sont soumis aux dispositions de la présente loi tout établissement industriel, commercial ou artisanal, public ou privé, toute installation, toute activité ou activité connexe et tout procédé, dénommés ci-

après «établissement(s)», dont l’existence, l’exploitation ou la mise en œuvre peuvent présenter des causes de danger ou des inconvénients à l’égard des intérêts dont question au point 1. ».

Aux termes de l’article 3 de la loi du 10 juin 1999 : « Les établissements sont divisés en quatre classes et deux sous-classes.

Leur nomenclature et leur classification sont établis par règlement grand-ducal. ».

En fonction de leur classification respective, les établissements doivent suivre des procédures d’autorisation différentes, réglementées par les dispositions de la loi du 10 juin 1999.

Plus concrètement, en l’espèce, force est de relever qu’en application du point 060102 de l’annexe du règlement grand-ducal du 10 mai 2012, constituant une sous-rubrique du point 060100, intitulé « Chantiers et travaux d’aménagement » : « (…) Zones d’activités - création / aménagement de telles zones », divisées en : « 01 zones d’activités à caractère commercial, artisanal ou industriel » et « 02 zones industrielles », relèvent de la classe 1.

Force est dès lors au tribunal de constater qu’en vertu du point 060102 du règlement grand-ducal du 10 mai 2012, seule la « création/aménagement » de nouvelles zones d’activités est soumise à l’obligation de suivre une procédure d’autorisation dite de « commodo incommodo » de classe 1. En l’espèce, il y a toutefois lieu de constater que la fabrique de production d’asphalte litigieuse a été autorisée dans une zone d’activité d’ores et déjà existante et non point à créer ou à aménager, de sorte que de ce point de vue aucune violation des dispositions précitées ne saurait être constatée. Force est par ailleurs de constater que même si la zone litigieuse avait été soumise à l’obligation de suivre une procédure d’autorisation de classe 1 et qu’une telle procédure ait fait défaut, ce défaut aurait pu, le cas échéant, être invoqué dans le cadre d’une procédure contentieuse introduite contre l’autorisation de ladite zone, sinon dans le cadre d’une procédure initiée sur base des dispositions de l’article 27 de la loi du 10 juin 1999 et tendant à la fermeture de l’établissement concerné, en l’occurrence, la zone d’activités, mais ne saurait actuellement produire aucun effet sur la légalité de la décision litigieuse portant uniquement autorisation d’exploiter un établissement dans ladite zone.

3.

En troisième lieu, l’administration communale d’….. invoque une violation de l’article 13.4 de la loi du 10 juin 1999, de l’article 12 de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, désignée ci-après par « la loi du 19 janvier 2004 » et des dispositions du règlement grand-ducal du 29 avril 2011 portant application de la directive 2008/50/CE du parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe, désigné ci-après par « le règlement grand-ducal du 29 avril 2011 ».

Elle affirme ainsi tout d’abord qu’avant d’émettre une autorisation d’exploitation, le ministre devrait prendre en considération la situation d’un point de vue environnemental du site d’implantation de l’établissement et lorsque le site se trouve à proximité de sites ou de zones protégés il lui appartiendrait de prendre des mesures particulières, sinon pour le moins vérifier si les mesures imposées ne nuisent pas aux zones protégées. En l’occurrence le ministre aurait partant dû prendre en considération la proximité des zones de protection, à savoir la zone humide « ….. », et la zone protégée d’intérêt national sous forme de réserve naturelle, zone humide « ….. », ainsi que les zones natura 2000 pour la protection des oiseaux entourant quasi tout le site et, enfin, les zones protégées de réserve naturelle « ….. » sur le territoire des communes d’….., …. et …… Dans le cadre de son mémoire en réplique, l’administration communale d’….. réfute le reproche selon lequel les futures nuisances ayant pour source l’usine d’asphalte et affectant négativement les différentes zones de protection précitées, ne soient pas clairement identifiées dans le recours, en soutenant que cette considération n’aurait pas d’incidence sur le fait que le ministre aurait omis d’analyser les éventuels futurs impacts sur ces zones. Elle se base sur le principe de précaution et d’action préventive, principe reconnu tant par l’Union européenne que par les juridictions luxembourgeoises, selon lequel en cas de risque d’impact sur l’environnement, la source de ce risque devrait être supprimée.

Dans le cadre de son mémoire en réplique, l’administration communale d’….. se fonde encore, d’une part, sur l’article 12 de la loi du 19 janvier 2004 selon lequel tout plan ou projet susceptible d’affecter une zone protégée prévue par la même loi devrait faire l’objet d’une évaluation de ses incidences sur l’environnement, ainsi que d’autre part, sur l’article 34 de ladite loi, déterminant les réseaux de zones « réseau Natura 2000 », pour conclure, en l’espèce, qu’en raison de la forte proximité entre le site d’implantation de l’usine et la zone d’intérêt communautaire faisant partie du « réseau Natura 2000 », le futur exploitant aurait dû faire réaliser une étude sur les impacts dus aux émanations provenant de l’usine d’asphalte.

Toujours dans le cadre de son mémoire en réplique, l’administration communale d’…..

argumente que la usine d’asphalte émettrait des émanations toxiques polluant l’environnement du site. Alors même que le gouvernement aurait affirmé que la fabrique respecterait le règlement grand-ducal du 29 avril 2011, elle conclut à une violation de l’article 1 (5) dudit règlement grand-ducal en avançant que la mise en place de la usine d’asphalte ne contribuerait pas à améliorer la qualité de l’air ambiant, mais, bien au contraire, violerait l’esprit général dudit règlement grand-ducal.

Le délégué du gouvernement répond que la demanderesse resterait en défaut de démontrer les raisons pour lesquelles l’installation de la usine d’asphalte pourrait affecter les zones de protection, ces dernières se trouvant, en effet, à quelques kilomètres de l’installation et seraient séparées de cette dernière par l’autoroute.

Dans le même ordre d’idées, la société ….. répond à la demanderesse qu’elle se limiterait à reprocher vaguement au ministre de ne pas avoir tenu compte de l’impact sur certaines zones protégées, sans pour autant préciser la nature des nuisances pouvant avoir un impact négatif sur ces zones, ni quelles mesures concrètes le ministre aurait dû, à son avis, prescrire à cet égard. Dans le cadre de son mémoire en duplique, la société ….. reproche encore à l’administration communale d’….. de s’être trompée sur la portée du règlement grand-ducal du 29 avril 2011, se limitant pour l’essentiel à mettre en place des méthodes de gestion de la qualité de l’air ambiant à suivre par le ministre.

Quant à la violation alléguée de l’article 13.4 de la loi du 10 juin 1999, le tribunal est d’abord amené à préciser que ledit article dispose que : « L’autorisation du ministre ayant dans ses attributions l’environnement détermine les conditions d’aménagement et d’exploitation visant l’environnement humain et naturel, telles que la protection de l’air, de l’eau, du sol, de la faune et de la flore, la lutte contre le bruit et les vibrations, l’utilisation rationnelle de l’énergie, la prévention et la gestion des déchets. (…) ». L’article 13.4 de la loi du 10 juin 1999 s’inscrit ainsi dans le contexte de l’article 13.1 de la même loi, aux termes duquel les autorisations délivrées en matière d’établissements classés sont appelées à fixer « les conditions d’aménagement et d’exploitation qui sont jugées nécessaires pour la protection des intérêts visés à l’article 1er de la présente loi, en tenant compte des meilleures techniques disponibles respectivement en matière d’environnement et en matière de protection des personnes », étant entendu que ladite loi a, aux termes de son article 1er, pour objet de « - réaliser la prévention et la réduction intégrées des pollutions en provenance des établissements ; - protéger la sécurité, la salubrité ou la commodité par rapport au public, au voisinage ou au personnel des établissements, la santé et la sécurité des travailleurs au travail, ainsi que l’environnement humain et naturel ; - promouvoir un développement durable ».

Un acte administratif individuel, et plus particulièrement celui qui est de nature à faire grief soit à son destinataire soit à de tierces personnes, bénéficie de la présomption de légalité ainsi que de conformité par rapport aux objectifs de la loi sur base de laquelle il a été pris, de sorte qu’il appartient à celui qui prétend subir un préjudice ou des inconvénients non justifiés du fait de l’acte administratif en question, et qui partant souhaite le voir réformé ou annulé en vue d’obtenir une situation de fait qui lui est plus favorable, d’établir concrètement en quoi l’acte administratif en question viole une règle fixée par une loi ou un règlement grand-ducal d’application1.

Cette règle s’applique plus particulièrement en matière d’établissements classés, de sorte qu’il ne suffit pas d’invoquer de manière générale et abstraite des inconvénients que de tiers intéressés estiment subir du fait de l’autorisation d’un établissement classé, mais il leur incombe d’apporter au tribunal des éléments suffisamment précis et documentés dans toute la mesure du possible afin que la juridiction soit mise en mesure d’apprécier de la manière la plus exacte possible la nature des inconvénients et préjudices ainsi invoqués, en lui soumettant également une argumentation juridique et technique suffisamment détaillée tendant à établir les raisons pour lesquelles les conditions techniques fixées par l’autorisation litigieuse ne seraient pas de nature à leur donner satisfaction. En effet, ce n’est que dans ces conditions que le tribunal peut sérieusement analyser, dans le cadre du recours en réformation dont il est saisi en matière d’établissements classés, le caractère approprié des conditions 1 cf. trib. adm. 16 juillet 2003, n° 15207 du rôle, Pas. adm. 2012, V° Actes administratifs, n° 112 et autres références y citées.

fixées par l’autorisation litigieuse et ordonner, le cas échéant, au cas où il estime ne pas disposer de toutes les connaissances techniques nécessaires, une expertise technique2.

En l’espèce, en ce qui concerne tout d’abord le reproche formulé par la demanderesse suivant lequel l’autorisation litigieuse ne contiendrait pas de mesures concrètes pour garantir la protection des intérêts visés à l’article 13.4 de la loi du 10 juin 1999, force est de constater que ce reproche n’est pas fondé, étant donné que l’autorisation litigieuse du ministre fixe en son article 2, point II, point III, point IV et point VI, à côté de simples recommandations à l’adresse de l’exploitant, un ensemble contraignant de conditions d’exploitation et de réserves auxquelles est soumise l’exploitation de l’établissement litigieux, relatives à la protection de l’air, des eaux, du sol et du sous-sol, ainsi qu’à la prévention et à gestion des déchets en provenance de l’exploitation normale de l’établissement.

Toutefois, l’administration communale d’….. ne fournit aucun élément concret tendant à faire constater le caractère insuffisant des conditions d’exploitation ainsi imposées.

Si l’administration communale d’….. invoque encore de manière générale et abstraite la possibilité d’émanations susceptibles d’être nuisibles pour les zones protégées aux alentours de la usine d’asphalte, elle reste en défaut d’indiquer avec précision l’origine, ainsi que la nature exactes des nuisances ainsi alléguées.

La demanderesse reste pareillement en défaut de soumettre au tribunal des éléments concrets de nature à établir que les éventuelles émanations alléguées soient excessives.

Force est dès lors au tribunal de constater que la demanderesse n’a pas établi que la décision litigieuse contrevienne à l’article 13.4 de la loi du 10 juin 1999, de sorte que le moyen afférent est à rejeter.

En ce qui concerne la violation de l’article 12 de la loi du 19 janvier 2004, il y a lieu de préciser qu’en vertu dudit article : « Tout projet ou plan, individuellement ou en conjugaison avec d’autres plans et projets, susceptible d’affecter une zone protégée prévue par la présente loi fait l’objet d’une évaluation de ses incidences sur l’environnement. Il en est de même des aménagements ou ouvrages à réaliser dans la zone verte. ». Tel que le tribunal vient de retenir, la demanderesse, à part des affirmations générales et vagues, est restée en défaut de démontrer en l’espèce concrètement les raisons pour lesquelles l’autorisation déférée serait susceptible d’affecter les zones protégées aux alentours de la usine d’asphalte. Le moyen afférent est partant à son tour à rejeter.

Enfin, quant à la violation alléguée de l’article 1.5 du règlement grand-ducal du 29 avril 2011 il échet de constater que ledit article dispose que : « Le présent règlement établit des mesures visant : (…) à préserver la qualité de l’air ambiant, lorsqu’elle est bonne, et à l’améliorer dans les autres cas. ».

Force est au tribunal de constater qu’à l’appui de son moyen tendant à établir une violation de l’article 1.5 du règlement grand-ducal du 29 avril 2011 la demanderesse se fonde sur une simple affirmation, non étayée concrètement, selon laquelle : « Avec la mise en place de la usine d’asphalte, la qualité de l’air ambiant ne sera certainement pas amélioré (sic), bien au contraire. Ainsi, la mise en place d’une telle fabrication sera à l’inverse de l’esprit 2 cf. trib. adm. 16 juillet 2003, n° 15207 du rôle, Pas. adm. 2012, V° Etablissements classés, n° 148 ainsi que les autres références y citées.

général du règlement précité [i.e. le règlement grand-ducal du 29 avril 2011]. ». Cette affirmation de la demanderesse simplement suggérée, non autrement circonstanciée en fait et en droit, est à rejeter, étant donné qu’à défaut de toute précision, elle n’est pas de nature à énerver la régularité de la décision litigieuse. En effet, des moyens simplement suggérés, sans être soutenus effectivement, ne sont pas à prendre en considération par le tribunal, étant donné qu’il n'appartient pas au tribunal de suppléer à la carence de la partie demanderesse et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de ses conclusions.

Au-delà de ces considérations et dans un souci d’exhaustivité, il convient de constater que l’administration communale d’….. n’a pas contesté les explications du délégué du gouvernement selon lesquelles les valeurs maximales en anhydride sulfureux et en oxydes d’azotes atteintes par la usine d’asphalte resteraient largement en dessous des valeurs maximales autorisées selon le règlement grand-ducal du 29 avril 2011.

Il suit de l’ensemble des développements qui précèdent que le moyen tiré d’une violation de l’article 13.4 de la loi du 10 juin 1999, de l’article 12 de la loi du 19 janvier 2004 et des dispositions du règlement grand-ducal du 29 avril 2011 est à rejeter pour n’être fondé dans aucun de ses volets.

4.

La demanderesse reproche ensuite à l’autorisation déférée de contenir d’autres incohérences par rapport aux études préalables. Elle estime ainsi que les études de la société …., désignée ci-après par « le ….. », auraient été élaborées sur la base du terrain du site d’implantation de la usine d’asphalte dans sa configuration originaire. Un critère déterminant pour le résultat de ces études aurait été la hauteur, telle la hauteur de la cheminée ou encore celle des immeubles. Cette hauteur d’implantation aurait cependant été modifiée par des remblais réa…..s en 2013.

Le délégué du gouvernement fait valoir que contrairement aux affirmations de la demanderesse les études du ….. auraient été élaborées non point sur base du niveau initial du terrain, mais sur base du niveau final du terrain.

La société ….. conteste également les affirmations de la demanderesse en ajoutant que l’administration communale de ….. se méprendrait sur le sens de la prescription de la hauteur d’une cheminée. Il ne s’agirait ainsi pas de fixer un niveau déterminé où les gaz sortent dans l’atmosphère. Ainsi, la longueur de la cheminée déterminerait son tirage et par voie de conséquence la vitesse d’expulsion. Ce facteur serait déterminant pour la dispersion des substances polluantes, tandis qu’un niveau de sortie plus élevé ou plus bas de quelques mètres serait sans incidences à cet égard.

Force est de prime abord au tribunal de constater que la demanderesse n’a plus contesté dans le cadre de son mémoire en réplique les explications du délégué du gouvernement et de la société ….. selon lesquelles les études auraient été élaborées sur base du niveau du terrain tel que se présentant après les travaux de remblayage. Le tribunal est encore amené à constater, à l’instar du délégué du gouvernement, qu’il résulte de l’étude intitulée « Schalltechnisches Gutachten zum Betrieb einer Asphaltmischanlage der Firma ….. in ….. » du 24 avril 2013 complétée en date du 24 juin 2013 que l’étude a été réalisée en prenant en compte la hauteur du terrain après les travaux de remblayage. Ainsi, ladite étude indique à la page 40 que la « Kaminmündung » se situerait à une hauteur de 325 mètres. Ces 325 mètres se dégagent d’une addition entre le niveau final du terrain après remblai situé à 290 mètres et la hauteur de la cheminée de 35 mètres. Il s’ensuit que les travaux de remblai ont bien été pris en considérations par les études préalables, de sorte que le moyen afférent est à rejeter pour ne pas être fondé.

5.

La demanderesse reproche encore à l’arrêté litigieux d’être basé sur des prémisses erronées dans la mesure où il limiterait le fonctionnement de l’installation à 1.000 heures par années, ce qui équivaudrait à 4 heures quotidiennes sans pour autant préciser la répartition de ces 1.000 heures sur les jours ouvrables de l’année mais en se limitant à autoriser le fonctionnement de 7 heures du matin à 17 heures de l’après-midi. La demanderesse estime que pendant les mois d’hiver et les congés collectifs l’installation risquerait de ne fonctionner qu’à très faible allure et de dépasser pendant d’autres périodes de l’année, notamment la période estivale, largement les 4 heures par jour de fonctionnement.

Elle explique dans ce contexte dans le cadre de son mémoire en réplique que le bitume aurait besoin d’être frais et ne pourrait pas être stocké pour une future utilisation, de sorte que pour répondre au pic de demande au cours de la période estivale, période où les travaux de réalisation et de rénovation des routes seraient réalisés, la fabrique devrait fonctionner de manière continue pendant toute la plage horaire de 7 heures à 17 heures. Les rapports du …..

seraient partant basés sur des prémisses erronées. Selon la demanderesse il serait évident que les émanations, leur concentration, leur nocivité et partant la capacité de les voir, le cas échéant dispersées dans l’atmosphère varient selon que l’usine fonctionnerait de façon linéaire tous les jours de l’année pendant 4 heures ou selon qu’elle battrait à plein régime de 7 heures du matin à 17 heures de l’après-midi.

Le délégué du gouvernement répond que selon l’article 1er, point II de l’arrêté déféré le dossier de demande en ferait partie intégrante. Or, l’arrêté ainsi que le dossier de demande ne prévoiraient que l’exploitation de l’installation de 7.00 heures à 17.00 heures, en laissant le choix à l’exploitant de déterminer dans cette plage horaire les heures de fonctionnement de l’installation. Il serait partant erroné de soutenir que l’installation ne pourrait être utilisée que pendant 4 heures par jours.

La société ….. explique dans ce contexte que l’installation ne fonctionnerait que de manière discontinue, même les jours où les conditions atmosphériques seraient idéales en raison du fait que l’asphalte, une fois produit, devrait être utilisé sans retard. Ainsi, les capacités de mise en œuvre seraient limitées et la production devrait s’adapter au rythme de demande d’asphalte. Les nuisances que pourraient dégager l’installation ne pourraient partant se produire que de manière intermittente et l’annexe 12 de la demande d’autorisation intitulée : « Schornsteinhöhen-berechnung und Immissionsprognose für die geplante Asphaltmischanlage der Firma ….. in ….. » prendrait pour point de départ un fonctionnement de l’installation entre 7.00 heures et 17.00 heures.

Force est à cet égard encore au tribunal de rappeler qu’un acte administratif individuel, et plus particulièrement celui qui est de nature à faire grief soit à son destinataire soit à de tierces personnes, bénéficie de la présomption de légalité ainsi que de conformité par rapport aux objectifs de la loi sur base de laquelle il a été pris, de sorte qu’il appartient à celui qui prétend subir un préjudice ou des inconvénients non justifiés du fait de l’acte administratif en question, et qui partant souhaite le voir réformé ou annulé en vue d’obtenir une situation de fait qui lui est plus favorable, d’établir concrètement en quoi l’acte administratif en question viole une règle fixée par une loi ou un règlement grand-ducal d’application.

Tel que retenu ci-avant, cette règle s’applique plus particulièrement en matière d’établissements classés, de sorte qu’il ne suffit pas d’invoquer de manière générale et abstraite des inconvénients que de tiers intéressés estiment subir du fait de l’autorisation d’un établissement classé, mais il leur incombe d’apporter au tribunal des éléments suffisamment précis et documentés dans toute la mesure du possible afin que la juridiction soit mise en mesure d’apprécier de la manière la plus exacte possible la nature des inconvénients et préjudices ainsi invoqués, en lui soumettant également une argumentation juridique et technique suffisamment détaillée tendant à établir les raisons pour lesquelles les conditions techniques fixées par l’autorisation litigieuse ne seraient pas de nature à leur donner satisfaction. En effet, ce n’est que dans ces conditions que le tribunal peut sérieusement analyser, dans le cadre du recours en réformation dont il est saisi en matière d’établissements classés, le caractère approprié des conditions fixées par l’autorisation litigieuse et ordonner, le cas échéant, au cas où il estime ne pas disposer de toutes les connaissances techniques nécessaires, une expertise technique.

En l’espèce, l’arrêté litigieux limite le fonctionnement de l’usine d’asphalte à 1.000 heures par années et à une plage horaire quotidienne de 7.00 heures à 17.00 heures, de sorte que la société ….. ne pourra dépasser, sous peine de vider l’autorisation d’établissement, ces limites. Les études préalables à l’autorisation d’établissement ont pris comme fondement un fonctionnement de 1.000 heures par année de l’usine d’asphalte. La demanderesse reste en défaut de démontrer pour quelle raison les études ainsi effectuées et l’arrêté déféré n’auraient pas été établis valablement. En effet, même dans l’hypothèse d’un fonctionnement discontinu de l’exploitation entraînant pour certaines périodes une production journalière de 7.00 heures à 17.00 heures, la société ….. est obligatoirement tenue de respecter le nombre maximum de 1.000 heures par an, impliquant que pendant d’autres périodes de l’année la production devrait être sensiblement ralentie voire arrêtée complètement. Dès lors, si pour les périodes de fortes productions les émissions, voire, le cas échéant, les nuisances émanant de l’exploitations augmenteraient, ces dernières diminueraient, voire seraient quasiment inexistantes pendant les périodes de production réduite ou d’absence de production. Il s’ensuit que la demanderesse n’a pas établi pour quelle raison les études précitées ainsi que l’arrêté déféré, fondé sur un fonctionnement de 1.000 heures par jour, ne seraient pas valables en raison du seul fait que la production risquerait d’être discontinue. Le moyen afférent est partant à rejeter.

6.

Enfin, si la demanderesse s’interroge encore sur le fait que le ….. aurait établi dans un lapse de temps de seulement un mois, deux « schalltechnische Gutachten » pour arriver à des conclusions différentes, sans fournir une quelconque explication à ce sujet, force est au tribunal de constater, à l’instar des explications du délégué du gouvernement, que la différence entre le « Schalltechnisches Gutachten zum Betrieb einer Asphaltmischanlage der Firma …. in ….. » du 24 avril 2013 et le rapport du 24 juin 2013, ayant complété le « Schalltechnische Gutachten zum Betrieb einer Asphaltmischanlage der Firma …. in ….. » du 24 avril 2013, résulte du fait que différentes sources mobiles, énumérées à la page 22 du rapport du 24 juin 2013 n’ont pas été prises en considération dans le cadre de la première étude. Le moyen afférent est partant également à rejeter.

7.

En se basant sur une réclamation introduite dans le cadre de l’enquête publique par un certain Docteur ….., l’administration communale d’….. s’interroge sur le diamètre de la cheminée de l’installation d’asphalte autorisée, dans la mesure où, sur le formulaire de demande d’autorisation introduit auprès du ministre par la société ….., cette dernière indique à la page 12/18 prévoir l’installation d’une cheminée d’évacuation de l’air dépoussiéré d’un diamètre de « 2,25 mètres ».

A cet égard, le tribunal est amené à constater à l’instar du délégué du gouvernement et de la société ….., que l’indication d’un diamètre de la cheminée de « 2,25 m » est à considérer comme erreur matérielle. En effet, l’arrêté litigieux indique, à sa page 13 de 58, autoriser :

« une cheminée d’évacuation des rejets dans l’air d’un diamètre de 1,25m (…) ». L’arrêté à d’ailleurs précisé dans ce contexte aux pages 7 et 8 de 58 : « Considérant que la liste des éléments sollicités énumère une cheminée d’un diamètre de 2,25 m ; que la fiche technique de l’installation de production d’asphalte et l’étude indiquent un diamètre de 1,25 m ; que le présent arrêté impose un diamètre de 1,25 m de la cheminée (…) ». S’y ajoute que l’étude préalable à l’arrêté litigieux, du ….. du 21 mai 2013, intitulée « Schornsteinhöhenberechnung und Immissionsprognose für die geplante Asphaltmischanlage der Firma ….. in ….. » prend uniquement en compte la valeur de 1,25 mètres.

Le moyen ayant trait à la prise en compte par l’arrêté litigieux d’une valeur erronée du diamètre de la cheminée de la usine d’asphalte est partant à rejeter pour ne pas être fondé.

Toujours en se référant à la réclamation introduite dans le cadre de l’enquête publique par un certain Docteur ….. ainsi qu’à un avis du bureau ….., conseil et expertise en environnement, l’administration communale de ….. met en doute l’exactitude des calculs et des indications figurant dans l’arrêté litigieux, notamment en ce qui concerne le dimensionnement du filtre, la hauteur de la cheminée et le traitement des matériaux recyclés.

A cet égard le tribunal est amené à constater que le délégué du gouvernement a fourni des explications cohérentes et techniques, desquelles il résulte, d’une part, que le filtre prévu pour le traitement de l’air de l’installation de production d’asphalte conçu pour un volume d’air de 64.000 Nm3/h est largement suffisant et, d’autre part, que la hauteur de la cheminée a été calculée suivant l’annexe III de la circulaire ministérielle du 27 mai 1994 portant application de la meilleure technologie disponible pour la détermination de seuils recommandés pour les rejets dans l’air en provenance des établissements industriels et artisanaux et que les résultats de ces calculs auraient démontré que sur tous les points d’immission la valeur d’insignifiance de 3% des valeurs limites des différents polluants, définies par le règlement grand-ducal modifié du 29 avril 2011 portant application de la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe et le règlement grand-ducal du 30 mai 2005 portant application de la directive 2004/107/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 2004 concernant l’arsenic, le cadmium, le mercure, le nickel et les hydrocarbures aromatiques polycycliques dans l’air ambiant serait respectée. Ces explications du délégué du gouvernement n’ont plus été remises en cause ni contestées dans le cadre de son mémoire en réplique par l’administration communale de ….., qui s’est en effet contentée de renvoyer à son recours en ce qui concerne l’avis du Docteur …… Le tribunal est partant amené à rejeter ce moyen pour ne pas être fondé.

En ce qui concerne le traitement de matériel recyclé, l’administration communale de ….. affirme qu’un tel traitement rejetterait plus d’effluents tel le Benzo(a)pyrène. Or, de tels effluents ne seraient pas pris en compte par l’arrêté litigieux sous le prétexte que le traitement de matériel recyclé serait limité à la moitié des heures de fonctionnement de l’usine. Un tel raisonnement ne saurait pourtant valoir aux yeux de l’administration communale de ….., étant donné que les plages horaires de fonctionnement de la fabrique avec du matériel recyclé ne seraient fixées nulle part.

Ce moyen est cependant à rejeter étant donné que sous le point IV de l’article 3 de l’arrêté litigieux il est imposé que « 4) Le tambour parallèle de recyclage ne peut être mis en marche que pendant une production continue avec un taux maximal de 50% de recyclage dans les matériaux enrobés et à un débit de 2/3 de la puissance nominale du tambour parallèle. ». S’y ajoute que, tel que précisé ci-avant, l’arrêté litigieux, impose sous son article 1er, point II que l’établissement doit être aménagé et exploité conformément à la demande du 28 mai 2013, complétée en date du 25 juin 2013 et à la demande du 3 février 2014, sauf en ce qu’elles seraient contraires aux dispositions de l’arrêté litigieux, et que la demande d’autorisation précisant expressément les heures de fonctionnement de l’exploitation. Il s’ensuit que le moyen tiré du fait que les plages horaires de fonctionnement de la fabrique avec du matériel recyclé ne seraient fixées nulle part manque en fait et est partant à rejeter.

8.

L’administration communale d’….. fait valoir que les valeurs d’émission de poussières et d’odeurs retenues par le ….. ne vaudraient qu’à condition d’un arrosage des zones de stockage et de la voirie de circulation. Selon le dossier de demande un tel arrosage nécessiterait 195,50 respectivement 194,14 m3 d’eau par année, eau qui serait prévue de provenir d’un bassin de rétention des eaux pluviales de 200 m3. L’arrêté litigieux partirait encore d’une situation hypothétique d’un fonctionnement de la fabrique de tous les jours ouvrables pendant 4 heures par jour seulement. La quantité d’eau estimée pour pourvoir effectuer l’arrosage serait partant nettement sous-évaluée. De plus, l’arrêté litigieux imposerait l’installation d’une station de lavage des camions qui serait également approvisionnée en eau par le bassin de rétention, alors même que le volume du bassin serait calculé pour servir les seuls besoins de l’arrosage. L’administration communale de ….. ajoute dans son mémoire en réplique que l’affirmation de la société ….. que l’arrosage consommerait 195,5 m3 ne serait pas étayée par un document et qu’elle estimerait qu’une marge de 4,5 m3 serait insuffisante.

La société ….. répond que l’eau destinée à approvisionner le bassin de rétention serait constituée par les eaux de pluie non polluées en hydrocarbures récoltées sur l’ensemble du site de l’exploitation. Au vu de la taille du site (1 hectare, 84 ares et 26 centiares), la quantité annuellement récoltée serait un multiple de 200 m3. De plus, la station de lavage pour les pneus des camions ne serait pas approvisionnée par ledit bassin de rétention, mais par le réseau public.

Le délégué du gouvernement fait encore valoir dans le cadre de son mémoire en duplique que l’arrosage prévu par l’arrêté litigieux nécessiterait 390 m3 par an (195,5 + 194,14). Le bassin de rétention aurait un volume de 200 m3, ce qui équivaudrait partant à la capacité de stockage d’un volume d’eau pouvant servir à l’arrosage pendant une demi-année.

La consommation journalière en eau s’élèverait, selon le dossier de demande, à 2,3 m3 (1,15 + 1,142), de sorte qu’il serait possible d’arroser pendant 87 jours sans qu’il ne pleuve.

A titre liminaire, le tribunal constate que la société ….. a affirmé à juste titre que l’eau destinée à servir la station de lavage des camions ne provient pas du bassin de rétention, mais du réseau public. En effet, la demande d’autorisation, faisant partie selon l’article 1er, point II de l’arrêté litigieux, de ce dernier, indique sans équivoque que l’eau destinée au nettoyage provient du réseau public tandis que l’eau destinée à l’arrosage est retirée du bassin de rétention. L’argument de l’administration communale d’….. selon lequel la quantité d’eau du bassin de rétention serait insuffisante pour pourvoir à l’arrosage et au lavage des camions est partant à rejeter.

Par ailleurs, le tribunal est amené à constater que l’administration communale d’….. se contente de critiquer de manière générale et abstraite le volume du bassin de rétention d’eau en avançant que la quantité d’eau prévue serait insuffisante, sans pour autant étayer ces affirmations par des quelconques éléments concrets, tels que des calculs ou des études et ne mettant ainsi pas en cause les explications circonstanciées de la société ….. et du délégué du gouvernement fondées sur les études préalables à la base de l’arrêté litigieux. Il s’ensuit que le moyen tiré d’un volume insuffisant du bassin de rétention est à rejeter pour ne pas être fondé.

9.

Enfin, en dernier lieu, l’administration communale d’….. soulève de manière générale d’autres « incohérences du dossier », en faisant valoir que l’affirmation contenue dans le dossier de demande suivant laquelle le site ne serait pas accessible au public et que seulement huit personnes y travailleraient serait fausse. Ainsi, outre les huit employés de l’usine, le site accueillerait nécessairement les chauffeurs de camion. De plus, ni le dossier de demande, ni l’arrêté litigieux ne renseigneraient que la réalisation d’un bâtiment administratif à trois étages serait prévue sur le site de la usine d’asphalte. Or, un tel bâtiment administratif serait certainement destiné à accueillir plus que huit employés. Dans le cadre de son mémoire en réplique, l’administration communale de ….. ajoute que ni le dossier d’autorisation, ni les études sur lesquelles se serait basé le ministre n’auraient prévu la présence, sur le site de l’exploitation et dans le bâtiment administratif, du personnel de la usine d’asphalte, des visiteurs, ainsi que des chauffeurs de camion, de sorte que les conditions imposées par le ministre ne permettraient pas d’assurer la pleine et entière sécurité des personnes présentes sur le site.

La société ….. conteste ce moyen en argumentant qu’un nombre de quatre personnes serait suffisant pour faire fonctionner l’exploitation et en ajoutant que le bâtiment administratif prévu plus loin sur le site ne ferait pas partie de l’installation d’enrobage proprement dite. A l’audience publique des plaidoiries le litismandataire de la société ….. a encore expliqué que la construction dudit bâtiment administratif n’aurait toujours pas été autorisée par le bourgmestre de la Ville d'…… Force est d’abord dans ce contexte au tribunal de rappeler qu’aux termes de l’article 13.4 de la loi du 10 juin 1999 : « L’autorisation du ministre ayant dans ses attributions l’environnement détermine les conditions d’aménagement et d’exploitation visant l’environnement humain et naturel, telles que la protection de l’air, de l’eau, du sol, de la faune et de la flore, la lutte contre le bruit et les vibrations, l’utilisation rationnelle de l’énergie, la prévention et la gestion des déchets. (…) » et qu’aux termes de l’article 13.5 de la loi du 10 juin 1999 : « L’autorisation du ministre ayant dans ses attributions le travail, détermine les conditions d’aménagement et d’exploitation relatives à la sécurité du public et du voisinage en général ainsi qu’à la sécurité, l’hygiène et la santé sur le lieu de travail, la salubrité et l’ergonomie. (…) ».

Dès lors, les compétences du ministre ayant l’environnement dans ses attributions, respectivement du ministre ayant le travail dans ses attributions sont nettement distinctes.

Ainsi, le ministre du Travail et de l'Emploi et de l’Economie sociale et solidaire n'est appelé à se prononcer que sur les conditions d'aménagement et d'exploitation relatives à la sécurité du public et du voisinage en général, ainsi qu'à la sécurité, l'hygiène et la santé sur le lieu de travail, la salubrité et l'ergonomie, les autres objectifs de la loi du 10 juin 1999 et énumérés à l'article 1er de ladite loi tombant dans le champ de compétence du ministre de l'Environnement3. Le ministre de l’Environnement quant à lui dispose d’une compétence générale pour déterminer, en tenant compte des particularités de chaque cas d'espèce, les réserves et conditions d'exploitation visant la protection de l'air, de l'eau, du sol, de la faune et de la flore, la lutte contre le bruit et l'élimination des déchets4.

Le recours sous examen est dirigé contre la décision du ministre de l’Environnement du 11 février 2014 autorisant la société anonyme ….. à installer et à exploiter une installation de production d’asphalte. Le moyen avancé par l’administration communale de ….. ayant trait au fait que le nombre de personnes dont la présence serait prévue sur le site par l’arrêté litigieux ne serait pas conforme à la réalité, a trait, tel que l’administration communale de …..

l’affirme elle-même, à la sécurité des personnes présentes sur le site, de sorte qu’elle ne relève pas de la compétence du ministre de l’Environnement mais de celle du ministre ayant le travail dans ses attributions. Ladite décision n’étant pourtant pas visée par le recours sous examen, le moyen afférent est à rejeter pour ne pas être pertinent en l’espèce.

Au-delà des considérations qui précèdent et à titre superfétatoire, le tribunal ajoute que de simples affirmations de la part de l’administration communale de ….., nullement étayées, selon lesquelles la présence de plus de huit personnes devrait être prévue sur le site, ne permettent pas d’affecter la légalité de l’arrêté litigieux, s’agissant d’un acte administratif individuel, qui, tel que retenu ci-avant, bénéficie de la présomption de légalité ainsi que de conformité par rapport aux objectifs de la loi sur base de laquelle il a été pris, à moins pour celui qui souhaite le voir réformé ou annulé en vue d’obtenir une situation de fait qui lui est plus favorable, d’établir concrètement en quoi l’acte administratif en question viole une règle fixée par une loi ou un règlement grand-ducal d’application. Il s’y ajoute, que tel que l’a relevé à juste titre la société ….., le bâtiment administratif projeté sur le site de la usine d’asphalte ne fait pas l’objet de l’arrêté litigieux sur lequel porte le recours sous examen, étant encore à ajouter que ledit bâtiment ne bénéficie pas encore d’une autorisation de construire de la part du bourgmestre de la Ville d'….. et que sa construction n’est partant pas encore entamée.

Il suit de l’ensemble des développements qui précèdent que le recours n’est fondé dans aucun de ses moyens de sorte qu’il est à rejeter.

Enfin, la demande formulée par l’administration communale de ….. de manière vague dans le cadre du dispositif de sa requête introductive d’instance, tendant à titre subsidiaire à voir « suspendre tous les effets de l’arrêté critiqué » est, en l’absence de toute précision, à interpréter comme demande basée sur l’article 35 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives tendant à voir ordonner l’effet suspensif du recours pendant le délai et l’instance d’appel. Cette demande est toutefois à écarter au vu de l’issue du présent litige, étant donné que pareille demande ne saurait être admise en cas de jugement portant rejet du recours.

En dernier lieu, il y a lieu de rejeter la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.000 euros, telle que formulée par la société ….., étant donné qu’elle omet de spécifier la nature des sommes exposées non comprises dans les dépens et 3 Cour adm. 8 mai 2008, n° 23754C du rôle, Pas. adm. 2012, V° Etablissements classés, n°31 et autres référéences y citées.

4 Trib. adm. 15 mars 1999, n° 10390, 10521 et 10597 du rôle, confirmé par Cour adm. 30 mars 2000, n° 11258C du rôle, Pas. adm. 2012, V° Etablissements classés, n°33 et autres référéences y citées.

qu’elle ne précise pas en quoi il serait inéquitable de laisser des frais non répétibles à charge de la partie tierce intéressée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié partant en déboute ;

rejette la demande tendant à voir « suspendre tous les effets de l’arrêté critiqué », telle que formulée par l’administration communale d’…..;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.000 euros formulée par la société anonyme ….. ;

condamne l’administration communale d’….. aux frais.

Ainsi jugé par :

Françoise Eberhard, vice-président, Paul Nourissier, juge, Daniel Weber, juge, et lu à l’audience publique du 22 janvier 2015 par le juge Paul Nourissier, délégué à ces fins par le vice-président, en présence du greffier Monique Thill.

Monique Thill pour Françoise Eberhard emp.

Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 23 janvier 2015 Le greffier du tribunal administratif 16


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 34235
Date de la décision : 22/01/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2015-01-22;34235 ?

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