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24/10/2012 | LUXEMBOURG | N°27540

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 octobre 2012, 27540


Tribunal administratif Numéro 27540 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 novembre 2010 1re chambre Audience publique du 24 octobre 2012 Recours formé par les époux …, …, contre une décision du bourgmestre de la commune de Hoscheid en présence de la société à responsabilité limitée …, … en matière de permis de construire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 27540 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 novembre 2010 par M

aître Pascale HANSEN, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch,...

Tribunal administratif Numéro 27540 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 novembre 2010 1re chambre Audience publique du 24 octobre 2012 Recours formé par les époux …, …, contre une décision du bourgmestre de la commune de Hoscheid en présence de la société à responsabilité limitée …, … en matière de permis de construire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 27540 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 novembre 2010 par Maître Pascale HANSEN, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de Monsieur …, …, et de son épouse, Madame …, …, demeurant actuellement ensemble à L-…, tendant à l’annulation de l’autorisation de bâtir N°31/2009 émise par le bourgmestre de la commune de Hoscheid le 23 décembre 2009 et portée à la connaissance des parties requérantes le 14 octobre 2010, autorisation émise au profit de la société à responsabilité limitée … S.àr.l., établie et ayant son siège social à L-…, pour la construction d’une maison unifamiliale sise à …, section A de Hoscheid, au lieu dit « …et portant le numéro cadastral … Vu l’exploit de l’huissier de justice Georges WEBER, demeurant à Diekirch, du 3 décembre 2010, portant signification de ce recours à l’administration communale de Hoscheid, établie à L-…représentée par son bourgmestre actuellement en fonctions, sinon, pour autant que de besoin par le collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions, sinon par qui de droit ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 3 décembre 2010, portant signification de ce recours à la société à responsabilité limitée … S.àr.l., établie et ayant son siège social à L-…, représentée par son gérant actuellement en fonctions, sinon par qui de droit, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B… ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif en date du 13 décembre 2010 par Maître Jean-Paul WILTZIUS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch au nom de l’administration communale de Hoscheid ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif en date du 17 janvier 2011 par Maître Astrid BUGATTO, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de la société … S.àr.l. ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 10 janvier 2011 par Maître Jean-Paul WILTZIUS au nom de l’administration communale de Hoscheid ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 28 février 2011 par Maître Astrid BUGATTO au nom de la société … S.àr.l. ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 29 mars 2011 par Maître Pascale HANSEN au nom des demandeurs ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 15 avril 2011 par Maître Jean-Paul WILTZIUS au nom de l’administration communale de Hoscheid ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 19 avril 2011 par Maître Astrid BUGATTO au nom de la société … S.àr.l. ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport ainsi que Maître Pascale HANSEN, Maître Christian BILTGEN, en remplacement de Maître Jean-Paul WILTZIUS et Maître Agnès DURDU en remplacement de Maître Astrid BUGATTO, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 17 septembre 2012.

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Le 23 décembre 2009, le bourgmestre de la commune de Hoscheid, ci-après « le bourgmestre », accorda à la société à responsabilité limitée … S.àr.l., établie et ayant son siège social à L- …, une autorisation de construire une maison unifamiliale sise à Hoscheid-…, section A de Hoscheid, au lieu dit « … » et portant le numéro cadastral N°….

Par requête déposée le 30 novembre 2010, inscrite sous le numéro 27540 du rôle, Monsieur … et son épouse, Madame …, ci-après « les époux … », ont introduit un recours en annulation à l’encontre de cette autorisation et par requête du même jour, inscrite sous le numéro 27541 du rôle, ils ont introduit une demande tendant à ordonner le sursis à exécution de la décision en question, demande dont ils ont été déboutés par une ordonnance du Président du tribunal administratif du 20 décembre 2010.

Dans la mesure où ni la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après dénommée « la loi du 19 juillet 2004», ni aucune autre disposition légale n’instaure un recours au fond en matière d’autorisations de construire, seul un recours en annulation a pu être valablement introduit.

Les parties défenderesse et tierce intéressée soulèvent l’irrecevabilité ratione temporis du recours en annulation.

La société … S.àr.l. souligne dans ce contexte le fait que l’autorisation de construire litigieuse aurait été affichée dès le 14 janvier 2010 de sorte que les demandeurs seraient malvenus d’affirmer n’avoir eu connaissance de la décision attaquée que le 14 octobre 2010.

Etant donné que l’affichage constituerait le point de départ du délai pour agir pour les tiers intéressés agissant contre une autorisation de construire et que conformément à l’article 37 de la loi du 19 juillet 2004, les demandeurs seraient réputés avoir eu connaissance de l’autorisation au plus tard trois jours après l’affichage, ils seraient en tout état de cause forclos à agir. La société produit à cet égard deux attestations testimoniales destinées à prouver que l’autorisation de construire litigieuse aurait été affichée dès le mois de janvier 2010 et offre de prouver pour autant que de besoin par l’audition de témoins que l’affichage de l’autorisation de construire N° 31/ 2009 aurait eu lieu le 14 janvier 2010, ou à toute autre date antérieure au 30 août 2010.

La société … S.àr.l. donne également à considérer que les demandeurs auraient de toute façon eu connaissance de l’autorisation de construire avant son affichage étant donné que Monsieur … aurait été membre du conseil communal de Hoscheid au moment de la délivrance de ladite autorisation le 23 décembre 2009, de sorte qu’il lui aurait appartenu de demander des renseignements supplémentaires auprès de la commune. La société rappelle dans ce contexte que la formalité de l’affichage d’un certificat attestant de l’octroi de l’autorisation de construire aurait été prévue pour des raisons de sécurité juridique, mais qu’elle ne s’imposerait cependant pas dans l’hypothèse où les intéressés auraient eu une connaissance effective de l’autorisation de construire, ce qui serait le cas en l’espèce au vu du mandat occupé par Monsieur … au sein du conseil communal de Hoscheid.

La commune de Hoscheid, ci-après « la commune », après avoir soulevé dans son mémoire en réponse l’irrecevabilité du recours des demandeurs pour cause de tardivité au motif notamment que les demandeurs auraient eu une connaissance effective de la décision d’autorisation de construire du fait du mandat de conseiller communal occupé par Monsieur …, a informé le tribunal à l’audience des plaidoiries qu’elle n’insistait pas sur la question de la recevabilité, tout en avouant que le contenu du document affiché aux abords du chantier n’aurait pas été conforme aux exigences légales.

Les demandeurs quant à eux font valoir que début octobre 2010, sans préjudice quant à la date exacte, la société … S.àr.l. aurait commencé avec la construction d’une maison unifamiliale se trouvant partiellement sur le terrain leur appartenant. En effet, il ressort des explications des demandeurs que par acte notarié du 4 mai 1998 ils auraient acquis une maison avec terrain sise dans la commune de Hoscheid, Section A de Hoscheid portant le numéro cadastral …au lieu dit …, maison place d’une contenance de 29 ares et 50 centiares. Il se serait par la suite avéré qu’une partie du terrain d’une contenance de 1 are et 24 centiares aurait été occupée par leur voisin, Monsieur …, qui aurait réussi à faire changer l’extrait cadastral de sorte qu’au moment de la délivrance de l’autorisation de construire, il aurait figuré sur l’extrait cadastral comme étant le propriétaire de la parcelle litigieuse portant actuellement le numéro …. La parcelle litigieuse aurait d’ailleurs entretemps été vendue par Monsieur… à la société …qui l’aurait revendue aux époux …. Un litige serait actuellement pendant devant le Tribunal de Paix de et à Diekirch concernant les droits de propriété sur la parcelle concernée.

Suite au début des travaux, le litismandataire des demandeurs aurait adressé le 5 octobre 2010 un courrier à la commune afin de se voir communiquer une copie des autorisations de construire émises pour la construction d’une maison sur leur terrain voisin. Une telle copie ne serait parvenue à leur litismandataire que le 14 octobre 2010, de sorte qu’ils n’auraient eu connaissance de « l’intégralité » de la décision attaquée que le 14 octobre 2010. Ils contestent en tout état de cause que le « point rouge » relatif à l’autorisation de construire litigieuse aurait été affiché dès le 14 janvier 2010 et affirment que l’affichage n’aurait même pas encore eu lieu fin septembre 2010, soit avant le commencement des travaux de construction et que tout au plus l’autorisation de démolition du 22 juin 2010 aurait pu avoir été affichée au courant du printemps 2010. Ils mettent dans ce contexte en doute les attestations testimoniales versées par la société … S.àr.l.. Ils en concluent qu’en déposant leur recours le 30 novembre 2010 ils n’auraient pas été forclos pour agir contre l’autorisation de construire litigieuse.

Dans ce même contexte, à savoir celui de l’information des tiers intéressés, les demandeurs soutiennent en substance que la décision attaquée serait intervenue en violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », dans la mesure où ils seraient d’une part les voisins directs du terrain sur lequel la construction litigieuse serait en train d’être réalisée et que d’autre part et surtout ils revendiqueraient la propriété d’une partie de la parcelle sur laquelle la construction litigieuse se trouve, de sorte que le bourgmestre, qui aurait nécessairement été au courant du litige ayant trait aux droits de propriété de la parcelle en question, aurait dû informer les demandeurs au préalable de son intention de délivrer à la société … S.àr.l. l’autorisation de construire litigieuse.

En ce qui concerne la prétendue violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, la commune conclut au rejet de ce moyen. Elle souligne tout d’abord qu’en ce qui concernerait l’obligation d’une information préalable des tiers intéressés cet article n’imposerait qu’une obligation de moyens. En se référant à deux courants jurisprudentiels de la Cour administrative en la matière, la commune donne d’une part à considérer que comme en matière d’urbanisme l’information des tiers intéressés pourrait se faire ex post au moyen de l’affichage et que l’autorisation litigieuse aurait été affichée par la société … S.àr.l., il n’y aurait pas eu de violation de l’article 5 précité. Elle s’appuie ensuite sur l’autre courant jurisprudentiel pour soutenir en substance que le bourgmestre, en délivrant l’autorisation de construire litigieuse, aurait de toute façon agi dans le cadre d’une compétence liée. En effet, lorsque le bourgmestre procèderait à la délivrance d’une autorisation de construire, il devrait se contenter de vérifier si les prescriptions administratives sont respectées sans prendre en compte des considérations d’intérêt privé de voisins, tel qu’un litige relatif aux droits de propriété du terrain concerné, sous peine de commettre un excès de pouvoir. Comme l’extrait cadastral du 24 novembre 2009 qui a été joint à la demande d’autorisation ensemble avec le plan d’implantation de l’immeuble sur la parcelle n°… à l’échelle 1/200 aurait clairement fait apparaître que le recul latéral et le recul postérieur de la construction projetée étaient conformes au règlement des bâtisses de la commune et que le même extrait aurait renseigné que la parcelle litigieuse appartenait à un seul propriétaire, à savoir Monsieur …, le bourgmestre n’aurait pas eu d’autre choix que de constater la conformité du projet de construction aux dispositions réglementaires applicables et partant d’accorder l’autorisation de construire. La commune en conclut que comme les points critiqués par les demandeurs échapperaient de toute façon à toute marge d’appréciation de la part du bourgmestre, ces points n’auraient pas permis à celui-ci de refuser l’autorisation, même si ces reproches avaient été formulés antérieurement lors de la procédure d’instruction de la demande du permis de construire. Le défaut d’information préalable des demandeurs ne leur aurait par conséquent pas causé de préjudice de sorte que même s’il ne devait pas y avoir eu d’information préalable, cette omission ne saurait en l’espèce entraîner de sanctions.

La société … S.àr.l., tout en insistant également sur le fait qu’en matière d’autorisation de construire le bourgmestre se trouverait confronté à une compétence liée de sorte que l’intervention des demandeurs préalablement à la prise de décision n’aurait pas pu influer sur le contenu de l’autorisation, souligne également que comme l’autorisation de construire litigieuse aurait été affichée le 14 janvier 2010 – ce qui serait notamment établi sur base des deux attestations testimoniales versées par elle - les demandeurs auraient eu la possibilité de se renseigner auprès de la commune et de faire valoir leurs moyens à partir de ce moment-là. Elle rappelle en effet qu’en matière d’urbanisme le législateur n’aurait a priori retenu qu’une obligation d’information ex post des parties tierces-intéressées par la voie de l’affichage, ce qui aurait été chose faite en l’espèce le 14 janvier 2010.

Les demandeurs confrontés à ces moyens de réponse, insistent sur le fait qu’il serait contesté que la société … ait affiché l’autorisation de construire avant le mois de septembre 2010 devant le chantier et que tout au plus l’autorisation de démolition aurait fait l’objet d’un affichage. Ils soulignent par ailleurs qu’ils auraient subi un préjudice du fait de ne pas avoir pu faire valoir leurs critiques préalablement à la prise de l’autorisation litigieuse puisque la construction litigieuse ne respecterait pas les limites latérales et postérieures du fait qu’une partie de la construction se trouverait sur leur terrain.

Aux termes de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, « lorsqu’une décision administrative est susceptible d’affecter les droits et intérêts de tierces personnes, l’autorité administrative doit lui donner une publicité adéquate mettant les tiers en mesure de faire valoir leurs moyens. Dans la mesure du possible, l’autorité administrative doit rendre publique l’ouverture de la procédure aboutissant à une telle décision. Les personnes intéressées doivent avoir la possibilité de faire connaître leurs observations. La décision définitive doit être portée par tous moyens appropriés à la connaissance des personnes qui ont présenté des observations. » Il convient de relever que l’article 5 du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979 n’impose à cet égard pas une obligation générale et stricte aux autorités administratives, mais il leur impose seulement d’informer les tiers intéressés « dans la mesure du possible ». Or, il résulte à cet égard des travaux parlementaires ayant abouti à la loi du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain que le législateur a explicitement exclu l’obligation de procéder antérieurement à une information de toutes les personnes intéressées, au motif qu’« une notification individuelle des personnes intéressées n’étant pas possible pour des raisons pratiques, liées notamment à l’impossibilité d’identifier ex ante toutes les personnes susceptibles d’être intéressées », de sorte à ne retenir a priori en matière d’urbanisme que l’obligation d’une information ex post par la voie de l’affichage.

En l’espèce, les demandeurs contestent purement et simplement que la décision litigieuse aurait été affichée dès le 14 janvier 2010, voire même avant le début des travaux de construction, en octobre 2010.

La société … S.àr.l. quant à elle verse deux attestations testimoniales, dont celle de Monsieur …qui atteste qu’il aurait « personnellement affiché l’autorisation de bâtir des maisons à Hoscheid-… en date du 14 janvier 2010 ».

Le tribunal relève qu’abstraction faite de la question de savoir si le certificat attestant l’octroi de l’autorisation de construire litigieuse a été affiché ou non, la commune est en aveu que le contenu du document affiché, ou non, n’était de toute façon pas conforme aux exigences légales.

Or, aux termes des alinéas 5 et 8 de l’article 37 de la loi du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, intitulé « Autorisations de construire » :

« (…) Un certificat délivré par le bourgmestre attestant que la construction projetée a fait l'objet de son autorisation est affiché aux abords du chantier par le maître de l'ouvrage. Ce certificat mentionne notamment qu'à la maison communale le public peut prendre inspection des plans afférents pour autant qu'ils portent sur l'implantation de la construction, ses parties extérieures et l'affectation de l'immeuble. (…)» (…) « Le délai de recours devant les juridictions administratives commence à courir trois jours à compter de la date d’affichage [du prédit certificat]». Pour faire courir le délai, la connaissance, par les tiers intéressés, de l’existence de la décision doit être telle qu’elle permette aux dits tiers de vérifier les éléments essentiels du contenu de la décision de façon à engager utilement, le cas échéant, un recours contentieux.1Ainsi, il a notamment déjà été jugé que l’affichage d’une simple copie de l’autorisation de construire ne peut être qualifié de formalité équivalente.2 Face à l’aveu de la commune que le document affiché n’était pas conforme aux exigences légales, c’est-à-dire qu’il ne comportait pas indication des éléments essentiels du contenu de la décision, il y a lieu de retenir que le délai de recours prévu à l’article 37 alinéa 8 n’a pu valablement commencer à courir à l’encontre des demandeurs, sans qu’il n’y ait lieu de déterminer le moment à partir duquel le document en question a été affiché ou non.

L’article 13 (1) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives dispose encore que :

« Sauf dans les cas où les lois ou les règlements fixent un délai plus long ou plus court et sans préjudice des dispositions de la loi du 22 décembre 1986 relative au relevé de la déchéance résultant de l’expiration d’un délai imparti pour agir en justice, le recours au tribunal n’est plus recevable après trois mois du jour où la décision a été notifiée au requérant ou du jour où le requérant a pu en prendre connaissance.» 1 Trib. admin. 21 septembre 2000, n°11428 du rôle, Pas. adm. 2011, V° Procédure contentieuse, n°219;

2 Trib. adm. 9 décembre 2006, n°19642 du rôle, Pas. adm. 2011, V° Urbanisme, n°583.

L’article 37 de la loi précitée du 19 juillet 2004 et l’article 13 (1) de la loi précitée du 21 juin 1999 sont à lire conjointement. Ainsi, l’article 13 (1) prévoit deux hypothèses alternatives dans lesquelles un recours peut être déclaré irrecevable faute d’avoir été introduit dans les délais, à savoir celle où le demandeur dépose son recours plus de trois mois après s’être vu formellement notifier la décision litigieuse, et celle où il introduit un recours plus de trois mois après avoir pu prendre connaissance de l’acte faisant grief, l’article 37 de la loi du 19 juillet 2004 précitée ayant à cet égard retenu pour des raisons pratiques que la prise de connaissance d’une autorisation de construire par les tiers intéressés est réputée avoir eu lieu trois jours après l’affichage d’un certificat attestant l’octroi de l’autorisation de construire.

Ces deux hypothèses ne sont pas énervées par l’article 37 de la loi du 19 juillet 2004 précitée qui dispose que le délai de recours contre l’autorisation court à compter de la date d’affichage de l’autorisation, sans qu’il n’exclut la deuxième hypothèse consacrée par l’article 13 (1) de la loi précitée du 21 juin 1999 selon laquelle le délai peut courir à compter de la prise de connaissance de la décision litigieuse.

En effet, si le législateur, partant du constat, d’une part, qu’une notification individuelle aux personnes intéressées par une autorisation de construire n’est pas toujours possible pour des raisons pratiques, liées notamment à l’impossibilité d’identifier toutes les personnes susceptibles d’être intéressées de sorte à exclure l’application de l’article 5 du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979, et d’autre part, que l’affichage in extenso des autorisations de construire avec les plans afférents est impraticable, a estimé nécessaire d’imposer la formalité d’une notification générale telle que retenue à l’article 37 de la loi précitée du 19 juillet 2004, à savoir l’affichage d’un certificat aux abords du chantier, et ceci afin de faire courir le délai du recours contentieux, cette formalité, qui a été prévue pour des raisons de sécurité juridique, ne s’impose cependant pas dans l’hypothèse où les intéressés ont eu une connaissance effective de l’autorisation de construire, la preuve de pareille connaissance appartenant cependant à la partie qui l’invoque.

Les parties défenderesse et tierce intéressée font dans ce contexte valoir que nonobstant la question de l’affichage de l’autorisation litigieuse, cette dernière aurait de toute façon été portée à la connaissance des demandeurs bien avant son affichage et donc en tout état de cause plus de trois mois avant le dépôt de leur recours contentieux. Force est toutefois au tribunal de relever qu’il ne saurait être déduit de la seule circonstance que Monsieur … aurait fait partie du conseil communal de la commune de Hoscheid au moment où le bourgmestre de la commune aurait délivré l’autorisation litigieuse, à savoir le 23 décembre 2009, que les demandeurs auraient nécessairement dû avoir connaissance de la décision attaquée avant même son affichage, voire avant le début des travaux de construction, le conseil communal n’étant en effet pas compétent en matière d’octroi de permis de bâtir. Par ailleurs, à défaut d’autres éléments de preuve, cette affirmation reste en tout état de cause à l’état de pure allégation.

En l’espèce, si l’autorisation de bâtir litigieuse porte la date du 23 décembre 2009, de sorte qu’il peut être supposé qu’elle a été délivrée concomitamment ou postérieurement à cette date, il n’appert cependant pas des pièces versées en cause que l’autorisation ait été affichée, respectivement - comme retenu ci-avant - affichée en bonne et due forme, ni qu’elle ait été communiquée aux demandeurs à une date située plus de trois mois – délai du recours contentieux – avant l’introduction de leur recours.

Le recours en annulation de la décision déférée est partant recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Les demandeurs invoquent au fond encore une violation de l’article 5.d.) du règlement sur les bâtisses de la commune de Hoscheid alors qu’une partie de la construction ne respecterait pas la limite latérale de trois mètres fixée par le règlement des bâtisses et qu’une autre partie de la construction ne respecterait pas la limite postérieure dans la mesure où elle se trouverait sur le terrain des demandeurs. Ils font également valoir que la construction n’aurait pas été faite conformément à l’autorisation émise étant donné qu’une terrasse serait également en construction sur l’arrière de la maison sans toutefois qu’elle ne figure sur l’autorisation de construire litigieuse.

En ce qui concerne la prétendue violation de l’article 5.d.) du règlement sur les bâtisses de la commune, cette dernière insiste sur le fait que sous peine de commettre un excès de pouvoir, le bourgmestre ne serait pas habilité à se préoccuper de considérations ayant trait au droit de propriété du terrain destiné à accueillir la construction projetée. Comme l’autorisation de construire aurait été délivrée sous réserve des droits des tiers à qui il appartient de les faire valoir devant le juge civil, la critique des marges de recul tomberait à faux. Pour ce qui est de la terrasse qui serait construite sans pour autant avoir été prévue dans l’autorisation, la commune donne à considérer qu’il s’agirait là d’un problème d’exécution de ladite autorisation qui ne saurait toutefois influer sur la légalité de l’autorisation. La société … S.àr.l. aurait par ailleurs introduit une demande d’autorisation ex post pour la construction de la terrasse, demande qui se trouvait en cours d’examen par les autorités communales au moment du dépôt du mémoire en réponse. La commune souligne finalement que si les demandeurs étaient d’avis que la construction d’une terrasse violerait le règlement des bâtisses, il leur appartiendrait d’agir en réparation soit en nature soit par équivalent et ce devant les juridictions judiciaires.

La société … S.àr.l. pour sa part souligne qu’aussi bien la limite latérale de trois mètres que la limite postérieure de dix mètres seraient respectées de sorte que le bourgmestre n’aurait pas pu refuser la demande en obtention d’une autorisation de construire. En ce qui concerne la terrasse litigieuse, la société … précise qu’une demande d’autorisation de construire aurait été introduite ex post tout en rappelant que le juge judiciaire serait de toute façon seul compétent pour ordonner la suppression de constructions érigées illégalement et la remise en pristin état d’un site.

En vertu de l’article 37 alinéa 2 de la loi précitée du 19 juillet 2004, l’autorisation de construire n’est accordée que si les travaux sont conformes soit au plan ou au projet d’aménagement général et le cas échéant au plan ou au projet d’aménagement particulier, voire au plan ou au projet de lotissement, de relotissement ou de morcellement, parties graphique et écrite.

La finalité de l’exigence légale de l’obtention d’une autorisation de construire consiste à vérifier si un projet de construction est conforme aux règles d’urbanisme applicables, à savoir essentiellement les plans d’aménagement général et particulier et le règlement des bâtisses, et une autorisation de construire s’analyse partant en la constatation officielle par l’autorité compétente, en l’occurrence le bourgmestre, de la conformité d’un projet de construction aux dispositions d’urbanisme applicables, de manière que toutes les règles quant au respect du droit de propriété de tiers et à la prise en compte de considérations d’intérêt privé qui ne font pas partie des règles d’urbanisme applicables sont étrangères au champ du contrôle de l’autorité compétente pour la délivrance d’une autorisation de construire.3 Ainsi, le bourgmestre, en délivrant l’autorisation de bâtir, constate dans la forme passive d’une autorisation que la réalisation du projet est permise.

Cet acte d’administration ne peut avoir pour l’administration aucune conséquence civile ; si le bâtisseur construit sur le bien d’autrui, ou si le bien est grevé de servitudes civiles, la demande est néanmoins accueillie, parce que l’administration ignore le point de droit civil et qu’elle ne prend aucune responsabilité technique.4 Le tribunal relève de prime abord que l’extrait cadastral émis par l’administration du Cadastre et de la Topographie le 24 novembre 2009 et soumis au bourgmestre le 8 décembre 2009 à l’appui de la demande d’autorisation de construire litigieuse, renseigne Monsieur … comme unique propriétaire de la parcelle portant le numéro cadastral ….

Il ressort ensuite du plan d’implantation de l’immeuble sur la parcelle N°… à l’échelle 1/200 qui a également été soumis au bourgmestre à l’appui de la demande d’autorisation de construire litigieuse, que le recul latéral y indiqué est de 3,13 mètres alors que suivant l’article 5 d.) du règlement des bâtisses de la commune de Hoscheid un minimum de 3 mètres doit être respecté et que le recul postérieur au côté droit est de 12 mètres, alors qu’un minimum de 10 mètres est requis.

La finalité première d’une autorisation de construire consiste, tel que rappelé ci-avant, pour le bourgmestre à certifier qu’un projet est conforme aux règles d’urbanisme applicables et par principe le propriétaire peut faire tout ce qui ne lui est pas formellement interdit par une disposition légale ou réglementaire. La conformité de la demande d’autorisation par rapport aux dispositions légales ou règlementaires existantes entraîne en principe dans le chef de l’administration l’obligation de délivrer le permis sollicité, sous peine de commettre un abus, respectivement un excès de pouvoir.5 Force est en l’espèce au tribunal de constater sur base des éléments soumis au bourgmestre à l’appui de la demande d’autorisation, et plus particulièrement du plan d’implantation précité, que les règles d’urbanisme applicables et plus particulièrement les dispositions de l’article 5.d) du règlement des bâtisses ont bien été respectées. L’argumentation des demandeurs suivant laquelle les reculs latéral et postérieur n’auraient pas été respectés du fait qu’une partie de la construction litigieuse se trouverait sur leur terrain ne saurait en effet être retenue en l’espèce pour ne pas être pertinente. En effet, les règles protectrices du droit de propriété, pour importantes qu’elles soient, ne relèvent pas du champ de compétence de l’autorité compétente, à savoir en l’espèce du bourgmestre, ni, par voie de conséquence, du contrôle du juge administratif, mais du juge judiciaire qui dispose d’instruments très efficaces pour sanctionner la violation du droit de propriété ou de servitudes relevant du droit civil.6 3 Cour adm., 22 mars 2011, n°27064C du rôle, Pas. adm. 2011, V° Urbanisme, n°486 ;

4 Cour adm., 22 mars 2011, n°27480C à 27483C du rôle, Pas. adm. 2011, V° Urbanisme, n°491 ;

5 Trib. adm., 6 octobre 2010, n°25782 du rôle, Pas. adm. 2011, V° Urbanisme, n°486, et autres références y citées.

6 Trib. adm., 4 mai 2009, n°23190 du rôle, Pas. adm. 2011, V° Urbanisme, n°486, et autres références y citées.

Comme en l’espèce le bourgmestre n’a pu que constater que le projet lui soumis était conforme aux règles d’urbanisme applicables et plus particulièrement à l’article 5.d.) du règlement des bâtisses de la commune et que par ailleurs la parcelle concernée appartenait suivant extrait cadastral récent à Monsieur …, il n’a pas eu d’autre choix que de délivrer l’autorisation de construire sollicitée, nonobstant l’existence d’un litige relatif au droit de propriété d’une partie de la parcelle sur laquelle la construction était projetée.

En ce qui concerne ensuite la non-conformité de l’autorisation de construire du fait qu’une terrasse serait actuellement [à lire « au moment du dépôt du recours contentieux »] construite à l’arrière de la maison sans toutefois qu’une telle terrasse ne figure sur l’autorisation de construire, il convient de prime abord de souligner que l’érection sans autorisation d’une construction, ou plutôt sans que l’autorisation accordée ne prévoit cette construction n’est pas de nature à vicier l’autorisation déférée, mais tout au plus rend la construction en cours illégale : il ne s’agit dès lors pas d’une question de légalité de l’autorisation relevant du juge administratif, mais d’une question d’exécution, de légalité de la construction, relevant du juge judiciaire.

Il découle de ce qui précède que le moyen fondé sur une violation de l’article 5.d.) du règlement sur les bâtisses de la commune de Hoscheid est à rejeter pour ne pas être fondé.

Les demandeurs font finalement valoir que l’autorisation litigieuse devrait être annulée compte tenu du fait que le bourgmestre de la commune de Hoscheid n’aurait pas pu ignorer le problème relatif aux droits de propriété d’une partie de la parcelle concernée et qu’il n’aurait dès lors pas dû accorder l’autorisation sans se rendre coupable d’un abus, sinon d’un détournement de pouvoir. Comme le bourgmestre aurait manifestement fait une mauvaise appréciation de la situation, la décision serait encore à annuler pour erreur de fait, sinon erreur manifeste d’appréciation dans le chef du bourgmestre.

Les parties défenderesse et tierce intéressée concluent toutes les deux au rejet de ces moyens d’annulation en renvoyant en substance à leurs développements antérieurs.

Au vu des développements qui précèdent et du constat déjà effectué par le tribunal que la conformité de la demande d’autorisation par rapport aux dispositions d’urbanisme existantes entraîne en principe dans le chef du bourgmestre l’obligation de délivrer le permis sollicité sans prendre en considération d’autres considérations d’intérêt privé ou tenant à l’exécutabilité technique ou matérielle du projet, sous peine de commettre un abus, respectivement un excès de pouvoir, les moyens des demandeurs tendant à l’annulation de la décision attaquée pour abus, sinon détournement de pouvoir sont à rejeter pour ne pas être fondés.

Le moyen fondé sur une erreur de fait, sinon une erreur manifeste d’appréciation dans le chef du bourgmestre est à écarter pour les mêmes raisons.

Les demandeurs sollicitent encore la condamnation des parties défenderesse et tierce intéressée à leur payer solidairement, sinon in solidum, une indemnité de procédure d’un montant de 2.000.- euros sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, demande qui, au vu de l’issue du présent litige est à rejeter.

Les parties défenderesse et tierce intéressée réclament quant à elles chacune une indemnité de procédure de 1.500.- euros, respectivement de 2.500.- euros sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives. Toutefois, les conditions d’application et notamment l’établissement du caractère d’iniquité résultant du fait de laisser les frais non répétibles à charge des parties défenderesse et tierce intéressée n’ont pas été rapportés à suffisance comme étant remplies en l’espèce, de sorte qu’il y a lieu de rejeter la demande.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

rejette les demandes en allocation d’une indemnité de procédure de part et d’autre;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 24 octobre 2012 par :

Marc Sünnen, vice-président, Thessy Kuborn, premier juge, Alexandra Castegnaro, juge, en présence du greffier Michèle Hoffmann.

s. Michèle Hoffmann s. Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 24/10/2012 Le Greffier du Tribunal administratif 11


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 27540
Date de la décision : 24/10/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2012-10-24;27540 ?

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