La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/11/2014 | LUXEMBOURG | N°35024

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 12 novembre 2014, 35024


Tribunal administratif Numéro 35024 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 août 2014 Ire chambre Audience publique du 12 novembre 2014 Recours formé par la société à responsabilité limitée …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’échange de renseignements

________________________________________________________________________


JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 35024 du rôle et déposée le 7 août 2014 au greffe du tribunal administratif par la société à respon

sabilité limitée Loyens & Loeff Luxembourg s.à r.l., avocat à la Cour, représentée par Maître Jean...

Tribunal administratif Numéro 35024 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 août 2014 Ire chambre Audience publique du 12 novembre 2014 Recours formé par la société à responsabilité limitée …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’échange de renseignements

________________________________________________________________________

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 35024 du rôle et déposée le 7 août 2014 au greffe du tribunal administratif par la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff Luxembourg s.à r.l., avocat à la Cour, représentée par Maître Jean-Pierre Winandy, avocat à la Cour, les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée …, établie et ayant son siège social à L- …, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, représentée par ses organes de direction en fonction, tendant à l’annulation d’une décision du 7 juillet 2014 prise par le directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’échange de renseignements ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 8 septembre 2014;

Vu l’ordonnance du premier vice-président du tribunal administratif du 9 septembre 2014, accordant aux parties des délais pour déposer un mémoire supplémentaire ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 30 septembre 2014 par la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff s.à r.l. au nom et pour compte de la société à responsabilité limitée …;

Vu le mémoire supplémentaire du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 octobre 2014 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Georges Simon, en remplacement de Maître Jean-Pierre Winandy, et Monsieur le délégué du gouvernement Luc Reding en leurs plaidoiries respectives.

___________________________________________________________________________

Le 7 juillet 2014, le directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur », adressa à la …, ci-après désignée par la « … », une demande de fournir des renseignements en vertu de la loi du 31 mars 2010 portant approbation des conventions fiscales et prévoyant la procédure y applicable en matière d’échange de renseignements sur demande, ci-après dénommée « la loi du 31 mars 2010 », relatifs au nom de la personne ayant ouvert le compte n° …détenu par la société à responsabilité limitée …, ci-

après désignée par la « …», au nom des personnes étant autorisées à effectuer des opérations sur ledit compte, ainsi que de fournir les relevés bancaires de ce compte et de tout autre compte ouvert au nom de la société …, ladite demande étant libellée comme suit :

« Suite à une demande d'échange de renseignements du 19 juin 2014 de la part de l'autorité compétente française sur base de la convention fiscale modifiée entre le Luxembourg et la France du 1er avril 1958 ainsi que de la directive 2011/16/UE, je vous prie par la présente de me fournir les renseignements suivants pour le 12 août 2014 au plus tard.

Identité de la personne concernée par la demande :

… Adresse connue :

…, F-… L'objectif de la demande d'échange de renseignements susmentionnée résulte de ce qui suit.

Afin de pouvoir clarifier la situation fiscale de leur contribuable, les autorités fiscales françaises nécessitent certaines informations bancaires concernant un compte bancaire que détiendrait la …auprès de votre établissement et qui n’aurait pas été déclaré en France.

Je vous prie de bien vouloir fournir, pour la période du 20 janvier 2011 au 31 décembre 2012, tous les renseignements dont vous êtes détenteur, afin de permettre à l’autorité compétente luxembourgeoise de transmettre à l’autorité compétente française les renseignements vraisemblablement pertinents :

- Veuillez fournir les noms de la (des) personne(s) étant autorisée(s) à effectuer des opérations sur le compte n°…;

- Veuillez fournir le nom de la personne ayant ouvert ce compte même si la date d’ouverture ne tombe pas dans la période visée ;

- Veuillez fournir les relevés bancaires de ce compte ;

- Veuillez identifier et fournir les relevés bancaires d’autres comptes ouverts au nom de la …auprès de votre établissement.

Selon les autorités fiscales françaises, l’Etat requérant a épuisé toutes les sources habituelles de renseignements internes pour l’obtention des renseignements requis, sans courir le risque de compromettre le résultat de l’enquête.

Après examen, la demande satisfait, à mon avis, aux conditions légales de l’octroi de l’échange de renseignement tel que prévu par l’article 22 de la prédite convention fiscale et de l’échange de lettres y relatif ainsi que par la directive 2011/16/UE. Elle contient toutes les informations nécessaires pour établir la pertinence vraisemblable des renseignements demandés.

Il y a lieu de préciser que les dispositions du paragraphe 178bis de la loi générale des impôts, pour ce qui est de l’imposition des contribuables en droit interne, sont pleinement respectées.

Au vu de ce qui précède, je vous prie de me fournir les renseignements demandés dont vous êtes détenteur dans le délai imparti. Si vous rencontrez des difficultés objectives pour déférer à la présente injonction, vous voudrez me le signaler dans les plus brefs délais.

La présente décision d'injonction est susceptible d'un recours en annulation devant le tribunal administratif qui est ouvert à toute personne visée par ladite décision ainsi qu'à tout tiers concerné. Le recours doit être introduit dans le délai d'un mois à partir de la notification de la décision au détenteur des renseignements demandés et a un effet suspensif. (…)».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 7 août 2014, la …a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision précitée du directeur du 7 juillet 2014.

Etant donné que l’article 9 de la loi du 29 mars 2013 dispose que les demandes d’informations introduites par application de l’échange d’informations prévu à l’article 6 de la même loi sont traitées suivant la procédure instaurée par les articles 2 à 6 de la loi du 31 mars 2010 et que l’article 6 (1) de la loi du 29 mars 2013 prévoit qu’un recours en annulation est prévu contre une décision portant injonction de fournir des renseignements, seul un recours en annulation a pu être introduit contre la décision déférée portant injonction de fournir des renseignements en matière fiscale.

Le délégué du gouvernement conclut de prime abord à l’irrecevabilité du recours, au motif qu’il serait dépourvu d’objet alors que la … aurait exécuté la décision déférée en fournissant en date du 12 août 2014 l’intégralité des renseignements sollicités.

La …fait valoir que la décision déférée n’a été exécutée que postérieurement à la date d’introduction du présent recours et que ce dernier ne saurait être considéré comme irrecevable en raison d’un fait intervenu postérieurement à son introduction. Elle insiste encore sur le fait que la production des renseignements litigieux aurait été faite à son insu et ne pourrait en aucun cas être interprétée comme une renonciation à l’instance en cours. Elle expose finalement que le recours aurait indirectement comme objet la vérification du contrôle de la demande d’échange de renseignements française effectué par les autorités luxembourgeoises compétentes en application de l’article 4 de la loi du 31 mars 2010.

S’il semble en effet établi en l’espèce que la … a remis les renseignements sollicités au directeur, de sorte que la décision déférée a été exécutée, l’objet du recours en question ne disparaît cependant pas pour autant. En effet, le recours en annulation, outre le fait de vouloir empêcher le transfert des renseignements, a pour objet de soumettre la question de la légalité de la décision déférée, contestée en l’espèce, à l’appréciation du tribunal. Il s’ensuit que dans la mesure où la décision déférée continue à exister, le recours de la partie demanderesse garde forcément son objet, à savoir notamment le contrôle de la légalité de la décision déférée.

Le délégué du gouvernement conclut encore à l’irrecevabilité du recours pour défaut de motivation, en estimant que la partie demanderesse se limiterait à contester la « pertinence vraisemblable » de la décision déférée, sans pour autant exposer des moyens et arguments précis y relatifs.

Aux termes de l’article 1er, paragraphe 2 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives : « La requête, qui porte date, contient : (…) -

l’exposé sommaire des faits et des moyens invoqués, (…) ».

Il appartient au tribunal saisi d’apprécier in concreto si l’exposé sommaire des faits et des moyens, ensemble les conclusions s’en dégageant, est suffisamment explicite ou non.

L’exceptio obscuri libelli, qui est d’application en matière de contentieux administratif, sanctionne d’une nullité l’acte y contrevenant, étant entendu que son but est de sanctionner le demandeur qui ne met pas le défendeur en mesure de savoir quelle est la décision critiquée et quels sont les moyens à la base de la demande, afin de lui permettre d’organiser utilement sa défense.1 S’il suffit que cet exposé soit sommaire, la requête introductive d’un recours ne doit cependant pas rester muette sur les moyens à son appui, elle ne doit pas être dépourvue des indications indispensables quant à la décision déférée et elle doit contenir des conclusions.

En l’espèce, la requête introductive sollicitant l’annulation d’une décision bien définie, contient outre un exposé sommaire des faits, un exposé sommaire du moyen en droit invoqué à l’appui du recours, à savoir qu’il ne ressortirait pas de la décision déférée un quelconque motif permettant de conclure que la …serait un contribuable français, raison pour laquelle la décision déférée ne serait pas suffisamment motivée et ne remplirait partant pas « les conditions de pertinence vraisemblable ».

Il ressort encore de la lecture du mémoire en réponse que la partie étatique a valablement pu prendre position quant au fond de la demande de sorte qu’une lésion de ses droits de la défense ne saurait être retenue en l’espèce.

Il s’ensuit que la requête introductive d’instance répond aux exigences de l’article 1er de la loi du 21 juin 1999 précitée de sorte que le moyen afférent est à rejeter comme étant non fondé.

Aucun autre moyen d’irrecevabilité n’ayant été soulevé, le recours en annulation est recevable pour avoir été, par ailleurs, introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, la partie demanderesse sollicite de prime abord la communication de la demande d’échange de renseignements émanant des autorités françaises du 19 juin 2014.

Or, dans la mesure où cette demande a été déposée au greffe du tribunal administratif le 8 septembre 2014, ensemble avec le mémoire en réponse du délégué du gouvernement, et que le mandataire de la partie demanderesse a pu en prendre inspection, cette demande est à considérer comme étant devenue sans objet, d’autant plus qu’elle a pu y prendre position dans son mémoire supplémentaire.

1 cf. trib. adm. 30 avril 2003, n° 15482 du rôle et autres références y citées, Pas. adm. 2012, V° Procédure contentieuse, n° 386 La partie demanderesse fait ensuite valoir être une société de droit luxembourgeois, ayant son siège social au Luxembourg, alors que la décision déférée ne contiendrait aucune information permettant de conclure qu’elle serait à considérer comme un contribuable français. Elle en conclut que la demande ne serait point motivée et ne saurait partant être considérée comme vraisemblablement pertinente.

Dans son mémoire supplémentaire, la partie demanderesse souligne que la décision déférée ne ferait pas état d’un établissement stable en France, mais la présenterait comme étant une société de droit français alors qu’elle serait en réalité une société de droit luxembourgeois. La finalité fiscale de la demande d’échange de renseignements des autorités françaises ne figurerait dès lors pas dans la décision déférée pour avoir omis de mentionner l’existence d’un établissement stable en France et partant être restée en défaut de créer un quelconque lien entre les autorités fiscales françaises et elle-même. A titre subsidiaire, elle estime qu’il existerait une incohérence entre la demande d’échange de renseignements française et l’objectif fiscal poursuivi, dans la mesure où le délégué du gouvernement préciserait dans son mémoire en réponse que les renseignements sollicités auraient pour but la détermination de l’impôt sur les salaires et que la décision déférée resterait muette sur ce point. A titre tout à fait subsidiaire, elle conteste avoir un établissement stable en France de sorte à ébranler le descriptif du cas d’imposition de manière à affecter sérieusement la pertinence vraisemblable des informations sollicitées.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet des moyens précités, en relevant que la décision serait motivée à suffisance pour mentionner le contrôle fiscal de la partie demanderesse et de son établissement stable réalisé en France. En tout état de cause, le standard international en matière d’échange de renseignements, et notamment le respect du principe de la confidentialité porteraient interdiction formelle d’inclure de manière intégrale la demande de renseignements étrangère, et ceci, tant au fond que quant à la forme. Il donne dans ce contexte à considérer que les autorités luxembourgeoises compétentes en la matière respecteraient en l’espèce les critères d’application stricte au niveau international relatifs à l’interprétation du principe de confidentialité en relation avec la demande de renseignements étrangère.

Il estime encore que le directeur aurait à bon droit retenu que la demande française satisferait aux conditions légales applicables en la matière pour établir la pertinence vraisemblable des renseignements demandés, étant donné que la demande de renseignements contiendrait tant l’identité de la personne faisant l’objet d’un contrôle ou d’une enquête, à savoir l’établissement stable en France de la société …, que les indications concernant les renseignements recherchés, et le but fiscal dans lequel ces renseignements sont demandés, la demande contenant à cet effet un descriptif précis et détaillé des faits et opérations de contrôle en cours, de même que les résultats des recherches d’ores et déjà obtenus, ce qui prouverait que les autorités fiscales étrangères auraient utilisé leurs sources habituelles de renseignements prévues par leurs procédures fiscales internes avant de s’adresser à l’autorité compétente luxembourgeoise. La … serait à considérer comme une personne dont il y aurait lieu de penser qu’elle serait en possession des renseignements demandés, et plus généralement de tout élément de nature à faciliter la recherche d’informations par l’Etat requis. Il résulterait encore de la demande de renseignements française que les renseignements demandés présenteraient un lien direct avec le contrôle fiscal en cours en France de sorte à être vraisemblablement pertinents et qu’elle fournirait toutes les informations établissant le lien « entre l’Etat requérant et l’Etat requis pour justifier une telle demande de renseignements ».

Dans son mémoire complémentaire, le délégué du gouvernement insiste encore une fois sur le fait que le but fiscal dans lequel les renseignements sont demandés serait clairement exposé dans la demande des autorités françaises, à savoir la détermination de l’impôt sur les sociétés de l’établissement stable en France de la partie demanderesse, et « que toute autre référence y contraire dans le mémoire en réponse de l’Etat du 8 septembre 2014 constitue une erreur matérielle et est à écarter ». A ce titre la partie étatique expose qu’une précédente demande d’assistance administrative aurait permis de confirmer que la …n’aurait pas d’activité ni de siège de direction au Luxembourg et qu’un contrôle effectué à son adresse aurait révélé l’existence d’un compte bancaire à Luxembourg non déclaré à l’administration française.

Le tribunal n'est pas tenu de suivre l'ordre dans lequel les moyens sont présentés par une partie demanderesse mais, dans l'intérêt de l'administration de la justice, sinon de la logique inhérente aux éléments de fait et de droit touchés par les moyens soulevés, peut les traiter suivant un ordre différent2.

Aux termes de l’article 22, paragraphe 1 de la Convention conclue entre le Grand-

Duché de Luxembourg et la France tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative réciproque en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Paris, le 1er avril 1958, modifiée par un Avenant signé à Paris le 8 septembre 1970, par un Avenant signé à Luxembourg, le 24 novembre 2006 et par un Avenant signé à Paris le 3 juin 2009 et l’échange de lettres y relatif, ci-après dénommée « la Convention » :

« 1. Les autorités compétentes des Etats contractants échangent les renseignements vraisemblablement pertinents pour appliquer les dispositions de la présente Convention ou pour l’administration ou l’application de la législation interne relative aux impôts de toute nature ou dénomination perçus pour le compte des Etats contractants, de leurs subdivisions politiques ou de leurs collectivités locales dans la mesure où l’imposition qu’elle prévoit n’est pas contraire à la Convention. L’échange de renseignements n’est pas restreint par l’article 1 ».

Il échet de relever qu’en ce qui concerne le rôle du tribunal en la matière, celui-ci est circonscrit par une triple limitation, à savoir, d’une part, celle découlant de sa compétence limitée de juge de l’annulation, de seconde part, celle découlant du fait que la décision directoriale repose à la base sur la décision d’une autorité étrangère, dont la légalité, le bien-

fondé et l’opportunité échappent au contrôle du juge luxembourgeois, et, de troisième part, celle du critère s’imposant tant au directeur qu’au juge administratif, à savoir celui de la « pertinence vraisemblable ». En ce qui concerne ce dernier critère, il y a lieu de relever que si le juge de l’annulation est communément appelé à examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée, ce contrôle doit, en la présente espèce, être considéré comme plus limité, puisque le juge n’est pas appelé à vérifier si la matérialité des faits donnant lieu au contrôle à la base de la demande de renseignements est positivement établie, mais seulement si les renseignements sollicités paraissent être vraisemblablement pertinents dans le cadre du contrôle ou de l’enquête poursuivie dans l’Etat requérant.3 Ce contrôle doit se faire dans l’Etat requis, alors qu’il appartient de vérifier si les conditions pour un échange de renseignements sont bien remplies, et notamment si l’Etat 2 Trib. adm. du 16 décembre 2004, n °18075 du rôle, Pas. adm. 2012, V° Procédure contentieuse, n° 392 et autres références y citées.

3 Voir trib. adm. 6 février 2012, n° 29592 du rôle, publié sous www.ja.etat.lu requérant a suffi à son obligation d’établir la pertinence vraisemblable de l’information sollicitée dans le cadre de sa demande de renseignements.

En l’espèce, force est au tribunal de constater que si la demande directoriale déférée ne fait pas état de l’existence d’un établissement stable de la partie demanderesse en France, elle désigne la …ayant comme adresse …, F-… sous … comme contribuable. Il en va néanmoins différemment de la demande initiale émanent des autorités françaises, qui désigne sans équivoque l’établissement stable de la partie demanderesse comme étant le contribuable faisant l’objet d’un contrôle fiscal en France. Par ailleurs, il échet de relever que les autorités de l’Etat requérant précisent dans le formulaire de demande de renseignements du 19 juin 2014 que la demande de renseignements concerne l’impôt sur les sociétés pour la période du 20 janvier 2011 au 31 décembre 2012.

Dans la mesure où le juge de l’Etat requis n’est en matière d’échange de renseignements pas compétent pour vérifier si la matérialité des faits donnant lieu au contrôle à la base de la demande de renseignements est positivement établie, le tribunal n’est en l’espèce pas compétent pour analyser le bien-fondé de l’affirmation relative à l’existence d’un établissement stable de la partie demanderesse en France, contestée par cette dernière.

Quant à la finalité fiscale des informations demandées, la demande française invoque les motifs suivants : « L’administration française procède actuellement à la vérification de la comptabilité de l’établissement stable en France de la …sise … L-…. Une précédente demande d’assistance administrative auprès de vos services a permis de confirmer que la …n’avait pas d’activité effective ni de siège de direction au Grand Duché. Une procédure de droit de visite et de saisie préalable à la vérification de comptabilité de la société …, effectuée à l’adresse de la société, a permis de révéler l’existence d’un compte bancaire à l’étranger et non déclaré à l’administration française. Dans le cadre de la procédure de contrôle, aucun élément n’a pu être obtenu de la part de la société, concernant ce compte bancaire à l’étranger. Dans le cadre de la présente demande, l’administration française souhaite disposer des relevés pour la période du 20/01/2011 au 31/12/2012 des comptes bancaires ouverts au nom de la …(ou EFI LUX), auprès de la banque et caisse d’épargne de l’Etat. Il s’agit en particulier du compte …et de toute (sic) autre compte ouvert dans la même banque au nom de la société. » Or, s’il en ressort que la partie demanderesse dispose d’un compte bancaire auprès d’un établissement bancaire luxembourgeois, en l’occurrence la …, ce qui n’est point étonnant alors qu’il s’agit d’une société de droit luxembourgeois, les autorités françaises ne fournissent cependant aucune explication quant au lien éventuel entre l’imposition de l’activité imposable en France de l’établissement stable de la …de droit luxembourgeois se trouvant en France et le compte luxembourgeois de cette dernière.

Le tribunal doit encore constater que le délégué du gouvernement reste également muet quant aux circonstances qui pourraient vraisemblablement justifier l’existence d’un tel lien, à savoir la justification de l’utilité concrète des renseignements sollicités dans le cas d’imposition en France.

Il résulte de ces considérations qu’en ce qui concerne les renseignements sollicités, la condition de la pertinence vraisemblable n’est pas remplie, de sorte que le moyen y relatif est à déclarer fondé et qu’il y a partant lieu d’annuler la décision déférée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

dit que la demande en communication de la demande d’échange de renseignements émanent des autorités françaises du 19 juin 2014 est devenue sans objet, au fond, déclare le recours justifié, partant annule la décision déférée du 7 juillet 2014 et renvoie le dossier en prosécution de cause devant le directeur de l’administration des Contribution directes;

met les frais à charge de l’Etat.

Ainsi jugé par :

Carlo Schockweiler, premier vice-président, Laurent Lucas, juge, Olivier Poos, juge, et lu à l’audience publique du 12 novembre 2014 par le premier vice-président, en présence du greffier Monique Thill.

s. Monique Thill s. Carlo Schockweiler Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 13 novembre 2014 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 35024
Date de la décision : 12/11/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2014-11-12;35024 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award