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18/04/2012 | LUXEMBOURG | N°28095

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 18 avril 2012, 28095


Tribunal administratif N° 28095 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 mars 2011 3e chambre Audience publique du 18 avril 2012 Recours formé par Madame …, … contre des décisions de l’Université du Luxembourg en matière de contestation des résultats d’examen

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 28095 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 9 mars 2011 par Maître Jonathan Michel, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocat

s à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation ...

Tribunal administratif N° 28095 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 mars 2011 3e chambre Audience publique du 18 avril 2012 Recours formé par Madame …, … contre des décisions de l’Université du Luxembourg en matière de contestation des résultats d’examen

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 28095 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 9 mars 2011 par Maître Jonathan Michel, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation :

- d’une décision du jury d’examen portant refus de validation des cours III et IV du Master en droit européen LL.M. - filière contentieux européen, Semestre 3, dans le cadre de la session d’examen 2009-2010 organisée par l’Université du Luxembourg, à savoir le cours III intitulé « Principes généraux, Droits fondamentaux » et le cours IV intitulé « Procédures et Contentieux en matières spécifiques » ;

- d’une décision de refus de délivrance du Master en droit européen LL.M. - filière contentieux européen qui en découle ;

- des décisions respectives d'attribuer la note de 9 sur 20 à l'examen du cours III intitulé « Principes généraux, Droits fondamentaux » et la note de 5 sur 20 à l'examen du cours IV intitulé « Procédures et Contentieux des matières spécifiques » ;

- d’une décision du 5 juillet 2010 du doyen de la Faculté de Droit, d’Economie et de Finance de l’Université du Luxembourg portant rejet de sa contestation introduite par courrier du 30 avril 2010 ;

- d’une décision du conseil universitaire, non autrement précisée quant à son contenu et sa date, rejetant en degré d’appel sa réclamation, telle que matérialisée par le courrier du 9 décembre 2010 du recteur de l’Université du Luxembourg ; et, à toutes fins utiles - d’une décision du 9 décembre 2010 du recteur de l’Université du Luxembourg ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Frank Schaal, demeurant à Luxembourg, du 21 mars 2011, portant signification de ce recours à l’Université du Luxembourg, établissement public d’enseignement supérieur, représenté par son recteur actuellement en fonction, établie et ayant son siège à L-1511 Luxembourg, 162A, Avenue de la Faïencerie ;

Vu la constitution d’avocat de Maître Sanae Igri, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, déposée au greffe du tribunal d’administratif en date du 25 mai 2011, au nom de l’Université du Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 21 juin 2011 par Maître Sanae Igri au nom de l’Université du Luxembourg, ledit mémoire ayant été notifié le même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de la demanderesse ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment les décisions critiquées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jonathan Michel et Maître Sanae Igri en leurs plaidoiries respectives en l’audience publique du 15 février 2012 ;

Vu les pièces supplémentaires déposées, à la demande du tribunal formulée à l’audience publique du 15 février 2012, au greffe du tribunal administratif le 2 avril 2012 par Maître Igri Sanae pour compte de l’Université du Luxembourg.

Madame …, inscrite à l’Université du Luxembourg en deuxième année d’études du Master en droit européen LL.M. - filière contentieux européen, Semestre 3, passa le 18 janvier 2010 l'examen du cours III intitulé « Principes généraux, Droits fondamentaux », de la session d’examen 2009-2010. Le 21 janvier 2010, Madame … passa l'examen du module IV intitulé « Procédures et Contentieux des matières spécifiques ».

Par courriel du 4 mars 2010, Madame … fut informée de la date de l’examen de rattrapage prévu pour le 17 juin 2010.

Le 17 mars 2010, l’intéressée s’adressa au Professeur … afin d’obtenir communication des copies d’examen corrigées des cours III et IV en vue de l’introduction d’une réclamation.

Le Professeur … lui répondit, par courrier du 18 mars 2010, qu’elle pouvait obtenir communication des copies d’examen annotées et il lui proposa une entrevue afin de discuter des résultats des examens.

Par courrier du 30 avril 2010, Madame … contesta auprès du doyen de la Faculté de Droit, d'Economie et de Finance de l'Université, les notes ainsi obtenues.

Par courriel du 30 mai 2010, l’intéressée s’enquit auprès du doyen de la prédite faculté si son absence de réponse à sa contestation valait implicitement son rejet.

Le 17 juin 2010, la session de rattrapage eut lieu sans que Madame … y participe pour des raisons de santé, telles que attestées par un certificat médical du 14 juin 2010.

Par courrier du 5 juillet 2010, le doyen de la Faculté de Droit, d'Economie et de Finance de l'Université s’adressa à Madame … en les termes suivants :

« Je fais suite à votre réclamation relative à la note qui vous a été attribuée pour les épreuves des examens de cours III et IV du Master en Droit européen, spécialisation contentieux européen.

Renseignement pris auprès du Professeur … qui dirige le Master en Droit Européen, je vous signale que les écrits que vous avez soumis pour ces épreuves ont fait l’objet d’une double correction.

J’ai appris également que vous avez pu consulter les écrits annotés par les deux correcteurs et que le Professeur … en charge des cours concernés vous a proposé une entrevue pour vous donner toutes les explications souhaitées sur lesdites corrections, proposition que vous n’avez pas jugé utile de saisir.

Dans ces conditions, je ne vois pas de raison de soumettre vos épreuves à une nouvelle correction.

Je vous rappelle cependant la disponibilité du Professeur … pour vous éclairer sur les notes qui vous ont été attribuées. » D’après le relevé des notes de la session d’examens été 2009-2010 du 12 juillet 2010, les cours III et IV furent renseignés comme non évalués, ce qui équivaut à l'échec des examens en cause et à la non-délivrance du Master en droit européen LL.M. - filière contentieux européen.

Par courrier du 26 août 2010, Madame … introduisit une réclamation auprès du recteur de l'Université, dont le vice-recteur académique accusa réception le 27 août 2010.

Le 12 novembre 2010, la commission des litiges saisie par courrier du 31 août 2010 du vice-recteur académique pour le compte du recteur, émit son avis dans lequel elle recommanda de rejeter la réclamation de Madame ….

Par courrier du 25 novembre 2010, le recteur de l’Université informa Madame … que le conseil universitaire, en sa séance du 22 novembre 2010, s’était rallié aux recommandations de la commission des litiges et en adoptait les motifs et qu’il avait pris la décision de ne pas donner de suite favorable à sa réclamation.

Par courrier recommandé du 9 décembre 2010, le recteur de l’Université du Luxembourg informa Madame … que le conseil universitaire avait rejeté sa réclamation tendant à ce qu’il soit procédé à une nouvelle correction de ses copies d’épreuves. Cette décision est libellée comme suit :

« Je fais suite à votre recours gracieux visant une nouvelle correction de vos copies d’examens relatifs aux cours III et IV du Master en Droit européen, spécialisation contentieux européen.

Un examen attentif de votre dossier fait apparaître que - vos copies d’examen ont fait l’objet d’une double correction, - vous avez pu consulter les écrits annotés par les deux correcteurs, - vous avez décliné l’entrevue proposée par un professeur de la formation concernée visant à obtenir les explications souhaitées sur les corrections concernées et éventuellement vous préparer à la session de rattrapage, - vous ne vous êtes pas présentée à l’examen de rattrapage relatif aux cours III et IV, organisé par la formation concernée.

Il ressort de ce qui précède que la formation concernée a mis en place une procédure d’examen équitable et objective fondée sur le principe de la double correction par deux différents professeurs. Par ailleurs, en ne vous présentant pas aux examens de rattrapage, vous avez manqué une chance d’améliorer les notes contestées, la présentation d’un certificat médical pour justifier votre absence à cet examen n’étant malheureusement pas de nature à changer cette situation. En effet, sur ce dernier point, vous comprendrez que l’examen de rattrapage constituant déjà une seconde chance, la formation concernée n’est pas en mesure d’organiser un examen individualisé pour les personnes absentes le jour officiel de l’examen de rattrapage.

J’ai le regret de vous informer que le conseil universitaire, sur la base de l’ensemble de ces éléments, a décidé de ne pas répondre favorablement à votre demande visant l’organisation d’une nouvelle correction de vos copies. (…) » Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 9 mars 2011, Madame … a introduit un recours en réformation, sinon en annulation contre 1) la décision du jury d'examen portant refus de validation des cours III et IV du Master en droit européen LL.M. -

filière contentieux européen, Semestre 3, dans le cadre de la session d'examens 2009-2010 organisée par l'Université du Luxembourg, à savoir le cours III intitulé « Principes généraux, Droits fondamentaux » et le cours IV intitulé « Procédures et Contentieux des matières spécifiques » ; 2) la décision de refus de délivrance du grade de Master en droit européen LL.M. - filière contentieux européen qui en découle ; 3) les décisions respectives d'attribuer la note de 9 sur 20 à l'examen du cours III intitulé « Principes généraux, Droits fondamentaux » et la note de 5 sur 20 à l'examen du cours IV intitulé « Procédures et Contentieux des matières spécifiques » ; 4) la décision du 5 juillet 2010 du doyen de la Faculté de Droit, d'Economie et de Finance de l'Université du Luxembourg portant rejet de sa contestation du 30 avril 2010 ;

5) la décision du 9 décembre 2010 du conseil universitaire, non autrement précisée quant à son contenu et sa date, portant rejet de sa réclamation ; et 6), à toutes fins utiles, contre la décision du 9 décembre 2010 du recteur de l'Université du Luxembourg.

Aucune disposition ne prévoyant un recours au fond en la présente matière, seul un recours en annulation a pu être introduit contre les décisions litigieuses. Le tribunal doit partant se déclarer incompétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal.

Quant à la recevabilité du recours subsidiaire en annulation, la partie défenderesse soulève en premier lieu l’irrecevabilité du recours pour libellé obscur. Elle fait valoir qu’il ne ressortirait pas clairement du dispositif de la requête introductive d’instance quelles seraient les décisions contre lesquelles la demanderesse aurait entendu diriger son recours, alors qu’elle demanderait, avant tout autre progrès en cause, au tribunal d’enjoindre à l'Université du Luxembourg de verser l'ensemble des pièces relatives aux examens litigieux dans un délai de quinze jours à compter du jugement avant dire droit à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard. En outre, la demanderesse invoquerait des arguments « à tort et à travers » sans préciser par rapport à quelles décisions elle invoquerait ses moyens.

Toute partie demanderesse se doit de préciser, de la manière la plus détaillée possible et tout en tenant compte des informations qu'elle peut recueillir, l'objet de son recours.

S’il est certes vrai que l’objet du recours est celui qui est circonscrit au dispositif de la requête introductive d’instance et qu’en l’espèce, la demanderesse se borne au dispositif de la requête à solliciter la réformation, sinon l’annulation des « décisions entreprises », il n’en demeure pas moins que la demanderesse a clairement indiqué, à la première page de sa requête, les décisions visées par son recours, de sorte qu’il ne saurait y avoir de doute quant à l’objet exact du recours et plus particulièrement quant aux décisions ainsi visées par la demanderesse à travers son recours. Le seul fait qu’elle demande également, au dispositif de sa requête, avant tout autre progrès en cause, au tribunal d’enjoindre à la partie défenderesse de verser l’intégralité du dossier administratif, dans le délai de quinze jours à compter du jugement avant dire droit à intervenir et sous astreinte, ne permet pas de retenir que la requête introductive d’instance ne soit pas suffisamment précise.

Quant à l’exposé des moyens, il suffit aux termes de l’article 1er, alinéa 2 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives que cet exposé soit sommaire, tandis que l’article 29 de la même loi prévoit que l’inobservation des règles de procédure n’entraîne l’irrecevabilité de la demande que si elle a pour effet de porter effectivement atteinte aux droits de la défense.

Or, force est au tribunal de constater que la demanderesse a indiqué, dans sa requête introductive d’instance, contre quelles décisions elle invoquait ses différents moyens. Ce constat est encore corroboré par le fait que la partie défenderesse a su prendre position, en connaissance de cause, dans son mémoire en réponse, par rapport aux différents moyens invoqués par la demanderesse.

Il s’ensuit que l'exception obscuri libelli ne saurait être accueillie.

La partie défenderesse conclut ensuite à l’irrecevabilité du recours en annulation en tant qu’il est dirigé contre la décision du jury d'examen de refus de validation des cours III et IV du Master en droit européen LL.M. - filière contentieux européen, Semestre 3, dans le cadre de la session d'examens 2009-2010, à savoir le cours III intitulé « Principes généraux, Droits fondamentaux » et le cours IV intitulé « Procédures et Contentieux des matières spécifiques », contre les décisions respectives d'attribuer la note de 9 sur 20 à l'examen du cours III et la note de 5 sur 20 à l'examen du cours IV, et encore contre le courrier du doyen de la Faculté de Droit, d'Economie et de Finance de l'Université du Luxembourg du 5 juillet 2010, au motif que ni les évaluations, ni le courrier en question ne constitueraient des décisions susceptibles de recours, mais des actes préparatoires à la décision finale qui incomberait au seul recteur de l'Université.

L'acte administratif susceptible de faire l'objet d'un recours contentieux doit constituer une véritable décision de nature à faire grief, c'est-à-dire un acte susceptible de produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle et patrimoniale de celui qui réclame. N'ont pas cette qualité de décision faisant grief, comme n'étant pas destinées à produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, les informations données par l'administration, tout comme les déclarations d'intention ou les actes préparatoires d'une décision (trib. adm. 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, Pas. adm. 2011, V° Actes administratifs, n° 43).

Il convient tout d’abord de relever que la décision du jury d’examen de refus de validation des cours III et IV du Master en droit européen LL.M. - filière contentieux européen, Semestre 3, dans le cadre de la session d'examens 2009-2010, ainsi que les décisions respectives d'attribuer la note de 9 sur 20 à l'examen du cours III et la note de 5 sur 20 à l'examen du cours IV n’ont pas été versées en cause. Ce constat ne porte cependant pas à conséquence, étant donné que l’existence de ces décisions n’a pas été remise en cause par les parties.

Cela étant dit, c’est à tort que la partie défenderesse soutient en l’espèce que les actes précités ne constitueraient pas des décisions administratives susceptibles de recours. En effet, la délibération du jury d’examen portant refus de valider les cours III et IV du Master en droit européen LL.M., filière contentieux européen, ainsi que les décisions du jury d’examen d’attribuer les notes de 9 sur 20 et de 5 sur 20 aux épreuves d’examen des cours III et IV du Master en droit européen revêtent bien le caractère de décisions administratives susceptibles de faire grief, destinées à produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, dès lors qu’elles comportent des éléments décisionnels propres et entraînent des conséquences préjudiciables pour la demanderesse.

Quant à la lettre déférée du 5 juillet 2010 du doyen de la Faculté de Droit, d’Economie et de Finance, c’est à travers cette lettre, portant refus de faire droit à la demande de Madame … tendant à ce qu’il soit procédé à une nouvelle correction de ses copies d’examen, que le doyen a statué, en première instance, sur la contestation formée par la demanderesse contre les notes obtenues aux examens en question, de sorte que ladite lettre est également à considérer comme une décision administrative faisant grief et partant susceptible de recours.

Cette conclusion n’est pas énervée par l’argumentation de la partie défenderesse, selon laquelle ces décisions constitueraient uniquement des actes préparatoires qui ne feraient que préparer la décision finale qui incomberait au recteur de l’Université conformément aux dispositions du Règlement d’ordre intérieur de l’Université du Luxembourg, ci-après désigné par le « ROI ». En effet, les prédites délibérations du jury d’examen constituent des décisions finales, le doyen et le recteur de l’Université n’intervenant que sur recours pour régler une contestation.

Le moyen d’irrecevabilité afférent est partant à rejeter comme non fondé.

Il convient encore de relever dans ce contexte que si la demanderesse déclare aussi diriger son recours contre une prétendue décision du 9 décembre 2010 du recteur de l’Université, le recours est cependant à déclarer irrecevable dans cette mesure pour défaut d’objet, étant donné qu’à travers la lettre déférée du 9 décembre 2010, le recteur de l’Université, pris en sa qualité de président du conseil universitaire, n’a fait que transmettre à la demanderesse la décision du conseil universitaire rejetant sa réclamation, conformément à l’article VII.4.106 du ROI (pris dans sa version, entrée en vigueur au second semestre 2010, mais qui correspond, d’après les déclarations non contestées de la demanderesse, à celle en vigueur au moment de la prise des décisions litigieuses, seule la numérotation des articles ayant changé).

La partie défenderesse soutient encore que le recours en annulation serait irrecevable en ce qu’il serait tardif, en se prévalant de l'article 13 de la loi précitée du 21 juin 1999.

S’il est vrai que cette disposition prévoit que le recours au tribunal n'est plus recevable après trois mois du jour où la décision a été notifiée au requérant ou du jour où le requérant a pu en prendre connaissance, il n’en demeure pas moins que les décisions déférées, à l’exception de la décision du conseil universitaire telle que matérialisée par le courrier du 9 décembre 2010 du recteur de l’Université, ne contiennent pas l’indication des voies et du délai de recours, de sorte qu’elles n’ont ainsi pas acquis un caractère définitif. En effet, à défaut d’indication des voies et du délai de recours, aucun délai n’a pu commencer à courir. Il s’ensuit que le moyen tiré de la tardivité du recours en ce qu’il est dirigé contre ces décisions ne peut qu’être écarté. Quant au recours en tant qu’il est dirigé contre la décision du conseil universitaire, telle que matérialisée par le courrier du recteur de l’Université du 9 décembre 2010, le recours a été déposé au greffe du tribunal administratif le 9 mars 2011, de sorte qu’il a été introduit dans le délai légal de trois mois.

Le moyen d’irrecevabilité tiré de la tardiveté du recours laisse partant d’être fondé.

Il suit de ce qui précède que le recours en annulation est irrecevable en tant qu’il est dirigé contre une prétendue décision du 9 décembre 2010 du recteur de l’Université, et est à déclarer recevable pour le surplus.

Le tribunal n’étant pas tenu par l’ordre dans lequel les moyens lui sont présentés par une partie demanderesse, mais dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, sinon de la logique inhérente aux éléments de fait et de droit touchés par les moyens soulevés, peut les traiter suivant un ordre différent, il convient en premier lieu d’examiner le moyen tiré d’une violation de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après dénommé « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », étant donné que le contrôle de la légalité externe doit précéder celui de la légalité interne.

A ce sujet, la demanderesse reproche à la partie défenderesse de ne pas avoir répondu à ses arguments et griefs contenus respectivement dans sa contestation du 30 avril 2010 et dans sa réclamation du 26 août 2010 concernant le résultat de ses épreuves d’examen. Cette absence de toute motivation par rapport à l'ensemble des griefs à la base de ses contestations, tels qu'exposés pourtant à deux reprises devant deux instances différentes, constituerait une absence totale de motivation des actes attaqués, de sorte que ces derniers devraient encourir l'annulation à ce titre. A tout le moins, il y aurait lieu de considérer que ces décisions seraient dépourvues de motivation suffisante, alors qu'elles seraient fondées sur des considérations qui ne les justifieraient pas. Ainsi, le fait qu’elle aurait pu consulter ses copies d’examen corrigées et que celles-ci auraient été soumises à une double correction, mais dans des conditions qu’elle critique, ne justifierait pas le rejet pur et simple de ses contestations. De même, une entrevue informelle, se déroulant de manière orale avec le professeur concerné, ne serait pas une étape prévue dans la procédure de contestation mise en place par le ROI, de sorte que l'Université ne pourrait pas légitimement fonder ses décisions sur l'absence de volonté dans son chef de s'y soumettre.

La partie défenderesse rétorque que l'obtention du Master en droit européen LL.M.-

filière contentieux européen serait soumise à la condition de validation des épreuves écrites, que la demanderesse aurait échoué aux épreuves d’examen écrites basées sur des critères d'évaluation sérieux, qu’elle aurait refusé toute conciliation et qu’elle n'aurait pas saisi sa chance de pouvoir améliorer ses résultats à la session de rattrapage. Elle aurait par ailleurs pu librement consulter ses copies d'examen et émettre des griefs qui auraient été traités dans le cadre du courrier du doyen du 5 juillet 2010 et dans la décision du recteur du 9 décembre 2010. Elle conclut partant au rejet du moyen de la demanderesse.

Aux termes de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, toute décision administrative doit être légalement motivée et la décision doit formellement indiquer les motifs par l'énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base, ceci dans l'hypothèse notamment où elle refuse de faire droit à la demande de l'intéressé ou si elle intervient sur recours gracieux, hiérarchique ou de tutelle.

La sanction d’une absence de motivation d’une décision administrative ne consiste cependant que dans la suspension des délais de recours. La décision reste valable et l’administration peut produire ou compléter ses motifs postérieurement et même pour la première fois en cours d’instance.

Il convient encore de rappeler que dans le cadre de l’examen de ce moyen concernant la motivation formelle des décisions, le tribunal ne saurait examiner les critiques de la demanderesse sur la motivation matérielle, qui seront examinées plus loin dans le cadre de l’analyse au fond des décisions déférées, mais limitera son examen au volet de l’obligation de motivation formelle des décisions.

Quant à la décision du doyen de la Faculté de Droit, d’Economie et de Finance du 5 juillet 2010 et à celle du conseil universitaire, telle que matérialisée par le courrier du recteur de l’Université du 9 décembre 2010, il y a lieu de retenir que dans ces décisions, dont le contenu est repris ci-dessus, les autorités académiques ont indiqué à la demanderesse, à suffisance de droit, les raisons pour lesquelles elles ont refusé de faire droit à sa demande tendant à ce qu’il soit procédé à une nouvelle correction et les raisons pour lesquelles, elles ont rejeté sa réclamation. S’il est certes vrai que ni le doyen, ni le recteur n’ont pris position par rapport aux reproches précis de la demanderesse en relation avec le caractère justifié de la notation de ses épreuves, ils ont toutefois clairement exprimé leurs raisons pour lesquelles ils ont estimé que la demanderesse avait reçu toutes les chances pour améliorer ses notes, chances qu’elle n’a pas saisies.

En ce qui concerne les décisions du jury d’examen, et notamment les notes d’examen, l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, précité, ne trouve pas application. En effet, il convient de retenir que la note d’examen suffit à titre de motivation formelle, une note d’examen renfermant en règle générale sa justification en soi.

Le moyen tiré du défaut de motivation laisse partant d’être fondé.

Au titre de la légalité externe des décisions déférées, il convient ensuite d’examiner le moyen tiré de la non-communication de l’avis de la commission des litiges. La demanderesse fait valoir qu’il ne serait nulle part fait référence à l’avis de cette commission, de sorte qu’il ne serait pas certain que cet avis ait été pris. Elle conclut partant à l’annulation de la décision du 9 décembre 2010. Par ailleurs, elle soutient que cet avis aurait dû lui être communiqué avec la décision du 9 décembre 2010. Elle conclut également que la décision attaquée encourrait l'annulation pour absence de motivation suffisante, dès lors qu’elle n’aurait pas eu connaissance de l'ensemble des motifs réels gisant à la base de cette décision telle que notifiée le 9 décembre 2010. Elle ajoute encore que la notification spontanée de ces éléments cruciaux, conjointement au courrier du 9 décembre 2010, se serait imposée encore pour des motifs fondamentaux de transparence administrative, la jurisprudence en la matière étant trop large. S’y ajouterait une atteinte patente aux principes du respect des droits de la défense et de l'égalité des armes.

Dans ce contexte, la demanderesse se plaint encore de ce que le recteur se serait uniquement référé dans son courrier du 9 décembre 2010 à la décision du conseil universitaire, sans que celle-ci ne soit jointe audit courrier. Tel que cela a déjà été retenu ci-

dessus, il appartient en effet, en vertu de l'article VII.4.106 du ROI, au conseil universitaire de statuer sur la réclamation, mais c’est le recteur qui transmet à l’étudiant la décision du conseil universitaire.

En l’espèce, il ressort clairement du libellé de la lettre du 9 décembre 2010, repris ci-

dessus, que le recteur n’a fait qu’informer la demanderesse de la décision du conseil universitaire sur sa réclamation. Il y a dès lors lieu de retenir que la lettre du recteur véhicule la décision du conseil universitaire. Le moyen tiré de ce que la décision incombant au conseil universitaire aurait été prise par le recteur, et donc par une autorité incompétente, laisse partant d’être fondé.

Aux termes de l’article VII.4.104 du ROI, la commission des litiges de l’Université examine la réclamation et elle informe le recteur de son avis sur la réclamation. L’article VII.4.106 du ROI prévoit que le recteur informe le conseil universitaire de l’avis rendu par la commission des litiges et que le conseil universitaire statue sur la réclamation.

Il ressort des pièces supplémentaires déposées, à la demande du tribunal, par la partie défenderesse au greffe le 2 avril 2012, que la commission des litiges de l’Université a effectivement été saisie par le recteur le 31 août 2010 et qu’elle a émis son avis le 12 novembre 2010.

Il échet de relever qu’aucune disposition de la procédure administrative non contentieuse n’impose à une autorité administrative de communiquer ses avis en toute hypothèse aux administrés concernés. Il ne saurait en être autrement que dans des matières spéciales où une disposition légale ou réglementaire prescrit une telle communication. Ainsi, à défaut d’un texte l’y obligeant expressément, l’administration n’est pas tenue de communiquer les avis recueillis aux personnes concernées, en l’absence d’une demande de communication de l’intéressé, à moins que dans sa décision, elle ne renvoie à la motivation contenue dans l’avis.

En l’espèce, il n’existe aucune disposition suivant laquelle le conseil universitaire ou le recteur doit d’office, sans demande de communication de la part de l’étudiant, communiquer l’avis de la commission des litiges sur lequel le conseil universitaire s’est basé pour prendre la décision sur réclamation afférente. Par ailleurs, une telle obligation n’existe pas non plus dans son chef en ce que dans la décision litigieuse du 9 décembre 2010, il n’a pas expressément été renvoyé à la motivation contenue dans l’avis de la commission des litiges du 12 novembre 2010. Il suit de ce qui précède qu’en l’espèce, il n’y avait aucune obligation dans le chef du conseil universitaire ou du recteur de communiquer l’avis en question à la demanderesse. Par suite, une violation du principe de transparence administrative ne saurait être retenue en l’espèce.

Quant à une violation des principes du respect des droits de la défense et de l'égalité des armes, force est de constater que la demanderesse reconnaît elle-même qu’elle n’a pas demandé communication aux autorités académiques concernées de l’avis de la commission des litiges. Par ailleurs, l’avis a finalement été produit par la partie défenderesse en cours du délibéré, sur demande expresse du tribunal, de sorte que la demanderesse aurait pu encore demander la rupture du délibéré pour en débattre contradictoirement, ce qu’elle a cependant omis de faire.

Il suit de ce qui précède que le moyen tiré d’une violation de l’article VII.4.106 du ROI et des principes du respect des droits de la défense et de l’égalité des armes laisse d’être fondé.

Quant à la légalité interne des décisions déférées, la demanderesse soutient que la règle de l’anonymat des copies d’épreuves n’aurait pas été respectée. Elle affirme qu’à l’instar des autres étudiants, elle aurait dû indiquer sur sa copie d’examen son nom, prénom et numéro de candidat et ce, en violation de l'article VII.1.102 du ROI (anciennement, Annexe 1 du ROI intitulée « Charte des droits et devoirs de l'étudiant »). Elle explique qu’elle aurait activement participé aux cours et fait preuve d'esprit critique par rapport à la matière enseignée, ce qui n'aurait cependant manifestement pas plu au Professeur …, l'enseignant en charge des deux matières. Elle estime que le fait que les deux épreuves litigieuses ne soient pas anonymes constituerait une violation flagrante de la garantie accordée par le ROI aux étudiants afin de permettre une évaluation équitable et objective de leurs examens, sans que l'aspect purement personnel des relations entre l'étudiant et l'enseignant puisse prévaloir.

La demanderesse soutient ensuite que la double correction des épreuves n’aurait pas été faite sur copie séparée, de sorte que le but d'objectivité, qui est censé être visé par cette mesure, n'aurait pas été atteint.

En troisième lieu, la demanderesse donne encore à considérer que les copies d’examen litigieuses auraient été corrigées au crayon, ce qui expliquerait le caractère quasiment illisible des annotations figurant sur les copies versées à l'appui de son recours. Elle estime que le fait de corriger des examens de fin d'année au crayon témoignerait en lui-même d'une pratique à tout le moins curieuse voire douteuse.

La partie défenderesse rétorque que la demanderesse n’aurait pas rapporté la preuve de ce que l’évaluation de ses épreuves d’examen n’aurait pas été équitable et objective. Elle entend réfuter toute accusation portée contre le Professeur …, la demanderesse se bornant à des allégations. Elle affirme ensuite que la demanderesse aurait fait l’objet d’une double correction afin de lui garantir une procédure d'examen équitable et objective fondée sur le principe de la double correction par deux professeurs. En outre, le professeur concerné aurait proposé à la demanderesse un entretien afin de lui expliquer ses erreurs, les attentes du professeur enseignant la discipline et les mécanismes à acquérir pour la session d'examen de rattrapage afin d'améliorer ses résultats, mais qu’elle aurait décliné cette proposition et ne se serait de surcroît pas présentée à la session de rattrapage, qui serait une série d'examens prévus pour permettre aux étudiants de maximiser les chances de réussite aux examens et de validation de l'année scolaire. Elle souligne encore que les copies litigieuses auraient été corrigées par deux correcteurs différents, chacun à part de l'autre, la demanderesse restant en défaut de démontrer en quoi la correction des copies par un premier professeur aurait pu influencer à l'avance le second professeur. Par ailleurs, le fait de corriger des examens de fin d'année au crayon ne serait pas en lui-même douteux.

Aux termes de l’article VII.1.102 du ROI, « l’étudiant a le droit : - à une correction anonyme de ses copies d’examen écrites » et « à une évaluation équitable et objective de son travail, de ses examens et prestations ».

La règle de l’anonymat des copies lors des épreuves écrites est censée garantir l’impartialité du jury d’examen ainsi que le principe d’égalité de traitement des étudiants.

En l’espèce, il n’est pas contesté en cause que les copies d’examen écrites des cours III et IV de la demanderesse n’ont pas été anonymes, en ce que ces copies portent mention du nom, prénom et numéro de la demanderesse. Il convient toutefois de retenir que la seule circonstance que les copies d’examens n’aient pas été anonymes ne suffit pas à établir que la demanderesse aurait été privée des garanties d’impartialité auxquelles tout étudiant est en droit de prétendre et que les résultats de l’examen auraient été de ce fait viciés. Les seules allégations de la demanderesse, vagues et allusives, selon lesquelles le Professeur …, n’aurait pas été impartial à son égard, ne sont pas suffisantes pour retenir une méconnaissance du principe d’impartialité des correcteurs en l’espèce.

Quant au reproche de la demanderesse en ce que les copies d’examen n’auraient pas été soumises à une double correction sur copie séparée, il convient de relever que la demanderesse ne soutient pas que le principe de la double correction des épreuves aurait été méconnu en l’espèce, mais son moyen consiste à affirmer que les deux correcteurs n’auraient pas évalué ses copies d’examen sur copie séparée.

Or, aucune disposition légale ou règlementaire applicable en l’espèce, ni aucune disposition du ROI ne prévoit que les copies d’examen universitaire doivent faire l’objet d’une double correction sur copie séparée.

En l’espèce, il ne ressort pas des pièces versées en cause et notamment des copies d’examen produites par la demanderesse si celles-ci ont fait l’objet d’une double correction sur copie séparée, c'est-à-dire si chaque correcteur a procédé à son évaluation sur une copie vierge ou si les deux correcteurs ont procédé à leur évaluation sur la même copie d’examen.

La partie défenderesse se borne à affirmer que les copies d’examen auraient été « corrigées par deux correcteurs différents, chacun à part de l’autre ».

Force est cependant au tribunal de retenir pour établi que les copies d’examen de la demanderesse ont été soumises à une double correction, c'est-à-dire qu’elles ont été corrigées par deux correcteurs.

Dès lors qu’aucune disposition applicable en l’espèce n’exige que la double correction soit faite sur copie séparée et que la demanderesse reste par ailleurs en défaut de démontrer que la correction de l’un des correcteurs aurait pu influencer d’une quelconque manière le second correcteur, le moyen de la demanderesse est à rejeter comme non fondé.

Cette conclusion n’est pas énervée par le jugement du tribunal administratif du 6 février 2004 (n° 17148 du rôle) cité par la demanderesse, étant donné que la solution y retenue par le tribunal n’est pas transposable au cas d’espèce. En effet, dans cette affaire, contrairement à la présente, une disposition règlementaire prévoyait explicitement que la double correction se fasse séparément, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Quant au fait non contesté que la correction des épreuves d’examen ait eu lieu au crayon, cet élément, à défaut de disposition contraire n’est pas de nature à entacher les corrections des épreuves d’examen de la demanderesse d’un vice.

Ces moyens tirés de l’irrégularité de la correction des épreuves d’examen de la demanderesse sont partant à rejeter comme n’étant pas fondés.

La demanderesse invoque ensuite un moyen tiré d’une violation de l’article VII.1.102 du ROI et plus particulièrement du droit de l’étudiant de contester les résultats d’évaluation des examens et prestations devant une instance mandatée à cet effet. Elle fait valoir qu'outre d’avoir violé le ROI, les autorités académiques ne lui auraient pas assuré un traitement de ses contestations conforme au principe de bonne administration, de sorte que la procédure interne à l'Université serait viciée de ce chef. Elle reproche ainsi au doyen d’avoir été saisi de ses contestations dès le 5 mai 2010 et alors que l'assistante du doyen lui aurait confirmé que ce dernier lui ferait part de sa décision pour le 7 juin 2010 au plus tard, soit dix jours avant l'organisation de l'examen de rattrapage prévu pour le 17 juin 2010, ce ne serait que par courrier du 5 juillet 2010 que le doyen l’aurait informée de sa décision de refus, c’est-à-dire à un moment où l'année académique 2009-2010 était déjà terminée, soit trois mois après le dépôt de la contestation. De même, il aurait fallu plus de trois mois au conseil universitaire, siégeant comme instance d’appel, saisi par courrier du 27 août 2010 pour rejeter sa réclamation. Elle en conclut que les autorités académiques auraient pris sept mois pour vider sa contestation des résultats d’examen du mois de janvier 2010. Elle ajoute qu’au vu de la motivation lapidaire des décisions de refus, un aussi long délai d’instruction ne serait aucunement justifié. Elle précise encore que pendant ce délai considérable, ses études et leurs résultats auraient être tenus de manière inadmissible en suspens, alors que le droit de déposer une réclamation serait garanti par le ROI et que ce recours interne, afin de garder un quelconque effet utile aurait dû être toisé au moins avant la session de rattrapage sous peine d'être vidé de tout son sens, ce qui n'aurait pas été le cas en l'espèce. Elle en conclut qu’elle aurait fait l'objet d'une sanction supplémentaire dans le traitement de ses contestations pour avoir tenté de faire valoir des droits qui lui seraient pourtant reconnus.

En ordre subsidiaire, la demanderesse soutient encore qu’il ressortirait des développements qui précèdent que les décisions attaquées reposeraient sur des mobiles étrangers à ceux qu'aurait pris en considération une autre entité administrative placée dans les mêmes circonstances de fait et de lieu. En effet, au lieu de rectifier les irrégularités survenues dans le cadre des examens litigieux et leur correction objectivement erronée, tant le doyen que le conseil universitaire ainsi que le recteur se seraient contentés de rejeter ses réclamations d'une manière qui reviendrait à vider la procédure de réclamation prévue par le ROI en lui enlevant tout sens et tout effet utile pour l'étudiant concerné. Les organes censés assurer le respect de la loi et du ROI, à savoir, le recteur et le doyen, mais aussi le jury d'examen et le conseil universitaire et, en particulier, le jury d'examen qui, suivant l'article 12 du règlement grand-ducal du 22 mai 2006 relatif à l'obtention du grade de bachelor et du grade de master de l’Université de Luxembourg, serait chargé de valider le bon déroulement du contrôle des connaissances en veillant à cette fin au respect des dispositions légales et réglementaires, auraient tous failli à leur mission de contrôle. Un tel dysfonctionnement collectif démontrerait que les décisions attaquées auraient été prises non pas dans le but de lui assurer l'exercice libre et effectif de son droit de recours interne à l'Université mais, au contraire, de l'en dissuader, et par voie de conséquence tout autre étudiant, ainsi qu'en attesterait notamment la durée de la procédure interne excédant largement un délai raisonnable (huit mois au total) et le fait de rendre une décision sur réclamation postérieurement à la date fixée pour l'examen de rattrapage. Elle conclut partant à l’annulation des décisions attaquées pour détournement de pouvoir.

La partie défenderesse rétorque que s'il était exact qu'aux termes des dispositions du ROI, le recteur devrait veiller à la mise en application du ROI, elle conteste toutefois formellement que les autorités académiques n'auraient pas assuré à la demanderesse un traitement de ses contestations conforme au principe de bonne administration. Elle affirme que la procédure suivie par l'Université du Luxembourg tant au niveau du recours gracieux, qu'au niveau du recours hiérarchique, serait parfaitement conforme au ROI ainsi qu'aux règles prévues par la procédure administrative non contentieuse. Ainsi, les copies de la demanderesse auraient fait l'objet d'une double correction, à savoir deux corrections distinctes par deux professeurs différents, tel que l'aurait souligné le doyen de la Faculté de Droit, d'Economie et de Finance dans son courrier de réponse du 5 juillet 2010 à la réclamation de la demanderesse et que celle-ci aurait eu accès à ses copies écrites annotées par les deux correcteurs. En date du 4 mars 2010, la demanderesse aurait été informée de la programmation de l'examen de rattrapage prévu pour le 17 juin 2010. Or, ce ne serait qu'au mois de mai 2011 qu’elle aurait émis des contestations relatives aux notes obtenues aux examens litigieux. En date du 5 juillet 2010, elle aurait été informée du caractère double de la correction et au mois de mai 2011, sans préjudice quant à une date plus exacte, le Professeur … aurait proposé à la demanderesse une entrevue pour lui fournir toutes les explications souhaitées sur lesdites corrections et pour la soutenir dans le cadre de la préparation de la session de rattrapage du 17 juin 2010, proposition qu’elle aurait déclinée sans aucune raison valable, de même qu’elle ne se serait pas présentée à l'examen de la session de rattrapage. La partie défenderesse donne encore à considérer que le recteur aurait, dans son courrier du 9 décembre 2010, apporté une réponse claire, fondée tant en fait qu'en droit. Elle conteste ensuite qu’il lui ait fallu sept mois pour vider la contestation de la demanderesse en soulignant qu’un véritable processus administratif et pédagogique aurait été mis en œuvre en vue d’expliquer à la demanderesse ses erreurs à l’examen. Ainsi, le recours de la demanderesse aurait eu un effet utile puisqu’entre sa première contestation et la décision finale, plusieurs propositions lui auraient été faites, et notamment celle de voir ses correcteurs, ce qu’elle aurait refusé sans raison valable. La partie défenderesse conclut que la correction des épreuves de la demanderesse aurait été régulière et réfute les reproches d’un dysfonctionnement au niveau des instances de l’Université et d’un détournement de pouvoir.

Il convient de relever que la demanderesse invoque en substance à titre principal une violation du principe du délai raisonnable de la procédure au niveau des instances universitaires.

A cet égard, elle invoque l'article VII.1.102 du ROI et plus précisément la disposition qui prévoit que : « L'étudiant a le droit : (…)  de contester des résultats d'évaluation des examens et prestations devant une instance mandatée à cet effet, conformément aux procédures de l'Université ; (…)  à ce qu'il ne soit pas porté atteinte à sa dignité et à son honneur ; (…) ».

Cette disposition confère à l’étudiant le droit de contester les résultats de l’examen devant l’instance universitaire mandatée à cette fin, conformément aux procédures prévues. Il échet encore de relever que ni la disposition précitée, ni les dispositions des articles VII.5.101 et suivants du ROI qui régissent les contestations et les modalités de recours n’enferment ces procédures dans un délai précis. Par ailleurs, aucune disposition du ROI ne prévoit que les contestations et réclamations aient un effet suspensif.

En l’espèce, il ressort des éléments du dossier que la demanderesse a passé l’examen des cours III et IV respectivement le 18 et le 21 janvier 2010, que le 4 mars 2010, elle a été informée de la date de l’examen de rattrapage prévu pour le 17 juin 2010, que le 17 mars 2010, elle a demandé au Professeur … communication de ses copies d’examen annotées en vue de l’introduction d’une contestation. Il ressort d’un courriel de la demanderesse du 17 mars 2010 qu’elle avait déjà auparavant pu consulter ses copies d’examen annotées. Le 18 mars 2010, le Professeur … lui répondit qu’elle pouvait obtenir communication des copies d’examen et lui proposa une entrevue afin de discuter des résultats de l’examen. Le 21 mars 2010, la demanderesse répondit que les annotations sur les copies d’examen dont elle avait reçu communication lui suffisaient pour introduire sa réclamation et elle demanda des précisions quant au délai dans lequel il fallait introduire sa réclamation. Le Professeur … lui répondit le 22 mars 2010 qu’à sa connaissance, il n’y aurait pas de délai. Le 5 mai 2010, la demanderesse introduisit une contestation des notes obtenues aux examens des cours III et IV auprès du doyen de la Faculté de Droit, d’Economie et de Finance. Le 17 juin 2010, eut lieu l’examen de rattrapage auquel la demanderesse ne se présenta pas, mais produisit un certificat médical pour justifier son absence. Le 5 juillet 2010, le doyen rejeta la contestation de la demanderesse. Le 26 août 2010, la demanderesse formula une réclamation auprès du recteur de l’Université qui la transmit pour avis à la commission des litiges le 31 août 2010. Le 12 novembre 2010, la commission des litiges émit un avis négatif sur la réclamation et le 25 novembre 2010, le recteur informa la demanderesse de la décision du conseil universitaire du 22 novembre 2010 portant rejet de sa réclamation. Le 9 décembre 2010, le recteur communiqua encore les motifs à la base de la décision de rejet du conseil universitaire.

Au vu de ces éléments, il convient de relever qu’il a fallu au doyen deux mois pour trancher la contestation introduite le 5 mai 2010 par la demanderesse et qu’il a fallu au conseil universitaire trois mois, à partir de l’introduction de la réclamation en date du 26 août 2010, soit jusqu’au 25 novembre 2010 respectivement le 9 décembre 2010, pour vider la réclamation de la demanderesse.

Force est dès lors au tribunal de constater que les autorités universitaires, dans le cadre du traitement des contestations de la demanderesse, n’ont pas en l’espèce méconnu le principe du délai raisonnable. En effet, s’il n’est pas contesté que l’assistante du doyen semble avoir promis à la demanderesse, par courriel non versé en cause, une réponse du doyen sur sa contestation avant la tenue de l’examen de rattrapage en date du 17 juin 2010, réponse qui n’est finalement intervenue qu’après ledit examen, soit le 5 juillet 2010, cet état de choses, à lui seul, n’est pas suffisant pour entacher la procédure d’irrégularité, étant donné que la contestation n’a pas d’effet suspensif. S’il est certes vrai que dans un souci d’effet utile, il aurait été préférable que le doyen tranche la contestation avant la tenue de l’examen de rattrapage, il n’en demeure pas moins que la demanderesse a refusé de faire usage de la possibilité offerte par l’article VII.5.102 du ROI afin de discuter des résultats d’examen avec le directeur des études, telle que cela lui fut proposé le 18 mars 2010 par le Professeur …. Par ailleurs, elle ne s’est pas présentée à l’examen de rattrapage, certes, il est vrai, pour des motifs de santé, mais l’organisation de la session de rattrapage aurait pu constituer l’occasion pour la demanderesse d’améliorer ses notes. Il s’ensuit que la demanderesse ne saurait se plaindre de la lenteur de la procédure alors qu’elle a refusé à deux reprises de profiter des possibilités offertes pour remédier à la correction des épreuves d’examen. Il convient encore de retenir que le conseil universitaire n’a pas mis un délai anormalement long à toiser la réclamation de la demanderesse, étant donné qu’elle a dû encore saisir la commission des litiges pour avis.

Le moyen tiré d’une violation du délai raisonnable de la procédure au niveau des instances universitaires laisse partant d’être fondé.

En ordre subsidiaire, la demanderesse soutient encore que les autorités universitaires auraient méconnu leur mission de contrôle en rejetant ses réclamations sans procéder à un examen de tous les reproches invoqués et que les décisions attaquées seraient entachées d’un détournement de pouvoir.

Force est cependant au tribunal de retenir que la demanderesse a pu introduire les recours contre les résultats de l’examen tels que prévus par les dispositions afférentes du ROI.

La seule circonstance que les autorités universitaires n’aient pas fait droit à ses réclamations ne permet pas de retenir que ses réclamations n’aient pas été toisées. Il s’ensuit encore que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

Le moyen afférent est partant à rejeter comme non fondé.

En dernier lieu, la demanderesse soutient que les délibérations du jury d’examen de lui attribuer les notes de 9 sur 20 et de 5 sur 20 seraient entachées d’une erreur d'appréciation manifeste. Elle fait valoir que le juge administratif même si faute de compétences techniques adéquates ne saurait se livrer à un contrôle des appréciations auxquelles se livrent les correcteurs légalement habilités pour ce faire, ce principe devrait trouver exception en cas d'erreur d'appréciation manifeste. Elle soutient que s'agissant d'études en droit, il sera d'autant plus aisé pour le tribunal administratif d'apprécier l'erreur manifeste d'appréciation des correcteurs. La demanderesse explique ensuite les raisons pour lesquelles elle estime que les correcteurs n’auraient pas correctement évalué ses épreuves d’examen. Sans ces erreurs manifestes des correcteurs, il ne ferait nul doute qu’elle aurait dû réussir son examen. Elle en conclut que ces irrégularités relatives à la correction des examens litigieux s'étendraient nécessairement à la décision du jury d'examen de refus de validation des cours III et IV du Master en droit européen LL.M. - filière contentieux européen qui s'en est suivie dans la mesure où cette dernière est directement conditionnée par ledit acte vicié à sa base. Il en serait de même pour les autres décisions visées par le présent recours.

La partie défenderesse conteste que l'Université du Luxembourg ait commis une erreur manifeste d'appréciation des faits. Elle estime par ailleurs que la demanderesse n’aurait pas assorti son moyen d’une précision suffisante et rappelle que le contrôle du juge serait limité en la matière dès lors que le jury d’examen serait souverain dans l'appréciation de la copie de l'étudiant.

C’est à juste titre que la partie défenderesse soutient qu’il n’appartient pas au tribunal siégeant comme juge de l’annulation de vérifier le caractère justifié ou non des notes attribuées aux candidats. L’appréciation portée sur les épreuves d’examen de la demanderesse étant souveraine, elle ne saurait être discutée devant le juge administratif, à moins que la demanderesse n’établisse une erreur manifeste d’appréciation ou que les appréciations soient fondées sur des considérations autres que la valeur des épreuves.

En l’espèce, la demanderesse se borne à alléguer que les notes obtenues aux épreuves d’examen des cours III et IV ne seraient pas justifiées, alors que les correcteurs auraient mal apprécié la qualité de ses copies d’examen. Or, force est de constater que les explications afférentes de la demanderesse, non appuyées par un quelconque élément de preuve concret, ne sont pas suffisantes pour établir une erreur manifeste d’appréciation dans le chef des correcteurs, ou pour retenir que l’appréciation des correcteurs aurait été fondée sur d’autres considérations que la seule valeur des prestations de la demanderesse. Dès lors, le moyen tiré de ce que les épreuves d’examen de la demanderesse auraient été évaluées de manière irrégulière et arbitraire, tout comme le moyen du détournement de pouvoir, laissent d’être fondés.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours n’est pas fondé et que la demanderesse doit en être déboutée.

Quant à la demande formulée par la demanderesse tendant à ce qu’il soit ordonné à l’Université du Luxembourg de communiquer le dossier administratif dans son intégralité, et en particulier et parmi d'autres, la décision du jury d'examen de refus de validation des cours III et IV du Master en droit européen LL.M. - filière contentieux européen, Semestre 3, dans le cadre de la session d'examens 2009-2010, la délibération du conseil universitaire et l'avis de la commission des litiges, dans le cadre de sa réclamation du 26 août 2010, cette demande est devenue sans objet au vu du dépôt des pièces supplémentaires par la partie défenderesse intervenu en date du 2 avril 2012.

Au vu de l’issue du litige, la demande de Madame … en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 4.000 euros sur la base de l’article 33 de la loi précitée du 21 juin 1999 est à rejeter comme n’étant pas fondée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

déclare le recours en annulation irrecevable en tant qu’il est dirigé contre une décision du recteur du 9 décembre 2010 ;

le déclare recevable pour le surplus ;

au fond, le dit non justifié, partant en déboute ;

dit la demande tendant à ce qu’il soit enjoint à la partie défenderesse de produire le dossier administratif dans son intégralité comme étant devenue sans objet ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée par la demanderesse ;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par :

Martine Gillardin, vice-président, Annick Braun, premier juge, Andrée Gindt, juge, et lu à l’audience publique du 18 avril 2012 par le vice-président, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Martine Gillardin Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 18.04.2012 Le Greffier du Tribunal administratif 16


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 28095
Date de la décision : 18/04/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2012-04-18;28095 ?

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