Tribunal administratif Numéro 34121 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 28 février 2014 Ire chambre Audience publique du 28 mai 2014 Recours formé par la société anonyme … S.A. , … , contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’échange de renseignements
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 34121 du rôle et déposée le 28 février 2014 au greffe du tribunal administratif par la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff Luxembourg Sàrl, avocat à la Cour, représentée par Maître Jean-Pierre Winandy, avocat à la Cour, inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … S.A. , établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro … , représentée par ses organes actuellement en fonctions, tendant à l’annulation d’une décision du 29 janvier 2014 prise par le directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’échange de renseignements ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 28 mars 2014 ;
Vu l’ordonnance du premier vice-président du tribunal administratif du 14 avril 2014, accordant aux parties des délais pour déposer un mémoire supplémentaire ;
Vu le mémoire complémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 25 avril 2014 par la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff Luxembourg Sàrl au nom de la société anonyme … S.A. ;
Vu le mémoire complémentaire du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 9 mai 2014 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que la société à responsabilité limitée Loyens & Loeff Luxembourg Sàrl, représentée par Maître Jean-Pierre Winandy et Madame le délégué du gouvernement Monique Adams en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 14 mai 2014.
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Le 29 janvier 2014, le directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur », adressa à la société anonyme … S.A. , ci-après désignée par la « société … », une demande de fournir des renseignements en vertu de la loi du 31 mars 2010 portant approbation des conventions fiscales et prévoyant la procédure y applicable en matière d’échange de renseignements sur demande, ci-après dénommée « la loi du 31 mars 2010 », concernant le nom de ses actionnaires et les pourcentages respectifs des actions détenues, afin de permettre à l’administration fiscale néerlandaise de clarifier la situation fiscale de la société de droit néerlandais … B.V. faisant l’objet d’un contrôle aux Pays-Bas, ladite demande étant libellée comme suit :
« Suite à une demande d'échange de renseignements du 20 décembre 2013 de la part de l'autorité compétente néerlandaise sur base de la convention fiscale entre le Luxembourg et les Pays-Bas du 8 mai 1968 et de la directive 2011/16/UE, je vous prie par la présente de me fournir les renseignements suivants pour le 6 mars 2014 au plus tard.
Identité de la personne concernée par la demande :
… B.V.
Adresse connue :
… Actionnaires :
Monsieur …, Monsieur …, Monsieur …, Madame … L'objectif de la demande d'échange de renseignements susmentionnée résulte de ce qui suit :
Afin de clarifier la situation fiscale de leur contribuable, les autorités fiscales néerlandaises nécessitent certains renseignements sur la structure de la société … S.A.
Par conséquent, je vous prie de me fournir les renseignements suivants pour la période du 1er janvier 2011 au 30 juin 2013 :
- Veuillez fournir le(s) nom(s) du(des) actionnaire(s) de la société ainsi que le pourcentage des actions détenues.
Après examen, la demande contient, à mon avis, toutes les informations nécessaires pour établir la pertinence vraisemblable des renseignements demandés.
Au vu de ce qui précède, je vous prie de fournir les renseignements demandés dont vous êtes détenteur dans le délai imparti. Si vous rencontrez des difficultés objectives pour déférer à la présente injonction, vous voudrez me le signaler dans les plus brefs délais.
La présente décision d'injonction est susceptible d'un recours en annulation devant le tribunal administratif qui est ouvert à toute personne visée par ladite décision ainsi qu'à tout tiers concerné. Le recours doit être introduit dans le délai d'un mois à partir de la notification de la décision au détenteur des renseignements demandés et a un effet suspensif. (…)» Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 28 février 2014, la société … a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision précitée du directeur du 29 janvier 2014.
Etant donné que l’article 6 (1) de la loi du 31 mars 2010 dispose qu’un recours en annulation est prévu contre une décision portant injonction de fournir des renseignements, seul un recours en annulation a pu être introduit contre la décision déférée portant injonction de fournir des renseignements, lequel est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.
A titre liminaire, la demanderesse, dans le cadre de son recours, sollicite du tribunal qu’il fasse injonction à l’Etat de déposer au greffe la demande de renseignement litigieuse émanant de l’autorité non pas française, comme indiqué erronément au dispositif de la requête, mais néerlandaise compétente et adressée au directeur afin d’en avoir communication.
Le délégué du gouvernement ne prend pas spécifiquement position quant à cette question mais verse en revanche la pièce sollicitée au greffe du tribunal administratif dans le cadre du dépôt de son mémoire en réponse.
Force est dès lors au tribunal de constater que la demande émanant de l’autorité néerlandaise compétente telle qu’adressée au directeur ayant été communiquée à la demanderesse au cours de la procédure contentieuse, la demande de communication de ladite pièce n’a plus d’objet.
A l’appui de son recours, la demanderesse fait d’abord plaider la nullité de la demande de renseignement pour absence d’épuisement des voies internes d’obtention de renseignements, en faisant valoir que la décision déférée omettrait de préciser que l’autorité requérante a épuisé tous les moyens possibles pour obtenir les renseignements dans son ordre interne, condition qui, selon la demanderesse, devrait être remplie pour que la demande réponde à l’exigence de « pertinence vraisemblable » visée au point 2. g) de l’échange de lettres du 29 mai 2009 entre le ministre du Trésor et du Budget du Grand-Duché de Luxembourg et le secrétaire d’Etat aux Finances du Royaume des Pays-Bas relative à l’échange de renseignements tel que mentionné dans l’article 26 de la convention contre les doubles impositions, ci-après désigné par « l’échange de lettres » ; cette obligation d’épuisement des voies internes serait également mise en avant par l’article 18 (1) de la loi du 29 mars 2013 portant transposition de la directive 2011/16/UE du Conseil du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE et portant 1. modification de la loi générale des impôts; 2. abrogation de la loi modifiée du 15 mars 1979 concernant l'assistance administrative internationale en matière d'impôts directs, désignée ci-après : « la loi du 29 mars 2013 ».
Le délégué du gouvernement rétorque que la condition serait remplie en l’espèce étant donné que la demande de renseignements de l’autorité néerlandaise du 20 décembre 2013 contiendrait de manière claire et non équivoque la déclaration selon laquelle: « je confirme avoir épuisé toutes les sources habituelles de renseignements que j’aurais pu utiliser dans les circonstances pour obtenir les renseignements requis, sans courir le risque de compromettre le résultat de l’enquête ». Il ajoute que cette déclaration faite par un fonctionnaire assermenté et faisant pour cette raison foi jusqu’à preuve du contraire serait corroborée par les explications précises de l’autorité compétente quant à la description des résultats concrets du contrôle en cours. Il se réfère pour le surplus à un arrêt de la Cour administrative1 ayant décidé que l’Etat requérant n’est pas tenu de préciser les démarches déjà accomplies en droit interne mais qu’il ne doit soumettre sa demande d’échange de renseignements qu’« après avoir utilisé les sources habituelles de renseignements prévues par sa procédure fiscale 1 Cour adm., 12 juillet 2012, n° 30644C du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu interne » et en conclut qu’en l’espèce, l’autorité néerlandaise n’aurait pas été obligée d’expliquer davantage les détails des mesures administratives déployées pour obtenir les renseignements litigieux, alors qu’en application du point 2 g) de l’échange de lettres la simple affirmation y relative par l’Etat requérant suffirait, de sorte que la décision déférée serait conforme à la loi.
Il échet de relever que le point 2. g) de l’échange de lettres dispose comme suit :
« The competent authority of the applicant State will provide the following information to the competent authority of the requested State when making a request for information under the Convention to demonstrate the foreseeable relevance of the information to the request:
(…) (g) a statement that the applicant State has pursued all means available in its own territory to obtain the information, except those that would give rise to disproportionate difficulties ».
Ainsi, en vertu du point 2 g) de l’échange de lettres, afin de démontrer la pertinence vraisemblable de la demande de renseignements, l’autorité requérante doit notamment fournir à l’autorité requise une déclaration selon laquelle elle a épuisé en droit interne toutes les procédures afin d’obtenir l’information recherchée, à l’exception de celles qui conduiraient à des difficultés disproportionnées.
Il échet de constater en l’espèce que s’il est vrai que le directeur se limite à indiquer dans la décision déférée qu’« après examen, la demande contient, à mon avis, toutes les informations nécessaires pour établir la pertinence vraisemblable des renseignements demandés », il n’en demeure pas moins que cette affirmation est entre autres basée sur le fait que l’autorité requérante affirme de manière non équivoque, en ayant coché la case correspondante dans le formulaire de la demande d’échange de renseignements du 20 décembre 2013, ce qui suit : « je confirme avoir épuisé toutes les sources habituelles de renseignements que j’aurais pu utiliser dans les circonstances pour obtenir les renseignements requis, sans courir le risque de compromettre le résultat de l’enquête ». Etant donné que la Cour administrative a décidé dans l’arrêt précité du 12 juillet 2012 que l’Etat requérant n’est pas tenu de préciser les démarches déjà accomplies en droit interne mais qu’il ne doit soumettre sa demande d’échange de renseignements qu’« après avoir utilisé les sources habituelles de renseignements prévues par sa procédure fiscale interne » ainsi que l’a relevé à juste titre le délégué du gouvernement, la seule affirmation l’autorité requérante selon laquelle toutes les possibilités de recherches ont été épuisées en droit interne suffit tant à l’exigence posée au point 2. g) de l’échange de lettres qu’à celle de l’article 18 (1) de la loi du 29 mars 2013, qui dispose que « L’autorité requise luxembourgeoise fournit à l’autorité requérante les informations visées à l’article 6, à condition que l’autorité requérante ait déjà exploité les sources habituelles d’information auxquelles elle peut avoir recours pour obtenir les informations demandées sans risquer de nuire à la réalisation de ses objectifs. » Il s’ensuit que le moyen afférent est à rejeter pour ne pas être fondé.
Enfin, la demanderesse fait valoir que la décision déférée se limiterait à justifier la demande de renseignements litigieuse par le seul fait que, dans le but de clarifier la situation fiscale de leur contribuable, les autorités fiscales néerlandaises nécessiteraient certains renseignements sur la structure de la société …, sans pour autant fournir la moindre indication quant au lien existant entre la société … et le contribuable faisant l’objet du contrôle fiscal aux Pays-Bas, à savoir la société … B.V.. Elle ajoute, dans le cadre de son mémoire complémentaire du 25 avril 2014, que si les explications fournies par l’autorité néerlandaise compétente dans la demande initiale quant aux relations entre la société … B.V. et elle-même préciseraient plus en détail l’identité d’un ensemble de personnes portant le nom de famille …, elle ne mentionnerait en aucun cas l’identité des enfants des consorts … qui figureraient uniquement sur le diagramme joint à la demande, mais qui ne seraient pas identifiés. De même, au vu du diagramme versé, qui résulterait d’une simple allégation de la part des autorités néerlandaises, le seul lien apparent entre elle et la société … B.V. consisterait dans le fait que les deux sociétés seraient actionnaires d’une société … … S.A.. Il y aurait ainsi une incohérence entre la demande de l’autorité néerlandaise et l’objectif du contrôle, qui viserait en fait les bénéficiaires économiques présumés de la société … et non, comme indiqué, la société … B.V.. Or, si, en vertu du Manuel de l’OCDE sur la mise en œuvre des dispositions relatives aux échanges de renseignements à des fins fiscales, désigné ci-après le « Manuel », la demande de renseignements pourrait légalement faire référence à des contribuables étrangers, ce ne serait qu’à condition que ces contribuables étrangers ou entités étrangères concernés par le contrôle ou les investigations soient connus, de même que leurs relations avec la ou les personnes faisant l’objet du contrôle ou des investigations. En l’occurrence, les consorts …, qui ne seraient pas entièrement identifiés, ne seraient pas cités comme des personnes contrôlées, mais n’apparaîtraient que dans le cadre de la motivation de la demande.
Le diagramme serait encore incomplet, alors qu’il ne mentionnerait pas les autres contribuables non identifiés dont il serait question dans le cadre de la motivation de la demande de renseignements.
Quant à l’appréciation de la pertinence vraisemblable des renseignements demandés, la partie demanderesse se réfère à des arrêts de la Cour administrative du 14 mai 2012 inscrit sous le n° 30251C du rôle respectivement du 26 février 2013 inscrit sous le n° 31929C du rôle, le dernier ayant annulé une première demande de renseignements dirigée contre elle dans le cadre d’un contrôle fiscal de la société … B.V..
Le délégué du gouvernement conclut au rejet du moyen précité, en relevant que le directeur aurait à bon droit retenu que la demande néerlandaise satisferait aux conditions légales de l’octroi de l’échange d’informations tel que prévu par l’article 6 de la loi du 29 mars 2013, alors que la demande de renseignements contiendrait tant l’identité de la personne faisant l’objet d’un contrôle, à savoir la société … B.V. et les membres de la famille … qui en seraient les actionnaires, que les indications concernant les renseignements recherchés, et le but fiscal dans lequel ces renseignements sont demandés, la demande contenant à cet effet un descriptif précis et détaillé des faits et opérations de contrôle en cours de même que les résultats des recherches d’ores et déjà obtenus, accompagné d’un diagramme reprenant les structures sociétaires mises en place par les membres de la famille …. La société … serait à considérer comme personne dont il y aurait lieu de penser qu’elle serait en possession des renseignements demandés, et plus généralement de tout élément de nature à faciliter la recherche d’informations par l’Etat requis. La demande de renseignements fournirait toutes les informations établissant les liens entre la société … B.V.., les membres de la famille … et la société ….
Dans son mémoire complémentaire, la partie étatique fait valoir que les incohérences soulevées par la partie demanderesse entre la demande des autorités néerlandaises et l’objectif du contrôle aux Pays-Bas relèveraient du fond de l’affaire néerlandaise et ne seraient pas de la compétence des autorités ou/et des juridictions luxembourgeoises. Il rappelle encore que le standard international du « Global Forum on Transparency and Exchange of Information for Tax Purposes » requerrait que les informations disponibles afin de permettre un échange de renseignements effectif engloberaient les renseignements relatifs à la propriété et l’identité et les arrangements pertinents incluant ainsi les informations relatives aux bénéficiaires économiques des différentes structures et sociétés litigieuses. Ce même forum global aurait par ailleurs constaté que les juridictions du Grand-Duché de Luxembourg interpréteraient le critère de la pertinence vraisemblable de façon trop restrictive non conforme au standard international, de sorte que l’arrêt de la Cour administrative du 26 février 2013 cité par la partie demanderesse serait « sans objet » pour la présente cause, pour être contraire au standard international en matière d’échange de renseignements, ce d’autant plus que la demande néerlandaise actuelle serait beaucoup plus détaillée que celle ayant fait l’objet du précédent litige. A l’audience des plaidoiries, le délégué du gouvernement fait encore valoir que le contrôle de la pertinence vraisemblable des renseignements sollicités incomberait exclusivement à l’Etat requérant.
Il échet d’abord de relever qu’en ce qui concerne le rôle du tribunal en la matière, celui-ci est circonscrit par une triple limitation, à savoir, d’une part, celle découlant de sa compétence limitée de juge de l’annulation, de seconde part, celle découlant du fait que la décision directoriale repose à la base sur la décision d’une autorité étrangère, dont la légalité, le bien-fondé et l’opportunité échappent au contrôle du juge luxembourgeois, et, de troisième part, celle du critère s’imposant tant au directeur qu’au juge administratif, à savoir celui de la « pertinence vraisemblable ». En ce qui concerne ce dernier critère, il y a lieu de relever que si le juge de l’annulation est communément appelé à examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée, ce contrôle doit, en la présente espèce, être considéré comme plus limité, puisque le juge n’est pas appelé à vérifier si la matérialité des faits donnant lieu au contrôle à la base de la demande de renseignements est positivement établie, mais seulement si les renseignements sollicités paraissent être vraisemblablement pertinents dans le cadre du contrôle ou de l’enquête poursuivie dans l’Etat requérant.2 Contrairement à ce qui est affirmé par le délégué du gouvernement à cet égard, ce contrôle doit se faire dans l’Etat requis, alors qu’il appartient de vérifier si les conditions pour un échange de renseignements sont bien remplies, et notamment si l’Etat requérant a suffi à son obligation d’établir la pertinence vraisemblable de l’information sollicitée dans le cadre de sa demande de renseignements, quelque soit, dans ce contexte, la critique générale non autrement étayée d’une interprétation trop stricte de ce critère par les juridictions luxembourgeoises.
En l’espèce, force est au tribunal de constater que la demande directoriale déférée ensemble la demande initiale des autorités néerlandaises distinguent clairement la société … B.V. comme étant le contribuable faisant l’objet du contrôle fiscal aux Pays-Bas. Par ailleurs, il échet de relever que les autorités de l’Etat requérant indiquent dans le formulaire de demande de renseignements du 20 décembre 2013 que la demande de renseignements concerne l’impôt sur les salaires pour la période du 1er janvier 2006 au 30 juin 2013 tout en précisant que les informations sollicitées seraient nécessaires afin de décider de l’application d’un régime fiscal d’imputation de salaires fictifs à des personnes, les consorts …, détenant une participation importante dans certaines sociétés.
2 Voir trib. adm. 6 février 2012, n° 29592 du rôle publié sous www.ja.etat.lu Le tribunal doit constater qu’en ce qui concerne la demande de renseignements actuelle il y a effectivement une contradiction entre le but fiscal, à savoir l’impôt sur les salaires imputés fictivement aux consorts … en leur qualité de détenteurs de parts sociales dans différentes sociétés et la personne faisant l’objet du contrôle fiscal, à savoir la société … B.V.. Tout comme la Cour administrative l’avait déjà relevé dans son arrêt du 26 février 2013 précité dans le contexte de la première demande de renseignements, force est de retenir que la société … B.V. n’est pas une personne physique pouvant se voir imputer un salaire fictif en tant que détenteur d’une participation importante dans une société et que la finalité de la demande de renseignements ne peut pas résider dans la détermination de la soumission de cette société au régime de l’imposition des salaires imputés fictivement.
Ainsi, il ne ressort pas des explications fournies en cause en quelle mesure le fait de connaître les actionnaires de la société … aurait une implication pour la situation fiscale de la société … B.V. faisant l’objet d’un contrôle relatif à l’impôt sur le revenu.
Si le diagramme versé ensemble avec la demande, ainsi que les explications des autorités requérantes sur le formulaire de demande de renseignements permettent de mettre en relation la famille … avec les deux sociétés … B.V. et …, il n’empêche que la situation fiscale des consorts … ne fait pas l’objet du contrôle fiscal à la base de la demande de renseignements. Ils ne sont d’ailleurs pas nommément visés sur le formulaire de demande en tant que personnes physiques faisant l’objet de la demande de renseignements.
Force est partant au tribunal de conclure, à défaut pour la partie étatique d’expliquer en quelle mesure la présente demande de renseignements serait plus détaillée que la première, que le constat de la Cour administrative dans son arrêt du 26 février 2013 au sujet d’une précédente demande de renseignements visant la société … reste toujours vérifié concernant la demande de renseignements actuellement déférée, en ce qu’il apparaît clairement que les renseignements demandés seraient plutôt pertinentes dans le cadre de l’imposition des consorts … et qu’il ne ressort pas du dossier en quelle mesure la situation fiscale des consorts … aurait une incidence sur l’imposition de la société … B.V. qui seule fait l’objet du contrôle fiscal à la base de la demande de renseignements.
Il résulte de ces considérations qu’en ce qui concerne les renseignements sollicités, la condition de la pertinence vraisemblable n’est pas remplie, de sorte que le moyen y relatif est à déclarer fondé et qu’il y a partant lieu à l’annulation de la décision déférée.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
reçoit le recours en annulation en la forme ;
au fond, le déclare justifié, partant annule la décision déférée du 29 janvier 2014 et renvoie le dossier en prosécution de cause devant le directeur de l’administration des Contribution directes;
condamne l’Etat aux frais.
Ainsi jugé par :
Carlo Schockweiler, premier vice-président, Laurent Lucas, juge, Olivier Poos, juge, et lu à l’audience publique du 28 mai 2014 par le premier vice-président, en présence du greffier Michèle Hoffmann.
s. Michèle Hoffmann s. Carlo Schockweiler 8