Tribunal administratif N° 33367 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 septembre 2013 1re chambre Audience publique du 17 novembre 2014 Recours formé par Madame …, … contre une décision du ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural, en matière d’aides agricoles
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 33367 du rôle et déposée le 20 septembre 2013 au greffe du tribunal administratif par Maître Edith REIFF, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de Madame …, agricultrice, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural du 21 décembre 2012 prononçant à l’encontre de son époux, Monsieur …, « des sanctions financières concernant les conventions de gestion MHA09/06-2-3-
4-6-7-8-9-10-12-13-14-15-19-20-26 du 20 juillet 2009 et JT10/170-1-2-3-4-5 du 11 mars 2011 conclues en vue de la protection et de la promotion de la biodiversité en vertu du règlement grand-ducal du 22 mars 2002 instituant un ensemble de régimes d’aides pour la sauvegarde de la diversité biologique », ainsi que contre « la décision implicite de refus intervenue sur recours gracieux du 20 mars 2013 » ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 19 décembre 2013 pour le compte de l’Etat ;
Vu le mémoire en réplique de Maître Edith REIFF déposé au greffe du tribunal administratif en date du 20 janvier 2014 pour compte de Madame … ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 20 février 2014 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Marina PETKOVA, en remplacement de Maître Edith REIFF, et Monsieur le délégué du gouvernement Luc REDING, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 3 novembre 2014.
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Par courrier du 8 octobre 2012, le ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural, ci-après « le ministre », informa l’époux de Madame …, Monsieur …, en sa qualité d’exploitant de l’exploitation agricole familiale, conformément au règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, de son intention de prononcer à son encontre des sanctions en relation avec l’exécution des conventions de gestion MHA09/06-2-3-4-6-7-8-9-10-12-13-14-15-19-20-26 du 20 juillet 2009 et JT10/170-1-2-3-4-5 du 11 mars 2011 conclues en vue de la protection et de la promotion de la biodiversité en vertu du règlement grand-ducal du 22 mars 2002 instituant un ensemble de régimes pour la sauvegarde de la diversité biologique, ci-après « le règlement grand-
ducal du 22 mars 2002 ».
Par courrier du 18 octobre 2012, Monsieur … prit position par rapport au courrier précité du ministre du 8 octobre 2012.
Par courrier du 21 décembre 2012, le ministre informa Monsieur … de ce qui suit :
« In unserem Schreiben vom 8. Oktober 2012 wurde Ihnen mitgeteilt, dass bei verschiedenen Vorortkontrollen im Jahr 2011 sowie einer Auswertung der 2010 realisierten Flugbilder festgestellt wurde, dass die Flächen der Verträge MHA09/06-13 (0,73 ha, Ganzjahresbeweidung) und MHA09/06-19-20 (5,30 ha, Beweidung mit max. 1,8 GVE/ha) in den Jahren 2010 und 2011 gemäht wurden, sowie die Flächen der Verträge MHA09/06-15 (0,90 ha, Ganzjahresbeweidung), JT10/170-2 (14,60 ha, Ganzjahresbeweidung) und JT10/170-4 (1,08 ha, Ganzjahresbeweidung) im Jahr 2011 ebenfalls gemäht wurden. Laut Artikel 5, Anhang III (Punkt 3) der groβherzoglichen Verordnung vom 22. März 2002 müssen die Flächen durch eine Beweidung genutzt werden. Aufgrund dieser Feststellungen wurde vorgesehen die Prämien 2010 bzw. 2011 für die betroffenen Flächen um 50% zu kürzen.
Des Weiteren wurde festgestellt, dass die Fläche des Vertrages JT10/170-3 (2,45 ha, Ganzjahresbeweidung) nicht beweidet wurde. Laut Artikel 5, Anhang III (Punkt 3) der groβherzoglichen Verordnung vom 22. März 2002 müssen die Flächen durch eine Beweidung genutzt werden. Aufgrund dieser Feststellungen wurde vorgesehen keine Prämie 2011 für die betroffene Fläche auszuzahlen.
Beim Vertrag MHA09/06-3 (0452999, Programm I3CA, 2,06 ha) wird eine Teilfläche von 0,45 ha rückwirkend herausgenommen, da diese nicht mitbewirtschaftet wird.
Bei folgenden Verträgen wurde festgestellt, dass der Viehbesatz pro ha Weidefläche zu hoch war:
Vertrag Weidefläche (ha) Kontrolle gezählte GVE GVE/ha MHA09/06-2-3-4-26 8,08 22.08.2011 9 1,11 MHA09/06-6-7-8-9 8,61 19.10.2011 12,4 1,18 +JT10/170-5 0,37 + Weidefläche P0646655 1,45 MHA09/06-10 2,49 22.08.2011 3 1,20 MHA09/06-12 1,42 22.08.2011 1,8 1,26 MHA09/06-14 1,12 22.08.2011 6,6 1,62 JT10/170-1 2,93 Laut Verträge und Artikel 5 der groβherzoglichen Verordnung vom 22. März 2002 beträgt der maximal zulässige Viehbesatz 0,8 GVE/ha. Aufgrund dieses Verstoβes wurde vorgesehen keine Prämie 2011 für die betroffenen Verträge auszuzahlen. Bei der Auswertung des Kontrollberichtes zur Berechnung des Viehbesatzes wurden zudem die Verträge von zusammenhängenden und – beweideten Flächen addiert, so dass der Realität Rechnung getragen wurde.
Die Mitteilung erfolgte in Anwendung des groβherzoglichen Reglements vom 8. Juni 1979 bezüglich der von den Staats- und Gemeindeverwaltungen einzuhaltenden Prozedur im Rahmen des Gesetzes vom 1. Dezember 1978 betreffend die “procedure administrative non-contentieuse”.
Ihnen wurde die Möglichkeit gegeben, innerhalb einer Frist von 15 Tagen ab Zustellung der Mitteilung Ihre eventuellen Bemerkungen oder zusätzlichen Elemente mündlich oder schriftlich bei der technischen Verwaltung für Landwirtschaft “Service Agri-environnement”, 16, route d’Esch, L-1019 Luxemburg, zu unterbreiten.
In Ihrem Schreiben vom 18. Oktober 2012 haben Sie von diesem Recht Gebrauch gemacht und Stellung zu den Beanstandungen genommen.
Sie teilen uns mit, dass Sie keinerlei Kenntnis von einer Vorortkontrolle 2010 haben und Ihnen keine Kopie des Berichtes von 2011 vorliegt. Weiterhin ist es Ihnen unverständlich, wie die Kontrolle zu dem Ergebnis kam, dass Sie auf den besagten Flächen gemäht hätten. Die Mahd der Flächen der Verträge MHA09/06-13-19-20 im Jahr 2010 wurde anhand der ausgewerteten Luftaufnahmen von Juni 2010 festgestellt. Betreffend das Jahr 2011 wurde die Mahd der Flächen bei der Kontrolle vor Ort festgestellt. Im Gegensatz zu den Agrarumweltmassnahmen, welche von der Unité de Contrôle des Landwirtschaftsministeriums kontrolliert werden, werden die Biodiversitätverträge gemäβ Artikel 43 der groβherzoglichen Verordnung vom 22. März 2002 durch die Entité mobile der Naturverwaltung kontrolliert. Die Vorortkontrolle im Jahr 2011 wurde durch zwei Kontrollbeauftragte der Naturverwaltung durchgeführt und bezog sich ausschlieβlich auf die Biodiversitätsflächen. Festgestellte Beanstandungen und Verstöβe wurden in einem Bericht festgehalten und an die Ackerbauverwaltung weitergeleitet.
In Ihrem Schreiben teilen Sie uns mit, dass SANITEL Ihnen einen Viehbesatz von 0,5 GVE/ha Grünland bescheinigt. Bei den Biodiversitätsverträgen beträgt der maximal zulässige Viehbesatz 0,8 GVE/ha. Der Viehbesatz wird hierbei nicht auf die gesamte Grünlandfläche berechnet sondern darf für jede zusammenhängende kontraktierte Biodiversitätsfläche nicht höher als 0,8 GVE/ha sein. Dieser maximal zulässige Wert darf zu keinem Zeitpunkt überschritten werden. Bei der Vorortkontrolle wurde das vorgefundene Vieh gezählt und wie folgt angerechnet:
Rinder 2 Jahre 1,0 GVE Rinder 6 Monate bis 2 Jahre 0,6 GVE Rinder 0,0 GVE Pferde 6 Monate 1,0 GVE Pferde 0,6 GVE Da somit keine weiteren Elemente in Erwägung gezogen werden können, werden die oben genannten Kürzungen bei der Auszahlung der Prämie 2010 und 2011 angewandt.
Innerhalb von drei Monaten ab der Zustellung kann gegen die vorliegende Entscheidung durch einen Anwalt Einspruch beim Verwaltungsgericht eingereicht werden ».
En date du 20 mars 2013, Monsieur … introduisit par l’intermédiaire de son mandataire un recours gracieux contre la décision ministérielle précitée du 21 décembre 2012, recours gracieux dont la teneur est la suivante :
« (…) Mon mandant m’a chargée d’introduire un recours gracieux contre une décision du 21 décembre 2012 concernant les conventions de gestion MHA09/06-2-3-4-6-7-8-9-10-12-13-
14-15-19-20-26 du 20 juillet 2009 ainsi que les conventions de gestion JT10/170-1-2-3-4-5 du 11 mars 2011 conclues en vue de la protection et de la promotion de la biodiversité en vertu du règlement grand-ducal du 22 mars 2002 instituant un ensemble de régimes d’aides pour la sauvegarde de la diversité biologique.
A titre préliminaire, je tiens à préciser qu’en date du 7 mars 2013, mon mandant a demandé auprès de l’Administration de la Nature et des Forêts une copie des rapports établis suite aux contrôles effectués sur place en 2011 dont fait état la décision critiquée.
Monsieur … se réserve dès lors expressément le droit de compléter, voire de modifier le présent recours dès réception et analyse desdits rapports.
- Quant aux parcelles relatives aux conventions de gestion MHA/09/06-13, MHA/09/06-
19-20, MHA/09/06-15, JT/170-2 et JT10/170-4, mon client conteste formellement le reproche d’avoir contrevenu aux dispositions de l’article 5 et de l’annexe III, cas de figure 3 du règlement grand-ducal du 22 mars 2002 précité ainsi qu’aux conditions spéciales consacrées par lesdites conventions.
L’annexe III et les conventions de gestion précitées n’édictent pas une interdiction annuelle générale de fauchage mais interdisent seulement le fauchage durant une période déterminée allant du 1er avril au 15 juin.
Plus particulièrement et concernant les conventions de gestion MHA09/06-13-19-20 et JT/170-3-4, un accord a été conclu en date du 2/07/2009 entre le sieur … et l’Administration de la Nature et des Forêts suivant lequel mon mandante s’est engagé à exploiter les parcelles en cause conformément aux prescriptions du règlement grand-ducal du 22 mars 2002 à charge pour l’administration d’enclore l’ensembles (sic) des surfaces visées par les conventions précitées.
Malgré ledit accord formel, l’Administration de la Nature et des Forêts reste toujours en défaut d’enclore les parcelles se rapportant aux conventions de gestion MHA09/06-13 et JT10/170-4.
Les parcelles faisant l’objet des conventions MHA09/06-19-20 n’ont été encloses qu’en octobre 2011, bien que les travaux avaient déjà débuté en juin 2011, sans préjudice quant aux dates exactes.
Ainsi et à cause du non-respect par l’Administration de la Nature et des Forêts de ses engagements, les surfaces des conventions MHA09/06-19-20 n’ont pu servir au pâturage que de janvier à juin et d’octobre à décembre de l’année 2011, sans préjudice quant aux dates exactes.
Mon mandant était ainsi contraint de procéder au fauchage d’une surface de 3,00 ha et non pas de 5,30 ha comme retenu erronément par la décision entreprise.
Monsieur … est dès lors en droit d’invoquer la dérogation de l’article 48(4) du règlement grand-ducal du 22 mars 2002 aux termes duquel la sanction de la restitution des aides n’est pas d’application « lorsque l’inobservation des engagements est la conséquence de circonstances indépendantes de la volonté du bénéficiaire des aides ».
- La décision litigieuse reproche encore à mon client de ne pas avoir utilisé la surface de la convention JT10/170-3 au pâturage permanent durant l’année 2011.
Or, comme pour les conventions de gestion MHA09/06-19-20, la surface litigieuse n’a été enclose par l’Administration de la Nature et des Forêts qu’en octobre 2011, sans préjudice quant à la date exacte.
Ladite administration n’ayant pas clôturé les parcelles en temps utiles, mon mandant était encore dans l’impossibilité de respecter ses engagements tout en renvoyant à l’article 48 (4) précité.
Dès la mise en place de la clôture par l’administration, la parcelle en question a servi exclusivement au pâturage permanent de sorte que la sanction tendant à l’exclusion de mon mandant au bénéfice des régimes d’aides pour l’année civile 2011 est injustifiée, sinon manifestement excessive.
- Quant à la parcelle MHA09/06-15, mon client conteste formellement avoir procédé à un quelconque fauchage.
La contenance de la prédite parcelle n’est d’ailleurs pas de 0,90 ha mais de 5,61 ha.
Monsieur … estime dès lors que la sanction appliquée à la prédite surface est dénuée de tout fondement alors qu’elle repose sur une erreur de la part de l’entité mobile.
Concernant les surfaces de la convention de gestion JT10/170-2, le sieur … est encore formel en ce qu’il n’a pas fauché en 2011.
Le fauchage des parcelles sous examen s’avère d’ailleurs impossible en pratique s’agissant de prairies extrêmement raides.
- Selon Monsieur …, la convention de gestion MHA09/06-3 d’une contenance de 2,06 ha englobe une surface de 0,45 ha dont mon client n’est pas propriétaire.
Il est très vraisemblable que l’erreur repose sur les photos aériennes prises en 2010.
Le sieur … avait pourtant porté ladite erreur à la connaissance de votre Ministère dès réception des photos.
- Mon mandant met également en cause les résultats des rapports effectués sur place en 2011 quant aux UGB/ha.
La décision critiquée ne permet nullement de vérifier s’il y a eu identification sur place de la marque auriculaire du bétail présent sur les parcelles visées lors des contrôles opérés par l’entité mobile.
L’on ne saurait dès lors concevoir comment ladite entité a pu calculer la densité du bétail en UGB alors que la détermination du nombre d’UGB ne peut se faire qu’au moyen du tableau de conversion en fonction de l’âge du bétail conformément à l’annexe 1du règlement grand-
ducal du 26 août 2009 instituant un régime d’aides favorisant les méthodes de production agricole compatibles avec les exigences de la protection de l’environnement et de l’entretien de l’espace naturel.
La densité du bétail exprimée en UGB par hectare doit ainsi être calculée sur base des données disponibles dans le cadre du système intégré de gestion et de contrôle prévu par les règlements modifiés (CEE) n°1782/2003 et n°796/ 2004, ainsi que les données moyennes disponibles dans la base de données informatiques visée à l’article 13 du règlement grand-ducal du 22 avril 1999 portant mesures d’application du règlement (CE) n°820/97 du Conseil du 21 avril 1997 en ce qui concerne l’identification et l’enregistrement des bovins.
Suivant les conventions de gestion souscrites par ma partie, la densité du bétail exprimée en UGB autorisée est de max. 2 UGB/ha pour la période du 1er avril au 31 octobre, la densité pour une période annuelle ne pouvant toutefois dépasser 0,8UGB/ha.
Or, « pour la détermination du nombre d’UGB bovins de l’exploitation servant de base de calcul, une moyenne de douze mois, sur base d’un inventaire mensuel à l’aide de la base de données des bovins, est prise en compte et recalculée pour chaque année d’engagement » (voir annexe 1-5) du règlement grand-ducal précité du 26 août 2009).
A aucun moment, la densité ainsi définie n’a été dépassée par mon mandant sur les surfaces reprises par la décision attaquée.
Il s’avère encore que la surface calculée pour les conventions MHA09/06-6-7-8-9 et JT10/170-5 ainsi que la parcelle numéro P0646655 n’est pas exacte alors qu’il échet d’y additionner la pâture permanente portant le numéro P0552179 d’une contenance de 5,18 ha laquelle est également accessible au bétail.
Ainsi, une surface de 15,61 ha doit partant être prise en compte pour le calcul des UGB/ha au lieu de celle retenue par la décision litigieuse de 10,43 ha seulement.
Par application des prédits critères, le nombre en UGB/ha est dès lors de 0,79 UGB/ha et non pas de 1,18UGB/ha.
La décision critiquée encourt partant la réformation alors qu’elle laisse d’être motivée quant aux modes et critères de calcule des UGB/ha.
- De façon générale, Monsieur … conteste l’ensemble des sanctions prononcées par l’administration à défaut par la décision entreprise d’indiquer les bases légales en vertu desquelles le taux de réduction des diverses aides en la matière sont pratiqués.
La décision litigieuse ne permet pas au sieur … de contrôler le bien-fondé des sanctions appliquées ni quant à leur principe ni quant à leur quantum.
- Conformément à l’article 45-2 du règlement grand-ducal du 22 mars 2002, les primes annuelles sont payables à la fin de chaque année.
Or, à ce jour et depuis 2009, aucune prime ni avance n’ont été versées à Monsieur … pour programmes instaurées par le règlement grand-ducal du 22 mars 2002 précité.
Au vu de ce qui précède, Monsieur … vous saurait dès lors gré de bien vouloir reconsidérer son cas et de réformer en conséquence la décision du 21 décembre 2012 (…) ».
Par courrier du 23 mai 2013, le mandataire de Monsieur … fit parvenir au ministre un « complément au recours gracieux contre une décision du 21 décembre 2012 en matière de régime d’aides pour la sauvegarde de la diversité biologique » dont la teneur est la suivante :
« (…) A titre préliminaire, je vous prie de noter que la dame … a repris l’exploitation … avec effet au 1er janvier 2013.
Je tiens encore à préciser que la présente complète le recours gracieux déposé à la requête du sieur … en date du 20 mars 2013 suite à la communication par l’Administration de la nature et des forêts des rapports relatifs aux contrôles effectués sur place en 2011.
- Quant à la régularité formelle de l’ensemble des rapports Les rapports dressés pour les contrôles effectués sur place en dates des 22/08/2011 et 19/10/2011 sont formellement contestés alors qu’ils ont été établis en dates des 20, 21 et 22 août 2012, soit une année, respectivement dix mois après les contrôles litigieux.
Ce n’est que par lettre d’intention du 8 octobre 2012 que mes mandants ont eu connaissance des contrôles dont s’agit et qu’ils ont été invités à soumettre leurs observations quant aux faits leur reprochés.
Tant la lettre d’intention précitée que la décision entreprise du 21 décembre 2012 se basent cependant principalement sur les contrôles effectués sur place des 22/08/2011 et 19/10/2011 pour justifier les sanctions appliquées.
Or, les mesures retirant un avantage à l’administré sont d’une telle gravité qu’elles doivent permettre l’exercice des droits de la défense.
En l’espèce, les mesures envisagées par l’administration ont le caractère de sanctions alors qu’elles lèsent mes mandants dans leurs intérêts matériels.
Il est partant impératif qu’elles soient précédées d’une procédure contradictoire.
Les droits de la défense de l’administré impliquent notamment que l’administré soit averti en temps utile de l’intention de l’administration de prendre une décision affectant ses droits acquis.
En l’occurrence, les contrôles litigieux ont eu lieu en août et en octobre 2011.
Mes mandants ne furent pourtant informés des sanctions à intervenir à leur encontre qu’en date du 8 octobre 2012, soit 14, respectivement 12 mois après les prédits contrôles.
Ces délais sont manifestement excessifs et déraisonnables alors qu’ils ne permettent pas à mes mandants d’organiser utilement leur défense à une date rapprochée des faits incriminés par l’administration.
Il y a partant violation des droits de la défense en l’occurrence.
- Quant aux conventions de gestion JT10/170-2 et MHA09/06-15-19-20 Il y a lieu de relever qu’aucun des rapports établis suite aux contrôles effectués sur place en dates des 22/08/2011 et 19/10/2011 ne constate que mes mandants ont procédé au fauchage des parcelles reprises dans les conventions de gestion sous examen.
Mes mandants contestent dès lors formellement les sanctions appliquées par la décision entreprise alors qu’aucune gestion en contradiction ni avec le règlement grand-ducal du 22 mars 2002 instituant un ensemble de régimes d’aides pour la sauvegarde de la diversité biologique, ni avec les conventions de gestion n’a été constatée par l’entité mobile lors des deux prédits contrôles.
Les photos aériennes de 2010 ne sauraient pas non plus servir de base aux sanctions infligées pour l’année 2011.
La décision du 21 décembre 2012 reste dès lors en défaut d’exprimer les raisons de fait sur lesquelles elle repose.
Or, l’existence et la validité des motifs sont des conditions essentielles de la légalité d’un acte administratif alors que la motivation constitue une garantie substantielle pour l’administré.
La décision critiquée manque dès lors d’être motivée au sens de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes.
- Quant aux résultats relatifs aux UGB/ha retenues dans les rapports des contrôles sur place de 2011 Suivant le règlement grand-ducal du 22 avril 1999 portant mesure d’application du règlement (CE) n°820/97 du Conseil du 21 avril 1997 en ce qui concerne l’identification et l’enregistrement des bovins, il est établi un document d’identification pour chaque bovin émis par le Ministre de l’Agriculture.
Chaque bovin est ainsi identifié grâce à sa marque auriculaire, laquelle permet de vérifier l’âge de l’animal à travers la base de données centrale gérée par le Ministre de l’Agriculture.
Or, aucun des rapports litigieux ne fait référence aux marques auriculaires des bovins présents sur place au moment des contrôles effectués durant l’année 2011.
Il est ainsi incompréhensible comment l’entité mobile a pu déterminer l’âge des bovins en question.
Les résultats des rapports litigieux sont dès lors contestés alors qu’une décision portant des sanctions financières d’une telle envergure ne saurait être basée sur des estimations grossières sans aucun fondement objectif.
La décision doit ainsi porter sur des éléments de preuve pertinents et vérifiables permettant à l’administré, et le cas échéant aux juridictions administratives, de contrôler le bien-
fondé des motifs invoqués à l’appui d’une décision.
Le défaut de précision des marques auriculaires des bovins équivaut dès lors encore à une absence, voire insuffisance de motivation de la décision dont recours.
- Quant à la surface calculée pour les conventions de gestion MHA09/06-6-7-8-9, JT10/170-5 et P0646655 Dans le recours gracieux du 20 mars 2013, mes mandants ont déjà contesté l’exactitude de la surface calculée.
Ils ont ainsi fait valoir qu’il échet d’y additionner la pâture permanente portant le numéro P0552179 d’une contenance de 5,18 ha laquelle est également accessible au bétail à travers les parcelles dont s’agit.
Après réexamen du dossier, il s’avère qu’il faut encore additionner la parcelle portant le numéro P0552180 d’une contenance de 0,48 ha.
Une surface totale de 16,09 ha doit partant être prise en compte pour le calcul des UGB/ha au lieu de celle retenue par la décision litigieuse de 10,43 ha seulement.
Mes mandants maintiennent et réitèrent pour le surplus l’intégralité des moyens et arguments développés dans le recours gracieux du 20 mars 2013 (…) » Par courrier du 30 mai 2013 et en réponse au « complément au recours gracieux » du 23 mai 2013, le ministre informa le mandataire de Monsieur … de ce qui suit :
« En mains votre missive du 23 mai 2013, je me permets de vous informer qu’étant donné que cette lettre comporte des éléments complémentaires au recours gracieux du 20 mars 2013 et que ceux-ci devront être analysés par les administrations concernées par le recours gracieux, il ne sera pas possible de respecter le délai légal initial des 3 mois en vue de fournir une réponse au recours gracieux du 20 mars 2013.
En conséquence, je vous informe que la réponse à votre recours gracieux vous parviendra dans le délai légal des 3 mois après réception du complément au recours gracieux, lequel nous est parvenu en date du 27 mai 2013, et qu’une absence de réponse de notre part après le 20 juin 2013 ne pourra pas être considérée comme une décision de refus implicite de la part de l’administration. (…) » Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 20 septembre 2013, la demanderesse, Madame …, ayant repris à partir du 1er janvier 2013 l’exploitation de l’entreprise agricole jusque-là exploitée par son époux, Monsieur …, a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision rendue en date du 21 décembre 2012 prononçant à l’encontre de son époux, Monsieur …, « des sanctions financières concernant les conventions de gestion MHA09/06-2-3-4-6-7-8-9-10-12-13-14-15-19-20-26 du 20 juillet 2009 et JT10/170-1-
2-3-4-5 du 11 mars 2011 conclues en vue de la protection et de la promotion de la biodiversité en vertu du règlement grand-ducal du 22 mars 2002 instituant un ensemble de régimes d’aides pour la sauvegarde de la diversité biologique », ainsi que de « la décision implicite de refus du ministre intervenue sur recours gracieux du 20 mars 2013 ».
En date du 22 novembre 2013, le ministre a émis une nouvelle décision dans laquelle il a été partiellement fait droit aux revendications de Monsieur … telles que formulées à travers son recours gracieux, tout en maintenant les autres éléments décisionnels affectant négativement Madame ….
Le tribunal est tout d’abord amené à relever qu’indépendamment de la question de la possibilité ou non d’introduire un recours au fond dans la présente matière, la partie étatique soutient dans son mémoire en réponse que le recours sous analyse aurait perdu son objet dans la mesure où le ministre aurait émis en date du 22 novembre 2013 une nouvelle décision dans laquelle il aurait été fait droit pour partie aux revendications formulées par les époux …-… à travers leur recours gracieux.
Dans son mémoire en réplique, la demanderesse conteste que son recours aurait perdu son objet dans la mesure où la décision du 22 novembre 2013 n’aurait modifié que partiellement la décision initiale du 21 décembre 2012 pour faire droit seulement à certaines des revendications formulées par les époux …-…. Elle estime dès lors que le recours sous analyse serait recevable en ce qui concerne toutes les revendications pour lesquelles la nouvelle décision ne leur aurait pas donné satisfaction.
En l’espèce, il est constant en cause qu’il existe deux, voire trois, décisions ministérielles explicites, la première, celle du 21 décembre 2012, prononçant des sanctions financières à l’encontre de Monsieur … sur base du règlement grand-ducal précité du 22 mars 2002, et la deuxième, celle du 22 novembre 2013, faisant droit à un certain nombre des revendications formulées par le litismandataire des époux …-… dans son recours gracieux et à travers laquelle le ministre renonce à certaines des sanctions financières prononcées antérieurement dans la décision ministérielle précitée du 21 décembre 2012, ainsi que celle du 30 mai 2013 à travers laquelle le ministre a décidé de ne pas faire parvenir de réponse au recours gracieux endéans un délai de trois mois à compter du recours gracieux initial mais à compter de la réception du complément au recours gracieux.
Il ressort à cet égard plus particulièrement du dossier administratif et des pièces versées en cause que le 20 mars 2013, la décision ministérielle initiale du 21 décembre 2012 a fait l’objet d’un recours gracieux. Ensuite, après que le litismandataire des époux …-… se soit vu communiquer à sa demande par l’administration de la Nature et des Forêts les rapports relatifs aux contrôles effectués en 2011 sur place sur les surfaces exploitées par Monsieur … dans le cadre des conventions de gestion MHA09/06-2-3-4-6-7-8-9-10-12-13-14-15-19-20-26 et JT10/170-1-2-3-4-5 - rapports sur lesquels le ministre s’est entre autres basé pour prononcer les sanctions financières litigieuses -, le recours gracieux initial du 20 mars 2013 a été complété par un courrier du 23 mai 2013 contenant des explications et une prise de position supplémentaires de la part des époux …-… par rapport plus particulièrement aux conclusions des rapports prévisés de l’administration de la Nature et des Forêts. Après avoir réceptionné le complément au recours gracieux initial des époux …-…, le ministre a informé par courrier du 30 mai 2013 le litismandataire de la demanderesse qu’il devait soumettre les éléments complémentaires par rapport au recours gracieux initial pour analyse aux différentes administrations concernées, de sorte qu’il ne lui serait pas possible de respecter le délai de trois mois lui imposé par la loi pour fournir une réponse au recours gracieux initial du 20 mars 2013. Par courrier du 22 novembre 2013, le ministre a finalement informé le litismandataire des époux …-… que le dossier avait été réexaminé et que suite à ce réexamen, il avait été décidé de faire droit à un certain nombre des revendications formulées à travers le recours gracieux complété.
Au vu de ce qui précède, le tribunal est amené à relever que suite à l’introduction du recours gracieux, tel que complété ultérieurement, le ministre a procédé à une nouvelle instruction du dossier de la demanderesse et de son époux, instruction qui l’a amené à prendre en date du 22 novembre 2013 une nouvelle décision, distincte de la première. En effet, dans cette nouvelle décision, dont la teneur est différente de celle du 21 décembre 2012, le ministre a non seulement tenu compte des circonstances de fait nouvelles résultant des explications et justifications invoquées pour la première fois par les époux …-… à travers leur recours gracieux, tel que complété, mais il a également expressément pris position à l’égard de celles-ci pour donner partiellement gain de cause aux époux …-….
Force est à cet égard d’ailleurs de constater que dans son mémoire en réplique, la demanderesse elle-même qualifie la décision ministérielle du 22 novembre 2013 comme décision « remplaçant partiellement la décision précitée » et qu’elle considère que le recours sous analyse est toujours recevable « pour toutes les revendications pour lesquelles la nouvelle décision1 n’a pas donné satisfaction à la partie requérante ».
Il ressort ainsi plus particulièrement de la décision du 22 novembre 2013 que le ministre a finalement renoncé à titre exceptionnel à la réduction de la prime relative aux parcelles des conventions de gestion MHA/09/6/13-19-20-15 et JT10/170-2-3-4 « compte tenu du seul fait que 1 Souligné par le tribunal l’Administration de la Nature et des Forêts n’a pas pu installer les clôtures en question à temps (…) », circonstance expressément mise en avant par les époux …-… à travers leur recours gracieux. Le ministre a encore renoncé à la réduction de la prime pour les parcelles de la convention de gestion JT10/170-2 au motif que suite au « réexamen du dossier sur ce point », il était apparu que « Monsieur … n’a pas fauché les parcelles en question en 2010 et 2011 ». La décision ministérielle du 22 novembre 2013 tient encore compte des contestations des époux …-… quant à la contenance retenue par le ministre en ce qui concerne la parcelle se rapportant à la convention de gestion MHA09/06-3 puisqu’il a finalement été retenu que « compte tenu du fait que Monsieur … n’est pas propriétaire de la superficie, ce qui n’est pas contesté par votre mandant, la prime de biodiversité sera adaptée à la surface appartenant réellement à Monsieur … dans le cadre du contrat de gestion MHA09/06-3 ».
Au vu des développements qui précèdent, il y a lieu de retenir que suite à l’introduction en date du 20 mars 2013 d’un recours gracieux, tel que complété par la suite par courrier du 23 mai 2013, le ministre a fait procéder à une nouvelle instruction du dossier qui l’a amené à prendre une nouvelle décision en date du 22 novembre 2013 qui, alors même qu’elle ne fait que partiellement droit aux revendications formulées par les époux …-… à travers leur recours gracieux, doit être considérée comme remplaçant par la force des choses les décisions antérieurement prises en matière de sanctions financières en relation avec les conventions de gestion MHA09/06/2-3-4-6-7-8-9-10-12-13-14-15-19-20-26 et JT10/170-1-2-3-4-5, et plus particulièrement celle du 21 décembre 2012, ainsi que celle ayant résulté du silence ministériel pendant plus de trois mois suite à l’introduction du recours gracieux, de sorte qu’il y a lieu de conclure que le recours, dans la mesure où il n’est pas dirigé contre la décision ministérielle du 22 novembre 2013, rendue à la suite de l’introduction du recours contentieux sous analyse, est devenu sans objet2.
La demanderesse réclame encore l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.500.- euros sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, demande qui est à écarter au vue de l’issu du litige.
Par ces motifs le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
déclare le recours sans objet, partant le rejette ;
rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que formulée par la demanderesse ;
condamne la demanderesse aux frais ;
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 17 novembre 2014 par :
2 Trib. adm. 25 septembre 2003, n° 15972, Pas. adm. 2012, V° Procédure contentieuse, n° 306.
Marc Sünnen, premier vice-président, Thessy Kuborn, premier juge, Alexandra Castegnaro, juge, en présence du greffier en chef Arny Schmit.
s. Arny Schmit s. Marc Sünnen 13