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05/11/2012 | LUXEMBOURG | N°29506

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 05 novembre 2012, 29506


Tribunal administratif N° 29506 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 21 novembre 2011 1re chambre Audience publique du 5 novembre 2012 Recours formé par Monsieur …, …, contre des bulletins de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu des personnes physiques et d’impôt commercial communal

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 29506 du rôle, déposée le 21 novembre 2011 au greffe du tribunal administratif par Maître Je

an-Pierre WINANDY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg...

Tribunal administratif N° 29506 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 21 novembre 2011 1re chambre Audience publique du 5 novembre 2012 Recours formé par Monsieur …, …, contre des bulletins de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu des personnes physiques et d’impôt commercial communal

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 29506 du rôle, déposée le 21 novembre 2011 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Pierre WINANDY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation des bulletins de l’impôt commercial communal 2006, 2007, 2008 et 2009 et des bulletins de l’impôt sur le revenu 2006, 2007, 2008 et 2009, émis le 16 mars 2011 par le bureau d’imposition Luxembourg 8, section des personnes physiques du service d’imposition de l’administration des Contributions directes ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 24 janvier 2012 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 24 février 2012 par le demandeur ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 12 mars 2012 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les bulletins critiqués ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Georges SIMON, en remplacement de Maître Jean-Pierre WINANDY, et Madame le délégué du gouvernement Betty SANDT en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 octobre 2012.

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En date du 16 mars 2011, le bureau d’imposition Luxembourg 8 de la section personnes physiques du service d’imposition de l’administration des Contributions directes émit les bulletins de l’impôt sur le revenu et de l’impôt commercial communal relatifs aux années 2006 à 2009 à l’encontre desquels Monsieur … fit introduire auprès du directeur de l’administration des Contributions directes une réclamation datée du 31 mars 2011.

A défaut de réaction lui parvenue de la part du directeur de l’administration des Contributions directes, désigné ci-après « le directeur », Monsieur … a fait déposer, par requête déposée le 21 novembre 2011 au greffe du tribunal administratif, un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation des bulletins de l’impôt commercial communal et des bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2006 à 2009.

Recevabilité Conformément aux dispositions combinées du paragraphe 228 AO, et de l’article 8 (3) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge du fond sur un recours introduit contre une décision du directeur ayant tranché les mérites d’une réclamation contre un bulletin d’imposition. Lorsqu’une réclamation au sens du paragraphe 228 AO a été introduite et qu’aucune décision définitive n’est intervenue dans le délai de six mois à partir de la demande, le réclamant peut considérer la réclamation comme rejetée et il peut interjeter un recours devant le tribunal administratif contre la décision qui fait l’objet de la réclamation ;

dans ce cas le délai de recours de trois mois ne court pas.

Le recours principal en réformation sous examen, tel que dirigé contre les bulletins des années 2006 à 2009, introduit dans les formes et délai de la loi, est partant recevable.

Il n’y a dès lors pas lieu d’analyser le recours en annulation, formulé à titre subsidiaire.

Quant au fond A l’appui de son recours, le demandeur soutient que les opérations de ventes d’immeubles litigieuses s’inscriraient dans le cadre de la gestion d’un patrimoine privé et que les plus-values en résultant ne sauraient être imposées en tant que bénéfice commercial. Il conteste encore la requalification des revenus divers en bénéfice commercial telle qu’opérérée par le bureau d’imposition en se prévalant tant de la notion de bénéfice commercial telle que définie par l’article 14 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après « LIR », que de la loi du 30 juillet 2002 incitant notamment à la mise sur le marché d’immeubles d’habitation. A cet égard, il donne à considérer que la loi du 30 juillet 2002 aurait introduit « plusieurs dispositions fiscales temporaires » relatives à l’imposition des revenus découlant de l’aliénation d’immeubles d’habitation pour les années 2002 à 2007 et que l’objectif de cette loi aurait été d’augmenter à brève échéance l’offre de terrains et de logements sur le marché immobilier, en adoptant notamment, « une série de mesures fiscales temporaires au bénéfice des particuliers propriétaires d’immeubles », lesquelles auraient notamment prévu une imposition allégée des plus-values issues de la vente d’immeubles d’habitation.

Monsieur … affirme ainsi que les trois ventes qu’il avait réalisées entre 2006 et 2007 auraient précisément participé à l’augmentation de l’offre d’immeubles d’habitation sur le marché, atteignant l’objectif de la loi du 30 juillet 2002, de sorte que ce serait à tort que l’administration des Contributions directes, loin de lui accorder « les dispositions avantageuses y afférentes », les lui aurait refusées, en l’imposant de surcroît au taux nettement supérieur relatif aux activités commerciales.

Il relève ensuite que l’article 14 LIR exigerait, pour qu’un revenu soit qualifié de bénéfice commercial, la recherche d’un but de lucre ; or, la vente de l’immeuble acheté le 14 juillet 2005 et revendu le 31 octobre 2006 aurait été motivée par des considérations étrangères à toute spéculation, puisqu’il aurait vendu une languette de terrain de 30 centiares afférente à l’immeuble en question dans un but d’utilité publique, à savoir dans l’intérêt de l’élargissement et du redressement de la rue du …, ce qui l’aurait empêché de réaliser les travaux envisagés lors de son acquisition et l’aurait contraint à vendre l’immeuble en date du 31 octobre 2006.

Il souligne encore que le bénéfice commercial au sens de l’article 14 LIR supposerait un caractère de permanence dans l’activité réalisée, ce qui ne serait toutefois pas le cas en l’espèce, puisqu’il aurait réalisé des opérations d’achat et de vente sur seulement trois immeubles, et ce de surcroît dans le cadre de la gestion normale de son patrimoine privé. Le demandeur estime d’ailleurs qu’il serait dénué de bon sens d’assimiler le cas où une personne achète un immeuble pour le subdiviser ensuite en quatre appartements qu’il revend, à celui d’une personne qui achète quatre appartements dans quatre opérations différentes pour les revendre séparément, alors qu’il serait évident que ces deux cas seraient à traiter de façon différente pour la raison que dans le deuxième cas l’intention de revente serait plus clairement établie et que la participation à la vie économique serait encore clairement plus poussée que dans le premier cas de figure.

Le demandeur, dans ce contexte, met encore en exergue le fait que de toute façon, si la détention d’immeubles ne dépasse pas 24 mois, le bénéfice réalisé serait en application des règles des articles 99 et suivants LIR traité comme bénéfice de spéculation avec donc la conséquence qu’il serait de toute façon imposable au taux plein d’imposition, pour en déduire que le législateur fiscal aurait de toute façon prévu des solutions claires pour ces cas et qu’il ne serait dès lors pas nécessaire « de fictivement traiter des gens de marchands de biens qui ne partagent guère quoi que ce soit avec cette catégorie de personnes ».

Il en conclut que les conditions de l’article 14 LIR ne seraient pas remplies.

Le délégué du gouvernement, de son côté, maintient au contraire que les conditions de cet article seraient remplies en l’espèce. Il souligne ainsi, en substance, le fait que le demandeur aurait systématiquement acquis des immeubles, qu’il les aurait ensuite rénovés au prix d’importants travaux, pour enfin les revendre, le cas échéant après les avoir divisés et mis en copropriété, avec des profits considérables, et ce à chaque fois après une période de détention très courte.

Il estime encore que le demandeur aurait également participé à la vie économique générale, en ce qu’il se serait, par le biais d’agents immobiliers, adressé au marché de biens immobiliers, le délégué du gouvernement estimant encore que le demandeur aurait évidemment agi de manière indépendante.

La partie étatique insiste ensuite sur certains liens du demandeur et sur certaines opérations commerciales réalisées par celui-ci sur le marché des biens immobiliers. Elle souligne ainsi qu’une société anonyme … S.A., dont l’objet social serait notamment l’achat, la vente et la mise en valeur de tous immeubles bâtis et non bâtis, aurait eu dans un premier temps son siège social au domicile du demandeur, la compagne du demandeur et mère de ses deux enfants ayant de surcroît été l’un des administrateurs de cette société, à laquelle se serait jointe à partir de 2006 la propre fille du demandeur, en la double qualité d’administrateur et d’administrateur-délégué.

Elle relève encore que non seulement le demandeur aurait prêté des fonds à la société … S.A., mais qu’il aurait également bénéficié d’un montant conséquent mis à disposition par cette société pour financer l’acquisition de la maison unifamiliale sise à …. De même, la partie étatique met en évidence le fait que le demandeur aurait touché de manière régulière des commissions de la part de la société … S.A., déclarées comme bénéfice commercial, tout comme il aurait touché une commission d’apport pour une autre maison de la part d’une autre société immobilière, commission là encore déclarée comme bénéfice commercial.

L’article 14, alinéa 1er LIR dispose qu’est à considérer comme bénéfice commercial, le revenu net provenant d’une entreprise commerciale, industrielle, minière ou artisanale, l’entreprise commerciale étant définie comme « toute activité indépendante à but de lucre exercée de manière permanente et constituant une participation à la vie économique générale… ». Le tribunal doit dès lors examiner les transactions immobilières litigieuses sous l’angle de vue de l’existence cumulative des quatre critères de la loi définissant l’entreprise commerciale.

Il résulte des éléments de fait de la cause que parmi les critères de la loi, il convient d’examiner en premier lieu celui de la permanence de l’activité litigieuse, la délimitation entre l’activité commerciale et la simple gestion du patrimoine privé impliquant une appréciation de l’activité développée par le contribuable à la lumière de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce.

Force est de prime abord de constater que le demandeur se limite à contester de manière générale l’application de cette disposition par l’administration des Contributions directes sans apporter de quelconques précisions quant aux circonstances des différentes opérations immobilières litigieuses et sans verser une quelconque pièce permettant au tribunal d’apprécier de lui-même celles-ci, si ce n’est de mettre en avant le fait que l’une des reventes - à savoir celle de l’immeuble sis à Luxemburg, 27, … -, aurait été rendue nécessaire par la vente à la Ville de Luxembourg d’une languette de terrain de 30 centiares, ladite languette ayant constitué une emprise profitant à la voirie communale, pour soutenir ensuite que cette vente aurait été de nature à empêcher les travaux que le demandeur aurait envisagé pour l’immeuble sis à Luxemburg, 27, ….

Le tribunal constate ensuite, de concert avec le délégué du gouvernement, que le demandeur a procédé sur la période de 2005 à 2007 à l’achat de 3 objets immobiliers, et en a vendu 7.

C’est ainsi qu’il a acquis en date du 14 juillet 2005, un immeuble sis à Luxembourg, 27, …, désigné par l’acte d’acquisition tel que communiqué au tribunal par la partie étatique de « maison d’habitation », ledit acte comportant encore l’indication expresse que l’acquéreur n’envisage pas d’habiter la maison acquise à titre de logement principal. Il résulte ensuite des actes de vente de cet immeuble que celui-ci a été divisé en trois lots, à savoir deux appartements privatifs, d’une part, et une partie commune, d’autre part, revendus le 31 octobre 2006, soit après une période de détention de 15 mois.

Le demandeur a encore acquis le 30 janvier 2006 - c’est-à-dire à une époque où il était encore propriétaire de l’immeuble sis à Luxembourg, 27, … - une maison unifamiliale sise à Luxembourg, …, rue du …, maison qu’il a revendue le 23 octobre 2007, soit après 21 mois.

Le demandeur a enfin acquis le 5 janvier 2007 une maison de rapport sise à Luxembourg, 23, rue …, comportant 4 appartements avec dépendances (caves, greniers) et parties communes - l’acte indiquant expressément que le demandeur envisageait de vendre l’immeuble par lots privatifs -, lesdits appartements ayant été revendus les 27 décembre 2007, 23 mars 2008, 15 avril 2008 et 27 août 2009, soit après des périodes de détention allant de 11,5 à 32 mois. Aussi, force est de constater que les opérations immobilières effectuées par le demandeur ne constituent pas des opérations isolées, mais au contraire des opérations répétitives et fréquentes, le délégué du gouvernement ayant à ce sujet à juste titre relevé tant leur nombre relativement important que leur fréquence, résultant de périodes de détention courtes des immeubles cédés.

Il résulte par ailleurs des travaux préparatoires de la loi du 4 décembre 1967 concernant l’article 14 LIR que « le caractère de permanence n’implique pas nécessairement que l’activité se répète. Pour qu’il y ait permanence, il suffit que l’activité ait lieu avec l’intention de la répéter si l’occasion s’en présente et de constituer de la sorte une source de revenu sur la base d’opérations répétées1 », le même commentaire de l’article 14 précisant que « le caractère de permanence sépare l’activité commerciale … d’actes similaires isolés qui ont lieu dans le cadre de l’administration du patrimoine privé du contribuable ».

Le tribunal ne saurait suivre à cet égard l’affirmation du demandeur selon laquelle il n’aurait en fait réalisé que trois opérations portant sur trois immeubles. En effet, si le demandeur a certes acquis originairement trois immeubles, dont un seul se trouvait déjà en copropriété, à savoir la maison de rapport sise à Luxembourg, rue …, il a ensuite vendu 7 objets immobiliers tant matériellement que juridiquement distincts, le demandeur ayant en effet procédé tant fonctionnellement que juridiquement à la division de la maison sise à Luxembourg, 27, … en deux appartements, lesquels firent l’objet de deux ventes par des actes distincts.

Par ailleurs, si l’acquisition ou la location d’objets immobiliers par un particulier peut certes être considérée objectivement comme une opération de gestion de patrimoine privé dont le but aurait été de simplifier la gestion de son patrimoine privé et d’augmenter ainsi ses revenus nets de location, de même que la revente d’immeubles est compatible avec la gestion d’un patrimoine immobilier privé, aussi longtemps que ce patrimoine sert au contribuable principalement à dégager des revenus de location2, il convient cependant, en ce qui concerne cette dernière condition dégagée par la jurisprudence, de relever que le demandeur reste muet quant aux raisons d’être des différentes ventes opérées, exceptée l’opération réalisée à Luxembourg, 27, …, dont l’explication avancée ne convainc toutefois pas le tribunal. En effet, le caractère d’emprise de la languette vendue à la Ville de Luxembourg, figure explicitement au registre cadastral - pareille indication résultant du compromis de vente versée en cause par le demandeur -, de sorte que cette affectation était nécessairement connue du demandeur au moment de l’acquisition de l’immeuble en date du 14 juillet 2005, ou à tout le moins devait être connue et qu’elle ne saurait être admise comme obstacle subitement survenu ayant contrecarré les projets de travaux du demandeur et justifiant la revente rapide de l’immeuble, l’intention du demandeur de réaliser des projets de transformation, telle que mise en avant par Monsieur …, qui aurait en fait motivé l’acquisition de l’immeuble, restant par ailleurs en l’état de pure allégation.

1 Projet de loi n° 5714, commentaire des articles, p. 18.

2 « Private Vermögensverwaltung ist nach ständiger Rechtsprechung des BFH anzunehmen, solange sich die Tätigkeit noch als Nutzung von Grundbesitz durch Fruchtziehung aus zu erhaltender Substanz darstellt und die Ausnutzung substantieller Vermögenswerte nicht entscheidend in den Vordergrund tritt. … Die Veräusserung von Grundbesitz ist daher der privaten Vermögensverwaltung zuzurechnen, wenn der Steuerpflichtige damit höhere Erträge aus dem vorhandenen Vermögen anstrebt. Veräussert er dagegen den Grundbesitz, um Substanzwertsteigerungen auszunutzen, wird er gewerblich tätig » (BFH, arrêt du 18 janvier 1989, BStBl 1990, II, 1051, 1052).

Or, si l’administration d’un patrimoine immobilier privé n’exclut pas qu’il puisse y avoir des mutations, c’est-à-dire des acquisitions et des ventes d’immeubles, il faut que ces mutations soient comprises comme début ou fin d’une activité orientée essentiellement vers une jouissance des fruits, par notamment la location, et qu’elles ne s’analysent pas comme un négoce déguisé d’immeubles3.

En l’espèce, il résulte tant de la courte période de détention des différents immeubles vendus entre 2005 et 2007 que de la qualification retenue par le demandeur lui-même d’opérations spéculatives au sens de l’article 99 bis LIR que lesdites opérations constituaient bien des opérations poursuivant une « Ausnutzung substantieller Vermögenswert ».

Par ailleurs, en ce qui concerne plus particulièrement la courte période de détention des immeubles, il convient de souligner que selon le Bundesfinanzhof, c’est essentiellement le nombre des acquisitions (ou constructions) d’immeubles, ainsi que le fait qu’elles soient rapidement suivies de leur revente, qui est déterminant pour distinguer gestion d’un patrimoine privé et entreprise commerciale4, la revente rapide des objets (« enger zeitlicher Zusammenhang zwischen Kauf und Verkauf von Wohnungen ») étant définie, par une jurisprudence constante du Bundesfinanzhof, comme une revente dans un délai maximal de cinq ans à partir de l’acquisition de l’objet en question : « Besteht ein enger zeitlicher Zusammenhang zwischen der Errichtung und der Veräusserung (…), so liegt nach der Rechtsprechung des BFH regelmässig ein Gewerbebetrieb vor ; ein enger zeitlicher Zusammenhang wird angenommen, wenn die Zeitspanne zwischen der Errichtung und dem Verkauf der Wohnungen nicht mehr als fünf Jahre beträgt5 ».

En l’espèce, force est de constater tous les immeubles vendus pendant la période concernée avaient été acquis moins de trois ans auparavant.

Il s’ensuit que la courte période de détention d’immeubles, caractéristique constante des opérations immobilières du demandeur, constitue un indice de commercialité de l’activité du demandeur.

Cette même approche a d’ailleurs été appliquée par la Cour administrative qui a retenu que lorsque des opérations immobilières d’une envergure indéniable ont été opérées dans un court laps de temps en impliquant des mutations importantes au niveau du patrimoine immobilier de la personne procédant à ces opérations, un dépassement du cadre de la simple gestion d’un patrimoine privé peut en être déduit : « En effet, le but recherché paraît avoir été moins la recherche d’une conservation et d’une jouissance à long terme desdites propriétés immobilières, mais essentiellement une valorisation rapide du patrimoine moyennant ces mutations, caractéristique essentielle d’un esprit de lucre et d’une entreprise commerciale6 ».

En ce qui concerne les trois autres critères d’appréciation cités ci-dessus, il y a lieu de souligner que la participation à la vie économique générale implique que le contribuable prenne part, d’une façon perceptible au public intéressé, à l’échange général des biens et prestations et qu’il soit prêt à entrer en relation d’affaires avec un nombre indéterminé de personnes, compte tenu naturellement de l’étendue et du genre de son entreprise et de sa propre capacité de prestation. Ainsi, le commerçant prend part au trafic économique général 3 H. Dostert et E. Stoffel, Le bénéfice commercial, Etudes fiscales, décembre 1997, pp.15 et 16.

4 BFH, arrêt précité, p.1052-1053.

5 BFH, arrêt du 22 mars 1990, BStBl 1990, II, 637, 638, avec de nombreuses références de jurisprudence.

6 Cour adm. 10 avril 2008, n° 23722C.

en approvisionnant le marché en biens pour lesquels il existe un besoin et en les échangeant contre des équivalents en nature ou en argent. Cet élément de la participation est à apprécier dans chaque cas d’espèce en considération du but recherché ainsi que de la nature des opérations exécutées7.

En l’espèce, il ressort des explications de la partie étatique, ni énervées, ni même contestées, que le demandeur a eu recours, en ce qui concerne les ventes litigieuses, à des agences immobilières, lesquelles ont d’ailleurs facturé au demandeur leurs interventions, ce qui implique que le demandeur, par le biais de ces agences, a eu recours à de la publicité et avait l’intention d’entrer en contact avec un nombre indéterminé de personnes.

La participation du demandeur à la vie économique générale se dégage encore de sa participation directe, sinon indirecte au travers de membres de sa famille, à la société … S.A., laquelle, comme indiqué ci-dessus, poursuit une activité immobilière, ainsi que des opérations immobilières dans lesquelles le demandeur était impliqué et pour lesquelles il a perçu des commissions, déclarées d’ailleurs comme constituant un bénéfice commercial.

Quant au critère de l’indépendance, celui-ci est également donné en l’espèce, le demandeur n’ayant pas procédé aux opérations immobilières en cause en étant sujet aux liens d’une occupation salariale.

Enfin, en ce qui concerne le but de lucre, un tel but, outre de se dégager d’ores et déjà du caractère spéculatif avéré de certaines opérations, il y a lieu de retenir que les opérations litigieuses ont dégagé un bénéfice, les différentes ventes s’étant toutes soldées par une plus-

value. Par ailleurs, même à supposer que l’activité immobilière du demandeur n’ait été que faiblement lucrative, il n’en demeure pas moins que la perspective d’un résultat global positif n’est pas impérative pour qualifier une activité d’activité commerciale, à condition que le contribuable ait procédé à la recherche d’un gain pécuniaire, recherche qui s’exprime dans un comportement économiquement raisonnable, c’est-à-dire que les expectatives du contribuable doivent être raisonnables et surtout qu’il doit déployer les efforts nécessaires et proportionnés propres à aboutir à un rendement économique8, ce qui, comme relevé ci-avant, est donné en l’espèce, le demandeur ayant, préalablement aux ventes des différents objets immobiliers, fait procéder à d’importants travaux de rénovation et de transformation des immeubles, les immeubles ne se trouvant pas tous originairement en copropriété ayant par ailleurs encore été divisés matériellement et juridiquement en plusieurs lots, et ce avec l’intention manifeste de maximaliser les plus-values pouvant être obtenues à l’occasion de la vente de ces immeubles.

Le but de lucre ainsi dégagé des opérations immobilières réalisées par le demandeur ne saurait en tout état de cause être énervé par le fait qu’il aurait également, ponctuellement, cédé à titre gratuit une emprise d’une superficie de 30 centiares à la Ville de Luxemburg.

Sur base des considérations qui précèdent, le tribunal arrive à la même conclusion que l’administration des Contributions directes, à savoir que dans les circonstances particulières de l’espèce, développées ci-avant ainsi que dans les circonstances plus particulièrement relevées par le délégué du gouvernement, circonstances non énervées par le demandeur, les 7 Trib. adm. 21 juin 2000, n° 11582, Pas. adm. 2011, V° Impôts, n° 81.

8 Voir en ce sens : trib. adm. janvier 2007, n° 21401, Pas. adm. 2011, V° Impôts, n° 83.

activités immobilières du demandeur s’analysent en des activités commerciales, caractéristique se répercutant au niveau de la qualification et de l’imposition des bénéfices afférents.

Il s’ensuit que l’intégralité du bénéfice relatif aux opérations immobilières litigieuses a à juste titre été imposée dans la catégorie de bénéfice commercial.

Cette conclusion n’est pas énervée par la référence générale faite par le demandeur à la loi du 30 juillet 2002, le demandeur restant en effet en défaut, d’une part, de préciser les dispositions précises de cette loi par lui visées, et d’autre part, d’expliquer dans quelle mesure lesdites dispositions auraient été violées, l’exposé d’un moyen de droit exigeant non seulement de désigner la règle de droit qui serait violée, mais également la manière dont celle-

ci aurait été violée par l’acte attaqué. Or les moyens simplement suggérés, sans être soutenus effectivement, ne sont pas à prendre en considération par le tribunal, étant donné qu’il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence de la partie demanderesse et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de ses conclusions.

La même conclusion s’impose en ce qui concerne l’allégation du demandeur selon laquelle les opérations immobilières litigieuses auraient généré « des bénéfices de spéculation et de cession, conformément aux articles 99bis et 99ter LIR » et que le bénéfice réalisé devrait être traité en application des « règles des articles 99 et suiv. LIR » comme bénéfice de spéculation, une telle allégation non autrement précisée et circonstanciée laissant manifestement de rencontrer les exigences pourtant peu élevées relativement à la précision de l’exposé des moyens.

A titre tout à fait superfétatoire, il échet en tout état de cause de souligner que l’article 99 LIR, relatif aux revenus divers, à savoir aux bénéfices de spéculation et aux bénéfices de cession, ainsi que les dispositions légales subséquentes, ne trouvent, par définition qu’à s’appliquer aux bénéfices divers, à savoir, conformément aux dispositions de l’article 10 LIR, des revenus qui ne tombent pas sous une des autres catégories de revenus y énumérées dont notamment le bénéfice commercial9, cette condition figurant d’ailleurs explicitement à l’article 99bis LIR, lequel traite plus particulièrement des bénéfices de spéculation, l’alinéa 1er de l’article 99bis LIR ne trouvant en effet à s’appliquer à des bénéfices de spéculation que « pour autant qu’ils ne sont pas imposables dans une des catégories de revenus visée sub 1 à 7 de l’article 10 ».

Le tribunal venant de retenir que les plus-values engendrées par les opérations immobilières litigieuses sont à imposer dans la catégorie de bénéfice commercial, le demandeur ne saurait prétendre à l’application des articles 99 et suivants LIR.

Il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent que le demandeur est à débouter de son recours.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

9 Art.10, point 1, LIR.

déclare le recours principal en réformation recevable ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu d’analyser le recours subsidiaire en annulation ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 5 novembre 2012 par :

Marc Sünnen, vice-président, Paul Nourissier, juge, Alexandra Castegnaro, juge, en présence du greffier en chef Arny Schmit.

s. Schmit s. Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 5.11.2012 Le Greffier du Tribunal administratif 9


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 29506
Date de la décision : 05/11/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2012-11-05;29506 ?

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