Tribunal administratif N° 33076 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 juillet 2013 1re chambre Audience publique du 29 septembre 2014 Recours formé par Monsieur … et consorts, …, contre une décision du bourgmestre de la commune de Septfontaines, en présence de Monsieur …, … en matière de permis de construire
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 33076 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 17 juillet 2013 par Maître Trixi LANNERS, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de 1. Monsieur …, demeurant à L-… et 5 consorts tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision rendue par le bourgmestre de la commune de Septfontaines le 12 avril 2013, autorisant Monsieur …, demeurant à L-…, à installer un conteneur sur un terrain sis en zone verte, terrain inscrit au cadastre sous le n° …, commune de Septfontaines, section A de … ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Cathérine NILLES, en remplacement de l’huissier de justice Carlos CALVO, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 18 juillet 2013, portant signification de ce recours à l’administration communale de Septfontaines ainsi qu’à Monsieur …, préqualifié ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif en date du 5 septembre 2013 par Maître Claude SCHMARTZ, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif en date du 13 novembre 2013 par Maître Christian POINT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Septfontaines ;
Vu le mémoire en réponse, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 16 décembre 2013 par Maître Christian POINT au nom de l’administration communale de Septfontaines ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 15 janvier 2014 par Maître Trixi LANNERS au nom de Monsieur … et consorts ;
Vu la constitution de nouvel avocat à la Cour déposée par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH, inscrite au barreau de Luxembourg, en remplacement de Maître Christian POINT, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 22 septembre 2014 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Stéphanie LOMMEL, en remplacement de Maître Trixi LANNERS, et Maître Martial BARBIAN, pour la société anonyme ARENDT & MEDERNACH, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 septembre 2014.
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Les demandeurs, ci-après dénommés « Monsieur … et consorts », propriétaires co-
indivisaires de deux prés sis en la commune de Septfontaines, section A de …, n° cadastraux … et …, avoisinant la parcelle cadastrale n° … appartenant à Madame …, grand-mère de Monsieur … exposent que sur ledit terrain, ci-après désigné par « le terrain … », enclavé, en ce sens qu’aucun accès direct à la voie publique n’existerait, et sis en zone verte, des tracteurs, remorques et un conteneur auraient été irrégulièrement déposés, de sorte Monsieur … aurait dénoncé ce fait au garde-forestier compétent.
Suite à l’intervention de l’administration de la Nature et des Forêts, Monsieur … aurait enlevé les tracteurs et remorques stationnés sur le terrain …, tout en y laissant un conteneur métallique comparable à ceux utilisés sur les chantiers.
Le 14 janvier 2013, Monsieur … présenta une demande en autorisation de construire, ce afin de se voir autoriser à laisser sur place le prédit conteneur métallique, destiné à servir d’abri à chevaux, autorisation qui lui fut délivrée par le bourgmestre de la commune de Septfontaines en date du 12 avril 2013, portant précisément sur l’installation provisoire d’un conteneur d’une dimension de 7 m x 2,4 m sans dalles et sans fixations.
Par requête déposée le 17 juillet 2013, inscrite sous le numéro 33076 du rôle, Monsieur … et consorts ont fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de l’autorisation de bâtir précitée délivrée le 12 avril 2013 par le bourgmestre.
A l’appui de ce recours, ils affirment de prime abord disposer d’un intérêt à agir personnel, né, actuel, direct et certain, alors que la décision attaquée serait susceptible de leur faire grief, dans le sens que comme le terrain … serait enclavé, chaque fois que Monsieur … voudrait aller auprès de son conteneur, il passerait sur leurs propres parcelles n° … et … en y causant des dommages non négligeables en les ruinant en enfonçant le terrain et en le rendant boueux du fait de l’eau de pluie qui stagnerait dans les ornières, et en écrasant l’herbe, les demandeurs donnant par ailleurs à considérer qu’il serait à craindre que Monsieur … utilise de nouveau le conteneur pour y garer ses remorques, tracteurs et autres engins, tel qu’il l’aurait fait par le passé.
En doit, les demandeurs estiment que la décision déférée violerait l’article 5 de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, en ce sens que le conteneur mis en place par Monsieur … ne ferait pas partie des constructions pouvant être autorisées en zone verte, les demandeurs estimant en effet que le simple fait de mettre un cheval dans une prairie ne constituerait pas une exploitation jardinière, maraîchère, sylvicole, viticole, piscicole, apicole ou cynégétique, ni ne remplirait un but d’utilité publique, de sorte qu’un abri à chevaux ne constituerait pas non plus une exploitation agricole, ni ne ferait partie d’une telle exploitation.
Ils font ensuite plaider que la décision violerait également l’article 39 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, qui imposerait à tout permis de construire de respecter les considérations intéressant la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique et de s’abstenir d’y porter atteinte, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce, le terrain … ne disposant d’aucun accès à la voie publique, de sorte que l’accès passerait par leurs prés, nullement adaptés à être traversés avec des engins lourds tels que remorques pour chevaux, camions pour chevaux, etc. afin de charger et décharger des chevaux, les demandeurs prétendant encore que même en l’absence de tout chargement ou déchargement de chevaux la parcelle … connaîtrait un afflux élevé depuis la mise en place du conteneur et la mise en pâture des chevaux, Monsieur … s’y rendant prétendument en tracteur, ne voulant pas marcher à pied, les demandeurs en concluant que le terrain …, par le fait d’être situé en aval d’autres terrains, ne constituerait pas un site approprié pour la garde de chevaux et l’exploitation d’un conteneur, notamment faute de voie d’accès adéquate.
Monsieur … et consorts soulèvent encore une violation de l’article 1er de la loi du 21 mai 1999 concernant l’aménagement du territoire, en ce sens que l’installation d’un conteneur métallique, qualifié de « laid », dans un pré, au milieu d’autres prés et de labours, donc en plein milieu rural, sur une parcelle qui jusqu’à présent était un vaste pré splendide, mettrait en échec la réalisation de ces objectifs.
Enfin, ils font plaider que l’autorisation déférée violerait encore le règlement sur les bâtisses de la commune de Septfontaines, pris en son article 16, alinéa 1er et 2, en ce que le conteneur ferait partie des constructions ne pouvant pas être érigées en zone agricole et qu’aucun raccordement à la canalisation et au réseau d’eau potable ne serait réalisable, notamment du fait que la parcelle en question se trouve en état d’enclave et n’a aucun accès à la voie publique. Par ailleurs, il ne résulterait d’aucune pièce du dossier que la propriétaire du terrain serait au courant de la construction litigieuse ou ait donné son accord à l’érection sur son terrain d’un conteneur métallique de stockage.
Quant à la recevabilité du recours Aucune disposition légale ne prévoit de recours au fond en matière de permis de construire, de sorte que seul un recours en annulation a pu être introduit contre la décision déférée au tribunal.
Le tribunal est partant incompétent pour connaître du recours principal en réformation.
L’administration communale de Septfontaines soulève l’irrecevabilité du recours subsidiaire en annulation en déniant aux demandeurs tout intérêt à agir. A cet égard, elle rappelle que la parcelle litigieuse n° … - le terrain … -, ne disposant pas d’accès direct à la voirie publique, devrait être considérée comme enclavée et bénéficierait à ce titre d’une servitude légale d’accès passant par les parcelles n° … et … des demandeurs. Or, ceux-ci, pour justifier leur intérêt à agir, exposeraient uniquement que le passage de Monsieur … causerait des dommages à leurs parcelles, en ce que le passage d’engins lourds enfoncerait le sol, écraserait l’herbe et rendrait le terrain boueux, de sorte à invoquer des faits qui ne seraient pas en relation avec ce permis, mais découleraient de l’existence de la servitude légale d’accès résultant elle-même de la situation des lieux.
Ainsi, l’existence ou l’absence d’un conteneur placé sur le terrain … n’aurait aucune influence sur le droit civil de Monsieur … de passer sur les parcelles n° … et … des parties demanderesses, que ce soit à pied ou avec des engins agricoles et les dégâts prétendument causés aux terrains des demandeurs seraient en relation causale avec ce passage et non avec le permis autorisant Monsieur … à installer un conteneur.
En ce qui concerne la question de l’intérêt à agir des demandeurs, telle que débattue par les parties en cause, il convient de prime abord de rappeler qu’en matière de recours en annulation dirigé contre un acte administratif, le demandeur doit justifier d’un intérêt personnel et direct à obtenir l’annulation de l’acte qu’il attaque, le juge administratif devant seulement avoir égard à ce que le demandeur avance à ce sujet, dès lors qu’il lui appartient de démontrer son intérêt1.
Il convient ensuite de souligner que dans le contentieux administratif l’analyse de l’instance n’est pas focalisée sur les personnes à l’instance, mais sur l’acte administratif par rapport auquel nécessairement une personne, physique ou morale, introduit un recours, lui-
même conditionné notamment par l’intérêt à agir dudit demandeur2. En d’autres termes, le juge doit vérifier, eu égard à l’intérêt mis en avant par le demandeur, si l’acte déféré est susceptible d’avoir une incidence sur la situation du demandeur : c’est au regard de l’incidence concrète de la décision sur la situation du demandeur que l’intérêt pour agir de ce demandeur devant le juge de l’annulation doit être apprécié3. En effet, le demandeur ne pourra être regardé comme ayant intérêt à agir que si l’acte entraîne à son égard les conséquences fâcheuses constituant le grief mis en avant4.
En l’espèce, il échet de constater que la décision déférée au tribunal se rapporte directement à une autorisation de bâtir délivrée par le bourgmestre de la commune de Septfontaines dont l’objet est d’autoriser l’installation d’un conteneur métallique préfabriqué dans un pré. Partant, et, en d’autres termes, la décision déférée a pour objet exclusif de régler les questions de l’installation d’un conteneur métallique, à l’exclusion de toute question relevant de l’affectation de ce terrain, à savoir la mise en pâture d’équidés, et d’éventuelles incidents de cette exploitation sur les terrains avoisinants.
Dès lors, et en application des principes retenus ci-dessus, il faut que l’autorisation de construire telle que ci-avant strictement délimitée en ses effets, présente des caractéristiques déterminées de nature à entraîner les griefs mis en avant par les demandeurs, puisque, comme retenu ci-avant, le type d’intérêt invoqué doit être en correspondance avec ce qu’est la décision litigieuse5.
Or, en l’espèce, les demandeurs mettent exclusivement en avant des nuisances tirées du passage du propriétaire des chevaux sur leurs propres terrains afin de justifier l’introduction du recours sous analyse. Force est à cet égard en particulier de constater que les griefs ainsi formulés s’adressent exclusivement aux activités accueillies par le pré sur lequel le conteneur doit être installé, mais jamais directement au conteneur même, seul objet de la décision déférée.
1 Trib. adm. 30 janvier 2006, n° 20272, Pas. adm. 2012, V° Procédure contentieuse, n° 24.
2 Cour adm. 13 février 2007, n° 22241C ; Pas. adm. 2012, V° Procédure contentieuse, n° 1.
3 Voir en ce sens : Conseil d’Etat fr., 16 juin 2004, req. 264185 et 264220.
4 Jacques Falys, La recevabilité des recours en annulation des actes administratifs, Bruylant, 1975, n° 159.
5 René Chapus, Droit du contentieux administratif, 4e éd.,1993, n° 440.
Dès lors, force est retenir que l’intérêt tel que mis en avant par les demandeurs, à savoir les conséquences du passage sur leurs propres terrains des personnes se rendant sur le terrain …, enclavé, est étranger à la décision déférée, celle-ci portant exclusivement sur la mise en place d’un conteneur.
Au-delà de cette conclusion, le tribunal est encore appelé à constater factuellement, à l’inspection des pièces lui communiquées, que contrairement à ce que semblent affirmer implicitement les demandeurs, à savoir que les passages répétés de Monsieur … sur leurs terrain ruineraient ceux-ci en y creusant des ornières et en y écrasant l’herbe, qu’il résulte tant d’une photographie aérienne que de l’extrait cadastral versés en cause, que les terrains des demandeurs, loin d’être des près vierges de toute atteinte, accueillent en fait un chemin champêtre sommaire, dépourvu de tout revêtement, présentant d’ores et déjà de larges ornières creusés par des véhicules, et reliant le terrain … à la voie publique, le tribunal soulignant tout particulièrement le caractère manifestement pérenne de ce chemin, puisque repris formellement par le cadastre.
Il s’ensuit dès lors que les demandeurs ne sauraient en tout état de cause pas se prévaloir d’une quelconque détérioration de leur situation, le chemin dont les demandeurs craignent la création existant factuellement d’ores et déjà.
Il suit de l’ensemble des développements qui précèdent qu’à défaut d’intérêt direct et suffisant dans le chef de tous les demandeurs pour agir contre l’installation litigieuse telle qu’autorisée à travers la décision déférée, le recours encourt l’irrecevabilité.
Quant au fond Ce n’est qu’à titre tout fait superfétatoire, de sorte à épuiser définitivement tous les moyens au niveau de la présente instance, que le tribunal procèdera à une analyse des moyens avancés au fond par les demandeurs.
A cet égard, en ce qui concerne la violation alléguée de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, il convient de rappeler qu’une autorisation de construire consiste en substance en la constatation officielle par l’autorité compétente - en l’espèce le bourgmestre - de la conformité d’un projet de construction aux dispositions réglementaires (plan d’aménagement et règlement sur les bâtisses) applicables6 - étant expressément souligné que l’article 37 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain limite ce contrôle de la conformité des travaux projetés à la réglementation urbanistique communale -, la conformité de la demande d’autorisation par rapport aux dispositions d’urbanisme existantes entraînant en principe dans le chef du bourgmestre l’obligation de délivrer le permis sollicité sans prendre en considération d’autres considérations d’intérêt privé ou tenant à l’exécutabilité technique ou matérielle du projet, sous peine de commettre un abus respectivement un excès de pouvoir7.
Ainsi, le bourgmestre, en délivrant l’autorisation de bâtir, constate dans la forme passive d’une autorisation que la réalisation du projet est permise. Cet acte d’administration 6 Voir trib. adm. 2 février 2004, n° 14800 et 16729, confirmé par arrêt du 23 septembre 2004, n° 17704C ; trib.
adm. 15 décembre 2004, n° 17971, Pas. adm. 2012, V° Urbanisme, n° 539.
7 Cour adm. 22 mars 2011, n° 27064C, Pas. adm. 2012, V° Urbanisme, n° 527.
ne peut avoir pour l’administration aucune conséquence civile : si le bâtisseur construit sur le bien d’autrui, ou si le bien est grevé de servitudes civiles, voire si d’autres législations ne relevant pas de la sphère de compétence du bourgmestre font obstacle à la réalisation du projet, la demande est néanmoins accueillie, parce que l’administration compétente ignore tant le point de droit civil que celui d’autres autorités et qu’elle ne prend aucune responsabilité technique8. Le fait que d’autres autorités aient de leur côté délivré ou non des autorisations n’est pas de nature à avoir une incidence à quelque titre que ce soit sur l’autorisation délivrée, chaque autorité étant appelée à statuer dans le cadre de sa propre sphère de compétence, les autorisations à délivrer sous l’empire de la loi du 19 juillet 2004 et des réglementations d’urbanisme communales étant indépendantes de celles émises dans le cadre de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles.
En effet, les dispositions de la loi précitée du 19 janvier 2004 qui confèrent un pouvoir d’appréciation et de décision au ministre ayant dans ses attributions la protection de l’environnement ne sauraient empêcher que le pouvoir communal puisse être investi, sur base de textes régissant la matière communale, de pouvoirs propres et distincts. Le bourgmestre, ainsi que le ministre ayant dans ses attributions la protection de l’environnement, ont donc, des compétences concurrentes, chacune de ces autorités administratives agissant dans la sphère de sa compétence propre et en application de ses lois et règlements spécifiques, de sorte qu’elles doivent tirer autorité des normes et conditions qui relèvent de leurs sphères de compétence respectives9.
Par voie de conséquence, l’exigence légale d’une autorisation du ministre ayant la protection de l’environnement dans ses attributions sous l’égide de la prédite loi du 19 janvier 2004 pour procéder à la réalisation de constructions en zone verte, reste sans incidence sur la légalité d’un permis de construire relevant de la compétence du bourgmestre, étant donné que le bourgmestre n’est admis qu’à vérifier si un projet respecte les conditions relevant de sa sphère de compétence, à savoir la réglementation de l’urbanisme et de la police des bâtisses, et n’est ni admis, ni tenu de prendre égard à la question de savoir si le ministre ayant la protection de l’environnement dans ses attributions a déjà exercé sa compétence distincte d’autorisation conformément aux prévisions de ladite loi du 19 janvier 2004 et s’il a effectivement délivré l’autorisation en question10.
Les reproches formulés en rapport avec le non-respect des obligations imposées et des compétences posées respectivement par l’article 5 de la loi précitée du 19 janvier 2004 seraient partant à rejeter.
Quant au moyen tiré d’une violation de l’article de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, il convient de souligner que cet article, pris en son alinéa 1er dispose que « le règlement sur les bâtisses, les voies publiques et les sites porte sur la solidité, la sécurité, la salubrité ainsi que la durabilité et la commodité du domaine publique, des sites, des constructions, bâtiments et installations ainsi que de leurs abords respectifs ». Il s’agit dès lors d’une disposition précisant dans les grandes lignes le contenu du règlement sur les bâtisses, les voies publiques et les sites à adopter par une commune, mais non d’une disposition dont le respect s’imposerait, à défaut de toute mesure d’exécution sous forme d’un règlement 8 Wilkin R., Voirie et alignement - urbanisme et constructions, Bruylant, 1964, p.283.
9 Trib. adm. 13 juillet 2005, n°19077 du rôle, Pas. adm. 2012, V° Environnement, n°13 10 Voir récemment trib. adm. 15 mai 2013, n° 29780, disponible sous www.ja.etat.lu communal, directement à l’administré et serait de ce fait invocable devant le juge administratif.
La même conclusion s’impose en ce qui concerne le moyen basé sur l’article 1er de la loi du 21 mai 1999 concernant l’aménagement du territoire, qui prévoit en tant qu’objectifs de l’aménagement du territoire notamment le respect des particularités des différentes régions, l’utilisation rationnelle du sol, l’assurance aux habitants du pays de conditions de vie optimales, et la gestion responsable de l’environnement, ce moyen serait en tout état de cause à rejeter, s’agissant d’objectifs de la loi en question, mais non de critères auquel chaque construction, chaque installation, considérée isolément, doit répondre pour pouvoir être autorisée11.
Enfin, en ce qui concerne les violations alléguées du règlement sur les bâtisses de la commune de Septfontaines, pris en son article 16, alinéa 1er et 2, relatif aux « constructions de bâtiments » en zone verte, le tribunal est amené à constater, de concert avec l’administration communale, que la mise en place d’un conteneur préfabriqué en métal, sans aucune fixation au sol, ni dalle ou fondations, ne constitue pas une construction.
En effet, aux termes de l’article 6.2 b) du règlement sur les bâtisses applicable, intitulé « Autorisation de construire », « (…) une autorisation de construire est requise:
- pour toute nouvelle construction - pour toute démolition - pour tout changement d’utilisation d’immeuble pour tous les agrandissements, exhaussements et transformations de constructions existantes, de même que pour toutes autres modifications apportées aux murs extérieurs, éléments porteurs et toitures , ou à l’affectation des locaux - pour l’installation d’auvents et de marquises en bordure des voies et places publiques - pour l’établissement et la modification de clôtures de toute nature le long des voies publiques - pour la construction de puits, citernes à eau, silos à eau, silos à fourrage, fosses à fumier et à purin - pour les travaux de déblai et de remblai et la construction de murs de soutènement - pour l’aménagement de rues ou trottoirs privés (…) » Or, force est de constater que l’article 6.2 b) utilise la notion de construction tantôt au sens d’une action (p.ex. les travaux de déblai et de remblai, la construction de murs de soutènement ou encore l’exécution de travaux de démolition) tantôt en son sens de résultat d’une telle action (« nouvelle construction »), de sorte qu’il convient, à un premier stade, de retenir que cette notion englobe tant différentes actions que le résultat définitif de telles actions.
En ce qui concerne ensuite plus particulièrement l’action de construire, il convient de retenir que les notions de construire ou de construction sont caractérisées dans leur acceptation commune par l’idée d’assembler ou de constituer solidement, la notion de construction visant concrètement l’édification d’un ouvrage durable et solide12.
11 Voir par analogie trib adm. 5 décembre 2001, n° 12911, Pas. adm 2012, V° Etablissements classés, n° 84, ainsi que trib. adm. 18 mars 2013, n° 29649, trib. adm. 15 juillet 2013 n° 32152 et trib. adm. 14 juillet 2014, n° 32633.
12 Trib. adm. 31 mars 2010, n° 26368, confirmé par arrêt du 23 novembre 2010, n° 26900C.
En ce qui concerne la deuxième signification de « construction », à savoir le résultat de l’action de construire, sont visées au premier chef les constructions immobilières13, c’est-à-
dire les « bâtiments » au sens de l’article 518 du Code civil, à savoir toutes les constructions résultant de l’assemblage de matériaux reliés ensemble artificiellement de façon durable et incorporés au sol par des fondations14.
Dès lors, il convient de retenir, conformément aux principes dégagés ci-avant, que la notion de construction est à interpréter comme le résultat d’un assemblage de matériaux, reliés de manière durable et solide, le cas échéant incorporé au sol, ou à tout le moins relié ou adhérant au sol, les critères pour déterminer l’existence d’une telle construction résidant partant dans les dimensions de l’édifice, les matériaux employés et son caractère de durabilité ou de permanence15, conditions qui ne se retrouvent pas en l’espèce, s’agissant en l’espèce de la simple pose à même le sol d’un conteneur préfabriqué en métal, et ce surcroît à titre provisoire.
Il se dégage partant de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours formé par les demandeurs serait en tout état de cause, indépendamment de son irrecevabilité pour défaut d’intérêt, à rejeter comme n’étant pas fondé.
Les demandeurs sollicitent la condamnation tant de l’administration communale que Monsieur … à leur payer solidairement sinon in solidum sinon chacun pour sa part une indemnité de procédure globale de 3.000.- euros, sinon 500.- euros par partie demanderesse sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, demande qui, au vu de l’issue du litige, est à rejeter.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;
déclare le recours subsidiaire en annulation irrecevable ;
rejette la demande en obtention d’une indemnité de procédure formulée par les demandeurs, condamne les demandeurs aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 29 septembre 2014 par :
13 Voir Cass. fr. 14 décembre 1956, D.1957, 87.
14 Voir CA Paris, 25 avril 1951, D.1951, 518.
15 Trib. adm. 14 novembre 2011, n° 27588, confirmé en ce point par arrêt du 7 juin 2012, n° 29650C, et trib.adm.
23 janvier 2012, n° 27656, confirmé par arrêt du 10 juillet 2012, n° 29916C.
Marc Sünnen, premier vice-président, Thessy Kuborn, premier juge, Alexandra Castegnaro, juge, en présence du greffier en chef Arny Schmit.
Schmit Sünnen 9