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27/08/2014 | LUXEMBOURG | N°34809

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 27 août 2014, 34809


Tribunal administratif N° 34809 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 juillet 2014 Chambre de vacation Audience publique extraordinaire du 27 août 2014 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 20, L.5.5.2006)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 34809 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 2 juillet 2014 par Maître Nicky STOFFEL, avo

cat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieu...

Tribunal administratif N° 34809 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 juillet 2014 Chambre de vacation Audience publique extraordinaire du 27 août 2014 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 20, L.5.5.2006)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 34809 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 2 juillet 2014 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Monténégro), de nationalité monténégrine, demeurant actuellement à L-…, tendant 1) à l’annulation d’une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 4 juin 2014, attribuée erronément au ministre des Affaires étrangères et européennes, de statuer sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, 2) à la réformation de la décision du même ministre du 4 juin 2014 refusant de faire droit à sa demande de protection internationale et 3) à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire contenu dans la même décision ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 23 juillet 2014 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Marcel MARIGO, en remplacement de Maître Nicky STOFFEL, et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-

Paul REITER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique de vacation du 27 août 2014.

Le 11 avril 2014, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection internationale, ci-après dénommée « la loi du 5 mai 2006 ».

Le même jour, Monsieur … fut entendu par un agent de la police grand-ducale, section police des étrangers et des jeux, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Le 5 mai 2014, Monsieur … fut également entendu par un agent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.

Par décision du 4 juin 2014, expédiée par courrier recommandé le 5 juin 2014, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, désigné ci-après par « le ministre », informa Monsieur … qu’il avait été statué sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée sur base de l’article 20 (1), a), b) et c) de la loi du 5 mai 2006 et que sa demande avait été refusée comme non fondée tout en lui enjoignant de quitter le territoire dans un délai de trente jours.

Par requête déposée au tribunal administratif le 2 juillet 2014, Monsieur … fit introduire un recours tendant au relevé de la déchéance résultant de l’expiration du délai de 15 jours imparti pour agir à l’encontre de la décision précitée du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 4 juin 2014 ayant statué sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le même jour, Monsieur … a encore fait introduire un recours tendant 1) à l’annulation de la décision précitée du ministre, attribuée erronément au ministre des Affaires étrangères et européennes, du 4 juin 2014 de statuer sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, 2) à la réformation de la même décision du ministre dans la mesure où elle refuse de faire droit à sa demande de protection internationale et 3) à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire contenu dans la même décision.

Avant tout autre progrès en cause, le tribunal est d’abord amené à relever que par jugement du tribunal administratif du 30 juillet 2014, n° 34808 du rôle, la requête du demandeur tendant au relevé de la déchéance résultant de l’expiration du délai de 15 jours lui imparti pour l’introduction d’un recours contentieux à l’encontre de la décision ministérielle précitée du 4 juin 2014 a été rejetée pour ne pas être fondée, le tribunal ayant à cet égard plus particulièrement retenu ce qui suit « Il n’est par ailleurs pas contesté en cause que malgré le fait que le demandeur ait immédiatement contacté son mandataire de l’époque en vue d’introduire un recours contentieux contre ladite décision, aucun recours n’a été déposé au greffe du tribunal administratif. Or, il y a lieu de constater que cette inaction est imputable au mandataire de l’époque du demandeur et que le demandeur n’a soumis au tribunal aucun élément irrésistible dans le chef de son précédent mandataire l’ayant empêché de déposer en temps utile un recours », tout en concluant qu’« une erreur commise par le mandataire du justiciable ne peut pas être considérée comme ayant été commise en dehors de la sphère d’action du justiciable qui ne peut partant pas être considéré comme s’étant trouvé dans l’impossibilité d’agir ».

Nonobstant ce jugement, Monsieur … a maintenu le recours actuellement déféré au tribunal et tendant, tel que relevé ci-dessus, 1) à l’annulation de la décision précitée du ministre du 4 juin 2014 de statuer sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, 2) à la réformation de la même décision du ministre dans la mesure où elle refuse de faire droit à sa demande de protection internationale et 3) à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire contenu dans la même décision.

A l’audience fixée pour les plaidoiries, le tribunal a soulevé d’office, conformément à l’article 30 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, la question de la recevabilité ratione temporis du recours du demandeur, déposé par son litismandataire au greffe du tribunal administratif en date du 2 juillet 2014 et ce au vu des conclusions du jugement précité du 30 juillet 2014 ayant déclaré la demande en relevé de forclusion du demandeur comme étant non fondée.

La question du dépôt de la requête introductive d’instance dans les délais impartis par la loi précitée du 5 mai 2006 touche à l’organisation juridictionnelle et est par voie de conséquence d’ordre public. Elle doit être soulevée d’office par le tribunal, à défaut de l’être à travers l’un des moyens des parties1.

Le litismandataire du demandeur et le délégué du gouvernement se sont rapportés à prudence de justice sur ce point.

Le tribunal constate en premier lieu qu’étant donné que l’article 20 (4) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en annulation contre les décisions du ministre de statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation dirigé contre la décision du ministre précitée.

Dans la mesure où l’article 20 (4) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en réformation en matière de demandes de protection internationale déclarées non fondées dans le cadre d’une procédure accélérée, le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre la décision ministérielle portant refus de faire droit à sa demande de protection internationale. Il n’y a partant pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

Enfin, étant donné que l’article 20 (4) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en annulation contre l’ordre de quitter le territoire, le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation dirigé contre l’ordre de quitter le territoire contenu dans la décision déférée du 4 juin 2014.

Quant au moyen d’ordre public relatif à la recevabilité ratione temporis du recours, le tribunal rappelle qu’aux termes de l’article 20 (4) de la loi du 5 mai 2006 : « […] Les trois recours [c'est-à-dire le recours en annulation dirigé contre la décision du ministre de statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée et contre l’ordre de quitter le territoire, et le recours en réformation dirigé contre le refus d’une protection internationale] doivent faire l’objet d’une seule requête introductive, sous peine d’irrecevabilité du recours séparé. Le recours doit être introduit dans un délai de quinze jours à partir de la notification. […] » Il se dégage du jugement précité du tribunal administratif du 30 juillet 2014, ainsi que des pièces et éléments du dossier administratif que la décision ministérielle du 4 juin 2014 déclarant non fondée la demande de protection internationale de Monsieur … sur base de l’article 20 de la loi du 5 mai 2006 a été notifiée au demandeur par courrier recommandé envoyé en date du 5 juin 2014, suivant les indications non contestées figurant sur la décision elle-même. En l’absence de preuve quant à la date de réception de la décision par son destinataire, et tel que cela a été retenu à bon droit dans le jugement précité du 30 juillet 2014, il y a lieu de faire application de la présomption prévue à l’article 6, paragraphe (9) de la loi du 5 mai 2006 suivant lequel la notification est réputée valablement faite 3 jours après l’envoi du courrier sous pli recommandé à la poste, de sorte qu’en l’espèce, la notification est censée être faite le 10 juin 2014, étant entendu que le lundi 9 juin était un jour férié légal. Il s’ensuit que le délai légal de 15 jours pour introduire un recours contentieux à l’encontre de ladite 1 Trib. adm. 28 juin 2007, n° 23080 du rôle, Pas. adm. 2012, V° Procédure contentieuse, n° 662 et autres références y citées décision a commencé à courir le 10 juin 2014, date de la réception présumée dudit courrier recommandé, pour se terminer 15 jours plus tard, soit le mercredi 25 juin 2014.

Au vu des éléments qui précèdent, le recours contentieux du demandeur qui a été déposé le 2 juillet 2014, soit après l’expiration du délai légal, et qui a été maintenu au mépris du jugement précité du 30 juillet 2014 ayant constaté la forclusion du demandeur pour agir en justice, doit être déclaré irrecevable pour avoir été introduit tardivement.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;

déclare irrecevable pour cause de tardiveté le recours en annulation introduit contre la décision ministérielle du 4 juin 2014 de statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée ;

déclare irrecevable pour cause de tardiveté le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 4 juin 2014 portant refus d’une protection internationale ;

déclare irrecevable pour cause de tardiveté le recours en annulation introduit contre la décision ministérielle du 4 juin 2014 portant ordre de quitter le territoire ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, juge, Laurent Lucas, juge, Hélène Steichen, juge, et lu à l’audience publique extraordinaire du 27 août 2014 par le juge Alexandra Castegnaro, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 27 août 2014 Le greffier du tribunal administratif 4


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 34809
Date de la décision : 27/08/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2014-08-27;34809 ?

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