Tribunal administratif Numéro 29216 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 septembre 2011 2e chambre Audience publique du 8 août 2012 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de nationalité
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 29216 du rôle déposée le 30 septembre 2011 au greffe du tribunal administratif, par Maître Sanae Igri, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à …, demeurant actuellement à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’un arrêté du ministre de la Justice du 7 juin 2011 portant refus de lui accorder la nationalité luxembourgeoise ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 28 décembre 2011;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 26 janvier 2012 par Maître Sanae Igri pour le compte de Monsieur … ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, Maître Sanae Igri ainsi que Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Jacques en leurs plaidoiries respectives à l’audience du 18 juin 2012 ;
Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif en date du 27 juin 2012 par Maître Sanae Igri pour le compte de Monsieur … ;
Vu le mémoire supplémentaire du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 3 juillet 2012 ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport complémentaire ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Guy Schleder en sa plaidoirie à l’audience du 9 juillet 2012 à laquelle l’affaire avait été refixée pour la continuation des débats.
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En date du 17 janvier 2005, Monsieur … présenta pardevant l’officier de l’état civil de la commune de … une déclaration de naturalisation sur base de l’article 19, 1° de la loi modifiée du 22 février 1968 sur la nationalité luxembourgeoise.
Par arrêté du 7 juin 2011, notifié à Monsieur … le 30 juin 2011, le ministre de la Justice, désigné ci-après par « le ministre », refusa de faire droit à ladite déclaration de naturalisation, arrêté fondé sur les considérations et motifs suivants :
« Vu la déclaration d'option, souscrite le 17 janvier 2005 sur base de l'article 19, 1° de la loi modifiée du 22 février 1968 sur la nationalité luxembourgeoise, devant l'officier de l'état civil de la commune de … par Monsieur …, né le … à …, demeurant à L-… ;
Vu la loi modifiée du 22 février 1968 sur la nationalité luxembourgeoise, et notamment ses articles 19, 20 et 22 ;
Vu la loi du 23 octobre 2008 sur la nationalité luxembourgeoise, et notamment ses articles IV, 3 et IV, 4 ;
Considérant que lors d'une audition policière du 9 juillet 2005, le requérant a fait des déclarations dénigrant les citoyens luxembourgeois, comme par exemple « Ech pissen op d'Lëtzebuerger» (procès-verbal n° … du 9 juillet 2005 et rapport n° … du 24 août 2005 / C.I.
Esch-sur-Alzette) ;
Considérant que, par jugement du tribunal de simple police de Luxembourg rendu le 4 novembre 2003, le déclarant a été condamné à des amendes de 250 + 100 euros et à une interdiction de conduire de 2 mois du chef des infractions suivantes :
dépassement de la vitesse de 50 km/h à l'intérieur d'une agglomération, en l'occurrence 100 km/h, circulation sur une partie de la voie publique marquée par des raies obliques parallèles, défaut d'une lettre 'L' pendant la période de stage ;
Considérant que, par jugement du tribunal correctionnel de Luxembourg rendu le 21 décembre 2005, le déclarant a été condamné à une amende de 1.000 euros et à une interdiction de conduire de 32 mois, assortie d'un sursis partiel de 7 mois, du chef des infractions suivantes :
circulation avec un taux d'alcool d'au moins 0,55 mg par litre d'air expiré, en l'occurrence 1,00 mg/I et 0,73 mg/I, défaut de se comporter raisonnablement et prudemment ;
Considérant que, par jugement du tribunal correctionnel de Luxembourg rendu le 9 janvier 2007, le déclarant a été condamné à une amende de 1.000 euros et à une interdiction de conduire de 24 mois du chef du fait de ne pas être titulaire d'un permis de conduire valable ;
Considérant que, par jugement du tribunal correctionnel de Luxembourg rendu le 8 octobre 2008, le déclarant a été condamné à une peine d'emprisonnement de 6 mois, assortie du sursis intégral, à une amende de 1.500 euros et à une interdiction de conduire de 30 mois du chef de conduite d'un véhicule sur la voie publique malgré une interdiction de conduire judiciaire ;
Considérant qu'au vu des antécédents judiciaires, le déclarant ne présente pas les garanties d'honorabilité nécessaires à l'acquisition de la nationalité luxembourgeoise ;
Considérant que le comportement du déclarant n'est pas compatible avec les exigences d'une « intégration suffisante » au pays, telle que prévue à l'article 22, 3° de la loi modifiée du 22 février 1968 sur la nationalité luxembourgeoise ;
Arrête :
Art. 1er. La nationalité luxembourgeoise est refusée à Monsieur ….
Art. 2. Le présent arrêté sera notifié à l'intéressé.
Art. 3. La présente décision est susceptible d'un recours en réformation devant le tribunal administratif, recours qui doit être intenté dans les trois mois de la notification par requête signée d'un avocat à la cour. ».
Par requête déposée le 30 septembre 2011 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation du prédit arrêté ministériel du 7 juin 2011.
A l’audience des plaidoiries du 18 juin 2012, le tribunal a soulevé d’office la question de la détermination de la loi applicable à la décision déférée. En effet, le demandeur ayant entendu fonder son recours sur la loi du 23 octobre 2008 sur la nationalité luxembourgeoise désignée ci-après par « la loi du 23 octobre 2008 », alors que la décision déférée se basait quant à l’analyse du fond de la demande sur la loi modifiée du 22 février 1968 sur la nationalité luxembourgeoise, désignée ci-après par « la loi du 22 février 1968 », le tribunal a autorisé les parties à déposer un mémoire supplémentaire afin de prendre position quant à cette question.
Le demandeur, bien qu’invité par le tribunal à prendre position sur la question de la détermination de la loi applicable à la décision déférée, s’en est tenu aux explications suivantes non autrement étayées : « en l’espèce l’application de la loi du 23 octobre 2008 n’exclut pas l’application de la loi modifiée du 22 février 1968 » et « si [le] Tribunal venait à considérer que la loi du 23 octobre 2008 sur la nationalité luxembourgeoise n’était pas applicable, quod non, il échet de rappeler que les dispositions transitoires sont en faveur d’une application non exclusive de la loi du 22 février 1968 sur la nationalité luxembourgeoise ».
Le délégué du gouvernement fait quant à lui valoir que la disposition transitoire prévue à l’article IV, point 3° de la loi du 23 octobre 2008 serait applicable dès lors que la demande d’option aurait été présentée avant l’entrée en vigueur de la prédite loi, à savoir avant le 1er janvier 2009. Il indique en outre que la demande vaudrait déclaration au sens de l’article 10, 1° de ladite loi dans la mesure où elle aurait été présentée devant l’officier de l’état civil.
Il échet de constater que la loi du 22 février 1968 a été abrogée par la loi du 23 octobre 2008. En vertu de l’article IV de la loi du 23 octobre 2008, cette dernière est entrée en vigueur le 1er janvier 2009 et les demandes de naturalisation introduites avant cette date restent soumises quant aux conditions de fond aux articles 6, 7, 8 et 9, ainsi qu’aux articles 19, 20, 21, 22, 25 et 26 de la loi du 22 février 1968, mais sont soumises quant à la procédure et aux recours éventuels aux articles 11, 14 et 26 de la loi du 23 octobre 2008.
En l’espèce, Monsieur … a introduit sa demande de naturalisation le 17 janvier 2005, soit avant l’entrée en vigueur de la loi du 23 octobre 2008, et la décision afférente du ministre n’est intervenue qu’en date du 7 juin 2011, soit après l’entrée en vigueur de la loi du 23 octobre 2008, de sorte que la demande est régie quant au fond par les dispositions de la loi du 22 février 1968 et quant à la procédure et aux recours par les dispositions de la loi du 23 octobre 2008.
Aux termes de l’article 26 de la loi du 23 octobre 2008, « les recours exercés contre les arrêtés ministériels portant refus de demandes de naturalisation (…) sont de la compétence du tribunal administratif qui statue comme juge du fond, conformément à l’article 3 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif ».
Dès lors, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal et il n’y a pas lieu de statuer sur le recours en annulation introduit à titre subsidiaire.
Le recours en réformation est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai légaux.
A l’appui de son recours, le demandeur explique qu’il vivrait avec sa famille au Luxembourg et qu’il n’aurait plus aucun lien avec son pays d’origine, le Monténégro. Il aurait introduit une demande en déclaration d’option de nationalité luxembourgeoise afin de réaliser son intégration complète et totale dans la société luxembourgeoise. Il fait état de ce qu’il parlerait couramment le luxembourgeois, l’allemand et le français. Malgré un casier judiciaire vierge, le ministre lui aurait refusé la nationalité.
En droit, alors que dans sa requête introductive d’instance et dans son mémoire en réplique, le demandeur fait valoir que les faits retenus par le ministre pour refuser l’octroi de la nationalité, à savoir sa déclaration dénigrant les citoyens luxembourgeois qu’il conteste par ailleurs, sa condamnation par jugement du tribunal de simple police du 4 novembre 2003 pour excès de vitesse, sa condamnation par jugement du tribunal correctionnel de Luxembourg du 21 décembre 2005 pour conduite en état d’ivresse, sa condamnation par jugement du tribunal correctionnel de Luxembourg du 9 janvier 2007 du fait de ne pas être titulaire d’un permis de conduire valable, sa condamnation du tribunal correctionnel de Luxembourg du 8 octobre 2008 du chef de conduite d’un véhicule sur la voie publique malgré une interdiction de conduire judiciaire et la circonstance qu’eu égard à ses antécédents judiciaires il ne présenterait pas les garanties d’honorabilité nécessaires à l’acquisition de la nationalité luxembourgeoise, ne seraient pas avérés au sens des articles 6 et 7 de la loi du 23 octobre 2008, il explique dans son mémoire supplémentaire « que si on analyse l’article 7 de la loi du 22 février 1968 sur la nationalité luxembourgeoise ainsi que l’article 7 et notamment en son point 2 a et point 2b de la loi du 23 octobre 2008 sur la nationalité luxembourgeoise, les dispositions sont quasi identiques. Qu’en effet si [le] Tribunal venait à considérer que la loi du 23 octobre 2008 sur la nationalité luxembourgeoise n’était pas applicable, quod non, il échet de rappeler que les dispositions transitoires sont en faveur d’une application non exclusive de la loi du 22 février 1968 sur la nationalité luxembourgeoise. Qu’au demeurant, il est important de noter que toutes les conclusions prises dans l’acte introductif d’instance ainsi que dans le mémoire en réplique de Monsieur … sont parfaitement conformes à la loi du 22 février 1968 sur la nationalité luxembourgeoise. Qu’en effet, les deux moyens invoqués par Monsieur le Ministre de la Justice François BILTGEN sont le défaut d’honorabilité ainsi que l’absence d’intégration au pays. Or ces deux conditions sont prévues tant dans la loi du 22 février 1968 sur la nationalité luxembourgeoise que dans la loi du 23 octobre 2008 sur la nationalité luxembourgeoise, Qu’il y a partant lieu à application de[s] ces 2 lois dans le présent cas d’espèce car l’application de la loi du 23 octobre 2008 renvoie dans ses dispositions transitoires à la loi du 22 février 1968 sur la nationalité précitée et notamment à l’application des articles 6, 7, 8 et 9 ainsi qu’aux articles 19, 20, 21, 22, 25 et 26 de cette loi modifiée du 22 février 1968 ». Par ailleurs, il conteste encore le motif invoqué par le délégué du gouvernement tiré de l’absence d’une intégration suffisante au Luxembourg.
Le délégué du gouvernement estime que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation et conclut au rejet du recours. Il donne par ailleurs à considérer par voie de mémoire supplémentaire que la demande déférée serait régie quant au fond par les dispositions de l’article 22, points 3° et 5° de la loi du 22 février 1968.
Avant tout progrès en cause, il convient de rappeler que la demande de naturalisation sous examen est régie quant au fond par les dispositions de la loi du 22 février 1968.
Il est constant en l’espèce, d’une part, que le demandeur a introduit sa déclaration d’option sur pied de l’article 19, 1° de la loi du 22 février 1968 et, d’autre part, que le ministre a refusé l’octroi de la nationalité aux motifs que, premièrement, au vu des nombreux antécédents judiciaires, le demandeur ne présenterait pas les garanties d'honorabilité nécessaires à l'acquisition de la nationalité luxembourgeoise et, deuxièmement, que le comportement du demandeur ne serait pas compatible avec les exigences d'une intégration suffisante au pays.
Il échet de relever que si en tant que telle la condition d’honorabilité n’est pas prévue par une disposition précise de la loi du 22 février 1968, elle constitue néanmoins un élément d’appréciation du ministre sur les qualités morales du candidat à la nationalité.
Etant donné que le demandeur ne conteste cette appréciation dans le cadre du présent recours que sur pied de l’article 7 de la loi du 23 octobre 2008, disposition qui n’est pas applicable en l’espèce, il n’y a pas lieu de retenir le moyen afférent, lequel est à rejeter pour ne pas être fondé.
Il échet encore de relever que l’article 22 de la loi du 22 février 1968 dispose que:
« Dans tous les cas visés par l’article 19, l’option est en outre irrecevable:
1° lorsque l’intéressé ne prouve pas par des certificats ou attestations, qu’il a perdu sa nationalité d’origine ou qu’il la perd de plein droit à la suite de l’acquisition d’une autre nationalité;
2° lorsque l’option ne se concilie pas avec les obligations que l’intéressé a à remplir envers l’Etat auquel il appartient et qu’il pourrait en naître des difficultés;
3° lorsqu’il ne justifie pas d’une intégration suffisante, notamment lorsqu’il ne justifie pas d’une connaissance active et passive suffisante d’au moins une des langues prévues par la loi du 24 février 1984 sur le régime des langues et, lorsqu’il n’a pas au moins une connaissance de base de la langue luxembourgeoise, appuyée par des certificats ou documents officiels;
4° lorsqu’il a encouru, dans le pays ou à l’étranger, une condamnation entraînant d’après la loi luxembourgeoise la déchéance du droit électoral, pour la durée de cette échéance;
5° lorsqu’il a encouru, dans le pays ou à l’étranger, une condamnation définitive pour crime ou délit graves ou pour contravention aux dispositions légales sur la sécurité intérieure ou extérieure du pays ou pour tentative d’une de ces infractions.
En outre les dispositions de l’article 9, 2° doivent trouver leur application (…) » .
L’article 22 de la loi du 22 février 1968 énumère donc cinq situations qui conduisent le ministre à refuser une demande de naturalisation.
En l’espèce, le ministre a retenu que le comportement du demandeur ne serait pas compatible avec les exigences « d’une intégration suffisante » telle que cette condition est prévue au point 3° dudit article 22.
Le délégué du gouvernement explique qu’aux termes de l’article 22, l’option est irrecevable notamment lorsque le demandeur ne justifie pas d’une connaissance active et passive d’au moins une des langues prévues par la loi du 24 février 1984 sur le régime des langues et lorsqu’il n’a pas au moins une connaissance de base de la langue luxembourgeoise.
Cela étant, il s’appuie sur une décision du tribunal1 pour faire valoir que le terme « notamment » indiquerait que la condition d’intégration suffisante au pays ne serait pas à apprécier exclusivement par rapport aux connaissances linguistiques du demandeur mais que d’autres facteurs seraient également à prendre en considération tel que le comportement général du demandeur. En l’espèce, le ministre aurait estimé que le comportement général du demandeur eu égard à ses antécédents judiciaires et policiers ne serait pas compatible avec les exigences d’une intégration suffisante au pays dans la mesure où ils traduiraient le refus du demandeur de respecter la loi luxembourgeoise.
Il ressort des pièces et éléments soumis au tribunal que par jugement du tribunal de police de Luxembourg rendu le 4 novembre 2003, le demandeur a été condamné à des amendes de 250 et 100 euros et à une interdiction de conduire de 2 mois du chef des infractions 1 trib. adm. 15 décembre 2010, n° 26759 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu suivantes : dépassement de la vitesse de 50 km/h à l'intérieur d'une agglomération, en l'occurrence 100 km/h, circulation sur une partie de la voie publique marquée par des raies obliques parallèles, défaut d'une lettre 'L' pendant la période de stage, que par jugement du tribunal correctionnel de Luxembourg rendu le 21 décembre 2005, le demandeur a encore été condamné à une amende de 1.000 euros et à une interdiction de conduire de 32 mois, assortie d'un sursis partiel de 7 mois, du chef des infractions suivantes : circulation avec un taux d'alcool d'au moins 0,55 mg par litre d'air expiré, en l'occurrence 1,00 mg/l et 0,73 mg/l, défaut de se comporter raisonnablement et prudemment, que par jugement du tribunal correctionnel de Luxembourg rendu le 9 janvier 2007, le demandeur a encore été condamné à une amende de 1.000 euros et à une interdiction de conduire de 24 mois du chef du fait d’avoir conduit un véhicule sans être titulaire d'un permis de conduire valable et, enfin, que par jugement du tribunal correctionnel de Luxembourg rendu le 8 octobre 2008, le demandeur a été condamné à une peine d'emprisonnement de 6 mois, assortie du sursis intégral, à une amende de 1.500 euros et à une interdiction de conduire de 30 mois du chef de conduite d'un véhicule sur la voie publique malgré une interdiction de conduire judiciaire.
Par ailleurs, indépendamment des nombreuses infractions au code de la route relevées plus en avant, et afin d’apprécier le comportement général du demandeur quand il n’est pas au volant, il y a lieu d’avoir égard à un procès-verbal du 24 août 2005 de la Police grand-ducale d’Esch-sur Alzette duquel il ressort que le demandeur s’est adressé en ces termes à un policier :
« Haal du deng Maul, ween mengs dou weens du bass ! Och wanns du eng Uniform un hues, maachen ëch awer nach ëmmer waat ëch well! (…). Haal deng Maul! Ëch färten dëch nët ! (…) Hei am Land ass ët souwiesou Null, ëch maachen waat ëch well an dier kënnt mier guer näischt maachen! (…) Haal deng Maul, du bass guer naischt, well ëch sin Comptabel an ëch pissen op ärsch an op d’Lëtzebuerger! Ëch hun eng Demande gemeet fier Lëtzebuerger ze gin! (…)». Par ailleurs, le commandant du commissariat de la circonscription régionale de Mersch indique dans un procès-verbal de la Police grand-ducale du 13 novembre 2006 au sujet du demandeur que « Unterzeichneter kann nur feststellen, dass derselbe die Luxemburger verspottet, und die Nationalität lediglich zwecks Anstellung beim Staat erhalten möchte. Der Interessent hält sich nicht an Gesetze und Vorschriften, missachtet gerichtliche Befehle und ist äusserst uneinsichtig (…) ». Enfin, il ressort d’un rapport du commandant du commissariat de la circonscription régionale de Mersch du 25 novembre 2008 rédigé à l’attention du service de l’indigénat du ministère de la Justice que : « … wurde schriftlich für den 11.11.2008 vorgeladen. Derselbe erschien nicht und konnte am 17.11.2008 telephonisch erreicht werden.
Er gab an am 20.11. 2008 um 17.30 vorstellig zu werden. Dies blieb bis dato ohne Erfolg.
Somit ist klar ersichtlich, dass derselbe es nicht für nötig hält, zu erscheinen und ist nicht am Erhalt der luxemburgischen Nationalität interessiert ».
Force est au tribunal de constater que le comportement du demandeur se caractérise par un refus systématique et répété de se soumettre à la loi luxembourgeoise et de la respecter, de sorte qu’il y a lieu de retenir qu’un tel comportement illustre un défaut manifeste d’intégration dans le pays2 au sens de l’article 22, 3° de la loi du 22 février 1968. Partant c’est à bon droit que le ministre a refusé l’octroi de la nationalité au demandeur sur base dudit article 22, 3° de la loi du 22 février 1968.
2 trib. adm. 15 décembre 2010, n° 26759 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu Cette conclusion n’est pas énervée par les affirmations non autrement étayées du demandeur, d’une part, quant à sa conduite au volant qui explique qu’il «n’a subi que 2 condamnations du tribunal correctionnel pour excès de vitesse et une conduite en état d’ivresse. Qu’[il] s’est repenti et a regretté amèrement les faits qui lui ont été reprochés. Que depuis la commission des erreurs de jeunesses, il adopte au quotidien une conduite exemplaire » et, d’autre part, quant à son comportement général en ce qu’il conteste « énergiquement (…) [l]’accusation [d’avoir fait des déclarations dénigrant les citoyens luxembourgeois] alors qu’[il] n’a jamais tenu de tels propos. Qu’à l’époque des faits, il ne maîtrisait pas parfaitement la langue luxembourgeoise de sorte qu’il y a eu méprise sur les propos tenus par le requérant » dès lors qu’il y a lieu de relever que ces dernières affirmations non autrement étayées ont pour objet de contester les propos tenus par le demandeur tels que consignés dans un procès-verbal de police, lesquels ne peuvent être mis en doute que par le biais d’une procédure en inscription en faux dont il n’est pas rapporté qu’elle ait été introduite.
Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours en réformation pour n’être fondé dans aucun de ses moyens.
Force est de constater que la partie demanderesse ne justifie ni la nature ni les motifs de sa demande d’allocation d’une indemnité de procédure dont elle ne chiffre pas le montant. Or, une demande d'allocation d'une indemnité de procédure qui omet de spécifier concrètement la nature des sommes exposées non comprises dans les dépens et qui ne précise pas concrètement en quoi il serait inéquitable de laisser des frais non répétibles à charge de la partie gagnante est à rejeter, la simple référence à l'article de loi applicable n’étant pas suffisante à cet égard3.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
reçoit en la forme le recours en réformation introduit à titre principal ;
au fond, le déclare non justifié et en déboute ;
dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours en annulation introduit à titre subsidiaire ;
rejette la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure formulée par la partie demanderesse condamne le demandeur aux frais.
3 voir Cour adm. 1er juillet 1997, n° 9891C du rôle, Pas. adm. 2011, V° Procédure contentieuse, Frais, n°850 Ainsi jugé par :
Carlo Schockweiler, premier vice-président, Anne Gosset, juge, Paul Nourissier, juge, et lu à l’audience publique du 8 août 2012 par le premier vice-président, en présence du greffier Judith Tagliaferri.
s. Judith Tagliaferri s. Carlo Schockweiler Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 09.08.2012 Le Greffier du Tribunal administratif 9