Tribunal administratif N° 30214 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 avril 2012 3e chambre Audience publique du 15 mai 2013 Recours formé par la société anonyme …, … contre une décision du ministère des Classes moyennes et du Tourisme en matière d’autorisation d’établissement
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 30214 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 3 avril 2012 par Maître Daniel Cravatte, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de la société anonyme …, établie et ayant son siège social à …, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Classes moyennes et du Tourisme du 30 décembre 2011 en matière d’obtention de l’autorisation d’établissement ainsi qu’à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision confirmative du 3 février 2012 prise sur recours gracieux du 20 janvier 2012 ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 29 juin 2012 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 18 septembre 2012 par Maître Daniel Cravatte au nom et pour compte de la société anonyme … ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 17 octobre 2012 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions déférées ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Daniel Cravatte et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Jacques en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 16 janvier 2013.
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Par décision du 30 décembre 2011, le ministre des Classes moyennes et du Tourisme, ci-après dénommé « le ministre », refusa à la société anonyme …, ci-après dénommée « la société … », une autorisation d’établissement dans le domaine de la construction. Cette décision retint que le dirigeant social, Monsieur …, remplirait certes la condition de qualification professionnelle légalement requise en vertu de l’article 3 de la loi du 2 septembre 2011 réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi que certaines professions libérales, ci-après dénommée « la loi du 2 septembre 2011 », mais que dans la mesure où il aurait tenté d’induire le Centre commun de la Sécurité sociale ainsi que le ministre en erreur en se faisant délivrer une attestation de la part du Centre commun de la Sécurité sociale aux termes de laquelle il ne serait pas redevable envers celui-ci d’arriérés de cotisations sociales accumulés par la société à responsabilité limitée …, dont la dénomination sociale a été changée en « … », ci-après dénommée « la société … », alors qu’il n’aurait eu cette attestation que sur base de mensonges, il ne satisferait pas aux conditions énumérées aux articles 4.1 et 6 de la loi du 2 septembre 2011, et notamment celle d’honorabilité professionnelle.
Par un courrier de son mandataire du 20 janvier 2012, la société … introduisit un recours gracieux contre la décision de refus précitée du 30 décembre 2011 en faisant valoir qu’il serait formellement contesté que Monsieur … aurait tenté d’induire le Centre commun de la Sécurité sociale en erreur. En effet, celui-ci n’aurait fait que remettre une copie de sa démission du 20 novembre 2010 en tant que gérant de la société … au Centre commun de la Sécurité sociale. En outre, durant la période où Monsieur … a assumé la gestion de la société …, aucun arriéré de cotisations sociales n’aurait été accumulé.
Par décision du 3 février 2012, le ministre rejeta le recours gracieux présenté le 20 janvier 2012 comme non fondé.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 3 avril 2012, la société … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision ministérielle du 30 décembre 2011 portant refus de sa demande en obtention d’une autorisation d’établissement et de celle du 3 février 2012 rendue sur recours gracieux.
Le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours en réformation et se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne la recevabilité du recours en annulation.
Aucune disposition légale ne prévoyant de recours au fond en matière d’octroi, de refus ou de révocation d’autorisation d’établissement, seul un recours en annulation a pu être introduit contre les décisions ministérielles litigieuses des 30 décembre 2011 et 3 février 2012 portant refus de la demande d’autorisation d’établissement, de sorte que le tribunal administratif est incompétent pour connaître du recours principal en réformation.
Le recours en annulation est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.
A l’appui de son recours, la demanderesse conteste que Monsieur … aurait trompé les autorités en présentant au Centre commun de la Sécurité sociale la lettre de démission en tant que gérant de la société … du 20 novembre 2010 afin d’obtenir la certification qu’il n’est pas responsable des arriérés de cotisations sociales restés en souffrance. A cet égard, elle fait valoir que la société … aurait été créée en date du 8 avril 2004 par Monsieur … et que les parts de celle-ci auraient été reprises durant l’année 2007 par Monsieur … qui aurait été nommé administrateur unique de la société en date du 12 septembre 2008. En 2011, Monsieur … aurait vendu les actions de la société … à la société … qui les aurait ensuite cédées à Madame … qui, depuis le 6 décembre 2010, aurait été l’associée unique de la société …. Par courrier du 20 novembre 2010, Monsieur … aurait informé la société … de sa démission en tant que gérant de la société qui aurait accusé bonne réception de cette démission tout en l’informant qu’elle acceptait sa démission. A partir de ce moment, Monsieur … n’aurait plus eu de fonction sociale au sein de la société …, mais y serait resté comme simple salarié. Finalement, ce serait sous la gérance de Monsieur … que la société … aurait déposé son bilan en date du 17 janvier 2012. Le demandeur en conclut qu’en raison du fait qu’il aurait démissionné de la fonction de gérant de la société … en date du 20 novembre 2010, il ne serait pas responsable des arriérés auprès du Centre commun de la Sécurité sociale de la société …, de sorte que ce serait à bon droit que cette dernière lui aurait délivré le certificat litigieux. S’il admet que la publication de sa démission n’aurait été faite qu’en date du 10 novembre 2011, cette omission ne saurait lui être reprochée dans la mesure où l’obligation de publication aurait incombé à la société ….
Le délégué du gouvernement fait valoir qu’en 2009 et 2010 Monsieur … aurait exploité sans autorisation d’établissement la société … ce qui constituerait non seulement un manquement au sens du droit d’établissement, mais également une infraction pénale. D’autre part, Monsieur … aurait travaillé à plusieurs reprises sous le couvert de personnes interposées sans se conformer aux obligations de publication de nomination de gérant. Le 19 novembre 2010, Monsieur … aurait cédé l’intégralité des parts de la société … à sa compagne, Madame …, et la société aurait été désormais nommée ….
Le 6 janvier 2011, Monsieur … aurait demandé de nouveau une autorisation provisoire en justifiant cette demande par le fait qu’il se serait inscrit à l’examen du brevet de maîtrise.
L’autorisation provisoire aurait été délivrée jusqu’au 23 juin 2011 et le 25 mai 2011, Monsieur … aurait demandé une seconde autorisation provisoire pour la société … en argumentant que les résultats de l’examen du brevet de maîtrise ne seraient connus qu’au mois d’août. Le ministère des Classes moyennes aurait alors refusé cette demande en lui indiquant qu’il devrait tenter de trouver une personne qualifiée, mais, au vu des informations données par Monsieur … qu’il aurait cherché sans succès une personne qualifiée en Allemagne, le ministère aurait délivré en date du 21 juillet 2011 une seconde autorisation provisoire valable jusqu’au 1er décembre 2011. Or, il se serait avéré que les explications fournies par Monsieur … avaient été mensongères dans la mesure où il aurait eu connaissance de son échec à l’examen du brevet de maîtrise depuis début mai 2011 et la recherche effectuée en Allemagne auprès de la « Bundesagentur für Arbeit », n’aurait pas eu pour but d’engager un gérant, mais Monsieur … aurait expressément indiqué dans la correspondance avec la « Bundesagentur für Arbeit » qu’il recherchait une personne qui n’aurait aucune responsabilité au niveau de la gestion. Le 21 octobre 2011, la compagne de Monsieur … aurait cédé l’intégralité des parts de la société … à Monsieur … qui aurait repris la gérance de la société. Le 18 janvier 2012, la société aurait été déclarée en état de faillite.
Parallèlement à ces agissements, Monsieur … aurait constitué le 15 janvier 2011 la société … qui aurait le même objet social et la même adresse que la société …. Le 22 juillet 2011, Monsieur … aurait demandé pour la société … une autorisation d’établissement dans le domaine de la construction qui lui aurait été refusée en raison de son défaut de qualification professionnelle. Monsieur … aurait par ailleurs constitué en août 2010 la société …, société qui aurait acheté en octobre 2011 les parts sociales des sociétés …, … et … qui auraient appartenu également à Monsieur … sans qu’il n’ait entretemps obtenu le brevet de maîtrise afférent.
Monsieur … aurait demandé au courant du mois de novembre 2011 au nom de la société … une autorisation pour différents métiers secondaires relevant du secteur de la construction. Or, lors de l’instruction de cette demande, le ministère aurait été informé que Monsieur … aurait accumulé auprès de la société …, entre-temps dénommé …, … € de dettes auprès du Centre commun de la Sécurité sociale. Ainsi, le ministère aurait conditionné la délivrance des autorisations sollicitées au remboursement de ces dettes. Monsieur … serait ensuite intervenu auprès du Centre commun de la Sécurité sociale en présentant une lettre de démission datée au 29 novembre 2010, qui ne correspondrait cependant nullement à la réalité et aurait eu pour seul but d’induire le Centre commun de la Sécurité sociale en erreur. Dans un premier temps le Centre commun de la Sécurité sociale aurait certifié à Monsieur … qu’il n’est pas responsable de ces dettes, mais quelques jours après, le Centre commun de la Sécurité sociale se serait rendu compte de son erreur et, en date du 16 décembre 2011, il aurait informé Monsieur … que le courrier initial du 7 décembre 2011 serait nul et non avenu. A ce moment, le montant des dettes de la société … auprès du Centre commun de la Sécurité sociale ce serait chiffré à … €. Le Centre commun de la Sécurité sociale aurait alors informé le ministère des Classes moyennes des agissements déloyaux de Monsieur …, de sorte que le ministre aurait décidé le 30 décembre 2011 qu’au vu des agissements multiples de Monsieur … celui-ci serait dépourvu de l’honorabilité professionnelle au sens de la loi du 2 septembre 2011.
Le délégué du gouvernement précise encore que le 17 janvier 2012, la société … aurait introduit une demande d’autorisation au nom de Madame … qui aurait été délivrée le 27 mars 2012.
Le délégué du gouvernement en conclut que Monsieur … ne disposerait pas de l’honorabilité professionnelle requise pour exploiter une entreprise de construction telle que la société … et, qu’en vertu de l’article 4.4. de la loi du 2 septembre 2011, l’autorisation sollicitée ne pourrait être délivrée avant que les dettes auprès du Centre commun de la Sécurité sociale de Monsieur … auront été honorées.
Dans son mémoire en réplique, la demanderesse conteste que la société … aurait été dirigée par plusieurs gérants qui n’auraient pas réellement géré cette entreprise et affirme qu’au final la société … aurait dû déposer son bilan pour l’unique raison que le ministère lui aurait refusé les autorisations nécessaires pour pouvoir exercer son activité. Elle s’étonne par ailleurs que le ministre ait pu prendre la décision faisant l’objet du présent recours, alors qu’au mois de janvier 2012, plusieurs autorisations d’établissement auraient été délivrées à travers la personne de Monsieur …, de sorte que le ministère aurait, implicitement, reconnu le bien-fondé du présent recours.
La demanderesse verse plusieurs extraits du Centre commun de la Sécurité sociale de juillet à novembre 2010 concernant la société … et couvrant la période durant laquelle Monsieur … aurait été responsable de la gérance de cette société, afin de prouver qu’aucune dette auprès du Centre commun de la Sécurité sociale n’aurait été accumulée sous sa gérance.
Par ailleurs, les pièces versées en cause démontreraient que des recherches sérieuses afin de trouver une personne avec les qualifications professionnelles requises auraient été entamées auprès de l’administration de l’Emploi.
Aux termes de l’article 4 de la loi du 2 septembre 2011 : « L’entreprise qui exerce une activité visée à la présente loi désigne au moins une personne physique, le dirigeant qui :
1. satisfait aux exigences de qualification et d’honorabilité professionnelles ;
et 2. assure effectivement et en permanence la gestion journalière de l’entreprise ;
et 3. a un lien réel avec l’entreprise en étant propriétaire, associé, actionnaire, ou salarié ;
et 4. ne s’est pas soustrait aux charges sociales et fiscales, soit en nom propre, soit par l’intermédiaire d’une société qu’il dirige ou a dirigée. ».
Par ailleurs, l’article 6 de la même loi dispose : « (1) La condition d’honorabilité professionnelle vise à garantir l’intégrité de la profession ainsi que la protection des futurs cocontractants et clients.
(2) L’honorabilité professionnelle s’apprécie sur base des antécédents du dirigeant et de tous les éléments fournis par l’instruction administrative pour autant qu’ils concernent des faits ne remontant pas à plus de dix ans.
Le respect de la condition d’honorabilité professionnelle est également exigé dans le chef du détenteur de la majorité des parts sociales ou des personnes en mesure d’exercer une influence significative sur la gestion ou l’administration de l’entreprise.
(3) Constitue un manquement privant le dirigeant de l’honorabilité professionnelle, tout comportement ou agissement qui affecte si gravement son intégrité professionnelle qu’on ne peut plus tolérer, dans l’intérêt des acteurs économiques concernés, qu’il exerce ou continue à exercer l’activité autorisée ou à autoriser.
(4) Par dérogation au paragraphe (3), constituent d’office un manquement qui affecte l’honorabilité professionnelle du dirigeant :
a) le recours à une personne interposée ou l’intervention comme personne interposée dans le cadre de la direction d’une entreprise soumise à la présente loi ;
b) l’usage dans le cadre de la demande d’autorisation de documents ou de déclarations falsifiés ou mensongers ;
c) le défaut répété de procéder aux publications légales requises par les dispositions légales relatives au registre de commerce et des sociétés ou le défaut de tenir une comptabilité conforme aux exigences légales ;
d) l’accumulation de dettes importantes auprès des créanciers publics dans le cadre d’une faillite ou liquidation judiciaire prononcées ;
e) toute condamnation définitive, grave ou répétée en relation avec l’activité exercée. » Il s’ensuit que l’exercice d’une activité réglementée par la loi du 2 septembre 2011 est subordonné au respect des conditions d’établissement, d’honorabilité et de qualification posées aux articles 4 à 27 de ladite loi, étant entendu que la condition d’honorabilité professionnelle n’est, notamment, pas remplie lorsque le dirigeant d’une personne morale qui sollicite l’autorisation d’établissement s’est soustrait aux charges sociales et fiscales, soit en nom propre, soit par l’intermédiaire d’une société qu’il dirige ou a dirigé ou s’il a accumulé des dettes importantes auprès des créanciers publics dans le cadre d’une faillite ou liquidation judiciaire prononcées.
En l’espèce, il ressort des explications non contestées de la part des parties, ainsi que du dossier administratif et des publications au registre de commerce et des sociétés que lors de la constitution de la société …, le 19 février 2004, la gérance de la société avait été confiée à l’associé unique de l’époque, Monsieur …. Lors d’une augmentation de capital du 4 juin 2007, Monsieur … avait souscrit pour 124 parts nouvelles dans la société … et détenait désormais la moitié des parts sociales, moins une part. A cette occasion, Monsieur … avait été nommé deuxième gérant de la société …. Le 29 février 2008, Monsieur … avait cédé l’entièreté de ses parts à Monsieur … qui devenait désormais associé unique de la société …. Le 5 juin 2008, Monsieur … avait cédé l’entièreté de ses parts à Monsieur …, ce dernier étant nommé gérant administratif de la société … et Monsieur … étant nommé gérant technique salarié, la société étant valablement engagée en toutes circonstances par la signature conjointe des deux gérants.
Le 12 septembre 2008, Monsieur … avait été révoqué comme gérant technique salarié et désormais la société était valablement engagée par la seule signature de Monsieur … en sa qualité de gérant administratif. Il ressort encore des pièces versées en cause que par acte d’assemblée générale extraordinaire du 19 novembre 2010, déposé au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg le 23 novembre 2010, Monsieur … avait cédé l’entièreté des parts qu’il détenait dans la société … à la société …. Il ressort finalement d’un acte notarié du 23 novembre 2010 déposé au registre de commerce et des sociétés le 26 novembre 2010 que la société …, dont Monsieur … était le gérant unique, avait cédé l’entièreté des actions qu’elle détenait dans la société … à Madame …. La circonstance invoquée par la partie étatique que Madame … était la compagne de Monsieur …, n’étant pas contestée par la demanderesse.
Il ressort encore des pièces versées en cause, et notamment du dossier administratif, qu’à la date du 7 décembre 2011, la société … redevait au Centre Commun de la Sécurité sociale le montant de … € d’arriérés de cotisations sociales. Il ressort par ailleurs de ces pièces que par courrier du 20 novembre 2010, Monsieur … a démissionné de ses fonctions de gérant de la société … avec effet au 26 novembre 2010 et que la même société a accepté cette démission par courrier du 25 octobre 2010. Finalement, il est constant en cause qu’en date du 7 janvier 2012, le gérant de la société … a fait l’aveu de la cessation des paiements.
Au vu des contestations de part et d’autre des parties au présent litige, se pose la question de savoir si c’est à bon droit que la partie étatique conclut à la responsabilité de Monsieur … en rapport avec les arrières de cotisations sociales accumulés par la société …, et plus particulièrement la question de l’opposabilité aux tiers de la démission de Monsieur … de ses fonctions de gérant de la société …, dans la mesure où il ne ressort pas des pièces versées en cause qu’elle ait fait l’objet d’une publication adéquate.
Aux termes de l’article 11bis de la loi modifiée du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales, ci-après dénommée « la loi du 10 août 1915 », : « Sont déposés et publiés conformément aux articles précédents :
[…] 3) l’extrait des actes relatifs à la nomination et à la cessation des fonctions :
a) des […] gérants […] des sociétés à responsabilité limitée […] ».
Par ailleurs, aux termes de l’article 9, paragraphe 4 de la loi du 10 août 1915 : « Les actes ou extraits d’actes ne sont opposables aux tiers qu’à partir du jour de leur publication au Mémorial, Recueil spécial des sociétés et associations, sauf si la société prouve que ses tiers en avaient antérieurement connaissance. […] ».
Ainsi, en vertu de l’article 11bis, (3) a) de la loi du 10 août 1915, la démission d’un gérant d’une société à responsabilité limitée est soumise aux obligations de la publication, à défaut de quoi elle n’est pas opposable aux tiers, tel que le prévoit l’article 9, paragraphe 4 de la même loi à moins que le tiers avait connaissance de la démission. Etant donné qu’en l’espèce il n’est ni prouvé que la démission ait fait l’objet de la publication légalement requise, ni que les autorités ait eu connaissance de cette démission, c’est à bon droit que le ministre a décidé que la démission de Monsieur … du 20 novembre 2010 n’est pas opposable aux tiers, de sorte que ce dernier était à considérer comme gérant de la société … au-delà de sa démission du 20 novembre 2010. Partant, les arriérés de cotisations sociales accumulés auprès du Centre commun de la Sécurité sociale de la société … sont imputables à Monsieur … qui, par le non-paiement des charges sociales de la société …, n’a pas respecté ses obligations professionnelles en tant que dirigeant de cette dernière affectant ainsi son honorabilité professionnelle.1 Par ailleurs, le tribunal est encore amené à relever que ce n’est que par l’assemblée générale du 21 octobre 2011 que la société … avait donne décharge à ses anciens gérants et avait nommé un nouveau gérant, à savoir Monsieur …, qui a dû faire l’aveu de faillite le 17 janvier 2012.
C’est dès lors à bon droit que le ministre a refusé à la demanderesse l’autorisation d’établissement sollicitée sur base des l’article 4.4 et 6 (4) d) précités de la loi du 2 septembre 2011, sans qu’il y a lieu d’analyser les autres manquements reprochés à Monsieur ….
Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;
reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;
au fond, le déclare non fondé et en déboute ;
condamne la demanderesse aux frais.
Ainsi jugé par:
Claude Fellens, vice-président, Annick Braun, premier juge, Andrée Gindt, juge, et lu à l’audience publique du 15 mai 2013 par le vice-président, en présence du greffier assumé Claudine Meili.
1 Voir TA 18 novembre 2002, n° 15025 du rôle, Pas. adm. 2012, n° 163 et les références y citées.
s. Claudine Meili s. Claude Fellens Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 16/5/2013 Le Greffier du Tribunal administratif 8