La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/09/2012 | LUXEMBOURG | N°30862

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 septembre 2012, 30862


Tribunal administratif N° 30862 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 juillet 2012 Audience publique extraordinaire de vacation du 13 septembre 2012 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration en matière de protection internationale (art. 20, L.5.5.2006)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 30862 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 13 juillet 2012 par Maître Nicky Stoffel, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au

nom de Monsieur …, né le … à … (Serbie), de nationalité serbe, demeurant actuellem...

Tribunal administratif N° 30862 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 juillet 2012 Audience publique extraordinaire de vacation du 13 septembre 2012 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration en matière de protection internationale (art. 20, L.5.5.2006)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 30862 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 13 juillet 2012 par Maître Nicky Stoffel, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Serbie), de nationalité serbe, demeurant actuellement à L-…, tendant 1) à l’annulation d’une décision du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration du 29 juin 2012 de statuer sur le bien-

fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, 2) à la réformation de la décision du même ministre du 29 juin 2012 refusant de faire droit à sa demande de protection internationale et 3) à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire contenu dans la même décision ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 7 août 2012 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Vania Dos Santos Bernardes, en remplacement de Maître Nicky Stoffel, et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Jacques en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 12 septembre 2012.

Le 11 mai 2012, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, ci-après dénommée la « loi du 5 mai 2006 ».

En date du même jour, Monsieur … fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Monsieur … fut en outre entendu par un agent du ministère des Affaires étrangères, direction de l’Immigration, en date du 28 juin 2012, sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.

Par décision du 29 juin 2012, notifiée par courrier recommandé du même jour, le ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration, ci-après dénommé le « ministre », l’informa qu’il avait statué sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée et que sa demande avait été refusée comme non fondée, tout en lui ordonnant de quitter le territoire dans un délai de trente jours. Ladite décision est libellée de la façon suivante :

« J'ai l'honneur de me référer à votre demande en obtention d'une protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection que vous avez présentée auprès du service compétent du Ministère des Affaires étrangères en date du 11 mai 2012.

En vertu des dispositions de l'article 20§1 de la loi précitée du 5 mai 2006, je vous informe qu'il est statué sur le bien-fondé de votre demande de protection internationale dans le cadre d'une procédure accélérée parce qu'il apparaît que vous tombez sous trois cas prévus au paragraphe (1), à savoir :

a) « le demandeur, en déposant sa demande et en exposant les faits, n'a soulevé que des questions sans pertinence ou d'une pertinence insignifiante au regard de l'examen visant à déterminer s'il remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale;

b) il apparaît clairement que le demandeur ne remplit pas les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale;

c) le demandeur provient d'un pays d'origine sûr au sens de l'article 21 de la présente loi. » En mains le rapport du Service de Police Judiciaire du 11 mai 2012 et le rapport d'entretien de l'agent du Ministère des Affaires étrangères du 28 juin 2012.

Monsieur, il résulte de vos déclarations que vous auriez déposé une demande de protection internationale pour des raisons économiques. Vous dites que certains patrons vous devraient encore 5000.- euros et ne voudraient pas vous déclarer.

Vous ne mentionnez aucune autre raison sous-tendant votre demande de protection internationale.

Il y a d'abord lieu de relever que la reconnaissance du statut de réfugié n'est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d'origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur qui doit établir, concrètement, que sa situation individuelle est telle qu'elle laisse supposer une crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève.

En tout état de cause, les faits exposés ne sauraient constituer un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié, puisqu'ils ne peuvent, à eux seuls, établir dans votre chef une crainte fondée d'être persécuté dans votre pays d'origine du fait de votre race, de votre religion, de votre nationalité, de votre appartenance à un groupe social ou de vos convictions politiques ainsi que le prévoit l'article 1er, section 1, § 2 de la Convention de Genève ainsi que les articles 31 et 32 de la loi précitée du 5 mai 2006. En effet, votre demande de protection internationale est uniquement basée sur des motifs d'ordre économique ne répondant à aucun des critères de fond définis par lesdites Convention et loi.

Subsidiairement, vous évoquez des problèmes avec certains patrons.

En ce qui concerne la situation économique de la Serbie, il y a lieu de souligner que « Auch die serbische Wirtschaft wurde durch die weltweite Finanzkrise getroffen. Nachdem das Wachstum sich Ende 2008 zunächst verlangsamte, ist die Wirtschaft 2009 in eine Rezession eingetreten. Folgen dieser Entwicklung sind wachsende Arbeitslosigkeit und Armut, vor allem der ländlichen Bevölkerung. In einigen Regionen, wie in Novi Pazar im Sandzak oder in Südserbien, befindet sich die Bevölkerung im Zustand „fortschreitender Verärmung“ ». Ainsi, « Die einst gut ausgebaute Industrie ist veraltet und liegt zum groβen Teil danieder. ». De même « Die offizielle Arbeitslosenquote betrug im September 2009 26,34 % , 2007 lag sie noch bei 18 %. Ein Drittel der Arbeitslosen ist jünger als 30 Jahre. Vielen gelingt es nur durch Schwarzarbeit, ihre Existenz zu sichern. Die Schattenwirtschaft erzeugt nach Schätzungen mindestens 30 % des BIP, die Überweisungen aus dem Ausland machen ca. 16 % aus ».

Or, au vu de ce qui précède, force est de constater que toute la population de la Serbie est affectée par la crise financière.

Vous faites en outre état de problèmes avec certains patrons pour lesquels vous auriez travaillé, ceux-ci vous devraient encore de l'argent et ne vous auraient pas déclaré. En application de l'article 28 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection au cas de l'espèce, il ne ressort pas du rapport d'audition que l'Etat ou d'autres organisations étatiques présentes sur le territoire de votre pays ne peuvent ou ne veulent pas vous accorder une protection à l'encontre de certains patrons qui vous devraient de l'argent. Il n'y a dès lors aucun motif sérieux de croire que, au cas où vous seriez renvoyé en Serbie, vous courriez un risque réel de subir des atteintes graves telles que définies dans la Convention de Genève et la loi modifiée du 5 mai 2006.

En vertu de l'article 21 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection et du règlement grand-ducal du 1 er avril 2011 modifiant le règlement grand-ducal du 21 décembre 2007 fixant une liste de pays d'origine sûrs au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection, la République de Serbie doit être considérée comme pays d'origine sûr où il n'existe pas, généralement et de façon constante de persécution au sens de la Convention de Genève. Ce constat n'a pas pu être contredit par l'examen individuel de vos demandes de protection internationale. Cet aspect est d'autant plus conforté par le fait qu'en date du 1er mars 2012 la République de Serbie a obtenu le statut de candidat officiel à l'Union Européenne.

Monsieur, vous ne faites donc pas état de problèmes, discriminations ou persécutions concrètes et personnelles, de sorte que vous ne soulevez que des questions sans pertinence ou d'une pertinence insignifiante au regard de l'examen visant à déterminer si vous remplissez les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale et que par conséquent les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale ne sont clairement pas remplies.

Je constate ainsi que vous n'alléguez aucun fait susceptible d'établir raisonnablement une crainte de persécution en raison d'opinions politiques, de race, de religion, de nationalité ou d'appartenance à un groupe social, susceptible de rendre votre vie intolérable dans votre pays. Les conditions permettant l'octroi du statut de réfugié ne sont par conséquent pas remplies.

En outre, vous n'invoquez pas non plus des motifs sérieux et avérés permettant de croire que vous courez un risque réel de subir les atteintes graves définies à l'article 37 de la loi précitée du 5 mai 2006. En effet, selon le même raisonnement que celui appliqué à l'évaluation de votre demande de protection internationale, des raisons économiques ne justifient pas la reconnaissance du statut conféré par la protection subsidiaire parce qu'ils n'établissent pas que a) vous craignez de vous voir infliger la peine de mort ou de vous faire exécuter, b) vous risquez de subir des actes de torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants, c) vous êtes susceptible de faire l'objet de menaces graves et individuelles contre votre vie en raison d'une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.

Votre demande en obtention d'une protection internationale est dès lors refusée comme non fondée au sens de l'article 20 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection.

Votre séjour étant illégal, vous êtes dans l'obligation de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours à compter du jour où la présente décision sera devenue définitive, à destination de la Serbie ou de tout autre pays dans lequel vous êtes autorisé à séjourner. (…).

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 13 juillet 2012, Monsieur … a fait introduire un recours tendant 1) à l’annulation de la décision précitée du ministre du 29 juin 2012 de statuer sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, 2) à la réformation de la même décision du ministre dans la mesure où elle refuse de faire droit à sa demande de protection internationale et 3) à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire contenu dans la même décision.

Quant aux faits, le demandeur expose être de nationalité serbe et avoir vécu dans une situation économique difficile dans son pays d’origine, en raison de ce qu’il aurait eu des problèmes de subvenir à ses besoins. Il fait en outre état de ce que ses anciens employeurs auraient non seulement refusé de le déclarer auprès des institutions officielles mais refuseraient également de lui verser son salaire. Il ajoute qu’il aurait également reçu des menaces de la part de ses patrons à partir du moment où il aurait commencé à réclamer ses salaires. Par ailleurs, en raison du prétendu laxisme de la part des policiers serbes, il n’aurait pas osé porter plainte auprès de la police serbe.

1) Quant au recours tendant à l’annulation de la décision de statuer sur la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée Etant donné que l’article 20, paragraphe (4) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en annulation contre les décisions du ministre de statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, un recours en annulation a valablement pu être introduit contre la décision déférée du ministre de statuer sur la demande de protection internationale du demandeur dans le cadre d’une procédure accélérée. Le recours en annulation est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Sous ce rapport, le demandeur soutient en substance que les éléments présentés par lui à l’appui de sa demande de protection internationale seraient manifestement pertinents au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour bénéficier d’une protection internationale. Il estime en outre, par rapport au troisième cas d’ouverture encore invoqué par le ministre, que la Serbie ne pourrait pas être qualifiée de pays d’origine sûr en raison de sa situation personnelle.

Aux termes de l’article 20, paragraphe (1) de la loi du 5 mai 2006 : « Le ministre peut statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée dans les cas suivants :

a) le demandeur, en déposant sa demande et en exposant les faits, n’a soulevé que des questions sans pertinence ou d’une pertinence insignifiante au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale ;

b) il apparaît clairement que le demandeur ne remplit pas les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale ;

c) le demandeur provient d’un pays d’origine sûr au sens de l’article 21 de la présente loi ; (…) ».

Il s’ensuit qu’aux termes de l’article 20, paragraphe (1) a), b) et c) de la loi du 5 mai 2006, le ministre peut statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale par voie de procédure accélérée soit s’il apparaît que les faits soulevés lors du dépôt de la demande sont sans pertinence ou d’une pertinence insignifiante au regard de l’examen de la prédite demande en obtention d’une protection internationale, soit s’il apparaît clairement que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons de nature à justifier dans son chef dans son pays de provenance une crainte justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de ses opinions politiques, de sa nationalité ou de son appartenance à un certain groupe social, respectivement un risque de subir des atteintes graves au sens de l’article 37 de la même loi, ou encore si le demandeur provient d’un pays d’origine sûr au sens de l’article 21 précité de la loi du 5 mai 2006.

Par ailleurs, force est au tribunal de constater que les conditions pour pouvoir statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée étant énumérées à l’article 20, paragraphe (1) de la loi du 5 mai 2006 de manière alternative et non point cumulative, le fait qu’une seule des conditions soit valablement remplie justifie la décision ministérielle à suffisance.

En ce qui concerne le cas énuméré au point c) de l’article 20, paragraphe (1) de la loi du 5 mai 2006, force est de constater qu’aux termes de l’article 21 de cette même loi : « (1) Un pays peut être désigné comme pays d’origine sûr pour les besoins de l’examen de la demande de protection internationale.

(2) Un pays qui est désigné comme pays d’origine sûr conformément aux paragraphes (3) et (4) du présent article peut uniquement, après examen individuel de la demande de protection internationale, être considéré comme étant un pays d’origine sûr pour un demandeur, s’il possède la nationalité de ce pays ou s’il avait précédemment sa résidence habituelle dans ce pays, mais que le demandeur n’a soumis aucune raison valable permettant de penser qu’il ne s’agit pas d’un pays d’origine sûr en raison de sa situation personnelle.

(3) Une demande de protection internationale est rejetée, sans préjudice du paragraphe (2) qui précède, lorsqu’un pays est désigné comme pays d’origine sûr soit par l’Union européenne soit par règlement grand-ducal.

(4) Un règlement grand-ducal pourra désigner un pays comme pays d’origine sûr s’il est établi qu’il n’y existe généralement et de façon constante pas de persécutions au sens de la Convention de Genève. Les critères suivants seront pris en considération pour la désignation d’un pays comme d’origine sûr :

a) l’observation des droits et libertés prévus par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le Pacte international de droits civils et politiques ou la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;

b) le respect du principe du non-refoulement prévu par la Convention de Genève ;

c) la prévision d’un système de recours efficace contre les violations de ces droits et libertés. » En l’espèce, il est constant en cause que par règlement grand-ducal du 1er avril 2011 ayant modifié celui du 21 décembre 2007 fixant la liste des pays d’origine sûr au sens de la loi du 5 mai 2006, la Serbie est considérée comme un pays d’origine sûr, tandis qu’il se dégage des éléments du dossier que le demandeur a la nationalité serbe et qu’il a habité en Serbie avant de venir au Luxembourg. Il y a partant lieu d’en conclure que c’est a priori à bon droit que le ministre a pu conclure que le demandeur provient d’un pays d’origine sûr. S’il est certes exact que l’énumération d’un pays sûr dans la liste du prédit règlement grand-ducal du 21 décembre 2007 ne constitue qu’une présomption que ce pays est à considérer comme un pays d’origine sûr et qu’aux termes de l’article 21, paragraphe (2) de la loi du 5 mai 2006, un examen de la situation individuelle du demandeur de protection internationale est indispensable pour pouvoir considérer que concrètement pour le demandeur de protection internationale considéré individuellement, le pays de provenance est à considérer comme pays d’origine sûr, force est au tribunal de constater que les moyens invoqués en l’espèce par le demandeur ne sont pas de nature à renverser cette présomption.

En effet, l’analyse de sa situation personnelle ne permet pas d’en dégager des éléments suffisants impliquant que ce constat ministériel s’en trouve ébranlé, étant relevé qu’il se dégage notamment des éléments d’information soumis par le demandeur que les seuls problèmes rencontrés en Serbie ont trait à sa situation économique et personnelle, étant relevé qu’au cours de son audition par un agent du ministère des Affaires étrangères, il a déclaré être venu au Luxembourg « pour des raisons économiques » et pour y chercher « une femme sérieuse » en vue de se marier. De tels éléments de fait ne sont partant pas de nature à mettre en doute la présomption que la Serbie est à qualifier de pays d’origine sûr au sens du règlement grand-ducal précité.

Il suit des considérations qui précèdent que le ministre a valablement pu conclure que le demandeur provient d’un pays d’origine sûr au sens de l’article 20, paragraphe (1) c), respectivement de l’article 21 de la loi du 5 mai 2006, de sorte que c’est à bon droit qu’il a décidé de statuer dans le cadre d’une procédure accélérée sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale.

Partant, le recours tendant à l’annulation de la décision de statuer sur la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée est à rejeter pour ne pas être fondé, sans qu’il n’y a lieu d’analyser les conditions retenues à l’article 20, paragraphe (1) a) et b) de la loi du 5 mai 2006.

2) Quant au recours en réformation de la décision portant refus d’une protection internationale Etant donné que l’article 20, paragraphe (4) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en réformation en matière de demandes de protection internationale déclarées non fondées dans le cadre d’une procédure accélérée, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit.

Le recours en réformation est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Sous ce rapport, le demandeur fait état de ses problèmes d’ordre économique qu’il aurait eus dans son pays d’origine et du fait que ses anciens employeurs refuseraient en partie de lui verser les salaires dus, en soutenant que de tels faits seraient à qualifier de persécutions au sens de la loi, en raison de l’attitude qu’auraient eu ses employeurs à son égard. Il estime qu’il aurait ainsi fait l’objet d’une forme d’« esclavage moderne » qui demeurerait impunie en raison du laxisme des autorités serbes.

Le délégué du gouvernement estime que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur, de sorte que le recours en réformation serait à rejeter comme non fondé.

En vertu de l’article 2 a) de la loi du 5 mai 2006, la notion de « protection internationale » se définit comme correspondant au statut de réfugié et au statut conféré par la protection subsidiaire.

A ce sujet, il échet de relever que la notion de « réfugié » est définie par l’article 2 c) de ladite loi du 5 mai 2006 comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays (…) », tandis que celle de « personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire » est définie par l’article 2 e) de la même loi comme tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir des atteintes graves et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays.

En l’espèce, l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition, ensemble les moyens et arguments apportés au cours de la procédure contentieuse et les pièces produites en cause, amène toutefois le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle fondée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social ainsi que le prévoit l’article 2 c) de la loi du 5 mai 2006.

En effet, force est au tribunal de relever qu’il ressort sans équivoque des déclarations du demandeur, telles qu’actées dans son rapport d’audition précité, qu’il n’a quitté son pays d’origine qu’en raison de problèmes économiques auxquels il devait faire face. Il s’ensuit que contrairement aux affirmations du demandeur, non autrement étayées, il ne peut se prévaloir d’avoir fait l’objet de persécutions au sens de la Convention de Genève et de la loi du 5 mai 2006.

Ainsi, force est au tribunal de constater que le demandeur est resté en défaut d’établir que les conditions de vie qu’il décrit, certes peu agréables, constitueraient une forme de persécution fondée sur un des motifs énumérés à l’article 2 c) de la loi du 5 mai 2006, à savoir sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa nationalité ou son appartenance à un certain groupe social.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a rejeté la demande en reconnaissance du statut de réfugié du demandeur.

En ce qui concerne le refus du ministre de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire, il y a lieu de rappeler qu’aux termes de l’article 2, e) de la loi du 5 mai 2006, est une « personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire», « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 37, l’article 39, paragraphes (1) et (2), n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays ».

L’article 37 de la même loi énumère en tant qu’atteintes graves, sous ses points a), b) et c), « la peine de mort ou l’exécution; ou la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine; ou des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

Le tribunal constate que le demandeur base son recours y relatif sur les mêmes motifs que ceux exposés à la base de sa demande de reconnaissance du statut de réfugié.

Or, au vu des conclusions dégagées ci-avant au sujet de la demande en reconnaissance du statut de réfugié, dans la mesure où il a été jugé que les faits et motifs invoqués par le demandeur manquent de fondement, il y a lieu de retenir qu’il n’existe pas davantage d’éléments susceptibles d’établir, sur la base des mêmes évènements ou arguments, qu’il existerait de sérieuses raisons de croire qu’il encourrait, en cas de retour dans son pays d’origine, un risque réel et avéré de subir des atteintes graves au sens de l’article 37 précité.

Plus particulièrement, le demandeur reste en défaut d’établir qu’en cas de retour dans son pays d’origine, il risquerait la peine de mort ou l’exécution, la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants, ou encore des menaces graves et individuelles contre sa vie ou sa personne en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.

Il s’ensuit en l’absence d’autres éléments que c’est à juste titre que le ministre a retenu que le demandeur n’a pas fait état de motifs sérieux et avérés permettant de croire qu’il courrait le risque de subir des atteintes graves au sens de l’article 37 de la loi du 5 mai 2006 et qu’il lui a partant refusé l’octroi d’une protection subsidiaire au sens de l’article 2 e) de ladite loi.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a déclaré la demande de protection internationale sous analyse comme non justifiée, de sorte que le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

3) Quant au recours tendant à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire Etant donné que l’article 20, paragraphe (4) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en annulation contre l’ordre de quitter le territoire, un recours sollicitant l’annulation de pareil ordre contenu dans la décision déférée a valablement pu être dirigé contre la décision ministérielle litigieuse. Le recours en annulation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai prévus par la loi, il est recevable.

Aux termes de l’article 20, paragraphe (2) de la loi du 5 mai 2006, « une décision négative du ministre vaut décision de retour. (…) ». En vertu de l’article 2. o) de la loi du 5 mai 2006 la notion de « décision de retour » se définit comme « la décision négative du ministre déclarant illégal le séjour et imposant l’ordre de quitter le territoire».

Le demandeur sollicite l’annulation de l’ordre de quitter le territoire sans cependant formuler de moyens à l’appui de son recours.

Le tribunal vient de retenir que le demandeur ne remplit pas les conditions pour prétendre au statut conféré par la protection internationale, de sorte que le ministre pouvait a priori valablement assortir le refus d’une protection internationale d’un ordre de quitter le territoire. A défaut d’un quelconque moyen, le tribunal ne saurait en l’état actuel du dossier mettre en cause ni la légalité ni le bien-fondé de la décision portant ordre de quitter le territoire.

Partant, le recours en annulation dirigé contre l’ordre de quitter le territoire est à rejeter à son tour pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit en la forme le recours en annulation introduit contre la décision ministérielle du 29 juin 2012 de statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

reçoit en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 29 juin 2012 portant refus d’une protection internationale ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

reçoit en la forme le recours en annulation introduit contre la décision ministérielle du 29 juin 2012 portant ordre de quitter le territoire ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Carlo Schockweiler, premier vice-président, Claude Fellens, vice-président, Alexandra Castegnaro, juge, et lu à l’audience publique extraordinaire de vacation du 13 septembre 2012 par le premier vice-président en présence du greffier du tribunal administratif Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Carlo Schockweiler Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 13.09.2012 Le Greffier du Tribunal administratif 10


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 30862
Date de la décision : 13/09/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2012-09-13;30862 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award