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05/11/2014 | LUXEMBOURG | N°32989

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 novembre 2014, 32989


Tribunal administratif No 32989 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 juillet 2013 3e chambre Audience publique du 5 novembre 2014 Recours formé par Madame …, … (France) contre une décision du ministre délégué à la Fonction publique et à la Réforme administrative et une décision du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative en matière d’admission à la carrière S des employés de l’Etat

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro

32989 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 2 juillet 2013 par Maître Pasc...

Tribunal administratif No 32989 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 juillet 2013 3e chambre Audience publique du 5 novembre 2014 Recours formé par Madame …, … (France) contre une décision du ministre délégué à la Fonction publique et à la Réforme administrative et une décision du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative en matière d’admission à la carrière S des employés de l’Etat

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 32989 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 2 juillet 2013 par Maître Pascal Peuvrel, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à F-…, tendant principalement à la réformation, subsidiairement à l’annulation de la décision du ministre délégué à la Fonction publique et à la Réforme administrative du 23 octobre 2012 portant refus d’équivalence de ses diplômes en vue de l’admission à la carrière S des employés de l’Etat, ainsi que de la décision confirmative du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative du 3 avril 2013, intervenue sur recours gracieux du 21 janvier 2013 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 30 septembre 2013;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 28 octobre 2013 par Maître Pascal Peuvrel au nom de Madame … ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 novembre 2013;

Vu les pièces versées en cause, et notamment les décisions critiquées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Franck Simans en remplacement de Maître Pascal Peuvrel, et Madame le délégué du gouvernement Betty Sandt en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 12 mars 2014 ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport complémentaire, ainsi que Maître Franck Simans, en remplacement de Maître Pascal Peuvrel, et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul Reiter en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 19 mars 2014.

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En date du 17 juillet 2001, Madame … se vit décerner un diplôme intitulé « Diplôme de l’école supérieure de commerce de Reims ».

En date du 25 septembre 2012, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche prit un arrêté aux termes duquel ledit diplôme fût inscrit au registre des diplômes prévu à l’article 1er de la loi modifiée du 17 juin 1963 ayant pour objet de protéger les titres d’enseignement supérieur.

Au cours de l’année 2012, Madame … transmit son dossier de candidature au service de recrutement du ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative de l’Etat, notamment en vue de l’admission à la carrière S des employés d’Etat.

En date du 18 septembre 2012 la Commission de l’examen d’aptitude générale de la catégorie administrative, ci-après désignée « Commission des équivalences administratives », rendit un avis négatif au sujet de la reconnaissance de l’équivalence du diplôme dont est titulaire Madame … aux études requises pour l’admission à la carrière S de l’employé de l’Etat. Cet avis est motivé comme suit :

« […] L'intéressée présente un diplôme de Baccalauréat général, délivré par l'Académie de Nancy-Metz et un Diplôme de l'Ecole supérieure de commerce de Reims.

Dans la mesure où l'intéressée désire obtenir l'équivalence de son diplôme avec les études requises pour être admissible à la carrière S de l’employé de l’Etat, il échet de rappeler les dispositions de l'article 2 du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 portant organisation des examens-concours pour l'admission au stage des fonctions administratives et scientifiques de la carrière supérieure des administrations de l'Etat et des établissements publics, qui dispose ce qui suit:[…] La commission constate que le diplôme présenté ne remplit pas les conditions énumérées à l'article 2 du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 portant organisation des examens-concours pour l’admission au stage des fonctions administratives et scientifiques de la carrière supérieure des administrations de l’Etat et des établissements publics. En effet, il ne satisfait ni aux dispositions prévues sous le point a) car il ne correspond pas à un grade de Master soumis à l’homologation par le Ministre de l’Enseignement supérieur, ni à celle du point b) il ne correspond pas à un grade de Master non soumis à l’homologation, ni à celle du point c) il est délivré par un établissement d’enseignement supérieur mais ne correspond pas dans sa dénomination aux diplômes délivrés par les universités de l’Etat dans lequel les études ont été accomplies.

Bien que le « Bulletin officiel spécial du 28 janvier 2010 » du gouvernement français, reprenne une liste de diplômes d'établissements d'enseignement supérieur technique privés et consulaires visés par le ministre chargé de l'enseignement supérieur et conférant à leurs titulaires le grade de master et que suivant cette liste les titulaires d'un diplôme de l'Ecole supérieure de commerce de Reims sont visés par l'arrêté du 24 février 2005 (Vague A ), il faut noter que cette mesure ne vise que les diplômes émis à partir du 1er septembre 2004.

Or le diplôme en question a été délivré à Madame … en 2001 et ne tombe de ce fait pas sous cette disposition.

Partant la commission des équivalences administratives émet un avis négatif quant à la demande en question et elle propose à Madame la Ministre déléguée à la Fonction publique et à la Réforme administrative de ne pas accorder l'équivalence des formations de Madame … avec les diplômes requis pour être admissible à la carrière S de l’employé de l’Etat.

[…] » Par une décision du 23 octobre 2012, le ministre délégué à la Fonction publique et à la Réforme administrative, ci-après désigné par « le ministre délégué», se rallia à cet avis négatif de la Commission des équivalences administratives et refusa de reconnaître l’équivalence du diplôme de Madame … aux études requises pour l’admission à l’examen-concours en vue de l’admission à la carrière S des employés de l’Etat, au motif que son diplôme ne rentre pas dans les catégories de diplômes visées par le règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 applicable à l’admission à la carrière S des employés de l’Etat en vertu de l’Annexe du règlement grand-ducal modifié du 28 juillet 2000 fixant le régime des indemnité des employés occupés dans les administration et services de l’Etat au sujet de la carrière S de l’employé de l’Etat.

En date du 21 janvier 2013, Madame … introduisit un recours gracieux contre la décision précitée du 23 octobre 2012.

Par une décision du 3 avril 2013, le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, ci-après désigné « le ministre » confirma la décision du 23 octobre 2012 en ces termes :

« En réponse à votre recours gracieux du 21 janvier 2013 formé à l'encontre de la décision de Madame la Ministre déléguée à la Fonction publique et à la Réforme administrative du 23 octobre 2012, prise sur avis de la commission des équivalences administratives du 18 septembre 2012, refusant de délivrer à Madame … l'équivalence de son diplôme avec les diplômes requis pour l’admission à la carrière S de l’employé de l’Etat, j'ai l'honneur de vous faire tenir la prise de position suivante :

Madame … dispose du diplôme de l'Ecole Supérieure de Commerce de Reims qui constitue un établissement d'Enseignement Technique Supérieur reconnu par l'Etat qui lui a été délivré en date du 17 juillet 2001. Dans son avis du 18 septembre 2012, auquel il est renvoyé pour les besoins de la cause, la commission des équivalences renvoie à l'article 2, paragraphe 2 du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 portant organisation des examens-

concours pour l'admission au stage des fonctions administratives et scientifiques de la carrière supérieure des administrations de l'Etat et des établissements publics qui dispose ce qui suit (le texte en question s’applique aux employés de l’Etat alors que l’annexe du règlement grand-ducal du 28 juillet 2000 fixant le régime des indemnités des employés occupés dans les administrations et services de l’Etat y fait expressément référence en ce qui concerne les employés de la carrière S):

[…] La commission des équivalences constate que l'intéressée ne remplit ni les conditions sous a) alors qu'elle ne dispose pas de diplôme homologué ni celles sous b) puisqu'elle ne dispose pas de diplôme délivré par un établissement à caractère universitaire.

La requérante serait éventuellement susceptible de remplir les conditions sous le point c) ci-dessus alors qu'elle dispose d'un diplôme délivré par une école d'enseignement supérieur. Or, son diplôme ne correspond pas, en ce qui concerne la dénomination de ce diplôme, à un diplôme délivré par une université et qui est par hypothèse le diplôme de master.

Le fait que l'intéressée produise maintenant une attestation de diplôme suivant laquelle elle « a obtenu, à la suite du Jury du 17 juillet 2001, le Diplôme de l'Ecole Supérieure de Commerce de Reims qui confère le grade de Master » n'y change rien alors qu'en dehors du fait que cette attestation serait contraire à la réglementation française si on en tirait les conclusions que vous en déduisez, elle n'a pas pour effet de conférer une autre dénomination au diplôme de l'intéressée que celle qui est portée sur le diplôme lui-même.

En conclusion, je me vois obligé de confirmer la décision de Madame la Ministre déléguée à la Fonction publique et à la Réforme administrative du 23 octobre 2012, ensemble avec l'avis de la commission des équivalences du 18 septembre 2012 en annexe de cette décision, en ce qui concerne la non-admissibilité de votre cliente à la carrière S des employés de l’Etat.

[…] » Par requête déposée le 2 juillet 2013 au greffe du tribunal administratif, Madame … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision du 23 octobre 2012 du ministre délégué, ainsi que de la décision du 3 avril 2013 du ministre intervenue suite à son recours gracieux du 21 janvier 2013.

A titre liminaire quant à l’objet du recours, le tribunal est amené à retenir que les décisions litigieuses portent sur deux volets, à savoir, d’une part, sur l’équivalence des diplômes de Madame … et, d’autre part, sur le refus de l’admission à la carrière S des employés de l’Etat.

Aucune disposition légale ne prévoyant un recours au fond en la présente matière, seul un recours en annulation a pu être introduit contre les décisions litigieuses. Le tribunal est dès lors incompétent pour statuer sur le recours principal en réformation.

Le recours subsidiaire en annulation, introduit par ailleurs dans les formes et délai de la loi, est recevable.

A l’appui de son recours, la demanderesse limite expressément ses développements aux conditions d’application de l’article 2, paragraphe 2, point c), du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 portant organisation des examens-concours pour l’admission au stage des fonctions administratives et scientifiques de la carrière supérieure des administrations de l’Etat et des établissements publics, ci-après désigné « le règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 », et argumente que le ministre aurait considéré à tort qu’elle ne remplirait pas les conditions exigées par cette disposition pour être admissible à la carrière S des employés de l’Etat.

S’agissant de la première condition posée par l’article 2, paragraphe 2, point c) du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 et tenant à l’obligation de présenter un diplôme délivré par une école d’enseignement supérieur et sanctionnant un cycle d’études aboutissant à la délivrance d’un diplôme correspondant au grade de master reconnu ou d’un diplôme reconnu équivalent correspondant à la formation exigée pour la vacance de poste sollicitée, la demanderesse soutient que le diplôme qu’elle aurait obtenu aurait été délivré par une école d’enseignement supérieur, en l’espèce l’Ecole Supérieure de Commerce de Reims, et que suivant une attestation de Monsieur le Directeur Délégué de Sup de Co de Reims Management School ce diplôme obtenu en 2001 lui conférerait le grade de master, de même que suivant l’attestation de Madame …, Directrice du programme Grande Ecole de Reims, puisque le diplôme de l’Ecole Supérieure de Commerce de Reims (bac +5) donnerait actuellement lieu à l’obtention de 180 crédits ECTS minimum après l’acquisition préalable de 120 crédits ECTS, soit un total de 300 crédits ECTS.

Concernant la deuxième condition posée par l’article 2, paragraphe 2, point c) du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 tenant à la dénomination du diplôme délivré, Madame … considère que cette exigence constituerait une discrimination indirecte puisque cette condition serait fondée uniquement sur la dénomination des diplômes et non sur la qualification académique et qu’ainsi deux étudiants, disposant du même niveau académique, titulaires tous deux d’un diplôme équivalent au grade de master, mais dont l’un aura été délivré par une université, et l’autre par un autre établissement d’enseignement supérieur seraient placés dans deux situations différentes et en conclut que cette condition ferait primer la forme sur le fond. De plus cette « situation » serait contraire à l’article 10bis de la Constitution.

A titre subsidiaire, elle soulève dans son mémoire en réplique la question de la conformité du deuxième tiret du point c) de l’article 2, paragraphe 2 du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 avec l’article 10bis de la Constitution et demande au tribunal de se prononcer sur la question de constitutionalité suivante:

« L’article 2.2 c), deuxième tiret, du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 relatif à l’organisation des examens-concours pour l’admission au stage des fonctions administratives et scientifique de la carrière supérieure des administrations de l’Etat et des établissements publics dans la mesure où il soumet l’admissibilité à la carrière S des employés de l’Etat à la possession d’un diplôme au moins équivalent au grade de master devant correspondre dans sa dénomination à un diplôme délivré par les universités est-il conforme à l’article 10bis de la Constitution ? » Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ces moyens.

Aux termes de l’annexe du règlement grand-ducal du 28 juillet 2000 fixant le régime des indemnités des employés occupés dans les administrations et services de l’Etat ; « pour être classé dans cette carrière [la carrière S] l’employé doit remplir les conditions d’études prévues au règlement grand-ducal du 30 janvier 2004 portant organisation des examens-concours pour l’admission au stage des fonctions administratives et scientifiques de la carrière supérieure des administrations de l’Etat et des établissements publics ».

Aux termes de l’article 2, paragraphe 2, point c) du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004, seul invoqué en l’espèce, de sorte que le tribunal limitera son examen à cette disposition, les candidats à la carrière S des employés de l’Etat doivent être titulaires :

« c) […] d'un diplôme étranger de fin d'études supérieures qui n'est ni soumis à l'homologation visée sous a), ni aux conditions exigées sous b), mais qui répond aux exigences suivantes:

− les diplômes doivent avoir été délivrés par une école d'enseignement supérieur et sanctionner un cycle d'études aboutissant à la délivrance d'un diplôme correspondant au grade de master reconnu ou d'un diplôme reconnu équivalent correspondant à la formation exigée pour la vacance de poste sollicitée;

− les diplômes doivent correspondre dans leur dénomination aux diplômes délivrés par les universités de l'Etat dans lequel les études ont été accomplies;

− les diplômes doivent être inscrits au registre prévu par la loi du 17 juin 1963 ayant pour objet de protéger les titres d'enseignement supérieur.

Les diplômes et certificats désignés par le présent paragraphe doivent être reconnus, dans chaque cas individuel, par les commissions prévues aux articles 4 et 7.

Avant de reconnaître les prédits diplômes et certificats, la commission doit :

− en avoir vérifié l'existence en ce qui concerne les titres visés sous 2-a), respectivement la validité, en ce qui concerne les titres visés sous 2-b) et 2-c). La charge des preuves à apporter à cet effet incombe aux candidats.

Pour la reconnaissance des diplômes visés sous 2-b) et 2-c), la commission apprécie tous les éléments déterminant la valeur des titres présentés par les candidats.

− avoir vérifié si les titres présentés ont été acquis dans une discipline correspondant à la formation exigée pour la vacance de poste sollicitée. » Cette disposition impose dès lors trois conditions tenant au diplôme requis. Lesdites conditions étant cumulatives, la circonstance que l’une d’entre elles n’est pas remplie entraîne automatiquement le non-respect du prescrit du point c) de l’article 2, paragraphe 2, précité.

Force est au tribunal de constater que sur base des pièces et éléments lui soumis, la demanderesse reste en défaut de prouver que la condition posée au deuxième tiret du point c) de l’article 2, paragraphe 2 du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 exigeant que « les diplômes doivent correspondre dans leur dénomination aux diplômes délivrés par les universités de l’Etat dans lequel les études ont été accomplies » soit remplie en l’espèce. Ainsi, le diplôme dont est titulaire la demanderesse ne correspond pas, par sa dénomination, au grade de master dont elle se prévaut. Par ailleurs, elle reste en défaut d’indiquer à quel autre diplôme délivré par les universités françaises son diplôme correspondrait. En effet, en l’espèce, le diplôme de la demanderesse intitulé « Diplôme de l’Ecole Supérieure de commerce de Reims» ne saurait de par son intitulé même être identique à celui décerné par une université française. La condition tirée de l’article 2, paragraphe 2, point c), deuxième tiret, n’est donc, en l’espèce, pas remplie.

En ce qui concerne le reproche que l’exigence posée par le deuxième tiret de l’article 2, paragraphe 2, point c) du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 serait discriminatoire, force est de constater que le principe d’égalité de traitement consacré par l’article 10bis de la Constitution interdit de traiter de manière différente les situations similaires à moins que la différence soit objectivement justifiée. Le principe d’égalité implique l’obligation de traiter de la même façon tout ceux qui se trouvent dans la même situation de fait et de droit.

Or, la demanderesse ne se trouve pas dans la même situation que celle des personnes ayant opté pour la poursuite de tout ou partie de leur formation auprès d’une université ou auprès d’une école supérieure dont les diplômes correspondent dans leur dénomination aux diplômes délivrés par les universités de l’Etat dans lequel les études ont été accomplies. En effet, tel que correctement relevé par la partie étatique, la provenance d’un diplôme permet non seulement de juger de sa valeur académique, mais est également un critère permettant de façon simplifiée de déterminer quel est le niveau de formation de son détenteur, constat qui a été accentué par le processus de Bologne ayant introduit une dénomination générale pour des diplômes équivalents.

L’exigence que le diplôme corresponde dans sa dénomination à un diplôme délivré par les universités de l’Etat ou provienne d’un certain type d’établissement d’enseignement supérieur ne constitue pas une discrimination contraire à l’article 10bis de la Constitution, dans la mesure où la dénomination et les établissements visés permettent d’une façon générale de reconnaître la valeur d’un diplôme et que les détenteurs d’un tel diplôme disposent d’une formation académique d’un niveau bien déterminé dont ne peuvent pas se prévaloir les candidats qui ne disposent pas d’un tel titre, de sorte que les diplômes dont la dénomination n’est pas équivalente à celle décernée par une université du même pays ne diffèrent non seulement dans leur dénomination, mais correspondent également à des qualifications académiques distinctes. Il s’ensuit que le moyen fondé sur une violation de l’article 10bis de la Constitution est à rejeter comme étant non fondé.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’une des conditions prévues au point c) faisant défaut, le refus du ministre est fondé à suffisance, sans qu’il n’y ait lieu d’examiner les autres conditions inscrites à l’article 2, paragraphe 2, point c) du règlement grand-

ducal modifié du 30 janvier 2004.

A titre superfétatoire, le tribunal relève néanmoins que la demanderesse ne remplit pas non plus la condition selon laquelle le diplôme doit correspondre au grade de master reconnu ou d’un diplôme reconnu équivalent. Or, étant titulaire d’un « diplôme de l’Ecole Supérieure de Commerce de Reims », la demanderesse n’est pas titulaire d’un diplôme de « master », constat qui n’est d’ailleurs pas contesté par la demanderesse, celle-ci considérant néanmoins que son diplôme serait équivalent au diplôme de master en se basant sur une attestation du 8 juillet 2013 de Madame …, Directrice du programme Grande Ecole de Reims. Il est certes vrai que dans cette attestation du 8 juillet 2013 il est mentionné que la demanderesse est titulaire du diplôme « qui confère aujourd’hui le grade de Master ». Ce constat est néanmoins à relativiser par les dispositions françaises citées par la Commission des équivalences dans son avis et dont le contenu n’a pas autrement été contesté par la demanderesse. En effet, il se dégage de l’avis de la Commission des équivalences que le « Bulletin officiel spécial du 28 janvier 2010 » du gouvernement français reprend certes une liste de diplômes d’établissements d’enseignement supérieur technique privés et consulaires visés par le ministre chargé de l’enseignement supérieur et conférant à leurs titulaires le grade de master et que suivant cette liste les titulaires d’un diplôme de l’Ecole supérieure de commerce de Reims sont visés par l’arrêté du 24 février 2005 (Vague A), mais cette mesure ne vise que les diplômes émis à partir du 1er septembre 2004. En l’espèce, le diplôme de Madame … datant de 2001, il ne tombe pas de ce fait sous cette disposition, de sorte que le tribunal est amené à retenir si aujourd’hui le diplôme de l’Ecole supérieur de commerce de Reims est considéré comme un diplôme équivalent au grade de master, ceci n’était pas le cas en 2001. D’autre part, le tribunal relève que l’attestation précitée du 8 juillet 2013 n’a en toute hypothèse pas la portée que la demanderesse entend lui conférer, puisqu’elle ne fait que confirmer que l’Ecole Supérieure de Commerce de Reims confère aujourd’hui le grade de master, sans pour autant qu’elle confirme que le diplôme de la demanderesse puisse être qualifié comme tel. Partant la condition inscrite à l’article 2, paragraphe 2, point c), premier tiret du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 n’est pas remplie non plus.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours est à rejeter pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

Au vu de l’issue du litige, il y a par ailleurs lieu de rejeter la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure de 2.500 € formulée par la partie demanderesse sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;

reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;

au fond le déclare non fondé et le rejette ;

dit non fondée la demande de Madame … en obtention d’une indemnité de procédure de 2.500,- EUR sur base de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi délibéré par:

Annick Braun, premier juge, Hélène Steichen, juge, Olivier Poos, juge et lu à l’audience publique du 5 novembre 2014 par le premier juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 6.11.2014 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 32989
Date de la décision : 05/11/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2014-11-05;32989 ?

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